Bible chrétienne Pentat. 5120

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LE DÉCALOGUE ET LA MEDIATION DE MOÏSE

Dt 5).

Début du 2° discours de Moïse. Le préambule historique tient cette fois en 5 versets, introduisant le Décalogue 'Symbole de toute la Loi' au sens où le Credo est 'Symbole de la foi’ chrétienne. C’ 'st presque constamment, et mot pour mot, le même énoncé qu'en Ex 20,1-17. On verra pourquoi l'évocation historique proprement dite se trouve cette fois reportée aux ch. 8 à 11 *.

Celui qui a prononcé le Nom de Dieu pour un mensonge (v. 11): C'est le 2° commandement, contre les blasphèmes et faux-serments. Mais le mensonge est aussi le mot par lequel est désigné le recours aux idoles (cf. Rm 1,25* / Qi; PC m, sur ).

// Ap 13,15-18 et 14,9-12 — Il y a correspondance entre les deux passages, marquée par le double: C'est ici (13,18 et 14,12).

L'énigme: C'est le 'Maskil', qui signifie, prophétie, figure — au sens où nous avons défini, dans l'Introduction générale, la perspective typologique. Ce mot est donc une invitation à chercher, au-delà du sens matériel, littéraire ou historique, un sens plus profond: « Ce que vous chantez selon la lettre, vous devez comprendre que c'est dit spirituellement » (saint jérôme, cité dans pc il, 207 — cf. pc m, 114-115).

Le thème de ces deux chapitres, et de toute l'Apocalypse d'ailleurs, est l'opposition violente entre l'Alliance avec Dieu ou l'esclavage de Satan. La Bête du ch. 13 (et l'autre, qui met à son service des prodiges et des 'images animées' — 13,11-15) est en effet l'Anti-Dieu. Elle est alors servie par l'Empire Romain persécuteur, et nommément par Néron les lettres qui composent son nom donnent effectivement: 666 (13,18), chiffre parfait de l'homme retranché en lui-même =‘l'Homme mauvais'. Néron en est le çvototype.

Au ch. 14, du v. 6 au v. 13 est annoncé l'Évangile éternel du Jugement de Dieu. Au supplice des 'adorateurs de la Bête' (v. 11) s'oppose la passion de ceux qui ont pu ainsi témoigner de leur fidélité au 1° commandement de n'adorer que Dieu. Passion en ce sens d'abord qu'ils ont été persécutés par la Bête et ses adeptes (13,15), mais passion surtout en ce sens qu'elle est participation à la Passion du Christ, agneau qui triomphe (14,10) en les rachetant et les associant à son triomphe.

Dt 5,12-15 // Mc 12,11 — 3° commandement. L'Exode ne donnait au Sabbat que le modèle du Repos de Dieu. Le Deutéronome y ajoute le souci du repos des serviteurs et des servantes, non moins que des maîtres, ce qui annonce l'interprétation évangélique. Sur le sens de l'expression clef: 'dia ton anthropon’ 'ou 'propter hominem’, traduite ici non pas : pour l'homme, mais : à cause de l'homme, ci. Ex 31,12-17*, où Mc 2,27 était déjà donné en // .

À cette valeur d'humanité s'ajoute maintenant celle de la commémoraison 'de la délivrance de l'Egypte. Tout cela sera transposé dans le Dimanche chrétien. Il faut ici entendre la révélation de son sens divin, humain, liturgique.

Dt 5,16-21 — 4° au 10° commandements. En // un passage évangélique rappelant que le Nouveau Testament est dans le prolongement de l'Ancienne Alliance, avec seulement une exigence plus délicate et mieux fondée encore sur l'Amour de Dieu (// Mt 5,21-23 cf. autres // à Ex 20,12-17 / Kh). Inutile de souligner longuement la portée fondamentale de ce Décalogue, dont la valeur universelle n'empêche pas qu'il soit donné comme résultant de l'Alliance du Sinaï: c'est la preuve que celle-ci n'est pas circonstancielle, ni liée au seul Israël, mais destinée à tous les hommes de tous les temps qui y adhéreront.

Dt 5,22-33 et // — Le rappel des réactions d'Israël en présence de la manifestation de Dieu au Sinaï met en relief le besoin instinctif du médiateur, qui n'est pas moindre pour la Nouvelle Alliance (/ 1Tm 2,5). Mais le Dt s'en sert surtout pour donner en exemple à toutes les générations à venir (Dt 5,29) cette sainte crainte*, non moins exigible et salutaire pour les chrétiens (// Ph 2,12).

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Au coeur de l'alliance : l'amour de dieu

Dt 6-7).


Dt 6,1-13 et // — En fait, l'exhortation de ce 2° discours a commencé dès 5,32-33, et même 5,28-29. On y retrouve les expressions caractéristiques du 1 ° discours : Écoute les préceptes et le droit (4,1 *). La crainte de Dieu est invoquée au principe et au terme de ce passage (6,2 et 13), et la Bénédiction* (v. 2-3). Mais les versets 4-5 disent en clair ce qui était impliqué dans tout ce processus d'Alliance entre Dieu et les hommes: Amour et fidélité. Ce n'est pas nouveau, car c'est une reprise du 1 ° commandement : c'est une nouvelle formulation, seulement cette fois tout à fait explicite. C'est le meilleur avantage des approfondissements qu'apportent les relectures à la compréhension du donné initial.

