Catherine, Dialogue 27

CHAPITRE XI Comment ce pont est construit en pierres, qui signifient les vertus: sur le pont se trouve une hôtellerie,

27 où l'on donne la nourriture aux voyageurs. Qui passe sur le pont va à la vie, qui s'engage dessous va à la perdition et à la mort.

Ce pont est construit en pierres, afin que la pluie, qui peut survenir, n'arrête point les passagers. Sais-tu quelles sont ces pierres? Ce sont les pierres des vraies et solides vertus. Ces pierres n'étaient pas entrées en construction avant la passion de mon Fils: aussi, nul ne pouvait-il parvenir à sa fin, quelque fidélité qu'il mît par ailleurs à suivre la voie de la vertu, parce que le ciel n'avait pas été ouvert avec la clef du sang.
La pluie de la justice interceptait le passage.
Mais après que les pierres furent taillées et posées sur le corps du Verbe, mon doux Fils, qui, comme je t'ai dit, est le pont, pour les lier entre elles, il détrempa la chaux avec son sang. Oui, le sang est mélangé avec la chaux de la Divinité, avec la force et le feu de la charité (
Ep 2,20-22). Par ma puissance, ces pierres des vertus entrèrent dans une construction qui repose sur lui-même; car il n'est aucune vertu qui n'ait son fondement en lui; toutes sont éprouvées en lui, et toutes ont vie par lui. Aussi bien,(91) nul ne peut avoir de vertu ne communiquant la vie de la grâce, sinon par lui, en suivant ses traces et sa doctrine (Jn 15,5 Ac 4,12). C'est lui qui a édifié les vertus, qui les a posées comme des pierres vivantes et cimentées par son sang, afin que tout fidèle pût passer à l'aise, sans aucune crainte servile d'être arrêté par la pluie de la justice divine, couvert qu'il est par la miséricorde, cette miséricorde descendue du ciel, par l'Incarnation de mon Fils. Et comment ouvre-t-on le ciel? Avec la clef de son sang.
Ainsi, tu vois comment le pont est construit, et abrité par la miséricorde. Sur ce pont, se trouve l'hôtellerie, dans le jardin de la sainte Eglise, qui possède et distribue le Pain de vie et donne à boire le Sang, afin que les passagers qui sont mes créatures, ne tombent pas de fatigue au cours de leur voyage. C'est dans cette pensée que ma charité a ordonné que l'on vous distribuât le sang et le corps de mon Fils unique, vrai Dieu et vrai homme.
Le pont traversé l'on arrive à la Porte qui le termine et fais corps avec lui, et c'est par cette porte que tous doivent entrer (Jn 10,9). N'a-t-il pas dit:"Je suis la Voie, la Vérité et la Vie; qui passe par moi ne chemine pas dans les ténèbres mais à la lumière" (Jn 14,6 Jn 8,12). Et dans un autre endroit, ma Vérité dit encore que nul ne peut venir à Moi sinon par Lui. Et il en est vraiment ainsi. S'il t'en souvient bien, c'est cela même que je t'ai dit et exposé quand j'ai voulu (92) t'indiquer la voie. Donc s'il dit qu'il est la Voie, c'est la vérité même, et je t'ai déjà montré que cette voie est en forme de pont. Il a dit aussi qu'il est la Vérité: quoi de plus réel, puisqu'il ne fait qu'un avec Moi qui suis la Vérité? Qui le suit, marche donc dans le chemin de la vérité et de la vie. Qui suit cette Vérité reçoit la vie de la grâce et ne peut périr de faim: car la Vérité de- vient sa nourriture. Il ne peut non plus tomber dans les ténèbres, parce qu'il est la lumière, pure de tout mensonge. Bien plus, c'est lui qui par la vérité a confondu et détruit le mensonge par lequel le démon séduisit Eve. C'est par ce mensonge que la voie du ciel avait été coupée; mais cette voie, la Vérité l'a rétablie et cimentée par le Sang. Ceux qui marchent en cette voie, sont donc les fils de la Vérité, car ils suivent la Vérité, ils passent par la porte de la Vérité, et ils se trouvent enfin unis en moi avec celui qui est la voie et qui est la porte, mon Fils, Vérité éternelle, Océan de Paix?
Celui qui s'écarte de cette voie prend en dessous, par le fleuve. Cette route n'est pas faite avec des pierres, mais avec de l'eau, et comme l'eau n'a pas de consistance, personne ne peut s'y engager sans se noyer. Cette eau qui se dérobe, ce sont les plaisirs et les honneurs du monde. Ceux qui n'ont pas fondé leur amour sur la pierre (Mt 7,24-27), mais l'ont placé dans les choses créées, par une attache désordonnée, les aimant et les possédant en dehors de moi, les créatures sont, pour eux, l'eau qui s'écoule continuellement. (93)
Et l'homme aussi s'écoule comme le fleuve. Il lui semble que ce soit les choses qu'il aime qui fuient, et cependant c'est lui encore qui incessamment est emporté vers le terme de la mort. Il voudrait bien s'arrêter, fixer sa vie et les choses qu'il aime pour les empêcher de couler! Vains efforts! Ou la mort arrive qui l'enlève à ce qu'il aime, ou ma Providence intervient qui le dépouille, avant le terme, des choses créées. Ceux qui en agissent ainsi suivent le mensonge, ils marchent dans la voie du mensonge, ils sont les fils du démon qui est le père du mensonge (Jn 8,4), et parce qu'ils passent par la porte du mensonge ils reçoivent l'éternelle damnation.
Tu vois donc que je t'ai montré la vérité et le mensonge, je veux dire, ma voie qui est vérité, et celle du démon qui est mensonge. (94)


