Discours 2005-2013 1202

AUX PARTICIPANTS À L'ASSEMBLÉE PLÉNIÈRE DU CONSEIL PONTIFICAL POUR LA PROMOTION DE L'UNITÉ DES CHRÉTIENS Salle Clémentine Jeudi 18 novembre 2010

Messieurs les cardinaux,
1203 Vénérés frères dans l'épiscopat et dans le sacerdoce,
Chers frères et soeurs!

C'est pour moi une grande joie de vous rencontrer à l'occasion de l'assemblée plénière du Conseil pontifical pour la promotion de l'unité des chrétiens, au cours de laquelle vous vous penchez sur le thème: «Vers une nouvelle étape du dialogue oecuménique ». En adressant à chacun de vous mes salutations cordiales, je souhaite remercier en particulier le président, Mgr Kurt Koch, notamment pour les paroles chaleureuses à travers lesquelles il a interprété vos sentiments.

Hier, comme l'a rappelé Mgr Koch, vous avez célébré, par un acte solennel de commémoration, le 50e anniversaire de l'institution de votre dicastère. Le 5 juin 1960, à la veille du Concile Vatican II, qui a souligné le caractère central pour l'Eglise de l’engagement oecuménique, le bienheureux Jean XXIII créait le Secrétariat pour la promotion de l'unité des chrétiens, qui prit par la suite le nom, en 1988, de Conseil pontifical. Ce fut un acte qui constitua une pierre milliaire pour le chemin oecuménique de l'Eglise catholique. Au cours de ces cinquante ans, beaucoup de chemin a été parcouru. Je souhaite exprimer ma vive gratitude à tous ceux qui ont prêté service au sein de ce Conseil pontifical, en rappelant tout d’abord les présidents qui s'y sont succédé: les cardinaux Augustin Bea, Johannes Willebrands, Edward Idris Cassidy; et je tiens tout particulièrement à remercier le cardinal Walter Kasper, qui a été à la tête du dicastère, avec compétence et passion, ces onze dernières années. Je remercie les membres et consulteurs, officiers et collaborateurs, ceux qui ont contribué à réaliser les dialogues théologiques et les rencontres oecuméniques et ceux qui ont prié le Seigneur pour le don de l’unité visible entre les chrétiens. Au cours de ces cinquante ans a été acquise une connaissance plus vraie et une estime plus grande à l’égard des Eglises et des communautés ecclésiales, en surmontant les préjugés accumulés au cours de l'histoire; l'on a grandi dans le dialogue théologique, mais aussi dans celui de la charité; diverses formes de collaboration se sont développées, au nombre desquelles, outre celles pour la défense de la vie, pour la sauvegarde de la création et pour combattre l'injustice, la collaboration dans le domaine des traductions oecuméniques des Saintes Ecritures a été importante et fructueuse.

Ces dernières années, par ailleurs, le Conseil pontifical s'est engagé, entre autres, dans un vaste projet, baptisé le Harvest Project, pour tracer le premier bilan des objectifs atteints dans les dialogues théologiques avec les principales communautés ecclésiales depuis Vatican II. Il s'agit d'un travail précieux qui a mis en évidence aussi bien les domaines de convergence, que ceux dans lesquels il est nécessaire de continuer à approfondir la réflexion. En rendant grâce à Dieu pour les fruits déjà obtenus, je vous encourage à poursuivre votre engagement dans la promotion d'une réception correcte des résultats obtenus et pour faire connaître avec exactitude l'état actuel de la recherche théologique au service du chemin vers l'unité. Aujourd'hui, certains pensent que ce chemin, en particulier en Occident, a perdu son élan; on perçoit alors l’urgence de raviver l'intérêt oecuménique et de donner une nouvelle impulsion aux dialogues. Des défis inédits se présentent également: les nouvelles interprétations anthropologiques et éthiques, la formation oecuménique des nouvelles générations, la fragmentation ultérieure du cadre oecuménique. Il est essentiel de prendre conscience de ces changements et de trouver les voies pour aller de l’avant de manière efficace à la lumière de la volonté du Seigneur: «Afin que tous soient un» (
Jn 17,21).

Avec les Eglises orthodoxes également et les antiques Eglises d’Orient, avec lesquelles existent des liens «qui les unissent intimement à nous» (Unitatis redintegratio UR 15), l'Eglise catholique poursuit avec passion le dialogue, en cherchant à approfondir de manière sérieuse et rigoureuse le patrimoine théologique, liturgique et spirituel commun, et à affronter avec sérénité et engagement les éléments qui nous divisent encore. Avec les orthodoxes, un point crucial de confrontation et de réflexion a été atteint: le rôle de l'Evêque de Rome dans la communion de l'Eglise. Et la question ecclésiologique est aussi au centre du dialogue avec les antiques Eglises d’Orient: malgré de nombreux siècles d'incompréhension et d'éloignement, on a pu constater, avec joie, qu’un précieux patrimoine commun a été conservé.

