Benoît XVI Homélies 10113

MESSE EN LA SOLENNITÉ DE SAINTE MARIE MÈRE DE DIEU Mardi 1er janvier 2013

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XLVIe JOURNÉE MONDIALE DE LA PAIX

Basilique Saint-Pierre





Chers frères et soeurs !

« Que Dieu nous bénisse, qu’il fasse resplendir sur nous son visage ». C’est ainsi que nous avons acclamé, avec les paroles du Psaume 66, après avoir écouté dans la première lecture, l’antique bénédiction sacerdotale sur le peuple de l’alliance. Il est particulièrement significatif qu’au début de chaque nouvelle année, Dieu projette sur nous, son peuple, la lumière de son saint Nom, le Nom qui est prononcé trois fois dans la formule solennelle de la bénédiction biblique. Et il est non moins significatif qu’au Verbe de Dieu – qui « s’est fait chair et a habité parmi nous » comme la « vraie Lumière, qui éclaire tout homme » (
Jn 1,9 Jn 1,14) – soit donné huit jours après sa naissance le nom de Jésus, comme nous le raconte l’Évangile d’aujourd’hui (cf. Lc Lc 2,21).

C’est dans ce nom que nous sommes réunis ici. Je salue cordialement toutes les personnes présentes, à commencer par les Ambassadeurs du Corps diplomatique accrédité près le Saint-Siège. Je salue avec affection le Cardinal Bertone, mon Secrétaire d’État, et le Cardinal Turkson, avec tous les membres du Conseil pontifical Justice et Paix ; je leur suis particulièrement reconnaissant pour leur engagement à diffuser le Message pour la Journée mondiale de la Paix, qui cette année, a pour thème « Bienheureux les artisans de paix ».

Bien que le monde soit malheureusement encore marqué par des « foyers de tension et d’opposition causés par des inégalités croissantes entre riches et pauvres, par la prévalence d’une mentalité égoïste et individualiste qui s’exprime également au travers d’un capitalisme financier sans régulation », en plus des différentes formes de terrorisme et de criminalité, je suis persuadé que « les nombreuses oeuvres de paix dont le monde est riche, témoignent de la vocation innée de l’humanité à la paix. En chaque personne, le désir de paix est une aspiration essentielle qui coïncide, d’une certaine façon, avec le désir d’une vie humaine pleine, heureuse et accomplie… L’homme est fait pour la paix qui est don de Dieu. Tout ce qui précède m’a conduit à m’inspirer, pour ce Message, des paroles de Jésus-Christ : « Heureux les artisans de paix, parce qu’ils seront appelés fils de Dieu » (Mt 5,9) (Message, n. 1). Cette béatitude « dit que la paix est à la fois don messianique et oeuvre humaine… C’est la paix avec Dieu, en vivant selon sa volonté. C’est la paix intérieure avec soi-même et la paix extérieure avec le prochain et avec toute la création » (id. nn. 2 et 3). Oui, la paix est le bien par excellence à invoquer comme don de Dieu et, en même temps, à construire avec effort.

Nous pouvons nous demander : quel est le fondement, l’origine, la racine de cette paix ? Comment pouvons-nous sentir en nous la paix, malgré les problèmes, les obscurités, les angoisses ? La réponse nous est donnée par les lectures de la liturgie d’aujourd’hui. Les textes bibliques, surtout celui tiré de l’Évangile de Luc, qui vient d’être proclamé, nous proposent de contempler la paix intérieure de Marie, la Mère de Jésus. Pour elle s’accomplissent durant les jours où « elle mit au monde son fils premier-né » (Lc 2,7), tant d’événements imprévus : non seulement la naissance de son Fils, mais auparavant le voyage fatigant de Nazareth à Bethléem, le fait de ne pas trouver de place à l’auberge, la recherche d’un refuge de fortune dans la nuit ; et puis le chant des anges, la visite inattendue des bergers. En tout cela, cependant, Marie ne se trouble pas, elle ne s’agite pas, elle n’est pas bouleversée par des faits qui la dépassent ; elle considère simplement, en silence, ce qui arrive, le garde dans sa mémoire et dans son coeur, y réfléchissant avec calme et sérénité. C’est cela la paix intérieure que nous voudrions avoir au milieu des événements parfois tumultueux et confus de l’histoire, événements dont souvent nous ne saisissons pas le sens et qui nous déconcertent.

Le passage évangélique se termine avec une allusion à la circoncision de Jésus. Selon la Loi de Moïse, huit jours après la naissance, un petit garçon devait être circoncis et à ce moment lui était donné son nom. Dieu lui-même, par son messager, avait dit à Marie – et aussi à Joseph – que le nom à donner à l’Enfant était « Jésus » (cf. Mt 1,21 Lc 1,31) ; et ce fut ainsi. Ce nom que Dieu avait déjà établi avant que l’Enfant fut conçu, est donné maintenant officiellement au moment de la circoncision. Et cela marque aussi une fois pour toutes l’identité de Marie : elle est « la mère de Jésus », c’est-à-dire la mère du Sauveur, du Christ, du Seigneur. Jésus n’est pas un homme comme n’importe quel autre, mais il est le Verbe de Dieu, une des Personnes divines, le Fils de Dieu : par conséquent, l’Église a donné à Marie le titre de Theotokos, c’est-à-dire « Mère de Dieu ».

