Brentano - Bse Emmerich, Vie Vierge Marie - XCVI - La fontaine de Mataréa. Job y avait habité avant Abraham. Détails sur ce patriarche.

XCVI - La fontaine de Mataréa. Job y avait habité avant Abraham. Détails sur ce patriarche.


La fontaine de Mataréa ne devait pas son origine à la sainte Vierge ; elle avait seulement jailli de nouveau. Elle était cachée sous les décombres et revêtue de maçonnerie à l'intérieur. Je vis que Job avait été en Egypte avant Abraham, et avait habité en ce lieu. Il avait trouvé la fontaine et sacrifié sur la grosse pierre qui était là. Job était le plus jeune de treize frères. Son père était un grand chef de tribu à l'époque où fut bâtie la tour de Babel. Ce père de Job avait un frère duquel descendait la famille d'Abraham. Les descendants de ces deux frères se mariaient le plus souvent entre eux. La première femme de Job était de la race de Phaleg ; lorsqu'après plusieurs aventures il alla habiter sa troisième demeure, il avait épousé trois autres femmes de la famille de Phaleg. L'une d'elles lui donna un fils, dont la fille se maria encore dans la famille de Phaleg, et mit au monde la mère d'Abraham. Job était donc le bisaïeul de la mère d'Abraham.


Le père de Job s'appelait Joctan il était fils d'Héber et habitait au nord de la mer Caspienne, auprès d'une chaîne de montagnes, où il fait chaud sur l'un des versants, tandis que l'autre côté est froid et couvert de glace. Il y avait des éléphants dans ce pays. L'endroit où Job alla d'abord, et où il s'établit avec sa famille, n'aurait pas convenu aux éléphants ; c'était une contrée très marécageuse. Ce pays était situé au nord d'une chaîne de montagnes située entre deux mers, dont la plus occidentale était aussi, avant le déluge, une haute chaîne de montagnes ', où habitaient de mauvais esprits qui possédaient les hommes.


Il est remarquable que, dans une autre occasion, elle raconta qu'à la Place de la mer Noire il y avait eu, avant le déluge, une haute chaîne de montagnes hantée par de mauvais esprits. Comme elle avait dit cela une autre fois de la mer Noire, il est vraisemblable que par la chaîne de montagnes derrière laquelle était le premier séjour de Job elle désignait le Caucase, qui est entre la mer Noire et la mer Caspienne.


Il y avait là une contrée stérile et marécageuse ; je crois qu'elle est habitée maintenant par un peuple qui a de petits yeux, le nez épaté et les pommettes saillantes. Ce fut là que Job subit sa première épreuve. Il alla ensuite plus au midi, vers le Caucase, et commença un nouvel établissement De là Job fit un voyage en Egypte, où dominaient alors des rois étrangers, appartenant à des peuples pasteurs venus de son pays. L'un d'eux était de la contrée de Job, l'autre venait du pays le plus éloigné habité par les trois rois. Ils n'étaient maîtres que d'une partie de l'Égypte, et furent chassés plus tard par un roi égyptien. Il y avait une grande quantité de ces pasteurs réunis devant une ville où ils s'étaient établis.


Le roi de ces pasteurs, compatriotes de Job, désirait, pour son fils, une femme de la race voisine du Caucase dont il était issu, et Job, accompagné d'un nombreux cortège, conduisit en Égypte cette fiancée royale, qui était sa parente. Il avait avec lui trente chameaux, de nombreux présents et une grande quantité de serviteurs. Il était encore jeune ; c'était un grand homme avec un teint d'un brun jaunâtre, mais agréable, et des cheveux tirant sur le roux. Les habitants de l'Egypte étaient d'un brun sale. Ce pays n'était pas encore très peuplé ; il y avait seulement ça et la de grandes populations agglomérées. On n'y voyait pas encore non plus tous ces grands édifices, qu'on ne commença à construire qu'à l'époque des enfants d'Israel.


Le roi rendit de grands honneurs à Job et ne voulut pas le laisser partir. Il désirait beaucoup qu'il vînt s'établit là avec toute sa tribu. Il 1ui assigna pour séjour la ville où demeura plus tard la sainte Famille, et qui était alors toute différente. Il resta cinq ans en Egypte. Je vis qu'il avait habité à l'endroit même où habita dans la suite la sainte Famille, et que la fontaine dont il a été question lui fut montrée par Dieu. Il sacrifia aussi sur la grosse pierre dont j'ai parlé.


