Ecclesia in Asia FR 18

L'Esprit Saint et la mission de l'Eglise en Asie

18 L'Esprit qui était à l'oeuvre en Asie au temps des Patriarches et des Prophètes, et de manière plus puissante à l'époque de Jésus Christ et de l'Eglise primitive, est maintenant à l'oeuvre chez les chrétiens de l'Asie, affermissant leur témoignage de foi parmi les peuples, les cultures et les religions du continent. De même que le grand dialogue d'amour entre Dieu et l'homme fut préparé par l'Esprit Saint et s'accomplit en terre d'Asie dans le mystère du Christ, de même le dialogue entre le Sauveur et les peuples du continent continue aujourd'hui par la puissance de ce même Esprit Saint, à l'oeuvre dans l'Eglise. Dans ce processus, les Evêques, les prêtres, les personnes consacrées et les laïcs, hommes et femmes, ont un rôle essentiel à jouer, suivant les paroles de Jésus, qui sont à la fois une promesse et une mission: « Vous allez recevoir une force, celle de l'Esprit Saint qui descendra sur vous. Vous serez alors mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu'aux extrémités de la terre » (Ac 1,8).

L'Eglise est convaincue qu'au plus intime des personnes, des cultures et des religions de l'Asie est ressentie une soif d'« eau vive » (cf. Jn 4,10-15), soif que l'Esprit lui-même suscite et que seul Jésus le Sauveur peut apaiser pleinement. Elle se tourne vers l'Esprit Saint pour qu'il continue à préparer les peuples de l'Asie au dialogue salvifique avec le Rédempteur de tous. Guidée par l'Esprit dans sa mission de service et d'amour, l'Eglise peut offrir une rencontre entre Jésus Christ et les peuples de l'Asie, car ils cherchent la plénitude de la vie. C'est seulement dans cette rencontre que l'on peut trouver l'eau vive jaillissant en vie éternelle, à savoir la connaissance de l'unique vrai Dieu et du Christ qu'il a envoyé (cf. Jn 17,3).

L'Eglise sait bien qu'elle ne peut remplir sa mission que si elle obéit aux impulsions de l'Esprit Saint. Appelée à être signe et instrument authentiques de l'action de l'Esprit dans les réalités concrètes de l'Asie, elle doit discerner dans les différentes situations du continent l'appel de l'Esprit à témoigner de Jésus Sauveur sous des formes nouvelles et efficaces. La pleine vérité de Jésus et du salut qu'il nous a mérité est toujours un don et n'est jamais le résultat d'un effort humain. « L'Esprit en personne se joint à notre esprit pour attester que nous sommes enfants de Dieu. Enfants, et donc héritiers; héritiers de Dieu et cohéritiers du Christ » (Rm 8,16-17). C'est pourquoi l'Eglise ne cesse de crier: « Viens, Esprit Saint! Pénètre le coeur de tes fidèles! Qu'ils soient brûlés au feu de ton amour! » Tel est le feu que Jésus fait descendre sur la terre, et l'Eglise en Asie partage l'ardent désir que ce feu soit allumé maintenant (cf. Lc 12,49). Animés de ce désir intense, les Pères synodaux ont cherché à discerner les principaux champs de mission pour l'Eglise en Asie, alors qu'elle se prépare à franchir le seuil du nouveau millénaire.



CHAPITRE IV

JÉSUS, LE SAUVEUR: PROCLAMER LE DON




Le primat de l'annonce

19 A la veille du troisième millénaire, la voix du Christ ressuscité résonne à nouveau dans le coeur de tout chrétien: « Tout pouvoir m'a été donné au ciel et sur la terre. Allez donc, de toutes les nations faites des disciples, les baptisant au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit, et leur apprenant à observer tout ce que je vous ai prescrit. Et voici que je suis avec vous pour toujours jusqu'à la fin des temps » (Mt 28,18-20). Certains du soutien infaillible de Jésus lui-même ainsi que de la présence et de la puissance de son Esprit, les Apôtres commencèrent immédiatement après la Pentecôte à pratiquer ce commandement: « Ils s'en allèrent prêcher en tout lieu, le Seigneur agissant avec eux » (Mc 16,20). Ce qu'ils annonçaient peut se résumer par les paroles de saint Paul: « Ce n'est pas nous que nous prêchons, mais le Christ Jésus, Seigneur; nous ne sommes, nous, que vos serviteurs, à cause de Jésus » (2Co 4,5). Bénie du don de la foi, l'Eglise, après deux mille ans, continue à aller à la rencontre des peuples du monde afin de partager avec eux la Bonne Nouvelle de Jésus Christ. Elle est une communauté enflammée d'ardeur missionnaire pour que Jésus soit connu, aimé et suivi.