CHAPITRE XII Comment ce n'est pas sans peine que l'on suit l'une ou l'autre de ces deux voies, celle du pont ou celle du fleuve;

28 et du bonheur que l'âme éprouve à passer par le pont.

Tels sont les deux chemins que l'on peut suivre; et dans chacun d'eux le passage est pénible. Quelle n'est donc pas l'ignorance et l'aveuglement de l'homme! Il persiste à vouloir s'engager dans le chemin de l'eau, alors qu'il trouve devant lui une voie toute prête, qui procure tant de joie à ceux qui la suivent, que toute amertume leur est douce, que tout fardeau leur devient léger (
Mt 11,30).
Bien qu'il soit dans les ténèbres du corps, il y rencontre la lumière, et quoique mortel, il y trouve la vie immortelle, en y goûtant par sentiment d'amour la lumière de l'éternelle Vérité, qui promet de donner le repos à qui se dépense pour Moi. Car je ne suis pas oublieux, Moi! Je connais ceux qui me servent, je suis juste et je rends à chacun suivant ses mérites: toute bonne action est récompensée, toute faute est punie. La joie que ressent celui qui marche dans cette voie, nulle langue ne la peut dire, aucune oreille ne la peut entendre, il n'est point d'oeil qui la puisse voir. Il goûte dès cette vie, et possède déjà le bien qui lui (95) est préparé dans la vie durable (1Co 2,9). Bien fou donc celui qui méprise un si grand bien, et préfère se procurer en cette vie un avant-goût de l'enfer, en passant par la voie d'en dessous, où l'on rencontre bien des peines, sans aucune consolation, et sans aucun bien. Car, par leur péché, ils se privent de Moi qui suis le Bien Souverain et éternel.
Tu as donc raison de gémir, et je veux que toi et mes autres serviteurs soyez en continuelle douleur de l'offense qui m'est faite et preniez en pitié l'ignorance et le malheur de ceux qui m'outragent avec tant d'inconscience. Tu as vu désormais, tu as appris comment est fait ce pont, et que ce pont est vraiment, comme je te l'ai expliqué, la grandeur avec la bassesse (96).


CHAPITRE XIII Comment ce pont, en s'élevant jusqu'au ciel, le jour de l'Ascension, n'a pas cependant quitté la terre.

