Ecclesia in Oceania FR 49

La vie des ministres ordonnés

49 Depuis le Concile Vatican II, les prêtres ont été confrontés aux changements, aux développements et aux défis de la société contemporaine. Les Pères du Synode ont reconnu « la fidélité et l'engagement persévérants des prêtres dans leur ministère presbytéral. Cette fidélité est d'autant plus impressionnante qu'elle est vécue dans un monde d'incertitude, de solitude, d'affairisme, et parfois d'indifférence et d'apathie. Nous reconnaissons la fidélité des prêtres comme un puissant témoignage de la compassion du Christ envers son peuple, et nous les louons pour cela ».(165)

La vie des prêtres se conforme entièrement à celle du Christ, qui s'est livré lui-même pour que nous ayons tous la vie en plénitude. Par le ministère ordonné, la présence du Christ est rendue visible au milieu de la communauté. Cela ne signifie pas cependant que les prêtres sont exempts de faiblesse humaine ou de péché. En effet, tout prêtre a besoin de se convertir en permanence et de s'ouvrir à l'Esprit afin d'approfondir son engagement sacerdotal en fidélité au Christ. « Pour préserver cette fidélité, le Synode conseille vivement à tous les membres du clergé de renouveler leurs efforts pour modeler leur vie de prière sur celle du Christ et pour adopter un style de vie qui reflète la vie du Christ dans sa simplicité, dans sa confiance envers le Père, dans sa générosité à l'égard des pauvres et dans son identification avec les petits ».(166)

Le Synode était conscient d'une érosion de l'identité sacerdotale, en particulier par le dénigrement du célibat des prêtres dans un monde influencé par des valeurs qui sont contraires aux exigences de l'Évangile. Le célibat sacerdotal est un grand mystère fondé sur l'amour du Christ, et il appelle à une relation radicale, aimante, intégrale avec le Christ et avec son Corps qui est l'Église. Le célibat est un don de Dieu pour ceux qui sont appelés à vivre la vie chrétienne comme prêtres, et il est une grande grâce pour toute l'Église, un témoignage du don total de soi pour le Royaume. Les valeurs éternelles du célibat évangélique et de la chasteté devront être défendues et expliquées par l'Église dans des cultures qui ne les ont jamais connues et dans des sociétés contemporaines où de telles valeurs sont peu comprises ou peu appréciées. Une recherche toujours plus approfondie sur le mystère chrétien du célibat aidera ceux qui ont accepté ce don à le vivre d'une manière plus fidèle et plus paisible.(167)

Le Concile Vatican II a enseigné que, « établis par leur ordination dans l'ordre du presbytérat, les prêtres sont tous liés entre eux par une intime fraternité sacramentelle; mais de façon spéciale, dans le diocèse au service duquel ils sont affectés sous l'autorité de l'Évêque propre, ils forment un seul presbyterium ».(168) En fait, avec leur Évêque, les prêtres forment une unique communauté, appelée communément le presbyterium. D'une manière toute particulière, lacommunio du presbyterium trouve une expression liturgique dans le rite de l'Ordination sacerdotale, et dans la concélébration de l'Eucharistie avec l'Évêque, spécialement au cours de la Messe chrismale du Jeudi saint. Les prêtres malades, âgés ou en retraite ont une place spéciale dans le presbyterium. Afin que l'Église leur manifeste sa reconnaissance pour leur fidélité, on ne manquera pas de les assister et de subvenir à leurs besoins. Il faudra aussi faire sentir aux prêtres retirés du ministère pastoral qu'ils conservent une place estimable dans le presbyterium.(169)

La communio du presbyterium comporte aussi d'autres aspects pratiques. « Les prêtres ont besoin de la compagnie et du soutien de leur Évêque et d'autres prêtres. Les Évêques sont invités à faire sentir aux prêtres qu'ils sont vraiment leurs collaborateurs dans la vigne du Seigneur. Ils devront aussi encourager les prêtres à prendre soin les uns des autres, dans un esprit de fraternité, afin de construire un clergé diocésain local soudé par un soutien mutuel et par un renouvellement permanent ».(170) Ce soutien dans l'amour fraternel est particulièrement important dans les situations insulaires où de nombreux prêtres proviennent de sociétés qui ont de forts liens communautaires, et dans lesquelles on les honore de manière spéciale en raison de leur ordination et de leur rang à l'intérieur de la société. « Considérés ainsi par le peuple qu'on leur a demandé de servir, ils ont besoin d'être considérablement soutenus pour établir leurs propres traditions et leur style de vie comme prêtres diocésains ».(171)

