1996 Denzinger 3731

Capital et travail

3731
Tout autre est la nature du travail qui est loué à autrui et appliqué à la chose d'autrui. C'est à lui tout particulièrement que convient l'affirmation de Léon XIII disant qu'il est « incontestable » que « les richesses de la cité ne proviennent de rien d'autre que du labeur des travailleurs 1 »...
Il en résulte que lorsque quelqu'un ne travaille pas à une chose qui lui appartient, le travail de l'un et la chose de l'autre doivent s'associer ; en effet aucun des deux ne peut quelque chose sans l'autre. ...

1 Encyclique Rerum novarum, n" 27 (ASS 23 (1890-1891), 657 LÉON XIII, Acta, Rome 11,123).

3732
(Principe directeur pour la juste attribution.)... Les deux [classes sociales] devraient se laisser exhorter par les paroles très sages de notre prédécesseur : « Bien que divisée entre personnes privées, la terre ne cesse pas de servir à l'utilité de tous 1. »...
C'est pourquoi les richesses qui sont augmentées constamment par la croissance économique et sociale doivent être distribuées aux différentes personnes et aux classes des hommes de sorte que soit assurée cette utilité commune de tous louée par Léon XIII, ou, en d'autres termes, que soit gardé intact le bien commun de toute la société. De par cette loi de la justice sociale, il est interdit qu'une classe exclue l'autre de la participation aux gains.

Elle ne viole donc pas moins cette loi, la classe des riches, lorsque dégagée par la fortune de tout souci, elle considère comme juste l'ordre des choses où tout lui revient et rien au travailleur, que ne le fait la classe prolétaire lorsque, exaspérée par les blessures infligées à la justice et trop portée à revendiquer seulement son droit, dont elle est consciente, elle exige tout pour elle-même parce que produit de ses mains, et que pour cela elle cherche à combattre et à abolir la propriété et les revenus ou les gains qui ne sont pas le fruit du travail, quelle que soit leur nature et leur fonction dans la société humaine, pour l'unique raison que c'est là ce qui les caractérise.
On ne peut pas passer sous silence non plus qu'à ce sujet certains se réfèrent hors de propos et sans fondement à l'Apôtre qui dit : « Si quelqu'un ne veut pas travailler, qu'il ne mange pas non plus» (
2Th 3,8-10) ; ce jugement en effet, l'Apôtre le porte sur ceux qui s'abstiennent de travailler bien qu'ils le puissent et qu'ils le doivent, et il avertit de mettre soigneusement à profit le temps et les forces du corps aussi bien que de l'esprit, et de ne pas être à la charge d'autrui lorsque nous pouvons pourvoir nous-mêmes à nos besoins. Mais que le travail soit l'unique titre à recevoir la subsistance ou un revenu, l'Apôtre ne l'enseigne d'aucune manière (voir 2Th 3,8-10).

1 Ibid. n° 7 (ASS 23 (l890-1891). 644 ; LEON XIII, Acta, Rome 11,102).

La juste rétribution du travail

3733
(Le contrat salarial n'est pas de soi injuste.) Et tout d'abord ceux qui affirment qu'un contrat de louage et la rétribution du travail sont injustes par nature et qu'il faut donc y substituer un contrat de société, disent une chose absurde et calomnient notre prédécesseur dont l'encyclique non seulement admet le «contrat salarial», mais s'attache longuement à le régler selon les normes de la justice 1.
Nous pensons cependant que, compte tenu des conditions de la communauté humaine aujourd'hui, il sera plus approprié si, lorsque cela peut se faire, le contrat de travail est tempéré dans une certaine mesure par un contrat de société. ... Ainsi les travailleurs et les employés seront associés à la propriété ou à la gestion, ou auront part d'une certaine manière aux bénéfices obtenus.