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Lorsque mon Fils unique retourna vers moi, quarante jours après la résurrection, ce pont s'éleva de terre, c'est-à-dire de la société des hommes, et monta au ciel par la vertu de ma nature divine pour s'asseoir à ma droite, à moi, son Père éternel. C'est ce que l'ange, le jour de l'Ascension, dit aux disciples, qui étaient comme morts parce que leurs coeurs avaient quitté la terre pour suivre au ciel la Sagesse de mon Fils: "Ne demeurez plus là, leur dit-il, puisqu'il est assis désormais à la droite du Père" (
Ac 1,11) .
Une fois qu'il se fut élevé au ciel et qu'il fut retourné à moi son Père, j'envoyai le Maître, c'est-à-dire l'Esprit-Saint, qui vint avec ma Puissance, avec la Sagesse de mon Fils, et avec sa Clémence d'Esprit-Saint. Il ne fait qu'un avec moi le Père et avec mon Fils. Il affermit la voie de la doctrine que ma Vérité laissa dans le monde.
Ainsi, en dérobant aux hommes sa présence, mon (97) Fils leur laissa la doctrine, avec les vertus, pierres vivantes fondées sur cette doctrine, qui est la voie que vous a faite ce doux et glorieux Pont. Il s'employa d'abord, et par ses propres oeuvres, à vous tracer la voie, en vous donnant la doctrine, par ses exemples plus que par ses paroles (Ac 1,1). Il agit avant de parler. La clémence de l'Esprit-Saint confirma cet enseignement en fortifiant l'âme des disciples pour leur faire confesser la Vérité et annoncer cette Voie qui est la doctrine du Christ crucifié. Par eux il convainquit le monde d'injustices et de faux jugements que je t'exposerai dans la suite, plus longuement (Jn 16,8).
Ce que je viens de te dire est pour dissiper toute ténèbre qui pourrait obscurcir la pensée de ceux qui m'écoutent. Ils pourraient dire: Avec ce corps du Christ il a bien été établi un pont par l'union de la nature divine avec la nature humaine; nous le voyons, et c'est bien vrai. Mais ce pont nous a été enlevé, en remontant au ciel. Il était bien une voie, il nous enseignait la vérité par son exemple et par ses oeuvres: mais désormais que nous reste-t-il? Où trouver la voie?
Je te le dis, ou plutôt, je le dirai pour tous ceux qui sont tombés dans cette ignorance. La Voie, c'est sa doctrine elle-même, attestée par les Apôtres, affirmée dans le sang des martyrs, éclairée par la lumière des Docteurs, professée par les Confesseurs, et écrite avec amour par les Evangélistes. Tous concordent en un même témoignage pour confesser la Vérité dans le corps mystique de la sainte Eglise (Ep 4,7-12). (98) Ils sont comme le flambeau placé sur le chandelier (Mt 5,15 Mc 4,21 Lc 8,16) pour montrer la voie de la vérité qui mène à la vie dans la lumière parfaite, comme je t'ai dit. Aussi peuvent-ils t'assurer, pour l'avoir éprouvé en eux-mêmes, que chaque homme a la lumière nécessaire pour connaître la vérité, s'il le veut bien, c'est-à-dire s'il ne veut pas éteindre la lumière de la raison, par un amour égoïste et désordonné. Oui, telle est bien la vérité! Sa doctrine est vraie; elle vous demeure comme une nacelle, pour transporter l'âme au-delà de la mer orageuse et la conduire au port du salut.
Ainsi tout d'abord, je vous ai fait un pont visible qui est mon Fils, quand je l'envoyai vivre parmi les hommes. Puis, quand ce pont visible s'est levé vers le ciel, il est resté parmi vous le pont et le chemin de la doctrine unie pour toujours, comme il a été dit, avec ma Puissance, avec la Sagesse de mon Fils et avec la Clémence de l'Esprit-Saint. Cette Puissance communique la vertu d'agir à qui suit cette voie, la Sagesse lui donne la lumière pour lui faire connaître la vérité, et l'Esprit-Saint lui octroie l'amour qui consumme et détruit tout amour sensuel, pour ne laisser dans l'âme que l'amour des vertus.
Ainsi, de toute manière, par sa présence visible ou par sa doctrine, il est la Voie, la Vérité et la Vie, et cette voie est le pont qui conduit dans les hauteurs du ciel. C'est ce qu'il a voulu faire entendre quand il a dit: "Je suis venu de mon Père et je retourne à mon Père et je reviendrai vers vous" (Jn 16,28), (99) c'est-à-dire mon Père m'a envoyé vers vous et m'a fait votre pont pour que vous puissiez franchir le fleuve et atteindre la vie. Puis il ajoute: je reviendrai vers vous, je ne vous laisserai pas orphelins, je vous enverrai le Paraclet (Jn 14,18 Jn 14,26), comme pour dire, je vous enverrai ma Vérité. Je m'en irai à mon Père et je reviendrai, qu'est-ce à dire, sinon que la venue de l'Esprit-Saint qui est appelé Paraclet, vous montrera plus clairement et vous confirmera que je suis la Voie de la Vérité, par la doctrine que je vous ai donnée. Il a dit qu'il reviendrait et il est revenu en effet, puisque l'Esprit-Saint ne vient pas seul, mais il vient avec ma Puissance à moi le Père, avec la Sagesse du Fils et avec la clémence de l'Esprit-Saint lui-même. Tu vois donc bien qu'il est revenu, non en présence visible, mais par sa vertu, comme je t'ai dit, en affermissant le chemin de la doctrine. Cette route ne peut être endommagée, ni fermée à celui qui la veut suivre; elle est solide, elle est indestructible, car elle procède de moi l'Immuable. Votre devoir est donc de marcher courageusement dans cette voie, sans la moindre hésitation, éclairés que vous êtes, par la lumière de la foi que vous avez revêtue dans le saint baptême.
Je t'ai donc fait voir, en pleine évidence, quel est ce pont visible et quelle est la doctrine qui ne fait qu'une même chose avec lui. J'ai expliqué pareillement à ceux qui l'ignorent, que c'est lui qui a montré cette voie, qui est la vérité même. Je leur ai fait connaître ceux qui l'enseignent; ce sont, ai-je dit, les Apôtres, les Evangélistes, les Martyrs, (100) les Confesseurs et les saints Docteurs établis au dedans de la sainte Eglise comme un flambeau (Mt 5,14-15). J'ai expliqué comment, en retournant à moi, il est revenu vers vous, non par sa présence visible, mais par sa vertu, quand l'Esprit-Saint est descendu sur les disciples. Il ne reviendra plus en présence visible, sinon au jour du jugement, quand il viendra avec ma majesté et en puissance divine, pour juger le monde, rendre le bien aux bons, récompenser de leurs fatigues l'âme et le corps tout ensemble, et rendre le mal de la peine éternelle à ceux qui auront vécu ici bas dans l'iniquité.
Je veux maintenant te faire connaître ce que Moi Vérité, je t'ai promis, en t'expliquant quels sont ceux qui marchent imparfaitement dans cette voie, quels sont ceux qui y progressent parfaitement, et quels sont ceux qui y atteignent à la grande perfection. Je te dirai aussi comment cheminent les méchants, qui par leur iniquité se noient dans le fleuve et n'obtiennent ainsi que supplices et tourments.
Je vous en conjure, mes fils très chers, suivez le chemin du pont; ne prenez pas par en dessous, ce n'est pas là la voie de la vérité; c'est celle du mensonge, où passent les pécheurs pervers dont je te parlerai. Ce sont ces pécheurs pour lesquels je vous demande de me prier, pour lesquels je réclame vos larmes et vos sueurs, afin que de moi ils reçoivent miséricorde (101).