La première Lecture nous rappelle que la paix est don de Dieu et est liée à la splendeur du visage de Dieu, selon le texte du Livre des Nombres, qui transmet la bénédiction utilisée par les prêtres du peuple d’Israël dans les assemblées liturgiques. Une bénédiction qui par trois fois répète le saint nom de Dieu, le nom imprononçable, et chaque fois le relie à deux verbes indiquant une action en faveur de l’homme : « Que le Seigneur te bénisse et te garde. Que le Seigneur fasse briller sur toi son visage, qu’il se penche vers toi. Que le Seigneur tourne vers toi son visage, qu’il t’apporte la paix » (6, 24-26). La paix est donc le sommet de ces six actions de Dieu en notre faveur, dans lesquelles il tourne vers nous la splendeur de son visage.

Pour la Sainte Écriture, contempler le visage de Dieu est le plus grand bonheur : « Tu le réjouis de bonheur près de ta face », dit le psalmiste (Ps 21,7). De la contemplation du visage de Dieu naissent joie, sécurité et paix. Mais que signifie concrètement contempler le visage du Seigneur, comment cela peut-il être compris dans le Nouveau Testament ? Cela veut dire le connaitre directement, pour autant qu’il est possible en cette vie, par Jésus Christ, en qui il s’est révélé. Jouir de la splendeur du visage de Dieu veut dire pénétrer dans le mystère de son Nom qui nous est manifesté par Jésus, comprendre quelque chose de sa vie intime et de sa volonté, afin que nous puissions vivre selon son dessein d’amour sur l’humanité. L’apôtre Paul l’exprime dans la seconde Lecture, tirée de la Lettre aux Galates (4, 4-7), en parlant de l’Esprit qui, dans l’intime de nos coeurs, crie : « Abba ! Père ! ». C’est le cri qui jaillit de la contemplation du vrai visage de Dieu, de la révélation du mystère du Nom. Jésus affirme : « J’ai fait connaître ton nom aux hommes » (Jn 17,6). Le Fils de Dieu qui s’est fait chair nous a fait connaître le Père, il nous a fait percevoir dans son visage humain visible le visage invisible du Père ; à travers le don de l’Esprit Saint répandu dans nos coeurs, il nous a fait connaître qu’en Lui nous sommes nous aussi enfants de Dieu, comme affirme saint Paul dans le passage que nous avons entendu : « Et voici la preuve que vous êtes des fils : envoyé de Dieu, l’Esprit de son Fils est dans nos coeurs, et il crie vers le Père en l’appelant ’Abba ! Père !’ » (Ga 4,6).

Voici, chers frères et soeurs, le fondement de notre paix : la certitude de contempler en Jésus Christ la splendeur du visage de Dieu Père, d’être fils dans le Fils, et d’avoir ainsi, sur le chemin de la vie, la même sécurité que l’enfant éprouve dans les bras d’un Père bon et tout puissant. La splendeur du visage du Seigneur sur nous, qui nous donne la paix est la manifestation de sa paternité ; le Seigneur tourne vers nous son visage, se montre Père et nous donne la paix. C’est là le principe de cette paix profonde – « la paix avec Dieu » - qui est liée indissolublement à la foi et à la grâce, comme écrit saint Paul aux chrétiens de Rome (cf. Rm Rm 5,2). Rien ne peut ôter aux croyants cette paix, pas même les difficultés et les souffrances de la vie. En effet, les souffrances, les épreuves et les obscurités n’érodent pas mais accroissent notre espérance, une espérance qui ne déçoit pas parce que « l’amour de Dieu a été répandu dans nos coeurs par l’Esprit Saint qui nous a été donné » (Rm 5,5).

Que la Vierge Marie, que nous vénérons aujourd’hui avec le titre de Mère de Dieu, nous aide à contempler le visage de Jésus, Prince de la Paix. Qu’elle nous soutienne et nous accompagne en cette nouvelle année ; qu’elle obtienne pour nous et pour le monde entier le don de la paix. Amen !



MESSE EN LA SOLENNITÉ DE L'ÉPIPHANIE DU SEIGNEUR

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Basilique Vaticane

Dimanche 6 janvier 2013



Chers frères et soeurs !

