Discours 2005-2013 1517


ANIMÉE PAR LA COMMUNAUTÉ DE TAIZÉ Place Saint-Pierre Samedi 29 décembre 2012

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Merci, cher frère Alois, pour vos paroles chaleureuses et pleines d'affection. Chers jeunes, chers pèlerins de la confiance, soyez les bienvenus à Rome !

Vous êtes venus très nombreux, de toute l'Europe et aussi des autres continents, pour prier près des tombeaux des saints apôtres Pierre et Paul. C'est en effet dans cette ville qu'ils ont, l'un et l'autre, versé leur sang pour le Christ. La foi qui animait ces deux grands apôtres de Jésus est aussi celle qui vous a mis en route. Pendant l'année qui vient, vous voulez chercher à dégager les sources de la confiance en Dieu pour en vivre au quotidien. Je me réjouis que vous rencontriez par là l'intention de l'année de la foi qui a commencé au mois d'octobre.

C'est la quatrième fois que vous avez une rencontre européenne à Rome. A cette occasion, je voudrais vous redire les paroles que mon prédécesseur le Bienheureux Jean-Paul II avait dites aux jeunes lors de votre troisième rencontre à Rome : « Le pape se sent profondément engagé avec vous dans ce pèlerinage de confiance sur la terre. Et je suis moi aussi appelé à être un pèlerin de confiance au nom du Christ ».

Il y a un peu plus de 70 ans, frère Roger a donné naissance à la communauté de Taizé. Celle-ci continue de voir venir vers elle des milliers de jeunes du monde entier, en quête d'un sens à leur vie, les frères les accueillent dans leur prière et leur fournissent l’occasion de faire l'expérience d'une relation personnelle avec Dieu. C'est pour soutenir ces jeunes dans leur marche vers le Christ que frère Roger a eu l'idée de commencer un « pèlerinage de confiance à travers la terre ».

Témoin infatigable de l’Évangile de paix et de réconciliation, animé par le feu d'un oecuménisme de la sainteté, frère Roger a encouragé tous ceux qui passent par Taizé à devenir des chercheurs de communion. Je l’ai dit dès le lendemain de sa mort : « Nous devrions écouter de l'intérieur son oecuménisme vécu spirituellement et nous laisser conduire par son témoignage vers un oecuménisme vraiment intériorisé et spiritualisé. » À sa suite, soyez tous des porteurs de ce message d'unité. Je vous assure de l'engagement irrévocable de l'Église catholique à poursuivre la recherche de chemins de réconciliation pour parvenir à l'unité visible des chrétiens. Et ce soir je voudrais saluer avec une affection toute particulière ceux d'entre vous qui sont orthodoxes ou protestants.

1518 Aujourd'hui, le Christ vous pose la question qu'il a adressée à ses disciples: « Qui suis-je pour vous ? » À cette question, Pierre, près du tombeau duquel nous nous trouvons en ce moment, a répondu : « Tu es le Christ, le fils du Dieu Vivant » (Mt 16,15-16). Et toute sa vie est devenue une réponse concrète à cette question. Le Christ souhaite recevoir de chacun de vous aussi une réponse qui vienne, non de la contrainte ni de la peur, mais de votre liberté profonde. C'est en répondant à cette question que votre vie trouvera son sens le plus fort. Le texte de la Lettre de saint Jean que nous venons d’entendre, nous fait comprendre avec grande simplicité comme en résumé comment donner une réponse : « Avoir foi en son Fils Jésus Christ et nous aimer les uns les autres » (3, 23). Avoir foi et aimer Dieu et les autres ! Quoi de plus exaltant ? Quoi de plus beau ?

Pendant ces jours à Rome, puissiez-vous laisser monter dans vos coeurs ce oui au Christ, en mettant à profit en particulier les longs temps de silence qui occupent une place centrale dans vos prières communes, à la suite de l'écoute de la Parole de Dieu. Cette Parole, dit la Seconde Lettre de Pierre, est « comme une lampe brillant dans un lieu obscur » , que vous faites bien de regarder « jusqu'à ce que luise le jour et que l'étoile du matin se lève dans vos coeurs » (1, 19). Vous l'avez compris : si l'étoile du matin doit se lever dans vos coeurs c'est qu'elle n'y est pas toujours. Parfois le mal et la souffrance des innocents créent en vous le doute et le trouble. Et le oui au Christ peut devenir difficile. Mais ce doute ne fait pas de vous des incroyants ! Jésus n'a pas rejeté l'homme de l’Évangile qui s'est écrié : « Je crois ! Viens au secours de mon manque de foi ! » (Mc 9,24).