Chers amis, même en présence de nouvelles situations problématiques ou de points difficiles pour le dialogue, le but du chemin oecuménique demeure inchangé, tout comme le ferme engagement à le poursuivre. Mais il ne s'agit pas d'un engagement selon des catégories, pour ainsi dire, politiques, dans lesquelles entrent en jeu l'habileté à négocier ou la plus grande capacité à trouver des compromis, si bien que l'on pourrait attendre, en bons médiateurs, de parvenir, au bout d'un certain temps, à des accords acceptables par tous. L'action oecuménique suit un double mouvement. D'une part, la recherche convaincue, passionnée et tenace pour trouver toute l'unité dans la vérité, pour imaginer des modèles d'unité, pour éclairer des opposions ou des points obscurs en vue d'atteindre l'unité. Et ce dans le nécessaire dialogue théologique, mais surtout dans la prière et dans la pénitence, dans cet oecuménisme spirituel qui constitue le coeur battant de tout le chemin: l'unité des chrétiens est et demeure prière, elle habite dans la prière. D'autre part, un autre mouvement concret, qui naît de la ferme conscience que nous ne savons pas l'heure de la réalisation de l'unité entre tous les disciples du Christ et que nous ne pouvons pas la connaître, parce que l'unité ce n’est pas nous qui la «faisons», mais c’est Dieu qui la «fait»: elle vient d'en haut, de l'unité du Père avec le Fils dans le dialogue d’amour qui est l'Esprit Saint; c'est une manière de prendre part à l'unité divine. Et cela ne doit pas réduire notre engagement, au contraire, cela doit nous rendre toujours plus attentifs à saisir les signes et les temps du Seigneur, en sachant reconnaître avec gratitude ce qui nous unit déjà et en travaillant pour qu'elle se consolide et grandisse. En fin de compte, dans le chemin oecuménique également, il s'agit de laisser à Dieu ce qui est uniquement à lui et d'explorer, avec sérieux, constance et dévouement, ce qui est notre tâche, en tenant compte du fait qu'à notre engagement appartiennent les binômes agir et souffrir, activité et patience, fatigue et joie.

Invoquons avec confiance l'Esprit Saint, pour qu'il guide notre chemin et que chacun sente avec une vigueur renouvelée l'appel à travailler pour la cause oecuménique. Je vous encourage tous à poursuivre dans votre oeuvre; c'est une aide que vous apportez à l'Evêque de Rome dans l’accomplissement de sa mission au service de l'unité. En signe d'affection et de gratitude, je vous donne de tout coeur ma Bénédiction apostolique.





CONSISTOIRE ORDINAIRE PUBLIC

POUR LA CRÉATION DE NOUVEAUX CARDINAUX


AUX NOUVEAUX CARDINAUX AVEC LEURS FAMILLES ET AUX PÈLERINS VENUS POUR LE CONSISTOIRE Salle Paul VI Lundi 22 novembre 2010



Messieurs les cardinaux,
1204 Chers frères dans l’épiscopat et dans le sacerdoce,
Chers amis!

Dans notre esprit et notre coeur à tous sont encore présents les sentiments et les émotions que nous avons vécus hier et avant-hier, à l’occasion de la création de 24 nouveaux cardinaux. Ce furent des moments de fervente prière et de profonde communion, que nous désirons prolonger aujourd’hui, l’âme emplie de gratitude envers le Seigneur, qui nous a donné la joie de vivre une nouvelle page de l’histoire de l’Eglise. Je suis donc heureux de vous accueillir aujourd’hui également, à l’occasion de cette rencontre simple et familiale, et d’adresser mon salut cordial aux nouveaux cardinaux, ainsi qu’à leurs familles, amis et tous ceux qui les accompagnent en cette circonstance si solennelle et importante.

