Discours 2005-2013 9410


DISCOURS

AUX ÉVÊQUES DE LA RÉGION "NORTE 2" DU BRÉSIL

LORS DE LEUR VISITE « AD LIMINA APOSTOLORUM » Jeudi 15 avril 2010



Bien-aimés frères dans l'épiscopat,

Votre visite "ad limina" a lieu dans le climat de louange et de joie pascale qui enveloppe l'Eglise tout entière, parée de la lumière resplendissante du Christ ressuscité. En lui, l'humanité a surmonté la mort et a complété la dernière étape de sa croissance en entrant dans les Cieux (cf. Ep Ep 2,6). A présent, Jésus peut librement revenir sur ses pas et rencontrer, comme, quand et où il veut, ses frères. Je suis heureux de vous accueillir en son nom, dévoués pasteurs de l'Eglise de Dieu en pèlerinage dans la région "Norte 2" du Brésil, avec le salut prononcé par le Seigneur, lorsqu'il se présenta ressuscité aux Apôtres et compagnons: "Paix à vous" (Lc 24,36).

1090 Votre présence ici possède une saveur familière, car elle semble reproposer l'épisode final de l'histoire des disciples d'Emmaüs (cf. Lc 24,33-35): vous êtes venus pour raconter ce qui a eu lieu le long du chemin accompli avec Jésus, de vos diocèses dispersés dans l'immensité de la région de l'Amazonie, avec leurs paroisses et les autres réalités qui les composent, avec les mouvements, les communautés nouvelles et les communautés ecclésiales de base, en communion avec leur évêque (cf. Document d'Aparecida, n. 179). Rien ne peut plus me réjouir que de vous savoir dans le Christ et avec le Christ, comme en témoignent les compte-rendus diocésains que vous avez envoyés et pour lesquels je vous remercie. Je suis reconnaissant de façon particulière à Mgr Jesus Maria Cizaurre pour les paroles qu'il vient de m'adresser en votre nom et au nom du peuple de Dieu qui vous est confié, en soulignant sa fidélité et son adhésion à Pierre. A votre retour, assurez-le de ma gratitude pour ces sentiments et de ma bénédiction, en ajoutant: "C'est bien vrai! Le Seigneur est ressuscité et il est apparu à Simon!" (Lc 24,34).

Lors de cette apparition, les paroles - si elles ont été prononcées - se sont évanouies dans la surprise de voir le Maître ressuscité, dont la présence dit tout: j'étais mort, mais à présent, je suis vivant et vous vivrez à travers moi (cf. Ap Ap 1,18). Et, étant mort et ressuscité, le Christ peut devenir "pain vivant" (Jn 6,51) pour l'humanité. C'est pour cela que je sens que le centre et la source permanente du ministère pétrinien résident dans l'Eucharistie, coeur de la vie chrétienne, source et sommet de la mission évangélisatrice de l'Eglise. Vous pouvez ainsi comprendre la préoccupation du Successeur de Pierre pour tout ce qui peut obscurcir le point le plus original de la foi catholique: aujourd'hui, Jésus Christ continue d'être vivant et réellement présent dans l'hostie et dans la coupe consacrées.

La faible attention qui est parfois prêtée au culte du Très Saint Sacrement est l'indice et la cause de l'obscurcissement de la signification chrétienne du mystère, comme cela est le cas lorsqu'au cours de la Messe, ce n'est plus Jésus qui apparaît prédominant et agissant, mais une communauté occupée à de nombreuses choses, au lieu d'être recueillie et de se laisser attirer vers l'Unique nécessaire: son Seigneur. Or, l'attitude principale et fondamentale du fidèle chrétien qui participe à la célébration liturgique n'est pas faire, mais écouter, s'ouvrir, recevoir... Il est évident que, dans ce cas, recevoir ne signifie pas demeurer passifs ou désintéressés par ce qui se passe, mais coopérer - car l'on est de nouveau capables de le faire par la grâce de Dieu - selon la "nature authentique de la véritable Eglise. Car il appartient en propre à celle-ci d'être à la fois humaine et divine; visible et riche de réalités invisibles, fervente dans l'action et occupée à la contemplation, présente dans le monde et pourtant étrangère. Mais de telle sorte qu'en elle, ce qui est humain est ordonné et soumis au divin; ce qui est visible à l'invisible; ce qui relève de l'action, à la contemplation; et ce qui est présent, à la cité future que nous recherchons" (Sacrosanctum Concilium SC 2). Si, dans la liturgie, ne ressortait pas la figure du Christ, qui est son principe et qui est réellement présent pour la rendre concrète, nous n'aurions plus la liturgie chrétienne, entièrement dépendante du Seigneur et soutenue par sa présence créatrice.