Pour tenir dans ce combat de la confiance, Dieu ne vous laisse pas seuls et isolés. Il nous donne à tous la joie et le réconfort de la communion de l’Église.

Pendant votre séjour à Rome, grâce notamment à l'accueil généreux de tant de paroisses et de communautés religieuses, vous faites une nouvelle expérience d’Église. Au retour chez vous, dans vos divers pays, je vous invite à découvrir que Dieu vous fait coresponsables de son Église, dans toute la diversité des vocations. Cette communion qu'est le Corps du Christ a besoin de vous et vous y avez toute votre place. C'est à partir de vos dons, de ce qu'il y a de spécifique à chacun de vous, que l'Esprit Saint façonne et fait vivre ce mystère de communion qu'est l’Église, en vue de transmettre la bonne nouvelle de l'Évangile au monde d'aujourd'hui.

Avec le silence, le chant occupe une grande place dans vos prières communes. Les chants de Taizé remplissent ces jours les basiliques de Rome. Le chant est un soutien et une expression incomparables de la prière. En chantant le Christ, vous vous ouvrez également au mystère de son espérance. N'ayez pas peur de devancer l'aurore pour louer Dieu. Vous ne serez pas déçus.

Chers jeunes amis, le Christ ne vous retire pas du monde. Il vous envoie là où la lumière fait défaut pour que vous la portiez à d'autres. Oui, vous êtes tous appelés à être de petites lumières pour ceux qui vous entourent. Par votre attention à une plus équitable répartition des biens de la terre, par votre engagement pour la justice et pour une nouvelle solidarité humaine, vous aiderez ceux qui sont autour de vous à mieux comprendre combien l'Évangile nous conduit à la fois vers Dieu et vers les autres. Ainsi, avec votre foi, vous contribuerez à ce que se lève une confiance sur la terre.

Soyez donc plein d’espérance. Que Dieu vous bénisse ainsi que vos familles et vos amis !





DISCOURS JANVIER 2013

DISCOURS

À L'OCCASION DE LA PRÉSENTATION DES VOEUX DU

CORPS DIPLOMATIQUE ACCRÉDITÉ PRÈS LE SAINT-SIÈGE

Salle royale
1519 Lundi 7 janvier 2013
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Excellences,
Mesdames et Messieurs,

Je suis heureux de vous accueillir, comme au début de chaque nouvelle année, distingués Membres du Corps diplomatique accrédité près le Saint-Siège, pour vous adresser mes salutations et mes voeux personnels, que j’étends volontiers aux chères Nations que vous représentez, les assurant de mon souvenir constant et de ma prière. Je suis particulièrement reconnaissant au Doyen, l’Ambassadeur Alejandro Valladares Lanza, et au Vice-Doyen, l’Ambassadeur Jean-Claude Michel, pour les paroles déférentes qu’ils m’ont adressées au nom de vous tous. De manière spéciale, je désire ensuite saluer ceux qui prennent part pour la première fois à cette rencontre. Votre présence est un signe significatif et apprécié des rapports fructueux que, dans le monde entier, l’Église catholique entretient avec les Autorités civiles. Il s’agit d’un dialogue qui a à coeur le bien intégral, spirituel et matériel, de chaque homme, et cherche à en promouvoir partout la dignité transcendante. Comme je l’ai rappelé dans mon Allocution à l’occasion du dernier Consistoire ordinaire public pour la création de nouveaux Cardinaux, « l’Église, depuis ses origines, est orientée kat’holon, c’est-à-dire qu’elle embrasse tout l’univers » et avec lui chaque peuple, chaque culture et chaque tradition. Cette “orientation” ne représente pas une ingérence dans la vie des diverses sociétés, mais elle sert plutôt à illuminer la conscience droite de leurs citoyens et à les inviter à travailler pour le bien de chaque personne et pour le progrès du genre humain. C’est dans cette perspective, et pour favoriser une collaboration fructueuse entre l’Église et l’État au service du bien commun, que l’année dernière, ont été signés des Accords bilatéraux entre le Saint-Siège et le Burundi ainsi qu’avec la Guinée Équatoriale, et que celui avec le Monténégro a été ratifié. Dans le même esprit, le Saint-Siège participe aux travaux de diverses Organisations et Institutions internationales. À ce propos, je suis heureux qu’au mois de décembre dernier sa demande pour devenir Observateur Extrarégional dans le Système d’Intégration de l’Amérique centrale ait été accueillie, en raison aussi de la contribution que l’Église catholique offre dans plusieurs secteurs des sociétés de cette Région. Les visites de divers Chefs d’État et de Gouvernement que j’ai reçues au cours de l’année écoulée, comme aussi les inoubliables Voyages apostoliques que j’ai effectués au Mexique, à Cuba et au Liban, ont été des occasions privilégiées pour raffermir l’engagement civique des chrétiens de ces pays ainsi que pour promouvoir la dignité de la personne humaine et les fondements de la paix.

