Bible chrétienne Actes 3

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§ 3. GUÉRISON MIRACULEUSE : Ac 3, 1 -26


Premier exemple des « signes et prodiges » que multiplient les Apôtres (Ac 2,43), notamment Pierre et Jean, les deux premiers nommés en Ac 1,13 ; mais, comme à la Résurrection (Jn 20,3-10), Jean s'efface, laissant l'initiative et la prédication à Pierre (Ac 3,4 Ac 3,12 Ac 4,7-8 Ac 4,13 Ac 4,19).

Ac 3,1Au Temple : Ac 2,46 Ac 2, neuvième heure, c'est-à-dire au début de l'après-midi (15 h). Heure de «l'oblation du soir» (Esd 9,5 ; Dn 9,21 ; cf. Ex 29,39), et Pierre y reste fidèle, même quand il est en dehors de Jérusalem (Ac 10,3.9.30). C'est bon de se dire que l'horaire de l'office liturgique a suivi, au moins jusqu'à ces dernières années, un rythme si vénérable (Ac 10,9*), et que certains monastères le gardent encore.

Ac 3,2-5 // Jn 9,1 Jn 9,8 Jn 5,3 Jn 5,6-8 Depuis le sein de sa mère: Comme «l'aveugle-né» du parallèle Jn 9 et comme l'infirme du parallèle Jn 5 l'est depuis Jn 38 ans (v. 5 — en parallèle à Ac 4,22); comme l'infirme également guéri par saint Paul , les miracles des Apôtres ne sont pas accomplis seulement « au nom de Jésus » (v. 6) mais à sa ressemblance, suivant sa Parole , « Celui qui croit en moi fera lui aussi les oeuvres que je fais. Il en fera même de plus grandes, parce que je vais au Père (prélude à l'envoi de l'Esprit Saint) . Et tout ce que vous demanderez en mon nom, je le ferai » (Jn 14,12-13). « La Belle Porte » , Probablement celle qui donnait directement sur le parvis des femmes, attenant au Temple.

Ac 3,6-8 // Lc 18,40-43 — Pauvreté matérielle, mais riche de Jésus-Christ (en accord avec la première béatitude).

saint léon : Sur les béatitudes (pl 54, 462 ; u 1111) — Quoi de plus sublime que cette humilité ? de plus riche que cette pauvreté ? Cet homme que sa mère avait enfanté infirme, d'un nom Pierre l'a guéri; et, n'ayant pas de quoi donner une pièce de monnaie à l'effigie de César, il a rétabli en l'homme l'image du Christ! Bien plus, de ce trésor il a tiré de quoi secourir non seulement cet homme, pour qu’il marche, mais les cinq mille hommes qui ont cru, comme l'Apôtre les y exhortait, à cause de ce miracle de guérison (cf. Ac Ac 4,4). au nom de : En donnant à l'expression la force que nous évoquions à propos d'Ac 2,38*, et que le présent miracle vient confirmer (ou de même EN 16,18). L'assurance que donne la foi en ce « nom de Jésus » est dite avec beaucoup de force en tout ce passage : cf. 3,16* et 4,9-12*. Qu'ajoute « le nom » à la réalité de la présence de Jésus que lui-même nous a promise (Mt 28,20) ? — Il implique pour nous deux avantages : pouvoir le nommer, c'est avoir conscience de ce que signifie ce nom de «Jésus », c'est-à-dire qu'il « sauve son peuple de ses péchés » (Mt 1,21 h*, p. Mt 103) ; et c'est aussi pouvoir l'invoquer, aussi souvent que nous y invite le danger, le besoin, ou simplement l'amour, comme dans les contes de fées où connaître le nom, c'est pouvoir se faire servir de celui qu'on appelle. Le premier de ces avantages implique la foi (comme il est dit expressément ici, Ac 3,16) ; mais l'autre avantage est le fruit d'une piété qui, spontanément, aime à redire ce nom, non seulement pour se protéger mais simplement pour renouveler notre conscience de cette divine présence à tout instant: «Jésus ! »... L'a.t. n'insistait pas moins sur l'importance de la reconnaissance et de l'invocation du nom pour la religion (cf. Il au v. 16 ; et bc i*, table). La nouveauté, c'est, une fois de plus, d'attribuer à «Jésus le Nazaréen » ce nom — et avec lui les titres divins de « Seigneur » (Ac 2,36), ou de « Saint », de « Juste », et de « Prince de la vie » (Ac 3,14-15*) qui ne reviennent, de plein droit, qu'à Dieu seul. Donc de le tenir pour Fils de Dieu et Dieu lui-même.

Ac 3,7Saisir par la main et faire se lever: Comme Jésus en Mc 1,31 ; 5,41 ; 8,23 ; 9,27 ; et 2,11.14 ; 3,3 ; 10,49.

il marchait: Prenons conscience ce qu'il y a d'enthousiasme dans ce constat émerveillé et que rend si bien la séquence : « marchant, sautant et louant Dieu ».

Dans les Actes, le salut implique aussi le salut du corps. Par la Résurrection, la nouvelle création s'est réalisée. Nous vivons dans l'« Eschaton ». Nous devons expérimenter dès maintenant la puissance salvatrice du Christ... Il n'y a pas de division : le salut de l'homme implique une purification de tout l'être, et réalise aussi la transformation et le salut de tout l'être. L'homme reste un... Le miracle accompli par Pierre n’est pas seulement un signe destiné à authentifier un message : il est la preuve du salut qu’il annonce. Le miracle manifeste la nature de ce salut (d. barsotti).

Ac 3,9-10 — Comme pour l'aveugle-né de Jn 9,8-12, miracle d'autant plus indéniable que l'infirmité était de notoriété publique. Hors d'eux-mêmes : même verbe qu'après le miracle de la Pentecôte, Ac 2,12*.

