Discours 2005-2013 25910

AUX ÉVÊQUES DE LA CONFÉRENCE ÉPISCOPALE DU BRÉSIL (RÉGION LESTE I) EN VISITE « AD LIMINA APOSTOLORUM » Salle du Consistoire du Palais pontifical de Castel Gandolfo Samedi 25 septembre 2010

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Vénérés frères dans l’épiscopat,

Je vous souhaite la bienvenue, heureux de vous recevoir tous à l’occasion de la visite «ad limina Apostolorum» que vous accomplissez au nom et au bénéfice de vos diocèses de la région «Leste 1», pour renforcer les liens qui les unissent au Successeur de Pierre. C’est précisément ce dont s’est fait l’interprète Mgr Rafael Cifuentes dans les paroles de salut qu’il m’a adressées en votre nom et pour lesquelles je le remercie, en appréciant beaucoup les prières que chaque jour, vous élevez au ciel pour moi et pour toute l’Eglise des différentes communautés familiales, paroissiales, religieuses et diocésaines des provinces ecclésiastiques de Rio de Janeiro et de Niterói. Que sur tous descende, rayonnante, la bienveillance du Seigneur: «Que Yahvé fasse pour toi rayonner son visage et te fasse grâce! Que Yahvé te découvre sa face et t’apporte la paix!» (
Nb 6,25-26).

Oui, bien-aimés frères, la splendeur de Dieu rayonne à partir de tout votre être et de votre vie, comme cela se produisit pour Moïse (cf. Ex Ex 34,29 et 25) et encore davantage, car à présent nous reflétons comme dans un miroir «la gloire du Seigneur, et nous sommes transfigurés en son image avec une gloire de plus en plus grande, par l’action du Seigneur qui est Esprit» (2Co 3,18). C’est ce que ressentaient les pères conciliaires lorsque, au terme du Concile Vatican II, ils présentèrent l’Eglise en ces termes: «Riche d’un long passé toujours vivant en elle, et marchant vers la perfection humaine dans le temps et vers les destinées ultime de l’histoire et de la vie, elle est la vraie jeunesse du monde... Regardez-la et vous retrouverez en elle le visage du Christ, le vrai héros, humble et sage, le prophète de la vérité et de l’amour, le compagnon et l’ami des jeunes» (Message du Concile Vatican II aux jeunes). Laissant transparaître le visage du Christ, l’Eglise est la jeunesse du monde.

Il sera cependant difficile de convaincre quelqu’un de cela, si la jeune génération d’aujourd’hui ne se reflète pas dans celle-ci. C’est pourquoi, comme vous vous en serez certainement rendus compte, un thème récurrent dans mes entretiens avec vous est la situation des jeunes dans les différents diocèses. Confiant dans la Divine Providence, qui préside avec amour au destin de l’histoire, en ne cessant jamais de préparer les temps futurs, je suis heureux de voir resplendir l’avenir chez les jeunes d’aujourd’hui. Déjà, le Pape Jean-Paul II, en voyant Rome devenir «jeune avec les jeunes», en l’an 2000, les salua comme les «sentinelles du matin» (Lettre apostolique, Novo millennio ineunte NM 9 Homélie lors de la veillée de prière de la XIe Journée mondiale de la jeunesse, 19 août 2000, n. 6), avec la tâche de réveiller leurs propres frères, afin qu’ils prennent le large sur le vaste océan du troisième millénaire. En témoigne l’image qui nous revient à la mémoire des longues files de jeunes qui attendaient pour se confesser au Cirque Maxime et qui ont redonné à beaucoup de prêtres la confiance dans le sacrement de la pénitence.

Comme vous le savez, bien-aimés pasteurs, la crise spirituelle de notre temps plonge ses racines dans l’obscurcissement de la grâce du pardon. Lorsque celui-ci n’est pas reconnu comme réel et efficace, on tend à libérer la personne de la faute, en faisant en sorte que les conditions pour l’existence de cette dernière ne puissent jamais exister. Mais, au plus profond d’elles-mêmes, les personnes ainsi «libérées» savent que cela n’est pas vrai, que le péché existe et qu’elles sont elles-mêmes pécheresses. Bien que certains courants de la psychologie aient de grandes difficultés à admettre que, parmi les sentiments de culpabilité, peuvent également se trouver ceux dus à une véritable faute, que celui qui est insensible au point de ne pas ressentir de sentiments de culpabilité, même lorsqu’il devrait les éprouver, cherche, par tous les moyens, à retrouver ces sentiments de culpabilité, car dans l’ordre spirituel ils sont nécessaires pour la santé de l’âme. De fait, Jésus n’est pas venu pour sauver ceux qui se sont déjà libérés tout seuls, en pensant ne pas avoir besoin de Lui, mais ceux qui sentent qu’ils sont pécheurs et qu’ils ont besoin de lui (cf. Lc 5,31-32).