1 Sur le salaire, voir encyclique Rerum novarum, n° 34 (ASS 23 [1890-1891], 661 ; LEON XIII, Acta. Rome 11.129).

3734
Or que la juste part du salaire ne doive pas être estimée à partir d'une seule considération, mais de plusieurs, Léon XIII l'avait déjà opportunément affirmé en ces termes : « Pour fixer le salaire de façon équitable, plusieurs raisons doivent être considérées 1»...
(Caractère individuel et social du travail.)... On comprend aisément qu'autant que la propriété, le travail, en particulier celui qui est loué à autrui, outre son caractère personnel et individuel, doit être considéré également en son aspect social ; en effet s'il n'existe pas un corps réellement social et organique, si aucun ordre social et juridique ne protège l'exercice du travail, si les différentes professions qui dépendent les unes des autres ne s'accordent et ne se complètent pas mutuellement, et si — ce qui est plus important — l'esprit, la propriété et le travail ne s'associent pas et ne s'unissent pas en quelque sorte en un, l'activité des hommes ne peut pas produire ses fruits. Elle ne peut donc pas être estimée de façon juste ni être rémunérée de façon équitable si sa nature sociale et individuelle est négligée.

(Trois points à considérer.) Or de ce double caractère que la nature a imprimé au travail humain, résulte des conséquences très importantes, qui doivent régir et déterminer le salaire.

1 Ibid. n° 17 (ASS 23 [1890-1891], 649 ; LÉON XIII, Acta, Rome 11, 111).

3735
(a. La subsistance du travailleur et de sa famille.) Tout d'abord on doit accorder au travailleur un salaire qui suffise à sa subsistance et à celle de sa famille 1. Assurément il est juste que le reste aussi de sa famille contribue selon ses forces à l'entretien commun de tous, comme on peut le voir surtout dans les familles d'agriculteurs, mais également dans un grand nombre de familles d'artisans et de petits commerçants ; mais c'est une injustice d'abuser de l'âge des enfants et de la faiblesse de la femme.
C'est à la maison avant tout, ou dans les environs de la maison, que les mères de famille doivent accomplir leur travail, en vaquant aux affaires domestiques. C'est donc un abus très néfaste, et qu'il faut s'efforcer fermement de faire disparaître, que les mères de famille, à cause de la faiblesse du salaire paternel, se trouvent contraintes d'exercer une activité rémunérée hors de la maison, en négligeant les tâches et les devoirs qui leur sont propres, en particulier l'éducation des enfants. ...

1 Voir PIE XI, encyclique Casti connubii, 31 décembre 1930 (AAS 22 [1930], 587).

3736
(b. Situation de l'entreprise.) Dans la détermination du montant du salaire il faudra également tenir compte de l'entreprise et de celui qui en a la charge ; il serait injuste d'exiger des salaires exagérés que l'entreprise ne pourrait pas supporter sans s'effondrer, et sans entraîner par là un désastre pour les travailleurs. Cependant si par indolence, ou par manque d'engagement, ou par négligence du progrès économique et technique elle fait moins de profit, elle ne peut pas considérer cela comme une juste raison pour réduire le salaire des travailleurs.
Mais si l'entreprise ne recueille pas suffisamment d'argent pour allouer aux travailleurs un salaire équitable, soit parce qu'elle succombe à des charges injustes, soit parce qu'elle est contrainte de vendre ce qu'elle produit à un prix moindre que celui qui est juste, ceux qui la pressent ainsi se rendent coupables d'une grave iniquité ; ils privent en effet de leur juste salaire des travailleurs qui, sous l'empire de la nécessité, sont contraints d'accepter un salaire moindre que celui qui est équitable. ...

3737
(c. Exigences du bien commun.) Enfin le montant du salaire doit être établi compte tenu du bien économique public. Nous avons déjà exposé plus haut combien cela contribue au bien commun si les travailleurs et les employés mettent en réserve la partie du salaire qui reste après les dépenses d'entretien indispensables, et parviennent peu à peu à une modeste fortune ; mais il est autre chose encore, dont l'importance n'est guère moindre, qui ne doit pas être passé sous silence et qui est particulièrement nécessaire de nos jours : à savoir qu'à ceux qui peuvent et veulent travailler soit donnée la possibilité de travailler. ...
Il est donc contraire à la justice sociale que, pour assurer son propre avantage, et en faisant passer au second plan le bien commun, on réduise ou qu'on hausse par trop le salaire des travailleurs ; elle exige en revanche qu'il y ait autant que possible une conjonction des décisions et des volontés, et que les salaires soient déterminés de façon telle que le plus grand nombre possible puisse louer sa force de travail et percevoir des fruits permettant de subvenir à la vie.