Ac 3,11 // Ct 3,4Le portique dit « de Salomon » : Bordait sans doute l'esplanade du Temple, côté est (vallée du Cédron), donc à proximité de «la Belle Porte ». Dans le cas du possédé de Gadara, Jésus n'avait pas accepté que le miraculé aille avec lui (Lc 8,38-39). C'est pourtant le besoin spontané de l'amour et de la reconnaissance (// Ct 3) ; parfois même dans la vie spirituelle, on ne doit pas lâcher le Sauveur, comme on le voit dans la lutte de Jacob avec l'ange (Gn 32,25-27, que nous avons hésité à mettre ici en parallèle — cf. bc i*, p. 152 s; bcii*, p. 330-331).

Ac 3,12 // Ps 115,1 Ps 115,9 Introduction d'humilité au second discours Pierre , « rendre à Dieu qui est à Dieu » (cf. 1Co 4,7) — et tout miracle fascine parce qu'il implique l'action de Dieu. Ensuite, vient le discours proprement dit, où l'on retrouve le kérygme*.

Ac 3,13-16 — premier point du kérygme : Témoignage sur la résurrection du Crucifié (d'il y a deux mois). Drame à trois acteurs :

1. Dieu (le Père) : Avec ses noms traditionnels : Dieu d'Abraham, d'Isaac et de Jacob : Il Ex 3,15 ; Dieu de nos pères : // Sg 9,1-2.4.

2. son Serviteur Jésus : On pourrait aussi traduire par « son Enfant », plus proche du titre que lui donneront les chrétiens. Mais ici, s'adressant à des Juifs convaincus, il est notable que Pierre accumule les références implicites à l'Ancienne Alliance. Présenter Jésus comme « le Serviteur de Yahvé», c'est voir dans sa mort ignominieuse l'accomplissement des oracles d'Isaïe communément désignés sous ce titre (// Is 52,13 — qui est donc le début de la prophétie la plus explicite de la Passion et de sa raison d'être (BC II, p. 559, 567,589,581-583) — et fis 49,3). Sur cette « glorification » du Père en la mort rédemptrice de Jésus, cf. Jn 13,31-32 ; bc h*, p. 652. Serviteur se retrouve dans tout ce passage, mais là seulement : cf. Ac 3,26 ; 4,25.27.30.

le Saint et le Juste : Encore deux titres divins courants de l’A.T.: cf. Il Dt 32,4 ; 1S 2,2 ; Is 12,6 ; Is 41,14.16. Mais tandis que le second convient aussi normalement au Messie, le premier n'est pas moins réservé à Dieu que le nom de « Seigneur» (Ac 2,36*), surtout précédé de l'article : « le Saint, le Juste », qui en fait son nom propre. Or, en ce verset 15, Pierre l'applique avec toute sa force à Jésus renié en faveur de cet assassin de Barabbas! C'est d'une audace à provoquer une lapidation — comme en sera victime Etienne dans un peu plus d'un an (Ac 6*). Saint s'applique également au Christ en 2,27 ; 13,35 ; et Juste en Ac 7,52 ; 22,14. Autrement dit, dans la droite ligne de la tradition judaïque, le christianisme apporte seulement cette révélation de la pleine divinité de Jésus, le Christ (Messie).

Prince de la vie : L'expression comme telle est unique. Ailleurs, dans le n.t., il s'agit plutôt du Christ comme Chef: Ac 5,31 : «Chef et Sauveur»; cf. He 2,10; 12,2. Il semble que l'on doive plutôt chercher dans les prophéties messianiques d'Ézéchiel, chapitres 44-48, et surtout de Daniel : // 9,24-26 ; cf. Dn 8,25. Etant donné que, dans le n.t., ce titre de «Prince» est plutôt donné à Satan : « prince des démons » (Mt 9,34 Mt 12,24 et // ) ou « prince de ce monde » (Jn 12,31 Jn 14,30 Jn 16,11 cf. 1Co 1Co ), on peut penser que l'expression inusitée met en opposition avec ce « prince de la mort » Jésus, « Prince de la vie », qui « donne la vie à qui il veut », car il est lui-même la voie, la vérité, LAviE (Jn 5,21 Jn 14,6).

3. Mais les Juifs, et plus généralement tous les hommes, jouent aussi leur rôle dans ce mystère pascal. Et cette fois encore, Pierre ne ménage pas ses auditeurs : « vous », « vous avez renié, livré, rejeté Jésus pour Barabbas ; pire que Pilate ! »

livré : Mot significatif (cf. bc u*, p. 702).

vous l'avez tué: Prend son maximum d'intensité du fait que l'accusation vient entre «Prince de la vie» et «Dieu l'a ressuscité». Et nous, honnêtes gens ! croyons-nous réellement que nous avons commis ce meurtre ?

Sur ce fond dramatique de procès et de mort, le témoignage apostolique ressort d'autant plus vivement : Dieu l'a ressuscité d'entre les morts. L'expression, fréquente dans le n.t., ferait pléonasme si «d'entre les morts» ne sous-entendait pas: «le premier d'entre les morts» (Ac 26,23) qui, grâce à lui, ressusciteront à leur tour ().

Ac 3,16 // Ps 9,11 Ps 91,14 Mt 8,13 Sg 16,12 — La foi « en son nom » ou « en lui» (première et deuxième phrases, qui sont parallèles), c'est idem. Sur «foi et miracles» dans l'Evangile (// Mt 8), cf. bcii*, table. «Entière guérison»: // Sg 16 miracle présent atteste la résurrection Jésus, vivant, présent, agissant, conjointement au témoignage des Apôtres (v. 15), et à l'accomplissement des Ecritures (v. 21-25). Mais littéralement, il y «grâce à lui », pouvant référer indifféremment au nom ou à Jésus ; la nuance étant , « la foi acquise et donnée par lui ».

Ac 3,17-21 // Is 50,6 Jr 25,3-5 — deuxième point du kérygme* , La dureté l'accusation précédente (v. 13-15) se tempère l'excuse qui est celle de Jésus même (// Lc 23,34) ; et le verset LE 18 explique bien que cette ignorance était non seulement de n'avoir pas reconnu en Jésus le Messie, mais aussi de n'avoir pas discerné dans les prophéties le dessein de Dieu*, tel qu'il s'y trouvait révélé (// Jr 11,18-19 et Is 50,6 — entre autres, et pour ne pas citer chaque fois le parallèle fondamental d'Is 52,13 à 53,12). Dans le parallèle Jr 11,18-19, j’ai vu, au sens d'une vision-révélation. L'arbre avec son fruit: littéralement «son pain » — qui prend tout son sens avec le Christ et son « pain » eucharistique. Et son nom, qu'on ne s'en souvienne plus: cf. Ac Ac 4,18 Ac Ac 4, ignorance n'est donc pas simple, mais se conjugue avec un auto-aveuglement.

