Discours 2005-2013 61009

AU PATRIARCHE DE L' ÉGLISE TEWAHEDO ORTHODOXE D'ETHIOPIE, SA SAINTETÉ ABUNA PAULOS Mardi 6 octobre 2009

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Votre Sainteté,

Je vous remercie de tout coeur pour votre présentation attentive et pour avoir accepté mon invitation à participer à la deuxième assemblée spéciale pour l'Afrique du Synode des Evêques. Je suis sûr que ma gratitude et ma reconnaissance sont partagées par tous les membres de l'assemblée.

Votre présence porte le témoignage éloquent des riches et antiques traditions de l'Eglise en Afrique. Depuis les temps apostoliques, parmi les nombreux peuples désirant ardemment écouter le message de salut du Christ se trouvaient ceux provenant d'Ethiopie (cf. Ac
Ac 8,26-40). La fidélité de votre peuple à l'Evangile continue à être montrée non seulement par son obéissance à la loi de l'amour mais également, comme vous nous l'avez rappelé, par la persévérance dans la persécution et par le sacrifice suprême du martyr au nom du Christ.

Votre Sainteté a rappelé que la proclamation de l'Evangile ne peut être séparée de l'engagement à bâtir une société conforme à la volonté de Dieu, qui respecte les bénédictions de sa création et protège la dignité et l'innocence de tous ses enfants. Dans le Christ, nous savons que la réconciliation est possible, que la justice peut prévaloir et que la paix peut durer! Tel est le message d'espérance que nous sommes appelés à proclamer. Telle est la promesse que le peuple d'Afrique aspire à réaliser de nos jours.

Prions donc afin que nos Eglises puissent se rapprocher dans l'unité qui est le don de l'Esprit Saint et rendre un témoignage commun de l'espérance apportée par l'Evangile. Continuons à oeuvrer en faveur du développement intégral de tous les peuples d'Afrique, en renforçant les familles qui constituent le rempart de la société africaine, en éduquant les jeunes qui sont l'avenir de l'Afrique et en contribuant à la construction de sociétés caractérisées par l'honnêteté, l'intégrité et la solidarité. Puissent nos délibérations, au cours de ces semaines, aider les fidèles du Christ sur le continent à être des exemples convaincants de rectitude, de miséricorde et de paix, et une lumière pour guider le chemin des générations futures.

Votre Sainteté, je vous remercie encore une fois de votre présence et de vos précieuses réflexions. Puisse votre participation à ce Synode être une bénédiction pour nos Eglises!


CONCERT "YOUTH AGAINST WAR" POUR LE 70 ANNIVERSAIRE DU DÉBUT DE LA DEUXIÈME GUERRE MONDIALE Auditorium de la Via della Conciliazione Jeudi 8 octobre 2009

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Monsieur le président
de la République italienne,
Messieurs les cardinaux,
Vénérés pères synodaux,
Messieurs les ambassadeurs,
Mesdames et Messieurs!

J'ai accueilli avec plaisir l'invitation à assister au concert: "Youth against war concert - à 70 ans du début de le deuxième guerre mondiale: les jeunes contre la guerre", organisé conjointement par le Conseil pontifical pour la promotion de l'unité des chrétiens, par la Commission pour les rapports religieux avec le judaïsme, par l'ambassade d'Allemagne près le Saint-Siège et par l'Europäisches KulturForum Mainau, sous l'égide de l'International Jewish Committee for Interreligious Consultations.J'adresse mes salutations et des remerciements sincères à tous les promoteurs et les organisateurs; je remercie en particulier le cardinal Walter Kasper de s'être fait l'interprète des sentiments communs. J'adresse une pensée respectueuse au président de la République italienne et à son épouse, reconnaissant de leur présence. En utilisant le langage universel de la musique, cette initiative veut encourager les jeunes à construire ensemble l'avenir du monde, en s'inspirant des valeurs de la paix et de la fraternité entre les hommes. Je salue Messieurs les cardinaux, les pères synodaux, les éminents membres du corps diplomatique près le Saint-Siège, les mécènes et toutes les personnes présentes.

Je remercie de tout coeur les jeunes musiciens des 15 pays qui se sont réunis dans la Inter-regionalen Jugendsinfonieorchester, avec leur chef d'orchestre Joachim Hochstenbach pour leur interprétation exceptionnelle. De même, je remercie la soliste, Mme Michelle Breedt pour son chant expressif et le professeur Klaus Maria Brandauer pour la vivacité de l'interprétation des textes. J'inclus dans ces remerciements également tous ceux qui ont rendu cette soirée possible: l'International Jewish Committee for Interreligious Consultations (IJCIC), en tant que promoteur du concert, et le Conseil pontifical pour la promotion de l'unité des chrétiens, l'ambassade d'Allemagne près le Saint-Siège et l'Europäisches KulturForum Mainau, en tant qu'organisateurs.

