Discours 2005-2013 1245

1245 Les traditions apostoliques que vous préservez jouissent de leur pleine fécondité spirituelle lorsqu’elles sont vécues en union avec l’Eglise universelle. Dans ce sens, vous suivez à juste titre les pas du serviteur de Dieu Mar Ivanios, qui a conduit vos prédécesseurs et leurs fidèles à la pleine communion avec l’Eglise catholique. Comme vos prédécesseurs, vous êtes vous aussi appelés, au sein de l’unique famille de Dieu, à poursuivre dans une solide fidélité ce qui vous a été transmis. Tous les évêques catholiques partagent une préoccupation profonde pour la fidélité à Jésus Christ et désirent cette unité qu’il a voulue pour ses disciples (cf. Jn 17,11), tout en préservant leur diversité légitime. «C’est en effet le dessein de l’Eglise catholique de sauvegarder dans leur intégrité les traditions de chaque Eglise particulière ou rite. Elle veut également adapter son mode de vie aux besoins divers des temps et des lieux» (Orientalium Ecclesarium, n. 2). Chaque génération doit affronter les défis qui se présentent à l’Eglise en accord avec ses capacités et en harmonie avec le reste du Corps mystique du Christ. Je vous encourage donc à promouvoir parmi vos prêtres et vos fidèles l’affection pour l’héritage spirituel et liturgique qui vous a été transmis, tout en approfondissant constamment votre communion avec le Siège de Pierre.

Le dépôt de la foi hérité des apôtres et transmis fidèlement jusqu’à notre époque est un don précieux du Seigneur. C’est ce message de salut qui a été révélé dans la personne de Jésus, dont l’Esprit unit les croyants de tout temps et de tout lieu, en nous offrant la communion avec le Père et avec son Fils afin que notre joie puisse être complète (cf. 1Jn 1,1-4). Vos prêtres et vous-mêmes êtes appelés à promouvoir cette communion à travers la parole et le sacrement, et à la renforcer à travers une catéchèse solide, afin que la Parole de Vie, Jésus Christ, et le don de la vie divine — la communion avec lui — puissent être connus partout dans le monde (cf. Verbum Domini, n. 2). Etant donné ses antiques racines et son éminente histoire, le christianisme en Inde apporte depuis longtemps sa contribution à la culture et à la société et à ses expressions religieuses et spirituelles. C’est à travers une détermination à vivre l’Evangile, «force de Dieu pour le salut de tout homme qui croit» (Rm 1,16) que ceux que vous servez apporteront une contribution plus efficace au Corps tout entier du Christ et à la société indienne, au bénéfice de tous. Puisse votre peuple continuer de se développer à travers la prédication de la Parole de Dieu et la promotion d’une communion fondée sur l’amour de Dieu.

Je note les défis particuliers qu’un grand nombre de vos paroisses doivent affronter pour apporter une sollicitude pastorale appropriée et un soutien mutuel, en particulier lorsqu'il n’y a pas toujours un curé de paroisse disponible. Toutefois, les paroisses plus petites, en tenant compte des réalités sociales que les chrétiens doivent affronter dans un contexte culturel plus vaste, offrent leurs propres opportunités de croissance et d’assistance véritablement fraternelle. Comme vous le savez, les petites communautés chrétiennes ont souvent apporté un témoignage remarquable dans l’histoire de l’Eglise. Tout comme dans les temps apostoliques, l’Eglise à notre époque se développera certainement en présence du Christ vivant, qui a promis d’être avec nous pour toujours (cf. Mt 28,20) et de nous soutenir (cf. 1Co 1,8). C’est cette présence divine qui doit demeurer au centre de la vie, de la foi et du témoignage de vos fidèles, et sur laquelle vous, leurs pasteurs, êtes appelés à veiller afin que, même s’ils doivent vivre loin de leur communauté, ils ne vivent pas loin du Christ. En effet, il est important de se rappeler que les communautés chrétiennes sont «le cadre dans lequel parcourir un itinéraire personnel et communautaire par rapport à la Parole de Dieu, de sorte que celle-ci soit vraiment au fondement de la vie spirituelle» (Verbum Domini, n. 72).

