Benoît XVI Homélies 23611

MESSE EN LA SOLENNITÉ DU CORPUS DOMINI, Jeudi 23 juin 2011

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Basilique Saint-Jean-de-Latran

Jeudi 23 juin 2011



Chers frères et soeurs!

La fête du Corpus Domini est inséparable du Jeudi Saint, de la Messe in Cena Domini, au cours de laquelle on célèbre solennellement l’institution de l’Eucharistie. Alors que dans la soirée du Jeudi Saint on revit le mystère du Christ qui s’offre à nous dans le pain rompu et dans le vin versé, aujourd’hui, en la fête du Corpus Domini, ce même mystère est proposé à l’adoration et à la méditation du Peuple de Dieu, et le Très Saint Sacrement est porté en procession dans les rues des villes et des villages, pour montrer que le Christ ressuscité marche parmi nous et nous guide vers le Royaume des cieux. Ce que Jésus nous a donné dans l’intimité du Cénacle, nous le manifestons aujourd’hui ouvertement, car l’amour du Christ n’est pas réservé à certains, mais il est destiné à tous. Dans la Messe in Cena Domini du Jeudi Saint, j’ai souligné que dans l’Eucharistie a lieu la transformation des dons de cette terre — le pain et le vin — ayant pour but de transformer notre vie et d’inaugurer ainsi la transformation du monde. Ce soir, je voudrais reprendre cette perspective.

Tout part, pourrait-on dire, du coeur du Christ, qui lors de la Dernière Cène, à la veille de sa passion, a remercié et loué Dieu et, en agissant ainsi, avec la puissance de son amour, a transformé le sens de la mort vers laquelle il allait. Le fait que le Sacrement de l’autel ait assumé le nom d’«Eucharistie» — «action de grâce» — exprime précisément cela: que la transformation de la substance du pain et du vin dans le Corps et le Sang du Christ est le fruit du don que le Christ a fait de lui-même, le don d’un Amour plus fort que la mort, un Amour divin qui l’a fait ressusciter d’entre les morts. Voilà pourquoi l’Eucharistie est nourriture de vie éternelle, Pain de la vie. Du coeur du Christ, de sa «prière eucharistique» à la veille de sa passion, naît ce dynamisme qui transforme la réalité dans ses dimensions cosmique, humaine et historique. Tout procède de Dieu, de la toute-puissance de son Amour Un et Trine, incarné en Jésus. Le coeur du Christ est plongé dans cet Amour; c’est pourquoi il sait rendre grâce et louer Dieu également face à la trahison et à la violence, et de cette manière il change les choses, les personnes et le monde.

Cette transformation est possible grâce à une communion plus forte que la division, la communion de Dieu lui-même. Le mot «communion», que nous utilisons également pour désigner l’Eucharistie, résume en lui la dimension verticale et la dimension horizontale du don du Christ. L’expression «prendre la communion», qui se réfère à l’acte de manger le Pain eucharistique, est belle et très éloquente. En effet, quand nous accomplissons cet acte, nous entrons en communion avec la vie même de Jésus, dans le dynamisme de cette vie qui se donne à nous et pour nous. De Dieu, à travers Jésus, jusqu’à nous: une unique communion se transmet dans la sainte Eucharistie. Nous l’avons entendu il y a peu, dans la deuxième lecture, dans les paroles de l’apôtre Paul adressées aux chrétiens de Corinthe: «La coupe d’action de grâce que nous bénissons, n’est-elle pas communion au sang du Christ? Le pain que nous rompons, n’est-il pas communion au corps du Christ? Puisqu’il y a un seul pain, la multitude que nous sommes est un seul corps, car nous avons tous part à un seul pain» (
1Co 10,16-17).

Saint Augustin nous aide à comprendre la dynamique de la communion eucharistique lorsqu’il fait référence à une sorte de vision qu’il eut, dans laquelle Jésus lui dit: «Je suis la nourriture des forts. Grandis et tu m’auras. Tu ne me transformeras pas en toi, comme la nourriture du corps, mais ce sera toi qui sera transformé en moi» (Conf. VII, 10, 18). Alors que la nourriture corporelle est donc assumée par notre organisme et contribue à son entretien, dans le cas de l’Eucharistie il s’agit d’un Pain différent: ce n’est pas nous qui l’assimilons, mais c’est lui qui nous assimile, de sorte que nous devenons conformes à Jésus Christ, membres de son corps, une seule chose avec Lui. Ce passage est décisif. En effet, c’est précisément parce que c’est le Christ qui, dans la communion eucharistique, nous transforme en Lui, que notre caractère individuel, dans cette rencontre, est ouvert, libéré de son égocentrisme et inséré dans la Personne de Jésus, qui à son tour est plongée dans la communion trinitaire. Ainsi l’Eucharistie, alors qu’elle nous unit au Christ, nous ouvre également aux autres, nous rend membres les uns des autres: nous ne sommes plus divisés, mais une seule chose en Lui. La communion eucharistique m’unit à la personne qui est à mes côtés, et avec laquelle je n’ai peut-être même pas un bon rapport, mais également aux frères éloignés, dans toutes les parties du monde. D’ici, de l’Eucharistie, dérive donc le sens profond de la présence sociale de l’Eglise, comme en témoignent les grands saints sociaux, qui ont toujours été de grandes âmes eucharistiques. Qui reconnaît Jésus dans la sainte Hostie, le reconnaît dans son frère qui souffre, qui a faim et soif, qui est étranger, nu, malade, emprisonné; et il est attentif à chaque personne, il s’engage, de manière concrète, pour tous ceux qui sont dans le besoin. Du don d’amour du Christ provient donc notre responsabilité particulière de chrétiens dans la construction d’une société solidaire, juste, fraternelle. A notre époque en particulier, où la mondialisation nous rend toujours plus dépendants les uns des autres, le christianisme peut et doit faire en sorte que cette unité ne se construise pas sans Dieu, c’est-à-dire sans le véritable Amour, ce qui laisserait place à la confusion, à l’individualisme, à la domination de tous contre tous. L’Evangile vise depuis toujours à l’unité de la famille humaine, une unité qui n’est pas imposée de l’extérieur, ni par des intérêts idéologiques ou économiques, mais bien à partir du sens de responsabilité des uns envers les autres, car nous nous reconnaissons membres d’un même corps, du corps du Christ, car nous avons appris et nous apprenons constamment du Sacrement de l’Autel que le partage, l’amour sont la voie de la véritable justice.