En ce lieu, il m’est également agréable de mentionner le précieux travail accompli par les Représentants Pontificaux, dans un dialogue constant avec vos Gouvernements. Je désire rappeler en particulier l’estime dont a joui Monseigneur Ambrose Madtha, Nonce Apostolique en Côte d’Ivoire, qui a péri tragiquement, il y a un mois, dans un accident de la route, avec le chauffeur qui l’accompagnait.

Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs,

L’Évangile de Luc relate que, dans la nuit de Noël, les bergers entendent les choeurs angéliques qui glorifient Dieu et invoquent la paix sur l’humanité. L’Évangéliste souligne ainsi l’étroite relation entre Dieu et le désir ardent de l’homme de tous les temps de connaître la vérité, de pratiquer la justice et de vivre dans la paix (cf. Jean XXIII, Pacem in terris , AAS 55 [1963], 257). Aujourd’hui, on est quelquefois amené à penser que la vérité, la justice et la paix sont des utopies et qu’elles s’excluent mutuellement. Connaître la vérité semble impossible et les efforts pour l’affirmer semblent souvent aboutir à la violence. D’autre part, selon une conception désormais diffuse, l’engagement pour la paix ne consiste que dans la recherche de compromis qui garantissent la cohabitation entre les peuples ou entre les citoyens à l’intérieur d’une Nation. Dans l’optique chrétienne, au contraire, il existe un lien intime entre la glorification de Dieu et la paix des hommes sur la terre, si bien que la paix ne vient pas d’un simple effort humain, mais participe de l’amour même de Dieu. Et c’est justement l’oubli de Dieu, et non pas sa glorification, qui engendre la violence. En effet, quand on cesse de se référer à une vérité objective et transcendante, comment est-il possible de réaliser un dialogue authentique ? Dans ce cas, comment peut-on éviter que la violence, déclarée ou cachée, ne devienne la règle dernière des rapports humains ? En réalité, sans une ouverture transcendante, l’homme devient facilement la proie du relativisme et, ensuite, il réussit difficilement à agir selon la justice et à s’engager pour la paix.

Aux manifestations de l’oubli de Dieu on peut associer celles dues à l’ignorance de son vrai visage, qui est la cause d’un fanatisme pernicieux de matrice religieuse, qui, en 2012 aussi, a fait des victimes dans certains pays, ici représentés. Comme je l’ai déjà dit, il s’agit d’une falsification de la religion elle-même, alors que celle-ci, au contraire, vise à réconcilier l’homme avec Dieu, à éclairer et à purifier les consciences et à rendre clair que chaque homme est image du Créateur.

