Discours 2005-2013 26919

CÉRÉMONIE DE BIENVENUE Aéroport international Stará Ruzyne - Prague Samedi 26 septembre 2009

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Monsieur le Président,
Messieurs les Cardinaux,
Messieurs les Évêques,
Excellences, Mesdames et Messieurs,

C’est avec beaucoup de joie que je suis avec vous aujourd’hui en République Tchèque, et je tiens à exprimer à tous ma profonde gratitude pour votre chaleureux accueil. Je remercie Monsieur le Président Václav Klaus de m’avoir invité à me rendre dans votre pays ainsi que de ses mots cordiaux. Je suis honoré de la présence des Représentants des Autorités civiles et politiques et je les salue ainsi que tout le peuple de la République Tchèque. Étant ici, en premier lieu, pour rendre visite aux communautés catholiques de la Bohême et de la Moravie, je salue aussi bien fraternellement le Cardinal Vlk, Archevêque de Prague, Mgr Graubner, Archevêque d’Olomouc et Président de la Conférence Épiscopale Tchèque, et tous les Évêques et fidèles ici présents. J’ai été particulièrement touché par le geste du jeune couple qui m’a apporté des dons typiques de la culture de votre nation et m’ont offert un peu de votre terre natale. Cela me rappelle que la culture tchèque est profondément pénétrée par le christianisme, car, comme vous le savez, les éléments du pain et du sel revêtent un sens particulier dans la symbolique du Nouveau Testament.

Même si toute la culture européenne a été profondément modelée par son héritage chrétien, ce fait est particulièrement vrai en cette terre tchèque, car c’est grâce au travail missionnaire des saints Cyrille et Méthode, au neuvième siècle, que l’ancienne langue slavonne a été transcrite pour la première fois. Apôtres des peuples slaves et fondateurs de leur culture, ils sont vénérés à juste titre comme Patrons de l’Europe. Il est aussi utile de rappeler que ces deux grands saints, de tradition byzantine, rencontrèrent ici des missionnaires provenant de l’Occident latin. Tout au long de son histoire, ce territoire situé au coeur du continent européen, au carrefour du nord et du sud, de l’est et de l’ouest, a été un point de rencontre pour différents peuples, traditions et cultures. Sans aucun doute, cela a provoqué quelquefois des frictions, toutefois, cette rencontre s’est démontrée fructueuse à long terme. D’où le rôle significatif que le territoire tchèque a joué dans l’histoire intellectuelle, culturelle et religieuse de l’Europe, de temps en temps comme champ de bataille, mais le plus souvent en tant que pont.

Dans quelques mois, aura lieu le vingtième anniversaire de la « Révolution de velours », qui, heureusement, mit fin pacifiquement, à une période d’épreuve particulière pour votre Pays, période durant laquelle la circulation des idées et des courants culturels était sévèrement contrôlée. Je m’unis à vous et à vos voisins en rendant grâce pour votre libération de ces régimes oppressifs. Si l’effondrement du mur de Berlin a marqué un tournant décisif dans l’histoire mondiale, il en fut plus encore ainsi pour les Pays de l’Europe Centrale et Orientale, leur permettant de prendre la place qui leur revient dans le consensus des nations, en qualité d’acteurs souverains.

Toutefois, le coût de quarante ans de répression politique n’est pas à sous-estimer. Un drame particulier pour ce pays a été la tentative impitoyable du Gouvernement de l’époque de réduire au silence l’Église. Votre histoire, tout au long de son cours, de saint Venceslas, de sainte Ludmilla et saint Adalbert jusqu’à saint Jean Népomucène, a été marquée par de courageux martyrs dont la fidélité au Christ a témoigné plus fortement et de façon plus éloquente que la voix de leurs bourreaux. Cette année est caractérisée par le quarantième anniversaire de la mort du Serviteur de Dieu, le Cardinal Josef Beran, Archevêque de Prague. Je désire lui rendre hommage ainsi qu’à son successeur, le Cardinal František Tomášek, que j’ai eu le privilège de connaître personnellement, pour leur invincible témoignage chrétien face à la persécution. Avec de braves et innombrables prêtres, religieux et laïcs, hommes et femmes, ils ont maintenu vivante la flamme de la foi dans ce Pays. Maintenant que la liberté religieuse a été rétablie, je fais appel à tous les citoyens de la République pour qu’ils redécouvrent les traditions chrétiennes qui ont façonné leur culture et j’invite la communauté chrétienne à continuer à faire entendre sa voix tandis que la nation affronte les défis du nouveau millénaire. « Sans Dieu, l’homme ne sait où aller et ne parvient même pas à comprendre qui il est » (Caritas in veritate ). La vérité de l’Évangile est indispensable pour une société saine, car elle ouvre à l’espérance et nous permet de découvrir notre dignité inaliénable de fils de Dieu.

