Discours 2005-2013 18420

CÉRÉMONIE DE CONGÉ Aéroport international de Malte - Luqa Dimanche 18 avril 2010

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Monsieur le Président,
Excellences
Mesdames et Messieurs,

Le temps est venu pour moi de dire adieu à Malte. Je remercie le Seigneur de l’opportunité qui m’a été donnée d’avoir rencontré un si grand nombre d’entre vous et d’avoir visité cette île. Je remercie Monsieur le Président de ses mots aimables et je vous remercie tous, qui m’avez accueilli si chaleureusement et si généreusement. Mon voyage m’a permis d’appréhender de façon plus profonde à quel point l’Évangile annoncé par saint Paul a modelé l’identité spirituelle du Peuple maltais. Alors que je vous quitte, laissez moi vous encourager une nouvelle fois à cultiver une conscience attentive de votre identité et de prendre les responsabilités qui en découlent, particulièrement en promouvant les valeurs de l’Évangile qui vous offriront une vision claire de la dignité humaine ainsi que de l’origine et de la destinée communes du genre humain.

Soyez un exemple, chez vous et à l’étranger, d’une vie chrétienne dynamique. Soyez fiers de votre vocation chrétienne. Chérissez votre héritage culturel et religieux. Regardez l’avenir avec espérance, avec un égard profond pour la création de Dieu, avec un respect religieux de la vie humaine, avec une haute estime pour le mariage et pour l’intégrité de la famille ! Soyez de bons fils et filles de saint Paul !

En raison de sa position géographique au coeur de la Méditerranée, beaucoup de migrants arrivent sur les côtes maltaises, certains fuyants des situations de violence et de persécution, d’autres, à la recherche de meilleures conditions de vie. Je suis conscient des difficultés que l’accueil d’un grand nombre de personnes peut provoquer ; ce sont des difficultés qui ne peuvent être résolues seul par aucun pays de premier accueil. En même temps, je suis sûr aussi que, s’appuyant sur la force de ses racines chrétiennes et sur sa longue et glorieuse tradition d’accueil des étrangers, Malte cherchera, avec l’aide des autres États et des Organisations internationales, à venir en aide à ceux qui arrivent ici et à s’assurer que leurs droits soient respectés.

Ces nobles objectifs dépendent d’un engagement inébranlable en faveur du dialogue et de la coopération au sein des communautés européenne et internationale, lieux-clefs dans lesquels Malte rend témoignage aux valeurs chrétiennes qui ont contribué à former son identité. Unité, solidarité et respect mutuel sont à la base de votre vie politique et sociale. Inspirées par votre foi catholique, elles constituent une boussole qui vous guidera dans la recherche de l’authentique développement intégral. Que le trésor de l’enseignement social guide et inspire ces efforts. Ne permettez pas que votre véritable identité soit compromise par l’indifférentisme ou le relativisme. Puissiez-vous toujours demeurer fidèles à l’enseignement de saint Paul, qui vous exhorte encore : « Veillez, demeurez fermes dans la foi, soyez des hommes, soyez forts. Que tout se passe chez vous dans la charité » (
1Co 16,13-14). Merci infiniment et que Dieu vous bénisse !


À S.E. M. GIOKO GJORGJEVSKI, NOUVEL AMBASSADEUR DE L'EX-RÉPUBLIQUE YOUGOSLAVE DE MACÉDOINE PRÈS LE SAINT-SIÈGE Jeudi 22 avril 2010

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Monsieur l'ambassadeur,

Je suis heureux d'accueillir Votre Excellence pour la présentation des Lettres qui l'accréditent comme ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de l'ex-République yougoslave de Macédoine près le Saint-Siège. Je vous suis reconnaissant pour les paroles cordiales que vous m'avez exprimées, également au nom des autorités et de la noble nation que vous représentez. Je vous prie de leur transmettre l'expression de mon estime et ma bienveillance, unies à l'assurance de ma prière pour la concorde et le développement harmonieux de tout le pays.