Chers amis! Ce soir nous revient en mémoire la tragédie de la deuxième guerre mondiale, une page d'histoire douloureuse imprégnée de violence et d'inhumanité, qui a causé la mort de millions de personnes, laissant les vainqueurs divisés et l'Europe à reconstruire. La guerre, voulue par le national-socialisme, a frappé de nombreuses populations innocentes de l'Europe et d'autres continents, alors que, avec le drame de la Shoah, elle a en particulier frappé le peuple juif, objet d'une extermination programmée. Et pourtant, les invitations à la raison et à la paix qui s'élevèrent de diverses parties ne manquèrent pas. Ici, à Rome, retentit avec angoisse la voix de mon vénéré prédécesseur Pie XII. Dans le radio-message du 24 août 1939 - précisément à la veille du commencement de la guerre - il proclama avec décision: "Rien n'est perdu avec la paix. Tout peut l'être avec la guerre" (cf. AAS, XXXI, 1939, p. 334). Hélas, personne ne réussit à arrêter cette terrible catastrophe: de manière inexorable prévalut la logique de l'égoïsme et de la violence. Que le rappel de ces tristes événements serve d'avertissement, en particulier aux nouvelles générations, afin qu'elles ne cèdent jamais plus à la tentation de la guerre.

Comme le cardinal Kasper l'a rappelé, nous commémorons cette année un autre anniversaire significatif: les vingt ans de la chute du mur de Berlin, symbole éloquent de la fin des régimes totalitaires communistes de l'Europe de l'Est. "La chute du mur - écrivit le Pape Jean-Paul II - comme l'effondrement de dangereux simulacres et d'une idéologie opprimante, ont démontré que les libertés fondamentales, qui donnent sa signification à la vie humaine, ne peuvent pas être réprimées et étouffées longtemps" (cf. Insegnamenti, XIII, 1, 1990, p. 1389). L'Europe, le monde entier ont soif de liberté et de paix! Il faut construire ensemble une véritable civilisation, qui ne soit pas basée sur la force, mais qui soit le "fruit de la victoire sur nous-mêmes, sur les puissances de l'injustice, de l'égoïsme et de la haine, qui peuvent parvenir à défigurer l'homme" (cf. ibid., XII, 2, 1989, p. 379). Le mouvement oecuménique, qui a trouvé dans la deuxième guerre mondiale un catalyseur - comme l'a opportunément souligné le cardinal Kasper -, peut contribuer à la construire, en oeuvrant avec les juifs et tous les croyants. Que Dieu nous bénisse et accorde à l'humanité le don de sa paix. Chers amis, merci encore de votre présence.



VEILLÉE MARIALE "AVEC L’AFRIQUE ET POUR L’AFRIQUE" Salle Paul VI Samedi 10 octobre 2009

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ORGANISÉ PAR LA SECRÉTAIRERIE GÉNÉRALE DU SYNODE DES ÉVÊQUES ET PAR LE BUREAU PASTORAL UNIVERSITAIRE DU VICARIAT DE ROME

Etaient présents à cette rencontre les Pères synodaux et les étudiants des Universités romaines, en liaison satellite avec les jeunes universitaires de 9 capitales africaines: Le Caire (Egypte), Nairobi (Kenya), Khartoum (Soudan), Antananarive (Madagascar), Johannesbourg (Afrique du Sud), Onitsha (Nigeria), Kinshasa (République démocratique du Congo), Maputo (Mozambique), Ouagadougou (Burkina Faso).



Vénérés Pères synodaux,
chers frères et soeurs,
chers étudiants universitaires!

A la fin de cette rencontre de prière mariale, j'adresse à tous mes salutations les plus cordiales, avec un sentiment de reconnaissance particulière envers les Pères synodaux ici présents. Je remercie les autorités italiennes qui ont soutenu cette initiative et surtout la Secrétairerie générale du Synode des Evêques, ainsi que le Bureau pour la pastorale universitaire du Vicariat de Rome qui l'ont promue et organisée.

Chers amis universitaires de Rome, je vous adresse également mes remerciements sincères pour avoir répondu aussi nombreux à mon invitation. Comme vous le savez, se déroule ces jours-ci au Vatican, la deuxième assemblée spéciale du synode des évêques pour l'Afrique. Le fait que se réunissent le Successeur de Pierre, de nombreux Pasteurs de l'Eglise en Afrique et des experts qualifiés, constitue une raison de joie et d'espérance, exprime la communion et la nourrit. Les Pères de l'Eglise comparaient déjà la communauté chrétienne à un orchestre ou à un choeur bien ordonnés et harmonieux, comme ceux qui ont animé notre prière et auxquels vont nos remerciements.