La vie des Évêques, des prêtres et des diacres nécessite une formation continue et des occasions pour raviver le zèle de leur vocation divine. Les Pères du Synode ont fortement recommandé de créer des occasions appropriées sur les plans spirituel, pastoral, intellectuel et convivial, afin d'augmenter la capacité d'accomplir le ministère et de s'engager de manière énergique dans la mission tout au long des années. Certains aspects de la formation continue ont été mis en lumière par le Synode: « Il est rappelé à tous les ministres que l'accomplissement de leurs tâches quotidiennes - célébration de l'Eucharistie, lecture quotidienne de l'Écriture, prière de la Liturgie des Heures, étude des Écritures et d'autres sources pour la prédication et l'enseignement, ministère de la confession, lecture d'ouvrages théologiques et de périodiques - contribue à leur édification et à leur renouvellement. Des efforts personnels doivent être entrepris pour prendre part à des retraites, à des conférences et à des congés annuels, même si cela oblige à laisser les activités pastorales. La formation permanente requiert que tous continuent à développer leur aptitude à proclamer le message de l'Évangile de façon à être compris par tous; la formation permanente n'est pas seulement intellectuelle, mais aussi spirituelle, humaine et pastorale. On encourage les Évêques à organiser dans ce sens la formation permanente dans leurs diocèses. Des dispositions doivent être prises aussi pour permettre des congés d'étude et des temps de renouvellement spirituel pour tout le clergé ».(172) Les Pères du Synode ont exprimé le désir d'offrir un soutien pastoral à leurs prêtres en étant ouverts à leurs besoins en toutes circonstances. Ils ont aussi été sensibles à la situation de ceux qui ont quitté le ministère.

Dans certaines parties de l'Océanie, des abus sexuels de la part de prêtres ou de religieux ont fait endurer aux victimes de grandes souffrances et des blessures spirituelles. Cela a été dramatique pour la vie de l'Église et est devenu un obstacle à la proclamation de l'Évangile. Les Pères du Synode ont condamné tout abus sexuel et toutes les formes d'abus de pouvoir, à la fois à l'intérieur de l'Église et dans la société tout entière. Dans l'Église, les abus sexuels sont en profonde contradiction avec l'enseignement et le témoignage de Jésus Christ. Les Pères synodaux ont souhaité demander pardon sans réserve aux victimes pour les souffrances et la détresse qui leur ont été causées.(173) L'Église en Océanie cherche des procédures ouvertes et justes pour répondre aux plaintes en ce domaine, et elle s'est engagée sans équivoque à être compatissante et à fournir une aide effective aux victimes, à leurs familles, à la communauté entière et aux coupables eux-mêmes.

(165) Proposition 36.
(166) Ibid.
(167) Cf. Proposition 35.
(168) Décret sur le ministère et la vie des prêtres Presbyterorum Ordinis, n.
PO 8.
(169) Cf. Proposition 36.
(170) Proposition 33.
(171) Ibid.
(172) Proposition 34.
(173) Cf. Proposition 43.


Le diaconat permanent

50 Le Concile Vatican II a décidé de restaurer le diaconat permanent en tant que ministère ordonné dans l'Église latine. Ce ministère a été introduit dans quelques diocèses de l'Océanie, où il a été bien reçu. Un avantage propre au diaconat permanent est sa capacité d'adaptation à une grande variété de besoins pastoraux locaux. Les Évêques en Synode ont rendu grâce pour le travail inlassable et pour le dévouement des diacres permanents en Océanie, conscients qu'ils étaient de la générosité des familles des diacres mariés. Une bonne formation des diacres est vitale, tout comme une catéchèse et une préparation approfondies de l'ensemble du diocèse, spécialement dans les communautés où ils serviront.(174) Il est en outre très important qu'ils puissent bénéficier d'une formation permanente. Il est bon que les prêtres et les diacres, chacun répondant à sa vocation particulière, coopèrent ensemble étroitement pour annoncer l'Évangile et administrer les sacrements.(175)

(174) Cf. Congrégation pour l'Éducation catholique et Congrégation pour le Clergé, Normes fondamentales pour la formation des diacres permanents et Directoire pour le ministère et la vie des diacres permanents (22 février 1998): AAS 90 (1998), pp. 843-927; La Documentation catholique 95 (1998), pp. 409-447.
(175) Cf. Proposition 32.


