Catena Aurea 7521

vv. 21-28


7521 Mc 15,21-28

La Glose. Après la condamnation de Jésus-Christ, et les outrages faits à ce divin condamné, l'Évangéliste en vient au récit de son crucifiement: «Et ils l'emmenèrent pour le crucifier». - S. Jér. C'est Abel qui est conduit dans les champs par son frère pour y être mis à mort (Gn 4); c'est Isaac portant le bois du sacrifice avec Abraham qui trouve le bélier pris dans un buisson (Gn 22); c'est encore Joseph avec la gerbe qu'il vit en songe, et sa tunique teinte de sang (Gn 38); c'est Moïse avec sa verge (Ex 7), et le serpent suspendu à un arbre (Nb 21); c'est là cette grappe de raisin portée sur un bâton (Nb 13); c'est Elisée cherchant le fer de sa cognée tombée dans l'eau, et qui nagea sur l'eau vers le bois (2R 6), figure du genre humain, que le fruit défendu d'un arbre précipita dans l'abîme, mais que le bois de la croix de Jésus-Christ et le baptême de l'eau firent remonter et nager vers le paradis; c'est enfin Jonas jeté par le sort hors du vaisseau dans la mer, et qui resta trois jours dans le sein de la baleine. (Jon 3)

«Et ils contraignirent un homme, nommé Simon, de porter sa croix», etc. - Théophyl. Saint Jean dit que Jésus portait sa croix, l'un et l'autre sont vrais, Jésus porta d'abord lui-même sa croix jusqu'à ce que les Juifs contraignirent cet homme, qui passait, de la porter avec lui. L'Évangéliste fait connaître le nom des enfants de cet homme pour donner à son récit une marque plus authentique de crédibilité; car cet homme vivait encore et pouvait affirmer lui-même toutes les circonstances du crucifiement. - S. Jér. Les uns doivent leur renommée aux mérites de leurs parents, les autres aux vertus de leurs enfants. Ce Simon, que les Juifs forcent de porter la croix, semble tirer son illustration de ses enfants qui étaient les disciples de Jésus-Christ. Nous apprenons de là que la sagesse, que les vertus des enfants peuvent être dans cette vie un puissant auxiliaire pour les parents eux-mêmes. C'est ainsi que les mérites des patriarches, des prophètes et des Apôtres ne cessent d'être un titre de gloire pour le peuple juif. Simon qui porte forcément la croix de Jésus, est la figure de celui qui travaille pour la gloire humaine; les hommes le contraignent de faire ce que ni la crainte ni l'amour de Dieu n'auraient pu obtenir de lui. - Bède. Ou bien encore, ce Simon qui n'est pas de Jérusalem, mais de Cyrène, ville de Lybie, figure le peuple des Gentils qui autrefois étaient complètement étrangers aux alliances, et qui maintenant par leur obéissance sont devenus les héritiers de Dieu et les cohéritiers de Jésus-Christ (Ep 2,12). Il est à remarquer, en effet, que Simon veut dire obéissant et Cyrène héritier. Il revient de sa maison des champs, en grec ðÜãïò, d'ou vient le mot paganus, païen que nous donnons à ceux qui sont étrangers à la cité de Dieu. Simon qui sort de sa maison des champs pour porter la croix après Jésus, est donc le peuple des nations ou des Gentils, qui abandonne les superstitions du paganisme pour s'attacher fidèlement à suivre les traces de la passion du Sauveur, «Et ils le conduisirent jusqu'au lieu appelé Golgotha», etc. En dehors de la ville et au-delà des portes se trouve le lieu où l'on tranche la tête aux condamnés, et c'est delà que lui est venu le nom de Calvaire, ou lieu des décapités. Or, Jésus fat crucifié en ce lieu, pour ériger l'étendard du martyre dans l'endroit même où les condamnés souffraient le dernier supplice. - S. Jér. Suivant une tradition des Juifs, c'est sur cette montagne qu'Abraham immola un bélier à la place de son fils Isaac; et c'est là aussi que Jésus est comme dépouillé de sa chair, c'est-à-dire séparé de la Judée toute charnelle.

«Et ils lui donnèrent à boire du vin mêlé avec de la myrrhe». - S. Aug. (de l'acc. des Evang., 3, 11). Saint Matthieu exprime la même pensée en disant: «Du vin mêlé avec du fiel». Il s'est servi du mot fiel pour signifier l'amertume de ce vin, car le vin mêlé à la myrrhe est fort amer. Il n'est pas impossible, non plus que ce soient le fiel et la myrrhe réunis qui rendirent ce vin fort amer. - Théophyl. Ou bien encore, au milieu de ce désordre et de cette confusion, on apportait une chose pour une autre, les uns du vinaigre et du fiel, les autres du vin avec de la myrrhe. - S. Jér. Ou bien ce vin mêlé avec de la myrrhe est du vinaigre; et c'est en goûtant ce vin que le Sauveur détruit le suc du fruit qui a donné la mort. - Bède. C'est la vigne amère qui produit le vin amer, dont le Seigneur est abreuvé, pour accomplir cette prophétie: «Ils ont mêlé le fiel à ma nourriture, ils m'ont présenté du vinaigre pour étancher ma soif» (Ps 68) - S. Aug. (de l'acc., des Evang., 3, 11) L'Évangéliste ajoute: «Et il n'en prit point», c'est-à-dire il n'en prit point pour boire, il en goûta seulement, comme le rapporte saint Matthieu, et cette expression: «Il ne voulut point le boire», est la même que celle de saint Marc: «Et il n'en prit point», excepté que ce dernier passe sous silence que le Seigneur en a goûté. - S. Jér. Il n'a point pris non plus ce qui était la cause de ses souffrances, ce qui lui fait dire par la bouche du Roi-prophète: «Je payais alors ce que je n'avais pas pris» (Ps 68)