Le Deutéronome est le premier conscient de l'importance capitale de ces deux versets, comme l'indique la prescription qui suit aussitôt (v. 6-9). Israël l'a bien compris, qui a fait de ce 'Schéma Israël'... le principe de sa prière quotidienne. L'Eglise chrétienne l'a elle aussi souligné, en retenant le 1 ° commandement de Dieu dans cette formulation.

L'amour est de l'Unique, et donc total. L'amour conjugal déjà le demande, combien plus encore l'amour de dieu. Le N.T. ne pourra que ratifier (// Mc 12,28-34). Mais à son tour, il révélera les profondeurs et l'extension de cet Amour: sa source est si bien en Dieu, qu'en Celui-ci se trouve la Trinité de Personnes par où s'accomplit la circulation du Don divin de soi — qui déborde encore en Amour créateur et rédempteur. À son image et sous l'inspiration directe de cet Amour divin, l'Homme à son tour devient capable d'aimer Dieu et du même coup son prochain, de tout son être.

Cet Évangile se fonde si bien sur Dt 6,4-5 que la Tradition les lit à la lumière l'un de l'autre:

théodoret de cyr : Questions 2 et 3 sur Dt (pg 80,409): Comment doit-on comprendre cette parole: « Écoute, Israël: le Seigneur ton Dieu, le Seigneur est Un »? Nous avons déjà dit que les mots Seigneur et Dieu signifient la nature divine, et non la distinction des Personnes. Les noms de Père, Fils et Esprit Saint, par contre, indiquent les propriétés des Personnes. Mais les Israélites n'étaient que des commençants : on ne pouvait leur exposer une théologie précise, car ils en auraient pris occasion pour invoquer plusieurs dieux. C'est pourquoi le nom divin est toujours au singulier dans l'Ancien Testament. Cependant il s'y trouve certaines notions mystérieuses de la Trinité. Par exemple cette sentence: « Le Seigneur ton Dieu, le Seigneur est Un », affirme l'unité de substance et dénombre trois Personnes, car il dit une fois « Dieu » et deux fois « Seigneur ».

Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton coeur... » Le Seigneur nous a déclaré en toutes lettres que nul ne peut servir deux maîtres, ne peut se partager entre Dieu et Mammon, etc. mais que l'homme doit consacrer à Dieu son Créateur toute la force de son amour, puis attribuer à chacun ce qui revient à chacun: aux parents, à l'épouse, aux enfants et aux amis; car leur attribuer ce qui leur revient, cela fait partie de l'amour de Dieu: « Celui qui m'aime garde mes commandements », dit le Seigneur. Or ces commandements ordonnent l'amour du prochain.

Dt 6,10-11 — // Mt 4,8-11 — C'est encore une forme de la 3° tentation du désert: cf. Nb 32,1-7*.

Dt 6,12-13Garde-toi d'oublier: Cf. le « Prends garde » de 4,9* et 15. C'est par son Nom que tu jureras : Reprend et complète la formulation de 5,11, qu'Ex 20,7 donnait sous sa forme négative: « Tu ne prononceras pas en vain le Nom de Yahvé ton Dieu pour le mensonge* ». L'interdit du faux-serment ou du simple juron donne tout son poids à l'invocation du Dieu de vérité — invocation qui Le prend pour garant de tout serment véritable. « Ceux qui jurent par Lui seront tout à la louange » (Ps 63,12). théodoret rattache ce second commandement au premier. À la question 4 : « Pourquoi la Loi ordonne-t-elle de jurer par Dieu? » il répond en citant la suite Dt 6,14): — Pour qu'ils ne jurent pas en prenant à témoins les faux dieux; car l'Écriture ajoute : Et tu ne suivras pas les dieux étrangers... » (pg 80,409-412).

Dt 7,6-10 et // — C'est la loi de Sainteté* du Lv (n° et in° Parties*), donc aussi loi de Séparation*. Mais le Deutéronome donne le seul motif de cette élection divine: L'amour, le choix gratuit, dont la cause n'est pas dans l'excellence de l'être aimé. Bien plutôt, c'est sa petitesse qui attire la Grandeur divine — offusquée au contraire par l'orgueil — c'est sa fragilité, sa condition misérable, en Egypte, qui attire la divine Miséricorde.

C'est la même révélation que celle de Saint Jean (/ 15,16; 1 Jn 1Jn 4,10-19) ou de Saint Paul (// ). C'est elle aussi qui est au coeur des prophéties, les plus tendres (Jr 2,2-3 cf. Os Os 11) comme lesplus sévères. Et la raison en est donnée par le // d'Amos 3,2: « Je vous aime; donc je serai plus exigeant pour vous que pour les autres familles de la terre: selon la parabole des dix talents. Visiter: cf. Gn 18,21 *.

/ 1 Jn 4,10 — Autre traduction possible, marquant mieux ce qu'il y a pour nous de donné, de sûr, d'acquis dès le départ : « La charité, c'est un fait : à savoir que ce n'est pas nous qui aimons Dieu, mais c'est Lui qui nous a aimés... »

Dt 7,11-14 et // — La Loi est l'application de l'Alliance, et ne doit donc être tenue que dans cette perspective, qui est celle de l'Amour et de ses Bénédictions*.