D'où la reprise au verset 19 du kérygme : Faites donc pénitence et convertissez-vous (au sens de : « revenir* ») pour la rémission des péchés, message de tous les prophètes ainsi que nous l'avons vu (// Jr 25,3-5 cf. Ac 2,37-40* et 3,21-25*). Le parallèle Ps 79,9 convient ici particulièrement, de par sa référence au « nom ».

Ac 3,18 Ac 3,20-21 S'imbriquant dans l'appel à la pénitence des versets Ac 17 et Ac 19, les versets Ac 18 et Ac 20-21 reprennent en le développant le premier point du kérygme: Dieu (le Père) a ainsi (par la méconnaissance de « vos chefs »v. 17) accompli* (son dessein de salut, qui est dans) les souffrances (rédemptrices) de son Christ (v. 18), et (par la rémission des péchés, v. 19) que viennent...

les temps de la consolation : Celle que le vieillard Syméon attendait (Lc 2,25 — en grec, c'est le mot d'où vient « Paraclet » : cf. bc h*, p. 91). Dans Ac 3,20 comme dans le parallèle Ps 66,10.12, la terminologie est différente, mais la signification reste convergente ; et que « la douceur » va bien avec « la consolation » ! Celle-ci est bien présente désormais, puisqu'elle nous est apportée conjointement par ce Jésus «qui nous est destiné» — quelle «douceur» en effet dans cette annonce ! — et par le Saint-Esprit Paraclet.

qu'il vous envoie... comme Messie : Dans tout ce passage (v. 18.20-21), l'initiative vient du Père, car c'est la Sainte Trinité qui s'occupe du salut du monde. Jésus est « son Envoyé » (cf. BC II*, table) et « son Christ* », dans le rôle royal et divin de Sauveur (// ).

que le ciel doit recevoir : Au premier abord, cette formule paraît bizarre, car en fait, Pierre sait bien que le Christ est déjà monté au ciel. Mais ce « doit » n'est pas à prendre ici comme une forme de futur ; c'est l'équivalent du « il faut* » de l'infaillible efficacité du dessein divin de salut (Ac 2,23*) ; et, du coup, ce séjour céleste du Christ n'est pas annoncé par Pierre comme d'hier ou d'aujourd'hui : bien plutôt, participant à ce que le plan de Dieu a d'éternel, il prend un air définitif. Ce qui ne l'empêche pas, du point de vue temporel qui est le nôtre, d'avoir été inauguré hier, par l'Ascension, et de ne durer tel que jusqu'à « la restauration universelle ».

Insistons-y, car il est difficile mais capital de bien admettre la réalité de ce double point de vue : éternel dans l'ordre de la pensée de Dieu ; temporel, donc successif dans l'ordre de son accomplissement. Même naturellement, nos projets, nos idées ont quelque chose d'intemporel qui doit être corrigé par ce que l'existence terrestre a de toujours historique, donc progressant jour après jour — c'est la différence entre le «plan» d'un architecte et la construction effective. Mais il y a, de Dieu à un architecte humain, cette énorme différence qu'en lui ce n'est pas la construction (la création, l'histoire humaine) qui est la plus réelle, mais bien le dessein lui-même, dans la perfection éternelle que le Père s'en formule en son Verbe divin ; et si son apparition en notre monde créé se fait peu à peu, cela tient seulement à la pauvreté d'être d'une créature qui ne peut recevoir que goutte après goutte ce « Royaume que Dieu prépare (à ses élus) depuis la création du monde » (Mt 25,34 ii, p. Mt 498 ii*, p. Mt 612).

Nous devons ainsi continuellement corriger notre point de vue spontanément naturel (et donc temporel) par le point de vue de Dieu (donc éternel), reçu de sa révélation avec foi. En bref, corriger les limites et les doutes de la raison humaine par la certitude (absolue puisque venant de Dieu) de la foi. L'Ecriture sainte en général, et les Actes des Apôtres en particulier, sont écrits pour nous apprendre à voir l'histoire de ce point de vue divin, donc éternel : cf. le « il faut» ou le «doit» d'Ac 1,16.21; 9,6.16; 17,3; 19,21; 23,11; 27,24; et encore 4,12; 5,29; 16,30.

jusqu'aux temps de la restauration universelle (Ac 3,21 // So 3,20): Dans le prolongement de la rémission des péchés, la perspective s'ouvre sur cet ultime et total accomplissement* du dessein de salut. Dans le contexte de ce discours, cette «restauration» vise moins celle du cosmos (comme en 2P 3,13 et Ap 21,1-5) que la parousie et le règne définitif de Dieu. Chacune de nos « conversions » individuelles — à laquelle nous exhorte Pierre — prépare cet ultime avènement et, pour autant, le «hâte» (deuxième Epître de saint Pierre, 3,12). Même s'il y a quelque chevauchement dans les versets 17 à 21, les deux points du kérygme* sont bien là, dans leur intégralité, jusqu'à leurs ultimes développements.

Le premier discours (Ac 2) mettait principalement l'accent sur l'annonce des derniers temps ; le second insiste au contraire sur le temps intermédiaire allant de la Résurrectiondont l'Apôtre est témoin« aux temps de la restauration universelle ». Il y aura encore un temps pour l'espérance... L'attente demeure (en effet) , parce que demeure le monde des contradictions et du péché... Le judaïsme n'a pas voulu accepter une ère messianique dans laquelle « la Fin » comportait encore le cheminement, et la présence divine comportait encore l'espérance... Le Christ vit maintenant dans le coeur de l'homme, non pour abandonner son corps au pouvoir de la mort, mais pour opérer plus efficacement par l'intime le salut de l'homme total ... La rédemption est l'oeuvre même de l'homme, de tout homme qui vit dans le Christ, parce que le Christ agit à travers tout homme qui s'insère en lui par la conversion, jusqu’à la restauration finale dans l'unité (d. barsotti — cf. Ep Ep 1,9-12).