En vous recevant, ma pensée va à la rencontre annuelle entre le Successeur de Pierre et une délégation officielle de haut rang de votre pays, qui se tient à l'occasion de la fête des saints Cyrille et Méthode, guides spirituels vénérés des peuples slaves et co-patrons de l'Europe. Ce rendez-vous, devenu une agréable coutume, atteste des bonnes relations qui existent entre le Saint-Siège et l'ex-République yougoslave de Macédoine. Il s'agit de relations bilatérales, qui se sont développées, en particulier au cours des dernières années, de façon positive, et qui sont caractérisées par une coopération cordiale. A ce propos, je désire exprimer mon appréciation pour l'engagement réciproque manifesté dans la construction récente de nouveaux édifices de culte catholiques dans divers lieux du pays.

Comme vous l'avez souligné, chez le peuple macédonien sont bien visibles les signes des valeurs humaines et chrétiennes, incarnées dans la vie des personnes, qui constituent le patrimoine spirituel et culturel apprécié de la nation, dont témoignent de façon tout aussi éloquente les magnifiques monuments religieux apparus à diverses époques et dans divers lieux, en particulier dans la ville d'Ohrid. Le Saint-Siège nourrit pour ce précieux héritage une grande estime et considération, et en favorise, dans la mesure de ses compétences, l'approfondissement historique et documentaire, en vue d'une plus grande connaissance du passé religieux et culturel. En puisant à ce patrimoine, les citoyens de votre pays continueront d'édifier à l'avenir également leur histoire et, forts de leur identité spirituelle, pourront apporter à l'ensemble des peuples européens la contribution de leur expérience. Pour cela, je souhaite vivement qu'aboutissent les aspirations et les efforts croissants de ce pays en vue de faire partie de l'Europe unie, dans une situation de reconnaissance des droits et des devoirs relatifs, et dans le respect réciproque des instances collectives et des valeurs traditionnelles de chaque peuple.

Monsieur l'ambassadeur, dans les paroles que vous avez prononcées à propos de l'engagement du peuple macédonien en vue de favoriser toujours plus le dialogue et la coexistence entre les divers groupes ethniques et religieux qui constituent votre pays, j'ai perçu l'aspiration universelle à la justice et à la cohésion intérieure qui l'anime depuis toujours et qui peut devenir un exemple pour d'autres dans la région des Balkans. En effet, les ponts d'échange en vue de plus amples ententes et de plus étroites relations religieuses entre les diverses composantes de la société macédonienne, ont favorisé la création d'un climat dans lequel les personnes se reconnaissent comme frères, fils de l'unique Dieu et citoyens de l'unique pays. Il est certain qu'il est du devoir en premier lieu des institutions d'identifier les modalités pour traduire en initiatives politiques les aspirations des hommes et des femmes au dialogue et à la paix. Toutefois, les croyants savent que la paix n'est pas seulement le fruit de planifications et d'activités humaines, mais avant tout un don de Dieu aux hommes de bonne volonté. La justice et le pardon représentent en outre les piliers fondamentaux de cette paix. La justice assure le plein respect des droits et des devoirs et le pardon guérit et reconstruit sur de nouvelles bases les relations entre les personnes, qui souffrent encore des conséquences des conflits entre les idéologies du passé récent.

Après avoir surmonté la période tragique de la dernière guerre mondiale, après la triste expérience d'un totalitarisme niant les droits fondamentaux de la personne humaine, le peuple de Macédoine a progressivement connu un progrès harmonieux, en faisant preuve de patience, de disponibilité au sacrifice et d'optimisme persévérant, tendant avec ténacité vers la création d'un avenir meilleur pour tous ses habitants. Un développement social et économique stable ne peut manquer de tenir compte des exigences culturelles, sociales et spirituelles des personnes, et doit également mettre en valeur les traditions et les ressources populaires les plus nobles. Et ce, dans la conscience que le phénomène croissant de la mondialisation qui comporte, d'une part, un certain nivellement des différences sociales et économiques, pourrait, d'autre part, aggraver le déséquilibre entre ceux qui tirent profit des possibilités toujours plus grandes de produire des richesses et ceux qui, au contraire, sont laissés en marge du progrès.