Il ne peut y avoir de véritable évangélisation sans annonce explicite que Jésus est le Seigneur. Le Concile Vatican II et, depuis lors, le Magistère, pour répondre à une certaine confusion quant à la vraie nature de la mission de l'Eglise, ont à maintes reprises souligné le primat de l'annonce de Jésus Christ dans toute activité d'évangélisation. Le pape Paul VI a écrit explicitement à ce sujet qu'« il n'y a pas d'évangélisation vraie si le nom, l'enseignement, la vie, les promesses, le Règne, le mystère de Jésus de Nazareth Fils de Dieu ne sont pas annoncés ».66 C'est ce que des générations de chrétiens ont fait au cours des siècles. Avec une fierté bien compréhensible, les Pères synodaux ont rappelé que « de nombreuses communautés chrétiennes en Asie ont préservé leur foi à travers les siècles en dépit de grandes tribulations et sont demeurées attachées à cet héritage spirituel avec une persévérance héroïque. Cet immense trésor est pour elles une source de grande joie et un stimulant ».67

En même temps, les participants à l'Assemblée spéciale ont témoigné maintes et maintes fois de la nécessité d'un engagement renouvelé dans l'annonce de Jésus Christ précisément sur le continent qui a vu le début de cette annonce il y a deux mille ans. Les paroles de l'Apôtre Paul deviennent encore plus actuelles quand on pense aux millions et millions de personnes qui, sur ce continent, n'ont jamais rencontré la personne de Jésus de manière claire et consciente: « Quiconque invoquera le nom du Seigneur sera sauvé. Mais comment l'invoquer sans d'abord croire en lui? Et comment croire sans d'abord l'entendre? Et comment entendre sans prédicateur? » (Rm 10,13-14). La grande question qui se pose actuellement à l'Eglise en Asie est de savoir comment partager avec nos frères et soeurs asiatiques ce que nous conservons jalousement comme le don qui contient tout autre don, à savoir la Bonne Nouvelle de Jésus Christ.

(66) Exhort. apost. Evangelii nuntiandi (8 décembre 1975), n. EN 22: AAS 68 (1976), p. 20; La Documentation catholique 73 (1976), p. 5.
(67) Proposition 8.


Proclamer Jésus Christ en Asie

20 L'Eglise en Asie est très bien disposée à la tâche de l'annonce, sachant qu'« il existe déjà, tant chez les individus que chez les peuples, grâce à l'action de l'Esprit, une attente, même inconsciente, de connaître la vérité sur Dieu, sur l'homme, sur la voie qui mène à la libération du péché et de la mort ».68 Cette insistance sur l'annonce ne vient pas d'un accès de sectarisme ni d'un esprit de prosélytisme, ni du moindre sens de supériorité. L'Eglise évangélise par obéissance au commandement du Christ, sachant que toute personne a le droit d'entendre la Bonne Nouvelle de Dieu, Lui qui se révèle et se donne dans le Christ.69 Rendre témoignage à Jésus Christ est le service suprême que l'Église peut offrir aux peuples de l'Asie, car cela répond à leur recherche profonde d'un absolu et dévoile les vérités et les valeurs qui garantissent leur développement humain intégral.

Profondément consciente de la complexité des situations si différentes en Asie et « vivant selon la vérité et dans la charité » (
Ep 4,15), l'Eglise proclame la Bonne Nouvelle avec une estime et un respect affectueux pour ceux qui l'écoutent. L'annonce qui respecte le droit des consciences ne viole pas la liberté, car la foi demande toujours une libre réponse de la part des personnes.70 Mais le respect ne supprime pas la nécessité d'une annonce explicite et intégrale de l'Evangile. Dans le contexte de la riche variété des cultures et des religions en Asie tout particulièrement, il faut noter que « ni le respect et l'estime envers ces religions, ni la complexité des questions soulevées ne sont pour l'Eglise une invitation à taire devant les non-chrétiens l'annonce de Jésus Christ ».71 En 1986, tandis que je visitais l'Inde, j'affirmais clairement que « l'approche de l'Eglise aux autres religions est faite de respect authentique [...]. Ce respect est double: respect pour l'homme dans sa recherche de réponses aux questions les plus profondes de sa vie, et respect pour l'action de l'Esprit dans l'homme ».72 Certes, les Pères synodaux ont reconnu volontiers l'action de l'Esprit dans les sociétés, dans les cultures et dans les religions asiatiques, à travers lesquelles le Père prépare les coeurs des peuples de l'Asie à la plénitude de vie dans le Christ.73

Dès avant les consultations qui ont précédé le Synode, beaucoup d'Evêques d'Asie ont fait remarquer les difficultés à proclamer la foi en Jésus comme unique Sauveur. Pendant l'Assemblée, la situation fut décrite de cette manière: « Certains des adeptes des grandes religions asiatiques n'ont aucun problème pour accepter Jésus comme une manifestation de la Divinité ou de l'Absolu, ou comme un "être illuminé". Toutefois, ils ont de la difficulté à le considérer comme l'unique manifestation de la Divinité ».74 En réalité, les efforts pour partager le don de la foi en Jésus comme unique Sauveur comporte de multiples difficultés philosophiques, culturelles et théologiques, spécialement à la lumière des croyances des grandes religions de l'Asie, étroitement liées à des valeurs culturelles et à des visions spécifiques du monde.