«Et après l'avoir crucifié», etc. - S. Jér. L'arbre de la croix est pour nous la figure du salut. Le premier arbre fut celui de la science du bien et du mal; le second est exclusivement l'arbre du bien et de la vie. La main, en s'étendant vers le premier arbre, n'a saisi que la mort; les mains étendues sur le second ont retrouvé la vie qui était perdue. C'est par la croix que Jésus-Christ nous a délivrés des supplices qui nous étaient dus; c'est par sa mort qu'il a détruit notre mort. C'est sous la forme d'un serpent qu'il donne la mort à l'antique serpent, de même que c'est par la verge changée en serpent que les autres serpents ont été dévorés (Ex 5,12). Que nous représente aussi la forme de la croix, si ce n'est les quatre parties du monde? L'Orient brille à son sommet, le Septentrion est figuré par la droite; le Midi par la gauche; l'Occident par la base fixée dans le sol; ce que parait indiquer l'Apôtre dans ces paroles: «Afin que vous sachiez quelle est la hauteur, la largeur, la longueur et la profondeur». (Ep 3) Lorsque les oiseaux prennent leur vol dans les airs, ils y dessinent la forme d'une croix; l'homme, en nageant, imite la forme d'une croix pour se soutenir sur les eaux; le vaisseau reçoit le souffle du vent dans l'antenne qui soutient les voiles, et présente la figure d'une croix; la lettre T, par sa forme, est aussi l'emblème de la croix et du salut. (Ez 9) - Bède. On peut dire aussi que le bois transversal de la croix où les mains sont clouées, signifie la joie que produit l'espérance; car les mains sont le symbole des oeuvres, et cette largeur de la croix figure la joie qui accompagne les bonnes oeuvres; car la tristesse resserre le coeur. Le haut de la croix où la tête repose, représente l'attente de la récompense que nous réserve la justice sublime de Dieu. La longueur de la croix sur laquelle le reste du corps est étendu, figure la patience, et de là vient qu'on dit de ceux qui sont patients, qu'ils ont de la longanimité. La partie de la croix qui s'enfonce dans la terre est le symbole des profondeurs que renferme ce mystère. Tant que dure pour nos corps le devoir de détruire en eux le corps du péché (Rm 6), c'est pour nous le temps de la croix.

Théophyl. Les soldats jettent au sort ses vêtements, comme si c'étaient des vêtements royaux, nouvelle dérision ajoutée à tant d'autres; car ces vêtements étaient pauvres et de peu de valeur. - La Glose. D'après saint Jean, qui raconte ce fait plus en détail, les soldats partagèrent en quatre parties, suivant leur nombre, les vêtements du Sauveur, et jetèrent au sort sa tunique sans couture et d'un seul tissu depuis le haut jusqu'en bas. - S. Jér. Les vêtements du Sauveur que les soldats païens se partagent, sont ses commandements, dont son corps, c'est-à-dire l'Eglise est comme enveloppée, et ils sont partagés entre quatre classes de fidèles, unis par une même foi; les époux, ceux qui pratiquent la continence, les supérieurs et les simples fidèles. La tunique indivisible qui est la paix et l'unité leur est échue à tous par le sort.