Donc, si la glorification de Dieu et la paix sur la terre sont étroitement liées entre elles, il apparaît évident que la paix est, en même temps, don de Dieu et tâche de l’homme, parce qu’elle exige sa réponse libre et consciente. Pour ce motif, j’ai voulu intituler le Message annuel pour la Journée mondiale de la Paix : Heureux les artisans de paix. C’est avant tout aux Autorités civiles et politiques qu’incombe la grave responsabilité d’oeuvrer pour la paix. Elles sont les premières à être appelées à résoudre les nombreux conflits qui continuent d’ensanglanter l’humanité, à commencer par cette Région privilégiée dans le dessein de Dieu qu’est le Moyen Orient. Je pense d’abord à la Syrie, déchirée par des massacres incessants et théâtre d’effroyables souffrances parmi la population civile. Je renouvelle mon appel afin que les armes soient déposées et que prévale le plus tôt possible un dialogue constructif pour mettre fin à un conflit qui ne connaîtra pas de vainqueurs, mais seulement des vaincus, s’il perdure, ne laissant derrière lui qu’un champ de ruines. Permettez-moi, Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs, de vous demander de continuer à sensibiliser vos Autorités, afin que soient fournies de façon urgente les aides indispensables pour affronter la grave situation humanitaire. Je regarde ensuite avec une vive attention vers la Terre Sainte. Suite à la reconnaissance de la Palestine comme État Observateur non Membre des Nations Unies, je renouvelle le souhait que, avec le soutien de la Communauté internationale, Israéliens et Palestiniens s’engagent pour une cohabitation pacifique dans le cadre de deux États souverains, où le respect de la justice et des aspirations légitimes des deux peuples sera préservé et garanti. Jérusalem, deviens ce que ton nom signifie ! Cité de la paix et non de la division ; prophétie du Royaume de Dieu et non message d’instabilité et d’opposition !

Tournant ensuite ma pensée vers la chère population irakienne, je souhaite qu’elle parcoure le chemin de la réconciliation, pour arriver à la stabilité désirée.

1520 Au Liban – où, au mois de septembre dernier, j’ai rencontré ses diverses réalités constitutives – que la pluralité des traditions religieuses soit cultivée par tous comme une vraie richesse pour le pays, comme aussi pour toute la Région, et que les chrétiens offrent un témoignage efficace pour la construction d’un avenir de paix avec tous les hommes de bonne volonté !

En Afrique du Nord aussi, la collaboration de toutes les composantes de la société est prioritaire et, à chacune d’elles doit être garantie la pleine citoyenneté, la liberté de professer publiquement sa religion et la possibilité de contribuer au bien commun. J’assure tous les Égyptiens de ma proximité et de ma prière, en cette période où se mettent en place de nouvelles institutions.

Tournant le regard vers l’Afrique subsaharienne, j’encourage les efforts pour construire la paix, surtout là où demeurent ouvertes les plaies des guerres et là où pèsent de graves conséquences humanitaires. Je pense particulièrement à la Région de la Corne de l’Afrique, comme aussi à l’est de la République démocratique du Congo, où les violences se sont ravivées, obligeant de nombreuses personnes à abandonner leurs maisons, leurs familles et leur cadre de vie. En même temps, je ne peux passer sous silence d’autres menaces qui se profilent à l’horizon. À intervalles réguliers, le Nigéria est le théâtre d’attentats terroristes qui font des victimes, surtout parmi les fidèles chrétiens réunis en prière, comme si la haine voulait transformer des temples de prière et de paix en autant de centres de peur et de division. J’ai ressenti une grande tristesse en apprenant que, même dans les jours où nous célébrions Noël, des chrétiens ont été tués d’une façon barbare. Le Mali est aussi déchiré par la violence et il est marqué par une profonde crise institutionnelle et sociale, qui doit susciter une attention efficace de la part de la Communauté internationale. En République Centrafricaine, je souhaite que les pourparlers annoncés pour les jours qui viennent ramènent la stabilité et épargnent à la population de revivre les affres de la guerre civile.

La construction de la paix passe toujours de nouveau par la protection de l’homme et de ses droits fondamentaux. Cette tâche, même si elle est menée avec des modalités et une intensité diverses, interpelle tous les pays et doit constamment être inspirée par la dignité transcendante de la personne humaine et par les principes inscrits dans sa nature. Parmi ceux-ci figure au premier plan le respect de la vie humaine, dans toutes ses phases. A cet égard, je me suis réjoui qu’une Résolution de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, en janvier de l’année dernière, ait demandé la prohibition de l’euthanasie, comprise comme un meurtre volontaire, par acte ou par omission, d’un être humain en état de dépendance. En même temps, je constate avec tristesse que, en divers pays, même de tradition chrétienne, on a oeuvré pour introduire ou pour amplifier des législations qui dépénalisent ou libéralisent l’avortement. L’avortement direct, c’est-à-dire voulu comme une fin ou comme un moyen, est gravement contraire à la loi morale. Par cette affirmation, l’Église catholique ne manque pas de compréhension et de bienveillance, y compris envers la mère. Il s’agit, plutôt, de veiller afin que la loi n’en arrive pas à altérer injustement l’équilibre entre le droit à la vie de la mère et celui de l’enfant à naître, qui appartient à l’un et à l’autre de façon égale. Dans ce domaine, est également source de préoccupation le récent arrêt de la Cour interaméricaine des droits de l’homme, relatif à la fécondation in vitro, qui redéfinit arbitrairement le moment de la conception et fragilise la défense de la vie prénatale.