Pour l’Église croyante et priante, les Mages d’Orient qui, sous la conduite de l’étoile, ont trouvé la route vers la crèche de Bethléem sont seulement le début d’une grande procession qui s’avance dans l’histoire. À cause de cela, la liturgie lit l’évangile qui parle du cheminement des Mages avec les splendides visions prophétiques d’Isaïe 60 et du Psaume 72, qui illustrent par des images audacieuses le pèlerinage des peuples vers Jérusalem. Comme les bergers qui, en tant que premiers hôtes auprès de l’Enfant nouveau-né couché dans la mangeoire, personnifient les pauvres d’Israël et, en général, les âmes humbles qui vivent intérieurement en étant très proches de Jésus, ainsi les hommes provenant de l’Orient personnifient le monde des peuples, l’Église des Gentils – les hommes qui à travers tous les siècles se mettent en marche vers l’Enfant de Bethléem, honorent en Lui le Fils de Dieu et se prosternent devant Lui. L’Église appelle cette fête « Épiphanie » – la manifestation du Divin. Si nous regardons le fait que, dès le début, les hommes de toute provenance, de tous les continents, de toutes les diverses cultures et de tous les divers modes de pensée et de vie ont été et sont en marche vers le Christ, nous pouvons vraiment dire que ce pèlerinage et cette rencontre avec Dieu dans la figure de l’Enfant est une Épiphanie de la bonté de Dieu et de son amour pour les hommes (cf. Tt
Tt 3,4).

Selon une tradition commencée par le Bienheureux Pape Jean-Paul II, nous célébrons aussi la fête de l’Épiphanie comme le jour de l’ordination épiscopale pour quatre prêtres qui, en des fonctions diverses, collaboreront désormais au Ministère du Pape pour l’unité de l’unique Église de Jésus Christ dans la pluralité des Églises particulières. Le lien entre cette ordination épiscopale et le thème du pèlerinage des peuples vers Jésus Christ est évident. En ce pèlerinage, l’évêque a la mission non seulement de marcher avec les autres, mais de précéder et d’indiquer la route. Dans cette liturgie, je voudrais toutefois réfléchir encore avec vous sur une question plus concrète. À partir de l’histoire racontée par Matthieu, nous pouvons certainement nous faire une certaine idée du type d’hommes qu’ont dû être ceux qui, en suivant le signe de l’étoile, se sont mis en route pour aller trouver ce Roi qui aurait fondé un nouveau type de royauté, non seulement pour Israël, mais aussi pour l’humanité entière. Quel genre d’hommes ceux-ci étaient-ils donc ? Et, à partir d’eux, demandons-nous aussi si, malgré la différence d’époque et de missions, on peut percevoir quelque chose de ce qu’est l’évêque et sur la façon dont il doit accomplir sa mission.

Les hommes qui partirent alors vers l’inconnu étaient, en tout cas, des hommes au coeur inquiet. Des hommes poussés par la recherche inquiète de Dieu et du salut du monde. Des hommes en attente qui ne se contentaient pas de leur revenu assuré et de leur position sociale peut-être reconnue. Ils étaient à la recherche de la réalité la plus grande. Ils étaient peut-être des hommes instruits qui avaient une grande connaissance des astres et qui probablement disposaient aussi d’une formation philosophique. Mais, ils ne voulaient pas seulement savoir beaucoup de choses. Ils voulaient savoir surtout l’essentiel. Ils voulaient savoir comment on peut réussir à être une personne humaine. Et c’est pourquoi, ils voulaient savoir si Dieu existe, où et comment il est. S’il prenait soin de nous et comment nous pouvons le rencontrer. Ils voulaient non seulement savoir. Ils voulaient reconnaître la vérité sur nous, sur Dieu et sur le monde. Leur pèlerinage extérieur était une expression de leur cheminement intérieur, du pèlerinage intérieur de leur coeur. Ils étaient des hommes qui cherchaient Dieu et, en définitive, ils étaient en marche vers lui. Ils étaient des chercheurs de Dieu.

Mais avec cela, nous arrivons à la question : comment doit être un homme à qui on impose les mains pour l’ordination épiscopale dans l’Église de Jésus Christ ? Nous pouvons dire : il doit être avant tout un homme dont l’intérêt est tourné vers Dieu, car c’est seulement alors qu’il s’intéresse vraiment aussi aux hommes. Nous pourrions aussi le dire en sens inverse : un évêque doit être un homme à qui les hommes tiennent à coeur, un homme qui est touché par les situations des hommes. Il doit être un homme pour les autres. Toutefois, il peut l’être vraiment seulement s’il est un homme conquis par Dieu. Si pour lui, l’inquiétude pour Dieu est devenu une inquiétude pour sa créature, l’homme. Comme les Mages d’Orient, un évêque ne doit pas aussi être quelqu’un qui exerce seulement son métier et ne veut rien d’autre. Non, il doit être pris par l’inquiétude de Dieu pour les hommes. Il doit, pour ainsi dire, penser et sentir avec Dieu. Il n’est pas seulement l’homme qui porte en lui l’inquiétude innée pour Dieu, mais cette inquiétude est une participation à l’inquiétude de Dieu pour nous. Puisque Dieu est inquiet de nous, il nous suit jusque dans la mangeoire, jusqu’à la Croix. « En me cherchant, tu as peiné ; tu m’as sauvé par ta passion : qu’un tel effort ne soit pas vain », prie l’Église dans le Dies irae. L’inquiétude de l’homme pour Dieu et, à partir d’elle, l’inquiétude de Dieu pour l’homme ne doivent pas donner de repos à l’évêque. C’est cela que nous comprenons quand nous disons que l’évêque doit être d’abord un homme de foi. Car la foi n’est pas autre chose que le fait d’être intérieurement touché par Dieu, une condition qui nous conduit sur le chemin de la vie. La foi nous introduit dans un état où nous sommes pris par l’inquiétude de Dieu et fait de nous des pèlerins qui sont intérieurement en marche vers le vrai Roi du monde et vers sa promesse de justice, de vérité et d’amour. Dans ce pèlerinage, l’évêque doit précéder, il doit être celui qui indique aux hommes le chemin vers la foi, l’espérance et l’amour.