Dans la pensée des Pères synodaux, la difficulté s'intensifie du fait que Jésus est souvent perçu comme étranger à l'Asie. C'est un paradoxe que beaucoup d'Asiatiques ont tendance à considérer Jésus, né sur le sol asiatique, comme un occidental plutôt que comme une figure asiatique. Il était inévitable que l'annonce faite par les missionnaires occidentaux soit profondément influencée par les cultures d'où ils provenaient, et l'on ne peut nier que parfois même une certaine étroitesse de vues, une attitude défensive et un manque de sensibilité aient accompagné leurs efforts. Les Pères du Synode ont pris acte de cela comme d'un fait dont il faut tenir compte dans l'histoire de l'évangélisation, et ils n'ont pas condamné d'une manière sommaire les missionnaires pour « la figure occidentale » de Jésus. En même temps, ils ont profité de l'occasion pour « exprimer d'une façon très spéciale leur gratitude à tous les missionnaires, hommes et femmes, religieux et laïcs, étrangers et autochtones, qui ont apporté le message de Jésus Christ et le don de la foi. Une reconnaissance spéciale doit également être exprimée à toutes les Eglises qui ont envoyé et continuent d'envoyer des missionnaires en Asie ».75

Les missionnaires de l'Evangile peuvent s'appuyer sur l'expérience de saint Paul qui établit un dialogue avec les valeurs philosophiques, culturelles et religieuses de ses auditeurs (cf. Ac 14,13-17 Ac 17,22-31). Les Conciles oecuméniques de l'Eglise, eux aussi, pour formuler des articles de foi de l'Eglise, ont dû utiliser les ressources linguistiques, philosophiques et culturelles qu'ils avaient à leur disposition. Ces ressources deviennent alors la propriété de toute l'Eglise, capable d'exprimer sa doctrine christologique d'une manière appropriée et universelle. Elles sont partie intégrante de l'héritage de la foi, qu'il faut s'approprier et partager constamment dans les rencontres avec les diverses cultures.76 Toutefois, la mission de proclamer Jésus d'une manière qui permette aux peuples de l'Asie, tout en restant fidèles en même temps à la doctrine théologique de l'Eglise et à leurs origines asiatiques, est un énorme défi.

La présentation de Jésus Christ comme unique Sauveur oblige à suivre une pédagogie qui introduise les personnes, pas à pas, à la pleine appropriation du mystère. Il est clair que la première évangélisation de non-chrétiens et, dans un deuxième temps, l'annonce de Jésus à des croyants devra avoir des approches différentes. Dans la première évangélisation, par exemple, « la présentation de Jésus Christ devrait arriver comme l'accomplissement des aspirations exprimées dans les mythologies et dans le folklore des peuples de l'Asie ».77 En règle générale, les méthodes narratives familières aux formes culturelles asiatiques doivent être préférées. En effet, l'annonce de Jésus Christ peut être réalisée de manière plus efficace en racontant son histoire comme le fait l'Evangile. Les notions ontologiques présentées, qui doivent toujours être présupposées et exprimées en présentant Jésus, peuvent être accompagnées plus expressément de perspectives relationnelles, historiques et même cosmiques. Comme l'ont souligné les Pères synodaux, l'Eglise « doit être ouverte aux voies nouvelles et surprenantes par lesquelles le visage du Christ pourra être présenté en Asie ».78

Le Synode recommande que les catéchèses à venir suivent « une pédagogie à base d'évocation qui utilise des histoires, des paraboles et des symboles si caractéristiques de la méthodologie asiatique dans l'enseignement ».79 Le ministère de Jésus lui-même montre clairement la valeur ducontact personnel, qui exige que l'évangélisateur prenne à coeur la situation de l'auditeur, se livrant à une proclamation adaptée à son degré de maturité, à travers des formes et un langage appropriés. Dans cette perspective, les Pères synodaux ont maintes fois souligné la nécessité d'évangéliser d'une manière qui tienne compte de la sensibilité des peuples asiatiques, suggérant des images de Jésus qui soient intelligibles pour la mentalité et les cultures asiatiques et, en même temps, fidèles à l'Ecriture Sainte et à la Tradition. Parmi ces figures, ils ont cité: « Jésus Christ comme le Maître de Sagesse, le Guérisseur, le Libérateur, le Guide spirituel, l'Etre illuminé, l'Ami compatissant des pauvres, le Bon Samaritain, le Bon Berger, l'Obéissant ».80 Jésus devrait être présenté comme la Sagesse de Dieu incarnée, dont la grâce porte à maturité les « semences » de la Sagesse divine déjà présentes dans la vie, dans les religions et chez les peuples de l'Asie.81 Au milieu des nombreuses souffrances qui affligent les peuples de l'Asie, il pourrait d'une manière profitable être proclamé comme le Sauveur « qui peut donner un sens à tous ceux qui subissent des douleurs et des souffrances indicibles ».82