CHAPITRE XIV Comment cette âme, en admiration de la miséricorde de Dieu, raconte plusieurs grâces et bienfaits accordés à la race humaine.

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Alors, cette âme, comme enivrée, ne se pouvait plus contenir et, debout en la présence de Dieu, elle disait: O éternelle miséricorde, qui couvrez les fautes de vos créatures! Je ne m'étonne donc plus que vous disiez de ceux qui sortent du péché mortel pour faire retour à vous: Moi, je ne me souviens plus que vous m'ayez jamais offensé (
Jr 31,34 Ez 18,21-22 He 10,17)! O Miséricorde ineffable, non je ne m'étonne plus que vous disiez cela à ceux qui sortent du péché, quand je vous entends dire de ceux qui vous persécutent: Je veux que vous me priez pour eux afin que je leur fasse miséricorde. O miséricorde qui procède de votre Divinité, Père éternel, et qui gouverne par votre puissance le monde tout entier! C'est par votre miséricorde que nous avons été créés; par votre miséricorde que nous avons été recréés, dans le sang de votre Fils; c'est votre miséricorde qui nous conserve; c'est votre miséricorde qui a mis votre Fils en agonie et l'a abandonné sur le bois de la croix, dans cette lutte de la mort contre la (102) vie et de la vie contre la mort! C'est alors que la Vie a vaincu la mort du péché et que la mort du péché a arraché la vie corporelle à l'Agneau sans tache. Qui resta vaincu? La mort! Quelle en fut la cause? La miséricorde! Votre miséricorde donne la vie, et elle donne la lumière qui nous fait connaître votre clémence pour toute créature, pour les justes et pour les pécheurs.
Au plus haut des cieux, votre miséricorde éclate dans vos saints. Si je regarde la terre, votre miséricorde y abonde. Dans les ténèbres de l'enfer, votre miséricorde luit encore, en n'infligeant pas aux damnés un supplice aussi grand que leurs fautes. Votre miséricorde fait plus douce votre justice! C'est par miséricorde que vous nous avez lavés dans le sang, par miséricorde que vous avez voulu converser avec vos créatures.
O Fou d'amour! Ce n'était donc pas assez de vous incarner, qu'encore vous avec voulu mourir! Ce n'était donc pas assez de mourir, qu'aussi vous êtes descendu aux enfers pour en délivrer les saints Patriarches et accomplir en eux votre vérité et votre miséricorde! Votre bonté en effet, avait promis le bonheur à ceux qui vous servent en vérité, et vous êtes descendu aux limbes, pour tirer de peine ceux qui vous avaient servi et leur rendre le fruit de leurs travaux.
Votre miséricorde vous a poussé à faire plus encore pour l'homme. Vous vous êtes laissé en nourriture, afin de nous fortifier dans notre faiblesse, et pour que notre ignorance, avec un tel souvenir, ne pût (103) perdre la mémoire de vos bienfaits. Voilà pourquoi chaque jour, vous vous donnez à l'homme, en vous représentant à lui, au sacrement de l'autel, dans le corps mystique de la sainte Eglise. Qui donc a fait cela? Votre Miséricorde!
O Miséricorde! Mon coeur devient tout feu à penser à vous! De quelque côté que mon esprit se tourne et se retourne, je ne trouve que miséricorde! O Père éternel, pardonnez à mon ignorance, si je suis assez présomptueuse pour parler devant vous! L'amour de votre miséricorde me sera une excuse devant votre Bonté (104).



2. LE DON DE LA CONFORMITE AU CHRIST


CHAPITRE I De l'indignité de ceux qui passent par le fleuve en dessous du pont;

31 et comment l'âme qui suit cette voie, Dieu l'appelle arbre de mort, qui plonge ses racines en quatre vices capitaux.