Monsieur l'ambassadeur, votre pays possède une longue et lumineuse tradition chrétienne, qui remonte aux temps apostoliques. Je souhaite que dans un contexte mondial de relativisme moral et de manque d'intérêt pour l'expérience religieuse, dans lequel se trouve souvent une partie de la société européenne, les citoyens du noble peuple que vous représentez sachent accomplir un sage discernement en s'ouvrant aux nouveaux horizons de civilisation authentique et de véritable humanisme. Pour ce faire, il convient de maintenir vivants et solides, au niveau personnel et communautaire, les principes qui sont à la base également de la civilisation de ce peuple: l'attachement à la famille, la défense de la vie humaine, la promotion des exigences de la vie religieuse, en particulier des jeunes. L'Eglise catholique dans votre nation, même si elle constitue une minorité, désire offrir une contribution sincère à la construction d'une société plus juste et solidaire, fondée sur les valeurs chrétiennes qui ont fécondé la conscience de ses habitants. Je suis certain que la communauté catholique, dans la conscience que la charité dans la vérité « est la force dynamique essentielle du vrai développement de chaque personne et de l'humanité tout entière » (Caritas in veritate, ), poursuivra sa mission caritative, si appréciée dans votre pays, en particulier en faveur des pauvres et des personnes qui souffrent.

Excellence, je suis certain que vous aussi, dans l'accomplissement de la haute mission qui vous est confiée, vous contribuerez à intensifier les relations déjà bonnes existant entre le Saint-Siège et la nation macédonienne, et je vous assure, à cette fin, de la disponibilité de tous mes collaborateurs de la Curie romaine. Avec ces voeux fervents, j'invoque sur vous, Monsieur l'ambassadeur, sur votre famille, ainsi que sur les gouvernants et sur tous les habitants de votre nation, une abondance de Bénédictions divines.



À S. E. M. CHARLES GHISLAIN, NOUVEL AMBASSADEUR DE BELGIQUE PRÈS LE SAINT-SIÈGE Samedi 24 avril 2010

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Monsieur l'Ambassadeur,

Je suis heureux de vous accueillir en cette circonstance de la présentation des Lettres qui vous accréditent en qualité d'Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de Belgique près le Saint-Siège. Je vous remercie pour les paroles que vous m’avez adressées. En retour, je vous saurai gré de bien vouloir exprimer à Sa Majesté Albert II, Roi des Belges, que j’ai pu saluer personnellement il y a peu, mes voeux cordiaux pour Sa Personne ainsi que pour le bonheur et la réussite du peuple belge. A travers vous, je salue également le Gouvernement et toutes les autorités du Royaume.

Votre pays a connu au début de cette année deux tragédies douloureuses de Liège et de Buizingen. Je désire renouveler aux familles endeuillées et aux victimes l’assurance de ma proximité spirituelle. Ces catastrophes nous font mesurer la fragilité de l’existence humaine et la nécessité, pour la protéger, d’une authentique cohésion sociale que n’affaiblit pas la légitime diversité des opinions. Elle repose sur la conviction que la vie et la dignité humaines constituent un bien précieux qu’il faut défendre et promouvoir avec résolution en s’appuyant sur le droit naturel. Depuis longtemps, l’Eglise s’inscrit pleinement dans l’histoire et dans le tissu social de votre Nation. Elle souhaite continuer à être un facteur de convivialité harmonieuse entre tous. Pour cela, elle apporte une contribution très active notamment par ses nombreuses institutions d’éducation, ses oeuvres à caractère social, et par l’engagement bénévole de très nombreux fidèles. L’Église est ainsi heureuse de se mettre au service de toutes les composantes de la société belge.

Toutefois, il ne paraît pas inutile de souligner qu’elle possède, en tant qu’institution, un droit à s’exprimer publiquement. Elle le partage avec tous les individus et toutes les institutions pour livrer son avis sur les questions d’intérêt commun. L’Église respecte la liberté pour tous de penser autrement qu’elle ; elle aimerait aussi que soit respecté son droit d’expression. L’Église est dépositaire d’un enseignement, d’un message religieux qu’elle a reçu du Christ-Jésus. Il peut se résumer par ces mots de l’Écriture Sainte : « Dieu est amour » (
1Jn 4,16) et il projette sa lumière sur le sens de la vie personnelle, familiale et sociale de l’homme. L’Église, ayant pour objectif le bien commun, ne réclame rien d’autre que la liberté de pouvoir proposer ce message, sans l’imposer à quiconque, dans le respect de la liberté des consciences.