La vie consacrée

51 L'histoire de la fondation de l'Église en Océanie recoupe en grande partie l'histoire de l'apostolat missionnaire d'un nombre incalculable de religieux et de religieuses qui, avec dévouement et désintéressement, ont proclamé l'Évangile dans un vaste champ de situations et de cultures. Leur engagement persévérant dans le travail d'évangélisation demeure d'une importance vitale et continue d'enrichir la vie de l'Église de manière singulière. Leur vocation les rend experts en matière de communio de l'Église. En poursuivant la perfection de la charité dans le service du Royaume, ils répondent à la soif de spiritualité des peuples de l'Océanie et ils sont un signe de la sainteté de l'Église.(176) Les Pasteurs devront toujours affirmer la valeur unique de la vie consacrée et rendre grâce à Dieu pour l'esprit de sacrifice des familles qui acceptent de donner un ou plusieurs de leurs enfants au Seigneur pour qu'ils suivent ce chemin merveilleux.(177)

Fidèles aux charismes de la vie consacrée, les Congrégations, les Instituts et les Sociétés de vie apostolique se sont courageusement adaptés aux nouvelles circonstances, et ils ont répandu de façon nouvelle la lumière de l'Évangile. Une bonne formation est primordiale pour l'avenir de la vie consacrée, et il est essentiel que ceux qui aspirent à ce genre de vie reçoivent la meilleure formation possible dans les domaines théologique, spirituel et humain. Dans cette perspective, les jeunes devront être accompagnés de manière appropriée dans les premières années de leur itinéraire de disciples. Étant donné l'importance centrale de la vie consacrée dans l'Église en Océanie, il est important que les Évêques respectent les charismes des Instituts religieux et encouragent ces derniers à les partager sous toutes les formes possibles avec l'Église locale. Cela peut être fait par leur participation à l'organisation et aux prises de décision dans le diocèse; de la même façon, les Évêques devront encourager les religieux et les religieuses à prendre part à la mise en application des plans pastoraux de l'Église locale.

Les Ordres contemplatifs se sont implantés en Océanie, et ils manifestent d'une manière toute spéciale la transcendance de Dieu et la valeur suprême de l'amour du Christ. Ils témoignent de l'intime communion entre les personnes, au sein de la communauté et avec Dieu. Les Pères du Synode étaient conscients que la vie de prière propre à la vocation contemplative est vitale pour l'Église en Océanie. Du coeur même de l'Église et de manière mystérieuse, elle inspire et pousse les fidèles à vivre la vie du Christ de manière plus radicale. C'est pourquoi les Évêques ont vivement insisté pour que la vie contemplative ne cesse jamais d'être en Océanie l'objet d'une profonde considération et ils se sont engagés à la promouvoir de toutes les manières possibles.(178)

(176) Cf. Proposition 29.
(177) Cf. ibid.
(178) Cf. ibid.

52 Considérant la générosité de Dieu en Océanie et son amour infini pour les peuples du continent, comment pourrions-nous ne pas rendre grâce à Celui de qui vient tout don parfait? Comment ne pas louer Dieu pour le trésor de la foi, don inestimable parmi ces nombreux dons, et pour l'appel à la mission que ce don implique? Nous avons mis notre foi dans le Christ, et c'est la parole du Christ qu'il nous faut annoncer dans les circonstances concrètes de notre époque et de nos cultures. L'Assemblée spéciale pour l'Océanie a proposé un certain nombre de pistes et de suggestions que les Églises locales en Océanie devront prendre en compte pour être à même de jouer leur rôle dans le travail de la nouvelle évangélisation. Devant quelque difficulté que ce soit, nous sommes appelés à cette tâche par le Christ ressuscité, qui a ordonné à Pierre et aux autres Apôtres: « Avance au large, et jetez les filets pour prendre du poisson » (Lc 5,4). Notre foi en Jésus nous enseigne que notre espérance n'est pas vaine et que nous pouvons dire avec Pierre: « Sur ton ordre, je vais jeter les filets » (Lc 5,5). Le résultat est surprenant: « Ils prirent une grande quantité de poissons » (Lc 5,6). Les eaux de l'Océanie soient nombreuses, vastes et profondes, et pourtant l'Église en Océanie n'a cessé de cheminer joyeusement et dans la confiance avec le Christ, annonçant sa vérité et vivant sa vie. Voici venu le temps d'une bonne pêche!





CONCLUSION


Marie, notre Mère

53 En concluant cette Exhortation apostolique, je vous invite à vous tourner avec moi vers la Vierge Marie, Mère de Jésus et Mère de l'Église, si vénérée dans toute l'Océanie. Les missionnaires tout comme les immigrants ont transmis la profonde dévotion à la Vierge qu'ils portaient en eux comme faisant partie intégrante de leur foi catholique; et depuis lors, les fidèles en Océanie n'ont jamais cessé de manifester leur grand amour envers Marie.(179) Elle a merveilleusement aidé l'Église dans ses efforts pour proclamer et enseigner l'Évangile dans tout le Pacifique. De nos jours, elle n'est pas moins présente dans l'Église qu'elle ne l'était à la Pentecôte quand, avec les Apôtres, ils étaient réunis en prière (cf. Ac 1,14). Par son intercession et par sa présence, elle ne manquera pas de soutenir la nouvelle évangélisation comme elle le fit pour la première annonce. Dans les moments de difficultés et de souffrance, Marie a été un refuge indéfectible pour ceux qui cherchaient paix et guérison. Dans les églises, les chapelles et les maisons, l'image de Marie rappelle à tous sa présence affectueuse et sa maternelle protection. En plusieurs régions du Pacifique, elle est particulièrement vénérée sous le vocable de « Secours des chrétiens »; et les Évêques l'ont proclamée patronne de l'Océanie sous le titre de « Notre-Dame de la Paix ».