La Nouvelle Alliance ne comporte pas moins des commandements (/ Jn 14,21), et «des oeuvres bonnes» (Tt 2,12 et 14), mais dans cette même perspective d'union à Dieu (// Jn 14,23) et d'« espérance bienheureuse »


(// Tt 2,13).

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La leçon du désert, source d'humilité

Dt 8-9).


Ce nouveau rappel historique ne fait pas doublet avec celui du 1 ° discours, parce qu'il se situe plus expressément au point de vue de l'Amour de Dieu, mis en évidence aux ch. 6 et 7. Et c'est pourquoi sans doute, au lieu d'être au départ, il vient en suite de cette Donnée éternelle de l'Amour de Dieu, éclairant tout ce passé. Souviens-toi: Cf. Ex 13,1-9 et 10,1-3*.

Afin de l'éprouver: C'est la tentation-épreuve du désert: cf. Ex 17,1-7*. Il t'a humilié: ne signifie pas que Dieu rabaisse l'homme. C'est plutôt une leçon de vérité, vérité de l'homme et de sa dépendance — matérielle à ses moyens de subsistance, aussi bien que spirituelle et ontologique à son Créateur. Mais comme l'Amour de Dieu est fidèle et n'a jamais manqué à Israël, même au pire du désert et de la tentation, cette leçon d'humilité est aussi une exaltation de la confiance.

Ici comme partout, le N.T. est le plus parfait accomplissement de l'attitude spirituelle des ' pauvres de Yahvé’ 'que la pédagogie divine (Dt 8,5 // Pr 3,11-12) suscitait déjà en Israël pérégrinant à travers le désert. C'est que Jésus est venu affronter avec nous cette tentation des besoins les plus matériels (/ Mt 4,1-3); et il l'a surmontée en citant précisément la Parole du Dt 8,3: « L'homme ne vit pas seulement de pain; ce qui sort de la bouche de Yahvé, voilà de quoi l'homme vit ».

C'est rétablir la hiérarchie: « La vie n'est-elle pas plus que la nourriture, et le corps plus que le vêtement » (// Mt 6,26), l'âme plus que le corps, et Dieu notre vraie nourriture, en son Fils, vrai Pain de Vie? C'est ainsi que vit Jésus lui-même, comme en témoigne, mieux encore que Mt 4,1-4, sa réponse aux Apôtres le pressant de manger: Rupert de Deutz montre à quel point « faire la volonté du Père en donnant sa vie pour nous » a été la faim et le rassasiement du Christ (Jn 4,34) : Par ces mots, il montre combien spontanément il obéit au Père pour opérer notre salut, et il montre qu'il savoure cette obéissance plus qu'un affamé ne se jetterait sur les aliments qu'on lui offrirait. Oui, beaucoup plus! Car la chair seule se restaure avec les nourritures corporelles, et elle finit quand même par mourir; mais par cette obéissance, la nature humaine du Christ, mortelle et passible, avait à se restaurer au point que ressuscitée des morts elle ne mourrait plus. Quelle est, en effet, la volonté du Père, sinon d'avoir de vrais adorateurs? Et c'est par la Passion du Christ qu'ils ont été trouvés; c'est par la Croix et l'obéissance du Fils qu'ils ont été acquis au Père. Donc, quand il dit: « Ma nourriture est défaire la volonté de mon Père », il exprime magnifiquement, et par l'analogie qui convient, quel grand désir le tend vers la consommation de son oeuvre rédemptrice. On trouve, certes, des saints qui ont reçu l'esprit de l'adoption des fils, et qui travaillent au salut de leurs frères avec la joie très douce de l'amour; mais à nul d'entre eux la peine du labeur n'est douce au point qu'il puisse dire en toute vérité: « Ma nourriture est de faire la volonté de Dieu ». Car le saint est composé d'une âme et d'un corps, tous deux passibles. Il peut prendre sa tribulation en patience parce qu'il vit pieusement dans le Christ, mais il ne peut dire que ce soit là sa nourriture. Le Christ, lui, n'était pas tout entier passible: pendant sa Passion, la douleur aiguë ne transperçait que sa nature humaine: sa nature divine avait sa nourriture dans l'amour du Père qui ne lui manque jamais. Il était rassasié d'opprobres: non pas comme les martyrs, dans la joie de l'espérance, mais dans la Présence éternelle (Sur S Jean, 4,34, — PL 169,371).

Pour nous, cette Présence éternelle se trouve dans le Christ lui-même qui, nous ayant nourris de son Corps et de son Sang, nous entraîne à chercher nous aussi « que la volonté du Père s'accomplisse sur terre comme au ciel ». Spiritualité de l'identification à Dieu entraînant le parfait 'abandonnement' à la conduite providentielle et bénéfique de Dieu sur nous, que l'on retrouve en tous les saints. Ils suivent en cela, du reste, les enseignements à la fois de l'Exode et du Sermon sur la Montagne (Dt 8,4-5 // Mt 6,25-32). Pour que Dieu règne enfin ! (// Mt 6,33 — cf. le Pater).