L’une des façons dont vous exercez votre rôle en tant que maîtres de la foi dans la communauté chrétienne est constituée par les programmes de formation catéchétique et de foi qui ont lieu sous votre direction. Etant donné que «cet enseignement sera fondé sur la Sainte Ecriture, la Tradition, la liturgie, le Magistère et la vie de l’Eglise» (Christus Dominus, CD 14), je suis heureux de noter la variété et le nombre de programmes auxquels vous avez recours actuellement. Avec la célébration des sacrements, ces programmes contribueront à assurer que les personnes confiées à vos soins pourront toujours rendre raison de l’espérance qui est en elles dans le Christ. En effet, la catéchèse et le développement spirituel comptent parmi les défis les plus importants que les pasteurs d’âmes doivent affronter, et c’est pourquoi je vous encourage chaleureusement à persévérer sur le chemin que vous avez choisi, tandis que vous vous efforcez de former votre peuple dans une connaissance et un amour plus profonds de la foi, aidés par la grâce de Dieu et par votre humble confiance dans sa Providence.

Avec ces pensées, je vous renouvelle mes sentiments d’affection fraternelle et d’estime pour vous. En invoquant l’intercession de saint Thomas apôtre, le grand patron de l’Inde, je vous assure de mes prières et je vous donne volontiers, ainsi qu’à ceux qui sont confiés à vos soins, ma Bénédiction apostolique en gage de grâce et de paix dans le Seigneur Jésus Christ.

AUX PARTICIPANTS AU COURS SUR LE FOR INTERNE

ORGANISÉ PAR LA PÉNITENCERIE APOSTOLIQUE Salle des Bénédictions Vendredi 25 mars 2011



Chers amis,

Je suis très heureux de souhaiter à chacun de vous une cordiale bienvenue. Je salue le cardinal Fortunato Baldelli, pénitencier majeur, et je le remercie des paroles courtoises qu’il m’a adressées. Je salue le régent de la Pénitencerie apostolique, Mgr Gianfranco Girotti, le personnel, les collaborateurs et tous les participants au cours sur le for interne, qui est devenu un rendez-vous traditionnel et une occasion importante pour approfondir les thèmes concernant le sacrement de la pénitence.

Je désire m’arrêter avec vous sur un aspect qui parfois, n’est pas suffisamment pris en considération, mais qui est d’une grande importance spirituelle et pastorale: la valeur pédagogique de la confession sacramentelle. S’il est vrai qu’il est toujours nécessaire de sauvegarder l’objectivité des effets du sacrement et sa correcte célébration selon les normes du Rite de la pénitence, il n’est pas hors de propos de réfléchir sur la façon dont celui-ci peut éduquer à la foi, aussi bien du ministre que du pénitent. La disponibilité fidèle et généreuse des prêtres à l’écoute des confessions, selon l’exemple des grands saints de l’histoire, de saint Jean-Marie Vianney à saint Jean Bosco, de saint Josemaría Escrivá à saint Pio da Pietrelcina, de saint Giuseppe Cafasso à saint Leopold Mandic, nous fait voir à tous que le confessionnal peut être un réel «lieu» de sanctification.