Le pèlerinage intérieur de la foi vers Dieu s’effectue surtout dans la prière. Saint Augustin a dit un jour que la prière, en dernière analyse, ne serait autre chose que l’actualisation et la radicalisation de notre désir de Dieu. À la place de la parole “désir”, nous pourrions mettre aussi la parole “inquiétude” et dire que la prière veut nous arracher à notre fausse commodité, à notre enfermement dans les réalités matérielles, visibles et nous transmettre l’inquiétude pour Dieu, nous rendant ainsi ouverts et inquiets aussi les uns des autres. Comme pèlerin de Dieu, l’évêque doit être d’abord un homme qui prie. Il doit être en contact intérieur permanent avec Dieu ; son âme doit être largement ouverte vers Dieu. Il doit porter à Dieu ses difficultés et celles des autres, comme aussi ses joies et celles des autres, et établir ainsi, à sa manière, le contact entre Dieu et le monde dans la communion avec le Christ, afin que la lumière du Christ resplendisse dans le monde.

Revenons aux Mages d’Orient. Ceux-ci étaient aussi et surtout des hommes qui avaient du courage, le courage et l’humilité de la foi. Il fallait du courage pour accueillir le signe de l’étoile comme un ordre de partir, pour sortir – vers l’inconnu, l’incertain, sur des chemins où il y avait de multiples dangers en embuscade. Nous pouvons imaginer que la décision de ces hommes a suscité la dérision : la plaisanterie des réalistes qui pouvaient seulement se moquer des rêveries de ces hommes. Celui qui partait sur des promesses aussi incertaines, risquant tout, ne pouvait apparaître que ridicule. Mais pour ces hommes touchés intérieurement par Dieu, le chemin selon les indications divines était plus important que l’opinion des gens. La recherche de la vérité était pour eux plus importante que la dérision du monde, apparemment intelligent.

Comment ne pas penser, dans une telle situation, à la mission d’un évêque à notre époque ? L’humilité de la foi, du fait de croire ensemble avec la foi de l’Église de tous les temps, se trouvera à maintes reprises en conflit avec l’intelligence dominante de ceux qui s’en tiennent à ce qui apparemment est sûr. Celui qui vit et annonce la foi de l’Église, sur de nombreux points n’est pas conforme aux opinions dominantes justement aussi à notre époque. L’agnosticisme aujourd’hui largement dominant a ses dogmes et est extrêmement intolérant à l’égard de tout ce qui le met en question et met en question ses critères. Par conséquent, le courage de contredire les orientations dominantes est aujourd’hui particulièrement urgent pour un évêque. Il doit être valeureux. Et cette vaillance ou ce courage ne consiste pas à frapper avec violence, à être agressif, mais à se laisser frapper et à tenir tête aux critères des opinions dominantes. Le courage de demeurer fermement dans la vérité est inévitablement demandé à ceux que le Seigneur envoie comme des agneaux au milieu des loups. « Celui qui craint le Seigneur n’a peur de rien » dit le Siracide (34, 16). La crainte de Dieu libère de la crainte des hommes. Elle rend libres !

Dans ce contexte, un épisode des débuts du christianisme que saint Luc rapporte dans les Actes des Apôtres me vient à l’esprit. Après le discours de Gamaliel, qui déconseillait la violence envers la communauté naissante des croyants en Jésus, le sanhédrin convoqua les Apôtres et les fit flageller. Ensuite il leur interdit de parler au nom de Jésus et il les remit en liberté. Saint Luc continue : « Mais eux, en sortant du sanhédrin, repartaient tout joyeux d’avoir été jugés dignes de subir des humiliations pour le nom de Jésus. Et chaque jour … ils ne cessaient d’enseigner et d’annoncer la Bonne Nouvelle du Christ Jésus » (Ac 5, 40ss.). Les successeurs des Apôtres doivent aussi s’attendre à être à maintes reprises frappés, de manière moderne, s’ils ne cessent pas d’annoncer de façon audible et compréhensible l’Évangile de Jésus Christ. Et alors ils peuvent être heureux d’avoir été jugés dignes de subir des outrages pour lui. Naturellement, nous voulons, comme les apôtres, convaincre les gens et, en ce sens, obtenir leur approbation. Naturellement, nous ne provoquons pas, mais bien au contraire nous invitons chacun à entrer dans la joie de la vérité qui indique la route. L’approbation des opinions dominantes, toutefois, n’est pas le critère auquel nous nous soumettons. Le critère c’est Lui seul : le Seigneur. Si nous défendons sa cause, grâce à Dieu, nous gagnerons toujours de nouveau des personnes pour le chemin de l’Évangile. Mais inévitablement nous serons aussi frappés par ceux qui, par leur vie, sont en opposition avec l’Évangile, et alors nous pouvons être reconnaissants d’être jugés dignes de participer à la Passion du Christ.

