1997 Directoire pour la catechèse 53

La conversion et la foi

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En annonçant au monde la Bonne Nouvelle de la Révélation, l'évangélisation invite les hommes et les femmes à la conversion et à la foi. (140) L'appel de Jésus, " convertissez-vous et croyez à l'Evangile " (
Mc 1,15) retentit aujourd'hui encore, grâce à l'oeuvre d'évangélisation de l'Eglise.
La foi chrétienne est, avant tout, conversion à Jésus-Christ, (141) adhésion pleine et sincère à sa personne et décision de marcher à sa suite. (142) La foi est une rencontre personnelle avec Jésus-Christ; c'est devenir son disciple, à savoir s'engager à penser comme lui, à juger comme lui et à vivre comme il a vécu. (143) Le croyant s'unit ainsi à la communauté des disciples et fait sienne la foi de l'Eglise. (144)

Notes:

(140) Cf. Rm 10,17 LG 16 cf. AGD 7 cf. CEC 846-848
(141) Cf. AGD 13.
(142) Cf. CTR 5.
(143) Cf. CTR 20.
(144) Cf. CEC 166-167


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Ce " oui " à Jésus-Christ, plénitude de la Révélation du Père, renferme une double dimension: l'abandon confiant à Dieu et l'assentiment amoureux à tout ce qu'il nous a révélé. Cela n'est possible que par l'action de l'Esprit Saint. (145)

" Par l'obéissance de la foi,

- l'homme s'en remet tout entier et librement à Dieu,

- dans un complet hommage d'intelligence et de volonté à Dieu qui révèle, et dans un assentiment volontaire à la révélation qu'il fait ". (146)

" Croire a donc une double référence: à la personne et à la vérité; à la vérité par confiance en la personne qui l'atteste ". (147)

Notes:

(145) Cf.
CEC 150 CEC 153 CEC 150 CEC 176.
(146) DV 5
(147) CEC 177


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La foi implique un changement de vie, une " metanoïa ", (148) c'est-à-dire un changement profond du regard et du coeur; elle conduit le croyant à une " nouvelle manière d'être, de vivre, de vivre ensemble, que l'Evangile inaugure ". (149) Ce changement de vie se manifeste à tous les niveaux de l'existence du chrétien: dans sa vie intérieure d'adoration et d'accueil de la volonté de Dieu; dans sa participation à la mission de l'Eglise; dans sa vie conjugale et familiale; dans la vie professionnelle; dans les activités économiques et sociales.

La foi et la conversion jaillissent du " coeur ", c'est-à-dire du plus profond de la personne humaine, et l'engagent tout entière. Par sa rencontre avec Jésus-Christ et par son adhésion à sa personne, l'être humain voit se combler ses attentes les plus intimes, il trouve ce qu'il a toujours cherché et l'obtient en abondance. (150) La foi répond à cette " attente ", (151) souvent inconsciente et toujours limitée, de connaître la vérité sur Dieu, sur l'homme et sur sa destinée. Elle est comme une eau pure (152) sur le chemin de l'homme, pèlerin à la recherche de son foyer.

La foi est un don de Dieu. Elle ne peut naître à l'intime du coeur de l'homme que comme fruit de la grâce " prévenante et aidante " (153) et comme réponse, totalement libre, à l'appel de l'Esprit Saint qui touche le coeur et le tourne vers Dieu, en lui donnant " la douceur de consentir et de croire à la vérité ". (154)

La Vierge Marie a vécu de la manière la plus parfaite ces dimensions de la foi. L'Eglise vénère en elle " la réalisation la plus pure de la foi ". (155)

Notes:

(148) Cf.
EN 10 AGD 13 CEC 1430-1431
(149) EN 23
(150) Cf. AGD 13
(151) Cf.
(152) Cf. RMi 46.
(153) DV 5 cf. CEC 153
(154) DV 5 cf. CEC 153
(155) CEC 149



Le processus de conversion permanente

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La foi est un don destiné à se développer dans le coeur des croyants. (156) L'adhésion à Jésus-Christ déclenche, en effet, un processus de conversion permanente qui dure toute la vie. (157) La personne qui accède à la foi est comme un nouveau-né (158) qui, petit à petit, grandit et devient un adulte à constituer l'" Homme parfait ", (159) à réaliser la plénitude du Christ.