De quelle manière le sacrement de la pénitence éduque-t-il? En quoi sa célébration possède-t-elle une valeur pédagogique, tout d’abord pour les ministres? Nous pourrions partir de la reconnaissance du fait que la mission sacerdotale constitue un point d’observation unique et privilégié, à partir duquel, quotidiennement, il nous est donné de contempler la splendeur de la Miséricorde divine. Combien de fois dans la célébration du sacrement de la pénitence, le prêtre assiste-t-il à de véritables miracles de conversion, qui, en renouvelant «la rencontre avec un événement, une Personne» (Lett. enc. Deus caritas est ) renforcent sa foi elle-même. Au fond, confesser signifie assister à autant de «professiones fidei» qu’il y a de pénitents, et contempler l’action de Dieu miséricordieux dans l’histoire, toucher du doigt les effets salvifiques de la Croix et de la Résurrection du Christ, à chaque époque et pour chaque homme. Il n’est pas rare que nous nous trouvions devant de véritables drames existentiels et spirituels, qui ne trouvent pas de réponses dans les paroles des hommes, mais qui sont compris et assumés par l’Amour divin, qui pardonne et transforme: «Quand vos péchés seraient comme l’écarlate, comme neige ils blanchiront» (Is 1,18). D’un côté, si connaître et, d’une certaine façon, se pencher sur l’abîme du coeur humain, même dans ses aspects obscurs, met l’humanité et la foi du prêtre à l’épreuve, de l’autre, elle nourrit en lui la certitude que le dernier mot sur le mal de l’homme et de l’histoire revient à Dieu, revient à sa Miséricorde, capables de rendre toutes choses nouvelles (cf. Ap Ap 21,5). Combien le prêtre peut-il ensuite apprendre des pénitents exemplaires dans leur vie spirituelle, dans le sérieux avec lequel ils conduisent leur examen de conscience, dans la transparence avec laquelle ils reconnaissent leur propre péché et dans leur docilité à l’égard de l’enseignement de l’Eglise et les orientations du confesseur. De l’administration du sacrement de la pénitence, nous pouvons recevoir de profondes leçons d’humilité et de foi! Il s’agit d’un rappel très fort pour chaque prêtre à la conscience de sa propre identité. Jamais nous ne pourrions écouter les confessions de nos frères uniquement en vertu de notre humanité! Si ceux-ci s’approchent de nous, c’est uniquement parce nous sommes des prêtres, configurés au Christ souverain et éternel Prêtre, et rendus capables d’agir en son Nom et en sa Personne, de rendre réellement présent Dieu qui pardonne, renouvelle et transforme. La célébration du sacrement de la pénitence possède une valeur pédagogique pour le prêtre, en ce qui concerne sa foi, la vérité et la pauvreté de sa personne, et elle nourrit en lui la conscience de l’identité sacramentelle.

1246 Quelle est la valeur pédagogique du sacrement de la pénitence pour les pénitents? Nous devons tout d’abord dire que celle-ci dépend de l’action de la Grâce et des effets objectifs du sacrement dans l’âme du fidèle. La réconciliation sacramentelle est assurément l’un des moments où la liberté personnelle et la conscience de soi sont appelées à s’exprimer de manière particulièrement évidente. C’est peut-être également pour cela que, à une époque de relativisme et d’une conscience atténuée de l’être qui en est la conséquence, la pratique sacramentelle apparaît elle aussi affaiblie. L’examen de conscience possède une importante valeur pédagogique: il éduque à considérer avec sincérité sa propre existence, à la confronter avec la vérité de l’Evangile et à l’évaluer avec des paramètres pas seulement humains, mais provenant de la Révélation divine. La confrontation avec les commandements, avec les béatitudes et, surtout, avec le précepte de l’amour, constitue la première grande «école pénitentielle».

A notre époque, caractérisée par le bruit, par la distraction et par la solitude, le dialogue du pénitent avec le confesseur peut représenter l’une des rares occasions, si ce n’est l’unique, pour être véritablement écouté en profondeur. Chers prêtres, ne négligez pas de ménager une place opportune à l’exercice du ministère de la pénitence dans le confessionnal: être accueillis et écoutés constitue également un signe humain de l’accueil et de la bonté de Dieu envers ses fils. La confession honnête des péchés éduque ensuite le pénitent à l’humilité, à la reconnaissance de sa propre fragilité et, dans le même temps, à la conscience de la nécessité du pardon de Dieu et à la confiance que la Grâce divine peut transformer la vie. De la même manière, l’écoute des avertissements et des conseils du confesseur est importante pour le jugement des actes, pour le chemin spirituel et pour la guérison intérieure du pénitent. N’oublions pas combien de conversions et combien d’existences réellement saintes ont commencé dans un confessionnal! Accueillir la pénitence et écouter les paroles: «Je t’absous de tes péchés» représentent, pour finir, une véritable école d’amour et d’espérance, qui guide vers la pleine confiance dans le Dieu Amour révélé en Jésus Christ, vers la responsabilité et l’engagement de la conversion permanente.