La foi que l'Eglise offre en don à ses fils et filles de l'Asie ne peut être confinée dans les limites de la compréhension et de l'expression d'une culture humaine particulière, puisqu'elle les transcende et qu'en vérité elle incite toute culture à s'élever à de nouveaux niveaux de compréhension et d'expression. En même temps, les Pères du Synode avaient bien conscience de la nécessité impérieuse pour les Eglises locales en Asie de présenter le mystère du Christ à leurs peuples en fonction des critères culturels et des modes de pensée de ces derniers. Ils soulignaient aussi que cette inculturation de la foi sur le continent doit amener à redécouvrir le visage asiatique de Jésus et à trouver des modes à travers lesquels les cultures asiatiques puissent saisir la signification salvifique universelle du mystère de Jésus et de son Eglise.83 Il faut faire revivre de nos jours la compréhension pénétrante des peuples et des cultures qu'ont eue de manière exemplaire des hommes comme Giovanni da Montecorvino, Matteo Ricci et Roberto de Nobili, pour n'en mentionner que quelques-uns.

(68) Jean-Paul II, Encycl. Redemptoris missio (7 décembre 1990), n. RMi 45: AAS 83 (1991), p. 292;La Documentation catholique 88 (1991), pp. 169-170.
(69) Cf. ibid., n. RMi 46: AAS, l.c., pp. 292-293; La Documentation catholique, l.c., pp. 169-170.
(70) Cf. Conc. oecum. Vat. II, Déclaration sur la liberté religieuse Dignitatis humanae, nn. DH 3-4: Jean-Paul II, Encycl. Redemptoris missio (7 décembre 1990), n. RMi 39: AAS 83 (1991), p. 287; La Documentation catholique 88 (1991), pp. 167-168; Proposition 40.
(71) Paul VI, Exhort. apost. Evangelii nuntiandi (8 décembre 1975), n. EN 53: AAS 68 (1976), pp. 41-42; La Documentation catholique 73 (1976), p. 11.
(72) Discours aux représentants des religions non chrétiennes (Madras, 5 février 1986), n. 2: AAS78 (1986), p. 767; La Documentation catholique 83 (1986), p. 297.
(73) Cf. Propositions 11 et 12; Jean-Paul II, Encycl. Redemptoris missio (7 décembre 1990), n. RMi 28: AAS 83 (1991), pp. 273-274; La Documentation catholique 88 (1991), p. 162.
(74) Rapport avant la discussion, n. 19: L'Osservatore Romano, 22 avril 1998, p. 5.
(75) Proposition 58.
(76) Cf. Jean-Paul II, Encycl. Fides et ratio (14 septembre 1998), n. FR 72: AAS 91 (1999), p. 61; La Documentation catholique 95 (1998), pp. 926-927.
(77) Assemblée spéciale pour l'Asie du Synode des Evêques, Rapport après la discussion, n. 15.
(78) Ibid.
(79) Ibid.
(80) Proposition 6.
(81) Cf. Assemblée spéciale pour l'Asie du Synode des Evêques, Rapport après la discussion, n. 6.
(82) Ibid.
(83) Cf. Assemblée spéciale pour l'Asie du Synode des Evêques, Rapport avant la discussion, n. 19: L'Osservatore Romano, 22 avril 1998, p. 5.


Le défi de l'inculturation

21 La culture est l'espace vital dans lequel la personne humaine se trouve face à face avec l'Evangile. De même qu'une culture est le résultat de la vie et de l'activité d'un groupe humain, de même les personnes qui appartiennent à ce groupe sont façonnées dans une large mesure par la culture dans laquelle elles vivent. De même que les personnes et les sociétés changent, de même la culture change avec elles. Et quand une culture est transformée, les personnes et les sociétés le sont aussi par elle. De ce point de vue, on voit plus clairement pourquoi l'évangélisation et l'inculturation sont naturellement et intimement en relation l'une avec l'autre. L'Evangile et l'évangélisation ne s'identifient certes pas à la culture, et en sont même indépendants. Et pourtant le Règne de Dieu atteint des personnes profondément liées à une culture, et la construction du Royaume ne peut éviter d'emprunter des éléments de cultures humaines. C'est pourquoi Paul VI a affirmé que la rupture entre Evangile et culture était le drame de notre époque, qui a un impact profond sur l'évangélisation comme sur les cultures.84