Dans le processus de foi et de conversion, divers moments essentiels sont à souligner du point de vue de la théologie:

a) L'intérêt pour l'Evangile: Le premier moment est celui au cours duquel la première annonce fait naître dans le coeur du non-croyant, de l'indifférent ou du membre d'une autre religion, un intérêt pour l'Evangile, sans qu'il s'agisse encore d'une décision ferme. Ce premier mouvement de l'esprit de l'homme vers la foi, qui est déjà un fruit de la grâce, porte plusieurs noms: " inclination à la foi ", (160) " préparation à l'Evangile ", (161) inclination à croire, " recherche religieuse ". (162) L'Eglise appelle ceux qui manifestent cette préoccupation des " sympathisants ". (163)

b) La conversion. Ce premier intérêt pour l'Evangile exige un temps de recherche (164) avant de devenir un choix ferme. L'option pour la foi est une décision qui doit être bien pesée. Cette recherche, sous l'action de l'Esprit Saint et par l'annonce du kerygme, conduit à la conversion qui sera, bien sûr, " initiale ", (165) mais qui est déjà adhésion à Jésus-Christ et désir de marcher à sa suite. Cette " option fondamentale " fonde toute la vie chrétienne du disciple du Seigneur. (166)

c) La profession de foi. L'abandon à Jésus-Christ engendre chez les croyants le désir de le mieux connaître et de s'identifier à Lui. La catéchèse les initie à la connaissance de la foi et à l'apprentissage de la vie chrétienne, en favorisant un itinéraire spirituel qui entraîne " un changement progressif de la mentalité et des moeurs ", (167) fait de renoncements et de luttes, mais aussi de joies que Dieu donne sans mesure. Le disciple de Jésus-Christ est alors prêt pour une profession de foi vivante, explicite et agissante. (168)

d) Le chemin vers la perfection. Cette maturité initiale, source de la profession de foi, n'est pas la dernière étape du processus permanent de conversion. La profession de foi baptismale est le fondement d'un édifice spirituel destiné à grandir. Le baptisé, toujours animé par l'Esprit, nourri par les sacrements, par la prière et par la pratique de la charité, et aidé par les multiples formes d'éducation permanente à la foi, cherche à faire sien le désir du Christ: " Soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait " (
Mt 5,48) . (169) C'est l'appel à la plénitude adressé à tout baptisé.

Notes:

(156) CTR 20: " Il s'agit de faire grandir, au niveau de la connaissance et dans la vie, la semence de la foi déposée par l'Esprit Saint lors de la première annonce ".
(157) Cf. RMi 46.
(158) Cf. 1P 2,2 He 5,13
(159) Ep 4,13
(160) RICA 12.
(161) Cf. Eusèbe de Césarée, Praeparatio evangelica, I, 1: SCh 206, 6; LG 16 AGD 3.
(162) CL 4c.
(163) RICA 12 et 111.
(164) Cf. RICA 6 et 7.
(165) AGD 13.
(166) Cf. AGD 13 EN 10 RMi 46 VS 66 RICA 10.
(167) AGD 13.
(168) Cf. MPD 8b CEC 187-189
(169) Cf. LG 11 LG 40 LG 42.


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Le ministère de la Parole est au service de ce processus de pleine conversion. La première annonce appelle à la foi; la catéchèse donne un fondement à la conversion et une structure de fond à la vie chrétienne; l'éducation permanente à la foi - dans laquelle l'homélie tient une place de choix -, est la nourriture dont tout organisme adulte a besoin pour vivre. (170)

Notes:

(170) Cf.
DV 24 EN 45


L'Evangélisation et les diverses situations socio-religieuses

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Dans le panorama religieux complexe et mouvant qui se présente à l'évangélisation, " trois situations " (171) exigent tout particulièrement des réponses adéquates et différenciées.

a) La situation des " peuples, des groupes humains, des contextes socio-culturels dans lesquels le Christ et son Evangile ne sont pas connus, ou dans lesquels il n'y a pas de communautés chrétiennes assez mûres pour pouvoir incarner la foi dans leur milieu et l'annoncer à d'autres groupes ". (172) Cette situation requiert la " mission ad gentes ", (173) avec une activité évangélisatrice centrée de préférence sur les jeunes et les adultes. Sa particularité tient au fait qu'elle s'adresse aux non-chrétiens en les invitant à la conversion. Dans cette situation, la catéchèse se fait d'ordinaire dans le catéchuménat baptismal.