Chers prêtres, qu’être les premiers à faire l’expérience de la Miséricorde divine et en être les instruments nous éduque à une célébration toujours plus fidèle du sacrement de la pénitence et à une profonde gratitude envers Dieu, qui «nous a confié le ministère de la réconciliation» (
2Co 5,18). Je confie à la Bienheureuse Vierge Marie, Mater misericordiae et Refugium peccatorum, les fruits de votre cours sur le for interne et le ministère de tous les confesseurs, alors que je vous bénis avec une grande affection.

AUX FIDÈLES DU DIOCÈSE DE TERNI-NARNI-AMELIA

À L'OCCASION DU 30e ANNIVERSAIRE DE LA VISITE DE JEAN-PAUL II À TERNI Salle Paul VI Samedi 26 mars 2011



Chers frères et soeurs,

Je suis très heureux de vous accueillir ce matin et d’adresser mon salut cordial aux autorités présentes, aux travailleurs et aux travailleuses ainsi qu’à vous tous qui êtes venus en pèlerinage au Siège de Pierre. J’adresse un salut particulier à votre évêque, Mgr Vincenzo Paglia, que je remercie pour les paroles adressées en votre nom également. Vous êtes venus nombreux à cette rencontre — je suis désolé que certains n’aient pas pu entrer — profitant de l’occasion du trentième anniversaire de la visite de Jean-Paul II à Terni. Aujourd’hui, nous voulons évoquer son souvenir de façon spéciale en raison de l’amour qu’il manifesta pour le monde du travail; nous pouvons presque l’entendre répéter les premières paroles qu’il prononça dès son arrivée à Terni: «Le but particulier de cette visite, qui se déroule le jour de la saint Joseph... est d’apporter une parole d’encouragement à tous les travailleurs [et de leur exprimer] mon amitié, ma solidarité et mon affection» (Discours aux autorités, Terni, 19 mars 1981; cf. ORLF n. 13 du 31 mars 1981). Je fais miens ces sentiments et je vous embrasse de tout coeur, ainsi que vos familles. Le jour de mon élection, je me suis présenté moi aussi comme un «humble ouvrier dans la vigne du Seigneur» et aujourd’hui, avec vous, je voudrais rappeler tous les travailleurs et les confier à la protection de saint Joseph travailleur.

Terni est caractérisée par la présence de l’une des plus grandes aciéries, qui a contribué à la croissance d’une communauté ouvrière importante. Un chemin marqué par des lumières, mais également par des moments difficiles, comme celui que nous vivons aujourd’hui. La crise dans le secteur de l’industrie met à dure épreuve également la vie de la ville, qui doit repenser son avenir. Dans tout cela est également remise en question votre vie de travailleurs et celle de vos familles. Dans les paroles de votre évêque, j’ai entendu l’écho des préoccupations que vous portez dans votre coeur. Je sais que l’Eglise diocésaine les fait siennes et ressent la responsabilité d’être proche de vous pour vous transmettre l’espérance de l’Evangile et la force d’édifier une société plus juste et plus digne de l’homme. Et elle le fait en partant de la source, de l’Eucharistie. Dans sa première lettre pastorale, L’Eucharistie sauve le monde, votre évêque vous a indiqué quelle est la source à laquelle puiser et à laquelle revenir pour vivre la joie de la foi et la passion pour améliorer le monde. L’Eucharistie du dimanche est ainsi devenue le centre de l’action pastorale du diocèse. C’est un choix qui a porté ses fruits, en faisant accroître la participation à l’Eucharistie du dimanche, point de départ de l’engagement du diocèse pour le chemin de votre terre. En effet, de l’Eucharistie, dans laquelle le Christ se rend présent dans son acte suprême d’amour pour nous tous, nous apprenons à habiter la société en chrétiens, pour la rendre plus accueillante, plus solidaire, plus attentive aux besoins de tous, en particulier des plus faibles, plus riche en amour. Saint Ignace d’Antioche, évêque et martyr, définissait les chrétiens comme ceux qui «vivent selon le dimanche» (iuxta dominicum viventes), c’est-à-dire «selon l’Eucharistie». Vivre de façon «eucharistique» signifie vivre comme un unique Corps, une unique famille, une société rassemblée par l’amour. L’exhortation à être «eucharistiques» n’est pas une simple invitation morale adressée à de simples personnes, mais c’est beaucoup plus: c’est l’exhortation à participer au dynamisme même de Jésus qui offre sa vie pour les autres, afin que tous soient un.