Monsieur le Président, je sais que vous voulez que soit accordé à la religion un rôle majeur dans les affaires du Pays. Le drapeau présidentiel qui flotte sur le Château de Prague proclame la devise « Pravda Vítezí – La Vérité triomphe » : je souhaite sincèrement que la lumière de la foi continue à guider cette nation, bénie abondamment au cours de son histoire par le témoignage de grands saints et martyrs. En cet âge de la science, il est utile de rappeler l’exemple de Jean Grégoire Mendel, Abbé augustin de Moravie, dont les recherches d’avant-garde furent à la base de la génétique moderne. Le reproche de son saint patron, Augustin, ne s’adressait pas à lui, lorsqu’il regrettait que beaucoup étaient « davantage portés à admirer les faits qu’à en rechercher les causes » (Epistula 120, 5 ; cf. Jean-Paul II, Commémoration de l’Abbé Grégoire Mendel à l’occasion du premier centenaire de sa mort, 10 mars 1984, 2). Le véritable progrès de l’humanité est servi au mieux justement par cette alliance de la sagesse de la foi et de l’intuition de la raison. Que le peuple Tchèque puisse toujours jouir des bénéfices qui proviennent de cette heureuse synthèse !

Il ne me reste qu’à renouveler à chacun de vous mes remerciements, et à vous dire que j’ai attendu avec impatience de passer ces quelques jours parmi vous, dans la République Tchèque, que vous êtes fiers d’appeler : « Žeme Ceská, domov muj ». Merci beaucoup.



VISITE À L' "ENFANT JÉSUS DE PRAGUE" Eglise Sainte Marie de la Victoire de Prague Samedi 26 septembre 2009

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Messieurs les Cardinaux,
Monsieur le Maire et autorités ici présentes,
Chers frères et soeurs,
Chers enfants,

J’adresse à chacun ma cordiale salutation et j’exprime la joie de visiter dans cette Église, dédiée à Sainte Marie de la Victoire où est vénérée la statue de l’Enfant-Jésus, connue partout sous le nom de « L’Enfant-Jésus de Prague ». Je remercie Monseigneur Jan Graubner, Président de la Conférence Épiscopale, pour ses paroles de bienvenue au nom de tous les évêques. J’adresse un salut respectueux au Maire et à toutes les autres autorités civiles et religieuses, qui ont voulu être présentes à cette rencontre. Je vous salue vous, chères familles, qui êtes venues si nombreuses à ma rencontre.

L’image de l’Enfant-Jésus fait immédiatement penser au mystère de l’Incarnation, au Dieu tout-puissant qui s’est fait homme et a vécu pendant 30 ans dans l’humble famille de Nazareth, confié par la Providence à la garde pleine d’attention de Marie et de Joseph. Ma pensée va vers vos familles et vers toutes les familles du monde, à leurs joies et à leurs difficultés. Unissant la prière à notre réflexion, nous demandons à l’Enfant-Jésus le don de l’unité et de la concorde pour toutes les familles. Nous pensons spécialement aux jeunes familles qui doivent faire tant d’efforts pour assurer à leurs enfants la sécurité et un avenir digne. Nous prions pour les familles en difficulté, éprouvées par la maladie et par la souffrance, pour celles qui traversent une crise, qui sont séparées ou meurtries par la mésentente et l’infidélité. Nous les confions toutes au Saint Enfant-Jésus de Prague, sachant combien est importante leur stabilité et leur bonne entente pour le vrai progrès de la société et pour l’avenir de l’humanité.