«Or, il était la troisième heure du jour», etc. - S. Jer. Cette observation de saint Marc est on ne peut plus conforme à la vérité; car à la sixième heure, les ténèbres se répandirent sur la terre, et il eût été impossible de faire aucune action. - S. Aug. (de raccord des Evang., 3, 13). Si ce fut à la sixième heure que Pilate, assis sur son tribunal, livra Jésus aux Juifs pour le crucifier, comme le rapporte saint Jean; comment a-t-il pu être crucifié à la troisième heure, comme quelques-uns le concluent d'une fausse interprétation des paroles de saint Marc? Examinons d'abord à quelle heure a pu avoir lieu le crucifiement, et nous verrons ensuite pourquoi saint Marc le place à la troisième heure. Il était environ la sixième heure lorsque Pilate, assis sur son tribunal, livra Jésus aux Juifs, comme nous l'avons dit. Or, la sixième heure n'était pas encore tout à fait arrivée; c'était environ la sixième heure, c'est-à-dire que la cinquième était passée, et qu'une partie de la sixième était commencée. Ainsi la cinquième heure était écoulée, et la sixième commencée, lorsqu'eurent lieu les circonstances du crucifiement; et aussitôt la sixième heure achevée, pendant que Jésus était attaché à la croix, les ténèbres se répandirent sur toute la terre. Examinons maintenant pourquoi saint Marc s'exprime ainsi: «Il était la troisième heure», etc. Il venait de dire: «Et ceux qui l'avaient crucifié partagèrent ses vêtements», et les autres Évangélistes rapportent également que ce fut après le crucifiement de Jésus, que ses bourreaux se partagèrent ses vêtements. Si saint Marc eut seulement voulu préciser l'heure où ces faits se passèrent, il lui suffisait de dire: «Il était la troisième heure». Pourquoi donc ajoute-t-il: «Et ils le crucifièrent ?» Ne voulait-il point par une espèce de récapitulation nous indiquer ici, comme objet de nos recherches, une vérité cachée; alors surtout que son Évangile devait être lu dans des temps où toute l'Eglise savait fort bien à quelle heure Jésus avait été attaché à la croix, ce qui permettait de dissiper sur ce point jusqu'à l'ombre de l'erreur, jusqu'à l'apparence du mensonge. Mais comme il savait parfaitement que ce ne furent pas les Juifs, mais les soldats, qui en réalité attachèrent Jésus-Christ à la croix, comme l'atteste saint Jean (Jn 19,23), il a voulu nous apprendre en termes couverts que les véritables auteurs du crucifiement furent ceux qui demandèrent à grands cris que le Sauveur fût crucifié, plutôt que ceux qui, par le devoir de leur état, ne firent qu'obéir aux ordres de leurs chefs. Ainsi donc, ce fut à la troisième heure que les Juifs demandèrent que Jésus fût crucifié, et eu réalité, ce crime fut dès lors moralement accompli. Or, pendant que Pilate s'efforçait de délivrer le Sauveur, et pendant le tumulte causé par les résistances des Juifs, il se passa un intervalle d'environ deux heures, et il était donc environ la sixième heure qui n'était pas encore écoulée lorsque se passèrent les événements renfermés entre le moment où il livra Jésus aux Juifs, jusqu'à celui où les ténèbres se répandirent sur la terre. Celui donc qui examinera ce passage sans aucun parti pris d'impiété, comprendra facilement que saint Marc a fait mention de la troisième heure dans l'endroit le plus opportun, c'est-à-dire au moment où les soldats crucifièrent Jésus. Afin donc qu'on fit retomber non pas sur les soldats, mais sur les Juifs la pensée d'un si grand crime, il écrit: «Or, il était la troisième heure, et ils le crucifièrent». Il voulait que pour un lecteur attentif, les véritables auteurs du crucifiement fussent ceux qui l'avaient demandé à grands cris vers la troisième heure, plutôt que les soldats qui n'ont accompli le crime qu'à la sixième heure. - S. Aug. (Quest. sur le Nouv. et l'Anc. Test., chap. 65). Saint Marc a donc voulu nous faire entendre que la sentence qui condamnait Jésus à être crucifié, fut rendue à la troisième heure. En effet, tout homme condamné à mort, est regardé comme mort du moment où la sentence de mort lui a été signifiée. Il établit ainsi d'une manière évidente que ce n'est point précisément en vertu de la sentence du juge que Jésus a été crucifié; car il serait difficile de prouver l'innocence de celui qui est l'objet d'une condamnation à mort. - S. Aug. (de l'acc. des Evang., 3, 13). Cependant il est des auteurs qui dans ces paroles de saint Jean: «C'était le jour de la préparation de la pâque, vers la sixième heure» (Jn 19,14), ont voulu voir la troisième heure dont parle saint Marc. Ce jour qui était suivi du jour du sabbat, disent-ils, était le jour de la préparation de la pâque des Juifs, parce que la fête des Azymes commençait à ce sabbat. Or, la préparation ou la vigile de la Pâque véritable, non pas de celle des Juifs, mais de celle des chrétiens, qui s'accomplissait dans la passion du Sauveur, avait déjà commencé à partir de la neuvième heure de la nuit, puisque c'est à partir de ce moment que les Juifs se sont préparés à immoler le Sauveur. En effet, le mot parasceve signifie préparation. Ainsi entre la neuvième heure de la nuit jusqu'à celle du crucifiement, vient se placer la sixième heure de la préparation, suivant saint Jean, et la troisième heure du jour d'après saint Marc. Quel fidèle n'adopterait pas cette solution, si quelque chose pouvait nous faire clairement comprendre que c'est à la neuvième heure de la nuit que commença la préparation de notre pâque, c'est- à-dire la préparation de la mort de Jésus-Christ? Dirons-nous que cette préparation a commencé au moment où Jésus fut pris et garrotté par les Juifs? Mais on n'était alors qu'à la première partie de la nuit. Est-ce quand le Sauveur fut conduit à la maison de Caïphe, où il fut interrogé par les princes des prêtres? mais le coq n'avait pas encore chanté. Est-ce quand Jésus fut traduit devant Pilate? mais l'Évangile dit expressément qu'il était alors grand jour. Il n'est donc plus possible de placer la préparation de la mort du Seigneur qu'au moment où tous les princes des prêtres s'écrièrent: «Il est digne de mort», car rien n'empêche d'admettre qu'il pouvait être alors la neuvième heure de la nuit, à la condition toutefois de placer auparavant le renoncement de Pierre que l'Évangéliste ne raconte qu'après, comme par récapitulation.