C’est dans cette perspective que se situe également le thème du travail, qui vous préoccupe aujourd’hui, avec ses problèmes, en particulier celui du chômage. Il est important de garder toujours à l’esprit que le travail est l’un des éléments fondamentaux tant de la personne que de la société. Les conditions de travail difficiles ou précaires rendent difficiles et précaires les conditions de la société elle-même, les conditions d’une vie organisée selon les exigences du bien commun. Dans l’encyclique Caritas in veritate — comme le rappelait Mgr Paglia — j’ai exhorté à ne pas se lasser de «se donner comme objectif prioritaire l’accès au travail ou son maintien, pour tous» (n. 32). Je voudrais rappeler également le grave problème de la sécurité sur le travail. Je sais que plusieurs fois, vous avez dû affronter également cette réalité tragique. Il faut déployer tous les efforts afin que se brise la chaîne de morts et d’accidents. Et que dire, de plus, de la précarité du travail, surtout quand elle touche le monde des jeunes? C’est un aspect qui ne manque pas de susciter l’angoisse dans de nombreuses familles! Votre évêque évoquait également la situation difficile de l’industrie chimique de votre ville ainsi que les problèmes dans le secteur sidérurgique. Je suis particulièrement proche de vous, en remettant entre les mains de Dieu toutes vos angoisses et vos préoccupations, et je souhaite que, dans la logique de la gratuité et de la solidarité, on puisse surmonter ces moments, afin de garantir un travail sûr, digne et stable.

Chers amis, le travail aide à être plus proches de Dieu et des autres. Jésus lui-même a été un travailleur, il a même passé une grande partie de sa vie terrestre à Nazareth, dans l’atelier de Joseph. L’évangéliste Matthieu rappelle que les gens parlaient de Jésus comme du «fils du charpentier» (Mt 13,55) et à Terni, Jean-Paul ii parla de l’«Evangile du travail», en affirmant qu’il était «écrit surtout par le fait que le Fils de Dieu... en se faisant homme, a travaillé de ses mains. Plus encore, son travail, qui a été vraiment un travail physique, a occupé la plus grande part de sa vie sur cette terre, et il est ainsi entré dans l’oeuvre de la rédemption de l’homme et du monde» (Discours aux ouvriers, Terni 19 mars 1981; cf. ibid.). Cela nous parle déjà de la dignité du travail, et même de la dignité spécifique du travail humain qui s’inscrit dans le mystère même de la rédemption. Il est important de le comprendre dans cette perspective chrétienne. Souvent, au contraire, il est considéré uniquement comme un instrument de profit, ou même, dans diverses situations dans le monde, comme moyen d’exploitation et donc d’offense à la dignité même de la personne. Je voudrais également évoquer le problème du travail le dimanche. Malheureusement, dans nos sociétés, le rythme de la consommation risque de nous priver également du sens de la fête et du dimanche comme jour du Seigneur et de la communauté.

Chers travailleuses et travailleurs, chers amis, je voudrais conclure mes brèves paroles en vous disant que l’Eglise soutient, réconforte, encourage tous les efforts visant à garantir à tous un travail sûr, digne et stable. Le Pape est proche de vous, il est aux côtés de vos familles, de vos enfants, de vos jeunes, des personnes âgées et vous porte tous dans son coeur devant Dieu. Que le Seigneur vous bénisse, ainsi que votre travail et votre avenir. Merci.


VISITE AU MÉMORIAL DES FOSSES ARDÉATINES À ROME Dimanche 27 mars 2011

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Chers frères et soeurs!