La statue de l’Enfant-Jésus, reflet de la tendresse de son enfance, nous fait en outre percevoir la proximité de Dieu et de son amour. Nous comprenons combien nous sommes précieux à ses yeux, parce que, particulièrement grâce à Lui, nous sommes devenus à notre tour fils de Dieu. Chaque être humain est fils de Dieu et donc, chacun de nos frères est, comme tel, à accueillir et à respecter. Puisse notre société comprendre cette réalité ! Chaque personne humaine serait alors considérée non pour ce qu’elle a mais pour ce qu’elle est, puisque dans le visage de chaque être humain, sans distinction de race ni de culture, resplendit l’image de Dieu.

Cela vaut par-dessus tout pour les enfants. Dans l’Enfant-Jésus de Prague, nous contemplons la beauté de l’enfance et la préférence que le Christ-Jésus a toujours manifestée envers les plus petits, comme nous le lisons dans l’Évangile (cf
Mc 10,13-16). Combien d’enfants, au contraire, ne sont pas aimés, ni accueillis, ni respectés ! Combien sont victimes de la violence et de toutes formes d’exploitation de la part de personnes sans scrupules ! Puissent être réservés à ces petits le respect et l’attention qui leur est dû : les enfants sont l’avenir et l’espérance de l’humanité !

Je voudrai maintenant adresser une parole spéciale à vous, chers enfants, et à vos familles. Vous êtes venus nombreux à ma rencontre et je vous en remercie de grand coeur. Vous qui êtes les préférés –du coeur- de l’Enfant-Jésus, sachez rendre son amour, et, en suivant son exemple, soyez obéissants, délicats et affectueux. Apprenez à être, comme Lui, le réconfort de vos parents. Soyez de vrais amis de Jésus et recourrez toujours à Lui dans la confiance. Priez-le pour vous-mêmes, pour vos parents, pour votre famille, pour vos maitres et pour vos amis, et priez-le aussi pour moi. Je vous remercie encore pour votre accueil et je vous bénis de grand coeur, invoquant sur tous la protection de l’Enfant-Jésus, de sa Mère Immaculée et de saint Joseph.



RENCONTRE AVEC LES AUTORITÉS POLITIQUES ET CIVILES ET AVEC LE CORPS DIPLOMATIQUE Prague – Château-Salle espagnole Samedi 26 septembre 2009

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Excellences, Mesdames et Messieurs

Je suis heureux de l’opportunité qui m’est donnée de rencontrer, dans un cadre si remarquable, les autorités politiques et civiles de la République tchèque, ainsi que les membres du Corps diplomatique. Je remercie chaleureusement le Président Klaus pour les aimables mots d’accueil qu’il m’a adressé en votre nom. J’exprime aussi ma reconnaissance à l’Orchestre philharmonique tchèque pour la prestation musicale qui a ouvert notre rencontre, et qui a illustré de façon éloquente à la fois les racines de la culture tchèque et l’apport d’envergure que cette nation a offert à la culture européenne.

Ma visite pastorale en République tchèque coïncide avec le 20e anniversaire de la chute des régimes totalitaires de l’Europe centrale et de l’Est, et de la « Révolution de velours » qui a restauré la démocratie dans ce pays. L’euphorie qui s’est ensuivie s’est exprimée en termes de liberté. Deux décennies après les profonds changements politiques qui ont balayé ce continent, le processus de guérison et de reconstruction se poursuit, dans le contexte plus large de l’unification européenne et d’un monde toujours plus globalisé. Les aspirations des citoyens et les attentes placées dans les gouvernements appellent de nouveaux modèles de vie citoyenne et de solidarité entre les nations et les peuples sans lesquels l’avenir si longtemps désiré de justice, de paix et de prospérité restera illusoire. Ces aspirations continuent à évoluer. Aujourd’hui, tout particulièrement chez les jeunes, la question de la nature de la liberté qui a été gagnée refait surface également. Dans quel but cette liberté est-elle exercée ? Quelles sont ses véritables critères d’authenticité ?