Ac 3,21-25 — La preuve par l'accomplissement des prophéties a déjà été amorcée au verset 18. Cette affirmation explicite un aspect fondamental de la foi et du message apostoliques : inauguré par la venue de Jésus (3,26 ; 13,23), sa passion (1,16; 4,25-28; 13,27-29) et sa résurrection (2,32-34; 3,13; 13,32-37), cet accomplissement se poursuit dans le pardon des péchés (10,43), le don de l'Esprit (2,16-21.33), le déroulement de la prédication apostolique (13,40 s.46 s ; 28,25-28) et la constitution de l'Église (15,14-19), en attendant de s'achever avec la venue glorieuse du Christ (3,20-21) (Note tob). Dans son livre sur L'Accomplissement des prophéties, André feuillet montre une fois de plus que ces correspondances entre l'Ancien Testament et le Nouveau sont le fondement objectif du « comparatisme intrabiblique » que cette Bible chrétienne met en oeuvre (BC II*, p. xn). Dès son premier discours, Pierre avait pratiqué ces rapprochements entre les prophéties (de Joël ou des Psaumes) et les faits qui sont au principe du n.t. L'insistance est seulement plus marquée ici qu'ailleurs.

depuis les jours anciens par la bouche de ses saints prophètes : C'est à peu près textuellement un des versets du «Benedictus» (Lc 1,70).

Moïse a dit, en effet (Ac 3,22-23 // Dt 18,13-14 Dt 18,17-19). L'expression «... sera retranchée de son peuple » ne se trouve pas textuellement mais équivalemment en Dt 18 ; cette sanction provient plus directement du Lévitique : par exemple 23,29-30. C'est prévenir implicitement que, si l'on ne veut pas être «retranché» du peuple élu, il faut se rallier au prophète Jésus-Christ... Ce titre «le prophète » lui est encore attribué par Etienne en Ac 7,37 (cf. Lc Lc 24,19 Jn 1,21 Jn 6,14 Jn 7,40 — ii*, table).

depuis Samuel (v. 24 // ).

tous les prophètes (v. 24) : C'est la troisième fois, après les versets 18 et 21, que Pierre nous fait remarquer cet accord entre « tous » ces porte-parole de Dieu. Mais Samuel lui-même (// ) ou Jérémie (25,3, en // au v. 18) faisaient appel au même consensus, comme révélant l'unique révélation de Dieu, qui est toujours en somme le kérygme* fondamental, en ses trois points. Il est vrai que, dans ce second discours de Pierre, le troisième point — qui est l'appel à la foi (ou au baptême) — n'apparaît pas expressément. Mais il est implicite dans la citation de Dt 18, où le prophète annoncé devra être « écouté en tout ce qu'il vous dira» (cf. Mt Mt 17,5); et aussi dans le rappel que ses auditeurs ont à être « fils des prophètes et de l'Alliance », car qu'est-ce que leur prescrit cette Alliance, sinon « l'obéissance de la foi » (Rm 1,5*) dont Abraham est le modèle (Rm 4*) ?

Ac 3,25 // Gn 22,18 Gn 49,28 Nb 23,19-20 Ps 21,2 Ps 21,6-7 Ce que cite Pierre, c'est la promesse initiale et fondamentale la vocation d'Abraham (Gn 12,2-3) et ses descendants, tant juifs que chrétiens, devenir «bénédiction» pour l'humanité entière. Mais saint Paul rétablira que la promesse visait, «en la descendance d'Abraham», par excellence le Christ lui-même (Ga 3,16*), et tous les autres hommes seulement grâce à leurs liens avec lui (Ga 3,29).

fils de : Sur le sens de cette tournure, cf. BC II*, table.

l'Alliance... établie avec vos pères : En relation avec le verset 13 : « Dieu de nos pères», faisant ainsi une sorte d'inclusion*. Elle souligne la volonté de Pierre de montrer à ses auditeurs, qui sont des Juifs et des pratiquants, que le Christ est le prolongement ou, mieux, l'accomplissement de l’A.T.

IRenée : Adv. Hoer. m, 12, 3 (SC 211, p. 190) — Elle est donc claire, cette prédication que Pierre a donnée avec Jean : il leur évangélise que la promesse faite par Dieu à nos pères est accomplie par Jésus ; il n’annonce pas un autre Dieu, mais il amène Israël à connaître le Fils de Dieu qui s'est fait homme et a souffert ; il annonce la résurrection d'entre les morts qui s'est faite en Jésus ; il signifie que tout ce que les prophètes ont prédit sur la Passion du Christ, Dieu l'a accompli.

rupert de deutz: De Victoria Verbi Dei (pl 169, 1388) — Crois-tu par hasard que dans cette nation ou ce peuple (hébreu) il n’y eût dans ces temps-là personne qui se souciât de la promesse, et ne sût que le Messie devait venir ? Certainement si ! Depuis que Dieu parla à Abraham, aucune époque ne s'écoula sans avoir eu ses fidèles, croyant en la promesse et attendant la venue du Messie. Ils étaient encore peu nombreux à comprendre spirituellement l'avènement et le règne du Christ, mais nécessairement il fallait que tous entendent (lire) la Loi et les Prophètes qui contenaient et attestaient cette promessemême si les auditeurs attendaient un royaume plutôt terrestre que céleste. Sans doute, les Juifs étaient négligents dans les périodes de prospérité, mais dans l'adversité ils redevenaient attentifs à cette espérance et ils désiraient la venue du Messie qui leur porterait secours, pensaient-ils, à la manière d'un grand roi, d'un roi puissant. Moïse le premier, quand Dieu l'envoyait à Pharaon : « Seigneur, je t'en prie, dit-il, envoie Celui que tu dois envoyer » (Ex 4). Et en d'autres âges, toutes les fois que nous lisons : « Et les fils d'Israël crièrent vers le Seigneur » (cf. // ) à cause de telle ou telle tribulation, s'ils criaient ainsi c'est qu'ils avaient toujours en mémoire la promesse souvent répétée : le Sauveur promis par la Loi et les Prophètes. Notons aussi que chaque « Sauveur » (par exemple les ) suscité par Dieu portait en lui un signe ou une préfiguration de Celui qu’on attendait et désirait : le Christ, l'unique et vrai Sauveur.