Revenons à présent à l’acte de Jésus lors de la Dernière Cène. Que s’est-il passé à ce moment? Lorsqu’Il dit: Ceci est mon corps qui est donné pour vous, ceci est mon sang versé pour vous et pour une multitude, que se passe-t-il? Dans ce geste, Jésus anticipe l’événement du Calvaire. Il accepte par amour toute la passion, avec son tourment et sa violence, jusqu’à la mort en croix; en l’acceptant de cette manière, il la transforme en un acte de donation. Telle est la transformation dont le monde a le plus besoin, car elle le rachète de l’intérieur, elle l’ouvre aux dimensions du Royaume des cieux. Mais ce renouvellement du monde, Dieu veut toujours le réaliser à travers la même voie suivie par le Christ, cette voie qui, d’ailleurs, est Lui-même. Il n’y a rien de magique dans le christianisme. Il n’y a pas de raccourcis, mais tout passe à travers la logique humble et patiente du grain de blé qui meurt pour donner la vie, la logique de la foi qui déplace les montagnes avec la force douce de Dieu. C’est pourquoi Dieu veut continuer à renouveler l’humanité, l’histoire et l’univers à travers cette chaîne de transformations dont l’Eucharistie est le sacrement. A travers le pain et le vin consacrés, dans lesquels sont réellement présents son Corps et son Sang, le Christ nous transforme, en nous assimilant à Lui: il nous fait participer à son opération de rédemption, en nous rendant capables, par la grâce de l’Esprit Saint, de vivre selon sa logique même de donation, comme des grains de blés unis à Lui et en Lui. C’est ainsi qu’on les sème et que mûrissent dans les sillons de l’histoire l’unité et la paix, qui sont l’objectif auquel nous tendons, selon le dessein de Dieu.

Sans illusions, sans utopies idéologiques, nous marchons sur les routes du monde, en portant en nous le Corps du Seigneur, comme la Vierge Marie dans le mystère de la Visitation. Avec l’humilité de savoir que nous sommes de simples grains de blé, nous conservons la ferme certitude que l’amour de Dieu, incarné dans le Christ, est plus fort que le mal, que la violence et que la mort. Nous savons que Dieu prépare pour tous les hommes des cieux nouveaux et une terre nouvelle, où règnent la paix et la justice — et dans la foi nous entrevoyons le monde nouveau, qui est notre véritable patrie. Ce soir aussi, alors que le soleil se couche sur notre bien-aimée ville de Rome, nous nous mettons en marche: avec nous il y a Jésus Eucharistie, le Ressuscité, qui a dit: «Et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde» (Mt 28,20). Merci, Seigneur Jésus! Merci de ta fidélité, qui soutient notre espérance. Reste avec nous, car le soir vient. «Bon Pasteur, Pain véritable, ô Jésus, aies pitié de nous, défends-nous, conduis-nous vers les biens éternels, dans la terre des vivants!» Amen.