Dans le processus de rencontre entre les diverses cultures du monde, l'Eglise non seulement transmet ses vérités et ses valeurs, et renouvelle les cultures de l'intérieur, mais elle prend aussi en elles les éléments positifs qui y sont déjà présents. C'est là le chemin obligé des évangélisateurs pour présenter la foi chrétienne et la rendre partie intégrante de l'héritage culturel des peuples. À leur tour, quand les différentes cultures sont perfectionnées et renouvelées à la lumière de l'Evangile, elles peuvent devenir des expressions véritables de l'unique foi chrétienne. « L'Eglise, par l'inculturation, devient un signe plus compréhensible de ce qu'elle est et un instrument plus adapté à sa mission ».85 Ce lien avec les cultures a toujours fait partie du pèlerinage de l'Eglise dans l'histoire, mais il revêt une urgence particulière aujourd'hui, dans la situation pluri-ethnique, pluri-religieuse et pluri-culturelle de l'Asie, où le christianisme est encore trop souvent vu comme étranger.

Ici, il est bon de rappeler ce qui a été dit à maintes reprises au cours du Synode, à savoir que l'Esprit Saint est l'agent premier de l'inculturation de la foi chrétienne en Asie.86 L'Esprit lui-même, qui nous conduit à la vérité tout entière, rend possible un dialogue fructueux avec les valeurs culturelles et religieuses de différents peuples, parmi lesquels, dans une certaine mesure, il est présent, donnant aux hommes et aux femmes qui ont un coeur sincère la force de combattre le mal et les embûches du Malin, et offrant véritablement à chacun la possibilité de partager le mystère pascal d'une manière connue de Dieu seul.87 La présence de l'Esprit fait que le dialogue se déroule dans la vérité, l'honnêteté, l'humilité et le respect.88 « En offrant aux autres la Bonne Nouvelle de la Rédemption, l'Eglise s'efforce de comprendre leur culture. Elle cherche à connaître les esprits et les coeurs de ses auditeurs, leurs valeurs et leurs coutumes, leurs problèmes et leurs difficultés, leurs espoirs et leurs rêves. Une fois qu'elle connaît et comprend ces divers aspects de la culture, elle peut alors commencer le dialogue de salut; elle peut offrir, avec respect mais avec clarté et conviction, la Bonne Nouvelle de la Rédemption à tous ceux qui, librement, veulent l'écouter et lui répondre ».89 Cependant, les peuples de l'Asie qui, en tant qu'asiatiques, désirent s'approprier la foi chrétienne peuvent être sûrs que leurs espoirs, leurs attentes, leurs soucis et leurs souffrances non seulement sont assumées par Jésus, mais deviennent le véritable point de passage par lequel le don de la foi et la puissance de l'Esprit entrent dans les profondeurs de leur vie.

C'est la tâche des Pasteurs, en vertu de leur charisme, de mener ce dialogue avec discernement. De même, les experts en disciplines sacrées ou profanes ont un rôle important à jouer dans le processus d'inculturation. Mais ce processus doit impliquer le peuple de Dieu tout entier, car la vie de l'Eglise dans son ensemble doit rendre visible la foi qu'elle proclame et qu'elle adopte. Pour être sûrs que cela se réalise en profondeur, les Pères synodaux ont précisé certains domaines qui exigent une attention particulière: la réflexion théologique, la liturgie, la formation des prêtres et des religieux, la catéchèse et la spiritualité.90

(84) Exhort. apost. Evangelii nuntiandi (8 décembre 1975), n.
EN 20: AAS 68 (1976), pp. 18-19; La Documentation catholique 73 (1976), pp. 4-5.
(85) Jean-Paul II, Encycl. Redemptoris missio (7 décembre 1990), n. RMi 52: AAS 83 (1991), p. 300;La Documentation catholique 88 (1991), p. 172.
(86) Cf. Assemblée spéciale pour l'Asie du Synode des Evêques, Rapport après la discussion, n. 9.
(87) Cf. Conc. oecum. Vat. II, Const. past. Gaudium et spes, n. GS 22; Jean-Paul II, Encycl.Redemptoris missio (7 décembre 1990), n. RMi 28: AAS 83 (1991), pp. 273-274; La Documentation catholique 88 (1991), p. 162.
(88) Cf. Jean-Paul II, Encycl. Redemptoris missio (7 décembre 1990), n. RMi 56: AAS 83 (1991), p. 304; La Documentation catholique 88 (1991), pp. 173-174.
(89) Jean-Paul II, Homélie lors de la Messe à Calcutta, 4 février 1986, n. 3: Insegnamenti IX, 1 (1986), p. 314; La Documentation catholique 83 (1986), p. 295.
(90) Cf. Proposition 43.