Les Mages ont suivi l’étoile, et ainsi ils sont parvenus jusqu’à Jésus, jusqu’à la grande Lumière qui éclaire tout homme venant en ce monde (cf. Jn 1,9). Comme pèlerins de la foi, les Mages sont devenus eux-mêmes des étoiles qui brillent dans le ciel de l’histoire et nous indiquent la route. Les saints sont les vraies constellations de Dieu, qui éclairent les nuits de ce monde et nous guident. Saint Paul, dans la Lettre aux Philippiens, a dit à ses fidèles qu’ils doivent resplendir comme des astres dans le monde (cf. 2, 15).

Chers amis, ceci nous concerne aussi. Ceci vous concerne surtout vous qui, maintenant, allez être ordonnés évêques de l’Église de Jésus Christ. Si vous vivez avec le Christ, liés à nouveau à lui dans le sacrement, alors vous aussi vous deviendrez des sages. Alors vous deviendrez des astres qui précèdent les hommes et leur indiquent le juste chemin de la vie. En ce moment nous tous ici nous prions pour vous, afin que le Seigneur vous remplisse de la lumière de la foi et de l’amour. Afin que cette inquiétude de Dieu pour l’homme vous touche, pour que tous fassent l’expérience de sa proximité et reçoivent le don de sa joie. Nous prions pour vous, afin que le Seigneur vous donne toujours le courage et l’humilité de la foi. Nous prions Marie qui a montré aux Mages le nouveau Roi du monde (Mt 2,11), afin qu’en Mère affectueuse, elle vous montre aussi Jésus Christ et vous aide à être des hommes qui indiquent la route qui conduit à lui. Amen.



FÊTE DU BAPTÊME DU SEIGNEUR CÉLÉBRATION DE LA MESSE ET BAPTÊME DE NOUVEAU-NÉS

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Chapelle Sixtine

Dimanche 13 janvier 2013




Chers frères et soeurs,

La joie qui naît de la célébration du Saint Noël trouve aujourd’hui son accomplissement dans la fête du baptême du Seigneur. À cette joie vient s’ajouter un motif supplémentaire pour nous qui sommes réunis ici : dans le sacrement du baptême, que j’administrerai dans quelques instants à ces nouveau-nés, se manifeste en effet la présence vivante et agissante de l’Esprit Saint qui, enrichissant l’Église de nouveaux enfants, la vivifie et la fait croître, et nous ne pouvons que nous réjouir de cela. Je désire adresser un salut particulier à vous, chers parents, parrains et marraines, qui témoignez aujourd’hui de votre foi en demandant le baptême pour ces enfants, pour qu’ils soient engendrés à la vie nouvelle dans le Christ et entrent dans la communauté des croyants.

Le récit évangélique du baptême de Jésus, que nous avons écouté aujourd’hui selon la version de saint Luc, montre la voie de l’abaissement et de l’humilité, que le Fils de Dieu a choisie librement pour adhérer au dessein du Père, pour être obéissant à sa volonté d’amour envers l’homme en tout, jusqu’au sacrifice sur la croix. Désormais devenu adulte, Jésus commence son ministère public en se rendant au fleuve Jourdain pour recevoir de Jean un baptême de pénitence et de conversion. Il se produit ce qui à nos yeux pourrait apparaître paradoxal. Jésus a-t-il besoin de pénitence et de conversion ? Assurément pas. Et pourtant, c’est précisément Celui qui est sans péché qui se place parmi les pécheurs pour se faire baptiser, pour accomplir ce geste de pénitence ; le Saint de Dieu s’unit à ceux qui se reconnaissent comme ayant besoin de pardon et demandent à Dieu le don de la conversion, c’est-à-dire la grâce de revenir à Lui de tout leur coeur, pour lui appartenir complètement. Jésus veut se mettre du côté des pécheurs, devenant solidaire avec eux, exprimant la proximité de Dieu. Jésus se montre solidaire avec nous, avec notre difficulté à nous convertir, à abandonner nos égoïsmes, à nous détacher de nos péchés, pour nous dire que si nous l’acceptons dans notre vie, Il est capable de nous relever et de nous conduire à la hauteur de Dieu le Père. Et cette solidarité de Jésus n’est pas, pour ainsi dire, un simple exercice de l’esprit et de la volonté. Jésus s’est réellement plongé dans notre condition humaine, il l’a vécue jusqu’au bout, en dehors du péché, et il est en mesure d’en comprendre la faiblesse et la fragilité. C’est pourquoi il ressent de la compassion, il choisit de « souffrir avec » les hommes, de devenir pénitent avec nous. Telle est l’oeuvre de Dieu que Jésus veut accomplir: la mission divine de panser celui qui est blessé et de soigner celui qui est malade, de prendre sur lui le péché du monde.