Combien sont éloignés de tout cela ceux qui, au nom de l'inculturation, tombent dans le syncrétisme, en introduisant dans la célébration de la Messe des rites empruntés à d'autres religions ou des particularismes culturels (cf. Redemptionis Sacramentum, n. 79)! Le mystère eucharistique est un "don trop grand - écrivait mon prédécesseur le Pape Jean-Paul II - pour pouvoir supporter des ambiguïtés et des réductions", en particulier lorsque "privé de sa valeur sacrificielle, il est vécu comme s'il n'allait pas au-delà du sens et de la valeur d'une rencontre conviviale et fraternelle" (Ecclesia de Eucharistia EE 10). A la base des diverses motivations adoptées, il existe une mentalité incapable d'accepter la possibilité d'une réelle intervention divine dans ce monde au secours de l'homme. Celui-ci, toutefois, "se découvre incapable par lui-même de vaincre effectivement les assauts du mal; et ainsi, chacun se sent comme chargé de chaînes" (Constitution Gaudium et spes GS 13). La confession d'une intervention rédemptrice de Dieu pour changer cette situation d'aliénation et de péché est considérée par ceux qui partagent la vision déiste comme intégraliste, et le même jugement est porté à propos d'un signe sacramentel qui rend présent le sacrifice rédempteur. A leurs yeux, il serait plus acceptable de célébrer un signe qui corresponde à un vague sentiment de communauté.

Toutefois, le culte ne peut naître de notre imagination; ce serait un cri dans l'obscurité ou une simple affirmation de soi. La véritable liturgie présuppose que Dieu réponde et nous montre comment nous pouvons l'adorer. "L'Eglise peut célébrer et adorer le mystère du Christ présent dans l'Eucharistie justement parce que le Christ lui-même s'est donné en premier à elle dans le sacrifice de la croix" (Sacramentum caritatis, n. 14). L'Eglise vit de cette présence et a comme raison d'être et d'exister celle de diffuser cette présence dans le monde entier.

"Reste avec nous, Seigneur!" (cf. Lc 24,29): c'est la prière qu'élèvent les fils et les filles du Brésil en vue du xvi Congrès eucharistique national, qui se tiendra dans un mois à Brasilia et qui, de cette façon, verra le jubilé d'or de sa fondation enrichi par l'"or" de l'éternité présente dans le temps: Jésus Eucharistie. Qu'il soit véritablement le coeur du Brésil, d'où provient la force pour tous les hommes et les femmes brésiliennes de se reconnaître et de s'aider comme des frères, comme des membres du Christ pris dans son ensemble. Celui qui veut vivre a un lieu où vivre, a de quoi vivre. Qu'il s'approche, qu'il croie, qu'il entre pour faire partie du Corps du Christ et il sera vivifié! C'est ce que je souhaite, aujourd'hui et ici, à cette portion pleine d'espérance de ce Corps qu'est la Région Norte 2, en donnant à chacun de vous, à ceux qui collaborent avec vous, et à tous les fidèles chrétiens, la Bénédiction apostolique.


DISCOURS

AUX MEMBRES DE LA "PAPAL FOUNDATION" Salle Clémentine Vendredi 16 avril 2010

Chers amis,

Je suis heureux de saluer les membres de la "Papal Foundation", à l'occasion de votre pèlerinage annuel à Rome. Notre rencontre est empreinte de la joie de ce temps de Pâques, alors que l'Eglise célèbre la victoire glorieuse du Seigneur sur la mort et son don de la vie nouvelle dans l'Esprit Saint.