Dt 8,3Il t'a nourri de la manne. Profitons de ce rappel de la manne, figure de l'eucharistie (cf. Jn Jn 6 // Jr à Jt), pour citer le commentaire de Cyrille d'allxandrie: SurJn 6,35 ss (pg 73,517,520-21,561): « Ne croyez pas que la manne soit le pain du ciel: Moi, je suis le pain de vie qui jadis vous fut promis et préfiguré par la manne. Maintenant ce pain est là, présent, et il accomplit la promesse. Je suis le pain de vie: non pas un pain corporel, remédiant seulement aux souffrances de la faim : je refaçonne plutôt pour la vie éternelle tout ce qui respire: l'homme fut créé pour la vie, je le rends plus fort que la mort ». Par ces mots, le Christ suggère cette Vie et cette Grâce qui nous viennent par sa sainte chair: c'est par elle qu'il introduit en nous ce qui est la propriété du Fils Unique: la Vie...

Que nous promet donc le Christ? Rien de corruptible, mais plutôt cette bénédiction qui se trouve dans la participation à sa sainte chair et à son sang : bénédiction qui ramène l'homme tout entier à l'incorruptibilité, si bien qu'il n'a plus besoin des nourritures qui reculent la mort...

Le saint corps du Christ vivifie ceux en qui il pénètre, quand il se mêle à nos corps. Car son corps n'est pas un corps étranger: il est le corps de « la Vie par nature ». Il contient en lui-même toute la puissance du Verbe à qui il est uni: il est doué, pour ainsi dire, de la même qualité, rempli de sa force qui vivifie toutes choses et les garde dans l'être.

Cela étant, les baptisés qui ont goûté à la grâce divine doivent du moins comprendre que s'ils vont rarement aux Assemblées de l'Église, s'ils s'abstiennent longtemps de cette bénédiction qui leur vient de la communion au Christ, ils s'excluent eux-mêmes de la vie éternelle, car ils refusent d'être vivifiés...

La manne n'est que l'image et l'ombre du Christ; elle figure le pain de vie, mais elle n'est pas le pain de vie: le psalmiste nous en est garant quand il dit: « Il leur donna le pain du ciel, l'homme a mangé le pain des anges » (Ps 78,24).

A première vue, il semblerait que le prophète ait dit cela des Israélites — mais non, c'est de nous qu'il est question: car ne serait-il pas stupide de supposer que les saints anges, dans le ciel, doués d'une nature incorporelle, se nourrissent d'une nourriture épaisse, et qu'ils aient besoin pour conserver leur vie de ces secours que réclame le corps terrestre? Au contraire, tout le monde comprend qu'étant esprits, ils ont besoin d'une nourriture spirituelle et intellectuelle. Il est donc manifeste que, la manne étant type et figure du Christ — qui contient tout en lui-même, qui fortifie et nourrit les anges, qui donne la vie à tout ce qui est sur la terre — le prophète a attribué au signe le nom de la Vérité, arrachant ainsi ses auditeurs à la manne matérielle et les conduisant à la réalité spirituelle du Christ en personne, lequel est le pain des saints anges eux-mêmes...

Ceux qui ont mangé la manne sont morts, mais ceux qui reçoivent en eux le pain de vie sont signés pour la vie éternelle: ils réalisent leur ascension dans les espaces éternels de la vie chrétienne. Et n'allez pas objecter qu'ils goûtent eux aussi à la mort: la mort leur arrive, c'est humain: mais comme le dit Paul, « ils vivent à Dieu ».

Dt 8,6Garde les commandements : Cette fois, étant donné sa situation dans le second discours, on passe directement du rappel historique à l'exhortation morale.

Pour le craindre: Cf. Dt 4,2* sur la 'sainte crainte'*.

Dt 8,11-17Garde-toi (v. 11.14-17) d'oublier (v. 11.14-18): Reprise, sous forme négative, de l'exhortation positive: « Souviens-toi... garde les commandements » (8,2 et 6 — comparer avec le 1° discours: « Ecoute et pratique... Mais prends garde ». .. Dt Dt 4,1 et 9). Mais revient le motif propre au second discours: les tentations du désert, épreuve de la sollicitude divine éduquant son peuple (v. 17 // à v. 2-3) en vertu de l'Alliance (v. 18), sont le fruit de l'élection elle-même fruit de l'Amour de Dieu.

// Si 10,12-18 — Cette leçon d'humilité (cf. Introd. à ces ch. 8-9 du Dt) vaut toujours. Contre l'impiété aveugle du siècle (Dt 9,5 * ).