Après que cette âme, par ces paroles, eût un peu mis son coeur au large (
Is 60,5 Ps 118 Ps 32) dans la miséricorde de Dieu, elle attendait humblement l'accomplissement de la promesse qui lui avait été faite, et Dieu reprenant son discours lui disait: Fille très chère, tu as parlé devant moi de ma miséricorde, parce que je te l'ai fait goûter, et voir dans la parole que je t'ai dite: "Ce sont ces pécheurs, pour lesquels je vous conjure de me prier!"
Mais sache bien que, sans aucune comparaison possible, ma miséricorde envers vous, est bien plus grande que tu ne le vois. Ta vue est imparfaite, et ma miséricorde est parfaite et infinie, de sorte qu'aucune comparaison ne se (105) peut établir entre l'une et l'autre, sinon celle du fini à l'infini.
Mais j'ai voulu te la faire goûter, cette miséricorde, et aussi la dignité de l'homme telle que je te l'ai exposée plus haut, pour que tu comprennes mieux la cruauté et la bassesse des hommes pervers, qui prennent par le chemin d'en dessous. Ouvre donc l'oeil de ton intelligence, regarde ceux qui volontairement se noient, et vois en quelle indignité ils sont tombés par leurs fautes.
Premièrement ils sont devenus infirmes, par le fait qu'ils ont conçu le péché mortel dans leur esprit; puis ils l'ont enfanté et ont perdu du même coup la vie de la grâce. De même qu'un mort est incapable d'aucun sentiment, et de lui-même ne se peut mouvoir qu'autant qu'il est soulevé et porté par autrui, ainsi ceux qui se sont noyés dans le fleuve de l'amour désordonné du monde, sont morts à la grâce; et parce qu'ils sont morts, leur mémoire n'évoque plus le souvenir de ma miséricorde. L'oeil de leur intelligence ne voit plus, ne connaît plus ma vérité, parce que le sentiment est mort, c'est-à-dire parce que l'intelligence n'a plus en face d'elle, qu'elle-même, avec l'amour mort de la sensualité propre. Leur volonté aussi est morte à ma volonté: car elle n'aime plus que choses mortes. Ces trois puissances étant mortes, toutes leurs opérations soit extérieures soit intérieures sont donc mortes aussi quant à la grâce. En conséquence, il leur est impossible de se défendre contre leurs ennemis ni de s'aider elles-mêmes, sinon pour autant que je les (106) secoure moi-même. Il est bien vrai que ce mort a conservé encore son libre arbitre, et que, tant qu'il demeure en son corps mortel, chaque fois qu'il demande mon aide, il le peut obtenir; mais il ne pourra jamais rien par lui-même. Il est devenu insupportable à lui-même, et en voulant dominer le monde, il a été dominé par cette chose qui n'est pas, par le péché. Le péché est un non être, et ils sont devenus serviteurs et esclaves du péché. J'avais fait d'eux des arbres d'amour par la vie de la grâce qu'ils reçurent au saint Baptême, et ils sont devenus des arbres de mort, parce qu'ils sont morts comme je te l'ai dit plus haut.
Sais-tu où pousse le racine de cet arbre? Dans l'élévation de la superbe que nourrit l'amour égoïste de la propre sensualité. Sa moëlle est l'impatience, la fuite de toute souffrance, et il a un rejeton, qui est l'aveuglement. Tels sont les quatre vices qui tuent l'âme de celui que j'ai appelé un arbre de mort, parce quc'il ne puise pas la vie dans la grâce. A l'intérieur de l'arbre se nourrit le ver de la conscience, mais l'homme le sent peu, tant qu'il vit en péché mortel, aveuglé qu'il est par l'amour-propre. Les fruits de cet arbre sont des fruits de mort, parce qu'ils ont tiré leur sève de la racine de la superbe, et la pauvre âme pleine d'ingratitude. C'est de là que vient tout le mal. Si elle (107) gardait quelque souvenir des bienfaits reçus de moi, elle me connaîtrait moi, et en me connaissant, elle se connaîtrait elle-même et ainsi elle demeurerait dans mon amour; mais elle, aveugle qu'elle est, prend par en bas et s'en va à tâtons par le fleuve, sans s'apercevoir que l'eau fuit et ne l'attend pas (108).


CHAPITRE II Comment les fruits de cet arbre sont aussi variés que le sont les péchés: et tout d'abord le péché de la chair.