Domaines clés de l'inculturation

22 Le Synode a exprimé ses encouragements aux théologiens dans leur tâche délicate qui consiste à développer une théologie inculturée, spécialement dans le domaine de la christologie.91Il a souligné que « cette manière de faire de la théologie doit être poursuivie avec courage dans la fidélité à l'Ecriture et à la Tradition de l'Eglise, en adhésion sincère au Magistère et avec une connaissance des situations pastorales ».92 Moi aussi, j'invite les théologiens à travailler en esprit d'union avec les Pasteurs et avec le peuple qui — dans l'unité et jamais séparés les uns des autres — « reflètent l'authentique sensus fidei qu'il ne faut jamais perdre de vue ».93 Le travail théologique doit toujours être guidé par le respect de la sensibilité des chrétiens, de manière que, par une croissance progressive vers des formes inculturées de l'expression de la foi, les personnes ne soient ni portées à la confusion ni scandalisées. L'inculturation doit toujours être guidée par la compatibilité avec l'Evangile et par la communion avec la foi de l'Eglise universelle, en plein accord avec la Tradition de l'Eglise, en ayant en vue l'affermissement de la foi du peuple.94 On aura la preuve d'une bonne inculturation si le peuple devient plus engagé dans la foi chrétienne parce qu'il la perçoit plus clairement avec les yeux de sa culture.

La liturgie est la source et le sommet de toute vie et de toute mission chrétiennes;95 c'est un moyen fondamental d'évangélisation, spécialement en Asie où les adeptes de diverses religions sont si attirés par le culte, par les festivités religieuses et par des dévotions populaires.96 La liturgie des Églises orientales a été dans la plupart des cas inculturée avec succès au cours de siècles d'interaction avec la culture ambiante, tandis que les Eglises fondées plus récemment ont besoin de faire en sorte que la liturgie devienne une source encore plus intense de nourriture pour leurs fidèles grâce à un usage sage et efficace d'éléments pris dans les cultures locales. Mais l'inculturation liturgique demande plus que de se concentrer sur des valeurs culturelles traditionnelles, sur des symboles et des rites. Il faut aussi tenir compte des changements dans la conscience et dans les comportements suscités par l'apparition de cultures de sécularisme et de consumérisme qui influent sur le sens asiatique du culte et de la prière. Pour une inculturation authentique de la liturgie en Asie, on ne peut pas oublier non plus les besoins spécifiques des pauvres, des migrants, des réfugiés, des jeunes et des femmes.

Les Conférences épiscopales nationales et régionales doivent oeuvrer en contact plus étroit avec la Congrégation pour le Culte divin et la Discipline des Sacrements pour chercher des voies efficaces afin de promouvoir des formes appropriées de culte dans le contexte de l'Asie.97 Une telle collaboration est essentielle parce que la sainte Liturgie exprime et célèbre la foi unique professée par tous et, étant l'héritage de toute l'Eglise, elle ne peut pas être déterminée par les Eglises locales isolément, sans référence à l'Eglise universelle.

Les Pères synodaux ont particulièrement insisté sur l'importance de la Parole biblique dans la transmission du message de salut aux peuples de l'Asie, où la Parole à transmettre a un grand rôle dans la préservation et la communication de l'expérience religieuse.98 Il s'ensuit qu'il faut développer un apostolat biblique efficace afin de pouvoir s'assurer que le texte sacré est plus largement diffusé et plus intensément utilisé en esprit de prière parmi les membres de l'Eglise en Asie. Les Pères synodaux ont souligné qu'il était urgent de la prendre comme base de toute annonce, catéchèse, prédication et forme de spiritualité missionnaires.99 Il faut également encourager et soutenir les efforts pour traduire la Bible dans les langues locales. La formation biblique devrait être considérée comme un moyen important d'éduquer les personnes à la foi et de les préparer à la tâche de la proclamation. On devra inclure des cours sur l'Ecriture orientés vers la pastorale, en mettant l'accent sur l'application de ses enseignements aux réalités complexes de la vie en Asie dans les programmes de formation pour le clergé, pour les personnes consacrées et pour les laïcs. 100 On devrait aussi faire connaître l'Ecriture sainte parmi les adeptes d'autres religions; la Parole de Dieu a le pouvoir intrinsèque de toucher le coeur des personnes, car, à travers elle, l'Esprit de Dieu révèle le plan divin du salut pour le monde. En outre, le style narratif que l'on peut remarquer dans beaucoup de livres de la Bible a des affinités avec les textes religieux typiques de l'Asie. 101