L'ordre social juste

3738
Même s'il est vrai... que du fait de l'évolution des conditions, bien des choses ne peuvent être réalisées que par de grandes associations, alors que dans des temps plus anciens elles l'étaient également par de petites, un principe de très grand poids n'en demeure pas moins fermement établi en philosophie morale : de même que ce qui peut être accompli par des hommes en particulier, de par leur propre initiative et leurs propres moyens, ne doit pas leur être arraché et transféré à la communauté, de même ce serait une injustice en même temps qu'un grand dommage et une perturba-:ion du juste ordre des choses que de confier à une collectivité plus grande et plus élevée ce qui peut être effectué et accompli par des communautés plus petites et inférieures ; en effet de par ce qu'elle est et de par sa nature, toute activité sociale doit apporter son aide aux membres du corps social, et elle ne doit jamais les détruire et les absorber. ...
C'est pourquoi les gouvernants doivent être persuadés de ceci : plus parfaitement sera assuré l'ordre hiérarchique entre les divers groupements, grâce au respect de ce principe de la fonction « subsidiaire », plus grandes seront l'autorité et l'efficience sociale, et plus heureux et plus prospère l'état des affaires publiques.

3739
(La coopération des «ordres» [une fois dépassée l'opposition entre «classes» antagonistes].) ... Il est donc nécessaire que la politique sociale s'applique à reconstituer les «ordres». ... Il n'y aura de guérison parfaite que si une fois écartée cette opposition, des membres bien agencés du corps social sont constitués : à savoir des «ordres» dans lesquels es hommes seront insérés non pas selon la position que quelqu'un occupe sur le marché du travail, mais selon les divers rôles sociaux exercés par chacun. Selon la conduite de la nature en effet, il se fait que... ceux qui exercent le même métier ou la même profession — soit économique, soit d'une autre nature — constituent des collèges ou des corporations, de sorte que ces groupements, qui ont leur droit propre, sont considérés par beaucoup sinon comme essentiels à la société civile, du moins comme naturels. ...

3740
(Liberté d'association.) Or de même que les habitants d'une ville ont coutume de fonder aux fins les plus diverses des associations auxquelles il est loisible à chacun d'adhérer ou non, de même ceux qui exercent la même profession forment également de libres associations les uns avec les autres en vue de fins qui se rapportent d'une manière ou d'une autre à la profession exercée. ...
Nous nous contentons de souligner ceci : l'homme a la possibilité et la liberté non seulement de fonder ces associations qui sont de droit et d'ordre privés, mais également d'y « choisir librement le statut et les règles dont on juge qu'ils conduisent au mieux au but qu'on se propose 1». La même liberté doit être affirmée pour l'institution d'associations qui débordent les frontières des diverses professions.

1 Voir encyclique Rerum novarum, n° 42 (ASS 23 [1890-1891], 667 ; LÉON XIII, Acta, Rome 11.138 s.)

3741
(Principe directeur à introduire pour l'économie.) Il faut se soucier d'une autre chose encore, étroitement liée à ce qui précède. De même que l'unité de la société humaine ne peut pas être fondée sur l'opposition des « classes », de même l'ordre juste de l'économie ne peut pas être livré à la libre concurrence des forces.
Bien que la libre concurrence, contenue dans de justes limites, soit chose légitime et certainement utile, elle ne peut diriger totalement l'économie ; ce que les faits ont surabondamment prouvé, depuis qu'on a mis en pratique les principes d'un esprit individualiste faussé. ...
Le pouvoir économique peut d'autant moins exercer le rôle [de principe directeur], qu'il est une force inconsidérée et violente qui... ne peut se diriger par elle-même. Il faut donc des principes plus hauts et plus nobles, par lesquels ce pouvoir soit gouverné de façon rigoureuse et intègre : à savoir la justice sociale et la charité sociale.