Ac 3,25-26 // Gn 22,18 — La Genèse annonçait la bénédiction de toutes les nations, en un sens universaliste ; en substituant familles à nations, Pierre montre qu'il pense plus directement aux tribus d'Israël, comme le confirme aussitôt le « c'est pour vous d'abord... » (v. 26) — il est vrai, non exclusif.

Ac 3,26 // Jr 26,3 — Conclusion du discours en un résumé qui est éblouissant, car, en une phrase, il reprend à la fois le premier point du kérygme : Dieu a ressuscité son Serviteur (avec par conséquent le rappel du titre de « Serviteur de Yahvé » du verset 13) ; et le deuxième point : que chacun se convertisse («la rémission des péchés » étant incluse dans la « bénédiction ») — si bien que tout vient du Père (la bénédiction), et de la mort rédemptrice du Fils (Serviteur de Yahvé). Dans la traduction que nous adoptons, en effet, la conversion apparaît comme un don de Dieu, de pair avec la bénédiction (tandis que l'on pourrait traduire aussi : « Si vous vous détournez de vos méfaits », la conversion devenant condition de la bénédiction). Car de toute façon, tout cela «est pour vous », mais non pas sans vous puisque chacun doit « revenir* » de ses actions mauvaises (// Jr 26).

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§ 4. PREMIÈRE PERSÉCUTION : Ac 4,1 -37


Le second discours de Pierre entraîne comme le premier de nombreuses conversions (Ac 4,4 // 2,41), avec tableau final de la première communauté apostolique (Ac 4,32-37 // 2,42-47*). Mais intervient ici le premier démêlé avec les autorités religieuses.

C'est un principe que nous devons garder bien présent : le mal qui se fait se paie, doit être payé : cela est dans l'ordre de la providence divine. Dieu ne pardonne pas gratuitement le mal : il le pardonne à travers le sacrifice de son Fils ; il le pardonne à travers la souffrance de ceux qui, en assumant le mal dans l'amour, le transforment en salut, même pour ceux qui ne croien) pas. Ceci est toujours vrai, mais surtout, c'est la loi de la vie de l'Eglise. L'Eglise demeure le sacrement voulu de Dieu pour le salut du monde, et elle accomplit sa mission dans la mesure où elle accepte, en ses membres, de porter le poids du péché du monde... Et dans la Croix, il y a une manifestation toujours plus haute de l'amour, mais aussi une manifestation toujours plus grande du péché du monde (d. barsotii).

Ac 4,1-7 // Jr 37,13-16 Lc 22,66 Jn 18,13 Lc 20,1 Jn 1,19-20 Jn 1,24-26 Le parallèle avec Jérémie est moins frappant qu'avec Jésus ou Jean-Baptiste, car il est bien évident que les Apôtres ont à passer parmi les mêmes contradictions que le Christ: « Le disciple n’est pas au-dessus du maître ; mais le disciple parfait sera comme son maître » (Lc 6,40).

le gouverneur du Temple : N'oublions pas que le miracle et le discours ont eu lieu à « la Belle Porte », puis « sous le portique de Salomon » (Ac 3,2 Ac 3,11). et les Sadducéens: Voir bcii*, p. 129. Niant la résurrection (Lc 20,27), ils étaient directement contredits par le témoignage des Apôtres (v. 2b) ; ceux-ci ont cependant un tort préalable non moins intolérable : ils attentent au sacro-saint monopole des enseignants (v. 2a).

Le jour suivant : Comme pour le Christ, le jugement ne pouvait avoir lieu qu'au jour (// Lc 22,66 bcii*, p. Lc 706). Les chefs, les anciens et les scribes (// idem) : c'est-à-dire tout le sanhédrin (cf. BC II*, p. 127). Anne et Caïphe (// Jn 18,13) : les mêmes que pour Jésus, car on est seulement deux mois plus tard. N'oublions pas cette proximité dans le temps, car elle rend plus remarquable encore le retournement que l'on va constater dans l'attitude des Apôtres. Par quel pouvoir (// Lc 20,1-2 Jn 1,19-20 Jn 1,24-26) : c'est la même question ici et là. Mais Ac 4,7 ajoute « ou en quel nom », en correspondance avec Ac 3,6 : « au nom de Jésus-Christ le Nazaréen, marche ! ». Et c'est là-dessus que Pierre va répondre (v. 10-12). La question n'est plus tant institutionnelle : «de quel droit», mais personnalisée: «de qui vous recommandez-vous?» La religion chrétienne est un attachement à « quelqu'un », donc premièrement un amour et une fidélité.

Ac 4,8-9 // Si 48,12 Lc 12,11-12 Lc 6,7 Lc 6,9 Pierre, rempli de l'Esprit Saint , De façon générale, cf. Ac 2,4* ; mais dans le cas présent, c'est aussi en vertu de la promesse faite par le Christ (// Lc 12). Tout de suite il attaque: c'est donc pour un bienfait qu'ils ont été arrêtés, emprisonnés et soumis à un tel tribunal ! — Comme Jésus (// Lc 6).

infirme... obtenu le salut : Même passage de la guérison physique, miraculeuse, au salut spirituel — non moins miraculeux — que Jésus avec le paralytique (Lc 5,17-26). Les deux se tiennent en effet, et Pierre en profite pour annoncer, à partir du fait que «cet homme se tient debout, guéri» (fin du v. 10), «l'Évangile du salut» (v. 10-12).