Le Saint-Père s’est ensuite adressé aux cardinaux dans leurs langues respectives. Voici ce qu’il a dit en français:

J'adresse mon cordial salut aux nouveaux cardinaux francophones: le patriarche d'Alexandrie des Coptes, le cardinal Antonios Naguib; le président du Conseil pontifical «Cor Unum», le cardinal Robert Sarah; l'archevêque de Kinshasa, le cardinal Laurent Monsengwo Pasinya. Je salue aussi avec joie leurs proches et toutes les personnes qui les accompagnent en ces jours de fête que nous venons de vivre. Chers amis, ces célébrations nous appellent à élargir notre regard aux dimensions de l'Eglise universelle. Je vous invite à prier pour les nouveaux cardinaux afin qu'en communion avec le Successeur de Pierre ils travaillent efficacement à l'unité et à la sainteté du Peuple de Dieu tout entier. Et vous mêmes, soyez des témoins ardents de l'Evangile pour redonner au monde l'espérance dont il a besoin et pour contribuer partout à l'établissement de la paix et de la fraternité.


À LA FÉDÉRATION ITALIENNE DES HEBDOMADAIRES CATHOLIQUES Salle Clémentine Vendredi 26 novembre 2010

Chers frères et soeurs,

Je suis heureux de vous rencontrer, à l’occasion de l’assemblée de la Fédération italienne des hebdomadaires catholiques. J’adresse un salut cordial à Mgr Mariano Crociata, secrétaire de la Conférence épiscopale italienne, aux prélats et aux prêtres présents, ainsi qu’à don Giorgio Zucchelli, président de la Fédération, que je remercie de ses paroles courtoises. Je vous salue tous, directeurs et collaborateurs des 188 publications catholiques représentées au sein de la Fédération; en particulier le directeur de l’agence SIR et le directeur du quotidien «Avvenire». Je suis reconnaissant de cette rencontre, avec laquelle vous manifestez votre fidélité à l’Eglise et à son magistère; je vous remercie également du soutien que vous continuez à apporter à la collecte du Denier de Saint-Pierre et aux initiatives de bienfaisance organisées et soutenues par le Saint-Siège.

La Fédération italienne des hebdomadaires catholiques rassemble les hebdomadaires diocésains et les divers organes de presse d’inspiration catholique de toute la péninsule italienne. Elle naquit en 1966, pour répondre à l’exigence de développer des synergies et des collaborations, visant à favoriser la précieuse tâche de faire connaître la vie, l’activité et l’enseignement de l’Eglise. En créant des canaux de communication entre les divers organes de presse locaux, présents dans toute l’Italie, on a voulu répondre à l’exigence de promouvoir la collaboration et donner autant que possible un caractère organique aux diverses potentialités intellectuelles et créatives, précisément pour accroître l’efficacité et la force de l’annonce du message évangélique. Telle est la fonction particulière des journaux d’inspiration catholique: annoncer la Bonne Nouvelle à travers le récit des faits concrets que vivent les communautés chrétiennes et des situations réelles dans lesquelles elles sont insérées. De même qu’une petite quantité de levain, mélangé avec la farine, fait fermenter toute la pâte, ainsi l’Eglise, présente dans la société, fait croître et mûrir ce qui s’y trouve de vrai, de bon et de beau; et vous avez la tâche de rendre compte de cette présence, de promouvoir et de fortifier ce qui est authentiquement humain et qui apporte à l’homme d’aujourd’hui le message de vérité et d’espérance du Seigneur Jésus.

Vous savez bien que, dans le contexte de la post-modernité dans lequel nous vivons, l’un des défis culturels les plus importants concerne la manière d’entendre la vérité. La culture dominante, celle qui est la plus diffuse dans l’aréopage médiatique, adopte, à l’égard de la vérité, une attitude sceptique et relativiste, la considérant au même niveau que les simples opinions et jugeant, en conséquence, possibles et légitimes de nombreuses «vérités». Mais le désir qui se trouve dans le coeur de l’homme témoigne de l’impossibilité de se contenter de vérités partielles; c’est pourquoi, la personne humaine «tend vers une vérité ultérieure qui soit susceptible d'expliquer le sens de la vie; c'est donc une recherche qui ne peut aboutir que dans l'absolu » (Jean-Paul II, Fides et ratio FR 33). La vérité, dont l’homme est assoiffé, est une personne: le Seigneur Jésus. Dans la rencontre avec cette Vérité, en la connaissant et en l’aimant, nous trouvons la paix véritable et le bonheur véritable. La mission de l’Eglise consiste à créer les conditions pour que se réalise cette rencontre de l’homme avec le Christ. En collaborant à cette tâche, les organes d’information sont appelés à servir la vérité avec courage, pour aider l’opinion publique à regarder et à lire la réalité d’un point de vue évangélique. Il s’agit de présenter les raisons de la foi, qui, en tant que telles, vont au-delà de toute vision idéologique et ont pleinement le droit de citoyenneté dans le débat public. C’est de cette exigence que naît votre engagement constant à donner voix à un point de vue qui reflète la pensée catholique dans toutes les questions éthiques et sociales.