Comme à l'occasion d'événements précédents, nous avons également eu recours ce soir à des techniques modernes de télécommunication pour "tisser un réseau" - un réseau de prière! - qui relie Rome à l'Afrique. Ainsi, grâce à la collaboration de Telespazio, du Centre de télévision du Vatican et de Radio Vatican, de nombreux étudiants universitaires, avec leurs pasteurs, ont pu prendre part au chapelet depuis différentes villes africaines. Je leur adresse un salut affectueux.

Frères et soeurs de langue française, particulièrement vous qui nous avez rejoint depuis le Burkina Faso, la République Démocratique du Congo et l'Egypte, je vous adresse mon salut très cordial. Je vous invite à demeurer unis par la prière aux Evêques de toute l'Afrique réunis à Rome en Synode, afin que l'Eglise puisse apporter une contribution efficace à la réconciliation, à la justice et à la paix, sur ce continent bien-aimé et qu'elle soit un signe authentique d'espérance pour tous les peuples africains, "Sel de la terre... et lumière du monde". Que la Vierge Marie, Notre-Dame d'Afrique, vous garde dans la paix et vous guide vers son Fils Jésus, le Sauveur! Que Dieu vous bénisse!

Chers amis, je salue avec affection les nombreux jeunes étudiants, spécialement ceux venant du Kenya, du Nigeria, d'Afrique du Sud et du Soudan, qui nous ont rejoint pour notre prière à Marie, la mère de Jésus. Nous avons confié à sa protection maternelle le succès de cette Deuxième Assemblée Spéciale pour l'Afrique du Synode des Evêques. Que son intercession puisse soutenir partout les chrétiens, notamment les peuples d'Afrique, et que son exemple nous apprenne à nous tourner vers le Seigneur et à persévérer dans la prière dans nos joies et dans nos peines. J'adresse un salut spécial aux jeunes hommes et aux jeunes femmes d'Afrique qui sont présents dans mon coeur et dans mes prières. Soyez toujours des témoins intransigeants et des promoteurs actifs de justice, de réconciliation et de paix.

Je salue les universitaires réunis à Maputo avec le chapelet en main et le nom de Marie sur les lèvres, priant avec l'Afrique et pour l'Afrique, pour que les fidèles chrétiens, remplis de l'Esprit Saint, puissent porter à terme la mission reçue de Jésus: être le sel d'une terre de justice et la lumière qui guide le monde pour la réconciliation et la paix. Merci, mes amis, pour votre prière et pour votre témoignage chrétien! Que veille sur vous la Vierge Marie, à laquelle je confie toute la jeunesse du Mozambique et des autres pays africains de langue officielle portugaise.

Pour préparer la rencontre d'aujourd'hui, un congrès s'est tenu à Rome, organisé par la Direction générale pour la coopération au développement du Ministère des Affaires Etrangères et par le Vicariat de Rome sur le thème: "Pour une nouvelle culture du développement en Afrique: le rôle de la coopération universitaire". En vous exprimant ici toute mon appréciation et mon encouragement à poursuivre ce projet, je désire souligner combien la formation de jeunes intellectuels et la collaboration scientifique entre les Universités sont importantes pour proposer et animer un développement humain intégral en Afrique et sur les autres continents. Dans ce contexte, je vous ai remis idéalement, chers jeunes, l'Encyclique Caritas in veritate, dans laquelle je rappelle l'urgence d'élaborer une nouvelle synthèse humaniste (cf. n. 21) qui renoue les liens entre l'anthropologie et la théologie. En méditant les mystères du chapelet, nous avons encore une fois rencontré le vrai visage de Dieu, qui, en Jésus Christ, nous révèle sa présence dans la vie de tous les peuples. Le Dieu de Jésus Christ chemine avec l'homme et grâce à Lui il est possible de construire la civilisation de l'amour (cf. ibid. n. 39). Chers universitaires de Rome et d'Afrique, je vous demande d'être, dans l'Eglise et dans la société, des agents actifs de la charité intellectuelle, nécessaire pour affronter les grands défis de l'histoire contemporaine. Soyez dans les Universités des chercheurs sincères et passionnés de la vérité, construisant des communautés académiques de haut niveau intellectuel, où il est possible d'exercer et de jouir de cette rationalité ouverte et ample qui ouvre la route à la rencontre avec Dieu. Sachez créer des ponts de collaboration scientifique et culturelle entre les différentes Universités, surtout avec les Universités africaines. A vous, chers étudiants africains, j'adresse un appel particulier à vivre le temps des études comme la préparation d'un service d'animation culturelle à assurer dans vos pays. La nouvelle évangélisation en Afrique compte aussi sur votre généreux engagement.