Malheureusement, surtout en Occident, on trouve beaucoup d’équivoques sur la signification des droits de l’homme et des devoirs qui leur sont liés. Les droits sont souvent confondus avec des manifestations exacerbées d’autonomie de la personne, qui devient autoréférentielle, n’est plus ouverte à la rencontre avec Dieu et avec les autres et se replie sur elle-même en ne cherchant à ne satisfaire que ses propres besoins. Pour être authentique, la défense des droits doit, au contraire, considérer l’homme dans son intégralité personnelle et communautaire.

Poursuivant notre réflexion, il vaut la peine de souligner comment l’éducation est une autre voie privilégiée pour la construction de la paix. La crise économique et financière actuelle, entre autre, nous l’enseigne. Elle s’est développée parce que le profit a été trop souvent absolutisé, au préjudice du travail, et qu’on s’est aventuré sans retenue sur les voies de l’économie financière, plutôt que sur les voies de l’économie réelle. Il convient donc de retrouver le sens du travail et d’un profit qui lui soit proportionné. À cette fin, il est bon d’éduquer à résister aux tentations des intérêts particuliers et à court terme, pour s’orienter plutôt vers le bien commun. En outre, il est urgent de former les leaders, qui, dans l’avenir, guideront les institutions publiques nationales et internationales (cf. Message pour la XLVIème Journée mondiale de la paix, 8 décembre 2012, n. 6). L’Union Européenne a aussi besoin de Représentants clairvoyants et qualifiés, pour faire les choix difficiles qui sont nécessaires pour redresser son économie et poser des bases solides pour son développement. Seuls, certains pays iront peut-être plus vite, mais, ensemble, tous iront certainement plus loin ! Si l’indice différentiel entre les taux financiers constitue une préoccupation, les différences croissantes entre un petit nombre, toujours plus riche, et un grand nombre, irrémédiablement plus pauvre, devraient provoquer le désarroi. Il s’agit, en un mot, de ne pas se résigner au « spread du bien-être social », alors qu’on combat celui de la finance.

Investir dans l’éducation dans les pays en voie de développement de l’Afrique, de l’Asie et de l’Amérique Latine, signifie les aider à vaincre la pauvreté et les maladies, comme aussi à réaliser des systèmes de droit équitables et respectueux de la dignité humaine. Il est certain que, pour mettre en oeuvre la justice, les bons modèles économiques ne suffisent pas, même s’ils sont nécessaires. La justice se réalise seulement s’il y a des personnes justes ! Construire la paix signifie par conséquent éduquer les individus à combattre la corruption, la criminalité, la production et le trafic de la drogue, ainsi qu’à se garder des divisions et des tensions, qui risquent d’épuiser la société, en en entravant le développement et la cohabitation pacifique.

En poursuivant notre entretien d’aujourd’hui, je voudrais ajouter que la paix sociale est aussi mise en péril par certaines atteintes à la liberté religieuse : il s’agit parfois de marginalisation de la religion dans la vie sociale; dans d’autres cas, d’intolérance ou même de violence envers des personnes, des symboles identitaires et des institutions religieuses. Il arrive aussi que des croyants – et particulièrement des chrétiens – soient empêchés de contribuer au bien commun par leurs institutions éducatives et d’assistance. Pour sauvegarder effectivement l’exercice de la liberté religieuse, il est ensuite essentiel de respecter le droit à l’objection de conscience. Cette “frontière” de la liberté touche à des principes de grande importance, de caractère éthique et religieux, enracinés dans la dignité même de la personne humaine. Ils sont comme “les murs porteurs” de toute société qui se veut vraiment libre et démocratique. Par conséquent, interdire l’objection de conscience individuelle et institutionnelle, au nom de la liberté et du pluralisme, ouvrirait paradoxalement au contraire les portes à l’intolérance et au nivellement forcé.