Dt 9,4-19 // Ep 2,8-13 — Cette leçon d'humilité devrait en particulier préserver Israël de s'attribuer les succès qu'il commence à connaître dans la conquête de la TransJordanie d'abord, en attendant celle de la Terre Promise. Ainsi, même le souvenir des fautes passées — ici le Veau d'Or (Dt 9,7-19) — est-il bénéfique s'il ne se borne pas à un remords stérile. La confession de nos péchés doit nous amener à 'confesser' avec plus de fermeté encore notre espérance en la 'Hésèd'*, l'amour divin, fidèle malgré nos infidélités, parce qu'il n'est pas causé par nos mérites, si fragiles même quand ils seraient réels, mais effet de la seule et débordante surabondance divine. De cette double confession — de Dieu et de nos péchés — le // Ne 9 montre que la leçon du Deutéronome est restée vivante en Israël. Les versets 20-21 de Ne 9 en particulier sont une citation directe de Dt 8,4. La mention qui y est faite du Don de l'Esprit qu'est l'Intelligence de la conduite providentielle, rejoint aussi Dt 8, mais à la lumière d'Is 11. Enfin, le N.T. y reconnaîtra l'Esprit Saint en Personne (// Tt 3,4 / Rc). Ainsi, la Révélation initiale s'éclaire progressivement par celle des prophètes, des sages d'Israël et du Christ ou de ses Apôtres...

// Ep 2,10Fixés dans les oeuvres salutaires: Nous comprenons donc 'epi ergois agathois' dans un sens définitif plutôt que final: « créés pour (ou: en vue de) les oeuvres bonnes », comme l'entend la traduction habituelle. Peut-être aussi pourrait-il signifier:’par dessus', ces oeuvres bonnes étant alors « par dessus le marché », c'est-à-dire qu'elles sont conséquence plutôt que clause préalable à l'Alliance et au Don de Dieu — ce qui serait tout-à-fait dans le sens du contexte, et convergent avec l'enseignement du Deutéronome.

Dt 9,5C'est pour l'impiété de ces nations: Même racine que le 'Rasha’ des Psaumes (Cf. PC m, p. 80). Comme les deux commandements de l'amour envers Dieu et le pro 'hain n'en font qu'un, de même l'impiété envers Dieu de 'Yim-pius’ du fils qui se révolte contre son Créateur et Père, s'accompagne souvent de l'irrespect envers ce qu'il y 'a de sacré en tout homme, et notamment de l'oppression des justes et des faibles.

En Gn 15,16*, se trouvait prédit qu'une fois « porté à son comble », le mal attire lui-même son châtiment, pour les Cananéens comme pour la génération du Déluge ou les habitants de Sodome — qui nous sont donnés par la Bible « en exemple ». Si l'élection d'Israël vient du libre amour de Dieu, la perte des Cananéens, elle, n'est imputable qu'à eux-mêmes. Tout comme plus tard, Israël ayant « porté à son comble » son infidélité, se condamnera lui-même à l'invasion étrangère et à l'exil (2R 17,7-23 2R 24,20), tandis que les païens, s'ils se convertissent, entreront dans l'Alliance et les Promesses (// Ep 2,11-13):

Dieu ne fait pas acception de personnes, ni de race... : la Bible le répète en maintes circonstances. Mais c'était d'autant plus nécessaire dans le Deutéronome, pour que la liberté des choix de l'Amour ne nous fasse pas craindre que la justice puisse en être lésée. Tout au contraire, le Don de Dieu surpasse et comble tout ce qui n'aurait été que pure rétribution, comme Jésus l'explique en sa parabole des Ouvriers de la onzième heure (Voir Dt 10,17-19 et // ).

Dt 10,12-13Et maintenant: amorce la conclusion (Cf. Introd. à Dt, et 4,1). Craindre et marcher; aimer, servir et garder les commandements: la suite des verbes est significative d'une ' sainte crainte' qui, loin d'être une peur servile et paralysante, est zèle d'amour, attentif à tout ce qui peut « plaire au Seigneur ». Et ce que Dieu te commande, en son Amour, comment ne serait-ce pas pour ton bien (v. 13)?

Dt 10,14-18Voici: amorce une déclaration qu'il faut recevoir dans l'adoration (cf. l'étude d'Y. fauquet, citée à Gn 1,31 * ). C'est la réitération de l'élection d'Israël par Yahvé, thème capital du Dt (le v. 14 reprend 4,39; le v. 15 est // à 4,32-38 ou 7,7-8). Avec la réciprocité, nécessaire à toute Alliance, de l'élection par Israël de Yahvé pour son Dieu (Gn 17,7-8*). Il y a donc appartenance mutuelle; et la circoncision physique n'est que le signe d'une plus nécessaire 'circoncision du coeur' (Gn 17,10-14* et // Jr 4,4 Ac 7,51 Col 2,11-13 / By). Pour cette conversion, il faut que notre nuque raidie devienne docile, et que nous soit donné coeur de chair et oreilles qui entendent (Ba 2,30-35): véritable 'seconde naissance', à partir non pas tant de nos bonnes oeuvres que du sacrement de baptême dans l'eau et dans l'Esprit, annoncé par Ez 36,25-28, donné par le Christ (HTt 3,5 — qu'on pourrait lui-même mettre en // avec la gratuité de l'amour de Dieu annoncé en Ep 2,8-13 // ?a).

Dt 10,17 et // Cf. 9,5*.