1205 Chers amis, l’importance de votre présence est témoignée par la diffusion ramifiée des publications de presse que vous représentez. Cette diffusion passe à travers le papier imprimé, qui, précisément en raison de sa simplicité, continue à être une caisse de résonance efficace pour tout ce qui a lieu au sein des différentes réalités diocésaines. Je vous exhorte donc à poursuivre votre service d’information sur les événements qui marquent le chemin des communautés, sur leur vécu quotidien, sur les nombreuses activités caritatives et de bienfaisance qu’elles promeuvent. Continuez à être les journaux des personnes, en cherchant à favoriser un dialogue authentique entre les différentes composantes sociales, en étant un terrain de confrontation et de débat loyal entre les différentes opinions. En agissant ainsi, les journaux catholiques, alors qu’ils accomplissent le devoir important d’informer, exercent dans le même temps une fonction de formation irremplaçable, en promouvant une compréhension évangélique de la réalité complexe, ainsi que l’éducation de consciences critiques et chrétiennes. Ainsi, vous répondez également à l’appel de la Conférence épiscopale italienne, qui a placé au centre de l’engagement pastoral de la prochaine décennie le défi éducatif, la nécessité de donner au peuple chrétien une formation solide et robuste.

Chers frères et soeurs, chaque chrétien, à travers le sacrement du Baptême, devient le temple de l’Esprit Saint et, plongé dans la mort et la résurrection du Seigneur, il est consacré à Lui et lui appartient. Vous aussi, pour mener à bien votre importante tâche, vous devez tout d’abord cultiver un lien constant et profond avec le Christ; seule une profonde communion avec Lui vous rendra capables d’apporter à l’homme d’aujourd’hui l’annonce du Salut! Avec zèle et dévouement dans votre travail quotidien sachez témoigner de votre foi, le grand don gratuit de la vocation chrétienne. Continuez à demeurer dans la communion ecclésiale avec vos pasteurs, de manière à pouvoir coopérer avec eux, comme directeurs, rédacteurs et administrateurs d’hebdomadaires catholiques, à la mission évangélisatrice de l’Eglise.

En prenant congé de vous, je voudrais vous assurer de mon souvenir à l’intention du regretté Mgr Franco Peradotto, récemment disparu, premier président de la Fédération des hebdomadaires catholiques italiens et pendant longtemps directeur de la «Voce del Popolo» de Turin. En confiant la Fédération et votre travail à l’intercession céleste de la Vierge Marie et de saint François de Sales, je vous donne de tout coeur, ainsi qu’à tous vos collaborateurs ma Bénédiction apostolique


À S.E. M. HIDEKAZU YAMAGUCHI, NOUVEL AMBASSADEUR DU JAPON PRÈS LE SAINT-SIÈGE Samedi 27 novembre 2010



Excellence,

Je suis heureux de vous accueillir et d’accepter les Lettres qui vous accréditent comme Ambassadeur Extraordinaire et Plénipotentiaire du Japon près le Saint-Siège. Je vous suis reconnaissant des courtoises salutations que vous m’avez adressées de la part de Sa Majesté l’Empereur. En retour, je vous prie de bien vouloir lui transmettre mes voeux cordiaux et l’assurance de ma prière pour sa santé et celle des membres de la Famille impériale. Je suis heureux aussi de saluer le Gouvernement et tout le peuple du Japon. Le Saint-Siège se félicite des excellentes relations qu’il a toujours entretenues avec votre pays depuis de leur établissement, il y a presque soixante ans. Elles ont constamment été marquées par la cordialité et la compréhension mutuelle. A travers les bons offices de Votre Excellence, je voudrais assurer Sa Majesté Impériale ainsi que le Gouvernement de l’engagement du Saint-Siège à poursuivre et renforcer ces relations.

Depuis son entrée dans l’organisation des Nations-Unies, le Japon a été un acteur important, sur la scène régionale et internationale et a contribué de manière significative à l’expansion de la paix, de la démocratie et des droits de l’homme en Extrême-Orient et bien au-delà, en particulier dans les pays du monde en voie de développement. Le Saint-Siège, par l’intermédiaire de ses missions diplomatiques présentes dans ces Etats, a noté avec satisfaction le financement accordé par votre pays pour le développement ainsi que d’autres formes d’assistance. Les répercussions sur les bénéficiaires sont immédiates, c’est vrai, mais c’est certainement là une pierre de fondation essentielle pour l’instauration d’une paix solide et de la prospérité dans le concert des nations du monde. En travaillant ainsi à l’édification de l’unité de la famille humaine, par la coopération internationale, vous aiderez à construire une économie mondiale où chacun occupera la place qui lui est due et pourra profiter, comme jamais auparavant, des ressources mondiales. Permettez-moi d’encourager votre Gouvernement à continuer sa politique de coopération au développement, en particulier dans les domaines qui touchent les plus pauvres et les plus faibles.