La vérité est que nous avons tous besoin de Lui, en tant que Sculpteur divin qui ôte les couches de poussières et de salissures qui se sont déposées sur l’image de Dieu inscrite en nous. Nous avons besoin du pardon, qui constitue le coeur de toute véritable réforme: en renouvelant la personne au plus profond, elle devient également le centre du renouveau de la communauté. En effet, si l’on ôte la poussière et la salissure qui rendent l’image de Dieu impossible à reconnaître en moi, je deviens semblable à l’autre, qui est à son tour l’image de Dieu, et surtout je deviens véritablement semblable au Christ, qui est l’image de Dieu sans aucun défaut ou limite, le modèle à partir duquel nous avons tous été créés. Saint Paul l’exprime de manière très concrète: «Je vis, mais ce n’est plus moi, c’est le Christ qui vit en moi» (Ga 2,20). Je suis arraché de mon isolement et accueilli dans une nouvelle communauté-sujet; et mon «moi» est inséré dans le «moi» du Christ, et il est ainsi uni à celui de tous mes frères. Ce n’est qu’à partir de cette profondeur de renouveau de l’individu que naît l’Eglise, que naît la communauté qui unit et soutient dans la vie et dans la mort. Celle-ci représente une compagnie dans la montée, dans la réalisation de cette purification qui nous rend capables d’être à la véritable hauteur pour être des hommes, à la hauteur de la compagnie de Dieu. A mesure que se réalise la purification, la montée — qui au début est difficile — devient toujours plus joyeuse. Cette joie doit transparaître toujours davantage de l’Eglise, en contaminant le monde, car elle est la jeunesse du monde.

Vénérés frères, nous ne pouvons pas réaliser une telle oeuvre avec nos seules forces; la lumière et la grâce qui proviennent de l’Esprit de Dieu et qui agissent au plus profond des coeurs et des consciences sont nécessaires. Que celles-ci vous soutiennent, ainsi que vos diocèses, dans la formation des esprits et des coeurs! Apportez mon salut affectueux à vos jeunes et à leurs animateurs, les prêtres, les religieux et les laïcs. Qu’ils élèvent leur regard vers l’Immaculée Conception, Nossa Senhora Aparecida, à la protection de laquelle je vous confie. Je vous donne de tout coeur ma Bénédiction apostolique, que j’étends à tous vos fidèles diocésains.


RENCONTRE AVEC LES DÉLÉGATIONS DE LA COMMUNE DE CASTEL GANDOLFO, LES AUTORITÉS CIVILES ET MILITAIRES, LES COMMUNAUTÉS RELIGIEUSES

ET LE PERSONNEL AYANT PRÊTÉ SERVICE TOUT AU LONG DE LA PÉRIODE D'ÉTÉ Palais pontifical de Castel Gandolfo, Salle des suisses Lundi 27 septembre 2010

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Chers frères et soeurs,

Avant de quitter Castel Gandolfo, au terme de la période d’été, je suis heureux de vous rencontrer, vous tous qui représentez la communauté ecclésiale et civile de cette belle petite ville, qui m’est si chère, où la Providence m’accorde chaque année de passer un séjour serein et bénéfique.

J’adresse avant tout mon salut fraternel et ma gratitude cordiale à l’évêque d’Albano, Mgr Marcello Semeraro, en l’étendant au diocèse tout entier, que je suis avec une affection particulière dans la prière dans sa vie de foi et de témoignage chrétien. Je salue également le curé de Castel Gandolfo et la communauté paroissiale, ainsi que les divers instituts religieux masculins et féminins qui vivent ici et oeuvrent pour servir dans la joie l’Evangile et leurs frères.

J’adresse un salut respectueux à Monsieur le maire et aux membres de l’administration municipale, en exprimant une fois de plus ma sincère reconnaissance pour la contribution indispensable qu’ils offrent, dans le cadre de leurs compétences, afin que Castel Gandolfo puisse accueillir comme il se doit les nombreux pèlerins qui viennent ici de toutes les régions du monde. A travers vous, je désire faire parvenir à vos concitoyens ma profonde satisfaction pour la courtoisie bien connue et l’attention bienveillante avec lesquelles ils m’entourent et suivent mon activité au service de l’Eglise universelle.

Je voudrais également remercier cordialement les dirigeants ainsi que tout le personnel des divers services du Gouvernorat, en commençant par le Corps de la Gendarmerie, le Mobilier de l’Etat du Vatican, les directions des services de santé et des services techniques ainsi que la Garde suisse pontificale. Chers amis, je vous adresse à tous des «remerciements particuliers» pour la sollicitude et le professionnalisme avec lesquels vous vous êtes prodigués pour répondre à mes exigences, à celles de mes collaborateurs et de tous ceux qui, au cours des mois d’été, sont venus à Castel Gandolfo me rendre visite. J’assure chacun d’entre vous et vos familles de mon souvenir constant dans la prière.