Un autre aspect clé de l'inculturation, dont l'avenir dépendant pour une large part, est la formation des missionnaires de l'Evangile. Dans le passé, la formation a souvent suivi le style, les méthodes et les programmes importés de l'Occident, et, tout en reconnaissant le service rendu par ce type de formation, les Pères synodaux ont noté, comme un développement positif, que des efforts ont été faits récemment pour adapter la formation des missionnaires de l'Evangile aux contextes culturels de l'Asie. En plus d'un solide bagage biblique et patristique, les séminaristes devraient acquérir une connaissance détaillée et assurée du patrimoine théologique et philosophique de l'Eglise, comme je l'ai rappelé dans mon encyclique Fides et ratio. 102 Sur la base de cette préparation, ils tireront alors profit de leurs contacts avec les traditions philosophiques et religieuses de l'Asie. 103 Les Pères synodaux ont également encouragé les professeurs de séminaire et leurs collaborateurs à chercher à comprendre en profondeur les éléments de spiritualité et de prière inhérents à l'âme asiatique, et à se laisser entraîner plus intensément dans la recherche à laquelle se livrent les peuples de l'Asie en vue d'une vie plus pleine. 104 A cette fin, ils ont suggéré la création d'un nouvel Institut central en Asie, consacré à la formation du corps enseignant des séminaires. 105 Le Synode a exprimé aussi sa préoccupation pour la formation des hommes et des femmes consacrés, déclarant clairement que leur spiritualité et leur style de vie doivent faire preuve de sensibilité à l'égard du patrimoine religieux et culturel des personnes au milieu desquelles ils vivent et qu'ils servent, présupposant toujours qu'est effectué le discernement nécessaire de ce qui est conforme à l'Evangile et de ce qui ne l'est pas. 106 En outre, puisque l'inculturation de l'Evangile concerne tout le peuple de Dieu, le rôle du laïcat est d'une importance fondamentale. Plus que tous les autres, les laïcs sont appelés à transformer la société, en collaboration avec les Evêques, le clergé et les religieux, en faisant pénétrer « l'esprit du Christ » dans la mentalité, les moeurs, les lois et les structures du monde séculier dans lequel ils vivent. 107 Une plus large inculturation de l'Evangile à tous les niveaux de la société en Asie dépendra considérablement de la formation appropriée que les Eglises locales sauront donner au laïcat.

(91) Cf. Proposition 7.
(92) Ibid.
(93) Jean-Paul II, Encycl. Redemptoris missio (7 décembre 1990), n.
RMi 54: AAS 83 (1991), p. 302;La Documentation catholique 88 (1991), p. 173.
(94) Cf. ibid. RMi 54: AAS, l.c., p. 301; La Documentation catholique, l.c., p. 173.
(95) Cf. Conc. oecum. Vat. II, Const. sur la sainte Liturgie Sacrosanctum Concilium, n. SC 2; Assemblée spéciale pour l'Asie du Synode des Evêques, Rapport après la discussion, n. 14.
(96) Cf. Assemblée spéciale pour l'Asie du Synode des Evêques, Rapport après la discussion, n. 14; Proposition 43.
(97) Cf. Proposition 43.
(98) Cf. Assemblée spéciale pour l'Asie du Synode des Evêques, Rapport après la discussion, n. 13.
(99) Cf. Proposition 17.
(100) Cf. Proposition 18.
(101) Cf. Proposition 17.
(102) NN. FR 60 FR 62 FR 105: AAS 91 (1999), pp. 52-53, 54, 85-86; La Documentation catholique 95 (1998), pp. 922-923, 938.
(103) Cf. Proposition 24.
(104) Cf. Proposition 25.
(105) Cf. ibid.
(106) Cf. Proposition 27.
(107) Cf. Proposition 29.


La vie chrétienne comme annonce

23 Plus la communauté chrétienne est enracinée dans l'expérience de Dieu qui provient d'une foi vive, plus elle pourra proclamer aux autres de manière crédible l'accomplissement du Royaume de Dieu en Jésus Christ. Cela se réalisera grâce à une écoute fidèle de la Parole de Dieu, à la prière et à la contemplation, à la célébration du mystère de Jésus dans les sacrements, par-dessus tout dans l'Eucharistie, et en donnant l'exemple d'une vraie communion de vie et d'un amour intègre. Le coeur de l'Eglise particulière doit être centré sur la contemplation de Jésus Christ, Dieu fait homme, et elle doit tendre constamment à une union plus intime avec lui, dont elle continue la mission. La mission est une action contemplative et une contemplation active. Cependant un missionnaire qui n'a pas une profonde expérience de Dieu dans la prière et dans la contemplation aura peu d'influence spirituelle ou de succès missionnaire. Il s'agit là d'une réflexion que je tire de ma propre expérience sacerdotale, et, comme je l'ai écrit ailleurs, mes contacts avec des représentants des traditions spirituelles non chrétiennes, particulièrement les traditions asiatiques, m'ont confirmé dans la conviction que l'avenir de la mission dépend d'une grande diffusion de la contemplation.108 En Asie, siège de grandes religions, où les personnes et des peuples entiers ont soif du divin, l'Église est appelée à être une Eglise de prière, profondément spirituelle bien qu'elle soit engagée dans des préoccupations humaines et sociales immédiates. Tout chrétien a besoin d'une authentique spiritualité missionnaire de prière et de contemplation.