En outre, dans un monde aux limites toujours plus ouvertes, construire la paix par le dialogue n’est pas un choix, mais une nécessité ! Dans cette perspective, la Déclaration conjointe entre le Président de la Conférence épiscopale polonaise et le Patriarche de Moscou, signée au mois d’août dernier, est un signe fort donné par les croyants pour favoriser les relations entre le Peuple russe et le Peuple polonais. Je désire également mentionner l’accord de paix conclu récemment aux Philippines et souligner le rôle du dialogue entre les religions pour une cohabitation pacifique dans la région de Mindanao.

Excellences, Mesdames et Messieurs,

À la fin de l’Encyclique Pacem in terris, dont le cinquantenaire sera célébré cette année, mon Prédécesseur, le Bienheureux Jean XXIII, rappelait que la paix reste « seulement un mot vide de sens », si elle n’est pas vivifiée et intégrée par la charité (AAS 55 [1963], 303). Ainsi, celle-ci est au coeur de l’action diplomatique du Saint-Siège et, avant tout, de la sollicitude du Successeur de Pierre et de toute l’Église catholique. La charité ne se substitue pas à la justice niée, mais d’autre part, la justice ne supplée pas la charité refusée. L’Église pratique quotidiennement la charité dans ses oeuvres d’assistance, dont les hôpitaux et les dispensaires, et ses oeuvres éducatives, dont les orphelinats, les écoles, les collèges, les universités, ainsi qu’à travers l’assistance fournie aux populations en difficulté, particulièrement durant et après les conflits. Au nom de la charité, l’Église veut aussi être proche de tous ceux qui souffrent à cause des catastrophes naturelles. Je pense aux victimes des inondations dans le sud-est de l’Asie et de l’ouragan qui s’est abattu sur la côte orientale des États-Unis d’Amérique. Je pense aussi à ceux qui ont subi le fort tremblement de terre, qui a dévasté certaines régions de l’Italie septentrionale. Comme vous le savez, j’ai voulu me rendre personnellement sur ces lieux, où j’ai pu constater l’ardent désir avec lequel on veut reconstruire ce qui a été démoli. Je souhaite que, en ce moment de son histoire, cet esprit de ténacité et d’engagement partagé anime toute la bien-aimée Nation italienne.

1521 En concluant notre rencontre, je voudrais rappeler qu’au terme du Concile Vatican II – qui commença il y a cinquante ans – le Serviteur de Dieu, le Pape Paul VI, adressa quelques messages qui sont toujours d’actualité, dont l’un était destiné à tous les gouvernants. Il les exhorta en ces termes : « C’est à vous qu’il revient d’être sur terre les promoteurs de l’ordre et de la paix entre les hommes. Mais, ne l’oubliez pas : c’est Dieu (…) [qui est] le grand artisan de l’ordre et de la paix sur la terre » (Message aux Gouvernants, 8 décembre 1965, n. 3). Aujourd’hui, je fais miennes ces considérations, en formulant, à vous-mêmes, Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs et Membres distingués du Corps Diplomatique, à vos familles et à vos Collaborateurs, mes voeux les plus fervents pour la Nouvelle Année. Merci !

SALUT

AU CORPS DE LA GENDERMERIE ET DES POMPIERS

DE L'ÉTAT DE LA CITÉ DU VATICAN Salle Clémentine Vendredi 11 janvier 2013



Monsieur le commandant,
chers dirigeants, commissaires et inspecteurs,
chers gendarmes et pompiers!

Je suis très heureux de vous accueillir aujourd’hui au Palais apostolique et de vous consacrer ce moment à vous tous, qui vous placez chaque jour au service du Successeur de Pierre, en offrant avec une disponibilité louable votre précieux service de jour comme de nuit dans l’Etat de la Cité du Vatican. Je vous salue avec une profonde cordialité, en commençant par le commandant Domenico Giani, que je remercie pour les paroles avec lesquelles il a interprété vos sentiments, en définissant les objectifs qui orientent votre engagement. J’adresse une pensée reconnaissante au cardinal Giuseppe Bertello et à Mgr Giuseppe Sciacca, respectivement président et secrétaire général du gouvernorat, qui ne font pas manquer le soutien nécessaire au Corps de la gendarmerie et à celui des pompiers. Je salue cordialement le cardinal Tarcisio Bertone, mon secrétaire d’Etat, en le remerciant pour sa présence à cette rencontre. J’adresse également une parole d’appréciation au père Gioele Schiavella et au père Sergio Pellini pour leur ministère en faveur de la croissance spirituelle de tout le Corps de la gendarmerie.