Chers frères et soeurs, par la récitation du Saint Rosaire, nous avons confié le Deuxième Synode pour l'Afrique à l'intercession maternelle de la Sainte Vierge. Remettons entre Ses mains les espérances, les attentes, les projets des peuples africains, tout comme leurs difficultés et leurs souffrances. A ceux qui sont en liaison avec nous de différentes parties d'Afrique et à vous tous ici présents, je donne de tout coeur ma Bénédiction apostolique.


À S.E. M. YVES GAZZO, AU NOUVEAU CHEF DE LA DÉLÉGATION DE LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES PRÈS LE SAINT-SIÈGE Lundi 19 octobre 2009

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Monsieur l’Ambassadeur,

Je suis heureux de recevoir Votre Excellence et de l’accréditer en qualité de Représentant de la Commission des Communautés européennes près le Saint-Siège. Je vous saurais gré de bien vouloir exprimer à S.E. Monsieur José Barroso qui vient d’être réélu à la tête de la Commission, les voeux cordiaux que je forme pour sa personne et pour le nouveau mandat qui lui est confié, ainsi que pour l’ensemble de ses collaborateurs.

Cette année, l’Europe commémore le 20ème anniversaire de la chute du mur de Berlin. J’ai voulu saluer de façon particulière cet événement en me déplaçant en République tchèque. Sur cette terre éprouvée par le joug d’une douloureuse idéologie, j’ai pu rendre grâce pour le don de la liberté recouvrée qui a permis au continent européen de retrouver son intégrité et son unité.

Vous venez de définir, Monsieur l’Ambassadeur, la réalité de l’Union européenne comme « une zone de paix et de stabilité qui réunit 27 États avec les mêmes valeurs fondamentales ». C’est une heureuse présentation. Il est juste cependant de relever que l’Union européenne ne s’est pas dotée de ces valeurs, mais que ce sont plutôt ces valeurs partagées qui l’ont fait naître et qui ont été comme la force de gravitation qui a attiré vers le noyau des Pays fondateurs les différentes Nations qui l’ont successivement rejointe au fil du temps. Ces valeurs sont le fruit d’une longue et sinueuse histoire dans laquelle, nul ne le niera, le Christianisme a joué un rôle de premier plan. L’égale dignité de tous les êtres humains, la liberté de l’acte de foi comme racine de toutes les autres libertés civiques, la paix comme élément décisif du bien commun, le développement humain - intellectuel, social et économique - en tant que vocation divine (cf. Caritas in Veritate ) et le sens de l’Histoire qui en découle sont autant d’éléments centraux de la Révélation chrétienne qui continuent de modeler la civilisation européenne.

Lorsque l’Église rappelle les racines chrétiennes de l’Europe, elle n’est pas en quête d’un statut privilégié pour elle-même. Elle veut faire oeuvre de mémoire historique en rappelant d’abord une vérité - de plus en plus passée sous silence - à savoir l’inspiration décisivement chrétienne des Pères fondateurs de l’Union européenne. Plus profondément, elle désire manifester aussi que le socle de valeurs provient principalement de l’héritage chrétien qui continue encore aujourd’hui de le nourrir.
Ces valeurs communes ne constituent pas un agrégat anarchique ou aléatoire, mais elles forment un ensemble cohérent qui s’ordonne et s’articule, historiquement, à partir d’une vision anthropologique précise. L’Europe peut-elle omettre le principe organique originel de ces valeurs qui a révélé à l’homme à la fois son éminente dignité et le fait que sa vocation personnelle l’ouvre à tous les autres hommes avec qui il est appelé à ne constituer qu’une seule famille ? Se laisser aller à cet oubli, n’est-ce pas s’exposer au risque de voir ces grandes et belles valeurs entrer en concurrence ou en conflit les unes avec les autres ? Ou bien encore celles-ci ne risquent-elles pas d’être instrumentalisées par des individus et des groupes de pression désireux de faire valoir des intérêts particuliers au détriment d’un projet collectif ambitieux - que les européens attendent - ayant le souci du bien commun des habitants du Continent et de l’ensemble de notre monde ? Ce danger est d’ores et déjà perçu et dénoncé par nombre d’observateurs appartenant à des horizons très divers. Il est important que l’Europe ne laisse pas son modèle de civilisation se défaire, pan par pan. Son élan originel ne doit pas être étouffé par l’individualisme ou par l’utilitarisme.