C’est en se nourrissant de cet enseignement ecclésial de manière radicale que Joseph de Veuster est devenu celui que l’on appelle désormais « Saint Damien ». La destinée exceptionnelle de cet homme montre à quel point l’Évangile suscite une éthique amie de la personne, surtout si elle est dans le besoin ou rejetée. La canonisation de ce prêtre et la renommée dont il jouit universellement est un motif de légitime fierté pour le peuple belge. Cette personnalité attachante n’est pas le fruit d’un itinéraire solitaire. Il est bon de se souvenir des racines religieuses qui ont nourri son éducation et sa formation, ainsi que des pédagogues qui ont éveillé en lui cette admirable générosité. Elle lui fera partager la vie marginalisée des lépreux, jusqu’à s’exposer au mal dont ils souffraient. Dans la lumière de tels témoins, il est possible à tous de comprendre que l’Évangile est une force dont il n’y a pas lieu d’avoir peur. Je suis convaincu que, malgré les évolutions sociologiques, le terreau chrétien est encore riche sur votre terre. Il peut nourrir généreusement l’engagement d’un nombre croissant de volontaires qui, inspirés des principes évangéliques de fraternité et de solidarité, accompagnent les personnes qui connaissent des difficultés et qui, pour cette raison, ont besoin d’être aidées.

Votre pays, qui accueille déjà le siège des Institutions communautaires, a vu sa vocation européenne une nouvelle fois réaffirmée à travers le choix de l’un de vos compatriotes comme premier Président du Conseil européen. À l’évidence, ces choix successifs ne sont pas liés à la seule position géographique de votre pays et à son multilinguisme. Membre du noyau primitif des pays fondateurs, votre Nation a dû s’impliquer et se distinguer dans la recherche d’un consensus dans des situations très complexes. Cette qualité doit être encouragée à l’heure d’affronter, pour le bien de tous, les défis internes du pays. Je désire souligner aujourd’hui que pour porter du fruit à long terme, l’art du consensus ne se réduit pas à une habileté purement dialectique, mais doit rechercher le vrai et le bien. Car « sans vérité, sans confiance et sans amour du vrai, il n’y a pas de conscience ni de responsabilité sociale, et l’agir social devient la proie d’intérêts privés et de logiques de pouvoir, qui ont pour effets d’entrainer la désagrégation de la société, et cela d’autant plus dans une société en voie de mondialisation et dans les moments difficiles comme ceux que nous connaissons actuellement » (Caritas in veritate ).

Profitant de notre rencontre, je souhaite saluer chaleureusement les Evêques de Belgique que j’aurai le plaisir d’accueillir très prochainement lors de leur visite ad Limina Apostolorum. Ma pensée va en particulier à Son Excellence Monseigneur Léonard qui, avec enthousiasme et générosité, a commencé, depuis peu, sa nouvelle mission d’Archevêque de Malines-Bruxelles. Je veux aussi saluer les prêtres de votre pays, et les diacres ainsi que tous les fidèles qui forment la communauté catholique belge. Je les invite à témoigner de leur foi avec audace. Dans leurs engagements dans la cité, qu’ils fassent valoir pleinement leur droit de proposer des valeurs qui respectent la nature humaine et qui correspondent aux aspirations spirituelles les plus profondes et les plus authentiques de la personne.

Au moment où vous inaugurez officiellement vos fonctions auprès du Saint-Siège, je forme les souhaits les meilleurs pour l’heureux accomplissement de votre mission. Soyez sûr, Monsieur l'Ambassadeur, de toujours trouver auprès de mes collaborateurs une attention et une compréhension cordiales. En invoquant l’intercession de la Vierge Marie et de saint Damien, je prie le Seigneur de répandre de généreuses bénédictions sur vous-même, sur votre famille et sur vos collaborateurs, ainsi que sur le peuple belge et sur ses dirigeants.



AU CONGRÈS NATIONAL ORGANISÉ PAR LA CEI: « TÉMOINS NUMÉRIQUES. VISAGES ET LANGAGES À L’ÈRE CROSS-MÉDIA », Salle Paul VI Samedi 24 avril 2010

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Eminence,
Vénérés confrères dans l'épiscopat,
Chers amis,

Je suis heureux de cette occasion de vous rencontrer et de conclure votre congrès, au titre tellement évocateur: « Témoins numériques. Visages et langages à l'ère cross-media ». Je remercie le président de la Conférence épiscopale italienne, le cardinal Angelo Bagnasco, pour ses paroles cordiales de bienvenue, par lesquelles une fois encore, il a voulu exprimer l'affection et la proximité de l'Eglise qui est en Italie à mon service apostolique. Dans vos paroles, Monsieur le cardinal, se reflète la fidèle adhésion à Pierre de tous les catholiques de cette bien-aimée nation, et l'estime de tant d'hommes et de femmes animés du désir de chercher la vérité.