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Les fruits de cet arbre qui donnent la mort sont aussi variés que les péchés eux-mêmes. Il en est qui servent de pâture aux bêtes: tels sont ceux que commettent ces hommes qui vont se roulant tout entiers, esprit et corps, dans la fange des voluptés charnelles, à la façon des pourceaux. O âme vile, où donc est ta dignité! Tu avais été faite soeur des anges, te voilà devenue une brute grossière!
Si grande est la misère de ces pécheurs, que non seulement Moi, qui suis la pureté même, je ne les puis souffrir, mais que les démons eux-mêmes dont ils se sont faits les amis et serviteurs, ne peuvent voir commettre tant d'obscénités. Aucun péché n'est plus abominable que celui-là et n'éteint davantage la lumière de l'intelligence. Les philosophes eux-mêmes, - non par la lumière de la grâce qu'ils n'avaient pas, mais par celle que la nature leur donnait, - ont connu que ce péché dégradant obscurcissait l'intelligence, aussi gardaient-ils la chasteté et la continence pour mieux étudier. Et pareillement renonçaient-ils aux richesses, afin que le souci des richesses n'occupât point leur coeur. Ce n'est point ce que fait l'ignorant et faux chrétien qui a perdu la grâce par sa faute (109).


CHAPITRE III De l'avarice et des maux qui en dérivent.

33 Quelques autres produisent un fruit de terre. Ce sont les avares cupides. Ils font comme la taupe qui toujours se nourrit de terre jusqu'à la mort. Quand la mort vient, ils ne trouvent contre elle aucun remède. Ceux-là, avec leur avarice, ravalent mes largesses, en vendant à leur prochain le temps qui n'est qu'à moi. Ce sont les usuriers qui oppriment et volent leur prochain, parce qu'ils n'ont point conservé dans leur mémoire (Mt 18,33), le souvenir de ma miséricorde. S'ils ne l'avaient oubliée, ils ne seraient pas aussi cruels envers eux-mêmes et à l'égard d'autrui: ils useraient de bonté et de miséricorde pour eux-mêmes en pratiquant la vertu, et envers le prochain en venant charitablement à son secours.
Oh! combien grands les maux qui dérivent de ce maudit péché! Combien d'homicides, de larcins, de rapines, de gains illicites, quelle cruauté de coeur, que d'injustices, que de dommages, au préjudice du prochain! Ce péché tue l'âme et la rend esclave des richesses: elle ne se soucie plus désormais d'observer mes commandements. L'avare (110) n'aime personne, sinon par intérêt. Ce vice procède de l'orgueil, et l'orgueil à son tour s'alimente par l'avarice, qui satisfait au besoin de réputation personnelle. Ces deux vices se prêtent ainsi un mutuel appui, et l'on se précipite de mal en pis, par le fait de ce misérable orgueil avide de paraître.
Il est un feu qui toujours répand une vanité de gloire et de vanité de coeur, où l'on se glorifie de ce qui n'est pas à soi. Il est en même temps une souche qui produit plusieurs rameaux, mais dont le principal est le désir d'être compté pour beaucoup, qui pousse à vouoir être plus grand que les autres. Sous l'empire de cette ambition, le coeur cesse d'être sincère et généreux, pour devenir hypocrite et menteur. La langue exprime une chose, quand le coeur en enferme une autre: elle dissimule la vérité, et profère le mensonge, suivant que l'intérêt le demande. Ce vice enfante l'envie, ver intérieur qui sans cesse ronge le coeur, et ne le laisse jouir ni de son propre bien ni de celui d'autrui. Comment, en une pareille bassesse, ces méchants pourraient-ils distraire une part de leur fortune pour le besoin des pauvres, eux qui dérobent celle des autres? Comment retireraient-ils leur âme grossière de cette vilenie, quand ce sont eux-mêmes qui l'y plongent! Parfois même, ils deviennent si inhumains qu'ils ne regardent même pas leurs fils ni leurs parents, quand, encore, ils ne les réduisent pas à la misère.
Néanmoins ma miséricorde les supporte, je ne commande pas à la terre de les engloutir! J'en agis ainsi pour qu'ils reconnaissent leurs fautes (111). Comment donc donneraient-ils leur vie pour le salut des âmes, quand ils refusent de donner de leur argent? Comment donneraient-ils l'amour, quand eux-mêmes se rongent d'envie? O misérables vices qui rabaissent à la terre le ciel de l'âme!
J'appelle l'âme un ciel, parce que ciel je l'ai faite, un ciel où j'habitais d'abord par ma grâce, me cachant en son intérieur, et faisant en elle ma demeure par sentiment d'amour! La voilà maintenant qui m'a quitté, comme une adultère, s'aimant elle-même et les créatures et les choses créées plus que moi. La voilà qui s'est fait d'elle-même son Dieu et ne cesse de me poursuivre (Ac 9,4 Ac 22,7 Ac 26,14) de ses péchés aussi nombreux que variés! Et pourquoi donc? Parce qu'elle ne se souvient plus du bienfait du Sang, répandu avec un si grand amour, un amour de feu (112).


CHAPITRE IV De quelques autres constitués en puissance, et de leur fruit qui est l'injustice.