Job était un gentil, mais c'était un homme juste. Il connaissait le vrai Dieu et l'adorait comme son créateur, en contemplant la nature, les astres et la lumière. Il aimait à s'entretenir avec Dieu de ses oeuvres merveilleuses. Il n'adorait pas d'affreuses images d'animaux comme le faisaient les peuples d'alors. Il avait imaginé une représentation du vrai Dieu : c'était une petite figure humaine, avec des rayons autour de la tête, et aussi avec des ailes, à ce que je crois. Elle avait les mains jointes sur la poitrine et portant un globe, au-dessus duquel était figuré un navire voguant sur les flots. C'était peut-être une représentation du déluge. Dans l'exercice de son culte, il brûlait des grains devant cette image. De petites figures du même genre furent introduites plus tard en Égypte, elles étaient assises comme dans une chaire surmontée d'une espèce de dais.


Job trouva dans cette ville un abominable culte, lequel se rattachait aux superstitions idolâtriques qui avaient présidé à la construction de la tour de Babel. Les habitants avaient une idole avec une tête de boeuf, très large, terminée en pointe et comme relevée en l'air ; sa bouche était ouverte et ses cornes tournées en bas. Cette idole était creuse ; on allumait du feu dans l'intérieur, et on mettait des enfants vivants entre ses bras brûlants. Je vis tirer quelque chose des ouvertures pratiquées dans le corps.


Les gens de ce pays étaient très cruels ; la contrée était pleine d'affreux animaux. On voyait voler en grandes troupes des bêtes noires dont il semblait sortir du feu. Elles empoisonnaient tout, et les arbres sur lesquels elles s'étaient posées se desséchaient. Je vis aussi des animaux qui avaient les pattes de derrière très longues et celles de devant plus courtes, comme les taupes ; ils pouvaient sauter d'un toit sur un autre. Il y avait aussi d'horribles bêtes qui se glissaient entre les pierres et dans trous ; elles enlaçaient les hommes et les étouffaient.


Dans le Nil, je vis un énorme animal avec d'affreuses dents et de gros pieds noirs ; il était de la taille d'un cheval, et avait aussi quelque chose du cochon. Je vis encore d'autres affreux animaux Mais le peuple était encore plus abominable, et Job, que j'avais vu délivrer son pays des bêtes malfaisantes par ses prières, avait une telle aversion pour ces hommes impies, qu'il éclatait souvent en plaintes contre ceux qui l'accompagnaient ; il aimait mieux vivre avec ces méchants animaux qu'avec les habitants du pays.


Je le voyais souvent aussi se tourner vers l'Orient, et jeter des regards pleins de désirs vers sa patrie, qui était au midi du pays le plus éloigné habité par les trois rois. Il vit des figures prophétiques de l'arrivée des enfants d'Israël en Egypte et en général du salut du genre humain, ainsi que des épreuves qui lui étaient réservées il ne se laissa pas persuader de rester dans ce pays, et au bout de cinq ans il quitta l'Egypte avec sa suite.


Dans l'intervalle des rudes épreuves qu'il eut à subir, il eut d'abord neuf ans, puis sept ans, puis encore douze ans de repos. Ces paroles du livre de Job " Et comme le messager de malheur parlait encore ", sont équivalentes à celles-ci : " Ce malheur qu'il avait eu était encore dans la bouche du peuple lorsque le suivant le frappa ". Il subit ses épreuves dans trois pays différents. La dernière, qui fut suivie du rétablissement de sa prospérité, lui arriva lorsqu'il vivait dans un pays de plaines, situé à l'orient de Jéricho. Ce pays produisait de l'encens et de la myrrhe ; il y avait aussi une mine d'or et on y travaillait les métaux.


Dans une autre occasion, je vis encore beaucoup de choses relativement à Job. Je ne dirai maintenant que ce qui suit. Deux serviteurs affidés, qui étaient comme des intendants, recueillirent de sa bouche son histoire et ses entretiens avec Dieu ils s'appelaient Haï et Uis ou Ois. 1


L'écrivain entendit dire, en 1835, que le père de la race arménienne s'appelait ainsi.