«Et le titre de sa condamnation était ainsi écrit», etc. - Théophyl. Ils mirent cette inscription pour apprendre à tous la cause de son crucifiement. Ils condamnaient ainsi publiquement le sentiment de Jésus qui se disait roi, ils étouffaient tout sentiment de compassion dans l'âme des passants, et les excitaient à insulter bien plutôt le Sauveur comme un tyran. - S. Jér. Ils écrivirent cette inscription en trois langues, en hébreu: Maleck Jeoudim; en grec: Basileus exomologeton; en latin: Rex confitentium. Ces trois langues furent consacrées dans l'inscription de la croix, afin que la perfidie des Juifs fût publiée dans toutes les langues que ces trois représentaient. - Bède. Cette inscription, placée au haut de la croix, prouve que les Juifs, en mettant Jésus à mort, n'ont pu se délivrer de l'avoir pour roi qui leur rendra selon leurs oeuvres.

«Ils crucifièrent aussi avec lui deux voleurs», etc. - Théophyl. Afin de donner ainsi de lui au peuple une mauvaise opinion et de le faire passer pour un voleur et un malfaiteur. Mais Dieu permit ce nouvel outrage pour accomplir l'oracle de l'Ecriture: «Ainsi fut accomplie cette parole de l'Ecriture: Il a été mis au rang des criminels». - S. Jér. La vérité est confondue avec les scélérats; elle en laisse un à gauche, elle prend et sauve celui qui est à sa droite; c'est ce qu'elle doit faire encore au jour du jugement. Quel sort bien différent, après des crimes semblables? l'un précède Pierre dans le paradis, l'autre Judas dans l'enfer. Une confession rapide obtient à l'un une vie éternelle, et le blasphème qui expire sur les lèvres de l'autre, est puni d'un supplice sans fin.

Bède. Les deux voleurs crucifiés avec Notre-Seigneur sont la figure de ceux qui, pour professer la foi et le nom de Jésus-Christ, se dévouent aux épreuves du martyre, ou embrassent la pratique sévère d'une vie mortifiée. Ceux qui ne se proposent en cela que la gloire éternelle, sont figurés par la foi du voleur qui est à droite; ceux au contraire qui n'ont en vue que la gloire qui vient des hommes imitent les sentiments et les actes du voleur qui est à gauche. - Théophyl. Ou bien encore, ces deux voleurs représentent les deux peuples, les Juifs et les Gentils, tous deux coupables d'iniquité, pour avoir transgressé, les Gentils, la loi naturelle; les Juifs, la loi écrite que le Seigneur leur avait donnée. Mais le peuple des Gentils se repent, tandis que le peuple juif blasphème jusqu'à la fin, et c'est au milieu de ces deux peuples que le Seigneur est crucifié, car il est la pierre angulaire qui nous réunit (Ep 2,14).



vv. 29-32

7529 Mc 15,29-32

S. Jér. L'ânon de la Judée, étant lié à la vigne, et son manteau rougi dans le sang du raisin, les chevreaux déchirent la vigne, ils blasphèment le Christ et branlent la tête: «Et les passants le blasphémaient en branlant la tête», etc. - Théophyl. Les passants blasphèment Jésus-Christ et l'accablent d'outrages comme un séducteur. C'est le démon qui les poussait à l'engager à descendre de la croix. Il savait que c'est la croix qui devait sauver le monde, il revenait donc tenter de nouveau Jésus-Christ; s'il descendait de la croix, il serait évident qu'il n'était pas véritablement le Fils de Dieu, et ainsi toute espérance de salut par la croix était anéantie. Mais Jésus, vrai Fils de Dieu, ne descendit pas de la croix. S'il avait dû en descendre il n'y serait pas monté, mais il savait que c'était là le moyen choisi de Dieu pour sauver le monde, il se dévoua donc aux souffrances de la croix et à mille autres outrages pour accomplir son oeuvre. «Et les princes des prêtres disaient aussi: Il a sauvé les autres, il ne peut se sauver lui-même», etc. En parlant ainsi, ils voulaient anéantir la vérité de ses miracles et les faire passer pour imaginaires; car en effet, Jésus avait sauvé un grand nombre par ses miracles. - Bède. Ils sont forcés d'avouer malgré eux qu'il a sauvé les autres. Vous êtes donc condamnés par vos propres paroles, car celui qui a sauvé les autres, peut également se sauver lui-même.