C’est très volontiers que j’ai accueilli l’invitation de l’«Association nationale des Familles italiennes des martyrs morts pour la liberté de la patrie» à accomplir un pèlerinage à ce mémorial, cher à tous les Italiens, en particulier au peuple romain. Je salue le cardinal-vicaire, le grand rabbin, le président de l’association, le commissaire général, le directeur du Mausolée et, de manière particulière, les familles des victimes, ainsi que toutes les personnes présentes.

«Je crois en Dieu et dans l’Italie / je crois dans la résurrection / des martyrs et des héros / je crois dans la renaissance / de la patrie et dans la / liberté du peuple». Ces mots ont été gravés sur les murs d’une cellule de torture, à via Tasso, à Rome, au cours de l’occupation nazie. Ils sont le testament d’une personne inconnue, qui fut emprisonnée dans cette cellule, et elles démontrent que l’esprit humain reste libre même dans les conditions les plus dures. «Je crois en Dieu et dans l’Italie»: cette expression m’a frappé, également parce que l’on fête cette année le 150ème anniversaire de l’unité de l’Italie, mais surtout parce qu’elle affirme le primat de la foi, à laquelle puiser la confiance et l’espérance pour l’Italie et pour son avenir. Ce qui s’est passé ici, le 24 mars 1944, est une très grave offense à Dieu, car il s’agit de la violence délibérée de l’homme sur l’homme. C’est l’effet le plus exécrable de la guerre, de chaque guerre, alors que Dieu est vie, paix, communion.

Comme mes prédécesseurs, je suis venu ici pour prier et rappeler la mémoire. Je suis venu invoquer la Miséricorde divine, qui seule peut combler les vides, les ravins ouverts par les hommes lorsque, poussés par la violence aveugle, ils renient leur propre dignité de fils de Dieu et de frères entre eux. Moi aussi, en tant qu’Evêque de Rome, ville consacrée par le sang des martyrs de l’Evangile de l’amour, je viens rendre hommage à ces frères, tués non loin des antiques catacombes.

«Je crois en Dieu et dans l’Italie». Dans ce testament gravé sur un lieu de violence et de mort, le lien entre la foi et l’amour de la patrie apparaît dans toute sa pureté, sans aucune rhétorique. Celui qui a écrit ces mots l’a fait uniquement par conviction intime, comme témoignage extrême à la vérité crue, qui rend l’âme humaine royale, même dans son abaissement le plus extrême. Chaque homme est appelé à réaliser de cette manière sa propre dignité: en témoignant de cette vérité qu’il reconnaît avec sa propre conscience.

Un autre témoignage m’a frappé, et celui-ci fut retrouvé précisément dans les «Fosses ardéatines». Une feuille de papier sur laquelle une victime avait écrit: «Dieu, mon Père très grand, nous te prions afin que tu puisses protéger les juifs des persécutions barbares. 1 Pater noster, 10 Ave Maria, 1 Gloria Patri». A ce moment si tragique, si inhumain, dans le coeur de cette personne se trouvait l’invocation la plus élevée: «Dieu, mon Père très grand». Le Père de tous! Comme sur les lèvres de Jésus, mourant sur la croix: «Père, je remets mon esprit entre tes mains». Dans ce nom, «Père», se trouve la garantie sûre de l’espérance; la possibilité d’un avenir différent, libéré de la haine et de la vengeance, un avenir de liberté et de fraternité, pour Rome, l’Italie, l’Europe, le monde. Oui, partout où il se trouve, dans chaque continent, quel que soit le peuple auquel il appartient, l’homme est le fils de ce Père qui est dans les cieux, il est le frère de tous en humanité. Mais cet être fils et frère n’est pas automatique. C’est ce que démontrent malheureusement également les «Fosses ardéatines». Il faut le vouloir, il faut dire oui au bien et non au mal. Il faut croire dans le Dieu de l’amour et de la vie, et rejeter tout autre fausse image divine, qui trahit son saint Nom et qui trahit en conséquence l’homme, fait à son image.