Cette histoire fut religieusement conservée par ses descendants. Elle fut transmise de génération en génération jusqu'à Abraham et à ses fils. On la faisait servir à l'instruction de la jeunesse. Elle vint en Égypte avec les enfants d'Israël. Moise en fit comme un abrégé pour consoler les Israélites sous l'oppression des Egyptiens et pendant leur séjour dans le désert. Elle était auparavant beaucoup plus longue, et il y avait bien des choses qu'ils n'auraient pas comprises. Salomon la remania à son tour, et elle devint ainsi un livre de piété, rempli de la sagesse de Job, de Moise et de Salomon. Il était difficile d'y retrouver l'histoire véritable de Job, car on y introduisit des noms de lieux et de peuples plus voisins de la terre de Chanaan. On crut que Job était un Iduméen, parce que le pays où il avait vécu en dernier lieu fut, longtemps après sa mort, habité par les descendants d'Esau ou Edom. Job pouvait vivre encore à l'époque de la naissance d'Abraham.


XCVII - La fontaine de Mataréa. Séjour que fit Abraham en ce lieu. Détails sur la fontaine jusque dans les temps chrétiens.


Abraham, lors de son séjour en Egypte, planta aussi ses tentes près de cette fontaine, et je l'y vis instruire le peuple '.


Flav. Josephus, lib. I, Anthquitat. Iud., et d'autres écrivains, disent qu'Abraham enseigna aux Egyptiens l'arithmétique et l'astronomie.


Il résida là plusieurs années avec Sara et plusieurs fils et filles dont les mères étaient restées en Chaldée. Son frère Loth fut aussi dans ce pays avec sa famille. Je ne sais plus quel était le lieu de leur résidence. Abraham alla en Egypte par l'ordre de Dieu, la première fois à cause d'une grande famine dans la terre de Chanaan, et la seconde fois pour y recouvrer un trésor de famille qu'une nièce de la mère de Sara y avait porté. Cette femme appartenait à la tribu des peuples pasteurs qui étaient de la même race que Job et qui avaient dominé précédemment sur une partie de l'Égypte ; elle était venue chez eux comme servante et elle avait ensuite épousé un Egyptien. Il sortit d'elle une tribu dont j'ai oublié le nom. Une de ses filles était Agar, la mère d'Ismaël, qui était par conséquent de la même race que Sara'.


La soeur, dans une autre occasion, dit à propos d'Agar : " Elle était de la race de Sara, et celle-ci, étant stérile, la donna pour femme a Abraham, et dit qu'elle voulait revivre en elle, qu'elle voulait avoir par elle de la postérité. Elle se considérait comme ne faisant qu'un avec toutes les femmes de son sang ; c'était pour elle comme une souche féminine qui avait plusieurs rejetons. Agar était un vaisseau, une fleur de sa souche, et elle espérait avoir par elle un fruit de sa lignée. Tout était alors comme une seule tige sur laquelle une même sève produisait les fleurs.


Cette femme avait enlevé un trésor de famille, comme Rachel déroba plus tard les dieux de Laban, et elle l'avait vendu en Egypte pour une grosse somme d'argent. Il était ainsi venu en la possession du roi et des prêtres du pays. C'était un registre généalogique des enfants de Noé, et en particulier des descendants de Sem jusqu'à l'époque d'Abraham, formé de pièces d'or triangulaires attachées ensemble. C'était fait comme une balance avec ses cordons. Les plaques triangulaires étaient enfilées ensemble avec d'autres qui indiquaient les branches latérales. Sur les plaques étaient gravés les noms des membres de la famille, et toutes ses séries, partant du milieu d'un couvercle, se réunissaient dans le plateau de la balance quand on abaissait le couvercle par-dessus. La balance se fermait ainsi comme une boite. Les plaques principales étaient épaisses et jaunes ; celles qui étaient dans les intervalles étaient minces et blanches ; elles semblaient être d'argent. J'ai aussi entendu dire combien tout cela pesait de sicles ; ce qui indiquait une certaine somme. Les prêtres d'Egypte avaient rattaché divers calculs à cet arbre généalogique ; mais leurs éternelles supputations n'étaient pas conformes à la vérité.


Quand Abraham vint dans le pays, ils apprirent quelque chose sur lui par leurs observateurs des astres et leurs magiciennes ; ils surent notamment qu'il était d'une très noble souche, ainsi que sa femme, et que d'eux devait sortir une postérité élue. Dans leurs divinations, ils cherchaient toujours à connaître les lignées les plus nobles, afin de s'allier avec elles par des mariages. Satan y introduisait par là la cruauté et la débauche, afin de dégrader les races pures.