SOLENNITÉ DES SAINTS APÔTRES PIERRE ET PAUL

MESSE ET IMPOSITION DU PALLIUM AUX NOUVEAUX ARCHEVÊQUES MÉTROPOLITAINS 29 juin 2011

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Basilique Vaticane

29 juin 2011




Chers frères et soeurs,

« Non iam dicam servos, sed amicos » - « Je ne vous appelle plus serviteurs mais amis ! » (cf.
Jn 15,15). À soixante années du jour de mon Ordination sacerdotale, j’entends encore résonner en moi ces paroles de Jésus, que notre grand Archevêque, le Cardinal Faulhaber, avec une voix désormais un peu faible et cependant ferme, nous adressa à nous les nouveaux prêtres à la fin de la cérémonie d’Ordination. Selon le déroulement liturgique de l’époque, cette acclamation signifiait alors aux nouveaux prêtres l’attribution explicite du mandat pour remettre les péchés. « Non plus serviteurs, mais amis » : je savais et j’avais conscience qu’à ce moment précis, ce n’était pas seulement une parole rituelle, ni une simple citation de la Sainte Écriture. J’avais conscience qu’en ce moment-là, le Seigneur Lui-même me l’adressait de façon toute personnelle. Dans le Baptême et dans la Confirmation, Il nous avait déjà attirés vers Lui, Il nous avait déjà accueillis dans la famille de Dieu. Cependant, ce qui arrivait à ce moment-là était quelque chose de plus encore. Il m’appelle ami. Il m’accueille dans le cercle de ceux auxquels il s’était adressé au Cénacle. Dans le cercle de ceux que Lui connaît d’une façon toute particulière et qui ainsi sont amenés à Le connaître de façon particulière. Il me donne la faculté, qui fait presque peur, de faire ce que Lui seul, le Fils de Dieu, peut dire et faire légitimement : Moi, je te pardonne tes péchés. Il veut que moi – par son mandat – je puisse prononcer avec son « Je » une parole qui n’est pas seulement une parole mais plus encore une action qui produit un changement au plus profond de l’être. Je sais que derrière cette parole, il y a sa Passion à cause de nous et pour nous. Je sais que le pardon a son prix : dans sa Passion, Lui-même est descendu dans la profondeur obscure et sale de notre péché. Il est descendu dans la nuit de notre faute, et c’est seulement ainsi qu’elle peut être transformée. Et par le mandat de pardonner, Il me permet de jeter un regard sur l’abîme de l’homme et sur la grandeur de sa souffrance pour nous les hommes, qui me laisse deviner la grandeur de son amour. Il me dit : « Non plus serviteurs, mais amis ». Il me confie les paroles de la Consécration eucharistique. Il m’estime capable d’annoncer sa Parole, de l’expliquer de façon juste et de la porter aux hommes d’aujourd’hui. Il s’en remet à moi. « Vous n’êtes plus serviteurs mais amis » : c’est une affirmation qui procure une grande joie intérieure et qui, en même temps, dans sa grandeur, peut faire frémir au long des décennies, avec toutes les expériences de notre faiblesse et de son inépuisable bonté.

« Non plus serviteurs mais amis » : dans cette parole est contenu tout le programme d’une vie sacerdotale. Qu’est-ce que vraiment l’amitié ? Idem velle, idem nolle – vouloir les mêmes choses et ne pas vouloir les mêmes choses, disaient les anciens. L’amitié est une communion de pensée et de vouloir. Le Seigneur nous dit la même chose avec grande insistance : « Je connais les miens et les miens me connaissent » (cf. Jn 10,14). Le Pasteur appelle les siens par leur nom (cf. Jn 10,3). Il me connaît par mon nom. Je ne suis pas n’importe quel être anonyme dans l’immensité de l’univers. Il me connaît de façon toute personnelle. Et moi, est-ce que je Le connais Lui ? L’amitié qu’Il me donne peut seulement signifier que moi aussi je cherche à Le connaître toujours mieux ; que moi dans l’Écriture, dans les Sacrements, dans la rencontre de la prière, dans la communion des Saints, dans les personnes qui s’approchent de moi et que Lui m’envoie, je cherche à Le connaître toujours plus. L’amitié n’est pas seulement connaissance, elle est surtout communion du vouloir. Elle signifie que ma volonté grandit vers le « oui » de l’adhésion à la sienne. Sa volonté, en effet, n’est pas pour moi une volonté externe et étrangère, à laquelle je me plie plus ou moins volontiers, ou à laquelle je ne me plie pas. Non, dans l’amitié, ma volonté en grandissant s’unit à la sienne, sa volonté devient la mienne et ainsi, je deviens vraiment moi-même. Outre la communion de pensée et de volonté, le Seigneur mentionne un troisième, un nouvel élément : Il donne sa vie pour nous (cf. Jn 15,13 Jn 10,15). Seigneur, aide-moi à Te connaître toujours mieux ! Aide-moi à ne faire toujours plus qu’un avec ta volonté ! Aide-moi à vivre ma vie non pour moi-même, mais à la vivre avec Toi pour les autres ! Aide-moi à devenir toujours plus Ton ami !

La Parole de Jésus sur l’amitié se place dans le contexte du discours sur la vigne. Le Seigneur associe l’image de la vigne avec la tâche confiée aux disciples : « Je vous ai institués pour que vous alliez et que vous portiez du fruit et un fruit qui demeure » (Jn 15,16). La première tâche donnée aux apôtres, aux amis, est de se mettre en route – institués pour que vous alliez -, de sortir de soi-même et d’aller vers les autres. Puissions-nous ici entendre ensemble la parole du Ressuscité adressée aux siens, avec laquelle Saint Matthieu termine son évangile : « Allez et enseignez à tous les peuples… » (cf. Mt 28, 19s). Le Seigneur nous exhorte à dépasser les limites du milieu dans lequel nous vivons, à porter l’Évangile dans le monde des autres, afin qu’il envahisse tout et qu’ainsi le monde s’ouvre au Royaume de Dieu. Cela peut nous rappeler que Dieu-même est sorti de Lui-même, Il a abandonné sa gloire pour nous chercher, pour nous donner sa lumière et son amour. Nous voulons suivre le Dieu qui se met en chemin, surpassant la paresse de rester repliés sur nous-mêmes, afin que Lui-même puisse entrer dans le monde.