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Il en est d'autres qui portent haut la tête parce qu'ils sont maîtres et seigneurs, mais qui ne sont dans l'exercice de leur puissance, que les port-étendards de l'injustice: injustice envers moi leur Dieu, injustice envers le prochain, injustice envers eux-mêmes. Injustes ils sont envers eux, parce qu'ils ne s'acquittent pas du devoir qu'ils ont à l'égard d'eux-mêmes, de faire d'eux des hommes vertueux. Injustes ils sont envers moi; car ils sont tenus de rendre louange et gloire à mon nom, et ils me refusent ce devoir d'honneur auquel j'ai droit. Comme des larrons, ils me dérobent ce qui est à moi, pour en faire hommage à leur propre servante, à leur sensualité. Ainsi commettent-ils l'injustice envers moi et envers eux, aveugles et ignorants qu'ils sont, au point de ne pas me connaître en eux, tant ils sont pleins de l'amour d'eux-mêmes.
Ainsi firent les Juifs, et les ministres de la Loi. Ils se laissèrent aveugler par l'envie et par l'amour-propre, et méconnurent la Vérité, mon Fils unique. Voilà pourquoi ils manquèrent au devoir d'accueillir (113) la Vérité éternelle qui était parmi eux, ainsi que ma Vérité le leur affirmait quand elle disait: "Le royaume de Dieu est parmi vous" (
Lc 17,21). Ils ne le connaissaient pas et pourquoi? Parce que, suivant que je l'ai expliqué, ils avaient perdu la lumière de la raison, et dès lors ils ne pouvaient le devoir de rendre hommage et gloire à Moi et à celui qui est une même chose avec Moi (Jn 10,30). Dans leur aveuglement, ils commirent l'injustice de le persécuter et de le couvrir d'opprobres, jusqu'à la mort de la croix.
C'est la même injustice dont se rendent coupables ces grands seigneurs, envers Moi et envers eux-mêmes. Injustes, ils le sont à légard de leur prochain, en vendant la chair de leurs sujets et de quiconque leur tombe entre les mains (114).


CHAPITRE V Comment par ces fautes et par d'autres, l'on se laisse aller à de faux jugements, et de l'indignité dans laquelle on tombe.

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Par ces signes et par d'autres aussi, ils tombent dans de faux jugements, comme je te l'expliquerai plus loin. C'est ainsi que toujours ils se scandalisent de mes oeuvres, qui toutes sont justes, et, en vérité, toutes inspirées par l'amour et par la miséricorde. C'est par ce faux jugement, c'est par le venin de l'envie et de l'orgueil, qu'étaient calomniées et injustement appréciées les oeuvres de mo Fils. C'est l'égarement et le mensonge qui faisaient dire: C'est par la vertu de Belzébuth qu'il agit celui-là (
Mt 12,24)! De même ces méchants, dominés par l'avarice, par l'amour-propre, par l'impureté, par l'orgueil, par l'envie, égarés par la perversité de leur jugement, impatients de toute gêne, aveuglés par tous les autres péchés qu'ils commettent, ne manquent jamais de se scandaliser de moi et de mes serviteurs, estimant que c'est par hypocrisie qu'ils font oeuvres de vertu. Comme leur coeur est corrompu et leur goût vicié, les choses bonnes leur paraissent (115) mauvaises, et ils tiennent pour honnête une vie déréglée.
O aveuglement humain! O homme, comme tu as peu d'égard à ta dignité! Tu étais si grand, et tu t'es fait si petit! De seigneur que tu étais, tu t'es fait esclave, et esclave de la plus vile domination qui se puisse rencontrer, puisque tu t'es fait serviteur et esclave du péché, et que tu es devenu semblable à cette chose même, à qui tu rends tous les services. Le péché n'est pas même une vétille; tu es donc devenu beaucoup moins qu'une vétille! Tu t'es ôté la vie et donné la mort!
Cette vie et cette souveraineté vous furent données par le Verbe, mon Fils unique, le pont de gloire. Vous étiez esclaves du démon et il vous a délivrés de cette servitude. Il s'est fait lui-même esclave, pour vous libérer de l'esclavage; il s'est imposé l'obéissance, pour détruire la désobéissance d'Adam; il s'est humilié lui-même jusqu'à la mort ignominieuse de la croix pour confondre la superbe. Par sa mort, il a expié, détruit tous les vices sans exception, afin que nul ne pût dire: il est tel péché qui n'a pas été puni, qui n'a pas été frappé par le châtiment! Car je te l'ai déjà dit, j'ai fait de son corps une enclume.
Tous les secours ont été donnés aux hommes pour échapper à la mort éternelle, et ils ont méprisé le Sang, ils l'ont foulé aux pieds d'un amour déréglé! Voilà l'injustice, voilà le faux jugement, dont est repris le monde, et dont il sera convaincu au dernier jour du jugement. C'est ce que voulut (116) faire entendre ma Vérité quand elle a dit: J'enverrai le Paraclet qui convaincra le monde d'injustice et de faux jugement (Jn 16,8). Et il fut convaincu, en effet, quand j'envoyai l'Esprit-Saint sur les Apôtres (117).