J’adresse également ma gratitude aux fonctionnaires et aux agents des diverses forces de l’ordre italiennes, pour service efficace et régulier, ainsi qu’aux officiers et aux pilotes du 31e escadron de l’aéronautique militaire. Je rends grâce à Dieu et je vous suis reconnaissant à tous, car tout s’est toujours déroulé dans l’ordre et dans la tranquillité.

En prenant congé de vous, je voudrais vous présenter la figure de saint Vincent de Paul, dont nous célébrons aujourd’hui la mémoire. Cet apôtre de la charité, si cher au peuple chrétien, et connu en particulier à travers les religieuses qu’il a fondées, fut proclamé par le Pape Léon XIII «patron universel de toutes les oeuvres de charité présentes dans le monde». Grâce à son action apostolique constante, l’Evangile devint toujours plus un phare lumineux d’espérance et d’amour pour l’homme de son temps, et en particulier pour les plus pauvres dans le corps et l’esprit. Que son exemple vertueux et son intercession suscitent dans vos communautés et en chacun de vous un engagement renouvelé de solidarité, afin que les efforts de chacun contribuent à l’édification du bien commun.

J’accompagne ce souhait cordial de l’assurance de mon souvenir dans le Seigneur, afin qu’il vous assiste tous de sa grâce, ainsi que vos familles, et qu’il vous comble d’abondantes consolations. Je vous remercie à nouveau, chers amis, et je vous bénis de tout coeur.





SALUT AU PERSONNEL DES VILLAS PONTIFICALES DE CASTEL GANDOLFO Palais pontifical de Castel Gandolfo Mercredi 29 septembre 2010

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Chers frères et soeurs!

Avant de prendre congé de Castel Gandolfo, en conclusion de mon séjour d’été, je suis heureux de vous accueillir pour cette visite de congé, qui m’offre l’opportunité d’exprimer à chacun de vous ma profonde reconnaissance pour le travail que vous accomplissez et de vous féliciter de façon particulière pour l’esprit qui inspire votre service.

Je remercie Monsieur le directeur, Saverio Petrillo, pour les aimables paroles qu’il m’a adressées et pour les sentiments qu’il m’a exprimés au nom de tous. Je suis heureux de renouveler, en cette occasion, l’expression de ma satisfaction pour la compétence et la précision que vous, cher directeur, ainsi que tout le personnel, consacrez au soin du Palais et des Villas pontificales. Que le Seigneur récompense chacun d’abondants dons célestes et vous protège, ainsi que vos familles. Merci à tous car, cet été également, vous m’avez accompagné par la prière et par votre travail constant. Vous avez toujours été proches de moi et je vous en suis reconnaissant.

Chers amis, continuez d’offrir le témoignage quotidien de votre foi, en vous plaçant en particulier à l’écoute docile de la Parole de Dieu. Aujourd’hui, dans la liturgie, nous célébrons trois Messagers excellents de cette Parole qui illumine, oriente, défend, réconforte, secourt: les saints archanges Michel, Gabriel et Raphaël, envoyés par Dieu, avec des missions spécifiques, à des moments particuliers de l’histoire du salut. Chaque chrétien est appelé à accueillir et à vivre chaque jour, avec simplicité et joie, la Parole de Vérité que le Seigneur nous a communiquée. Au cours des siècles, l’Eglise a connu des figures splendides de fidèles disciples du Christ qui se sont nourris assidûment et avec amour de l’Ecriture Sainte, plaçant en elle une profonde confiance. Demain, nous rappellerons saint Jérôme, un Père de l’Eglise qui a placé la Bible au coeur de sa vie: il l’a traduite en latin, l’a commentée dans ses oeuvres. Cet éminent docteur de l’Eglise avertissait qu’«ignorer les Ecritures, c’est ignorer le Christ» (Commentaire à Isaïe, prol.). C’est pourquoi, il est fondamental que chaque chrétien vive en contact et en dialogue personnel avec la Parole de Dieu, qui nous a été donnée dans l’Ecriture Sainte, en la lisant non pas comme une parole du passé, mais comme une parole vivante, qui s’adresse à nous et nous interpelle.

Très chers amis, je vous assure de mon souvenir constant dans la prière, afin que chacun puisse connaître et assimiler toujours plus profondément la Parole de Dieu, encouragement et source de la vie chrétienne pour toutes les situations et pour chaque personne. La Sainte Vierge est le modèle de cette écoute obéissante: apprenez d’Elle! Que le Seigneur vous accorde des jours heureux et saints; que l’Esprit enrichisse de ses dons vos familles.

Et à présent, en signe de mon amitié, je donne de tout coeur à chacun de vous ici présents et aux personnes qui vous sont chères une Bénédiction apostolique particulière.