Cette année marque le soixante-cinquième anniversaire du tragique bombardement atomique sur les populations de Hiroshima et de Nagasaki. Le souvenir de ce sombre épisode de l’histoire de l’humanité devient chaque année plus poignant, au fur et à mesure que disparaissent ceux qui ont été témoins d’une telle horreur. Cette tragédie nous rappelle avec insistance combien il est nécessaire de persévérer dans les efforts en faveur de la non-prolifération des armes nucléaires et pour le désarmement. L’arme nucléaire reste une source de préoccupation majeure. Sa possession et le risque de son éventuel usage soulèvent des tensions et une méfiance dans un bon nombre de régions du monde. Votre nation, Monsieur l’Ambassadeur, doit être citée en exemple pour son soutien constant à la recherche de solutions politiques qui permettent non seulement d’empêcher la prolifération d’armes nucléaires mais aussi d’éviter que la guerre ne soit considérée comme un moyen de résolution des conflits entre les nations et entre les peuples.

Tout en partageant avec le Japon ce souci d’un monde sans armes nucléaires, le Saint-Siège encourage toutes les nations à tisser patiemment les liens économiques et politiques de la paix qui s’élèvent, comme un rempart contre tout prétexte de recours aux armes et qui permettent de promouvoir le développement humain intégral de tous les peuples (cf. Audience générale , le LE 5 mai 2010). Une part des sommes allouées aux armes pourrait être réaffectée à des projets de développement économique et social, d’éducation et de santé. Cela contribuerait sans aucun doute à la stabilité intérieure des pays et à celle entre les peuples (cf. Caritas in veritate ). Or, en ces temps d’instabilité des marchés et de l’emploi, la nécessité de trouver des financements sûrs de développement demeure une préoccupation constante.

Les difficultés liées à la récession économique mondiale actuelle n’ont épargné aucun pays. Malgré cela, la place du Japon dans l’économie internationale reste très importante et, en raison de la mondialisation croissante du système commercial et des mouvements de capitaux, qui est une réalité, les décisions prises par votre Gouvernement continueront d’avoir un impact bien au-delà de vos frontières. Puissent tous les peuples de bonne volonté voir dans la crise économique mondiale actuelle une « occasion de discernement [qui] met en capacité d’élaborer de nouveaux projets » (Caritas in veritate ), projets marqués par la charité dans la vérité, par la solidarité et par un engagement en faveur d’une sphère économique orientée de façon éthique (ibid, 36).

Votre pays, Excellence, jouit de la liberté de conscience et de la liberté de culte depuis de nombreuses années, et l'Église Catholique au Japon a ainsi la possibilité de vivre en paix et dans la fraternité avec chacun. Ses membres sont libres non seulement de s’engager dans la culture et la société japonaises, mais de jouer un rôle vivant et actif dans le Japon contemporain, en particulier à travers ses universités, ses écoles, ses hôpitaux et ses institutions caritatives, qu’elle met bien volontiers au service de toute la communauté. Dernièrement, ces institutions ont été heureuses de répondre également aux besoins des populations migrantes venues au Japon, et dont la situation requiert certainement une prudente attention et une aide effective de la part de toute la société.

1206 Plus encore, je souligne que les membres de l'Église catholique au Japon sont engagés depuis longtemps dans un dialogue ouvert et respectueux avec les autres religions, spécialement celles qui plongent leurs racines dans votre nation. L'Église a toujours promu le respect de la personne humaine dans son intégrité et dans sa dimension spirituelle, comme un élément essentiel commun à toutes les cultures qui s’exprime dans la recherche personnelle du sacré et dans la pratique religieuse. « Dieu est le garant du véritable développement de l’homme, dans la mesure où, l’ayant créé à son image, il en fonde aussi la dignité transcendante et alimente en lui la soif d’‘être plus’ » (ibid, 29). Je voudrais assurer le peuple japonais de la haute considération en laquelle l'Église catholique porte le dialogue interreligieux, l’engageant fermement afin d’encourager la confiance mutuelle, la compréhension et l’amitié, dans l’intérêt de la famille humaine tout entière.