Il y a un an, j'ai eu la grâce de visiter la Terre Sainte et de prier devant le sépulcre vide du Seigneur. Là, faisant écho au témoignage de l'apôtre Pierre, j'ai proclamé que le Christ, en ressuscitant à la vie nouvelle, nous a enseigné que "le mal n'a jamais le dernier mot, que l'amour est plus fort que la mort, que notre avenir, l'avenir de toute l'humanité, est entre les mains d'un Dieu fidèle et bon" (Discours à l'église du Saint-Sépulcre, 15 mai 2009). En tout temps et en tout lieu, l'Eglise est appelée à proclamer ce message d'espérance et à confirmer sa vérité à travers son témoignage concret de sainteté et de charité. La "Papal Foundation" a poursuivi cette mission d'une façon particulière, en soutenant une vaste gamme d'oeuvres caritatives chères au coeur du Successeur de Pierre. Je vous remercie pour vos efforts généreux en vue d'apporter une assistance à nos frères et soeurs dans les pays en voie de développement, de garantir l'éducation des futurs responsables de l'Eglise, et de promouvoir les efforts missionnaires de nombreux diocèses et congrégations religieuses dans le monde.

En ces jours, je vous demande de prier pour les besoins de l'Eglise universelle et d'implorer de l'Esprit une effusion renouvelée de dons spirituels de sainteté, d'unité et de zèle missionnaire sur tout le peuple de Dieu. Avec une profonde affection, je vous confie, ainsi que vos familles, à l'intercession pleine d'amour de Marie, Mère de l'Eglise, et je vous donne cordialement ma Bénédiction apostolique en signe de joie et de paix en Jésus, notre Seigneur Ressuscité.




VOYAGE APOSTOLIQUE À MALTE À L'OCCASION DU 1950e ANNIVERSAIRE DU NAUFRAGE DE SAINT PAUL (17-18 AVRIL 2010)


RENCONTRE AVEC LES JOURNALISTES PENDANT LE VOL VERS MALTE Samedi 17 avril 2010

17410
Père Federico Lombardi: Chers amis, Sa Sainteté est à nouveau avec nous pour le premier des cinq voyages en programme cette année. Nous sommes très heureux de l'avoir avec nous au début de ce voyage qui nous permet de lui présenter nos voeux pour ses deux anniversaires, celui d'hier, l'anniversaire de sa naissance, et celui de lundi prochain. Le Saint-Père a reçu les questions que certains d'entre vous lui ont fait parvenir et qui interprètent un peu les attentes que nous avons tous au début de ce voyage. Il partagera donc quelques réflexions et considérations sur la base de nos attentes. Nous ne suivrons pas le schéma question-réponse précédent. Nous laissons le Saint-Père prononcer son court discours. Merci Sainteté et bon voyage.

Benoît XVI: Chers amis, bonsoir! Souhaitons-nous un bon voyage sans ce nuage obscur qui recouvre une partie de l'Europe.

Alors, pourquoi ce voyage à Malte? Les raisons sont multiples.

La première est saint Paul. L'année paulinienne s'est terminée pour l'Eglise universelle, mais Malte fête les 1950 ans du naufrage et cela est pour moi l'occasion de mettre encore une fois en lumière la grande figure de l'apôtre des nations, et son message si important précisément pour aujourd'hui encore. Je pense que l'on peut résumer l'essentiel de son voyage par les paroles qu'il a lui-même reprises à la fin de la lettre aux Galates: la foi opérant par la charité.

Ce sont aussi des choses importantes pour aujourd'hui: la foi, la relation avec Dieu qui se transforme ensuite en charité. Mais je pense aussi que le motif du naufrage nous interpelle. Par ce naufrage, Malte a eu la chance d'avoir la foi; c'est pourquoi nous pouvons penser, nous aussi, que les naufrages de la vie peuvent être dans les plans de Dieu pour nous, et peuvent aussi être utiles à de nouveaux commencements dans notre vie.

La deuxième raison: j'ai plaisir à découvrir une Eglise vivante comme celle de Malte, qui aujourd'hui aussi porte des fruits de vocations, est pleine de foi et répond aux défis de notre époque. Je sais que Malte aime le Christ et qu'elle aime l'Eglise qui est son Corps. Elle sait que, même si ce Corps est blessé par nos péchés, le Seigneur aime toutefois son Eglise et que son Evangile est la force véritable qui purifie et guérit.