Après la parole sur la mise en route, Jésus continue : portez du fruit, un fruit qui demeure ! Quel fruit attend-Il de nous ? Quel est le fruit qui demeure ? Eh bien, le fruit de la vigne est le raisin à partir duquel se prépare par la suite le vin. Arrêtons-nous un instant sur cette image. Pour que le bon raisin puisse mûrir, il faut non seulement du soleil mais encore de la pluie, le jour et la nuit. Pour que parvienne à maturité un vin de qualité, il faut le foulage, le temps nécessaire à la fermentation, le soin attentif qui sert au processus de la maturation. Le vin fin est caractérisé non seulement par sa douceur, mais aussi par la richesse de ses nuances, l’arôme varié qui s’est développé au cours du processus de maturation et de fermentation. N’est-ce pas déjà une image de la vie humaine, et selon un mode spécial, de notre vie de prêtre ? Nous avons besoin du soleil et de la pluie, de la sérénité et de la difficulté, des phases de purification et d’épreuve, comme aussi des temps de cheminement joyeux avec l’Évangile. Jetant un regard en arrière nous pouvons remercier Dieu pour les deux réalités : pour les difficultés et pour les joies, pour les heures sombres et les heures heureuses. Dans les deux cas nous reconnaissons la présence continuelle de son amour, qui toujours nous porte et nous supporte.

Maintenant, nous devons cependant nous demander : de quelle sorte est le fruit que le Seigneur attend de nous ? Le vin est l’image de l’amour : celui-ci est le vrai fruit qui demeure, celui que Dieu veut de nous. N’oublions pas pourtant que dans l’Ancien Testament le vin qu’on attend du raisin de qualité est avant tout une image de la justice qui se développe dans une vie vécue selon la loi de Dieu ! Et nous ne disons pas qu’il s’agit d’une vision vétérotestamentaire et dépassée aujourd’hui : non, cela demeure toujours vrai. L’authentique contenu de la Loi, sa summa, est l’amour pour Dieu et le prochain. Ce double amour, cependant, n’est pas simplement quelque chose de doux. Il porte en lui la charge de la patience, de l’humilité, de la maturation dans la formation de notre volonté jusqu’à son assimilation à la volonté de Dieu, à la volonté de Jésus-Christ, l’Ami. Ainsi seulement, l’amour véritable se situe aussi dans le devenir vrai et juste de tout notre être, ainsi seulement il est un fruit mûr. Son exigence intrinsèque, la fidélité au Christ et à son Église, requiert toujours d’être réalisée aussi dans la souffrance. Ainsi vraiment grandit la véritable joie. Au fond, l’essence de l’amour, du vrai fruit, correspond à l’idée de se mettre en chemin, de marcher : l’amour signifie s’abandonner, se donner ; il porte en soi le signe de la croix. Dans ce contexte Grégoire-le-Grand a dit une fois : si vous tendez vers Dieu, veillez à ne pas le rejoindre seul (cf. H Ev 1,6,6 : PL 76, 1097s) - une parole qui doit nous être, à nous comme prêtres, intimement présente chaque jour.

Chers amis, je me suis peut-être attardé trop longtemps sur la mémoire intérieure des soixante années de mon ministère sacerdotal. Il est maintenant temps de penser à ce qui est propre au moment présent.

À l’occasion de la Solennité des Saints Apôtres Pierre et Paul, j’adresse mon salut le plus cordial au Patriarche OEcuménique Bartolomeo Ier et à la Délégation qu’il a envoyée et que je remercie vivement pour la visite appréciée en cette heureuse circonstance des Saints Apôtres Patrons de Rome. Je salue également Messieurs les Cardinaux, les Frères dans l’Épiscopat, Messieurs les Ambassadeurs et les Autorités civiles, ainsi que les prêtres, les compagnons de ma première Messe, les religieux et les fidèles laïcs. Je vous remercie tous pour votre présence et pour votre prière.

Aux Archevêques Métropolitains nommés après la dernière Fête des grands Apôtres, le pallium va maintenant être imposé. Qu’est-ce que cela signifie ? Celui-ci peut nous rappeler avant tout le joug léger du Christ qui nous est déposé sur les épaules (cf. Mt 11,29s). Le joug du Christ est identique à son amitié. C’est un joug d’amitié et donc un « joug doux », mais justement pour cela aussi, un joug qui exige et qui modèle. C’est le joug de sa volonté, qui est une volonté de vérité et d’amour. Ainsi, c’est pour nous surtout le joug qui introduit les autres dans l’amitié avec le Christ et nous rend disponibles aux autres pour en prendre soin comme Pasteurs. Avec cela, nous atteignons un sens supplémentaire du pallium : tissé avec de la laine des agneaux bénis en la fête de Sainte Agnès, il nous rappelle ainsi le Pasteur devenu Lui-même Agneau par amour pour nous. Il rappelle le Christ qui a marché sur les montagnes et dans les déserts, où son agneau - l’humanité - s’était égaré. Le pallium nous rappelle que Lui a pris l’agneau, l’humanité - moi - sur ses épaules, pour me ramener à la maison. Il nous rappelle de cette manière que, comme Pasteurs à son service, nous devons aussi porter les autres, les prendre, pour ainsi dire, sur nos épaules et les porter au Christ. Il nous rappelle que nous pouvons être Pasteurs de son troupeau qui reste toujours sien et ne devient pas nôtre. Enfin, le pallium signifie aussi très concrètement la communion des Pasteurs de l’Église avec Pierre et avec ses successeurs – il signifie que nous devons être des Pasteurs pour l’unité et dans l’unité et que c’est seulement dans l’unité dont Pierre est le symbole que nous conduisons vraiment vers le Christ.