Enfin, Monsieur l’Ambassadeur, permettez-moi de vous offrir mes voeux les meilleurs accompagnés de ma prière pour le succès de votre mission, et de vous assurer que les différents bureaux de la Curie Romaine sont prêts à vous aider dans l’exercice de vos fonctions. Sur Votre Excellence, sur votre famille et sur le noble peuple du Japon, j’invoque cordialement d’abondantes bénédictions de Dieu.






AUX ÉVÊQUES DE LA CONFÉRENCE ÉPISCOPALE DES PHILIPPINES EN VISITE «AD LIMINA APOSTOLORUM» Lundi 29 novembre 2010

Chers frères évêques,

Je suis heureux de vous souhaiter à tous une chaleureuse bienvenue à l'occasion de votre visite ad limina Apostolorum. Je remercie le cardinal Gaudencio Rosales des paroles courtoises qu'il m'a adressées en votre nom, et je vous assure de mes prières et de mes meilleurs voeux pour vous-mêmes et pour tous les fidèles confiés à vos soins pastoraux. Votre présence ici à Rome resserre les liens entre la communauté catholique aux Philippines et le Siège de Pierre, une communion qui remonte à plus de quatre siècles, lors de la première offrande du Sacrifice eucharistique sur vos côtes. Votre peuple s'est nourri à cette communion de foi et de sacrement pendant de nombreuses générations. Je prie pour qu’elle puisse continuer de servir de levain dans la culture au sens large, afin que les générations présentes et futures de Philippins continuent de rencontrer le message de joie de l'Evangile de notre Seigneur Jésus Christ.

Pour être un tel levain, l'Eglise doit toujours essayer de trouver sa propre voix, car c'est par sa proclamation que l'Evangile porte ses fruits de conversion de la vie (cf. Mc 16,15-16). Cette voix s'exprime dans le témoignage moral et spirituel de la vie des croyants. Elle s'exprime aussi dans le témoignage public offert par les évêques, en tant que premiers enseignants de l'Eglise, ainsi que par tous ceux qui ont un rôle dans l'enseignement de la foi aux autres. Grâce à la présentation claire, dans l'Evangile, de la vérité sur Dieu et sur l'homme, des générations de prêtres, religieux et laïcs philippins emplis de zèle, ont promu un ordre social toujours plus juste. Parfois, ce devoir de proclamation touche à des questions relevant de la sphère politique. Cela n'est pas surprenant, car la communauté politique et l'Eglise, bien que distinctes à juste titre, sont néanmoins toutes deux au service du développement intégral de tout être humain et de la société dans son ensemble. Pour sa part, l'Eglise contribue fortement à la construction d'un ordre social juste et charitable, «en prêchant la vérité de l’Evangile, en éclairant tous les secteurs de l’activité humaine par sa doctrine et par le témoignage que rendent des chrétiens, l’Eglise respecte et promeut aussi la liberté politique et la responsabilité des citoyens » (Gaudium et spes GS 76).

Dans le même temps, la mission prophétique de l'Eglise exige qu'elle soit libre de «prêcher la foi avec une authentique liberté, enseigner sa doctrine sociale… porter un jugement moral, même en des matières qui touchent le domaine politique, quand les droits fondamentaux de la personne ou le salut des âmes l’exigent » (ibid.). A la lumière de cette tâche prophétique, je demande à l'Eglise qui est aux Philippines de chercher à jouer son rôle pour soutenir la vie humaine de sa conception à sa mort naturelle, et pour défendre l'intégrité du mariage et de la famille. Dans ces domaines, vous promouvez des vérités sur la personne et sur la société qui n'ont pas seulement pour origine la révélation divine mais aussi la loi naturelle, un ordre accessible à la raison humaine et qui offre ainsi une base pour un dialogue et un discernement plus profonds de la part de toutes les personnes de bonne volonté. Je me félicite également du travail de l'Eglise en vue d'abolir la peine de mort dans votre pays.

Il existe un domaine spécifique dans lequel l'Eglise doit toujours trouver sa propre voix: celui des communications sociales et des médias. La tâche qui se présente à l'ensemble de la communauté catholique est de transmettre une vision pleine d'espérance de la foi et de la vertu, afin que les Philippins puissent trouver un encouragement et une orientation dans leur chemin vers une vie en plénitude dans le Christ. Une voix unifiée et positive doit être présentée au public dans les médias, sous des formes nouvelles ou anciennes, afin que le message de l'Evangile puisse avoir un impact toujours plus fort sur les membres de la nation. Il est important que les laïcs catholiques compétents dans le domaine des communications sociales assument leur rôle en proposant le message chrétien d'une manière convaincante et attirante. Si l'Evangile du Christ doit être le levain de la société philippine, alors l'ensemble de la communauté catholique doit être attentive à la force de la vérité proclamée avec amour.