«Que le Christ, le roi d'Israël descende de la croix, afin que nous voyions et que nous croyions». - S. Jér. Ils virent bientôt sortir du sépulcre celui qu'ils ne croyaient pas pouvoir descendre de la croix. O Juifs ! où ira donc se réfugier votre incrédulité? Je vous prends à témoins, j'en appelle à votre jugement. N'est-il pas mille fois plus admirable qu'un mort puisse ressusciter, qu'il ne le serait qu'un homme vivant encore voulût descendre de la croix? Vous avez peu demandé, on vous a donné beaucoup; mais ces prodiges mille fois plus éclatants que ceux que vous demandez n'ont pu guérir votre incrédulité; ils se sont tous détournés de la vérité, ils sont devenus inutiles.

«Et ceux qui avaient été crucifiés avec lui l'outrageaient de même». - S. Aug. (De l'acc. des Evang., 3, 16). Mais comment admettre ici la vérité du récit de saint Marc, alors qu'au témoignage de saint Luc, un seul de ces voleurs outragea le Sauveur, tandis que l'autre voulait l'en empêcher et crut en Dieu. La seule réponse à faire, c'est que saint Matthieu et saint Marc, insistant peu sur ce détail, ont employé le pluriel pour le singulier. - Théophyl. Ou bien tous deux commencèrent par l'accabler d'outrages, et puis l'un deux reconnaissant son innocence, reprocha à son compagnon les blasphèmes qu'il vomissait contre lui.


vv. 33-38

7533 Mc 15,33-38

Bède. L'astre brillant du jour voila ses rayons pour ne pas voir le Seigneur attaché à la croix, ou pour ne pas laisser jouir de sa lumière ces impies blasphémateurs: «A la sixième heure du jour, les ténèbres se répandirent sur toute la terre jusqu'à la neuvième». - S. Aug. (De l'acc. des Evang., 3, 17) Saint Luc indique la cause de ces ténèbres, c'est-à-dire l'obscurcissement du soleil. - Théophyl. Si c'eût été le temps régulier pour une éclipse, on pourrait dire que cette obscurité était naturelle, mais on était alors au quatorzième jour de la lune, époque où selon les lois ordinaires, une éclipse n'est pas possible.

«Et à la neuvième heure, Jésus jeta un grand cri, en disant: Ëloï ! Eloï !» etc. - S. Jér. C'est à la neuvième heure que la maison a été balayée, que la drachme qui était perdue est retrouvée (Lc 15,8). - Bède. Lorsque Adam eut péché, il est écrit (Gn 3) qu'il entendit la voix de Dieu, qui se promenait dans le paradis à l'heure du jour où la brise s'élève; or, ce fut à l'heure que le premier Adam fit entrer par son péché la mort dans le monde, que le second Adam détruisit par sa mort l'empire de la mort. Il est encore à remarquer que le Seigneur a été crucifié lorsque le soleil s'éloigne du centre du ciel, et qu'il a célébré le mystère de sa résurrection lorsque le soleil se lève, parce qu'il est mort pour nos péchés et qu'il est ressuscité pour notre justification (Rm 4,25). Ne soyez point surpris de l'humilité de ses paroles, de ce qu'il se plaigne d'être abandonné; la forme de serviteur qu'il a prise, vous le savez, est la cause du scandale de la croix. La faim, la soif, la fatigue, n'étaient pas les propriétés de sa divinité, mais les infirmités de la nature humaine; ainsi ce cri: «Pourquoi m'avez-vous abandonné»; c'est la plainte du corps, parce que le corps a une horreur souveraine et naturelle pour sa séparation d'avec la vie qui lui est unie. Sans doute, c'est le Sauveur lui-même qui parle ici, mais eu égard à la faiblesse de son corps, il parle comme homme et laisse la nature humaine en proie à ces agitations qui nous font craindre à nous-mêmes que Dieu nous abandonne au milieu des dangers. - Théophyl. Ou bien, c'est au nom de l'humanité, que le Sauveur crucifié adresse cette plainte à Dieu, car nous autres hommes, nous sommes abandonnés, mais pour, lui, il n'a jamais été abandonné de son Père. Ecoutez, c'est lui-même qui l'atteste: «je ne suis pas seul, mais mon Père est avec moi (Jn 8). Ou bien encore, il parle ici au nom des Juifs qu'il représentait comme juif par sa naissance, et il semble dire: Pourquoi avez-vous abandonné le peuple hébreu, et l'avez-vous laissé crucifier votre Fils? Nous disons quelquefois: Dieu s'est revêtu de moi, c'est-à-dire, de ma nature humaine; ainsi nous devons entendre ces paroles: «Pourquoi m'avez-vous abandonné» de la nature humaine ou du peuple juif.