Abraham, qui craignait que les Egyptiens ne le fissent mourir à cause de la beauté de sa femme, l'avait fait passer pour sa soeur, et ce n'était pas un mensonge, car elle était sa soeur consanguine, étant fille de son père Tharé, qui l'avait eue d'une autre mère (Gn 20,12). Le roi fit amener Sara dans sa résidence, et il voulut la prendre pour femme. Tous deux furent très affligés ; ils prièrent Dieu de les secourir, et Dieu punit le roi. Toutes ses épouses et la plupart des femmes de la ville tombèrent malades. Le roi effrayé en rechercha la cause, et, ayant appris que Sara était l'épouse d'Abraham, il la lui rendit, en le priant de quitter l'Egypte aussitôt que possible, car il avait reconnu que les dieux les protégeaient.


Les Égyptiens étaient un peuple très singulier. D'une part, ils étaient très orgueilleux et se regardaient comme les plus grands et les plus sages des hommes ; mais, d'un autre côté, ils étaient incroyablement lâches et rampants, et ils cédaient promptement quand ils craignaient de rencontrer une force supérieure à la leur. Cela venait de ce qu'ils n'étaient pas très assurés de leur science, et qu'ils ne connaissaient la plupart des choses que par des divinations obscures et équivoques, par lesquelles pouvaient leur être annoncées toutes sortes de résultats compliqués et contradictoires. Comme ils voyaient le merveilleux partout, ils s'effrayaient promptement lorsque l'événement ne répondait pas à leur attente.


Abraham s'était présenté très humblement au roi pour lui demander du blé. Il s'était adressé à lui comme à un père des peuples, et il avait gagné par là ses bonnes grâces, en sorte que celui-ci lui fit beaucoup de présents. Quand il lui rendit Sara et le pria de quitter le pays, Abraham répondit qu'il ne le pouvait pas avant d'avoir recouvré cet arbre généalogique qui lui appartenait, et raconta de quelle manière il avait été porté en Égypte. Le roi assembla alors les prêtres, et ils consentirent à rendre à Abraham ce qui lui appartenait, mais ils le prièrent de leur en laisser prendre copie, ce qui eut lieu en effet. Alors Abraham s'en retourna avec sa suite dans le pays de Chanaan.


J'ai vu encore beaucoup de choses relatives à la fontaine de Mataréa jusqu'à notre époque. Je ne me souviens que de ce qui suit : Déjà à l'époque de la sainte Famille, les lépreux faisaient usage de son eau comme ayant une vertu particulière. Dans un temps très postérieur, lorsque déjà on avait élevé sur l'habitation de Marie une petite église chrétienne, avec une entrée près du maître autel pour descendre dans le caveau où avait longtemps demeuré la sainte Famille, je vis la fontaine entourée d'habitations, et son eau employée comme remède contre différentes espèces de lèpre. Je vis aussi des gens qui s'y baignaient pour être délivrés de certaines maladies de peau. Cela avait encore lieu lorsque les Mahométans furent maîtres du pays. Je vis aussi les Turcs entretenir une lampe toujours allumée dans l'église qui avait servi de demeure à Marie. Ils craignaient qu'il ne leur arrivât malheur s'ils négligeaient de l'entretenir. Dans les temps modernes, Je vis la source dans la solitude et à une assez grande distance des habitations. Il n'y avait plus de ville en cet endroit, et divers fruits sauvages croissaient alentour.


XCVIII - Retour d'Egypte. Un ange avertit Joseph de quitter ce pays.

- Départ de la sainte Famille. Séjour de trois mois à Gaza.


Je vis la sainte Famille quitter l'Egypte. Hérode était mort depuis assez longtemps ; mais ils ne pouvaient encore revenir parce qu'il y avait toujours du danger. Le séjour de l'Egypte devenait de plus en plus pénible pour saint Joseph. Les gens du pays pratiquaient un horrible culte idolâtrique : ils sacrifiaient des enfants mal venus, et ceux qui en sacrifiaient de bien conformés croyaient faire preuve d'une grande piété. Ils avaient en outre un culte secret plein d'impuretés ; les Juifs mêmes du pays étaient infectés de ces abominations. Ils avaient un temple qu'ils disaient être comme celui de Salomon ; mais c'était une vanterie ridicule, car il était tout différent. Ils avaient une imitation de l'Arche d'alliance, dans laquelle étaient des figures obscènes, et ils se livraient à de détestables pratiques. Ils ne chantaient plus de psaumes. Joseph avait établi un ordre parfait dans l'école de Mataréa. Le prêtre égyptien qui, lors de la chute des idoles dans la petite ville voisine d'Héliopolis, avait parlé en faveur de la sainte Famille, était venu là avec plusieurs personnes et s'était réuni à la communauté juive.