CONCERT EN L'HONNEUR DU SAINT-PÈRE OFFERT PAR L'ENI Salle Paul VI Vendredi 1er octobre 2010

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Vénérés frères,
Mesdames et messieurs,
chers frères et soeurs!

Je désire tout d’abord adresser mes remerciements sincères à l’ENI, en la personne de son président, M. Roberto Poli, qui a aimablement présenté cette soirée. Depuis longtemps déjà, l’ENI avait proposé d’organiser un concert en concomitance avec les travaux de restauration des façades latérales de la Basilique Saint-Pierre. Après avoir réalisé le nettoyage mémorable de la façade principale, admirée par des millions de pèlerins pendant le Jubilé de l’an 2000, ce nouveau chantier bat à présent son plein: en entrant au Vatican par l’«Arco delle Campane» ou par le «Petriano», on reste frappé — en regardant la partie déjà terminée — par l’aspect du travertin, qui apparaît comme nous ne l’avions jamais vu, presque souple et velouté. Il s’agit là aussi d’un grand travail d’«orchestre» et tous ceux qui le dirigent et qui le réalisent, avec savoir-faire et au prix de grands efforts, méritent un applaudissement!

Et ainsi l’ENI a pensé à un concert — peut-être pour compenser les bruits que ces travaux produisent inévitablement! C’est pourquoi l’Orchestre et le Choeur de l’Académie nationale de Sainte-Cécile ont été invités, c’est-à-dire deux institutions qui, en raison de leur histoire, de la qualité de leur art et un son typiquement «italien», représentent Rome et l’Italie sur la scène musicale mondiale. A tous les musiciens de l’Orchestre et à tous les choristes, je voudrais présenter mes félicitations, avec le souhait de pouvoir toujours se renouveler dans l’esprit, pour donner vie — comme ce soir — à des oeuvres immortelles. En particulier, j’exprime mes vives félicitations au directeur, Neeme Järvi, au pianiste, Andrea Lucchesini, et au maître du Choeur, Ciro Visco. J’adresse également un salut spécial au groupe de pauvres, assistés par la Caritas diocésaine, que j’ai voulu inviter pour vivre avec nous ce moment de joie.

Et à présent une brève réflexion sur la musique que nous venons d’écouter: une symphonie de Haydn, du groupe des «Londoniennes», intitulée «La surprise», ou «mit dem Paukenschlag» en raison de l’utilisation caractéristique des cymbales dans le deuxième mouvement, la Fantaisie chorale de Beethoven, un morceau assez atypique en son genre dans le répertoire de Beethoven, mais qui montre synthétiquement les possibilités expressives de la musique soliste, orchestrale et chorale; et, entre les deux, Cécile, Vierge romaine d’Arvo Pärt. Les deux oeuvres de Haydn et de Beethoven ont fait retentir toute la richesse et la puissance de la musique symphonique de la période classique et romantique: avec celle-ci, le génie humain rivalise de créativité avec la nature, donne vie à des harmonies variées et multiformes, où la voix humaine participe également à ce langage, qui est comme un reflet de la grande symphonie cosmique. Cette forme est en particulier caractéristique de la période romantique et du romantisme tardif, mais elle va au-delà, elle représente une dimension universelle de l’art, une manière de concevoir l’homme et sa place dans le monde.

En revanche, l’oeuvre de Pärt, bien qu’utilisant elle aussi un instrument semblable, un orchestre symphonique et un choeur, veut faire entendre une autre réalité, qui n’appartient pas au monde naturel: elle fait entendre le témoignage de la foi en Christ, qui en un mot se dit «martyre». Il est intéressant que ce témoignage soit personnifié précisément par sainte Cécile: une martyre qui est également la patronne de la musique et du bel canto.

Il revient donc de féliciter également celui qui est à l’origine du choix du programme du concert, car le rapprochement de ce travail sur sainte Cécile avec les oeuvres de Haydn et Beethoven offre un contraste riche de signification, qui invite à réfléchir. Le texte du martyre de la sainte et le style particulier qui l’interprète sous forme musicale, semblent représenter la place et le rôle de la foi dans l’univers: au milieu des forces vitales de la nature, qui sont autour de l’homme et également en lui, la foi est une force différente, qui répond à une parole profonde, «sortie du silence», comme le dirait saint Ignace d’Antioche. La parole de la foi a besoin d’un grand silence intérieur, pour écouter et obéir à une voix qui est au-delà du visible et du tangible. Cette voix parle également à travers les phénomènes de la nature, car elle est la puissance qui a créé et qui gouverne l’univers; mais pour la reconnaître un coeur humble et reconnaissant est nécessaire — comme nous l’enseigne également la sainte dont nous faisons mémoire aujourd’hui: sainte Thérèse de l’Enfant Jésus. La foi suit cette voix profonde là où l’art lui-même ne peut arriver tout seul: elle la suit sur la voie du témoignage, du don de soi-même par amour, comme l’a fait Cécile. Alors l’oeuvre d’art la plus belle, le chef-d’oeuvre de l’être humain est chacun de ses actes d’amour authentique, du plus petit — dans le martyre quotidien — jusqu’au sacrifice extrême. Ici, la vie elle-même se fait chant: une anticipation de cette symphonie que nous chanterons ensemble au Paradis. Merci de nouveau et bonne soirée.