«Quelques-uns de ceux qui étaient présents, l'ayant entendu, disaient: Il appelle Elie». - Bède. Ce furent, à mon avis, des soldats romains, qui ne comprenaient point la langue hébraïque, et qui entendant crier Eloï, s'imaginèrent qu'il appelait Elie. Si vous voulez au contraire que ce soient les Juifs, ils interprètent ainsi le cri du Sauveur, pour insulter à sa faiblesse, qui implore le secours d'Elie: «Et l'un d'eux courut emplir une éponge de vinaigre», etc. Saint Jean explique plus au long la raison pour laquelle on présenta du vinaigre à Jésus sur la croix: «Afin que les Écritures fussent accomplies, Jésus dit: J'ai soif; les soldats emplirent une éponge de vinaigre, et la présentèrent à sa bouche» (Jn 19,28-29). - S. Jér. C'est ici un symbole de ce qu'étaient les Juifs; ils emplissent de vinaigre, c'est-à-dire, de malice et de ruse, une éponge qu'ils placent au bout d'un roseau fragile, sec, destiné au feu. - S. Aug. (De l'acc. des Evang., 3, 17). D'après saint Matthieu, ce n'est pas celui qui présenta l'éponge remplie de vinaigre qui interpréta ainsi les paroles du Seigneur, mais les autres qui étaient présents, d'où nous pouvons conclure que tous ont tenu ce langage.

S. Jér. Au moment où la chair s'affaiblit, la voix divine fait éclater sa puissance, cette voix qui dit par la bouche du Psalmiste: «Ouvrez-moi les portes de la justice» (Ps 117) «Jésus ayant jeté un grand cri, expira». Nous qui sommes de la terre, nous n'avons en mourant qu'un reste de voix où la parole même expire sur nos lèvres, mais celui qui vient du ciel a jusqu'à la mort toute la puissance de sa voix. - Théophyl. Celui qui tient la mort sous ses lois et qui lui commande, meurt aussi comme le maître de la mort. Or, quel fut ce cri que Jésus fît entendre? Saint Luc nous l'apprend: «Mon Père, je remets mon âme entre vos mains». Il a voulu par là nous apprendre que les âmes des saints s'élèvent dans les mains de Dieu, elles qui étaient retenues dans les enfers avant l'avènement de celui qui est venu annoncer aux captifs leur délivrance.


vv. 39-41

7539 Mc 15,39-41

La Glose. Après avoir raconté la passion et la mort du Sauveur, l'Évangéliste passe au récit des événements qui suivirent sa mort: «Et le voile du temple se déchira en deux», etc. - S. Jér. Le voile du temple qui se déchire, c'est le ciel qui s'ouvre. - Théophyl. Dieu permit que le voile se déchirât, afin de signifier que la grâce de l'Esprit saint s'éloignait et se séparait du temple pour découvrir aux yeux de tous les secrets du saint des saints, et aussi que le temple serait dans la désolation, lorsque les Juifs déploreront leur malheur et déchireront leurs vêtements. Ce voile est aussi le symbole de ce temple vivant du corps de Jésus-Christ qui, dans sa passion, vit ses vêtements, c'est-à-dire son corps déchiré. Il a encore une autre signification; notre chair est le voile de notre temple, c'est-à-dire, de notre âme. Or, la puissance de la chair dans la passion de Jésus-Christ, a été déchiré et détruit du haut en bas, c'est-à-dire, depuis Adam jusqu'au dernier rejeton de sa postérité. En effet, Adam est sauvé par la passion de Jésus-Christ, sa chair ne demeure plus sous la malédiction, elle n'est plus sujette à la corruption, mais elle reçoit en même temps le don de l'incorruptibilité.

«Or le centurion voyant», etc. Le centurion est l'officier qui commandait à cent hommes. A la vue de Jésus expirant avec tant de puissance et d'autorité, il est dans l'admiration et confesse sa divinité. - Bède. L'Évangile nous fait connaître clairement la cause de l'étonnement du Centurion, c'est qu'ayant vu le Seigneur mourir de la sorte, il s'écria: «Cet homme était vraiment le Fils de Dieu». Car le Créateur des âmes a seul, à l'exclusion de tout autre, le pouvoir de remettre son âme. - S. Aug. (De la Trin., 4, 13). Ce qui étonna surtout le Centurion, c'est qu'après ce grand cri qui était comme l'expression figurée de notre péché, il expira aussitôt. L'esprit du Médiateur nous apprenait ainsi que la mort de son corps n'était la suite d'aucun péché, qu'il ne s'en séparait point malgré lui, mais quand il le voulut, parce qu'il était uni au Verbe de Dieu en unité de personne. - S. Jér. Les derniers sont maintenant devenus les premiers, les Gentils confessent Jésus-Christ, les Juifs aveugles le renient, et leur erreur devient pire que la première. - Théophyl. L'ordre naturel se trouve ainsi renversé, les Juifs mettent à mort celui que les Gentils reconnaissent comme Dieu, ses disciples s'enfuient, et les pieuses femmes persévèrent.