Troisième point: Malte est le lieu où les réfugiés arrivent d'Afrique et frappent à la porte de l'Europe. C'est un grand problème de notre époque qui ne peut malheureusement pas être résolu par l'île de Malte. Nous devons tous répondre à ce défi, travailler pour que chacun puisse, sur sa terre, vivre dignement. D'autre part, nous devons faire notre possible pour que ces réfugiés trouvent tous, ici où ils arrivent, un espace de vie convenable. Une réponse à un grand défi de notre temps: Malte nous rappelle ces problèmes et nous rappelle aussi que la foi est la force qui donne la charité, et donc aussi l'imagination pour bien répondre à ces défis. Merci.

Père Federico Lombardi: Merci, Sainteté, et bon voyage, nous vous accompagnerons également par notre travail et nos informations.



CÉRÉMONIE DE BIENVENUE Aéroport international de Malte - Luqa Samedi 17 avril 2010

17420
Monsieur le Président,
Chers frères Évêques
Messieurs-Dames représentants les Autorités,
Mesdames et Messieurs,
Jien kuntent hafna li ninsab fostkom! [Je suis heureux d’être ici parmi vous.]

C’est pour moi un motif de joie que d’être ici, à Malte, avec vous, aujourd’hui. Je viens parmi vous en pèlerin pour adorer le Seigneur et le louer pour les merveilles qu’il a réalisées ici. Je viens, en outre, comme le Successeur de Pierre pour vous confirmer dans la foi (cf.
Lc 22,32) et m’unir à vous dans la prière au Dieu unique, vivant et vrai, en compagnie de tous les saints, aux nombres desquels figure le grand Apôtre de Malte, saint Paul. Bien que ma visite dans votre pays soit brève, je prie pour qu’elle porte beaucoup de fruits.

Je vous suis reconnaissant, Monsieur le Président, des paroles aimables avec lesquelles vous m’avez accueilli, en votre nom et au nom du peuple maltais. Je vous remercie pour votre invitation et pour le travail important que vous et votre gouvernement avez mis en oeuvre pour préparer ma visite. Je remercie le Premier Ministre, les autorités civiles et militaires, les membres du Corps diplomatique et toutes les personnes qui sont présentes, d’honorer cet événement par votre présence et pour votre chaleureux accueil.

Je remercie de façon particulière Monseigneur l’Archevêque Paul Cremona, Monseigneur Mario Grech (…) et Monseigneur Annetto Depasquale, évêque auxiliaire, ainsi que les autres évêques présents. En vous saluant, je veux exprimer mon affection pour les prêtres, les diacres, les religieux et les religieuses et pour tous les fidèles laïcs confiés à vos soins pastoraux.

L’occasion de ma visite dans ces îles est le 1950° anniversaire du naufrage de saint Paul sur les plages de cette île de Malte. Saint Luc décrit cet événement dans les Actes des Apôtres, et c’est dans son récit que nous avons choisi le thème de cette visite: «Mais nous devons échouer sur une île» (Ac 27,26). Certains pourraient considérer l’arrivée de saint Paul à Malte, à travers un événement humainement imprévu, comme un simple accident de l’histoire. Les yeux de la foi, toutefois, nous permette de reconnaître là l’oeuvre de la Divine Providence.

Dans l’histoire européenne et méditerranéenne, Malte a souvent été jusqu’à aujourd’hui le lieu de grands événements et le carrefour de nombreux échanges culturels. Ces îles ont joué un rôle clé dans le développement politique, religieux et culturel de l’Europe, du Proche-Orient et de l’Afrique du Nord. Selon les desseins mystérieux de Dieu, l’Évangile fut apporté sur ces côtes, par saint Paul et les premiers disciples du Christ. Leur labeur missionnaire a porté de nombreux fruits tout au long des siècles, contribuant de multiples manières à modeler la riche et noble culture de Malte.