Je vis saint Joseph occupé de son travail de charpentier. Lorsque vint l'heure où il devait le cesser, il parut très triste, car on ne lui donnait pas son salaire, et il n'avait rien à rapporter à la maison, où l'on souffrait pourtant de grandes privations. Accablé de soucis, il s'agenouilla en plein air, exposa à Dieu sa détresse et le pria de venir à son secours. Je vis la nuit suivante un ange lui apparaître en songe et lui dire que ceux qui en voulaient à la vie de l'enfant étaient morts, qu'il devait se lever et faire ses dispositions pour revenir dans sa patrie par la route la plus fréquentée. Il l'exhortait à ne rien craindre parce qu'il serait à ses côtés. Je vis saint Joseph faire connaître cet ordre de Dieu à la sainte Vierge et à l'Enfant-Jésus. Ils obéirent aussitôt et firent leurs préparatifs de voyage avec la même promptitude qu'ils les avaient faits lorsqu'ils avaient reçu l'ordre de s'enfuir en Egypte.


Le lendemain matin, quand on connut leur projet, beaucoup de gens, très attristés de leur départ, vinrent prendre congé d'eux et leur apportèrent des présents de toute espèce dans de petits vases d'écorce. Ces gens étaient sincèrement affligés : il y avait parmi eux quelques Juifs, mais la plupart étaient des païens convertis. Les Israélites établis dans ce pays étaient, pour la plupart, tellement tombes dans l'idolâtrie, qu'ils n'étaient presque plus reconnaissables. Il y avait aussi des hommes qui voyaient avec joie le départ de la sainte Famille, car ils les regardaient comme des magiciens, qui avaient à leur service les plus puissants d'entre les mauvais esprits.


Je vis parmi les braves gens qui leur portaient des présents des mères avec leurs enfants qui avaient été les compagnons de Jésus, et spécialement une femme de distinction de cette ville, ayant avec elle un petit garçon, qu'elle avait coutume d'appeler le fils de Marie ; car cette femme avait longtemps désiré en vain d'avoir des enfants, et c'était à la prière de la sainte Vierge que Dieu lui avait accordé ce petit garçon. Elle s'appelait Mira et son fils Déodatus. Je la vis donner de l'argent à l'Enfant-Jésus. C'étaient de petites pièces triangulaires, jaunes, blanches et brunes. Jésus, en les recevant, regarda sa mère.


Quand Joseph eut chargé sur l'âne leurs effets les plus nécessaires, ils se mirent en route accompagnés de ces amis. C'était le même âne que Marie avait monté en allant à Bethléem. Pour la fuite en Égypte, ils avaient emmené en outre une ânesse ; mais Joseph l'avait vendue dans un moment de détresse.


Ils passèrent entre Héliopolis et le village juif, et se détournèrent un peu au midi, vers la source qui avait jailli à la prière de Marie avant leur première arrivée à Héliopolis ou On. Tout, dans ce lieu, s'était recouvert d'une belle verdure. Le ruisseau coulait autour d'un jardin carré, bordé de baumiers. Ce lieu, où il y avait une entrée, était à peu prés grand comme est ici le manège du duc'. Il était plein de jeunes arbres fruitiers, de dattiers, de sycomores, etc.


1) Elle voulait parler du duc de Croy, seigneur de Dulmen.


Les baumiers étaient à peu près grands comme des ceps de vigne de moyenne taille. Joseph avait fait de petits vases d'écorce d'arbre. Ils étaient enduits de poix à certaines places, du reste bien polis et d'une forme élégante. Il faisait souvent, dans les haltes du voyage, de semblables vases destinés à différents usages. Il arracha aux petites branches rougeâtres des baumiers leurs feuilles semblables à des feuilles de trèfle ; il y suspendit de ces petits vases d'écorce pour recueillir le baume qui en découlait, et ils l'emportèrent avec eux pour le voyage. Ceux qui les avaient accompagnés leur firent des adieux touchants. Pour eux, ils s'arrêtèrent là quelques heures. La sainte Vierge lava et fit sécher quelques effets. Ils se reposèrent au bord de l'eau et remplirent leur outre ; puis ils continuèrent leur voyage par la route la plus fréquentée.