Chaque génération a le devoir de s’engager à nouveau dans la difficile tâche d’ordonner de façon juste les affaires humaines, cherchant à comprendre le juste usage de la liberté humaine (cf. Spe Salvi ). Alors que le devoir de renforcer « les structures de liberté » s’avère vital, ce n’est pourtant pas suffisant : les aspirations humaines s’élèvent au-delà du quant-à-soi, au-delà de ce qu’aucune autorité politique ou économique peut offrir, vers une espérance rayonnante (cf. ibid., n.35) qui a son origine au-delà de nous-mêmes même si nous la rencontrons en nous, en tant que vérité, beauté et bonté. La liberté est en quête d’un but : cela requiert une conviction. La vraie liberté présuppose la recherche de la vérité – du vrai bien – et, de là, trouve précisément son accomplissement en connaissant et en faisant ce qui est opportun et juste. Aristote définit le bien comme « ce vers quoi toute chose tend » et il poursuit en suggérant que « s’il est bon qu’un seul homme atteigne sa fin, il est plus excellent et plus divin que l’atteigne une nation ou les États-cités » (Éthique à Nicomaque, 1 ; cf. Caritas in Veritate ). En effet, la haute responsabilité d’éveiller la réceptivité à la vérité et à la bonté incombe à tous les responsables – religieux, politique et culturel, chacun dans son domaine. Conjointement, nous devons nous engager dans la lutte pour la liberté et la recherche de la vérité, qui soit vont ensemble main dans la main, soit périssent ensemble misérablement (cf. Fides et Ratio
FR 90).

Pour les chrétiens, la vérité a un nom : Dieu. Et la bonté a son visage : Jésus Christ. Depuis le temps des saints Cyrille et Méthode et des premiers missionnaires, la foi des chrétiens a, dans les faits, joué un rôle décisif dans la formation de l’héritage spirituel et culturel de ce pays. Cela doit être encore le cas pour le présent et dans le futur. Le riche patrimoine de valeurs spirituelles et culturelles, chacune trouvant son expression dans l’autre, n’a pas seulement forgé l’identité nationale, mais lui a aussi fourni la vision nécessaire pour exercer un rôle de cohésion au coeur de l’Europe. Pendant des siècles, ce territoire a été un lieu de rencontre entre différents peuples, traditions et cultures. Comme nous en avons tous conscience, il a connu dans son histoire des chapitres douloureux, et il porte les cicatrices d’événements tragiques nés de l’incompréhension, de la guerre et de la persécution. Mais il est aussi vrai, que ses racines chrétiennes ont alimenté un remarquable esprit de pardon, de réconciliation et de coopération qui a rendu capable le peuple de cette terre de trouver la liberté et d’inaugurer un nouveau commencement, une nouvelle synthèse, un renouveau d’espérance. N’est-ce pas de cet esprit dont l’Europe contemporaine a besoin ?

L’Europe est plus qu’un continent. C’est une maison ! Et la liberté trouve son sens le plus profond dans une patrie spirituelle. Avec un respect entier pour la distinction entre le domaine politique et celui de la religion – qui garantit la liberté des citoyens d’exprimer leur croyance religieuse et de vivre conformité avec elle – je souhaite souligner le rôle irremplaçable du Christianisme pour la formation de la conscience de chaque génération et la promotion d’un consensus éthique de base qui est utile à toute personne qui appelle ce continent « ma maison » ! Dans cet esprit, je souhaite reconnaître la voix de ceux qui aujourd’hui, à travers ce pays et ce continent, cherchent à vivre, dans la vie publique, leur foi de façon aussi déterminée que sereine, dans l’attente que les normes sociales soient informées par le désir de vivre dans la vérité qui nous rend libres (cf. Caritas in Veritate ).

La fidélité aux peuples que vous servez et que vous représentez exige une fidélité à la vérité qui, seule, est la garantie de la liberté et du développement humain intégral (cf. ibid.,n.9). Le courage d’affirmer la vérité sert, en fait, tous les membres de la société en jetant une lumière sur les avancées du progrès humain, en indiquant ses fondements éthiques et moraux, et en garantissant que la politique publique s’appuie sur le trésor de la sagesse humaine. La sensibilité à la vérité universelle ne devrait jamais être éclipsée par des intérêts particuliers, aussi importants qu’ils puissent être ; cela ne conduirait qu’à de nouveaux exemples d’éclatement ou de discrimination social dont ces mêmes intérêts ou des groupes de pression seraient disposés à profiter. En fait, loin de menacer l’acceptation des différences et la pluralité culturelle, la recherche de la vérité rend possible un consensus, elle permet au débat publique de demeurer rationnel, honnête et responsable, et elle assure une unité que les vagues notions d’intégration ne peuvent tout simplement pas offrir.