En Jésus Christ, qu'elle a porté en son sein, est né un nouveau monde, où justice et miséricorde se rencontrent, un monde de liberté et de paix. Par la Croix et la résurrection du Christ, Dieu a réconcilié le monde avec lui et il a fait du Seigneur Jésus le Prince de la Paix pour tous les temps et tous les lieux. Puisse Marie, Regina Pacis, aider les peuples de l'Océanie à jouir de cette paix et à la partager avec d'autres! À l'aube du troisième millénaire chrétien, qu'une justice et une harmonie véritables soient le don que Dieu fait à l'Océanie et à toutes les nations du monde!(180)

En exprimant ma reconnaissance pour la grâce de cette Assemblée spéciale du Synode, je recommande tous les peuples de l'Océanie à la maternelle sollicitude de la Bienheureuse Vierge Marie, dans l'absolue confiance qu'elle écoute toujours d'une oreille attentive, qu'elle ouvre toujours largement son coeur et que sa prière est toujours exaucée.

Prière

Ô Marie, Secours des chrétiens,
nous nous tournons vers toi dans nos nécessités,
les yeux remplis d'amour,
les mains vides et le coeur plein de désirs.
Nous nous tournons vers toi
qui nous fais voir ton Fils, notre Seigneur.
Nous levons nos mains
pour recevoir le Pain de la Vie.
Nous ouvrons tout grands nos coeurs
pour accueillir le Prince de la Paix.
Mère de l'Église,
tes fils et tes filles te remercient
pour ta parole de foi qui traverse tous les âges,
montant d'une âme pauvre, pleine de grâce,
préparée par Dieu pour accueillir
le Verbe dans le monde
afin que le monde lui-même puisse renaître.
En toi, s'annonçait comme une aurore
le règne de Dieu,
règne de grâce et de paix,
règne d'amour et de justice,
né du mystère du Verbe fait chair.
L'Église répandue à travers le monde
s'unit à toi pour louer Celui
dont la miséricorde s'étend d'âge en âge.

O Stella Maris, lumière de tous les océans
et maîtresse des profondeurs,
guide les peuples de l'Océanie,
à travers les mers sombres et tempétueuses,
vers le port de lumière et de paix
préparé par Celui qui apaisa la tempête.
Garde tous tes enfants à l'abri du mal,
car les vagues sont hautes
et nous sommes loin du port.
Tandis que nous avançons
sur les océans du monde,
et que nous traversons les déserts
de notre temps,
montre-nous, ô Marie, le fruit de ton sein,
car, sans ton Fils, nous sommes perdus.
Prie pour que
nous ne tombions pas en chemin,
pour que, dans nos coeurs
et dans nos esprits,
en paroles et en actes,
dans les jours de tumulte
et dans les jours de calme,
nous gardions toujours
les yeux fixés sur le Christ en disant:
« Qui est-il donc celui-là,
que même le vent et la mer lui obéissent? ».

Notre-Dame de la Paix,
en qui toutes les tempêtes s'apaisent peu à peu,
prie, à l'aube du nouveau millénaire,
pour que l'Église en Océanie
ne cesse jamais de montrer
la face glorieuse de ton Fils,
plein de grâce et de vérité,
afin que les hommes et les femmes
du Pacifique
laissent Dieu régner dans leurs coeurs
et qu'ils trouvent la paix
dans le vrai Sauveur du monde.
Intercède pour l'Église en Océanie
afin qu'elle reçoive la force
de suivre fidèlement le chemin de Jésus Christ,
de proclamer courageusement
la vérité de Jésus Christ,
de vivre joyeusement la vie de Jésus Christ.
Ô Secours des chrétiens, protège-nous!
Brillante Étoile de la mer, guide-nous!
Notre-Dame de la Paix, prie pour nous!


(179) Cf. Proposition 48.
(180) Cf. ibid.


Donné à Rome, près de Saint-Pierre, le 22 novembre 2001, en la vingt-quatrième année de mon pontificat.

JOANNES PAULUS PP. II



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