VISITE PASTORALE À PALERME


RENCONTRE AVEC LES PRÊTRES, LES RELIGIEUX, LES RELIGIEUSES ET LES SÉMINARISTES Cathédrale de Palerme Dimanche 3 octobre 2010

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Vénérés frères dans l'épiscopat,

chers frères et soeurs!

A l'occasion de cette visite pastorale sur votre terre, je ne pouvais manquer de vous rencontrer. Merci de votre accueil! J'ai beaucoup apprécié dans les paroles de l'archevêque, l’analogie entre la beauté de la cathédrale et celle de l’édifice de «pierres vivantes» que vous constituez. Oui, en ce moment bref mais intense avec vous, je peux admirer le visage de l'Eglise, dans la variété de ses dons. Et, en tant que Successeur de Pierre, j'ai la joie de vous confirmer dans l'unique foi et dans la profonde communion que le Seigneur Jésus Christ nous a obtenues. A Mgr Paolo Romeo, j'exprime ma gratitude, que j'étends à l'évêque auxiliaire. A vous, chers prêtres de cet archidiocèse et de tous les diocèses de Sicile, à vous, chers diacres et séminaristes, et à vous, religieux et religieuses, et laïcs consacrés, j'adresse mes salutations les plus cordiales, et je voudrais les faire parvenir à tous les confrères et les consoeurs de Sicile, en particulier à ceux qui sont malades ou très âgés.

L'adoration eucharistique que nous avons la grâce et la joie de partager, nous a révélé et nous a fait ressentir le sens profond de ce que nous sommes: membres du Corps du Christ qui est l'Eglise. Prostré devant Jésus, ici au milieu de vous, je lui ai demandé d'enflammer vos coeurs avec sa charité, afin que vous soyez assimilés à lui et que vous puissiez l'imiter dans le don le plus complet et le plus généreux à l'Eglise et aux frères.

Chers prêtres, je voudrais m'adresser avant tout à vous. Je sais que vous travaillez avec zèle et intelligence, sans épargner vos énergies. Le Seigneur Jésus, auquel vous avez consacré votre vie, est avec vous! Soyez toujours des hommes de prière, pour être aussi des maîtres de prière. Que vos journées soient rythmées par les temps de la prière, durant lesquels, sur le modèle de Jésus, vous vous entretenez dans un dialogue régénérant avec le Père. Il n'est pas facile de rester fidèles à ces rendez-vous quotidiens avec le Seigneur, surtout de nos jours, où le rythme de la vie est devenu frénétique et les occupations absorbent toujours davantage. Nous devons toutefois en être convaincus, le moment de la prière est fondamental: en elle, la grâce divine agit avec plus d'efficacité, en donnant fécondité au ministère. Beaucoup de choses nous pressent, mais si nous ne sommes pas intérieurement en communion avec Dieu, nous ne pouvons rien donner non plus aux autres. Nous devons toujours réserver le temps nécessaire pour «être avec lui» (cf.
Mc 3,14).

Le Concile Vatican II affirme à propos des prêtres: «C’est dans le culte ou synaxe eucharistique que s’exerce par excellence leur charge sacrée» (Const. dogm. Lumen gentium LG 28). L'Eucharistie est la source et le sommet de toute la vie chrétienne. Chers frères prêtres, pouvons-nous dire qu'elle l'est pour nous, pour notre vie sacerdotale? Quel soin consacrons-nous à la préparation de la Messe, à sa célébration, à demeurer en adoration? Nos églises sont-elles vraiment une «maison de Dieu», où sa présence attire les personnes, qui malheureusement aujourd'hui sentent souvent l'absence de Dieu?