Ac 4,10-12 // Ps 99,6 Ps 148,13sachez tous, et sache, tout le peuple d'Israël , La solennité de la formule annonce que Pierre a conscience de proclamer ici une vérité essentielle. Et en réalité, c'est l'unique kérygme ,

1. « Jésus crucifié et ressuscité » ; 2. Lui seul sauve (par la guérison, signe de son pouvoir de remettre les péchés : cf. le paralytique) ; 3. Pour être sauvé, il faut donc s'en remettre à lui, comme cet infirme « guéri^ en lui » (fin du v. 10), «par sa foi en son nom» (Ac 3,16), ou comme l'Église, parlant et baptisant « au nom de Jésus-Christ le Nazaréen ». La formulation est seulement un peu différente, parce que Pierre l'adapte à la question posée. On a demandé aux Apôtres : « Par quel pouvoir et en quel nom... ?» — Pierre répond donc : par le pouvoir du nom de Jésus, et de lui seul. « Grâce au nom ou grâce à Jésus, c'est tout un » (tob — cf. Ac Ac 3,6 Ac Ac 3, et les // Ps 99,6 Ps 148,13). En lui notre foi, en son nom le baptême.

Ac 4,11 // Lc 20,17 — C'est donc Jésus qui s'est appliqué à lui-même Ps Is 118, tenu pour messianique par les rabbins, pour annoncer aux Pharisiens leur aveuglement (// Lc 20,9-19). Mais les autres parallèles (1P 2 et Is 28) donnent à l'image toute sa signification positive, d'où provient le nom même de l'«Église»; et si le Christ en est «la pierre angulaire» (Ep 2,20-22), le fait qu'il ait donné ce nom de «Pierre» à son successeur nous indique l'importance de celui-ci pour tout l'édifice fondé sur lui (Mt 16,18).

Ac 4,12 — Positivement puis négativement, Pierre affirme l'exclusivité du salut attachée à ce nom, donc à cette personne de Jésus. Il est vrai qu'à présent certains jugent bon de refuser cette supériorité de la religion chrétienne, sous prétexte d'oecuménisme. En réalité, cela mènerait vite à renier la foi, car comment admettre que le bouddhisme ou l'islam soient sur le même plan que le christianisme, dès lors que l'on reconnaît dans le Christ, son fondateur, l'incarnation du Verbe divin, donc la Vérité même, totale et absolue ? Cela ne revient évidemment pas à soutenir que l'Église, en ses membres comme en son institution et son histoire, soit la perfection même ! Sans minimiser ces défaillances, on fausserait l'oecuménisme, puisqu'il ne saurait y avoir de dialogue véritable à partir et au prix d'un abandon de ce qui fait notre identité propre. À l'exemple de Pierre, n'ayons pas peur d'affirmer notre foi, en son fondement (ou en son fondateur), qui est Fils de Dieu et Dieu lui-même. Que cela n'empêche pas mais, bien au contraire, rende souverainement convenable d'y inclure, en puissance, tous les hommes, y compris, en un sens, les adeptes des autres religions, les Actes des Apôtres sont là pour nous le montrer.

aucun autre nom... en lequel nous devions être sauvés : Non pas seulement « nous puissions être sauvés » ; c'est le « il faut* » du dessein divin ; c'est la volonté de Dieu : «Il m'a sauvé parce qu'il me veut » (Ac 4,12 // Ps 18,20).

Ac 4,13 // Lc 10,21 Lc 21,14-15voyant l'assurance , Cette assurance est le premier et le dernier mot des Actes ( Ac 2,29 Ac 28,31). Elle est le double accomplissement de paroles prophétiques du Christ (// Lc 10 et 21). Mais dans la présente première confrontation des Apôtres avec les autorités juives, le changement de leur attitude entre Passion et Ascension éclate, témoignant de la force divine qu'ils ont reçue du Saint-Esprit. Pour fêter les Apôtres, l'Église a choisi l'application que fait Grégoire le grand du Ps 33,6, pour s'émerveiller de la métamorphose : Par le Verbe du Seigneur, les cieux furent créés, par l'Esprit de sa bouche, toute leur force (Vulgate).

Grégoire le grand: Hom. 30 in Ev. n"s 7-8 (Brev. Mon. Commun des Apôtres, l. 7-8 ; pl 76, 1225) — Ce que furent les docteurs de l'Eglise avant la venue de l'Esprit Saint, nous le savons ; mais après sa venue, quelle force leur donne la grâce : nous le voyons ! Certes, ce pasteur de l'Église lui-même (Pierre) , dont le corps sacré motive notre présence stable ici (sa tombe, au Vatican, étant devenue le siège de la papauté) , combien fut-il faible et pusillanime avant la venue de l'Esprit! Demandons-le à la servante portière, et qu'elle nous le dise ! Car au seul choc de la voix d'une femme, il eut peur de mourir et renia la Vie (cf. Jn 18,17).

Encore faut-il comparer ces deux attitudes : le Christ aux mains liées passait devant Pierre, Pierre le renia. Ce même Christ suspendu à la croix, un larron le confessa.

Mais ce pauvre homme si lâche, que devient son assurance après la venue de l'Esprit? Ecoutons: magistrats et anciens s'assemblent. Après avoir fait battre les Apôtres, ils leur enjoignent de ne pas prononcer le nom de Jésus. Et Pierre, avec une magnifique assurance, répond : « Il faut obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes ! »

tob remarque très justement que cette assurance « apparaît comme un aspect de la foi ». C'est l'opposé de la peur qu'on a aujourd'hui d'affirmer nettement cette foi, sous prétexte de ne pas l'imposer à autrui ; comme si l'existence des autres tels qu'ils sont était incompatible avec la liberté de quiconque !

Ac 4,14-18 // Jn 11,47-48 Jr 38,14 Jr 38,24-26 L'embarras est le même qu'après la résurrection de Lazare (// Jn 11), ou que lors du miracle en faveur de l'aveugle-né: comment nier l'évidence, et empêcher de se répandre la renommée d'un prodige si retentissant (v. 21) ? Inversement, Sédécias était tiraillé entre sa propre conviction que Jérémie était un vrai prophète et la crainte heurter ceux qui lui étaient hostiles (// Jr 38). Et pareillement Hérode, vis-à-vis Jean-Baptiste.