Je les vis plusieurs fois pendant ce voyage, où ils ne coururent aucun danger. L'Enfant-Jésus, Marie et Joseph avaient sur la tête, pour se garantir du soleil, une large pièce d'écorce très mince, assujettie sous le menton avec un linge. Jésus avait sa petite robe brune et des chaussures d'écorce que Joseph lui avait fabriquées : elles couvraient les pieds à moitié. Marie n'avait que des sandales. Je les vis souvent inquiets parce que l'Enfant Jésus avait peine à marcher dans le sable brûlant. Je les vis plusieurs fois s'arrêter et ôter le sable de ses chaussures. Ils le faisaient fréquemment monter sur l'âne pour le soulager.


Je les vis traverser plusieurs villes et passer près de quelques autres. Les noms m'ont échappé ; je me souviens pourtant du nom de Ramessès. Ils traversèrent un cours d'eau qu'ils avaient déjà traversé en venant. Il allait de la mer Rouge au Nil.


Joseph ne voulait pas revenir à Nazareth, mais s'établir à Bethléem, sa patrie ; cependant il était indécis, parce qu'il avait appris dans la terre promise que la Judée était gouvernée par Archélaus, qui était aussi très cruel.


Je vis que la sainte Famille, arrivée à Gaza, y séjourna trois mois. Beaucoup de païens habitaient cette ville. Un ange lui apparut de nouveau en songe, et lui ordonna de retourner à Nazareth, ce qu'il fit aussitôt. Anne vivait encore. Elle connaissait le séjour de la sainte Famille, ainsi que quelques-uns de ses parents.


Le retour d'Égypte eut lieu en septembre. Jésus était âgé de huit ans moins trois semaines.




MORT DE LA SAINTE VIERGE


(Les communications suivantes, qui eurent lieu en diverses années, presque toujours au milieu d'août avant la fête de l'assomption ont été rangées ici dans leur ordre naturel.)

En novembre 1890, les Pères Lazaristes de la résidence de Smyrne eurent l'idée de faire des recherches dans les environs d'Ephèse en s'aidant des indices topographiques de cet ouvrage et furent assez heureux pour finir par découvrir cette Maison de la Sainte Vierge dont les détails concordaient avec la description de C. Emmerich.

Un procès-verbal de l'archevêque de Smyrne Mgr. Timoni et les relations d'explorateurs très compétents comme le Père Eschbach, supérieur du séminaire français de Rome ont attesté l'identité frappante du lieu et des ruines confirmée par les traditions locales que de temps immémorial appelaient cette maison Panaghia Capouli ou Porte de la Vierge.

(Note de l'éditeur.)


I - Sur l'âge de Marie.

- Elle va avec saint Jean à Ephèse.

- Description du pays.


Le 13 août 1822, la soeur dit : " J'ai eu cette nuit une vision relative à la mort de la sainte Vierge, mais j'ai presque tout oublié ". Comme on lui demandait quel âge pouvait avoir alors la sainte Vierge, elle jeta tout à coup un regard de côté et dit : " Elle est arrivée à l'âge de soixante-quatre ans moins vingt-trois jours. J'ai vu six fois près de moi la lettre X, puis 1, puis Y ; cela ne fait il pas soixante-quatre ? Après l'ascension de Notre Seigneur Jésus-Christ, Marie vécut trois ans à Sion, trois ans à Béthanie et neuf ans à Ephèse, où Jean l'avait conduite peu après que les Juifs eurent exposé sur la mer Lazare et ses soeurs.


Il est digne de remarque que jamais un nombre ne lui était présenté avec les chiffres arabes ordinaires, qui, seuls, lui étaient familiers, mais que, dans toutes ses visions concernant l'Eglise romaine, elle ne voyait que des chiffres romains.


En juillet 1822 à l'occasion de l'apôtre saint Jacques le Majeur, qui, en partant pour l'Espagne, avait visité Marie à Éphèse, elle dit que saint Jean conduisit Marie dans cette ville ; c'était au commencement de la quatrième année après l'Ascension autant qu'elle sen souvenait. Le 13 août 1822, elle dit que c'était dans la sixième année. Des différences de ce genre se présentaient souvent quant elle voyait les chiffres IV ou VI, qu'elle confondait fréquemment. C'est au lecteur à juger de ce qui peut avoir occasionné ces changements.