En raison de leur position géographique, ces îles ont été d’une grande importance stratégique en plus d’une occasion, même récemment : la présence de la Georg Cross sur le drapeau national témoigne fièrement du grand courage de votre peuple durant les jours sombres de la dernière guerre mondiale. Les fortifications qui caractérisent si nettement l’architecture de l’île évoquent également des combats plus anciens, lorsque Malte contribua si fortement à la défense de la chrétienté, aussi bien sur la terre que sur la mer. Vous continuez à jouer un rôle précieux dans les débats d’aujourd’hui sur l’identité, la culture et la politique européennes. En même temps, je suis heureux de noter l’engagement du Gouvernement dans des projets humanitaires à l’étranger, spécialement en Afrique. Il est à espérer vraiment que cela serve à promouvoir le bien-être de ceux qui sont moins favorisés que vous, comme une expression de l’authentique charité chrétienne.

Malte a en effet beaucoup à offrir sur des questions aussi divers que la tolérance, les échanges réciproques, l’immigration et d’autres problèmes cruciaux pour l’avenir de ce continent. Votre nation doit continuer à défendre l’indissolubilité du mariage, en tant qu’institution naturelle autant que sacramentelle, ainsi que la vraie nature de la famille, comme elle le fait déjà en défendant le caractère sacré de la vie humaine, de la conception à la mort naturelle, et le juste respect dû à la liberté religieuse, de façon qu’elle contribue à un authentique développement intégral aussi bien des individus que de la société.

Malte possède aussi des liens étroits avec le Proche Orient, non seulement en termes culturels et religieux, mais aussi linguistiques. Permettez-moi de vous encourager à user plus largement de cet ensemble d’aptitudes et d’atouts de façon à pouvoir servir de pont dans la compréhension entre les peuples, les cultures et les religions présentes autour de la Méditerranée. Beaucoup doit encore être fait pour édifier des relations de confiance authentique et de dialogue fructueux, et Malte est bien placée pour tendre la main de l’amitié à ses voisins du Nord et du Sud, de l’Est et de l’Ouest.

Le peuple maltais, éclairé par presque 2000 ans d’enseignement de l’Évangile et continuellement fortifié par ses racines chrétiennes, est fier, à juste titre, du rôle de premier plan que la foi catholique a eu dans le développement de son pays. La beauté de votre foi s’exprime ici de manières variées et complémentaires, dont la moindre n’est pas les vies saintes qui ont conduit des maltais à se donner eux-mêmes pour le bien des autres. Parmi eux, nous devons inclure Don Gorg Preca, que j’ai eu la joie de canoniser il y a tout juste 3 ans (LE 3 juin 2007). Je vous invite tous à invoquer son intercession pour que ma première visite pastorale chez vous porte de nombreux fruits spirituels.

Il me tarde de prier avec vous durant le temps que je passerai à Malte et je voudrais, comme un père et un frère, vous assurer de mon affection comme aussi du désir de vivre ce temps dans la foi et l’amitié. Avec ces sentiments, je vous confie tous à la protection de Notre Dame de Ta’Pinu et à votre père dans la foi, le grand Apôtre Paul.

Il Mulej ibierek lill-poplu kollu ta’Malta u ta’ Ghawdex! [Que Dieu bénisse tout le peuple de Malte et de Gozo]



VISITE À LA GROTTE DE SAINT PAUL Rabat Samedi 17 avril 2010

17430


Chers Frères et Soeurs,

Mon pèlerinage à Malte a commencé par un moment de prière silencieuse dans la Grotte de Saint Paul qui, le premier, a porté la foi à ces îles. J’ai mis mes pas dans ceux des innombrables pèlerins des siècles précédents qui ont prié dans ce lieu saint, confiant leurs personnes, leurs familles et la prospérité de cette nation à l’intercession de l’Apôtre des Gentils. Je me réjouis d’être enfin parmi vous et je vous salue tous avec grande affection dans le Seigneur!

Le naufrage de Paul et son séjour de trois mois à Malte ont laissé un signe indélébile dans l’histoire de votre pays. Ses paroles à (l’adresse de) ses compagnons, avant son arrivée à Malte, nous sont rapportées par les Actes des Apôtres et ont constitué le thème retenu pour votre préparation à ma visite. Ces paroles - «Jehtieg izda li naslu fi gzira»[1] -, dans leur contexte originel, sont une invitation au courage devant l’inconnu et à une confiance indéfectible dans la mystérieuse Providence de Dieu. Les naufragés ont été, en effet, chaleureusement accueillis par le peuple maltais, selon l’exemple donné par saint Publius. Dans le plan de Dieu, saint Paul est ainsi devenu votre père dans la foi chrétienne. Grâce à sa présence parmi vous, l’Évangile de Jésus Christ s’est profondément enraciné et a produit des fruits non seulement dans la vie des personnes, des familles et des communautés, mais aussi dans la formation de l’identité nationale de Malte et dans sa culture vivante et singulière.