Les immenses ressources intellectuelles, culturelles, économiques du continent continueront de porter du fruit si elles demeurent fécondées par la vision transcendante de la personne humaine qui constitue le trésor le plus précieux de l’héritage européen. Cette tradition humaniste, dans laquelle se reconnaissent beaucoup de familles de pensée très différentes parfois, rend l’Europe capable d’affronter les défis de demain et de répondre aux attentes de la population. Il s’agit principalement de la quête du juste et délicat équilibre entre l’efficacité économique et les exigences sociales, de la sauvegarde de l’environnement, et surtout de l’indispensable et nécessaire soutien à la vie humaine depuis la conception jusqu’à la mort naturelles et à la famille fondée sur le mariage entre un homme et une femme. L’Europe ne sera réellement elle-même que si elle sait conserver l’originalité qui a fait sa grandeur et qui est susceptible de faire d’elle, demain, un des acteurs majeurs dans la promotion du développement intégral des personnes que l’Église catholique considère comme l’unique voie susceptible de remédier aux déséquilibres présents de notre monde.

Pour toutes ces raisons, Monsieur l’Ambassadeur, le Saint-Siège suit avec respect et grande attention l’activité des Institutions européennes, souhaitant que celles-ci, par leur travail et leur créativité, honorent l’Europe qui est plus qu’un continent, mais une « maison spirituelle » (cf. Discours aux Autorités civiles et au Corps diplomatique, Prague, 26 septembre 2009). L’Église désire « accompagner » la construction de l’Union européenne. C’est pourquoi elle se permet de lui rappeler quelles sont les valeurs fondatrices et constitutives de la société européenne afin qu’elles puissent être promues pour le bien de tous.

Au moment où vous inaugurez votre mission auprès du Saint-Siège, je souhaite renouveler l’expression de ma satisfaction pour les excellentes relations qu’entretiennent les Communautés européennes et le Saint-Siège et je vous adresse mes voeux les meilleurs, Monsieur l’Ambassadeur, pour le bon accomplissement de votre noble charge. Soyez certain que vous trouverez auprès de mes collaborateurs l’accueil et la compréhension dont vous pourrez avoir besoin.

Sur Votre Excellence, sur sa famille et sur ses collaborateurs, j’invoque de grand coeur l’abondance des Bénédictions divines.



REPAS DE CLÔTURE DU SYNODE - PAROLES DU PAPE - Atrium de la Salle Paul VI Samedi 24 octobre 2009

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Chers frères et soeurs,

L'heure est à présent venue de dire merci. Merci avant tout au Seigneur qui nous a convoqués, nous a réunis, nous a aidés à écouter sa Parole, la voix de l'Esprit Saint, et nous a donc aussi donné la possibilité de trouver le chemin de l'unité dans la multitude des expériences, l'unité de la foi et la communion dans le Seigneur. A présent, l'expression « Eglise-Famille de Dieu » n'est plus simplement un concept, une idée, mais une expérience vivante de ces semaines: nous avons été réellement unis, ici, en tant que Famille de Dieu. Nous avons aussi fait un bon travail, avec l'aide du Seigneur.

Le thème, en soi, représentait un défi difficile, avec deux dangers, je dirais. Le thème « Réconciliation, justice et paix » implique certainement une forte dimension politique, même s'il est évident que la réconciliation, la justice et la paix ne sont possibles sans une profonde purification du coeur, sans un renouvellement de la pensée, une « metanoia », sans une nouveauté qui doit résulter justement de la rencontre avec Dieu. Même si cette dimension spirituelle est profonde et fondamentale, la dimension politique est aussi très réelle, parce que, sans réalisations politiques, ces nouveautés de l'Esprit ne se réalisent généralement pas. C'est pourquoi, la tentation pouvait être celle de donner une dimension politique au thème, de moins parler en qualité de pasteurs que d'hommes politiques, avec une compétence qui n'est pas la nôtre.

L'autre danger a été ? justement pour fuir à cette tentation ? de se retirer dans un monde purement spirituel, dans un monde abstrait et beau, mais qui n'est pas réaliste. Le discours d'un pasteur doit au contraire être réaliste, doit toucher la réalité, mais dans la perspective de Dieu et de sa Parole. Cette médiation comporte donc d'une part, le fait d'être réellement en relation avec la réalité, attentifs à parler de ce qui existe, et d'autre part à ne pas tomber dans des solutions techniquement politiques; ceci veut dire indiquer une parole concrète, mais spirituelle. C'était le grand problème du Synode, et il me semble que, grâce à Dieu, nous avons réussi à le résoudre, ce qui représente pour moi une source de gratitude, car l'élaboration du document post-synodal est ainsi beaucoup facilitée.

Je voudrais à présent revenir aux remerciements. Je remercie surtout les présidents délégués qui ont modéré, avec une grande « souveraineté » et avec joie, les séances du Synode. Je remercie les rapporteurs: nous avons aussi vu maintenant et touché ? si l'on peut ainsi dire ? de la main, qu'ils ont porté le plus grand poids du travail, ils ont travaillé la nuit et le dimanche, ils ont travaillé pendant le déjeuner et méritent donc réellement de notre part tous nos meilleurs applaudissements.