Un troisième aspect de la mission de l'Eglise de proclamer la parole de vie de Dieu consiste dans son engagement dans les questions économiques et sociales, en particulier à l’égard des plus pauvres et des plus faibles dans la société. Lors de la deuxième assemblée plénière des Philippines, l'Eglise dans votre nation s'est intéressée en particulier aux moyens de se dévouer plus pleinement à l’assistance des pauvres. Il est réconfortant de voir que cette entreprise a porté des fruits, avec des institutions catholiques caritatives activement engagées à travers le pays. Beaucoup de vos concitoyens, toutefois, demeurent encore sans travail, sans une éducation adéquate, démunis des services de base, si bien que vos discours prophétiques et votre action charitable en faveur des pauvres continuent d'être hautement appréciés. En plus de cet effort, vous êtes à juste titre attentifs à ce qu'il y ait un engagement permanent dans la lutte contre la corruption, car seule une application claire et solide de l'Etat de droit à travers le pays peut assurer la croissance d'une économie juste et durable.

Chers frères évêques, comme mon prédécesseur le Pape Jean-Paul II l'observait justement: «Vous êtes les pasteurs d'un peuple qui aime Marie» (Discours à la conférence des évêques des Philippines, 14 janvier 1995; cf. ORLF n. 4 du 24 janvier 1995). Puisse sa volonté de porter la Parole qui est Jésus Christ dans le monde être pour vous une inspiration permanente dans votre ministère apostolique.

A chacun de vous, ainsi qu'aux prêtres, aux religieux et aux laïcs de vos diocèses, je donne de tout coeur ma Bénédiction apostolique en gage de paix et de joie.


À LA COMMISSION THÉOLOGIQUE INTERNATIONALE Salle du Consistoire Vendredi 3 décembre 2010

31210
Monsieur le cardinal,
vénérés frères dans l’épiscopat,
illustres professeurs et chers collaborateurs!

C’est avec joie que je vous accueille, au terme des travaux de votre session plénière annuelle. Je désire tout d’abord exprimer mes sincères remerciements pour les paroles d’hommage que, au nom de tous, Monsieur le cardinal, en qualité de président de la Commission théologique internationale, vous avez voulu m’adresser. Les travaux de ce huitième «quinquennat» de la Commission, comme vous l’avez rappelé, affrontent les thèmes suivants d’une grande importance: la théologie et sa méthodologie; la question de l’unique Dieu en relation avec les trois autres religions monothéistes; l’intégration de la doctrine sociale de l’Eglise dans le vaste contexte de la doctrine chrétienne.

«En effet, l’amour du Christ nous saisit quand nous pensons qu’un seul est mort pour tous, et qu’ainsi tous ont passé par la mort. Car le Christ est mort pour tous, afin que les vivants n’aient plus leur vie centrée sur eux-mêmes, mais sur lui, qui est mort et ressuscité pour eux» (
2Co 5,14-15). Comment ne pas ressentir également comme nôtre cette belle réaction de l’apôtre Paul lors de sa rencontre avec le Christ ressuscité? Cette expérience se trouve précisément à la racine des trois thèmes importants que vous avez approfondis lors de votre session plénière qui vient de se conclure.

Celui qui a découvert dans le Christ l’amour de Dieu, déversé par l’Esprit Saint dans nos coeurs, désire mieux connaître Celui par qui il est aimé et qu’il aime. Connaissance et amour se soutiennent mutuellement. Comme l’ont affirmé les pères de l’Eglise, quiconque aime Dieu est poussé à devenir, dans un certain sens, un théologien, quelqu’un qui parle avec Dieu, qui réfléchit sur Dieu et qui cherche à penser avec Dieu; alors que le travail professionnel d’un théologien est pour certains une vocation pleine de responsabilité devant le Christ, devant l’Eglise. Pouvoir étudier Dieu lui-même de manière professionnelle et pouvoir parler — contemplari et contemplata docere (S. Thomas d’Aquin, Super sent., lib. 3 d. 35 q. 1 a. 3 qc. 1 arg. 3) — est un grand privilège. Votre réflexion sur la vision chrétienne de Dieu pourra apporter une contribution précieuse aussi bien pour la vie des fidèles que pour notre dialogue avec les croyants d’autres religions et aussi avec les non-croyants. De fait, la parole même «théo-logie» révèle cet aspect communicatif de votre travail — dans la théologie nous cherchons, à travers le «logos» à communiquer ce que «nous avons vu et entendu» (1Jn 1,3). Mais nous savons bien que la parole «logos » possède une signification beaucoup plus vaste, qui comprend également le sens de «ratio», «raison». Et ce fait nous conduit à un deuxième point très important. Nous pouvons penser à Dieu et transmettre ce que nous avons pensé, car Il nous a dotés d’une raison en harmonie avec sa nature. Ce n’est pas par hasard que l’Evangile de Jean commence par l’affirmation: «Au commencement était le Logos... et le Logos était Dieu» (Jn 1,1). Accueillir ce Logos — cette pensée divine — est, enfin, également une contribution à la paix dans le monde. En effet, connaître Dieu dans sa véritable nature est également une manière sûre pour assurer la paix. Un Dieu qui ne serait pas perçu comme une source de pardon, de justice et d’amour, ne pourrait pas être la lumière sur le chemin de la paix.