Dt 10,18-19Dieu aime l'étranger: et pas seulement Israël. « Juif ou Grec », comme dira saint Paul, finalement tous les hommes sont appelés. Pour mieux marquer cette équité* divine, le Deutéronome précise que Dieu donne aussi à l'étranger du pain et des vêtements, c'est à-dire veille à assurer ses besoins primaires, exactement comme il l'a fait premièrement pour Israël pendant l'Exode (Dt 8,3-4). Bien plus, ne veille-t-il pas ainsi, même sur les oiseaux du ciel et les lys des champs (Mt 6,26-29 / Qy)? L'amour de Dieu, pour être personnalisé — « Je t'ai appelé par ton nom » — n'en est pas moins universel. Y compris dans le Deutéronome, quoi qu'en disent certains commentateurs.

Dt 10,20-22 Dt 11,1-2 Dt 11,7 Dt 11,16-18 Dt 11,26-28 // De la finale, assez redondante, nous détachons qui en souligne le thème essentiel , à nouveau c'est celui des LE 2 Voies, avec leurs fruits de Bénédiction* et Malédiction — ces derniers introduits par un ultime: Prenez garde... (11,16-17). Sur la colère de Dieu, cf. Nb 35* et 25,11*.

Dt 11,2-7Vous savez... vos yeux ont vu: « Bienheureux ceux qui croient sans avoir vu » (Jn 20,29). Mais il n'y aurait pas même d'objet à notre foi si l'invisible ne s'était d'abord manifesté. Pour l’A.T.tout entier, la référence primordiale restera « les grandes oeuvres que Yahvé a faites », vues et constatées par Israël tout au long de son Exode. Pour le N.T., c'est « ce que nous avons vu de nos yeux et que nos mains ont touché du Verbe de Vie » (1 Jn 1Jn 1,1). Telle est la Lumière qui doit éclairer toute notre vie (// Mt 6,22-23).

Dt 11-18Sur votre coeur et dans votre âme... comme un signe sur votre bras, entre vos yeux: Reprend la prescription de 6,7-9, mais en précisant que le mémento sensible doit avoir valeur désigne d'un attachement du coeur et de l'âme. Les invectives du Christ contre les phylactères ne visent que leur pratique pharisaïque, tout extérieure et ostentatoire (Mt 23,5 et 25-28).


5200

II. LA LOI DE L'ALLIANCE

Dt 12-26)

Dans son ensemble, elle suit l'ordre du Décalogue (ch. 5): D'abord Dieu et son culte (12,2 à 17,7); ensuite, aux ch. 17-18, l'autorité civile (Juges et Rois) et religieuse (Prêtres et Prophètes), qui est du ressort du 4° commandement. Puis l'homicide et la guerre (19,1 à 21,9), puis la morale familiale (21,10 à 23,1). Lc 8° commandement n'est représenté que par le souci d'empêcher les faux témoignages (19,15-21) — et que ce soit inséré dans les chapitres sur l'homicide met en garde contre ce qu'il peut y avoir de meurtrier dans un faux-témoignage comme d'ailleurs dans une calomnie. , . Le 'code’ se termine sur quelques règles relatives à la pureté dans le culte et dans le camp, puis à la vie sociale (23-2 ') avec un paragraphe sur le divorce (24,1-4) et quelques additions plutôt cultuelles, contre la prostitution sacrée (23,18-19), sur les voeux (23,22-24), le lévirat (25,5-10), l'anathème* sur Amalec (25,17-19), les prémices et la dîme (26,1-15). Rien de très systématique, on le voit, ni le souci d'être complet. La Loi du Dt. reprend certains points de celle de l'Exode ou du Lévitique comme l'Évangile de St Jean les Synoptiques: c'est une relecture approfondissante.

Certains leitmotive indiquent la perspective surtout religieuse d'une Loi destinée à garder l'Alliance d'Israël avec le Dieu Saint: « Tu ôteras le mal du milieu de toi » (13,6 etc. ..)... Vous vous réjouirez (12,7) ... Souviens-toi que tu as été esclave en Egypte » (15,15). Tant il est vrai que le croyant se trouve toujours pérégrinant à partir de l'esclavage du péché vers la Sainteté et la Béatitude du Royaume promis.

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L'unité du culte, garantie du monothéisme

Dt 12-14).


Dt 12,5-7 — Le reste du chapitre revenant sur le sacrifice et la mise en garde contre les cultes païens, ce qu'il y a de nouveau ici, c'est la prescription initiale de l'unité du sanctuaire, affirmant que « Yahvé est Un » (6,4). Dans l'Alliance nouvelle mieux encore, il n'y a « qu'un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême, un seul Dieu et Père de tous » (Ep 4,5-6) — donc un seul autel, qui est le Christ même (cf. 1Co et Ap 21,22 — Cf c.j. nesmy: Pratique de la Liturgie, DDB. 1964, p. 175-178). Si l'Église a pu implanter partout ses églises, multipliant ses autels, c'est dans la foi en la Promesse du Christ : « Je suis avec vous, jusqu'à la fin des siècles », de sorte que ces autels innombrables manifestent la catholicité de l'Église, pourtant Une, Épouse unique de l'unique Christ.

// R 8,29 — Reprend la définition du Sanctuaire donnée par le Deuté-ronome (12,5): un lieule Nom de Dieu peut être invoqué, parce qu'il a choisi d'y habiter.