A la lumière de la Tradition de l’Église où la charité imprègne les domaines temporel, intellectuel, spirituel, je suis certain que les membres de la Communauté catholique, avec les membres des autres Églises, des communautés ecclésiales et des autres religions, vont continuer à poursuivre les objectifs de développement qui possèdent une valeur plus humaine et plus humanisante, à la fois dans ce pays et ailleurs (cf. ibid.,n.9).

Chers amis, notre présence dans cette magnifique capitale, qui est souvent présentée comme le coeur de l’Europe, nous pousse à nous demander ce que signifie un « coeur ». Bien qu’il n’y ait pas de réponse simple à cette question, une piste peut certainement être trouvée dans les joyaux architecturaux qui ornent cette cité. La beauté frappante de ses églises, du château, des places et des ponts ne peuvent pas ne pas tourner nos esprits vers Dieu. Leur beauté exprime la foi ; ils sont une épiphanie de Dieu qui, justement, nous laisse méditer les glorieuses merveilles auxquelles nous, créatures, pouvons aspirer quand nous donnons forme aux aspirations esthétiques et noétiques de notre être le plus intime. Comme cela serait tragique si quelqu’un devait voir de telles beautés, tout en ignorant le mystère transcendant qu’elles indiquent. La rencontre créatrice entre la tradition classique et l’Évangile a donné naissance à une vision de l’homme et de la société attentive à la présence de Dieu parmi nous. En formant le patrimoine culturel de ce continent, celle-ci a montré que la raison ne finit pas avec ce que voient les yeux, mais qu’elle est plutôt tournée vers ce qui se trouve au-delà, ce à quoi nous aspirons profondément : l’Esprit, pourrions-nous dire, de la Création.

À la présente croisée des chemins de la civilisation, si souvent marquée par une division troublante de l’unité de la bonté, de la vérité et de la beauté et la difficulté conséquente à s’accorder sur les mêmes valeurs communes, tout effort en vue du progrès humain doit puiser son inspiration dans cet héritage vivant. L’Europe, dans la fidélité à ses racines chrétiennes, possède une vocation particulière à confirmer cette vision transcendante à travers ses initiatives pour servir le bien commun des personnes, des communautés et des nations. Il est particulièrement important que les jeunes européens soient encouragés par une formation qui respecte et nourrisse les capacités que Dieu leur a données de transcender les limites dans lesquelles on voudrait parfois les enfermer. Dans le sport, dans les arts et dans les études, les jeunes ont l’occasion d’exceller. N’est-il pas tout aussi vrai qu’en présence de grands idéaux, ceux-ci aspireront aussi à la vertu morale et à une vie de compassion et de bonté ? J’encourage chaleureusement les parents et les responsables de communauté qui attendent des autorités qu’elles promeuvent les valeurs qui intègrent les dimensions intellectuelle, humaine et spirituelle d’une éducation profonde digne des aspirations de notre jeunesse.

« Veritas vincit ». Telle est la devise inscrite sur le drapeau du Président de la République tchèque : en définitive, la vérité l’emporte, non par la force, mais par la persuasion, par l’héroïque témoignage d’hommes et de femmes dont les principes sont fermes, par le dialogue sincère qui dépasse l’intérêt propre pour considérer les exigences du bien commun. La soif de vérité, de beauté et de bonté, enracinée en tout homme et en toute femme par le Créateur, est destinée à les réunir dans leur quête de la justice, de la liberté et de la paix. L’histoire a amplement montré que la vérité peut être trahie et manipulée au service d’idéologies fausses, de l’oppression et de l’injustice. Mais les défis auxquels l’humanité fait face ne nous appellent-ils pas à regarder au-delà de ces dangers ? En définitive, qu’y a-t-il de plus inhumain, et de plus destructeur, que le cynisme qui voudrait dénier la grandeur de notre quête de vérité, et le relativisme qui corrode les vraies valeurs qui inspire la construction d’un monde uni et fraternel ? Au contraire, nous devons reprendre confiance dans la noblesse et l’ampleur de l’esprit humain, dans ses capacités à atteindre la vérité, et laisser cette confiance nous guider dans le patient travail de la politique et de la diplomatie.

Mesdames et messieurs, avec ces sentiments, je vous offre mes voeux priants afin que votre service soit inspiré et soutenu par la lumière de cette vérité qui est un reflet de l’éternelle Sagesse du Dieu créateur. Sur vous et sur vos familles, j’invoque cordialement l’abondance des grâces divines.