Etant donné que l’homme tend toujours à relier ses connaissances les unes aux autres, la connaissance de Dieu s’organise également de manière systématique. Mais aucun système théologique ne peut subsister s’il n’est pas imprégné par l’amour de son «Objet» divin, qui dans la théologie doit nécessairement être le «Sujet» qui nous parle et avec lequel nous sommes en relation d’amour. Ainsi, la théologie doit toujours être nourrie par le dialogue avec le Logos divin, Créateur et Rédempteur. En outre, aucune théologie n’est telle si elle n’est pas intégrée dans la vie et dans la réflexion de l’Eglise, à travers le temps et l’espace. Oui, il est vrai que, pour être scientifique, la théologie doit raisonner de manière rationnelle, mais elle doit également être fidèle à la nature de la foi ecclésiale: axée sur Dieu, enracinée dans la prière, dans une communion avec les autres disciples du Seigneur garantie par la communion avec le Successeur de Pierre et tout le collège épiscopal.

Cet accueil et cette transmission du Logos a également pour conséquence que la rationalité même de la théologie aide à purifier la raison humaine en la libérant de certains préjugés et idées qui peuvent exercer une profonde influence sur la pensée de chaque époque. Il faut, d’autre part, remarquer que la théologie vit toujours en continuité et en dialogue avec les croyants et les théologiens qui nous ont précédés; la communion ecclésiale étant diachronique, la théologie l’est aussi. Le théologien ne commence jamais à partir de zéro, mais il considère comme des maîtres les Pères et les théologiens de toute la tradition chrétienne. Enracinée dans les Saintes Ecritures, lues avec les Pères et les Docteurs, la théologie peut être une école de sainteté, comme en a témoigné le bienheureux John Henry Newman. Faire découvrir la valeur permanente de la richesse transmise par le passé n’est pas une mince contribution de la théologie au concert des sciences.

Le Christ est mort pour tous, bien que tous ne le sachent pas ou ne l’acceptent pas. Ayant reçu l’amour de Dieu, comment pourrions-nous ne pas aimer ceux pour lesquels le Christ a donné sa propre vie? «Lui, Jésus, a donné sa vie pour nous. Nous aussi, nous devons donner notre vie pour nos frères» (1Jn 3,16). Tout cela nous conduit au service des autres au nom du Christ; en d’autres termes, l’engagement social des chrétiens dérive nécessairement de la manifestation de l’amour divin. Contemplation de Dieu révélé et charité pour le prochain ne peuvent pas être séparées, même si on les vit selon divers charismes. Dans un monde qui apprécie souvent de nombreux dons du christianisme — comme par exemple l’idée d’égalité démocratique — sans comprendre la racine de ses propres idéaux, il est particulièrement important de montrer que les fruits meurent si la racine de l’arbre est coupée. En effet, il n’y a pas de justice sans vérité, et la justice ne se développe pas pleinement si son horizon se limite au monde matériel. Pour nous chrétiens, la solidarité sociale a toujours une perspective d’éternité.

1208 Chers amis théologiens, notre rencontre d’aujourd’hui manifeste de manière précieuse et singulière l’unité indispensable qui doit régner entre théologiens et pasteurs. On ne peut pas être théologiens dans la solitude: les théologiens ont besoin du ministère des pasteurs de l’Eglise, comme le magistère a besoin de théologiens qui accomplissent jusqu’au bout leur service, avec toute l’ascèse que cela implique. A travers votre Commission, je désire donc remercier tous les théologiens et les encourager à avoir foi dans la grande valeur de leur engagement. En vous présentant mes meilleurs voeux pour votre travail, je vous donne avec affection ma Bénédiction.




Discours 2005-2013 1202