Marie ne demeurait pas à Ephèse même, mais dans les environs, où s'étaient établies déjà plusieurs femmes de ses amies. Son habitation était située à trois lieues et demie d'Ephèse, sur une montagne qu'on voyait à gauche, en venant de Jérusalem, et qui descendait rapidement vers Éphèse. En venant du sud-est, on aperçoit la ville comme ramassée au pied d'une montagne, mais on la voit s'étendre tout autour à mesure qu'on s'avance. Devant Ephèse, se trouvent de grandes allées d'arbres sous lesquels des fruits jaunes se trouvent par terre. Un peu au midi, d'étroits sentiers conduisent sur une hauteur couverte de plantes sauvages ; puis, on trouve une plaine ondulée et couverte de végétation qui a une demi-lieue de tour : c'était là que s'était fait cet établissement. C'est une contrée très solitaire, avec beaucoup de collines agréables et fertiles, et quelques grottes creusées dans le roc, au milieu de petites places sablonneuses. Le pays est sauvage, sans être stérile ; il y a ça et là beaucoup d'arbres à forme pyramidale, dont le tronc est lisse et dont les branches ombragent un large espace.


Lorsque saint Jean conduisit là la sainte Vierge, pour laquelle il avait fait construire une maison d'avance, quelques familles chrétiennes et plusieurs saintes femmes résidaient déjà dans cette contrée ; elles demeuraient, les unes sous des tentes, les autres dans les grottes qu'on avait rendues habitables à l'aide de quelques charpentes et de quelques boiseries. Elles y étaient venues avant que la persécution n'eût éclaté dans toute sa violence. Comme elles tiraient parti des grottes qui se trouvaient là et des facilités que présentait la nature des lieux, leurs demeures étaient de vrais ermitages, séparés souvent d'un quart de lieue les uns des autres ; et cette espèce de colonie présentait l'aspect d'un village dont les maisons seraient dispersées à de grands intervalles. La maison de Marie était la seule qui fût en pierre. A quelque distance, derrière cette maison, le terrain s'élevait et aboutissait, à travers des rochers, au point culminant de la montagne, du haut de laquelle, par delà les collines et les arbres, on voyait la ville d'Éphèse et la mer avec ses nombreuses îles. Et lieu était plus voisin de la mer qu'Éphèse elle-même, qui en était à une certaine distance. La contrée était solitaire et peu fréquentée. Il y avait dans le voisinage un château où demeurait un personnage qui était, si je ne me trompe, un roi dépossédé. Saint Jean le visitait souvent, et il le convertit. Cet endroit devint, plus tard un évêché. Entre cette résidence de la sainte Vierge et Éphèse, serpentait une rivière qui faisait des détours innombrables.


II - La maison de Marie à Ephèse.


La maison de Marie était carrée ; la partie postérieure se terminait en rond ou en angle ; les fenêtres étaient pratiquées à une grande hauteur ; le toit était plat. Elle était séparée en deux parties par le foyer, qui était placé au milieu. On allumait le feu en face de la porte, dans l'excavation d'un mur, terminé des deux côtés par des espèces de degrés qui s'élevaient jusqu'au toit de la maison. Dans le centre de ce mur, courait, à partir de l'âtre jusqu'au haut, une excavation semblable à un demi tuyau de cheminée, où la fumée montait et s'échappait ensuite par une ouverture pratiquée dans le toit. Au-dessus de cette ouverture, je vis un tuyau de cuivre oblique qui dépassait le toit.


Cette partie antérieure de la maison était séparée de la partie qui était derrière l'Atre par des cloisons légères en clayonnage. Dans cette partie, dont les murs étaient assez grossièrement construits et un peu noircis par la fumée, je vis des deux côtés de petites cellules formées par des cloisons en branches entrelacées. (quand on voulait en faire une grande salle, on défaisait ces cloisons qui étaient peu élevées, et on les mettait de côté. C'était dans les cellules en question que couchaient la servante de Marie et d'autres femmes qui lui rendaient visite.


A droite et à gauche du foyer, de petites portes conduisaient à la partie postérieure de la maison, qui était peu éclairée, terminée circulairement ou en angle, du resta très proprement et très agréablement disposée. Tous les murs étaient revêtus de boiseries, et le haut formait une voûte. Les poutres qui la surmontaient, liées entre elles par d'autres solives et recouvertes de feuillage, avaient une apparence simple et décente.