Socialisme

3742
Nous proclamons ceci : que le socialisme soit considéré comme une doctrine, ou comme un fait historique, ou comme une action, s'il demeure réellement socialisme, et même après avoir concédé à la vérité et à la justice ce que nous venons de dire, il ne peut pas se concilier avec les dogmes de l'Église catholique ; il tient en effet une conception de la société qui est on ne peut plus étrangère à la vérité chrétienne.

3743
(Il tient des conceptions de la société et du caractère social de l'homme totalement étrangères à la vérité chrétienne.) En effet, selon la doctrine chrétienne, l'homme, doté d'une nature sociale, est établi sur cette terre pour conduire sa vie en société et sous l'autorité établie par Dieu (voir
Rm 13,1), afin de cultiver et de développer pleinement toutes ses facultés à la louange et à la gloire de son Créateur, et afin que, remplissant fidèlement les devoirs de sa profession ou de sa vocation, quelle qu'elle soit, il assure son bonheur à la fois temporel et éternel. Or le socialisme, ignorant complètement cette fin éminente de l'homme ainsi que de la société et s'en désintéressant, affirme que la communauté humaine n'a été instituée qu'en vue du seul bien-être.

3744
(Catholique et socialiste sont contradictoires.) Même si le socialisme, comme toutes les erreurs, contient une part de vérité (ce que d'ailleurs les souverains pontifes n'ont jamais nié), il n'en repose pas moins sur une doctrine concernant la société qui lui est propre, et qui est inconciliable avec le christianisme authentique. Socialisme religieux, socialisme chrétien disent quelque chose de contradictoire : personne ne peut être à la fois un catholique authentique et un socialiste au sens propre du terme.


Réponse de la Sacrée Pénitencerie, 20 juillet 1932.

Le recours exclusif aux périodes infécondes

3748
Éd. : F. Hurth, TD ser. theol. 25 (195 32), 101 s.
Question : Est-elle licite en elle-même, la pratique des époux qui, parce que pour des raisons justes et graves ils préfèrent éviter une descendance de manière honnête, s'abstiennent par consentement mutuel et pour des motifs honnêtes de l'usage du mariage à l'exception des jours où, selon les théories de certains auteurs récents (Ogino-Knaus), il ne peut pas y avoir de conception pour des raisons naturelles ?
Réponse : A été traité par la réponse de la Sacrée Pénitencerie du 16 juin 1880
3148 .



Réponse de la Commission biblique, 1er juillet 1933.

Fausse interprétation de Ps 16,10s, Mt 16,26 ; Lc 9,25

3750 Ps 16,10 s, Mt 16,26 Lc 9,25

Éd. : AAS 25 (1933), 344 ; EnchB n° 513 s.

Question 1: Est-il permis à un catholique, étant donné surtout l'interprétation authentique du Prince des apôtres Ac 2,24-33 Ac 13,35-37 d'interpréter les paroles du Ps 16,10-11 : "Tu ne laisseras pas mon âme dans le séjour des morts et tu ne permettras pas que ton saint voie la corruption. Tu m'as fait connaître les sentiers de la vie", comme si l'auteur n'avait pas voulu parler de la résurrection de notre seigneur Jésus Christ ?
Réponse : Non.

3751
Question 2 : Est-il permis d'affirmer que les paroles de Jésus Christ qu'on lit dans
Mt 16,26 : "Et que sert-il à un homme de gagner le monde entier s'il vient à perdre son âme. Ou que donnera un homme en échange de son âme? ", ainsi que les suivantes, qu'on lit dans saint Luc : " Que sert-il à un homme de gagner le monde entier s'il se ruine ou se perd lui-même ? " Lc 9,25, ne concernent pas, au sens littéral, le salut éternel de l'âme mais seulement la vie temporelle de l'homme, nonobstant la teneur des mots eux-mêmes et leur contexte, comme aussi l'interprétation catholique unanime ?
Réponse : Non.

3755-3758. Encyclique «Ad catholici sacerdotii», 20 décembre 1935.

Éd. : AAS 28 (1936), 10-19.