Le temps que nous vivons connaît une immense extension des frontières de la communication, réalise une convergence inédite entre les différents médias et rend possible l'interactivité. Internet manifeste donc une vocation ouverte, à tendance égalitaire et pluraliste, mais en même temps, il souligne un nouveau fossé: on parle en effet du « fossé numérique ». Il sépare les « inclus » des « exclus », et vient s'ajouter aux autres fossés qui éloignent déjà les nations entre elles et aussi à l'intérieur d'elles-mêmes. Les dangers d'uniformisation et de contrôle augmentent aussi, de même que le danger du relativisme intellectuel et moral, déjà bien reconnaissables dans le fléchissement de l'esprit critique, dans la vérité réduite à un jeu d'opinions, dans les multiples formes de dégradation et d'humiliation de l'intimité de la personne. On assiste alors à une « pollution de l'esprit qui rend nos visages moins souriants, plus sombres, qui nous conduit à ne pas nous saluer entre nous, à ne pas nous regarder en face... » (Discours place d'Espagne, 8 décembre 2009; cf. ORLF n. 49 du 8 décembre 2009). Ce congrès vise, au contraire, à reconnaître des visages, donc à surmonter ces dynamiques collectives qui peuvent nous faire perdre la perception de la profondeur des personnes et rester à leur surface: lorsque cela se produit, elles restent des corps sans âmes, des objets d'échange et de consommation.

Comment est-il possible aujourd'hui de revenir aux visages? J'ai tenté d'indiquer la voie dans ma troisième encyclique. Elle passe par cette caritas in veritate qui brille sur le visage du Christ. L'amour dans la vérité constitue « un grand défi pour l'Eglise dans un monde sur la voie d'une mondialisation progressive et généralisée » (n. 9). Les médias peuvent devenir des facteurs d'humanisation « non seulement quand, grâce au développement technologique, ils offrent de plus grandes possibilités de communication et d'information, mais surtout quand ils sont structurés et orientés à la lumière d'une image de la personne et du bien commun qui en respecte les valeurs universelles » (n. 73). Cela exige qu'ils « aient pour objectif principal la promotion de la dignité des personnes et des peuples, qu'ils soient expressément animés par la charité et mis au service de la vérité, du bien et d'une fraternité naturelle et surnaturelle » (ibid.). C'est seulement à ces conditions que la transition historique que nous sommes en train de traverser peut se révéler riche et féconde en nouvelles opportunités. Nous voulons sans peur avancer au large sur la mer numérique, en affrontant la navigation ouverte avec la même passion qui depuis deux mille ans, gouverne la barque de l'Eglise. Plus que pour les ressources techniques, bien qu'elles soient nécessaires, nous voulons nous distinguer en vertu du fait que nous habitons dans cet univers également avec un coeur de croyant, qui contribue à donner une âme au flux ininterrompu de communication sur Internet.

Voici quelle est notre mission, une mission à laquelle l'Eglise ne saurait renoncer: la tâche de tout croyant qui agit dans les médias est celle « d'ouvrir la route à de nouvelles rencontres, en assurant toujours la qualité du contact humain et l'attention aux personnes ainsi qu'à leurs vrais besoins spirituels, en donnant aux hommes qui vivent notre temps numérique les signes nécessaires pour reconnaître le Seigneur » (Message pour la 44e Journée mondiale des communications sociales, 16 mai 2010; cf. ORLF n. 4 du 26 janvier 2010). Chers amis, sur Internet aussi, vous êtes appelés à vous situer en tant qu'« animateurs de communautés », attentifs à « préparer les chemins qui mènent à la Parole de Dieu » et à exprimer une sensibilité particulière pour ceux qui « sont découragés et ont dans le coeur des désirs d'absolu et de vérités non éphémères » (ibid.). Internet pourra ainsi devenir une sorte de « parvis des païens » où « ouvrir un espace à ceux pour qui Dieu est encore inconnu » (ibid.).