«Il y avait aussi là des femmes», etc. Celle qui est appelée Salomé, est la mère des enfants de Zébédée. - Orig. (Traité 35 sur S. Matth). Le récit comparé de saint Matthieu et de saint Marc, m'amène à penser qu'il est ici question de trois femmes principales; deux d'entre elles sont désignées par les deux Évangélistes, Marie-Madeleine et Marie, mère de Jacques; la troisième est appelée par saint Matthieu, la mère des enfants de Zébédée, et par saint Marc, Salomé. - Bède. Saint Marc appelle Jacques le Mineur, Jacques, fils d'Alphée, on l'appelait aussi frère du Seigneur, parce qu'il était fils de Marie, tante du Sauveur, dont saint Jean fait mention: «Debout, près de la croix de Jésus, étaient sa mère et la soeur de sa mère, Marie, femme de Cléophas, et Marie-Madeleine» (Jn 19). Or, l'une de ces femmes est appelée Marie de Cléophas, ou comme fille de Cléophas, ou du nom de sa famille. Jacques le Mineur est ainsi appelé pour le distinguer de Jacques le Majeur, fils de Zébédée, qui a été un des premiers que le Seigneur a choisi pour ses Apôtres. C'était chez les Juifs une coutume consacrée par les moeurs antiques, et que personne ne songeait à blâmer, que les femmes prissent soin de fournir de leur bien, la nourriture à ceux qui les instruisaient, c'est ce que saint Marc rappelle ici: «Elles le suivaient lorsqu'il était en Galilée, et l'assistaient de leur bien». Elles assistaient le Seigneur de leur avoir, et lui permettaient ainsi de moissonner leurs biens matériels, alors qu'elles moissonnaient elles-mêmes ses grâces spirituelles. Notre-Seigneur voulait ainsi donner l'exemple à ceux qui devaient enseigner l'Évangile, et leur apprendre à se contenter de la nourriture et du vêtement qu'ils recevraient de leurs disciples. Mais voyons quelles étaient celles qui les accompagnaient: «Et plusieurs autres qui étaient venues avec lui à Jérusalem». - S. Jér. De même que la femme est associée au salut du monde dans la personne de la Vierge Marie; ainsi Dieu la rattache à la science du mystère de la croix et de la résurrection dans Marie-Madeleine, qui est veuve, et dans les autres mères qui l'accompagnent.



vv. 42-47

7542 Mc 15,42-47

La Glose. Après le récit de la passion et de la mort de Jésus-Christ, l'Évangéliste raconte ce qui concerne sa sépulture: «Le soir étant venu, comme c'était le jour de la préparation», etc. - Bède. Le mot grec parasceve, veut dire en latin proeparatio, préparation. Les Juifs qui habitaient parmi les Grecs, donnaient ce nom au sixième jour de la semaine, parce qu'on préparait dans ce jour tout ce qui était nécessaire pour assurer le repas du jour de sabbat. C'est le sixième jour que l'homme a été créé, et c'est le septième que le Créateur s'est reposé de toutes ses oeuvres; c'est aussi le sixième jour que le Sauveur attaché à la croix, accomplit le mystère de la réparation du genre humain, et le septième il se repose dans le tombeau en attendant sa résurrection qui devait avoir lieu le huitième jour. Ainsi, pendant l'âge actuel de cette vie, nous devons être nous-mêmes crucifiés au monde; et le septième jour, lorsque chacun de nous aura payé son tribut à la mort, nos corps reposeront dans le tombeau, tandis que nos âmes, après une vie de bonnes oeuvres, se reposeront dans la paix intime de Dieu, en attendant qu'au huitième âge nos corps glorifiés avec nos âmes, reçoivent par leur résurrection le don de l'incorruptibilité.

«Joseph d'Arimathie, qui était très-considéré», etc. Il était convenable que ce fût un homme de ce mérite qui ensevelît le corps de Jésus; qui par la grandeur de ses vertus, fût digne de lui rendre ce devoir, et par le crédit que lui donnait sa haute position dans le monde, pût en obtenir l'autorisation; c'est pour cela que l'Évangéliste nous fait remarquer que c'était un homme de considération et du grand conseil, et qui lui aussi attendait le royaume de Dieu. On appelait décurion celui qui faisait partie du conseil et qui remplissait les fonctions de conseiller ou de sénateur; on lui donnait aussi le nom de magistrat municipal, à cause des emplois civils qu'il remplissait. Arimathie est la même ville que Ramata, patrie de Samuel et d'Helcana (1R 1). Arimathie signifie qui détache, et Joseph, qui vint pour détacher le corps de Jésus de la croix, sort de cette ville.

«Il vint hardiment trouver Pilate, et lui demanda le corps de Jésus». - Théophyl. La demande qu'il fait est aussi digne d'éloges qu'elle est hardie. Il ne se dit pas à lui-même: Je perdrai mes richesses, je serai banni par les Juifs, si je demande le corps de celui qui a été condamné comme un blasphémateur: «Pilate s'étonnant qu'il fût mort si tôt», etc. Il pensait que sa vie devait se prolonger plus longtemps sur la croix comme celle des voleurs qu'on y suspendait et qui ne mouraient pas sitôt: «Il fit donc venir le centenier et lui demanda s'il était déjà mort», c'est-à-dire avant le temps où les autres criminels rendaient ordinairement le dernier soupir: «Le centenier l'en ayant assuré, il donna le corps à Joseph». - Bède. Un homme inconnu ou dans une position ordinaire, n'aurait pas osé se présenter chez le gouverneur, et n'en aurait pas obtenu le corps d'un crucifié.