// Lc 2,41 Lc 9,51 Jn 4,2 — L'Évangile montre à la fois l'accomplissement de la Loi ancienne et son dépassement « en esprit et en vérité », pour que « les vrais adorateurs » trouvent le Père qui les cherche tout au long de leur itinéraire, comme déjà Israël au Désert ou Abraham arpentant la Terre Promise , « Le Royaume de Dieu, il est en vous » (Lc 17,21 ).

Dt 13,2-6 // Mt 24,24 Ga 1,6-8 — Le Dt reviendra sur vrais et faux prophètes au ch. 18,18-20*. Saint Matthieu et saint Paul nous avertissent que de notre temps aussi, le danger existe, et que plus il y en a qui se prétendent 'prophète', plus il faut s'en tenir fermement à l'Évangile authentiquement transmis par l'Église.

// 1Co 5,6-7 — Cette comparaison exaltant ce que la vie chrétienne doit avoir de pascal, pourrait sembler bien éloignée de la vieille Loi du Sinaï, et 13,2 pourtant elle est dans la même ligne, non seulement parce qu'elle est fondée sur la Pâque, mais parce qu'elle implique dès lors la même Loi de sainteté, excluant tout renégat. De fait, saint Paul conclut ce passage en citant Dt 13,6 (et passim, car la sentence revient par 9 fois en ces chapitres): « Tu ôteras le mal — et même seulement le ferment du mal — du milieu de toi » ().

Dt 14,1-2 // Is 63,16 Mt 6,9-10 — Delà viennent les exigences delà Loi. C'est toujours la conjonction: « Electi, Sancti, Dilecti (Col 3,12), fondement du Deutéronome (7,6 et /*). Elle trouve son achèvement dans le mystère pascal: « Je monte vers mon Père et votre Père, vers mon Dieu et votre Dieu (Jn 20,17). Cette filiation est tellement le tout de notre religion qu'elle est au principe de notre prière: « Notre Père... »

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L'année sabbatique


Dt 15 — cf. aussi Lv 25, sur le Jubilé). Loi capitale pour l'économie de l'Héritage, donc la Justice sociale dans le Peuple de Dieu. Ses vicissitudes expliquent la ruine et le relèvement de Jérusalem :

D. barsotti: Thrènes — Esdras (p. 231 ss.): Demandons-nous quelle fut la cause déterminante de la destruction de Jérusalem. Jérémie avait donné une dernière chance à Israël: Jérusalem ne serait pas détruite si l'on obéissait à la loi de l'année sabbatique et à la loi de l'année jubilaire.

Tous les sept ans, on devait laisser les champs sans culture, pour faire reposer la terre. Et tous les cinquante ans on devait célébrer l'année jubilaire en rendant la liberté à ceux qui l'avaient perdue pour quelque cause que ce fût, et en restituant à chaque famille d'Israël son bien patrimonial. Bien des familles, ruinées par quelque accident, ou par une mauvaise administration, avaient dû vendre leurs biens, leur maison, ou même leur fils et leurs filles. Elles devaient rentrer en possession de ces biens, de par l'Alliance.

C'était Dieu qui avait donné à Israël la terre de Canaan: il avait établi ce que devait avoir chaque tribu ou famille. La législation d'Israël quant à la justice était peut-être plus parfaite que celle de n'importe quelle autre nation antique: elle n'avait certes rien à envier à la législation de la Grèce ou de Rome. Israël avait reçu une loi qui faisait de lui une nation sainte. Et l'une des lois de l'antique Israël était précisément celle qui, tous les cinquante ans, faisant valoir à nouveau les droits de chaque famille, empêchait la formation d'un pouvoir économique qui aurait écrasé le pauvre et l'aurait privé de sa dignité.

Cette loi n était jamais pleinement observée. Jérémie exigea de la part de Dieu son exécution. Le roi et le peuple promirent ; mais la promesse ne fut pas tenue. Aucun de ceux qui s'étaient enrichis avec les biens des pauvres, et étaient entrés en possession de leurs terres et de leurs maisons, n'eût l'honnêteté d'y renoncer pour les rendre à qui de droit, Alors, Israël n'ayant pas obéi aux appels du prophète, Dieu se déclara libre vis-à-vis d'Israël et abandonna la cité à la guerre, à la famine et à la peste.

La ruine de Jérusalem dérive donc immédiatement du fait qu'Israël ne voulut pas tenir un engagement pris avec Dieu. Les prophètes prêchèrent toujours la justice sociale. Ce qu'ils voulaient était exactement un rapport de justice et d'équité d'homme à homme. L Alliance avec Dieu, et la survie même de Jérusalem, étaient suspendues à l’observance de la justice. Israël n'obéit pas, et Israël fut abandonné de Dieu.

Mais voici qu'avec Néhémie, Israël revient dans sa cité, et Jérusalem est reconstruite. Etait-il suffisant de rebâtir le Temple de Dieu? de relever les murs de la cité?

La cause du désastre avait été une faute, une injustice sociale. C est l'accomplissement d'une loi de justice sociale qui rachètera maintenant la nation.