Le labeur apostolique de Paul a aussi porté un fruit abondant à travers les générations de prédicateurs qui ont suivi ses pas, et particulièrement dans le grand nombre de prêtres et de religieux qui ont imité son zèle missionnaire en quittant Malte pour porter l’Évangile vers des rives lointaines. Je suis heureux d’avoir eu l’opportunité de rencontrer aujourd’hui beaucoup d’entre eux dans cette église Saint-Paul, et de les encourager dans leur vocation pleine d’audace et souvent héroïque. Chers missionnaires, je vous remercie tous, au nom de toute l’Église, pour le témoignage que vous rendez au Seigneur Ressuscité et pour vos vies consacrées au service des autres. Votre présence et votre activité dans tant de pays du monde fait honneur à votre pays et témoignent d’un élan évangélique profondément ancrée dans l’Église de Malte. Demandons au Seigneur de susciter un plus grand nombre d’hommes et de femmes pour poursuivre la noble mission d’annoncer l’Évangile et d’oeuvrer pour le progrès du Règne du Christ sur toute terre et chez tous les peuples!

L’arrivée de saint Paul à Malte n’était pas programmée. Comme nous le savons, il était en route pour Rome quand une violente tempête s’est levée et que son navire s’est échoué sur cette île. Les marins peuvent bien tracer la route du voyage, mais Dieu, dans sa Sagesse et dans sa Providence, construit son propre itinéraire. Paul, qui avait rencontré d’une manière retentissante le Seigneur Ressuscité sur la route de Damas, le savait très bien. Le cours de sa vie changea brusquement; désormais, pour lui, vivre c’était le Christ (cf.
Ph 1,21); toute sa pensée et son action étaient orientées vers la proclamation du mystère de la Croix et de son message de réconciliation offert par l’amour de Dieu.

Cette même parole, la parole de l’Évangile, a encore aujourd’hui la force de pénétrer dans nos vies et d’en changer le cours. Aujourd’hui le même Évangile prêché par Paul continue d’interpeller la population de vos îles à la conversion, à une vie nouvelle et à un avenir d’espérance. Me trouvant parmi vous comme le successeur de l’Apôtre Pierre, je vous invite à écouter de nouveau la Parole de Dieu, comme l’ont fait vos aïeux, et à la laisser changer vos manières de penser et la manière de conduire vos vies.

Depuis ce lieu saint d’où la première annonce apostolique s’est propagée dans toutes ces îles, je lance un appel à chacun de vous à faire sien l’exaltant défi de la nouvelle évangélisation. Vivez toujours plus pleinement votre foi avec les membres de vos familles, avec vos amis, dans vos quartiers, dans votre lieu de travail et dans l’ensemble du tissu social maltais. Je vous invite particulièrement vous les parents, les enseignants et les catéchistes à parler aux autres de votre lien vivant avec Jésus Ressuscité, spécialement aux jeunes qui sont l’avenir de Malte. «La foi s’affermit lorsqu’on la donne [aux autres]» (cf. Redemptoris Missio RMi 2). Croyez que le temps que vous consacrez à la prière constitue vraiment une rencontre avec Dieu qui, dans sa très grande puissance, touche le coeur de l’homme. Ainsi, vous introduirez les jeunes à la beauté et à la richesse de la foi catholique, et leur donnerez une solide catéchèse en les invitant à une participation toujours plus active à la vie sacramentelle de l’Église.

Le monde a besoin de ce témoignage! Face aux si nombreuses menaces qui pèsent sur le caractère sacré de la vie humaine et sur la dignité du mariage et de la famille, nos contemporains n’ont-ils pas besoin qu’on leur rappelle constamment la grandeur de notre dignité de fils de Dieu et de la noble vocation que nous avons reçue dans le Christ? Les sociétés n’ont-elles pas besoin de se réapproprier et de défendre ces vérités morales fondamentales qui restent le fondement d’une liberté authentique et d’un progrès véritable?