Soixante années de ministère sacerdotal – chers amis, je me suis peut-être trop attardé sur des éléments particuliers. Mais en cet instant, je me suis senti poussé à regarder ce qui a caractérisé ces dizaines d’années. Je me suis senti poussé à vous dire - à tous, prêtres et Évêques comme aussi aux fidèles de l’Église - une parole d’espérance et d’encouragement ; une parole, murie à travers l’expérience, sur le fait que le Seigneur est bon. Cependant, c’est surtout un moment de gratitude : gratitude envers le Seigneur pour l’amitié qu’Il m’a donnée et qu’Il veut nous donner à tous. Gratitude envers les personnes qui m’ont formé et accompagné. Et en tout cela se cache la prière qu’un jour le Seigneur dans sa bonté nous accueille et nous fasse contempler sa joie. Amen !


ASSOMPTION DE LA VIERGE MARIE Lundi 15 août 2011

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Église paroissiale San Tommaso da Villanova, Castel Gandolfo

Lundi 15 août 2011




Chers frères et soeurs,

Nous sommes réunis une fois de plus pour célébrer l’une des fêtes les plus antiques et les plus aimées dédiées à la Très Sainte Vierge Marie: la fête de son Assomption à la gloire du Ciel, corps et âme, c’est-à-dire de tout son être humain, dans l’intégrité de sa personne. Ainsi nous est donnée la grâce de renouveler notre amour à Marie, de l’admirer et de la louer pour les «grandes choses» que le Tout-Puissant a faites pour Elle et a opérées en Elle.

En contemplant la Vierge Marie, une autre grâce nous est donnée: celle de pouvoir voir également notre vie en profondeur. Oui, car notre existence quotidienne elle aussi, avec ses problèmes et ses espérances, reçoit une lumière de la Mère de Dieu, de son parcours spirituel, de son destin de gloire: un chemin et un objectif qui peuvent et qui doivent devenir, d’une certaine façon, notre même chemin et notre même objectif. Nous nous laissons guider par les passages de l’Ecriture Sainte que nous propose la liturgie d’aujourd’hui. Je voudrais m’arrêter en particulier sur une image que nous trouvons dans la première lecture, tirée de l’Apocalypse, et à laquelle fait écho l’Evangile de Luc: c’est-à-dire celle de l’arche.

Dans la première lecture, nous avons entendu: «Alors s'ouvrit le temple de Dieu, dans le ciel, et son arche d'alliance apparut, dans le temple» (
Ap 11,19). Quelle est la signification de l’arche? Qu’est-ce qui apparaît? Pour l’Ancien Testament, elle est le symbole de la présence de Dieu parmi son peuple. Mais désormais, le symbole a laissé la place à la réalité. Ainsi, le Nouveau Testament nous dit que la véritable arche de l’alliance est une personne vivante et concrète: c’est la Vierge Marie. Dieu n’habite pas un meuble, Dieu réside dans une personne, dans un coeur: Marie, Celle qui a porté dans son sein le Fils éternel de Dieu fait homme, Jésus, notre Seigneur et Sauveur. Dans l’arche — comme nous le savons — étaient conservées les deux tables de la loi de Moïse, qui manifestaient la volonté de Dieu de conserver l’alliance avec son peuple, en indiquant les conditions pour être fidèles au pacte de Dieu, pour être conformes à la volonté de Dieu et ainsi, également, à notre vérité profonde. Marie est l’arche de l’alliance car elle a accueilli en elle Jésus; elle a accueilli en elle la Parole vivante, tout le contenu de la volonté de Dieu, de la vérité de Dieu; elle a accueilli en elle Celui qui est l’alliance nouvelle et éternelle, qui a culminé dans le don de son corps et de son sang: un corps et un sang reçus de Marie. C’est donc à juste titre que la piété chrétienne, dans les litanies en l’honneur de la Vierge, s’adresse à Elle en l’invoquant comme Foederis Arca, c’est-à-dire «arche de l’alliance», arche de la présence de Dieu, arche de l’alliance d’amour que Dieu a voulu établir de façon définitive avec toute l’humanité dans le Christ.