Que se passe-t-il au moment où Jésus se fait baptiser par Jean ? Face à cet acte d’amour humble de la part du Fils de Dieu, les cieux s’ouvrent et l’Esprit Saint se manifeste de manière visible sous la forme d’une colombe, alors qu’une voix d’en-haut exprime la satisfaction du Père, qui reconnaît le Fils unique, le Bien-aimé. Il s’agit d’une véritable manifestation de la Très Sainte Trinité, qui rend témoignage de la divinité de Jésus, du fait qu’il est le Messie promis, Celui que Dieu a envoyé libérer son peuple, pour qu’il soit sauvé (cf. Is
Is 40,2). C’est ainsi que se réalise la prophétie d’Isaïe que nous avons écoutée dans la première Lecture : le Seigneur Dieu vient avec puissance pour détruire les oeuvres du péché et son bras exerce sa domination pour désarmer le Malin ; mais gardons à l’esprit que ce bras est le bras étendu sur la croix et que la puissance du Christ est la puissance de Celui qui souffre pour nous : tel est le pouvoir de Dieu, différent du pouvoir du monde ; ainsi, Dieu vient avec puissance pour détruire le péché. Jésus agit vraiment comme le Bon Pasteur qui fait paître le troupeau et le rassemble, pour qu’il ne se disperse pas (cf. Is Is 40,10-11), et il offre sa propre vie pour qu’il ait la vie. C’est par sa mort rédemptrice que l’homme est libéré de la domination du péché et qu’il est réconcilié avec le Père ; c’est par sa résurrection que l’homme est sauvé de la mort éternelle et qu’il vainc le Malin.

Chers frères et soeurs, que se passe-t-il dans le baptême que j’administrerai d’ici peu à vos enfants ? C’est précisément cela qui se passe : ils seront unis de manière profonde et pour toujours avec Jésus, plongés dans le mystère de sa puissance, de son pouvoir, c’est-à-dire dans le mystère de sa mort, qui est source de vie, pour participer à sa résurrection, pour renaître à une vie nouvelle. Voilà le prodige qui se répète aujourd’hui aussi pour vos enfants : en recevant le baptême, ils renaissent comme fils de Dieu, participant à la relation filiale que Jésus a avec le Père, capables de s’adresser à Dieu en l’appelant avec une familiarité et une confiance totales : « Abbà, Père ». Sur vos enfants aussi le ciel est ouvert, et Dieu dit : ce sont mes enfants, les enfants en qui je me complais. Insérés dans cette relation et libérés du péché originel, ils deviennent des membres vivants de l’unique corps qui est l’Église et ils sont en mesure de vivre en plénitude leur vocation à la sainteté, de manière a pouvoir ainsi hériter la vie éternelle, qui nous a été obtenue par la résurrection de Jésus.

Chers parents, en demandant le baptême pour vos enfants, vous manifestez et vous témoignez votre foi, la joie d’être chrétiens et d’appartenir à l’Église. C’est la joie qui naît de la conscience d’avoir reçu un grand don de Dieu, la foi précisément, un don que personne de nous n’a pu mériter, mais qui nous a été donné gratuitement et auquel nous avons pu répondre avec notre « oui ». C’est la joie de nous reconnaître comme fils de Dieu, de découvrir que nous sommes placés entre ses mains, de nous sentir accueillis dans une étreinte d’amour, de la même manière qu’une mère soutient et embrasse son enfant. Cette joie, qui oriente le chemin de chaque chrétien, se fonde sur le rapport personnel avec Jésus, un rapport qui oriente toute l’existence humaine. C’est Lui, en effet, le sens de notre vie, Celui sur qui il vaut la peine de garder le regard fixé, pour être illuminés par sa Vérité et pour pouvoir vivre en plénitude. Le chemin de la foi qui commence aujourd’hui pour ces enfants, se fonde donc sur une certitude, sur l’expérience qu’il n’y a rien de plus grand que connaître le Christ et communiquer aux autres l’amitié avec Lui; ce n’est que dans cette amitié que s’ouvrent réellement les grandes potentialités de la condition humaine et que nous pouvons expérimenter ce qui est beau et ce qui libère (cf. Homélie lors de la Messe pour le début du pontificat, 24 avril 2005). Celui qui a fait cette expérience n’est pas disposé à renoncer à sa foi pour rien au monde.

À vous, chers parrains et marraines, revient la tâche importante de soutenir et d’aider l’oeuvre éducative des parents, en les soutenant dans la transmission de la vérité de la foi et dans le témoignage des valeurs de l’Évangile, en les aidant à faire grandir ces enfants dans une amitié toujours plus profonde avec le Seigneur. Sachez toujours leur offrir votre bon exemple, à travers l’exercice des vertus chrétiennes. Il n’est pas facile de manifester ouvertement et sans compromis ce en quoi l’on croit, en particulier dans le contexte dans lequel nous vivons, face à une société qui considère souvent démodés et dépassés ceux qui vivent de la foi en Jésus. Suivant cette mentalité, il peut exister également chez les chrétiens le risque de concevoir la relation avec Jésus comme limitante, comme quelque chose qui freine la propre réalisation personnelle ; « Dieu est vu comme la limite à notre liberté, une limite à éliminer afin que l’homme puisse être totalement lui-même » (L’enfance de Jésus). Mais il n’en est pas ainsi ! Cette vision montre ne rien avoir compris de la relation avec Dieu, car c’est précisément à mesure que l’on avance sur le chemin de la foi que l’on comprend que Jésus exerce sur nous l’action libératrice de l’amour de Dieu, qui nous fait sortir de notre égoïsme, de notre repli sur nous-mêmes, pour nous conduire à une vie en plénitude, en communion avec Dieu et ouverte aux autres. « “Dieu est amour: celui qui demeure dans l’amour demeure en Dieu, et Dieu en lui” (1Jn 4,16). Ces paroles de la Première Lettre de saint Jean expriment avec une clarté particulière ce qui fait le centre de la foi chrétienne : l’image chrétienne de Dieu, ainsi que l'image de l'homme et de son chemin, qui en découle » (Enc. Deus caritas est ).