CÉLÉBRATION DES VÊPRES AVEC LES PRÊTRES, LES RELIGIEUSES, LES RELIGIEUX, LES SÉMINARISTES ET LES MOUVEMENTS LAICS Cathédrale Saint Guy - Prague Samedi 26 septembre 2009

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Chers frères et soeurs !

Je vous adresse à tous le salut de saint Paul que nous avons entendu dans la lecture brève : Que la grâce et la paix de Dieu notre Père, soient avec vous ! Je l’adresse en premier lieu au Cardinal Archevêque, que je remercie pour ses paroles cordiales. Je l’étends aussi autres Cardinaux et aux Évêques présents, aux prêtres et aux diacres, aux séminaristes, aux religieux et aux religieuses, aux catéchistes et aux agents pastoraux, aux jeunes et aux familles, aux associations et aux mouvements ecclésiaux.

Nous sommes rassemblés ce soir dans un lieu qui vous est cher, qui est un signe visible de la puissance de la grâce divine qui agit dans le coeur des croyants. La beauté de cet édifice millénaire est en effet un témoignage vivant de la riche histoire de foi et de tradition chrétienne de votre peuple ; une histoire illuminée, en particulier, par la fidélité de ceux qui ont scellé leur adhésion au Christ et à l’Église par le martyre. Je pense aux figures des saints Venceslas, Adalbert et Jean Népomucène, pierres milliaires du chemin de votre Église, à qui se joignent les exemples du jeune saint Guy, qui préféra le martyre plutôt que de trahir le Christ, du moine saint Procope et de sainte Ludmilla. Je pense à ce qui, au siècle dernier, a marqué l’existence de deux Archevêques de cette Église locale, les Cardinaux Josef Beran et František Tomášek, ainsi que de nombreux Evêques, prêtres, religieux, religieuses et fidèles qui ont résisté avec une fermeté héroïque à la persécution communiste, jusqu’au sacrifice de leur vie. D’où ces courageux amis du Christ ont-ils tiré leur force sinon de l’Evangile ? Oui ! ils se sont laissés fasciner par Jésus qui a dit : « Si quelqu’un veut marcher derrière moi, qu’il renonce à lui-même, qu’il prenne sa croix et qu’il me suive » (
Mt 16,24). Au moment de la difficulté ils ont senti résonner dans leur coeur une autre de ses paroles : « Si l’on m’a persécuté, on vous persécutera, vous aussi » (Jn 15,20).

L’héroïsme des témoins de la foi rappelle que c’est seulement de la connaissance personnelle et du lien profond avec le Christ qu’il est possible de tirer l’énergie spirituelle pour réaliser pleinement la vocation chrétienne. Seul l’amour du Christ rend efficace l’action apostolique, surtout au moment de la difficulté et de l’épreuve. Aimer le Christ et les frères doit être la caractéristique de tout baptisé et de toute communauté. Dans les Actes des Apôtres nous lisons que « la multitude de ceux qui avaient adhéré à la foi avait un seul coeur et une seule âme » (4, 32). Et Tertullien, un auteur des premiers siècles, écrivait que les païens étaient touchés de l’amour qui liait les chrétiens entre eux (cf. Apologétique XXXIX). Chers frères et soeurs, imitez le divin Maître qui « n’est pas venu pour être servi, mais pour servir, et donner sa vie en rançon pour la multitude » (Mc 10,45). Que l’amour resplendisse dans chacune de vos paroisses et communautés, dans les diverses associations et les mouvements. Que votre Église, selon l’image de saint Paul, soit un corps bien structuré qui a le Christ comme Tête, et dans laquelle tout membre agit en harmonie avec le tout. Nourrissez votre amour du Christ par la prière et l’écoute de sa parole ; nourrissez-vous de Lui dans l’Eucharistie, et avec sa grâce, soyez dans tous les milieux des artisans d’unité et de paix.