Le passage de l’Apocalypse veut indiquer un autre aspect important de la réalité de Marie. Arche vivante de l’alliance, Elle possède un destin de gloire extraordinaire, car elle est unie de façon si étroite au Fils qu’elle a accueilli dans la foi et engendré dans la chair, qu’elle en partage pleinement la gloire au ciel. C’est ce que nous suggèrent les paroles que nous avons entendues: «Un signe grandiose apparut au ciel: une Femme! Le soleil l'enveloppe, la lune est sous ses pieds et douze étoiles couronnent sa tête; elle est enceinte... la Femme mit au monde un enfant mâle, celui qui doit mener toutes les nations...» (Ap 12,1-2 Ap 12,5). La grandeur de Marie, Mère de Dieu pleine de grâce, pleinement docile à l’action de l’Esprit Saint, vit déjà dans le Ciel de Dieu de toute sa personne, corps et âme. Saint Jean Damascène, en se référant à ce mystère, affirme dans une homélie célèbre: «Aujourd’hui la sainte et l’unique Vierge est amenée au temple céleste... Aujourd’hui l’arche sacrée et vivante du Dieu vivant, celle qui a porté dans son sein son Auteur, se repose dans le temple du Seigneur non fait de main d’homme...» (Deuxième homélie sur la dormition, 2, PG 96, 723) et poursuit: «Il fallait que celle qui avait donné asile au Verbe divin dans son sein, vînt habiter dans les tabernacles de son Fils... Il fallait que l’Epouse que le Père s’était choisie vînt habiter au ciel la demeure nuptiale» (ibid., 14, PG 96,742). Aujourd’hui, l’Eglise chante l’amour immense de Dieu pour sa créature: elle l’a choisie comme véritable «arche de l’alliance», comme Celle qui continue à engendrer et à donner le Christ Sauveur à l’humanité, comme Celle qui partage au Ciel la plénitude de la gloire et jouit du bonheur même de Dieu et, dans le même temps, nous invite également à devenir, de notre modeste façon, une «arche» dans laquelle est présente la Parole de Dieu, qui est transformée et vivifiée par sa présence, lieu de la présence de Dieu, afin que les hommes puissent rencontrer dans l’autre homme la proximité de Dieu et vivre ainsi en communion avec Dieu et connaître la réalité du Ciel.

L’Evangile de Luc que nous venons d’écouter (cf. Lc Lc 1,39-56), nous montre cette arche vivante, qu’est Marie, en mouvement: ayant quitté sa maison de Nazareth, Marie se met en route vers la montagne pour rejoindre en hâte une ville de Juda et se rendre à la maison de Zacharie et Elisabeth. Il me semble important de souligner l’expression «en hâte»: les choses de Dieu méritent qu’on se hâte; je dirais même que les seules choses au monde qui méritent que l’on se hâte sont précisément celles de Dieu, qui revêtent un caractère de véritable urgence pour notre vie. Alors Marie entre dans cette maison de Zacharie et Elisabeth, mais elle n’y entre pas seule. Elle y entre en portant dans son sein son fils, qui est Dieu lui-même fait homme. Il est certain qu’on l’attendait, ainsi que son aide, dans cette maison, mais l’évangéliste nous fait comprendre que cette attente renvoie à une autre, plus profonde. Zacharie, Elisabeth et le petit Jean-Baptiste sont, en effet, le symbole de tous les justes d’Israël, dont le coeur, riche d’espérance, attend la venue du Messie sauveur. Et c’est l’Esprit Saint qui ouvre les yeux d’Elisabeth et qui lui fait reconnaître en Marie la véritable arche de l’alliance, la Mère de Dieu, qui vient lui rendre visite. Et ainsi, la parente âgée l’accueille en poussant «un grand cri»: «Bénie es-tu entre les femmes, et béni le fruit de ton sein! Et comment m'est-il donné que vienne à moi la mère de mon Seigneur?» (Lc 1,42-43). C’est le même Esprit Saint qui, devant Celle qui porte le Dieu fait homme, ouvre le coeur de Jean-Baptiste dans le sein d’Elisabeth. Elisabeth s’exclame: «Car, vois-tu, dès l'instant où ta salutation a frappé mes oreilles, l'enfant a tressailli d'allégresse en mon sein» (Lc 1,44). Ici, l’évangéliste Luc utilise le terme «skirtan», c’est-à-dire «sautiller», le même terme que nous trouvons dans l’une des plus anciennes traductions grecques de l’Ancien Testament pour décrire la danse du Roi David devant l’arche sainte qui est enfin revenue dans sa patrie (2S 6,16). Dans le sein de sa mère, Jean-Baptiste danse devant l’arche de l’Alliance, comme David; et il reconnaît ainsi: Marie est la nouvelle arche de l’alliance, devant laquelle le coeur exulte de joie, la Mère de Dieu présente dans le monde, qui ne garde pas pour elle cette divine présence, mais l’offre en partageant la grâce de Dieu. Et ainsi — comme le dit la prière — Marie est réellement «causa nostrae laetitiae», l’«arche» dans laquelle le Sauveur est réellement parmi nous.

Chers frères! Nous parlons de Marie mais, dans un certain sens, nous parlons également de nous, de chacun de nous: nous aussi sommes les destinataires de l’amour immense que Dieu a réservé — certes, de façon absolument unique et irremplaçable — à Marie. En cette solennité de l’Assomption, tournons notre regard vers Marie: Elle nous ouvre à l’espérance, à un avenir plein de joie, et nous enseigne la voie pour y parvenir: accueillir dans la foi son Fils; ne jamais perdre l’amitié avec Lui, mais nous laisser illuminer et guider par sa parole; le suivre chaque jour, même dans les moments où nous sentons que nos croix deviennent lourdes. Marie, l’arche de l’alliance qui est dans le sanctuaire du Ciel, nous indique avec une clarté lumineuse que nous sommes en chemin vers notre véritable Maison, la communion de joie et de paix avec Dieu. Amen!