Les effets de l'ordination

3755
Le prêtre est ministre du Christ : il est donc comme un instrument du divin Rédempteur, pour qu'il puisse continuer à travers le temps son œuvre admirable qui, rétablissant avec l'efficacité d'en haut la totalité de la communauté des hommes, l'a conduite à un culte plus parfait. Il est même, comme Nous pouvons l'appeler à juste titre et solennellement, «un autre Christ», puisqu'il représente sa personne selon cette parole : « De même que le Père m'a envoyé, moi je vous envoie» (
Jn 20,21)...

3756
... Puisque ces pouvoirs, conférés au prêtre par un sacrement particulier, ont leur origine dans une forme indélébile imprimée dans son âme grâce à laquelle, à l'instar de celui au sacerdoce duquel il participe, il est fait « prêtre pour l'éternité» , ils ne sont pas transitoires et passagers, mais stables et perpétuels. Et même si, du fait de la faiblesse humaine, il se trouve dans l'erreur ou s'il a chuté dans une vie déshonnête, jamais il ne pourra effacer cette forme sacerdotale de son âme.De plus... il est doté également d'une grâce nouvelle et particulière ainsi qu'une aide particulière qui lui permettront — dès lors que par son agir coopérant et libre il secondera fidèlement la vertu des dons célestes divinement efficaces — de s'acquitter effectivement de façon digne et d'un cœur intrépide des tâches difficiles du ministère qu'il a reçu. ...

Les prières liturgiques

3757
... Le prêtre enfin — continuant en cela aussi le service de Jésus Christ qui « passait la nuit en prière avec Dieu » (
Lc 6,12), et qui vit toujours pour intercéder pour nous (voir He 7,25) — est de par son office l'intercesseur public auprès de Dieu pour nous ; son mandat est d'offrir à la divinité céleste au nom de l'Église non seulement le sacrifice



Réponse du Saint-Office. 11 août 1936.

Stérilisation

3760
Exposé : ... Une opération chirurgicale qui conduit à une stérilisation n'est pas, certes, une "action intrinsèquement mauvaise pour ce qui est de la substance de l'acte", et elle peut donc être permise du moment qu'elle est nécessaire pour procurer la bonne santé. Mais si elle est accomplie en vue d'empêcher la procréation d'enfants, elle est une "action intrinsèquement mauvaise en raison de l'absence de droit chez celui qui agit", puisque ni un homme privé, ni l'autorité publique, n'ont de pouvoir direct de disposer des membres du corps qui s'étendrait jusque-là.

3761
Cette doctrine, présentée de façon explicite par le souverain pontife, doit être appliquée intégralement à la loi de stérilisation dont il s'agit. Que cette loi destinée à empêcher une descendance handicapée soit édictée pour des raisons purement eugéniques, ou plutôt, pour prévenir des dommages économiques ou d'autres de cette sorte, ne change rien à l'affaire et ne supplée pas à l'absence de droit chez celui qui agit, et c'est pourquoi l'opération de stérilisation qui est prescrite doit être considérée comme intrinsèquement injuste, et elle l'est en effet.

3762
Par conséquent : même si la fin de la loi, qui est de se soucier de la santé et de la vigueur de la descendance, et d'empêcher une descendance handicapée, n'est pas à réprouver, il faut néanmoins réprouver totalement l'objet de la loi, c'est-à-dire le moyen prescrit pour conduire à cette fin.
(En conséquence de cela, le Saint-Office donna cette réponse le 15 juillet 1936 : )

3763
1) Une stérilisation faite à cette fin qui est d'empêcher une descendance, est une action intrinsèquement mauvaise par absence de droit chez celui qui agit ; et c'est pourquoi elle est interdite par la loi naturelle elle- même, qu'elle soit accomplie en vertu d'une autorité privée ou en vertu d'une autorité publique.

3764
2) ... Dans la mesure où elle prescrit soit de demander, soit de réaliser une telle stérilisation, la "Loi visant à empêcher une descendance atteinte d'une maladie héréditaire" est contraire au bien commun véritable, injuste, et ne peut pas créer une obligation en conscience.