Je vous adresse à chacun de vous, chers gendarmes, un salut très affectueux! Cette circonstance me donne l’occasion de vous exprimer avec des sentiments intenses mon estime, mon vif encouragement et surtout ma profonde reconnaissance pour le travail généreux que vous accomplissez avec discrétion, compétence et efficacité et non sans sacrifice. Presque chaque jour, j’ai l’occasion de rencontrer l’un d’entre vous dans les divers postes de service et de constater en personne le professionnalisme dont vous faites preuve, en collaborant pour garantir la surveillance du Pape, ainsi que l’ordre nécessaire et la sécurité de tous ceux qui résident dans l’Etat ou de ceux qui prennent part aux célébrations et aux rencontres qui se déroulent au Vatican.

Le Corps de la gendarmerie est appelé à accomplir, parmi ses divers devoirs, celui d’accueillir avec courtoisie et gentillesse les pèlerins et les visiteurs du Vatican, qui arrivent de Rome, de l’Italie et de toutes les parties du monde. Ce travail de surveillance et de contrôle, que vous accomplissez avec zèle et sollicitude, est certainement considérable et délicat: il exige parfois une grande patience, persévérance et disponibilité à l’écoute. Il s’agit d’un service très utile au déroulement serein et sûr de la vie quotidienne et des manifestations religieuses de la Cité du Vatican.

Dans chaque pèlerin ou visiteur, sachez voir le visage d’un frère que Dieu place sur votre chemin; vous devez donc l’accueillir avec gentillesse et l’aider, le considérant comme un membre de la grande famille humaine. Comme je l’ai écrit dans le Message pour la récente célébration de la Journée mondiale de la paix: «La réalisation de la paix dépend avant tout de la reconnaissance d’être, en Dieu, une unique famille humaine. Celle-ci se structure, comme l’a enseigné l’Encyclique Pacem in terris, à travers des relations interpersonnelles et des institutions soutenues et animées par un “nous” communautaire... La paix est un ordre vivifié et structuré par l’amour; ainsi chacun ressent comme siens les besoins et les exigences d’autrui» (n. 3).

Votre activité sera d’autant plus efficace pour le Saint-Siège et enrichissante pour vous si elle peut s’accomplir dans un cadre de sérénité et d’harmonie. A ce propos, il est nécessaire que les gendarmes qui assurent depuis longtemps leur service au sein du Corps et les responsables du poste de commandement favorisent toujours plus des relations de confiance en mesure de soutenir et d’encourager tous les membres de la gendarmerie vaticane, même dans les moments difficiles.

1522 Chers amis gendarmes et pompiers, que votre présence particulière au coeur de la chrétienté, où des foules de fidèles arrivent sans cesse pour rencontrer le Successeur de Pierre et pour se recueillir sur les tombes des apôtres, suscite toujours plus en chacun de vous l’intention d’intensifier la dimension spirituelle de la vie, ainsi que l’engagement à approfondir votre foi chrétienne, en en témoignant courageusement dans tous les milieux à travers une conduite de vie cohérente. Dans ce but, l’Année de la foi, que nous célébrons actuellement, peut vous aider: celle-ci représente une occasion privilégiée de redécouvrir la joie qu’il y a à croire et à communiquer aux autres que la rencontre salvifique et libératrice avec Dieu réalise les aspirations les plus profondes de l’homme, ses désirs de paix, de fraternité et d’amour.

Au cours des derniers jours, la liturgie nous a invités à contempler Jésus qui s’est fait homme et qui est venu parmi nous. Il est la lumière qui illumine et donne son sens à notre existence; il est le Rédempteur qui apporte la paix au monde. Contemplons la Vierge Marie alors qu’elle le tient dans ses bras, comme une mère attentionnée, pour le donner à tous les hommes, et accueillons-le avec confiance et joie! Comme Marie, nous aussi regardons avec attention et conservons dans notre coeur les grandes choses que Dieu accomplit chaque jour dans l’histoire. Nous apprendrons ainsi à reconnaître dans la trame de la vie quotidienne, l’intervention constante de la divine Providence, qui guide tout avec sagesse et amour.