À l’instant, alors que je me tenais devant la Grotte, j’ai médité sur le grand don spirituel (cf. Rm 1,11) que Paul a donné à Malte, et j’ai prié pour que vous puissiez garder intact l’héritage que le grand Apôtre vous a légué. Que le Seigneur vous confirme ainsi que vos familles dans la foi qui agit par la charité (cf. Ga 5,6), et fasse de vous des témoins joyeux de l’espérance qui ne déçoit jamais (cf. Rm 5,5). Le Christ est ressuscité! Il est vraiment ressuscité! Alléluia.


[1] « Mais nous devons échouer sur une île » (Ac 27,26)


RENCONTRE AVEC LES JEUNES Quai du Grand Port - La Valette Dimanche 18 avril 2010

18410


Chers jeunes de Malte et de Gozo, je suis très heureux d’être avec vous,

Quelle joie c’est pour moi d’être avec vous aujourd’hui sur votre terre natale. En ce jubilé, remercions Dieu d’avoir envoyé l’Apôtre Paul vers ces îles qui ont été parmi les premières à recevoir la Bonne Nouvelle de notre Seigneur Jésus Christ.

Je salue cordialement l’Archevêque Cremona et l’Évêque Grech que je remercie pour ses aimables paroles, et tous les Évêques, prêtres et religieux et religieuses qui sont ici. Je vous salue particulièrement vous, jeunes de Malte et de Gozo, et je vous remercie d’avoir évoqué pour moi les sujets qui vous touchent le plus profondément. J’apprécie votre désir de chercher et de trouver la vérité, et de connaître ce que vous devez faire pour atteindre la plénitude de la vie.

Saint Paul, alors qu’il était jeune, a eu une expérience qui l’a changé pour toujours. Comme vous savez, pendant un temps il fut un ennemi de l’Église et il a tout fait pour la détruire. Alors qu’il était en route vers Damas, avec l’intention de traquer tout chrétien qu’il y aurait trouvé, le Seigneur lui apparut dans une vision. Une lumière aveuglante l’enveloppa et il entendit une voix lui dire : « Pourquoi me persécutes-tu ?... Je suis Jésus, celui que tu persécutes » (
Ac 9,4-5). Paul fut complètement bouleversé par cette rencontre avec le Seigneur et toute sa vie en fut transformée. Il devint un disciple jusqu’à devenir un grand apôtre et missionnaire. Ici à Malte, vous avez un motif particulier de rendre grâce pour les oeuvres missionnaires de Paul, qui répandit l’Évangile en Méditerranée.

Chaque rencontre personnelle avec Jésus est une expérience irrésistible d’amour. D’abord, comme Paul lui-même l’admet, il avait mené « une persécution effrénée contre l’Église de Dieu et cherché à la détruire » (cf. Ga 1,13). Mais la haine et la rage exprimées dans ces paroles furent complètement balayées par la puissance de l’amour du Christ. Jusqu’à la fin de sa vie, Paul a eu l’ardent désir de porter l’annonce de cet amour jusqu’aux confins de la terre.

Peut-être l’un de vous me dira-t-il que saint Paul a souvent été sévère dans ses écrits. Comment puis-je affirmer qu’il a répandu un message d’amour ? Ma réponse est celle-ci. Dieu aime chacun de nous avec une profondeur et une intensité que nous pouvons difficilement imaginer. Il nous connaît intimement, il connaît toutes nos talents et tous nos défauts. Par conséquent, il nous aime tellement, qu’il désire nous purifier de nos imperfections et renforcer nos vertus si bien que nous puissions avoir la vie en abondance. Quand il nous fait reproche parce que quelque chose dans nos vies lui déplaît, il ne nous rejette pas, mais il nous demande de changer et de devenir plus parfaits. C’est ce qu’il a demandé à saint Paul sur le chemin de Damas. Dieu ne rejette personne. Et l’Église ne rejette personne. Toutefois, dans son grand amour, Dieu provoque chacun de nous à changer et à devenir plus parfait.