Vos communautés chrétiennes, après le long hiver de la dictature communiste, ont recommencé à s’exprimer librement il y a 20 ans quand votre peuple, avec les événements qui se sont mis en route à partir de la manifestation étudiante du 17 novembre 1989, a retrouvé sa propre liberté. Vous percevez cependant que même aujourd’hui il n’est pas facile de vivre et de témoigner de l’Évangile. La société actuelle porte encore les blessures causées par l’idéologie athée et elle est souvent fascinée par la mentalité moderne d’une consommation hédoniste, avec une dangereuse crise des valeurs humaines et religieuses et la dérive d’un relativisme éthique et culturel déferlant. Dans ce contexte un engagement renouvelé de la part de toutes les composantes ecclésiales pour renforcer les valeurs spirituelles et morales dans la vie de la société actuelle, est devenu urgent. Je sais que vos communautés sont déjà engagées sur de nombreux fronts, en particulier dans le domaine caritatif avec la Caritas. Avec un zèle particulier, votre activité pastorale embrasse le domaine de l’éducation des générations nouvelles. Les écoles catholiques promeuvent le respect dû à l’homme ; une attention particulière est aussi donnée à la pastorale des jeunes même en-dehors du contexte scolaire, sans pour autant délaisser les autres fidèles. Le Christ est pour tous ! Je souhaite de tout coeur une entente toujours croissante avec les autres institutions quelles soient publiques ou privées. L’Eglise – il est toujours bon de le répéter – ne demande pas des privilèges, mais elle demande seulement de pouvoir oeuvrer librement au service de tous et dans un esprit évangélique.

Chers frères et soeurs, puisse le Seigneur vous donnez d’être comme le sel dont parle l’Evangile et qui donne saveur à la vie, pour être des ouvriers fidèles dans la vigne du Seigneur. Il revient, en premier lieu, à vous, chers Evêques et prêtres, de travailler inlassablement pour le bien de ceux qui sont confiés à vos soins. Inspirez-vous toujours de l’image évangélique du Bon Pasteur, qui connaît ses brebis, les appelle par leur nom, les conduit dans des lieux sûrs, et est disposé à se donner lui-même pour elles (cf. Jn 10,1-19). Chères personnes consacrées, par la profession des conseils évangéliques vous rappelez le primat que Dieu doit avoir dans la vie de tout être humain, et, vivant en fraternité, vous témoignez combien la pratique du commandement de l’amour est enrichissante (cf. Jn 13,34). Fidèles à votre vocation, vous aiderez ainsi les hommes et les femmes de notre temps à regarder vers en haut, à se laisser fasciner par Dieu et par l’Évangile de son Fils (cf. Vita consecrata VC 104). Et à vous, chers jeunes, qui êtes dans les séminaires ou dans des maisons de formation, préoccupez-vous d’acquérir une solide préparation culturelle, spirituelle et pastorale. En cette Année sacerdotale que j’ai proclamée pour commémorer le cent cinquantième anniversaire de la mort du saint Curé d’Ars, que la figure de ce pasteur totalement donné à Dieu et aux âmes, pleinement conscient que justement son ministère, animé par la prière, était son chemin de sanctification, soit exemplaire pour vous.

Chers frères et soeurs, nous nous souvenons dans notre action grâce à Dieu de différents anniversaires : les 280 ans de la canonisation de saint Jean Népomucène, le 80ème anniversaire de la dédicace de cette cathédrale dédiée à saint Guy et le 20ème anniversaire de la canonisation de sainte Agnès de Prague, événement qui a annoncé la libération de votre Pays de l’oppression athée. Il y a là de nombreux motifs pour poursuivre avec joie et enthousiasme le chemin ecclésial en comptant sur l’intercession maternelle de Marie, la Mère de Dieu, et sur celle de tous vos Saints Protecteurs. Amen !



ANGELUS Aéroport Turany de Brno Dimanche 27 septembre 2009

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Chers frères et soeurs,

Arrivés à la fin de cette célébration solennelle, l’heure de midi nous invite à la prière de l’Angélus. Nous sommes heureux de la réciter ici, au coeur de la Moravie, région fraternellement unie à la Bohème, sur cette terre qui, il y a de nombreux siècles, reçut le don de la foi grâce au génie missionnaire des saints Cyrille et Méthode.