VOYAGE APOSTOLIQUE À MADRID À L'OCCASION DE LA XXVIème JOURNÉE MONDIALE DE LA JEUNESSE

18-21 AOÛT 2011


MESSE AVEC LES SÉMINARISTES Samedi 20 août 2011

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Cathédrale Sainte Marie la Royale de la Almudena de Madrid

Samedi 20 août 2011


Monsieur le Cardinal Archevêque de Madrid,
Vénérés frères dans l’Épiscopat,
Chers prêtres et religieux,
Chers recteurs et formateurs,
Chers séminaristes,
Chers amis,

C’est avec une joie profonde que je célèbre la sainte Messe en votre présence, vous qui aspirez à être prêtres du Christ pour le service de l’Église et des hommes, et je reçois avec reconnaissance les aimables paroles par lesquelles vous m’avez accueilli. Cette sainte cathédrale Sainte Marie la Royale de la Almudena est aujourd’hui comme un immense cénacle où le Seigneur célèbre sa Pâque avec un ardent désir, en compagnie de ceux qui désirent présider un jour en son nom les mystères du salut. À dire vrai, je constate une nouvelle fois que le Christ appelle à Lui de jeunes disciples pour qu’ils soient ses apôtres, en poursuivant ainsi la mission de l’Église et le don de l’Évangile au monde. Comme séminaristes, vous êtes en chemin vers un but saint : prolonger la mission que le Christ a reçue du Père. Appelés par Lui, vous avez suivi sa voix et, attirés par son regard d’amour, vous avancez vers le ministère sacré. Levez les yeux vers Lui : par son Incarnation, il donne la révélation ultime de Dieu au monde et, par sa Résurrection, il accomplit fidèlement sa promesse. Rendez grâce pour ce signe de prédilection qui marque chacun d’entre vous.

La première lecture que nous avons écoutée nous montre le Christ comme le prêtre nouveau et définitif, qui fit de sa vie une offrande totale. L’antienne du psaume peut s’appliquer à Lui à la perfection, car, entrant dans le monde, il s’adresse à son Père et lui dit : « Je suis venu ici pour faire ta volonté » (cf. Ps
Ps 39 [40], 8-9). Il cherchait à Lui plaire en toutes choses, dans ses paroles et ses actions, quand il marchait sur les chemins et accueillait les pécheurs. Sa vie fut un service et sa mort une intercession définitive, qui le plaça au nom de tous devant le Père comme Premier-né d’un grand nombre de frères. L’auteur de la Lettre aux Hébreux affirme que, par son abandon à Dieu, il nous rendit parfait pour toujours, nous qui étions appelés à avoir part à sa filiation (cf. He He 10,14).

L’Eucharistie, dont l’évangile qui vient d’être proclamé nous rapporte l’institution (cf. Lc Lc 22,14-20), est l’expression véritable de ce don inconditionnel de Jésus pour tous, même pour ceux qui le trahissaient. Don de son corps et de son sang pour la vie des hommes et le pardon de leurs péchés. Le sang, signe de la vie, nous fut donné par Dieu comme une alliance, afin que nous puissions communiquer la force de sa vie, là où règne la mort à cause de notre péché, et ainsi le détruire. Le corps lacéré et le sang versé du Christ, c’est-à-dire sa liberté offerte, sont devenus, par les signes eucharistiques, la nouvelle source de la liberté rachetée des hommes. En Lui, nous avons la promesse d’une rédemption définitive et la ferme espérance des biens à venir. Par le Christ, nous savons que nous ne sommes pas en train de marcher vers l’abîme, vers le silence du néant ou de la mort, mais que nous allons jusqu’à une terre promise, jusqu’à Celui qui est notre but en même temps que notre principe.

Chers amis, vous vous préparez à être apôtres avec le Christ et comme le Christ, à être compagnons de route et serviteurs des hommes.

Comment vivre ces années de préparation ? Avant tout, elles doivent être des années de silence intérieur, de prière permanente, d’étude constante et d’insertion progressive dans les actions et les structures pastorales de l’Église, une Église qui est communauté et institution, famille et mission, création du Christ par son Esprit saint, en même temps que résultat de notre action, à nous qui la formons avec notre sainteté et nos péchés. C’est ce que Dieu a aimé, Lui qui n’a pas hésité à faire des pauvres et des pécheurs ses amis et ses instruments pour la rédemption du genre humain. La sainteté de l’Église est avant tout la sainteté objective de la personne même du Christ, de son Évangile et de ses sacrements, la sainteté de la force d’en-haut qui l’anime et la stimule. Nous devons être saints pour éviter la contradiction entre le signe que nous sommes et la réalité que nous voulons signifier.