Ac 4,19-20 // Jr 20,9 — C'est le fameux « non possumus ». Il porte sur ce que nous avons vu et entendu , en premier lieu, évidemment, la résurrection du Christ, puisque c'est elle qu'ils ont constatée, et dont ils ont à être les « témoins* » (Ac 1,8.22). Mais l'expression « vu et entendu » englobe aussi les miracles et les paroles du Maître, dont le souvenir sera fixé dans les Évangiles. Le ton surtout de la réplique est impressionnant, d'assurance non moins que de vivacité. Comme Jésus étonnait par l'autorité avec laquelle il tranchait en matière de morale (Mt 7,28-29 — conclusion du sermon sur la montagne), Pierre parle ici d'égal à égal avec les plus hautes autorités de son peuple, en pape !

isaac de L'étoile : 1" S. pour la Pentecôte (SC 339, p. 72-76) — Ces hommes craintifs, qui pendant la Passion du Seigneur l'abandonnèrent sans rien dire, ou le renièrent, les voilà éloquents et pleins d'ardeur... O pauvres hommes, qui naguère aviez peur des hommes ! D'où vous vient cette force soudaine, que désormais au-dessus des hommes vous ne craigniez plus les hommes ? Il y a peu de temps, par crainte des Juifs, vous vous enfermiez dans une maison étroite et obscure : comment parlez-vous dans le Temple avec une si grande assurance ?

Cette fois, Pierre n'avait pas renié la vérité! A la faute grave de son reniement durant la Passion répond maintenant sa tranquille affirmation... Le heurt se produit entre l'ancien sacerdoce et le nouveau : d'un côté Caïphe, de l'autre Pierre. Pierre prend la place de Caïphe, et il la prend au nom et en vertu de la Résurrection qui est arrivée (d. barsotti).

Ac 4,21 // Lc 20,19À cause du peuple : Comme pour Jésus (// Lc 20 cf. Lc 22,2). Car tous glorifiaient Dieu : thème fondamental de saint Luc : Lc 2,20 (bcii*, p. 86); et dans les Actes (2,47; 3,8-9; 10,46; 11,18; 13,48; 19,17; 21,20). Devoir de reconnaissance, mais plus encore joie de l'amour admiratif. Tandis qu'Hérode meurt pour «n'avoir pas rendu gloire à Dieu» (Ac 12,23). (Il s'agit d'Hérode Antipas, en charge de 3 av. J.-C. à 39 ap. J.-C. : cf. Lc Lc 9,7-9 Lc 13,31-32 Lc 23,7-12)

Ac 4,22 // Jn 5,5-6 — cf. Ac 3,2*. Ce signe de guérison : Comme en saint Jean, le miracle est signe, dont « les chefs et les scribes » refusent de tenir compte.

Ac 4,23 // Lc 19,48 — Comme pour Jésus, même si le parallèle n'est pas strict, les auditoires étant différents : ici de croyants, alors que dans l'Évangile, c'est le tout venant.

Ac 4,24tous, d'un seul coeur : Entre disciples et de façon générale (Ac 4,32) ; mais aussi, dans le cas présent, ces premiers membres de l'Église ont été de coeur avec leurs Apôtres, tous étant solidaires de ce qui est arrivé aux Douze.

élevèrent la voix vers Dieu : Comme un cri*, mais qui est une «élévation du coeur» (définition la plus générale de la prière). À comparer avec Ac 1,24-25.

Irénée : Adv. Hoer, m, 12, 5 (SC 211, p. 196) — Telles sont les voix de l'Église, d'où toute l'Église prend son origine. Telles sont les voix de la « métropole », telles sont les voix des Apôtres, telles sont les voix des disciples du Seigneur, de ceux qui, après l'Ascension du Seigneur, furent rendus parfaits par l'Esprit.

Ac 4,24-28 // Ne 9,5-7 Ps 146,5-6 — D'abord, l'invocation: comme souvent, celle-ci conjugue une double reconnaissance, au Créateur et à sa Providence dans l'accomplissement son éternel Dessein de Salut (voir v. Ac 4,28). Le fait que le pivot de ce Plan, qui est la Passion du Sauveur, ait été prophétisé, « par inspiration de l'Esprit Saint » (v. 25a) témoigne en effet de ce qui est pour Dieu non seulement projet préalable, mais réalisation en cours — étant fruit non seulement de la pensée divine, mais de « ta main et ta volonté ». L'ordre même de ces mots est significatif: pour nous autres hommes en effet, la séquence normale est « penser - vouloir - faire ». Mais si déjà le moine, les mains soudainement libres et laissant là inachevé ce qu'il faisait, suit efficacement, au pas allègre de l'obéissance, la voix de celui qui commande (Règle de saint Benoît, chapitre 5), combien mieux en Dieu la main va de pair avec son infaillible vouloir de notre Salut !

Ac 4,25-27 // Is 44,24 Is 44,26 Is 44,28 Is 45,1 — Nouvel exemple d'application d'un psaume messianique à une circonstance précise de la Passion, rapportée en Lc 23,12, toujours la preuve par l'accomplissement des prophéties... contre Jésus, ton saint Enfant , Ou « ton saint serviteur* » (en relation avec «les poèmes du Serviteur souffrant*»). Si nous préférons «Enfant», c'est pour une certaine tonalité de tendresse qu'il y a ici, de par le possessif « ton » ; mais c'est aussi pour mieux valoriser le parallèle avec le Serviteur oint d'Is 44.

Ac 4,29-30 // Ex 3,20 Dt 26,8-9 — Après l'invocation vient la demande, amorcée par le classique « Et maintenant... » (cf. bc n*, p. 688 et table). Cette demande est double: d'une part, «l'assurance*» dans la proclamation du kérygme* (v. 29); et d'autre part, que celle-ci soit appuyée de «guérisons de signes et de prodiges* », ce qui est le dernier mot de saint Marc (Mc 16,20).

étends la main : Expression reçue (// Ex-Dt), mais en relation plus directe avec le verset 28* (cf. la note au sujet des v. 24-28).