C’est pourquoi, en ce lieu, douloureux mémorial du mal le plus horrible, la réponse la plus vraie est celle de se prendre par la main, comme des frères, et de dire: Notre Père, nous croyons en Toi, et avec la force de ton amour nous voulons marcher ensemble, en paix, à Rome, en Italie, en Europe, dans le monde entier. Amen.


AUX ÉVÊQUES DE RITE SIRO-MALABAR EN VISITE «AD LIMINA APOSTOLORUM» Salle du Consistoire Jeudi 7 avril 2011

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Chers frères évêques,

Je vous souhaite avec affection une bienvenue fraternelle, à l’occasion de votre visite ad limina Apostolorum à un moment tristement marqué par la mort du cardinal Varkey Vithayathil. Face à vous tous, je désire encore une fois rendre grâce à Dieu pour le service efficace et plein de bonne volonté qu’il a prêté pendant de nombreuses années à l’Eglise qui est en Inde. Que notre Sauveur plein d’amour accueille sa noble âme au paradis et qu’il repose en paix, en communion avec tous les saints.

Je vous remercie pour les sentiments de respect et d’estime exprimés par Mar Bosco Puthur en votre nom et au nom de ceux que vous administrez. Votre présence est une expression éloquente des profonds liens spirituels qui unissent l’Eglise syro-malabare à l’Eglise universelle, en fidélité à la prière du Christ pour tous ses disciples (cf.
Jn 17,21). Vous apportez sur les tombes des Apôtres Pierre et Paul les joies et les espérances de toute l’Eglise syro-malabare, que mon prédécesseur, le vénérable Jean-Paul II, a élevée avec joie au statut d’Eglise archiépiscopale majeure en 1992. J’adresse mes salutations aux prêtres, aux religieux, hommes et femmes, aux membres des mouvements laïcs, aux familles et en particulier aux jeunes qui sont l’espérance de l’Eglise.

Le Concile Vatican II a enseigné que «les évêques, eux aussi, établis par le Saint-Esprit, succèdent aux apôtres comme pasteurs des âmes: ils ont été envoyés pour assurer, en union avec le Souverain Pontife et sous son autorité, la pérennité de l’oeuvre du Christ, pasteur éternel» (Christus Dominus CD 2). La rencontre d’aujourd’hui constitue donc une partie essentielle de votre pèlerinage ad limina Apostolorum. Il s’agit également d’une occasion pour intensifier la conscience du don divin et de la responsabilité reçus lors de l’ordination, avec laquelle vous êtes devenus membres du collège épiscopal. Je m’unis à vous pour demander l’intercession des Apôtres pour votre ministère. Ces derniers, qui furent les premiers à recevoir le mandat de garder le troupeau du Christ, continuent à guider l’Eglise et à veiller sur elle, de là où ils sont au ciel, et ils demeurent un modèle et une source d’inspiration pour tous les évêques à travers leur sainteté de vie, leur enseignement et leur exemple.

Votre visite offre également une occasion précieuse de rendre grâce à Dieu pour le don de communion dans la foi apostolique et dans la vie de l’Esprit qui vous permet d’être unis entre vous et avec votre peuple. Avec l’inspiration et la grâce divines, d’une part, et avec d’humbles efforts et prières, de l’autre, ce don précieux de communion avec le Dieu Un et Trine et entre vous deviendra toujours plus riche et plus profond. Chaque évêque, quant à lui, est appelé à être un ministre d’unité (cf. ibid., n. 6) dans son Eglise particulière et dans l’Eglise universelle. Cette responsabilité revêt une importance particulière dans un pays comme l’Inde, où l’unité de l’Eglise se reflète dans la riche diversité de ses rites et de ses traditions. Je vous encourage à faire tout le possible pour promouvoir la communion entre vous et avec tous les évêques catholiques dans le monde, et à être l’expression vivante de cette communion entre vos prêtres et les fidèles. Que l’avertissement délicat de saint Paul continue à guider vos coeurs et vos efforts apostoliques: «Fuyez le mal avec horreur, attachez-vous au bien. Soyez unis les uns aux autres par l’action fraternelle, rivalisez de respect les uns pour les autres» (Rm 12,9-10 Rm 12,16). L’unité du Dieu Un et Trine sera ainsi proclamée et vécue dans le monde, et notre vie dans le Christ sera donc vécue toujours plus profondément au bénéfice de toute l’Eglise catholique.