Je peux maintenant vous communiquer que j'ai décidé de nommer le Cardinal Turkson nouveau président du Conseil pontifical Justice et Paix, succédant ainsi au Cardinal Martino. Merci, Eminence, pour avoir accepté; nous sommes heureux de vous avoir bientôt parmi nous. Merci aussi à tous les Pères, aux délégués fraternels, aux auditeurs, aux experts, et merci surtout aux traducteurs parce qu'ils ont eu un rôle dans le parcours de « créer une Pentecôte ». La Pentecôte signifie se comprendre réciproquement; sans eux, ce pont de compréhension aurait manqué. Merci! Et merci surtout au Secrétaire général, à son « team », qui nous a conduits et a silencieusement tout très bien organisé.

Le Synode se termine, mais ne finit pas, non seulement parce que les travaux continuent avec l'Exhortation post-synodale: « Synodos » signifie chemin commun. Restons dans le chemin commun avec le Seigneur, allons au-devant du Seigneur pour lui préparer les routes, pour l'aider, pour lui ouvrir les portes du monde afin qu'Il puisse créer son Royaume parmi nous. C'est en ce sens que va ma Bénédiction pour vous tous. Récitons à présent la prière de remerciement pour le repas.


AUX PROFESSEURS, AUX ÉTUDIANTS ET AU PERSONNEL DE L'INSTITUT PONTIFICAL BIBLIQUE Salle Clémentine Lundi 26 octobre 2009



Messieurs les cardinaux,
1011 Révérend préposé général
de la Compagnie de Jésus,
Illustre recteur,
Illustres professeurs et chers élèves
de l'Institut pontifical biblique!

C'est avec un véritable plaisir que je vous rencontre à l'occasion du 100e anniversaire de la fondation de votre Institut, voulu par mon saint prédécesseur, Pie X, dans le but d'établir dans la ville de Rome ? comme cela a été dit ? un centre d'études spécialisées dans l'Ecriture Sainte et les disciplines qui y sont liées. Je salue avec respect le cardinal Zenon Grocholewski, à qui j'adresse mes remerciements pour les paroles courtoises qu'il a bien voulu m'adresser en votre nom. Je salue également le préposé général, le père Adolfo Nicolás Pachón, et je saisis volontiers l'occasion qui m'est donnée pour manifester une gratitude sincère à la Compagnie de Jésus, qui, non sans un effort important, apporte des investissements financiers et des ressources humaines dans la gestion de la faculté de l'Orient antique, de la faculté biblique, ici à Rome, et du siège de l'Institut à Jérusalem. Je salue le recteur et les enseignants, qui ont consacré leur vie à l'étude et à la recherche, dans une écoute constante de la Parole de Dieu. Je salue et je remercie le personnel, les employés et les ouvriers pour leur collaboration appréciée, ainsi que les bienfaiteurs qui ont mis et qui continuent à mettre à disposition les ressources nécessaires pour l'entretien des structures et pour les activités de l'Institut pontifical biblique. Je salue les anciens élèves unis spirituellement à nous en ce moment, et en particulier je vous salue, chers élèves, qui provenez de toutes les parties du monde.

100 ans se sont écoulés depuis la naissance de l'Institut pontifical biblique. Au cours de ce siècle, l'intérêt pour la Bible s'est certainement accru, et, grâce au Concile Vatican II, en particulier à la Constitution dogmatique Dei Verbum ? je fus un témoin direct de son élaboration, participant en tant que théologien aux débats qui ont précédé son approbation ?, on a beaucoup plus ressenti l'importance de la Parole de Dieu dans la vie et dans la mission de l'Eglise. Cela a favorisé dans les communautés chrétiennes un authentique renouveau spirituel et pastoral, qui a en particulier concerné la prédication, la catéchèse, l'étude de la théologie et le dialogue oecuménique. Votre Institut pontifical a apporté une contribution significative à ce renouveau, à travers la recherche scientifique biblique, l'enseignement des disciplines bibliques et la publication d'études qualifiées et de revues spécialisées. Au cours des décennies se sont succédé plusieurs générations d'illustres professeurs ? je voudrais rappeler ici, entre autres, le cardinal Bea ?, qui ont formé plus de sept mille professeurs d'Ecriture Sainte et promoteurs de groupes bibliques, ainsi que de nombreux experts actuellement insérés dans différents services ecclésiaux, dans chaque région du monde. Nous rendons grâce au Seigneur pour votre activité qui a pour objectif d'interpréter les textes bibliques dans l'esprit dans lesquels ils ont été écrits (cf. Dei Verbum
DV 12), et qui est ouverte au dialogue avec les autres disciplines, avec les différentes cultures et religions. Même si elle a connu des moments de difficulté, celle-ci a été conduite en fidélité constante au magistère, selon les finalités propres à votre Institut, précisément né « ut in Urbe Roma altiorum studiorum ad Libros sacros pertinentium habeatur centrum, quod efficaciore, quo liceat, modo doctrinam biblicam et studia omnia eidem adiuncta, sensu Ecclesiae catholicae promoveat » (Pius PP. X, Litt. AP. Vinea electa [7 mai 1909]: AAS I [1909], 447-448).