«Joseph ayant acheté un linceul, enveloppa le corps», etc. - Théophyl. Il ensevelit dans un linceul de grand prix un corps aussi précieux, car il était disciple du Seigneur, et il savait avec quel honneur il fallait traiter son divin corps. - Bède. Nous pouvons aussi, dans un sens spirituel, conclure de cet exemple que le corps du Seigneur ne doit pas être enveloppé dans l'or, dans les pierres précieuses et dans la soie, mais dans un linge d'une blancheur éclatante. C'est de là qu'est venu l'usage dans l'Eglise, d'offrir le sacrifice de l'autel, non sur la soie, ni sur une étoffe de couleur, mais sur un tissu de lin qui vient de la terre, en souvenir du corps du Seigneur, qui a été enseveli dans un linceul blanc, comme l'a ordonné par un décret pontifical, le bienheureux pape Sylvestre. Joseph, qui enveloppe le corps de Jésus dans un linceul blanc, est aussi la figure de celui qui le reçoit dans un coeur pur: «Et il le mit dans un sépulcre». Le monument du Sauveur était, dit-on, une cellule de forme ronde, et taillé dans une roche qui se trouvait au-dessous. La hauteur de ce monument était si grande, qu'un homme debout pouvait à peine en toucher la voûte avec la main. On y entrait du côté de l'Orient, et on y roula une grande pierre sur la partie qui regarde le Nord. Le tombeau proprement dit, où fut déposé le corps du Seigneur était creusé dans le même roc, il avait sept pieds de long, s'élevait de trois palmes au-dessus du sol, il était ouvert sur toute sa longueur, non par dessus, mais du côté du Midi, et c'est par cette ouverture que l'on introduisait le corps. La couleur du monument et du tombeau était un mélange de rouge et de blanc. - S. Jér. C'est par la sépulture du Christ que nous ressuscitons, c'est par sa descente aux enfers que nous montons aux cieux; c'est là que nous trouvons véritablement le miel dans la gueule du lion mort (Jg 14,8).

Théophyl. Imitons nous aussi, la conduite de Joseph en recevant le corps de Jésus-Christ dans le sacrement de l'unité, et déposons-le dans un monument taillé dans le roc, c'est-à-dire, dans une âme qui ne perd jamais le souvenir de Dieu; une telle âme est comme taillée dans le roc, c'est-à-dire, dans Jésus-Christ, qui est la pierre, parce qu'il est le principe de toute fermeté. Nous devons aussi envelopper ce divin corps dans un linceul blanc, c'est-à-dire, le recevoir dans un corps pur, car le linceul est l'emblème du corps qui est le vêtement de l'âme, et l'honneur dû au corps de Jésus-Christ, exige que nous le recevions, non seulement dans une âme innocente, mais dans un corps exempt de toutes souillures. Il faut de plus envelopper le corps et ne pas le laisser à découvert, c'est un secret qu'il faut tenir soigneusement fermé et caché.

«Cependant Marie-Madeleine et Marie, mère de Joseph, regardaient où on le mettait». - Bède. Nous lisons dans saint Luc, que tous ceux qui connaissaient Jésus, et les femmes qui l'avaient suivi, regardaient de loin ce qui se passait (Lc 23,49). Or, tandis que les amis de Jésus regagnent leurs demeures après que Jésus fut descendu de la croix, les saintes femmes seules, qui l'avaient aimé plus tendrement, suivent ses funérailles, elles remarquent avec soin le lieu où on le déposait, afin de pouvoir lui offrir, en temps convenable, l'hommage de leur piété. Or, le jour de la préparation de la pâque, les saintes femmes, c'est-à-dire, les âmes humbles, accomplissent le même devoir, lorsque brûlantes d'amour pour le Sauveur, elles suivent fidèlement les traces de sa passion, dans le cours de cette vie où elles préparent le repos de l'éternité. Elles s'appliquent aussi avec une pieuse curiosité à méditer l'ordre et les circonstances de sa passion, afin de voir comment elles peuvent l'imiter. - S. Jér. Tous ces détails de la sépulture du Sauveur peuvent aussi s'appliquer au peuple juif, qui doit embrasser la foi à la fin du monde. Ennobli par la foi, il redevient fils d'Abraham, il recouvre l'espérance, il attend le royaume de Dieu; il entre dans l'assemblée des chrétiens pour recevoir le baptême, ce qui est figuré par le nom de Pilate (c'est-à-dire, forgeron), qui dompte les peuples les plus durs, et les gouverne avec un sceptre de fer. Il demande le sacrifice qui est donné comme viatique aux pénitents à la fin de leur vie; il l'enveloppe dans un coeur pur (1Tm 1,5) et mort au péché, il le dépose dans un lieu fortifié par la foi, le recouvre avec l'espérance par les oeuvres de la charité (car la fin du précepte est la charité). Cependant les élus qui sont comme les étoiles de la mer, regardent de loin, alors que les élus eux-mêmes seront scandalisés, si cela était possible.


Catena Aurea 7521