CHAPITRE VI Où l'on explique la parabole du Christ: "J'enverrai l'Esprit-Saint qui convaincra le monde d'injustice

36 et de faux jugement" (Jn 16,8), et comment l'une de ces réprimandes est continuelle.

Il y a trois condamnations du monde. La première, quand l'Esprit-Saint descendit sur les disciples. Ils furent comme je l'ai dit, fortifiés par ma puissance, éclairés par la sagesse de mon Fils bien-aimé, et reçurent tout don dans la plénitude de l'Esprit-Saint. C'est alors que le Saint-Esprit, qui est Un avec moi et avec mon Fils, accusa le monde par la bouche des Apôtres, avec la doctrine de ma Vérité (Ac 2,22-36). C'est ceux, et tous ceux qui procèdent d'eux, en suivant la vérité qu'ils ont reçue par leur enseignement, qui reprennent le monde. Voilà l'accusation incessante que je porte contre le monde, par la voix de la sainte Ecriture, et par la bouche de mes serviteurs, sur la langue desquels je mets l'Esprit-Saint quand ils annoncent ma Vérité, comme le démon se place sur la langue de ses serviteurs, c'est-à-dire de ceux qui s'engagent dans ce fleuve d'iniquité. Elle est douce cette accusation que j'ai voulue continuelle, à cause du très grand amour que j'ai du salut des âmes (118).
Nul ne peut dire: Je n'ai trouvé personne qui me reprenne, car à tous j'ai manifesté la Vérité; à tous, j'ai appris où est la vertu, où est le vice. Je leur ai fait voir le fruit de la vertu, et les effets pernicieux du vice, pour leur inspirer un amour saint, une sainte crainte, l'amour de la vertu et la haine du vice. Et ce n'est pas par un ange que je leur ai enseigné cette doctrine de Vérité. Ils auraient pu dire: L'Ange est un esprit bienheureux, il ne peut pécher, il ne sent pas comme nous l'aiguillon de la chair, il n'est pas alourdi comme nous par le fardeau d'un corps. Non, je ne leur ai pas laissé cette excuse. Cette doctrine leur a été donnée par ma Vérité, par mon Verbe incarné dans votre chair mortelle. Qui suit donc ces autres qui ont suivi ce Verbe? Des créatures mortelles comme vous, passibles comme vous, éprouvant en elles, comme vous, la lutte de la chair contre l'esprit? C'est Paul, mon héraut (2Co 12,7), et c'est la multitude de mes saints, qui tous, pour une chose ou pour une autre, ont été des passionnés.
Les passions, je les permettais et je les permets toujours, pour l'accroissement de la grâce et le progrès de la vertu dans les âmes. Ainsi donc, les saints sont nés du péché comme vous, ils ont été nourris de la même nourriture que vous, et Moi, aujourd'hui comme alors, ne suis-je pas le même Dieu? Ma puissance n'a pas diminué et ne saurait défaillir. Toujours, je puis, je veux, je sais secourir qui fait appel à mon assistance. Alors vraiment l'homme demande mon secours, quand il se dégage (119) des eaux du fleuve, pour prendre le chemin du pont, en suivant la doctrine de ma Vérité.
Les hommes sont donc sans excuse, puisque mes réprimandes n'ont point de relâche et que continuellement je leur fais voir la vérité. S'ils ne se corrigent pas pendant qu'il en est temps encore, ils seront condamnés dans la seconde accusation, que je lancerai contre eux, au dernier instant de la mort, quand ma justice leur criera: Morts, levez-vous et venez au jugement! Surgite mortui, venite ad judicium. (Mi 6,1) C'est-à-dire: Toi qui es mort à la grâce et vas mourir à la vie corporelle, lève-toi, viens comparaître devant le souverain Juge, avec ton injustice, avec ton faux jugement, avec la lumière éteinte de la foi, cette lumière que tu as reçue toute allumée dans le saint baptême et que tu as étouffée par le vent de l'orgueil et de la vanité du coeur. Ton coeur, tu l'as tendu comme une voile à tous les souffles contraires à ton salut! Oui, la voile de l'amour-propre, largement ouverte à tous les vents de la flatterie, tu as descendu le fleuve des délices et des grandeurs du monde, t'abandonnant, bien volontairement, aux séductions de la chair fragile, aux artifices et aux pièges du démon.
En soufflant dans la voile de ta volonté propre, le démon t'a conduit par le chemin d'en dessous, dans le torrent qui ne s'arrête plus, et il t'a entraîné avec lui dans l'éternelle damnation (120).



Catherine, Dialogue 27