L’eau avec laquelle ces enfants seront marqués au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit, les plongera dans cette « source » de vie qui est Dieu lui-même et qui fera d’eux ses véritables enfants. Et la semence des vertus théologales, transmise par Dieu, la foi, l’espérance et la charité, une semence qui est aujourd’hui placée dans leur coeur par la puissance de l’Esprit Saint, devra toujours être alimentée par la Parole de Dieu et par les Sacrements, de manière à ce que ces vertus du chrétien puissent croître et parvenir à leur pleine maturité, jusqu’à faire de chacun de nous un véritable témoin du Seigneur. Alors que nous invoquons sur ces petits enfants l’effusion de l’Esprit Saint, nous les confions à la protection de la Sainte Vierge ; qu’elle les garde toujours avec sa présence maternelle et les accompagne à chaque moment de leur vie. Amen.



CÉLÉBRATION DES VÊPRES EN CONCLUSION DE LA SEMAINE DE PRIÈRE POUR L'UNITÉ DES CHRÉTIENS Vendredi 25 janvier 2013

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Solennité de la Conversion de saint Paul apôtre

Basilique Saint-Paul-hors-les-murs






Chers frères et soeurs!

C’est toujours une joie et une grâce particulière de se retrouver ensemble, autour de la tombe de l’apôtre Paul, pour conclure la Semaine de prière pour l’unité des chrétiens. Je salue avec affection les cardinaux présents, en premier lieu le cardinal Harvey, archiprêtre de cette basilique, et avec lui l’abbé et la communauté des moines qui nous accueillent. Je salue le cardinal Koch, président du Conseil pontifical pour la promotion de l’unité des chrétiens, ainsi que tous les collaborateurs du dicastère. J’adresse mes salutations cordiales et fraternelles à Son Eminence le métropolite Gennadios, représentant du patriarche oecuménique, au révérend chanoine Richardson, représentant personnel à Rome de l’archevêque de Canterbury, et à tous les représentants des différentes Eglises et communautés ecclésiales, réunies ici ce soir. Je suis en outre particulièrement heureux de saluer les membres de la Commission mixte pour le dialogue théologique entre l’Eglise catholique et les Eglises orthodoxes orientales, auxquelles je souhaite un fructueux travail pour la session plénière qui se déroule ces jours-ci à Rome, ainsi qu’aux étudiants de l’Institut oecuménique de Bossey, en visite à Rome pour approfondir leur connaissance de l’Eglise catholique, et les jeunes orthodoxes et orthodoxes orientaux qui étudient ici. Je salue enfin toutes les personnes présentes venues prier pour l’unité entre tous les disciples du Christ.

Cette célébration s’inscrit dans le cadre de l’Année de la foi, qui a débuté le 11 octobre dernier, cinquantième anniversaire de l’ouverture du Concile Vatican II. La communion dans la même foi est la base de l’oecuménisme. L’unité, en effet, est donnée par Dieu comme inséparable de la foi; saint Paul l’exprime de manière efficace: «Il n’y a qu’un Corps et qu’un Esprit, comme il n’y a qu’une espérance au terme de l’appel que vous avez reçu; un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême; un seul Dieu et Père de tous, qui est au-dessus de tous, par tout et en tous» (
Ep 4,4-6). La profession de la foi baptismale en Dieu, Père et Créateur, qui s’est révélé dans le Fils Jésus Christ, en offrant l’Esprit qui vivifie et sanctifie, unit déjà les chrétiens. Sans la foi — qui est avant tout don de Dieu, mais aussi réponse de l’homme — tout le mouvement oecuménique se réduirait à une forme de «contrat» auquel adhérer dans un intérêt commun. Le Concile Vatican II rappelle que, pour les chrétiens, «plus étroite, en effet, sera leur communion avec le Père, le Verbe et l’Esprit Saint, plus ils pourront rendre intime et facile la fraternité mutuelle» (Décr. Unitatis redintegratio UR 7). Les questions doctrinales qui nous divisent encore ne doivent pas être négligées ni minimisées. Il faut plutôt les affronter avec courage, dans un esprit de fraternité et de respect réciproque. Le dialogue, lorsqu’il reflète la priorité de la foi, permet de s’ouvrir à l’action de Dieu avec la ferme confiance que, seuls, nous ne pouvons pas construire l’unité, mais que c’est l’Esprit Saint qui nous guide vers la pleine communion, et fait saisir la richesse spirituelle présente dans les différentes Eglises et communautés ecclésiales.