Le prêtre trouve toujours, et de manière immuable, la source de son identité dans le Christ Prêtre. Ce n'est pas le monde qui définit notre statut, selon les besoins et les conceptions des rôles sociaux. Le prêtre est marqué par le sceau du Sacerdoce du Christ, pour participer à sa fonction d'unique Médiateur et Rédempteur. En vertu de ce lien fondamental, s'ouvre au prêtre le champ immense du service des âmes, pour leur salut dans le Christ et dans l'Eglise. Un service qui doit être entièrement inspiré par la charité du Christ. Dieu veut que tous les hommes soient sauvés, qu'aucun ne se perde. Le saint Curé d'Ars disait: «Le prêtre doit être toujours prêt à répondre aux besoins des âmes. Il n'est pas pour lui-même, il est pour vous». Le prêtre est pour les fidèles: il les anime et les soutient dans l'exercice du sacerdoce commun des baptisés, dans leur chemin de foi, à cultiver l'espérance, à vivre la charité, l'amour du Christ. Chers prêtres, ayez toujours une attention particulière également pour le monde des jeunes. Comme le dit sur cette terre le Vénérable Jean-Paul II, ouvrez grand les portes de vos paroisses aux jeunes, pour qu'ils puissent ouvrir les portes de leur coeur au Christ! Qu'ils ne les trouvent jamais fermées!

Le prêtre ne peut pas demeurer éloigné des préoccupations quotidiennes du Peuple de Dieu; au contraire, il doit être très proche, mais en tant que prêtre, toujours dans la perspective du salut et du Royaume de Dieu. Il est le témoin et le dispensateur d'une vie différente de la vie terrestre (cf. Décr. Presbyterorum Ordinis PO 3). Il est porteur d'une espérance forte, d'une «espérance fiable», celle du Christ, avec laquelle affronter le présent, même s'il est souvent difficile (cf. Enc. Spe salvi ). Il est essentiel pour l'Eglise que l'identité du prêtre soit sauvegardée, dans sa dimension «verticale». La vie et la personnalité de saint Jean-Marie Vianney, mais aussi de tant de saints de votre terre, comme saint Annibale Maria di Francia, le bienheureux Giacomo Cusmano ou le bienheureux Francesco Spoto, en sont des exemples particulièrement forts et éclairants.

L'Eglise de Palerme a rappelé récemment l'anniversaire du barbare assassinat de Don Giuseppe Puglisi, qui appartenait à ce presbyterium, tué par la mafia. Il avait un coeur qui brûlait d’une authentique charité pastorale; dans son ministère zélé, il a accordé une large place à l'éducation des enfants et des jeunes, et il a également oeuvré pour que chaque famille chrétienne vive la vocation fondamentale de première éducatrice de la foi des enfants. Le peuple confié à ses soins pastoraux a pu lui-même se nourrir de la richesse spirituelle de ce bon pasteur, dont la cause de béatification est en cours. Je vous exhorte à conserver un souvenir vivant de son témoignage sacerdotal fécond en imitant son exemple héroïque.

C'est avec beaucoup d'affection que je m'adresse également à vous, qui sous diverses formes et dans divers instituts, vivez la consécration à Dieu dans le Christ et dans l'Eglise. J'adresse une pensée particulière aux moines et aux moniales de clôture, dont le service de prière est si précieux pour la communauté ecclésiale. Chers frères et soeurs, continuez à suivre Jésus sans compromis, comme cela est proposé dans l'Evangile, en témoignant ainsi de la beauté d'être chrétiens de manière radicale. Il vous revient en particulier de conserver vivante chez les baptisés la conscience des exigences fondamentales de l'Evangile. En effet, votre présence elle-même et votre style insufflent à la communauté ecclésiale un élan précieux vers la «haute mesure» de la vocation chrétienne; et nous pourrions même dire que votre existence constitue une sorte de prédication, très éloquente, même si elle est souvent silencieuse. Très chers amis, votre style de vie est à la fois antique et toujours nouveau, malgré la diminution du nombre et des forces. Mais ayez confiance: nos temps ne sont pas ceux de Dieu et de sa providence. Il faut prier et croître dans la sainteté personnelle et communautaire. Ensuite le Seigneur pourvoit!

Chers séminaristes, je vous salue avec affection et prédilection et je vous exhorte à répondre avec générosité à l'appel du Seigneur et aux attentes du Peuple de Dieu, en croissant dans l'identification avec le Christ, le Souverain Prêtre, en vous préparant à la mission avec une solide formation humaine, spirituelle, théologique et culturelle. Le séminaire est plus que jamais précieux pour votre avenir, parce que, à travers une expérience complète et un travail patient, il vous conduit à être des pasteurs d'âmes et des maîtres de foi, des ministres des saints mystères et des porteurs de la charité du Christ. Vivez avec engagement ce temps de grâce et conservez dans le coeur la joie et l'élan du premier moment de l'appel et de votre «oui» lorsque, en répondant à la voix mystérieuse du Christ, vous avez donné un tournant décisif à votre vie. Soyez dociles aux directives des supérieurs et des responsables de votre croissance en Christ, et apprenez de Lui l'amour pour chaque enfant de Dieu et de l'Eglise.