Méditez bien ce mystère de l’Église, en vivant les années de votre formation avec une profonde joie, en vous montrant dociles, lucides et radicalement fidèles à l’Évangile, tout en ayant une relation d’amour avec le temps et les personnes au milieu desquelles vous vivez. Personne ne choisit le contexte ou les destinataires de sa mission. Chaque époque a ses problèmes, mais Dieu donne en tout temps la grâce voulue pour les assumer et les dépasser avec amour et réalisme. C’est pourquoi, en quelque situation qu’il soit, aussi difficile soit-elle, le prêtre doit donner du fruit par toute sorte d’oeuvres bonnes, gardant à jamais vivantes en son coeur les paroles du jour de son Ordination, par lesquelles il était exhorté à configurer sa vie au mystère de la croix du Seigneur.

Se laisser configurer au Christ signifie, chers séminaristes, être identifié chaque fois davantage à Celui qui s’est fait pour nous serviteur, prêtre et victime. Se laisser configurer à Lui, c’est, en réalité, la mission du prêtre tout au long de sa vie. Nous savons déjà qu’elle nous dépasse et que nous ne parviendrons jamais à l’accomplir entièrement, mais, comme le dit saint Paul, nous courons vers le but que nous espérons atteindre (cf. Ph Ph 3,12-14).

Mais le Christ, Souverain Prêtre, est aussi le Bon Pasteur qui veille sur ses brebis au point de donner sa vie pour elles (cf. Jn 10,11). Pour imiter le Seigneur sur ce point aussi, votre coeur doit devenir mature au Séminaire, en étant totalement à la disposition du Maître. Cette disponibilité, qui est un don de l’Esprit Saint, inspire la décision de vivre le célibat pour le Royaume des cieux, le détachement des biens de la terre, la sobriété de la vie, l’obéissance sincère et sans dissimulation.

Demandez-lui donc de vous accorder de L’imiter dans sa charité pour tous jusqu’au bout, sans repousser ceux qui sont loin et pécheurs, de sorte que, avec votre aide, ils se convertissent et reviennent au bon chemin. Demandez-lui de vous apprendre à être très proches des malades et des pauvres, avec simplicité et générosité. Relevez ce défi sans complexe ni médiocrité, mais bien comme une belle forme de réalisation de la vie humaine dans la gratuité et le service, en étant témoins de Dieu fait homme, messagers de la très haute dignité de la personne humaine et, par conséquent, ses défenseurs inconditionnels. Appuyés sur son amour, ne vous laissez pas intimider par un environnement qui prétend exclure Dieu et dans lequel le pouvoir, l’avoir ou le plaire à peu de frais sont les critères principaux qui dirigent l’existence. Il peut se faire que vous soyez méprisés, comme il arrive d’ordinaire à ceux qui recherchent des buts plus élevés ou démasquent les idoles devant lesquelles nombreux sont aujourd’hui ceux qui se prosternent. C’est alors qu’une vie profondément enracinée dans le Christ se montrera réellement comme une nouveauté et attirera avec force ceux qui cherchent vraiment Dieu, la vérité et la justice.

Encouragés par vos formateurs, ouvrez votre âme à la lumière du Seigneur pour voir si ce chemin, qui demande du courage et de l’authenticité, est le vôtre, et n’avancez jusqu’au sacerdoce que si vous êtes fermement persuadés que Dieu vous appelle à être ses ministres et pleinement décidés à exercer ce ministère dans l’obéissance aux dispositions de l’Église.

Avec cette confiance, apprenez de Lui qu’il s’est défini lui-même comme doux et humble de coeur, en vous dépouillant pour cela de tout désir humain, de manière à ne pas vous rechercher vous-mêmes, en édifiant vos frères par votre comportement, comme le fit le saint patron du clergé séculier espagnol, saint Jean d’Avila. Animés par son exemple, regardez surtout la Vierge Marie, Mère des prêtres. Elle saura former votre âme sur le modèle du Christ, son divin Fils, et elle vous enseignera toujours à garder les biens qu’Il a acquis sur le Calvaire pour le salut du monde. Amen.




Déclaration de Saint Jean d’Avila, prêtre, Docteur de l’Église universelle


Chers frères,

Avec grande joie, en cette sainte église cathédrale de Sainte Marie la Royale de la Almuneda, je voudrais annoncer maintenant au Peuple de Dieu que, accueillant les demandes du Président de la Conférence épiscopale espagnole, Son Éminence le Cardinal Antonio Maria Rouco Varela, Archevêque de Madrid, des autres Frères dans l’Épiscopat d’Espagne, comme aussi d’un grand nombre d’Archevêques et d’Évêques des autres parties du monde, et de nombreux fidèles, je déclarerai prochainement saint Jean d’Avila, prêtre, Docteur de l’Église universelle.

En rendant publique ici cette nouvelle, je souhaite que la parole et l’exemple de cet éminent pasteur illuminent les prêtres et ceux qui se préparent avec joie et espérance à recevoir un jour l’Ordination sacrée.

Je vous invite tous à tourner votre regard vers lui, et je recommande à son intercession les Évêques d’Espagne et du monde entier, comme aussi les prêtres et les séminaristes, pour que, en persévérant dans la même foi dont il fut un maître, ils modèlent leur coeur selon les sentiments de Jésus Christ, le Bon Pasteur, à qui soit rendus gloire et honneur dans les siècles des siècles. Amen.




Benoît XVI Homélies 23611