Dans la société actuelle, il semble que le message chrétien influe toujours moins sur la vie personnelle et communautaire; et cela représente un défi pour toutes les Eglises et les communautés ecclésiales. L’unité est en elle-même un moyen privilégié, presque un présupposé pour annoncer de manière toujours plus crédible la foi à ceux qui ne connaissent pas encore le Sauveur ou qui, bien qu’ayant reçu l’annonce de l’Evangile, ont presque oublié ce don précieux. Le scandale de la division qui affaiblissait l’activité missionnaire fut l’élan qui donna naissance au mouvement oecuménique tel que nous le connaissons aujourd’hui. La communion pleine et visible entre les chrétiens doit être entendue, en effet, comme une caractéristique fondamentale pour un témoignage encore plus clair. Tandis que nous sommes en chemin vers la pleine unité, il est alors nécessaire de poursuivre une collaboration concrète entre les disciples du Christ pour la cause de la transmission de la foi au monde contemporain. Il y a aujourd’hui un grand besoin de réconciliation, de dialogue et de compréhension réciproque, dans une perspective non pas moralisante, mais précisément au nom de l’authenticité chrétienne pour une présence plus incisive dans la réalité de notre temps.

La véritable foi en Dieu est ensuite inséparable de la sainteté personnelle, comme aussi de la recherche de la justice. Au cours de la Semaine de prière pour l’unité des chrétiens, qui se conclut aujourd’hui, le thème offert à notre méditation était: «Que nous demande le Seigneur?», inspiré par les paroles du prophète Michée, que nous avons écoutées (cf. 6, 6-8). Il a été proposé par le Student Christian Movement in India, en collaboration avec la All India Catholic University Federation et le National Council of Churches in India, qui ont également préparé les documents d’accompagnement pour la réflexion et la prière. A tous ceux qui ont collaboré, je souhaite exprimer ma vive gratitude et, avec une grande affection, j’assure de ma prière tous les chrétiens de l’Inde qui sont parfois appelés à rendre témoignage de leur foi dans des conditions difficiles. «Marcher humblement avec Dieu» (cf. Mi Mi 6,8) signifie avant tout marcher dans la radicalité de la foi, comme Abraham, en se fiant à Dieu, et même en reposant en Lui chacune de nos espérances et aspirations, mais cela signifie aussi marcher au-delà des barrières, au-delà de la haine, du racisme et de la discrimination sociale et religieuse qui divisent et nuisent à la société tout entière. Comme l’affirme saint Paul, les chrétiens doivent offrir les premiers un lumineux exemple dans la recherche de la réconciliation et de la communion dans le Christ, qui surmonte tout type de division. Dans la Lettre aux Galates, l’apôtre des nations affirme: «Car vous êtes tous fils de Dieu, par la foi, dans le Christ Jésus. Vous tous en effet, baptisés dans le Christ, vous avez revêtu le Christ: il n’y a ni juif ni grec, il n’y a ni esclave ni homme libre, il n’y a ni homme ni femme; car tous vous ne faites qu’un dans le Christ Jésus» (3, 26-28).

Notre recherche d’unité dans la vérité et dans l’amour, enfin, ne doit jamais perdre de vue la perception que l’unité des chrétiens est l’oeuvre et le don de l’Esprit Saint et va bien au-delà de nos efforts. Par conséquent, l’oecuménisme spirituel, notamment la prière, est le coeur de l’engagement oecuménique (cf. Décr. Unitatis redintegratio UR 8). Toutefois, l’oecuménisme ne portera pas de fruits durables s’il ne s’accompagne pas de gestes concrets de conversion qui éveillent les consciences et favorisent la guérison des souvenirs et des relations. Comme l’affirme le décret sur l’oecuménisme du Concile Vatican II : «Il n’y a pas de véritable oecuménisme sans conversion intérieure» (n. 7). Une authentique conversion, comme celle suggérée par le prophète Michée et dont l’apôtre Paul est un exemple significatif, nous portera plus près de Dieu, au centre de notre vie, de façon à nous rapprocher davantage aussi les uns des autres. C’est là un élément fondamental de notre engagement oecuménique. Le renouveau de la vie intérieure de notre coeur et de notre esprit, qui se reflète dans la vie quotidienne, est crucial dans tout dialogue et parcours de réconciliation, en faisant de l’oecuménisme un engage- ment réciproque de compréhension, de respect et d’amour, «afin que le monde croie» (Jn 17,21).

Chers frères et soeurs, invoquons avec confiance la Vierge Marie, modèle inégalable d’évangélisation, afin que l’Eglise «à la fois le signe et le moyen de l’union intime avec Dieu et de l’unité de tout le genre humain» (Const. Lumen gentium LG 1), annonce avec franchise, à notre époque aussi, le Christ Sauveur. Amen.



Benoît XVI Homélies 10113