Chers amis, l'anniversaire du centenaire constitue un point d'arrivée et, dans le même temps, un point de départ. Enrichis par l'expérience du passé, vous poursuivez votre chemin avec un engagement renouvelé, conscients du service à l'Eglise qui vous est demandé, c'est-à-dire celui d'approcher la Bible de la vie du Peuple de Dieu, pour qu'il sache affronter de manière adaptée les défis inédits que les temps modernes lancent à la nouvelle évangélisation. Le souhait commun est que l'Ecriture Sainte devienne dans ce monde sécularisé non seulement l'âme de la théologie, mais également la source de la spiritualité et de la vigueur de la foi de tous les croyants en Christ. Que l'Institut pontifical biblique continue donc à croître comme un centre ecclésial d'étude de haute qualité dans le domaine de la recherche biblique, en s'appuyant sur les méthodologies critiques modernes et en collaboration avec les spécialistes en dogmatique et dans d'autres domaines de la théologie; qu'il assure une formation soignée aux futurs professeurs d'Ecriture Sainte afin que, se servant des langues bibliques et des différentes méthodologies exégétiques, ils puissent accéder directement aux textes bibliques.

La Constitution dogmatique Dei Verbum déjà citée a souligné à cet égard la légitimité et la nécessité de la méthode historique-critique, la ramenant à trois éléments essentiels: l'attention aux genres littéraires; l'étude du contexte historique; l'examen de ce qu'on a l'habitude d'appeler Sitz im Leben. Dans le même temps, le document conciliaire conserve fermement le caractère théologique de l'exégèse en indiquant les points de force de la méthode théologique dans l'interprétation du texte. Cela du fait que le présupposé fondamental sur lequel repose la compréhension théologique de la Bible est l'unité de l'Ecriture, et à ce présupposé, correspond comme chemin méthodologique l'analogie de la foi, c'est-à-dire la compréhension de chaque texte à partir de l'ensemble. Le texte conciliaire ajoute une indication méthodologique supplémentaire. L'Ecriture étant une seule chose à partir de l'unique Peuple de Dieu, qui en a été le porteur à travers l'histoire, lire l'Ecriture comme une unité signifie en conséquence la lire à partir du Peuple de Dieu, de l'Eglise comme son lieu vital et considérer la foi de l'Eglise comme la véritable clef d'interprétation. Si l'exégèse veut être également théologie, elle doit reconnaître que la foi de l'Eglise est cette forme de « sym-pathie » sans laquelle la Bible reste un livre fermé: la Tradition n'empêche pas l'accès à l'Ecriture, mais elle l'ouvre plutôt; d'autre part, c'est à l'Eglise que revient, dans ses organismes institutionnels, la parole décisive dans l'interprétation de l'Ecriture. En effet, c'est à l'Eglise qu'est confiée la tâche d'interpréter authentiquement la Parole de Dieu écrite et transmise, en exerçant son autorité au nom de Jésus Christ (cf. Dei Verbum DV 10).

Chers frères et soeurs, alors que je vous remercie de votre visite appréciée, je vous encourage à poursuivre votre service ecclésial, en adhésion constante au magistère de l'Eglise, et en assurant à chacun de vous le soutien de ma prière, je donne de tout coeur à tous, en tant que gage des faveurs divines, ma Bénédiction apostolique.


À S.E. M. ALI AKBAR NASERI, NOUVEL AMBASSADEUR DE LA RÉPUBLIQUE ISLAMIQUE D'IRAN PRÈS LE SAINT-SIÈGE Jeudi 29 octobre 2009



1012 Monsieur l’Ambassadeur,

Je suis heureux de vous accueillir en ce jour où vous présentez les Lettres qui vous accréditent comme Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de la République Islamique d’Iran près le Saint-Siège. Je vous exprime ma gratitude pour les aimables paroles que vous m’avez adressées ainsi que pour les voeux que vous m’avez transmis de la part de Son Excellence Monsieur Mahmoud Ahmadinejad, Président de la République. En retour, je vous serais reconnaissant de l’en remercier et de l’assurer de mes souhaits cordiaux pour toute la Nation.