En tant qu'animateurs de la culture et de la communication, vous êtes un signe vivant de ce que les « moyens modernes de communication font désormais partie des instruments ordinaires par lesquels les communautés ecclésiales s'expriment, en entrant en contact avec leur territoire et en instaurant très souvent des formes de dialogue à plus large échelle » (ibid.).

En Italie, les voix ne manquent pas dans ce domaine: il suffit de mentionner le quotidien Avvenire, la chaîne de télévision TV2000, le réseau radiophonique inBlu et l'agence de presse SIR, aux côtés des revues catholiques, du réseau des hebdomadaires diocésains et des nombreux sites Internet d'inspiration catholique. J'exhorte tous les professionnels de la communication à ne pas se lasser de nourrir dans leur coeur une saine passion pour l'homme qui devient une tension pour se rapprocher toujours davantage de ses langages et de son vrai visage. Vous serez aidés en cela par une solide préparation théologique et surtout une profonde et joyeuse passion pour Dieu, nourrie par un dialogue incessant avec le Seigneur. Pour leur part, que les Eglises particulières et les instituts religieux n'hésitent pas à mettre en valeur les parcours de formation proposés par les Universités pontificales, l'Université catholique du Sacré-Coeur, et d'autres universités catholiques et ecclésiastiques, en y destinant avec prévoyance des personnes et des ressources. Que le monde de la communication sociale entre à plein titre dans les programmes pastoraux.

Je vous remercie du service que vous rendez à l'Eglise et donc à la cause de l'homme, et je vous exhorte à aller sur les routes du continent numérique animés du courage de l'Esprit Saint; notre confiance ne repose pas de façon a-critique sur quelque instrument technique. Notre force réside dans le fait d'être Eglise, communion croyante, capable de témoigner auprès de tous de l'éternelle nouveauté du Ressuscité, par une vie qui fleurit en plénitude dans la mesure où elle s'ouvre, entre en relation, se donne gratuitement.

Je vous confie à la Très Sainte Vierge Marie et aux grands saints de la communication et je vous bénis de tout coeur.


DÉJEUNER AVEC LES MEMBRES DU COMITÉ « VOX CLARA » Casina Pie IV Mercredi 28 avril 2010

Chers frères dans l'épiscopat,
membres et conseillers
du Comité « Vox Clara »,
révérends pères,

Je vous remercie pour le travail que « Vox Clara » a accompli au cours des huit dernières années, en assistant et en conseillant la Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements dans l'accomplissement de ses responsabilités relatives à la traduction en anglais des textes liturgiques. Il s'est agit d'une entreprise véritablement collégiale. Non seulement les membres du Comité représentent les cinq continents, mais vous vous êtes appliqués à rassembler les contributions des Conférences épiscopales des territoires anglophones partout dans le monde. Je vous remercie pour le grand engagement dont vous avez fait preuve dans l'étude des traductions et l'élaboration des résultats des nombreuses consultations qui ont été menées. Je remercie les assistants experts qui ont offert le fruit de leurs recherches en vue d'apporter un service à l'Eglise universelle. Et je remercie les supérieurs et les fonctionnaires de la Congrégation pour leur travail quotidien et difficile de supervision de la rédaction et de la traduction de textes qui proclament la vérité de notre rédemption dans le Christ, le Verbe incarné de Dieu.

Saint Augustin a parlé de façon merveilleuse de la relation entre Jean le Baptiste, la vox clara qui retentissait sur les rives du Jourdain, et la Parole qu'il annonçait. Une voix, a-t-il dit, sert à partager avec celui qui écoute le message qui est déjà présent dans le coeur de celui qui parle. Une fois que la parole a été prononcée, elle est présente dans le coeur des deux personnes, c'est alors que sa voix, ayant accompli sa tâche, peut disparaître (cf. Sermon 293). Je suis heureux d'apprendre que la traduction en anglais du Missel romain sera bientôt prête pour la publication, de sorte que les textes que vous avez passé tant de temps à préparer puissent être proclamés dans la liturgie qui est célébrée dans le monde anglophone. A travers ces textes sacrés et les actions qui les accompagnent, le Christ sera présent et agissant au milieu de son peuple. La voix qui a contribué à faire naître ces paroles aura accompli sa tâche.