3765
3) Approuver cette loi, la recommander ou l'appliquer par sentence judiciaire à des cas particuliers pour que soit réalisée la stérilisation, de même qu'approuver la stérilisation elle-même en vue d'empêcher une descendance..., signifie approuver une chose intrinsèquement mauvaise..., et est pour cette raison immoral et illicite.



Encyclique "Firmissimam constantiam" aux évêques des Etats-Unis du Mexique, 28 m

La résistance contre l'abus du pouvoir étatique

3775
Vous avez enseigné que, même au prix de graves inconvénients pour elle-même, l'Eglise préconise la paix et l'ordre, et qu'elle condamne toute rébellion injuste ou toute violence contre les pouvoirs constitués. D'autre part il a été affirmé également chez vous que si le cas se produit où les pouvoirs eux-mêmes combattent ouvertement la justice et la vérité au point qu'ils détruisent même les fondements de l'autorité, on ne voit pas pourquoi on devrait condamner les citoyens qui s'unissent pour se garder eux-mêmes, et protéger la nation, lorsqu'ils mettent en oeuvre des moyens licites et approuvés contre ceux qui abusent du pouvoir en entraînant la ruine de la vie publique commune.

3776
Même si la solution à apporter à ces questions dépend nécessairement des circonstances concrètes, certains principes doivent être mis en lumière :
1. Les actes de résistance de cette sorte ont le caractère d'un moyen ou d'une fin relative, non celui d'une fin ultime et absolue.
2. En tant que moyens, ils doivent être des actions licites, et non intrinsèquement mauvais.
3. Etant donné qu'ils doivent être aptes et proportionnés à la fin, ils doivent cependant être mis en oeuvre dans la mesure seulement où ils conduisent entièrement ou pour partie à la fin poursuivie, mais de telle sorte qu'ils n'entraînent pas pour la communauté et pour la justice de dommages supérieurs aux dommages qu'on veut réparer.
4. L'usage de ces moyens et le plein exercice des droits civils et politiques cependant, du fait qu'ils englobent également ce qui relève de l'ordre purement temporel et technique ou de la défense par la force, ne concerne pas directement la tâche de l'Action catholique, même s'il lui incombe le devoir d'instruire les hommes catholiques à exercer de façon juste les droits qui leur sont propres et à les défendre des moyens justes, selon ce qu'exige le bien commun.
5. Le clergé et l'Action catholique étant tenus, en vertu de la mission de paix et d'amour qui leur est confiée, d'unir tous les hommes "dans le lien de la paix"
Ep 4,3, ils doivent contribuer au plus haut point à la prospérité de la nation, aussi bien en favorisant grandement l'union des citoyens et des classes, qu'en soutenant toutes les initiatives sociales qui ne sont pas en contradiction avec la doctrine du Christ et la loi morale.



Décret du Saint-Office, 21 (24) février 1940.

Stérilisation

3788
Question : La stérilisation directe, soit perpétuelle, soit temporaire, de l'homme ou de la femme est-elle licite ?
Réponse (confirmée par le souverain pontife le 22 février) : Non ; elle est interdite par le droit naturel, et pour ce qui est de la stérilisation eugénique, elle a déjà été réprouvée par le décret du 21 mars 1931.



Décret du Saint-Office, 27 novembre (2 décembre) 1940.

La mise à mort directe d'innocents sur ordre de l'autorité publique

3790
Question : Est-il licite de tuer directement, sur ordre de l'autorité publique, ceux qui, sans avoir commis aucun crime qui mérite la mort, ne sont pourtant plus en état, par suite de déficiences psychiques ou physiques, d'être utiles à la nation, et qui sont considérés au contraire comme lui étant à charge et comme faisant obstacle à sa vigueur et à sa force?
Réponse (confirmée par le souverain pontife le 1er décembre) : Non, puisque cela est contraire au droit naturel et au droit divin positif.



lettre de la Commission biblique aux évêques d'Italie, 20 août 1941.