Votre présence ici, ce matin, manifeste l’intérêt de votre pays pour le développement de bonnes relations avec le Saint-Siège. Comme vous le savez, Monsieur l’Ambassadeur, par sa présence dans les instances internationales et ses relations bilatérales avec de nombreux pays, le Saint-Siège souhaite défendre et promouvoir la dignité de l’homme. Il veut ainsi être au service du bien de la famille humaine, en portant un intérêt particulier aux aspects éthiques, moraux et humanitaires des relations entre les peuples. Dans cette perspective, le Saint-Siège désire consolider ses relations avec la République Islamique d’Iran, et favoriser la compréhension mutuelle et la collaboration en vue du bien commun.

L’Iran est une grande Nation qui possède d’éminentes traditions spirituelles et son peuple a une sensibilité religieuse profonde. Ceci peut être un motif d’espérance pour une ouverture croissante et une collaboration confiante avec la communauté internationale. Pour sa part, le Saint-Siège sera toujours prêt à travailler en harmonie avec ceux qui servent la cause de la paix et qui promeuvent la dignité dont le Créateur a doté tout être humain. Aujourd’hui, nous devons tous espérer et soutenir une nouvelle phase de coopération internationale, plus solidement fondée sur des principes humanitaires et sur l’aide effective à ceux qui souffrent, moins dépendante de froids calculs d’échanges et de bénéfices techniques et économiques.

La foi dans le Dieu unique doit rapprocher tous les croyants et les inciter à travailler ensemble pour la défense et la promotion des valeurs humaines fondamentales. Parmi les droits universels, la liberté religieuse et la liberté de conscience tiennent une place fondamentale, car elles sont à la source des autres libertés. La défense d’autres droits qui naissent de la dignité des personnes et des peuples, en particulier la promotion de la protection de la vie, de la justice et de la solidarité, doivent aussi être l’objet d’une réelle collaboration. D’ailleurs, comme j’ai eu souvent l’occasion de le souligner, l’établissement de relations cordiales entre les croyants des diverses religions est une nécessité urgente de notre temps, afin de construire un monde plus humain et plus conforme au projet de Dieu sur la création. Je me réjouis donc de l’existence, depuis plusieurs années, de rencontres organisées régulièrement, conjointement par le Conseil pontifical pour le Dialogue interreligieux et par l’Organisation pour la Culture et les Relations islamiques, sur des thèmes d‘intérêt commun. En contribuant à rechercher ensemble ce qui est juste et vrai, de telles rencontres permettent à tous de progresser dans la connaissance réciproque et de coopérer dans la réflexion sur les grandes questions qui touchent la vie de l’humanité.

D’autre part, les catholiques sont présents en Iran depuis les premiers siècles du christianisme et ils ont toujours été partie intégrante de la vie et de la culture de la Nation. Cette communauté est réellement iranienne et son expérience séculaire de convivialité avec les croyants musulmans est d’une grande utilité pour la promotion d’une plus grande compréhension et coopération. Le Saint-Siège a confiance que les Autorités iraniennes sauront renforcer et garantir aux chrétiens la liberté de professer leur foi et assurer à la communauté catholique les conditions essentielles pour son existence, notamment la possibilité d’avoir un personnel religieux suffisant et des facilités de déplacement dans le pays pour assurer le service religieux des fidèles. Dans cette perspective, je souhaite qu’un dialogue confiant et sincère se développe avec les institutions du pays afin d’améliorer la situation des communautés chrétiennes et de leurs activités dans le contexte de la société civile ainsi que de faire croître leur sens de l’appartenance à la vie nationale. Pour sa part, le Saint-Siège dont il est dans la nature et dans la mission de s’intéresser directement à la vie des Eglises locales, souhaite faire les efforts nécessaires pour aider la communauté catholique en Iran à maintenir vivants les signes de la présence chrétienne, dans un esprit d’entente bienveillante avec tous.

Monsieur, l’Ambassadeur, je voudrais enfin profiter de cette heureuse occasion pour saluer chaleureusement les communautés catholiques qui vivent en Iran, ainsi que leurs Pasteurs. Le Pape demeure proche de tous les fidèles et prie pour eux afin que tout en maintenant avec persévérance leur identité propre et en restant attachés à leur terre, ils collaborent généreusement avec tous leurs compatriotes au développement de la Nation.

Excellence, alors que débute votre mission auprès du Saint-Siège, je vous adresse mes meilleurs voeux de réussite. Je puis vous assurer qu’auprès de mes collaborateurs vous trouverez toujours compréhension et soutien pour son heureux accomplissement.

J’invoque de grand coeur sur votre personne, sur votre famille, sur vos collaborateurs ainsi que sur tous les Iraniens, l’abondance des Bénédictions du Très-Haut.



Discours 2005-2013 61009