Lorsqu’il y a une vingtaine d’années, Jean-Paul II décida de visiter l’Europe centrale et orientale après la chute du totalitarisme communiste, il voulut commencer son voyage pastoral par Velehrad, ville où se tinrent les grands Congrès Unionistes, précurseurs de l’oecuménisme dans le monde slave, ville rendue célèbre dans tout le monde chrétien. Vous vous rappelez, aussi, d’une autre visite, celle de 1995 à Svatý Kopecek, près d’Olomouc, avec l’inoubliable rencontre avec les jeunes. C’est dans cet esprit que je voudrai reprendre l’enseignement de mon vénéré Prédécesseur et vous inviter à demeurer fidèle à votre vocation chrétienne et à l’Évangile pour construire ensemble un avenir de solidarité et de paix.

La Moravie est une terre riche en sanctuaires mariaux qu’une foule de pèlerins visite durant toute l’année. Je désire, en ce moment, me rendre en esprit comme un pèlerin sur la montagne boisée d’Hostýn, en ce lieu où la Madone est vénérée comme votre protectrice. Que Marie garde vigilante votre foi, une foi plongeant ses racines dans le passé à travers les nombreuses traditions locales que vous avez justement le souci de conserver pour que ne diminue point, dans les villages et dans les villes, l’atmosphère chaleureuse de la vie familiale. Il nous arrive de constater, parfois avec une certaine nostalgie, que le rythme de la vie moderne tend à effacer les traces d’un passé riche de foi. Il est important, au contraire de ne pas perdre de vue l’idéal que les usages traditionnels expriment et par dessus-tout, de maintenir le patrimoine spirituel hérité de vos ancêtres pour le préserver, bien plus, pour faire en sorte qu’il réponde aux défis du temps présent. Que la Vierge Marie vous aide en cela, Elle à qui je confie une nouvelle fois votre Église et la Nation Tchèque toute entière.

Angelus Domini …

[Avec affection, je donne la bienvenue aux pèlerins provenant de la Slovaquie voisine. Chers frères et soeurs, la Parole de Dieu d’aujourd’hui nous exhorte à reconnaître Jésus-Christ comme notre unique espérance. Je vous invite à être dans le monde des témoins fidèle de cette annonce. De tout coeur, je vous bénis ainsi que vos familles dans vos Pays. Loué soit Jésus-Christ !]

[Je salue cordialement les polonais qui prennent part à cette Eucharistie. Je vous remercie pour votre présence et pour votre soutien spirituel. Que la rencontre du Pape avec l’Eglise qui se trouve en République Tchèque puisse porter des fruits de foi et d’amour abondants dans vos coeurs. Que Dieu vous bénisse !]

Von Herzen grüße ich die Pilger aus Deutschland und aus Österreich. Ich freue mich über euer Kommen, über euer Mitbeten und Mitfeiern mit den Brüdern und Schwestern hier in Tschechien. Noch mehr als alle nachbarschaftlichen Bande ist es der Glaube an Jesus Christus, der uns zusammenführt und eint. Und heute braucht es besonders unser gemeinschaftliches Zeugnis, um neu und kraftvoll die Botschaft des Heils zu verkünden: den gekreuzigten und auferstandenen Herrn – Jesus Christus, die Hoffnung der Menschheit! Die Erfahrung, daß Christus seine Freunde nicht allein läßt, sondern ihnen hilft, damit sie glücklich leben können, darf uns nicht kalt und gleichgültig lassen gegenüber unseren Mitmenschen, die auf der Suche nach Wahrheit und Liebe sind und sich nach dem wirklichen Leben sehnen. Zeigen wir ihnen den Weg zu Jesus Christus, der das Leben in Fülle schenkt. Mit Freude wollen wir Tag für Tag aus unserem Glauben und unserer Hoffnung leben und am Aufbau einer Gesellschaft mitarbeiten, die auf den Werten des Guten, der Gerechtigkeit und Brüderlichkeit, auf der Liebe zu Gott und dem Nächsten gründet. Dazu schenke der Herr uns seinen Segen.


[Mes chers, c’est pour moi une grande joie d’être avec vous aujourd’hui à Brno, au coeur de la Moravie. Je salue aussi ceux qui sont avec nous à travers les médias. Ma pensée affectueuse rejoint particulièrement les personnes âgées, souffrantes et les malades. Je demande un souvenir dans votre prière. Pour ma part, je vous assure de ma proximité spirituelle. Que dieu tout-puissant vous accorde d’abondantes grâces spirituelles et des bénédictions.]




Discours 2005-2013 26919