Le sens littéral et le sens spirituel de l'Ecriture

3792
(1) L'auteur anonyme, tout en affirmant pour la forme que le sens littéral est "la base de l'interprétation biblique", préconise en fait une interprétation totalement subjective et allégorique... Certes, c'est un énoncé de foi, et à tenir comme un principe fondamental, que la sainte Ecriture contient, outre le sens littéral, un sens spirituel ou typique, comme cela est enseigné par la façon de faire de notre Seigneur et des apôtres ; cependant toute sentence ou tout récit biblique ne contient pas un sens typique, et ce fut un grand excès de l'école alexandrine d'avoir voulu trouver partout un sens symbolique, même au dépens du sens littéral et historique.
Le sens spirituel ou typique, outre qu'il se fonde sur le sens littéral, doit se prouver soit par l'usage de notre Seigneur, des apôtres ou des écrivains inspirés, soit par l'usage traditionnel des saints Pères et de l'Eglise, spécialement dans la liturgie sacrée, parce que "la règle de la prière est la règle de la foi"
246 .
Une application plus large des textes sacrés pourra bien se justifier par un but d'édification dans la prédication et les écrits ascétiques ; mais le sens qui résulte des accommodations les plus heureuses, quand il n'a pas été approuvé comme il est dit ci-dessus, ne peut être dit vraiment et strictement sens de la Bible, ni sens que Dieu a inspiré à l'hagiographe.

3793
L'auteur anonyme, au contraire, qui ne fait aucune de ces distinctions élémentaires, veut imposer les élucubrations de son imagination comme sens de la Bible, comme "la véritable communion spirituelle de la sagesse du Seigneur", et méconnaissant l'importance capitale du sens littéral, il accuse calomnieusement les exégètes catholiques de considérer "seulement le sens littéral" et de le considérer "d'une façon humaine, le prenant seulement matériellement pour ce que les paroles signifient"...
Il rejette de cette façon la règle d'or des docteurs de l'Eglise, formulée si clairement par Thomas d'Aquin : "Tous les sens sont fondés sur l'unique sens littéral, et l'on ne pourra argumenter qu'à partir de lui seul" ; règle que les souverains pontifes ont approuvée et consacrée quand ils ont prescrits, avant tout, de chercher avec tout le soin possible le sens littéral. Ainsi par exemple Léon XIII ... : "C'est pourquoi il faut peser avec soin la valeur des mots eux- mêmes, la signification du contexte, la similitude des passages et autres choses semblables, et associer également les éclaircissements externes par une science appropriée"... (Est cité également le précepte d'Augustin
3284 )
De même également Benoît XV... " Nous voulons considérer par un examen attentif les paroles mêmes de l'Ecriture, pour nous assurer sans nul doute possible de ce qu'a écrit l'auteur sacré ; et il... recommande aux exégètes "de s'élever avec mesure et discrétion jusqu'à des interprétations plus hautes".
Finalement les deux papes... insistent, avec les paroles mêmes de saint Jérôme, sur le devoir de l'exégète : "Le devoir du commentateur est d'exposer non des idées et des intentions personnelles, mais uniquement la pensée, l'idée de l'auteur qu'il commente."

Le sens du décret de Trente concernant l'autorité de la Vulgate.

3794
(2) ... Le concile de Trente a voulu, contre la confusion occasionnée par les nouvelles traductions en latin et en langues vulgaires alors propagées, sanctionner l'usage public dans l'Eglise d'Occident de la version latine commune, en la justifiant par l'usage séculaire qu'en faisait l'Eglise, mais il n'a pas entendu par là diminuer en rien l'autorité des antiques versions employées dans les Eglises orientales, en particulier celle de la Septante utilisée par les apôtres eux-mêmes, et encore moins l'autorité des textes originaux il a résisté à une partie des pères qui voulaient l'usage exclusif de la Vulgate, comme seul texte faisant autorité.
L'anonyme, au contraire, juge que, en vertu du décret du concile de Trente, on possède dans la version latine un texte déclaré supérieur à tous les autres ; il blâme les exégètes de vouloir interpréter la Vulgate à l'aide des textes originaux et des autres versions anciennes. Pour lui le décret donne "la certitude du texte sacré", de sorte que l'Eglise n'a pas besoin "de rechercher encore la lettre authentique de Dieu", et cela non seulement en matière de foi et de moeurs, mais pour toutes les questions (y compris littéraires, géographiques, chronologiques, etc.)...