Chers frères et soeurs, tout en vous remerciant encore de votre affection, je vous assure de mon souvenir dans la prière, pour que vous poursuiviez avec un élan renouvelé et avec une forte espérance le chemin de fidèle adhésion au Christ et de service généreux à l'Eglise. Que vous assiste toujours la Vierge Marie, notre Mère; que vous protègent sainte Rosalie et tous les saints patrons de cette terre de Sicile; et que vous accompagne aussi la Bénédiction apostolique, que je vous donne de tout coeur, ainsi qu'à vos communautés.



RENCONTRE AVEC LES JEUNES Place Politeama de Palerme (Sicile) Dimanche 3 octobre 2010

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Chers jeunes et chères familles de Sicile!

Je vous salue avec beaucoup d'affection et de joie! Merci de votre joie et de votre foi! Cette rencontre avec vous est la dernière de ma visite d'aujourd'hui à Palerme, mais en un certain sens, elle constitue le coeur de celle-ci; en effet, c'est l'occasion qui a offert le motif de l'invitation que vous m'avez adressée: votre rencontre régionale des jeunes et des familles. Alors aujourd'hui, je dois commencer par là, par cet événement; et je le fais avant tout en remerciant Mgr Mario Russotto, évêque de Caltanissetta, qui est délégué pour la pastorale des jeunes et des familles au niveau régional, et puis les jeunes Giorgia et David. Chers amis, les paroles que vous m'avez adressées ont été bien plus qu'un salut: un partage de foi et d'espérance. Je vous remercie de tout coeur. L'Evêque de Rome se rend partout pour confirmer les chrétiens dans la foi, mais il rentre chez lui confirmé par votre foi, par votre joie, par votre espérance!

Et par conséquent, les jeunes et les familles. Nous devons prendre au sérieux ce rapprochement, ce rassemblement, qui ne peut pas être uniquement occasionnel, ou fonctionnel. Il a un sens, une valeur humaine, chrétienne, ecclésiale. Et je veux partir non pas d'un raisonnement, mais d’un témoignage, une histoire vécue et d'une grande actualité. Je pense que vous savez tous que samedi 25 septembre dernier, à Rome, a été proclamée bienheureuse une jeune Italienne prénommée Chiara, Chiara Badano. Je vous invite à la connaître: sa vie a été brève, mais elle est un message extraordinaire. Chiara est née en 1971 et elle est morte en 1990, d'une maladie incurable. Dix-neuf années pleines de vie, d'amour, de foi. Deux années, les dernières, pleines aussi de douleur, mais toujours dans l'amour et dans la lumière, une lumière qui rayonnait d'elle et qui venait de l'intérieur: de son coeur empli de Dieu! Comment est-ce possible? Comment une jeune fille de 17, 18 ans peut-elle vivre une telle souffrance, humainement sans espérance, en diffusant amour, sérénité, paix, foi? Il s'agit bien sûr d'une grâce de Dieu, mais cette grâce a été aussi préparée et accompagnée par la collaboration humaine, la collaboration de Chiara elle-même, assurément, mais aussi celle de ses parents et de ses amis.

Avant tout les parents, la famille. Aujourd'hui, je veux le souligner de manière particulière. Les parents de la bienheureuse Chiara Badano sont vivants, ils étaient à Rome pour la béatification — je les ai moi-même rencontrés personnellement — et ils sont témoins du fait fondamental, qui explique tout: leur fille est emplie de la lumière de Dieu! Et cette lumière, qui vient de la foi et de l'amour, ils ont été les premiers à l'allumer: le père et la mère ont allumé dans l'âme de leur fille la petite flamme de la foi et ils ont aidé Chiara à la garder toujours allumée, même dans les moments difficiles de la croissance et surtout dans la grande et longue épreuve de la souffrance, comme ce fut aussi le cas pour la vénérable Maria Carmelina Leone, morte à 17 ans. Tel est, chers amis, le premier message que je voudrais vous laisser: la relation entre parents et enfants — vous le savez — est fondamentale; mais pas seulement pour conserver une bonne tradition — je sais que celle-ci est très importante pour les Siciliens. C'est quelque chose de plus, que Jésus lui-même nous a enseigné: c'est la flamme de la foi qui se transmet de génération en génération; cette flamme qui est présente également dans le rite du baptême, lorsque le prêtre dit: «Recevez la lumière du Christ... signe pascal... c'est à vous que cette lumière est confiée. Veillez à l'entretenir».