Une personne vraiment religieuse est très facilement respectée et suivie en Asie. La prière, le jeûne et les diverses formes d'ascétisme sont tenus en haute estime. Le renoncement, le détachement, l'humilité, la simplicité et le silence sont considérés comme de grandes valeurs par les adeptes de toutes les religions. Pour que la prière ne soit pas détachée de la promotion humaine, les Pères synodaux ont souligné que « l'oeuvre de justice, de charité et de compassion est étroitement liée à une vie authentique de prière et de contemplation, et en outre cette même spiritualité sera la source de toute notre oeuvre d'évangélisation ». 109 Pleinement convaincus de l'importance du témoignage authentique dans l'évangélisation de l'Asie, les Pères du synode ont affirmé: « La Bonne Nouvelle de Jésus Christ ne peut être annoncée que par ceux qui sont pris et inspirés par l'amour du Père pour ses enfants, manifesté dans la personne de Jésus Christ. Cette annonce est une mission qui a besoin de saints hommes et de saintes femmes qui feront connaître et aimer le Sauveur par leurs vies. Un feu ne peut être allumé que par quelque chose qui est lui-même enflammé. Ainsi, une annonce réussie de la Bonne Nouvelle du Salut en Asie ne peut être mise en place que si les Evêques, les prêtres, les religieux et les laïcs sont eux-mêmes embrasés par l'amour du Christ et brûlants de zèle pour le faire connaître plus largement, le faire aimer plus intensément et le faire suivre de plus près ». 110 Les chrétiens qui parlent du Christ doivent incarner dans leur vie le message qu'ils annoncent.

A cet égard toutefois, une circonstance particulière dans le contexte asiatique requiert notre attention. L'Eglise sait que le témoignage silencieux de la vie reste aujourd'hui encore l'unique moyen de proclamer le Règne de Dieu en beaucoup d'endroits en Asie où l'annonce explicite est interdite et où la liberté religieuse est refusée ou du moins systématiquement réduite. L'Eglise vit ce type de témoignage de manière consciente, y voyant le moyen de « prendre sa croix » (cf.
Lc 9,23), bien qu'elle ne se lasse pas d'attirer l'attention des gouvernements et de réclamer d'eux la reconnaissance de la liberté religieuse comme un droit humain fondamental. Il est bon de rappeler ici ce que disait le Concile Vatican II: « La personne humaine a droit à la liberté religieuse. Cette liberté consiste en ce que tous les hommes doivent être exempts de toute contrainte de la part soit d'individus, soit de groupes sociaux et de quelque pouvoir humain que ce soit, de telle sorte qu'en matière religieuse nul ne soit forcé d'agir contre sa conscience ni empêché d'agir, dans de justes limites, selon sa conscience, en privé comme en public, seul ou en association avec d'autres ». 111Dans certains pays asiatiques, ce principe doit encore être reconnu et mis en oeuvre.

Il est donc clair que l'annonce de Jésus Christ en Asie présente des aspects complexes du point de vue du contenu comme de la méthode. Les Pères synodaux avaient hautement conscience de la légitime variété d'approches de l'annonce de Jésus, à condition toutefois que la foi soit intégralement respectée dans le processus d'appropriation et de partage de la foi. Le Synode a souligné que « l'évangélisation est aujourd'hui une réalité riche et dynamique. Elle a des aspects et des éléments variés: le témoignage, le dialogue, l'annonce, la catéchèse, la conversion, le baptême, l'insertion dans la communauté ecclésiale, l'implantation de l'Eglise, l'inculturation et le développement intégral de l'homme. Certains de ces éléments sont liés alors que d'autres sont des étapes successives du processus global d'évangélisation ». 112 Toutefois, dans l'ensemble de l'oeuvre évangélisatrice, ce qui doit être annoncé, c'est la vérité complète de Jésus Christ. Souligner certains aspects du mystère insondable de Jésus est légitime autant que nécessaire pour introduire progressivement le Christ auprès d'une personne, mais aucune compromission ne peut être admise quant à l'intégrité de la foi. En fin de compte, l'acceptation de la foi de la part d'une personne doit être fondée sur une compréhension certaine de la personne de Jésus Christ, le Seigneur de tous qui « est le même hier, aujourd'hui et à jamais » (He 13,8), comme l'a enseigné l'Église en tout temps et en tout lieu.

(108) Cf. Encycl. Redemptoris missio (7 décembre 1990), n. RMi 91: AAS 83 (1991), p. 338; La Documentation catholique 88 (1991), p. 187.
(109) Proposition 19.
(110) Proposition 8.
(111) Déclar. sur la liberté religieuse Dignitatis humanae, n. DH 2.
(112) Proposition 6.


Ecclesia in Asia FR 18