Une autre tâche se présentera alors, qui n'est pas de la compétence directe de « Vox Clara », mais qui, d'une façon ou d'une autre, vous concernera tous – celle de préparer l'accueil de la nouvelle traduction de la part du clergé et des fidèles laïcs. De nombreuses personnes auront des difficultés à s'adapter à des textes nouveaux, après avoir fait constamment usage, pendant près de 40 ans, des traductions précédentes. Le changement devra être introduit avec une sensibilité adaptée, et l'opportunité de catéchèse qui se présente devra être saisie de façon résolue. Je prie pour que, de cette façon, tout risque de confusion ou de désorientation soit évité, et que le changement serve au contraire de tremplin pour un renouveau et un approfondissement de la dévotion eucharistique partout dans le monde anglophone.

Chers frères dans l'épiscopat, révérends pères, chers amis, je voudrais que vous sachiez combien j'apprécie l'important effort de collaboration auquel vous avez contribué. Bientôt, les fruits de votre labeur seront à la disposition des Congrégations anglophones partout dans le monde. Tandis que les prières du peuple de Dieu s'élèvent devant lui comme un encens (cf. Psaume, Ps 140,2), puissent les Bénédictions du Seigneur descendre sur tous ceux qui ont contribué, en offrant leur temps et leurs compétences, à la préparation des textes dans lesquels ces prières sont exprimées. Merci, et puissiez-vous être abondamment récompensés pour votre service généreux au peuple de Dieu.



À S. E. M. JEAN-PIERRE HAMULI MUPENDA,: NOUVEL AMBASSADEUR DE LA RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO PRÈS LE SAINT-SIÈGE Samedi 24 avril 2010

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Monsieur l’Ambassadeur,

Il m’est agréable de Vous recevoir à l’occasion de la présentation des Lettres qui vous accréditent en qualité d’Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de la République Démocratique du Congo près le Saint-Siège. Je vous remercie de vos aimables paroles, par lesquelles vous me transmettez l’hommage respectueux du Président de la République, Son Excellence Monsieur Joseph Kabila Kabange, et du peuple congolais. J’ai eu le plaisir de rencontrer Votre Président en juin 2008. Je vous saurai gré de bien vouloir lui transmettre les voeux que je forme pour sa personne et pour l’accomplissement de sa tâche au service de la Nation. Que Dieu le guide dans les efforts pour arriver à la paix, garante d’une existence digne et d’un développement intégral. Je salue aussi avec cordialité les différents Responsables et tous les habitants de votre pays.

Votre présence, Monsieur l’Ambassadeur, à la tête de votre ambassade, après de longues années de vacance, manifeste le désir du Chef de l’Etat et du Gouvernement de fortifier les relations avec le Saint-Siège et je les en remercie. Je relève également que cette décision se situe en l’année du 50ème anniversaire de l’indépendance de votre patrie. Puisse ce jubilé permettre à la Nation de prendre un nouveau départ.

Votre pays a connu durant ces mêmes années des moments particulièrement difficiles et tragiques. La violence s’est abattue, aveugle et sans pitié, sur une large frange de la population, la faisant plier sous son joug brutal et insupportable en semant ruines et morts. Je pense particulièrement aux femmes, aux jeunes et aux enfants dont la dignité a été bafouée à outrance par la violation de leurs droits. Je voudrais leur exprimer ma sollicitude et les assurer de ma prière. L’Eglise catholique, elle-même, a été blessée dans beaucoup de ses membres et dans ses structures. Elle désire favoriser la guérison intérieure et la fraternité. La Conférence Episcopale en a largement parlé dans son Message de juin dernier. Il conviendrait donc maintenant d’employer tous les moyens politiques et humains pour mettre fin à la souffrance. Il conviendrait également de faire réparation et de rendre justice, comme les mots justice et paix inscrits dans la devise nationale y invitent. L’engagement pris à Goma en 2008 et l’application des accords internationaux, plus particulièrement le Pacte sur la sécurité, la stabilité et le développement de la Région des Grands Lacs, sont certes nécessaires, mais plus urgent encore est d’oeuvrer aux conditions préalables de leur application. Elle ne pourra se réaliser qu’en reconstruisant peu à peu le tissu social si gravement blessé, en encourageant la première société naturelle qui est la famille, et en consolidant les rapports interpersonnels entre Congolais fondés sur une éducation intégrale, source de paix et de justice. L’Eglise catholique, Monsieur l’Ambassadeur, désire continuer à apporter sa contribution à cette noble tâche à travers l’ensemble des structures dont elle dispose grâce à sa tradition spirituelle, éducative et sanitaire.