Ac 4,31 — Manifestation de l'Esprit, dans le prolongement de la Pentecôte (Ac 2,1-2). Comme la présence du Christ à son Eglise (Mt 28,20), celle de l'Esprit Saint ne lui manquera pas non plus (cf. Ac Ac 10,44) par la suite, sinon sensiblement, du moins intérieurement.

Ac 4,32-37 // Ps 122,3-4 Ne 8,1 Ne 8,3 Ne 8,6 Ne 8,10 Ne 8,12 En conclusion des chapitres 3-4, nouveau tableau de la communauté apostolique, comparable à celui de la fin du chapitre 2*. Même unanimité (// Ps 122 et Ne 8 ; cf. Ep 4,4-6* — hilaire), même rôle des Apôtres (avec puissance, terme généralement en lien avec l'Esprit Saint — bc n*, table), même estime de ces premiers chrétiens par leurs frères juifs. S'il n'est pas fait mention des prières, c'est qu'on vient d'en parler aux versets Ac 4,24-30 Mais l'accent porte davantage sur la communauté des biens.

Ac 4,32 Ac 4,34-37 Lv 25,23-28 Lc 12,33-34 Dt 15,4 Dt 15,7-8 Pourquoi, se demande Pierre Damien (Épître au pape Alexandre, PL 145, 901), après avoir parlé de vie commune (v. Ac 4,32b), le discours semble-t-il s'interrompre pour sauter à la prédication , « Et les Apôtres rendaient témoignage à la Résurrection avec grande puissance » ? Pourquoi l'Apôtre mélange-t-il les matières, alors qu'il aurait dû poursuivre ce qu'il avait commencé ? C'est pour nous démontrer avec évidence que ceux-là seuls sont aptes à l'office de la prédication qui ne possèdent aucun avantage de propriétés terrestres, n’ont rien qui leur soit particulier, possèdent tout en commun ; autrement dit, « N'ayant rien, et possédant tout. » Ceux-là, oui, quand ils n’ont aucun empêchement venant des choses terrestres, se tiennent debout, libres et dégagés pour l'armée du Seigneur sur le champ de bataille. Et parce que, dépouillés de leurs biens, ceints des seules armes des vertus, ils combattent par le glaive de l'Esprit contre les troupes des vices, ils deviennent des guerriers bien formés pour décapiter les ennemis qui les attaquent. A cette guerre, évidemment, sont inaptes ceux qui, non contents des biens de la communauté, désirent se charger de possessions personnelles: ils perdent leur élan et battent en retraite. C'est pourquoi il est dit dans le Deutéronome pour ceux qui marchent au combat: « Y a-t-il un homme qui a planté une vigne et ne l'a pas mise à la disposition de tous, de manière que tous puissent en profiter ? Qu’il parte ! Qu’il revienne dans sa maison, car il mourrait à la guerre. Qu’un autre prenne son office ! » (Dt 20,6).

Quoi qu'il en soit de ce point plus particulier, inspiré par l'agencement du texte (dont on a suspecté qu'il n'était pas d'origine), il est évident que les Actes veulent décourager ici l'accaparement individuel au profit d'une plus grande solidarité, en un sens qui est celui de la Loi mosaïque (// Lv 25,23-28 Dt 15,4 Dt 15,7-8) comme des prophètes (Is 5,8 Jr 22,13-19 Mi 2,1-5, etc.), des sages (Pr 30,8-9 Si 31,8), et bien entendu, de l'Évangile (bcii*, p. 273-279 et 457-459). Mais ce ne fut jamais une obligation (Ac 5,4), et le droit de propriété n'a jamais été nié dans l'Église (voir du, Index xi s).

Pauvreté, vie commune, communauté des biens sont de l'ordre non des «préceptes», mais seulement des «conseils» évangéliques (Mt 19,11-12 Mt 19,21 Mt 19,25-26). Non pas, comme l'explique admirablement Louis Bouyer, que la morale chrétienne puisse être à deux étages : l'un réservé à la masse... l'autre réservé à une élite... D'après le sermon sur la montagne en effet, la recherche de la perfection ne peut être facultative. Elle appartient à l'essence même du commandement dès qu'il se révèle que celui-ci ne se limite pas au «tu ne tueras point, etc. », mais comporte et l’obligation intérieure et l'appel positif à l'amour de Dieu par-dessus toutes choses. Pour autant, se désintéresser de la perfection, c'est se désintéresser des commandements eux-mêmes... La pratique des « conseils » ne vise pas à réaliser une «perfection » plus haute que celle à laquelle visent les «préceptes» eux-mêmes. (Seulement,) les « conseils » appartiennent à l'ordre des moyens, non à celui des fins ; c'est sur la fin que repose le «précepte », et le moyen n'y est englobé qu"indirectement et secondairement (Introduction à la vie spirituelle, p. 190-193). Si les «conseils» sont des moyens, ils ne sont, de ce fait, pas obligatoires, et l'on reste libre de choisir, entre divers moyens, celui qui convient le mieux, suivant la vocation, la situation et l'occasion. Ce qui ne signifie pas que, pour être laissés à notre libre choix, ces « conseils » ne soient pas les moyens les plus appropriés pour parvenir à la perfection dans la pratique des « préceptes » eux-mêmes. C'est pourquoi l'Église n'a cessé de les proposer, d'abord aux premiers chrétiens, puis à tous ceux qui ont voulu suivre ces « conseils » du Christ, soit dans la vie dite «religieuse», soit à présent dans les instituts séculiers (où l'on s'engage précisément à mettre ces «conseils» en pratique tout en restant « dans le monde »). Et pour tous, moines, religieux ou membres de ces instituts, le triple tableau de la communauté apostolique (Ac 2,42-47 Ac 4,32-37 Ac 5,12-14) a toujours joué un rôle instigateur exemplaire.

Barnabe : Nom à retenir pour son rôle dans la fondation de l'Église d'Antioche (Ac 11,22-24*) et auprès de Paul (Ac 9,27 Ac 11,25-26 Ac 12,24-15,39 cf. aussi 1Co 9,6).


Bible chrétienne Actes 3