Beaucoup viennent se plaindre à Néhémie. Ils n'ont pas de quoi vivre: pour avoir du pain, ils ont dû vendre leurs champs, leurs fils, leurs filles. Néhémie, le serviteur de Dieu, s'indigne. Néhémie est vraiment un nouveau Moïse: il aime son peuple. Il n'a jamais voulu vivre de ce qui devait être la solde du Gouverneur : comme Gouverneur, il aurait pu tirer du peuple le montant de son traitement. Mais Néhémie n'a jamais voulu rien accepter du peuple qu'il gouverne: au contraire, il a entretenu à ses frais cent cinquante hommes pour la construction des murs et pour la défense de la ville. Chaque jour il a donné un boeuf, six moutons et de la volaille. Il ne vit pas aux dépens du peuple comme un mercenaire, mais se sacrifie pour la nation. Lui qui, à la cour de Babylone, jouissait du bien-être, de la sécurité, et même de l'affection du roi, il a quitté la cour et tout abandonné pour se mettre au service de son peuple, pour rebâtir la sainte cité. C'est une âme vraiment noble et religieuse. Il a placé le salut de son peuple au-dessus de tout intérêt personnel.

Néhémie écoute la plainte du peuple qui, dans l'extrême nécessité, s'était vendu à des profiteurs êhontês; et il s'insurge avec indignation. À l'égard de Juifs qui pressurent leurs frères, Néhémie n'a pas de pitié: Comment! Le peuple de Dieu a été racheté de l'esclavage des nations, pour tomber dans un esclavage pire, entre les mains de ses propres frères? Néhémie exige que l'on déchire toutes les obligations de dettes. Toute créance doit être remise au débiteur: les fils d'un même peuple doivent se reconnaître véritablement frères, égaux devant Dieu. Tous doivent se sentir liés par une même foi: tous engagés dans la reconstruction de la cité, avec les mêmes droits et les mêmes devoirs.

Par cette intervention, Néhémie accomplit quelque chose de plus grand encore que la reconstruction des murs. Il redonne au peuple d'Israël la conscience de son unité; il lui redonne une âme.

La pureté de la race ne suffit pas à préserver le privilège de l'élection divine. Esdras, en renvoyant les femmes étrangères, purifie Israël de la contagion des nations païennes : mais pour remodeler le peuple de Dieu, il faut le purifier de l'égoïsme qui fait échec à l'unité du peuple; il faut accomplir une loi qui reconnaît les droits de chacun; il faut retrouver une volonté nationale qui surmonte les divisions et surmonte les égoïsmes.

En ce chapitre cinquième, Néhémie s'élève à la très haute dignité de prophète et de législateur, comme Moïse. Il n'est plus seulement le chef d'Israël, il devient le père qui façonne l'âme d'un peuple. Il est plus heureux que les prophètes, car les prophètes avaient prêché mais n'avaient pas été entendus. Lui, on l'écoute! L'extrême nécessité où la nation était réduite rendit plus facile l'exercice de cette autorité dont Néhémie avait été investi par le roi de Perse; mais ce fut surtout son prestige moral qui lui acquit l'obéissance du peuple.

Personne peut-être n'a jamais eu en Israël autant d'autorité morale que Néhémie ... Plus que Zorobabel et plus qu Esdras, il fonde le judaïsme. Il fonde le nouveau peuple d'Israël sur l'unité nationale dans la justice. Avec Néhémie, la loi qui n'avait jamais été observée depuis qu'Israël l'avait reçue de Dieu, devient vraiment le fondement de la vie nationale. Tous sont reconnus fils d'Israël, tous participent au bien de l'Alliance, nul ne devra mépriser l'autre, nul ne sera esclave de l'autre, chacun aura ses moyens de subsistance, chacun aura ses champs et sa récolte. Pour le première fois peut-être dans l'histoire du monde, Néhémie établit que sous aucun prétexte on ne peut enlever à un homme tous ses moyens de subsistance. Cette loi rétablit la nation.

// Lc 4,17 Jn 8,34 1 Jn 1Jn 3,16-17 — La vraie rémission annoncée par l'année sabbatique est celle qu'apporte la Rédemption du Christ. Et c'est aujourd'hui. Le Christ lui-même, dès le début de sa prédication, donne ainsi l'exemple d'une lecture sachant reconnaître dans la Loi ou les Prophètes — ici, Isaïe — leur permanente actualisation (cf. Introduction générale). Méthode

de lecture que le Maître a enseignée lui-même à ses disciples, et qu'il leur lègue juste avant son Ascension, en la centrant justement sur la même perspective de rémission des péchés (Lc 24,27 et 44-48).

Dt 15,11 // Mc 14,7 — Il faut reconnaître dans la Parole du Christ une citation du Dt, pour ne pas en être choqué comme d'une démission, mais pour y discerner tout au contraire un appel à plus de charité envers le pauvre, image visible du Christ et qui est tien, donc 'ton plus que prochain’.

Dt 15,12-18 // Lc 17,3-4 Mt 6,12 Lc 5,20 — '« Remets nous nos dettes comme nous les remettons, indéfiniment ». Ou mieux encore: « Puisque Dieu ne se lasse pas de nous remettre nos dettes (// Mt et Lc), remettons nous aussi au prochain ses dettes envers nous, sans nous lasser. Traiter l'autre comme Dieu nous a traités, est aussi le motif donné par Dt 15,15.


Bible chrétienne Pentat. 5120