J’invite les Pouvoirs publics à ne rien négliger pour mettre fin à la situation de guerre qui, hélas, existe encore dans certaines provinces du pays, et à se dédier à la reconstruction humaine et sociale de la nation dans le respect des droits humains fondamentaux. La paix n’est pas uniquement l’absence de conflits, elle est aussi un don et une tâche qui obligent les citoyens et l’Etat. L’Eglise est convaincue qu’elle ne peut se réaliser que dans « le respect de la ‘grammaire’ écrite dans le coeur de l'homme par son divin Créateur », c’est-à-dire dans une réponse humaine en harmonie avec le plan divin. « Cette ‘grammaire’, à savoir l'ensemble des règles de l'agir individuel et des relations mutuelles entre les personnes, selon la justice et la solidarité, est inscrite dans les consciences, où se reflète le sage projet de Dieu » (Cf. Message pour la Journée Mondiale pour la Paix, 2007, 3). J’appelle la Communauté internationale, impliquée à divers degrés dans les conflits successifs que votre nation a connus, à se mobiliser pour contribuer efficacement à ramener en République Démocratique du Congo la paix et la légalité.

Après tant d’années de souffrances, Excellence, votre pays a besoin de s’engager résolument dans la voie de la réconciliation nationale. Vos Evêques ont déclaré cette année anniversaire pour la nation, une année de grâce, de renouveau et de joie, une année de réconciliation pour construire un Congo solidaire, prospère et uni. L’un des meilleurs moyens pour y parvenir est de promouvoir l’éducation des jeunes générations. L’esprit de réconciliation et de paix, né dans la famille, s’affermit et s’élargit à l’école et à l’université. Les congolais désirent une bonne éducation pour leurs enfants, mais la charge de son financement direct par les ménages est lourde voire même insupportable pour beaucoup. Je suis certain qu’une juste solution pourra être trouvée. En aidant économiquement les parents et en assurant le financement régulier des éducateurs, l’Etat fera un investissement qui sera profitable à tous. Il est essentiel que les enfants et les jeunes soient éduqués avec patience et ténacité, surtout ceux qui ont été privés d’instruction et entraînés à tuer. Il convient non seulement de leur inculquer un savoir qui les aidera dans leur future vie adulte et professionnelle, mais il faut leur donner de solides bases morales et spirituelles qui les aideront à rejeter la tentation de la violence et du ressentiment pour choisir ce qui est juste et vrai. A travers ses structures éducatives et selon ses possibilités, l’Eglise peut aider et compléter celles de l’Etat.

Les importantes richesses naturelles dont Dieu a doté votre terre et qui sont devenues malheureusement une source de convoitise et de profits disproportionnés pour beaucoup à l’intérieur et à l’extérieur de votre pays, permettent largement, grâce à une juste répartition des gains, d’aider la population à sortir de la pauvreté et à pourvoir à sa sécurité alimentaire et sanitaire. Les familles congolaises et l’éducation des jeunes en seront les premiers bénéficiaires. Ce devoir de justice promu par l’Etat consolidera la réconciliation et la paix nationale, et permettra à la population de goûter une vie sereine, base nécessaire à la prospérité.

Par votre intermédiaire, je désire également adresser des voeux chaleureux aux membres de la communauté catholique de votre pays, plus particulièrement aux Évêques, les invitant à être des témoins généreux de l’amour de Dieu et à contribuer à l’édification d’une nation unie et fraternelle où chacun se sente pleinement aimé et respecté.

Au moment où commence votre mission, je vous offre, Monsieur l’Ambassadeur, mes souhaits les meilleurs pour la noble tâche qui vous attend, vous assurant que vous trouverez toujours un accueil attentif et une compréhension cordiale auprès de mes collaborateurs.

Sur Votre Excellence, sur Votre famille, sur l’ensemble du peuple congolais et sur ses Dirigeants, j’invoque de grand coeur l’abondance des Bénédictions divines.



Discours 2005-2013 18420