Saint Jean nous dit que cet amour parfait chasse la crainte (cf. 1Jn 4,18). Et c’est pourquoi je vous dis à tous : « N’ayez pas peur ! ». Que de fois nous entendons ces paroles de l’Écriture ! Elles ont été adressées à Marie par l’ange à l’Annonciation, par Jésus à Pierre, quand il l’a appelé à être son disciple, et par l’ange à Paul la veille de son naufrage. À tous ceux d’entre vous qui désirent suivre le Christ, en tant que couples mariés, parents, prêtres, religieux, religieuses et laïcs qui portez le message de l’Évangile au monde, je dis : n’ayez pas peur ! Certainement rencontrerez-vous une opposition au message de l’Évangile. La culture d’aujourd’hui, comme toute culture, encourage des idées et des valeurs qui sont parfois incompatibles avec celles vécues et prêchées par notre Seigneur Jésus Christ. Souvent elles sont présentées avec un grand pouvoir de persuasion, renforcé par les médias et par la pression sociale de groupes hostiles à la foi chrétienne. Il est facile, quand on est jeunes et impressionnables, d’être influencés par les personnes du même âge pour accepter des idées et des valeurs que nous savons ne pas être ce que le Seigneur veut vraiment de nous. Voici pourquoi je vous dis : n’ayez pas peur, mais réjouissez-vous de son amour pour vous ; faites-lui confiance, répondez à son invitation à être ses disciples, trouvez un aliment et un remède spirituel dans les sacrements de l’Église.

Ici à Malte, vous vivez dans une société qui est imprégnée par la foi et par les valeurs chrétiennes. Vous devriez être fiers que votre pays, seul parmi les états de l’Union Européenne, à la fois défende l’enfant qui n’est pas encore né et encourage la stabilité de la vie de famille en disant non à l’avortement et au divorce. Je vous exhorte à maintenir ce courageux témoignage rendu à la sainteté de la vie et à la place centrale du mariage et de la vie familiale pour une société saine. À Malte et à Gozo, les familles savent comment estimer et prendre soin de leurs membres âgés et malades, et elles accueillent les enfants comme des dons de Dieu. D’autres nations peuvent apprendre de votre exemple chrétien. Dans le contexte de la société européenne, les valeurs évangéliques encore une fois deviennent une contre-culture, tout comme elles l’étaient au temps de saint Paul.

En cette Année sacerdotale, je vous demande d’être ouverts à la possibilité que le Seigneur puisse appeler certains de vous à se donner totalement au service de son peuple dans le sacerdoce ou dans la vie consacrée. Votre pays a donné beaucoup d’excellents prêtres et religieux à l’Église. Inspirez-vous de leur exemple et reconnaissez la joie profonde qui vient du fait de consacrer sa vie à l’annonce du message de l’amour de Dieu pour tous, sans exception.

J’ai déjà parlé de la nécessité d’avoir soin des plus jeunes, des personnes âgées et des malades. Mais le chrétien est appelé à porter le message de salut de l’Évangile à tous. Dieu aime chaque personne en ce monde, en effet il aime toute personne quelle que soit où elle ait vécu. Dans la mort et la résurrection de Jésus, rendues présentes chaque fois que nous célébrons la Messe, il offre la vie en abondance à toutes ces personnes. Comme chrétiens nous sommes appelés à manifester l’amour de Dieu qui s’étend à tous. C’est pourquoi nous devons secourir le pauvre, le faible, le marginal ; nous devons avoir un souci particulier de ceux qui sont en difficulté, qui souffrent de dépression ou d’inquiétude ; nous devons avoir soin des handicapés et faire tout ce que nous pouvons pour promouvoir leur dignité et leur qualité de vie ; nous devons prêter attention aux besoins des immigrés et de ceux qui cherchent asile sur nos terres ; nous devons tendre la main avec amitié aux croyants et aux non-croyants. C’est cela la noble vocation d’amour et de service que nous avons tous reçue. Laissez Dieu vous inspirer de Lui consacrer vos vies en suivant le Christ. N’ayez pas peur d’être des amis intimes du Christ !

Chers jeunes, au moment de vous quitter, je désire que vous sachiez combien je vous suis proche et que je me souviens de vous, de vos familles et de vos amis dans mes prières. Transmettez mes salutations à tous les jeunes de Malte et de Gozo.



Discours 2005-2013 9410