Au sein de ce mystère de communion aimante, une expression privilégiée de partage de la vie divine est constituée par le mariage sacramentel et par la vie familiale. Les changements rapides et importants qui définissent la société actuelle dans le monde entier présentent non seulement des défis importants, mais offrent également de nouvelles possibilités de proclamer la vérité libératrice du message évangélique, pour transformer et élever toutes les relations humaines. Chers frères évêques, votre soutien et celui de vos prêtres et de vos communautés en vue de l’éducation solide et intégrale des jeunes, dans la chasteté et dans la responsabilité, leur permettront non seulement d’accueillir la nature authentique du mariage, mais seront également bénéfiques à la culture indienne tout entière. Malheureusement, l’Eglise ne peut plus compter sur le soutien de la société dans son ensemble pour promouvoir la conception chrétienne du mariage comme union permanente et indissoluble visant à la procréation et à la sanctification des conjoints. Faites en sorte que vos familles se tournent vers le Seigneur et sa parole salvifique pour une vision complète et authentiquement positive de la vie et des relations conjugales, si nécessaire pour le bien de toute la famille humaine. Que votre prédication et votre catéchèse dans ce domaine soient patientes et constantes.

Au coeur d’un grand nombre des oeuvres d’éducation et de charité accomplies dans vos éparchies se trouvent diverses communautés de religieux, hommes et femmes, qui se consacrent au service de Dieu et de leur prochain. Je désire exprimer combien l’Eglise apprécie la charité, la foi et le dur travail de ces religieux, qui en professant et en vivant les conseils évangéliques de pauvreté, chasteté et obéissance, offrent un exemple de dévotion complète au divin Maître et, de cette manière, contribuent considérablement à une bonne préparation de vos fidèles pour chaque bonne oeuvre (cf. 2Tm 3,17). La vocation à la vie religieuse et la recherche de la charité parfaite sont attirantes à chaque âge, mais elles devraient être nourries par un renouveau spirituel constant promu par des supérieurs qui consacrent une grande attention à la formation humaine, intellectuelle et spirituelle de leurs confrères religieux (cf. Perfectae caritatis PC 11). L’Eglise insiste afin que la préparation à la profession religieuse soit caractérisée par un discernement long et attentif visant à garantir, avant les voeux définitifs, que chaque candidat soit profondément enraciné dans le Christ, solide dans sa capacité d’engagement authentique, et joyeux dans le don de soi à Jésus Christ et à son Eglise. En outre, par sa nature même, la formation n’est jamais complète, mais elle est permanente et doit faire partie intégrante de la vie quotidienne de chaque individu et communauté. Il y a beaucoup à faire dans ce secteur, en utilisant les nombreuses ressources disponibles dans votre Eglise, en particulier à travers une formation plus profonde de la pratique de la prière, les traditions spirituelles et liturgiques particulières du rite syro-malabar et les exigences intellectuelles d’une solide pratique pastorale. Je vous encourage à planifier de manière efficace, en étroite collaboration avec les supérieurs religieux, cette solide formation permanente de manière à ce que les religieux, hommes et femmes, continuent à être des témoins efficaces de la présence de Dieu dans le monde et de notre destin éternel, afin que le don complet de soi à Dieu à travers la vie religieuse puisse resplendir dans toute sa beauté et sa pureté face aux hommes.

Chers frères et soeurs, avec ces réflexions, je vous exprime encore une fois mon affection fraternelle et mon estime. En vous confiant à l’intercession de saint Thomas, Apôtre de l’Inde, je vous assure de mes prières pour vous et pour ceux qui sont confiés à votre sollicitude pastorale. Je donne à tous ma bénédiction apostolique en gage de grâce et de paix dans le Seigneur.


Discours 2005-2013 1245