L'extrémité de cette pièce, séparée de reste par un rideau, formait la chambre à coucher de Marie. Au centre du mur se trouvait, dans une niche, comme un tabernacle qu'on faisait tourner sur lui-même au moyen d'un cordon, selon qu'on voulait l'ouvrir ou le fermer. Il y avait une croix longue à peu près comme le bras, de la forme d'un Y, ainsi que j'ai toujours vu la croix de Notre seigneur Jésus-Christ. Elle n'avait pas d'ornements particuliers, et était à peine entaillée, comme les croix que viennent aujourd'hui de la Terre Sainte. Je crois qui saint Jean et Marie l'avaient arrangée eux-mêmes. Elle était faite de différentes espèces de bois. Il me fut dit que le tronc, de couleur blanchâtre, était en cyprès ; l'un des bras, de couleur brune, en cèdre ; l'autre bras, tirant sur le jaune, en palmier ; enfin, l'extrémité, avec la tablette, en bois d'olivier jaune et poli. La croix était plantée dans un support en terre ou en pierre, comme la croix de Jésus dans le rocher du Calvaire. A ses pieds se trouvait un écriteau en parchemin où était écrit quelque chose : c'étaient, je crois, des paroles de Notre-Seigneur. Sur la croix elle-même, était l'image du Sauveur, tracée simplement par des lignes de couleur foncée, afin qu'on put bien la distinguer. J'eus aussi connaissance des méditations de Marie sur les différentes espèces de bois dont elle était faite. Malheureusement, j'ai oublié ces belles explications. Je ne sais pas non plus maintenant si la croix du Christ était réellement faite de ces diverses espèces de bois ; ou si cette croix de Marie avait été ainsi faite pour fournir un aliment à la méditation. Elle était placée entre deux vases pleins de fleurs naturelles.


Je vis aussi un linge posé près de la croix, et j'eus le sentiment que c'était celui avec lequel la sainte Vierge, après la descente de croix, avait essuyé le sang qui couvrait le corps sacré du Sauveur. J'eus cette impression, parce qu'à la vue de ce linge cet acte de saint amour maternel fut présenté devant mes yeux. Je sentis, en même temps, que c'était comme le linge avec lequel les prêtres purifient le calice quand ils ont bu le sang du Rédempteur dans le saint sacrifice ; Marie, essuyant les blessures de son Fils, me parut faire quelque chose de semblable ; et, du reste, dans cette circonstance, elle avait pris et plié de la même manière le linge dont elle se servait. J'eus la même impression en voyant ce linge prés de la croix.


A droite de cet oratoire, était la cellule où reposait la sainte Vierge, et, vis-à-vis de celle-ci, à gauche de l'oratoire, un autre petit réduit où étaient disposés ses vêtements et ses effets. De l'une à l'autre de ces cellules, était tendu un rideau qui cachait l'oratoire placé entre elles. C'était devant ce rideau que Marie avait coutume de s'asseoir quand elle lisait ou travaillait.


La cellule de la sainte Vierge s'appuyait par derrière à un mur recouvert d'un tapis ; les cloisons latérales étaient en clayonnage léger, qui ressemblait à un ouvrage de marqueterie. Au milieu de la cloison antérieure, qui était couverte d'une tapisserie, se trouvait une porte légère, à deux battants, qui s'ouvrait à l'intérieur. Le plafond de cette cellule était aussi en clayonnage, qui formait comme une voûte au centre de laquelle était suspendue une lampe à plusieurs branches. La couche de Marie était une espèce de coffre creux, haut d'un pied et demi, de la largeur et de la longueur d'un lit ordinaire de petite dimension. Les côtés étaient recouverts de tapis qui descendaient jusqu'au sol et qui étaient bordés de franges et de houppes. Un coussin rond servait d'oreiller, et un tapis brun à carreaux de couverture. La petite maison était voisine d'un bois et entourée d'arbres à forme pyramidale. C'était un lieu solitaire et tranquille, Les habitations des autres familles se trouvaient à quelque distance. Elles étaient dispersées ça et là et formaient comme un village.



Brentano - Bse Emmerich, Vie Vierge Marie - XCVI - La fontaine de Mataréa. Job y avait habité avant Abraham. Détails sur ce patriarche.