Chers amis, je vous renouvelle à tous mon remerciement le plus sincère et affectueux pour votre collaboration; que votre service généreux et apprécié puisse être abondamment récompensé par le Seigneur. Je Lui adresse ma prière afin qu’il vous aide à accomplir votre profession, toujours fidèles aux idéaux qu’elle exige. Plus les principes moraux qui vous inspirent sont solides, plus vos interventions auront de l’autorité. Continuez à agir toujours dans cet esprit. Que vos saints patrons, l’archange saint Michel et sainte Barbara, vous protègent; que ma bienveillance constante vous apporte réconfort et encouragement; et que vous accompagne ma Bénédiction apostolique, que je donne de tout coeur à vous et à vos familles.



SALUT


AUX DIRIGEANTS ET AU PERSONNEL DE L'INSPECTORAT DE SÉCURITÉ PUBLIQUE PRÈS LE VATICAN Salle Clémentine Lundi 14 janvier 2013



Messieurs, chers fonctionnaires et agents !

Je suis très heureux de renouveler cette rencontre désormais traditionnelle, à l’occasion de l’échange réciproque de voeux au début de la nouvelle année. Mon salut et mes voeux s’adressent tout d’abord à M. Enrico Avola, nommé depuis peu directeur général, que je remercie des paroles qu’il vient de m’adresser, ainsi qu’au préfet M. Salvatore Festa. Je salue avec la même affection les membres et les collaborateurs de l’Inspectorat de sécurité publique auprès du Vatican.

Je désire tout d’abord exprimer le sentiment de ma reconnaissance pour le service que vous accomplissez, avec dévouement et un professionnalisme reconnu, sur la place Saint-Pierre et dans la zone autour du Vatican pour la protection nécessaire de l’ordre public. Je pense en particulier à votre action au cours des manifestations des fidèles et des pèlerins, qui viennent du monde entier pour rencontrer le Successeur de Pierre et pour rendre visite à la tombe du Prince des apôtres, ainsi que pour prier sur celle de mes vénérés prédécesseurs, en particulier le bienheureux Jean-Paul II.

Votre engagement s’élargit également à l’occasion de mes visites pastorales à Rome et lors de mes voyages apostoliques en Italie. Dans cette circonstance, j’entends manifester encore une fois mon estime et souligner ma sincère appréciation pour la manière et l’esprit qui animent votre service, attentif et qualifié. Un style qui, alors qu’il fait honneur à votre identité de fonctionnaires de l’État italien et de membres de l’Église, atteste également des bonnes relations qui existent entre l’Italie et le Siège apostolique.

J’ai écouté avec intérêt les paroles de votre dirigeant, qui, au nom de vous tous, a voulu se faire l’interprète des sentiments, des idéaux, des intentions qui animent votre vie et votre comportement dans votre engagement quotidien. Je souhaite de tout coeur que vos efforts, souvent accomplis avec sacrifice et des risques, soient toujours animés par une solide foi chrétienne, qui est sans doute le trésor et la valeur spirituelle les plus précieux que vos familles vous ont confiés et que vous êtes appelés à transmettre à vos enfants. L’Année de la foi, que l’Église tout entière est en train de vivre, constitue une opportunité également pour vous de revenir au message de l’Évangile et de le faire entrer de manière plus profonde dans vos consciences et dans la vie quotidienne, en témoignant avec courage de l’amour de Dieu dans chaque milieu, également dans celui de votre travail.

Dans le Message à l’occasion de la récente Journée mondiale de la paix, j’ai souligné que « les nombreuses oeuvres de paix dont le monde est riche, témoignent de la vocation innée de l’humanité à la paix. En chaque personne, le désir de paix est une aspiration essentielle qui coïncide, d’une certaine façon, avec le désir d’une vie humaine pleine, heureuse et accomplie » (n. 1). Chers amis, que votre présence soit une garantie toujours meilleure de ce bon ordre et de cette tranquillité, qui sont fondamentaux pour construire une vie sociale pacifique et ordonnée, et qui, en plus de nous être enseignés par le message évangélique, sont un signe de civilisation authentique.


Discours 2005-2013 1517