La famille est fondamentale parce que c'est là que germe dans l'âme humaine la première perception du sens de la vie. Elle germe dans la relation avec la mère et avec le père, qui ne sont pas les maîtres de la vie des enfants, mais les premiers collaborateurs de Dieu pour la transmission de la vie et de la foi. C'est ce qui est advenu de manière exemplaire et extraordinaire dans la famille de la bienheureuse Chiara Badano; mais cela advient dans un très grand nombre de familles. En Sicile aussi, on trouve de splendides témoignages de jeunes qui ont grandi comme de belles plantes florissantes après avoir germé dans la famille, avec la grâce du Seigneur et la collaboration humaine. Je pense à la bienheureuse Pina Suriano, aux vénérables Maria Carmelina Leone et Maria Magno Magro, grande éducatrice; aux serviteurs de Dieu Rosario Livatino, Mario Giuseppe Restivo, et à beaucoup d'autres jeunes que vous connaissez! Souvent, leur action ne fait pas la une des journaux, parce que le mal fait plus de bruit, mais ils sont la force, l'avenir de la Sicile! L'image de l'arbre est très significative pour représenter l'homme. La Bible l'utilise par exemple dans les Psaumes. Le Psaume 1, par exemple, dit: Bienheureux l'homme qui médite la loi du Seigneur, «il est comme un arbre planté auprès des cours d'eau; celui-là portera fruit en son temps» (v. 3). Ces «cours d'eau» peuvent être le «fleuve» de la tradition, le «fleuve» de la foi où l'on puise la sève vitale. Chers jeunes de Sicile, soyez des arbres qui plongent leurs racines dans le «fleuve» du bien! N'ayez pas peur de vous opposer au mal! Ensemble, vous serez comme une forêt qui croît, peut-être silencieuse, mais capable de porter du fruit, d'apporter la vie et de renouveler en profondeur votre terre! Ne cédez pas aux suggestions de la mafia, qui est un chemin de mort, incompatible avec l'Evangile, comme tant de fois nos évêques l'ont dit et le répètent!

L'apôtre Paul reprend cette image dans la Lettre aux Colossiens, où il exhorte les chrétiens à être «enracinés et fondés en Christ, affermis dans la foi» (cf. Col
Col 2,7). Chers jeunes, vous savez que ces paroles sont le thème de mon Message pour la Journée mondiale de la jeunesse de l'année prochaine à Madrid. L'image de l'arbre dit que chacun de nous a besoin d'un terrain fertile dans lequel plonger ses racines, un terrain riche de substances nutritives qui font croître la personne: ce sont les valeurs, mais ce sont surtout l'amour et la foi, la connaissance du vrai visage de Dieu, la conscience qu'Il nous aime infiniment, fidèlement, patiemment, jusqu'à donner sa vie pour nous. En ce sens, la famille est une «petite Eglise», parce qu'elle transmet Dieu, elle transmet l'amour du Christ, en vertu du sacrement du mariage. L'amour divin qui a uni l’homme et la femme, et qui a fait d'eux des parents, est capable de susciter dans le coeur des enfants le germe de la foi, c'est-à-dire la lumière du sens profond de la vie.

Et voici un autre passage important, que je ne peux qu'évoquer: la famille, pour être une «petite Eglise», doit vivre bien inscrite dans la «grande Eglise», c'est-à-dire dans la famille de Dieu que le Christ est venu former. C'est de cela aussi que témoigne la bienheureuse Chiara Badano, comme tous les jeunes saints et bienheureux: à côté de la famille d'origine, est fondamentale la grande famille de l'Eglise, dont on fait la rencontre et l'expérience dans la communauté paroissiale, dans le diocèse; pour la bienheureuse Pina Suriano ce fut l'Action catholique — largement présente dans cette terre —, pour la bienheureuse Chiara Badano le Mouvement des Focolari; en effet, les mouvements et les associations ecclésiaux eux aussi sont au service non d’eux-mêmes, mais du Christ et de l'Eglise.

Chers amis! Je connais vos difficultés dans le contexte social actuel, qui sont les difficultés des jeunes et des familles d'aujourd'hui, en particulier dans le Sud de l'Italie. Et je connais aussi l'engagement avec lequel vous tentez de réagir et d'affronter ces problèmes, assistés par vos prêtres, qui sont pour vous d'authentiques pères et frères dans la foi, comme l'a été Don Pino Puglisi. Je rends grâce à Dieu de vous avoir rencontrés, parce que là où des jeunes et des familles choisissent le chemin de l'Evangile, il y a l'espérance. Et vous êtes un signe d'espérance non seulement pour la Sicile, mais pour toute l'Italie. Je vous ai apporté un témoignage de sainteté, et vous m'offrez le vôtre: les visages de tant de jeunes de cette terre qui ont aimé le Christ avec une radicalité évangélique; vos propres visages, comme une mosaïque! Voilà le don le plus grand que nous avons reçu: être Eglise, être dans le Christ signe et instrument d'unité, de paix, de vraie liberté. Personne ne peut nous ôter cette joie! Personne ne peut nous ôter cette force! Courage, chers jeunes et familles de Sicile! Soyez saints! A l'école de Marie, notre Mère, mettez-vous pleinement à la disposition de Dieu, laissez-vous façonner par sa Parole et par son Esprit, et vous serez encore et toujours plus sel et lumière de votre terre bien-aimée. Merci!







Discours 2005-2013 25910