3795
Or pareille prétention n'est pas seulement contraire au sens commun, qui n'acceptera jamais qu'une version puisse être supérieure au texte original, mais contraire aussi à la pensée des pères du concile telle qu'elle apparaît dans les actes officiels. Le concile fut même convaincu de la nécessité d'une révision et d'une correction de la Vulgate elle-même, et en avait confié l'exécution aux souverains pontifes qui le firent, comme ils firent, conformément aux plus compétents collaborateurs du concile lui-même, une édition corrigée de la Septante,... et ensuite ordonnèrent celle du texte hébreu de l'Ancien Testament et du texte grec du Nouveau Testament...
Et elle contredit ouvertement le précepte de l'encyclique 'Providentissimus': "Nous ne voulons pas dire cependant qu'il ne faudra pas tenir compte des autres versions que les chrétiens des premiers âges ont utilisées avec éloge, et surtout des textes primitifs."

3796
En somme, le concile de Trente a déclaré la Vulgate "authentique" au sens juridique, c'est-à-dire pour tout ce qui concerne la "force probatoire en matière de foi et de moeurs", mais n'exclut pas le fait des divergences possibles d'avec le texte original et les anciennes versions...



Instruction de la Sacrée Pénitencerie, 25 mars 1944.

L'absolution générale

3832
(En vue d'écarter les doutes à propos de la faculté) de donner dans certaines circonstances l'absolution sacramentelle avec une formule générale, c'est-à-dire une absolution sacramentelle collective, sans qu'il y ait eu auparavant de la part de chaque fidèle la confession des péchés, la Sacrée Pénitencerie (déclare):

3833
1. Les prêtres, même s'ils ne sont pas approuvés pour entendre les confessions sacramentelles, ont la faculté d'absoudre d'une façon générale, ensemble et en même temps :
a) En tant que se trouvant en danger de mort, les soldats qui se battent ou sont sur le point de se battre, lorsque, en raison soit de la multitude des soldats, soit du peu de temps, ceux-ci ne peuvent pas être entendus individuellement. Si cependant les circonstances sont telles qu'il paraisse moralement impossible ou extrêmement difficile d'absoudre les soldats au moment du combat ou si celui-ci est imminent, alors il est permis de leur donner l'absolution dès lors qu'on le jugera nécessaire.
b) Les civils et les soldats quand il y a menace prochaine d'un danger de mort durant les incursions ennemies.

3834
2. En dehors des cas où intervient le danger de mort, il n'est pas permis de donner l'absolution sacramentelle à plusieurs fidèles à la fois et en même temps, ni à des fidèles en particulier qui, à cause seulement du grand nombre de pénitents, comme cela peut arriver par exemple un jour de grande de fête ou d'une indulgence à gagner, ne se sont confessés qu'à moitié
2159 ; cela serait cependant permis si vient s'ajouter une autre nécessité, tout à fait grave et urgente, proportionnée à la gravité du précepte divin de l'intégrité de la confession, par exemple si des pénitents, sans faute de leur part, étaient réduits à être privés longtemps de la grâce du sacrement et de la sainte communion. ..

3835
4. (Entre autres choses les pénitents doivent être avertis de ce que) il est nécessaire que ceux qui ont été absous en groupe accusent selon les règles, dès la première confession qu'ils feront, chaque péché grave commis et non encore accusé antérieurement.

3836
5. Que les prêtres instruisent clairement les fidèles qu'il est gravement interdit, quand ils sont tout à fait conscients d'avoir commis un péché mortel, non encore régulièrement accusé et remis en confession, de se soustraire à dessein à l'obligation qui s'impose en vertu de la loi tant divine qu'ecclésiastique, d'accuser en confession tous les péchés mortels commis et chacun d'entre eux, en attendant l'occasion où l'absolution sacramentelle sera donnée à un groupe.

3837
7. Si le temps le permet, cette absolution doit être donnée en employant la formule habituelle complète, mais en la mettant au pluriel ; dans les cas contraires on peut se servir de la formule suivante, plus courte : "Je vous absous de toutes les censures et de tous les péchés au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit."




1996 Denzinger 3731