b) Il est, par ailleurs, d'autres situations où, dans un contexte socio-culturel déterminé, on trouve " des communautés chrétiennes aux structures ecclésiales fortes et adaptées, à la foi et à la vie ferventes, qui rendent témoignage à l'Evangile de manière rayonnante dans leur milieu et qui prennent conscience du devoir de la mission universelle ". (174) Ces communautés ont besoin d'une intense " activité pastorale de l'Eglise ", du moment qu'elles sont constituées de personnes et de familles ayant un sens chrétien profond. Dans ce contexte, la catéchèse des petits enfants, des adolescents et des jeunes doit promouvoir de vrais processus d'initiation chrétienne bien organisés, qui leur permettent d'arriver à l'âge adulte avec une foi mûre. D'évangélisés, elle fera d'eux des évangélisateurs. Dans ces situations également, diverses méthodes sont adoptées pour la formation chrétienne des adultes.

c) En de nombreux pays de vieille tradition chrétienne et parfois aussi dans les Eglises plus jeunes, il existe une " situation intermédiaire ", (175) où " des groupes entiers de baptisés ont perdu le sens de la foi vivante ou vont jusqu'à ne plus se reconnaître comme membres de l'Eglise, en menant une existence éloignée du Christ et de son Evangile ". (176) Cette situation requiert une " nouvelle évangélisation ". Sa caractéristique consiste dans le fait que l'activité missionnaire s'adresse à des baptisés de tous âges qui vivent dans un contexte religieux où les références chrétiennes existent mais ne sont perçues qu'extérieurement. Dans cette situation, la première annonce et une catéchèse de base sont une priorité.

Notes:

(171) Cf.
RMi 33
(172) RMi 33.
(173) Ibid Il est important de prendre conscience des " contextes " (fines) que Rmi destine à la " mission ad gentes ". Il ne s'agit pas seulement de " territoires " (RMi 37 ad a), mais aussi de " mondes et de phénomènes sociaux nouveaux " (RMi 37 ad b), comme les grandes villes, le monde des jeunes, les migrations,. et de " zones culturelles ou aréopages modernes " (RMi 37 ad c), comme le monde de la communication, de la science, l'écologie. Dans cette mesure, une Eglise particulière, déjà implantée sur un territoire, réalise la " mission ad gentes " non seulement " ad extra " mais aussi " ad intra " de ses frontières.
(174) RMi 33.
(175) RMi 33.
(176) RMi 33.



Interdépendance entre les activités

évangélisatrices dans ces situations

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Ces situations socio-religieuses sont évidemment différentes et il ne faut pas les assimiler. Cette diversité, qui a toujours caractérisé la mission de l'Eglise, revêt aujourd'hui, dans ce monde qui change, un aspect nouveau. En effet, diverses situations coexistent sur un même territoire. Dans les grandes villes, par exemple, il faut faire face à la situation qui requiert une " mission ad gentes " et à celle qui requiert " une nouvelle évangélisation ". Au milieu de celles-ci des communautés chrétiennes missionnaires sont présentes, édifiées par une " activité pastorale " adaptée. Souvent de nos jours, sur le territoire d'une Eglise particulière, il faut faire face à l'ensemble de ces situations. " Les frontières de la charge pastorale des fidèles, de la nouvelle évangélisation et de l'activité missionnaire spécifique ne sont pas nettement définissables et on ne saurait créer entre elles des barrières ou une compartimentation rigide ". (177) De fait, " chacune exerce une influence sur l'autre, la stimule et lui vient en aide ". (178)

C'est pourquoi, en vue d'un enrichissement mutuel des activités évangélisatrices qui coexistent, il faut tenir compte que:

- la mission ad gentes, quelle que soit la zone ou le milieu dans lequel elle se réalise, est la tâche la plus spécifiquement missionnaire que Jésus ait confiée à son Eglise; elle est par conséquent le modèle par excellence de toute l'activité missionnaire de l'Eglise. La " nouvelle évangélisation " ne peut ni évincer ni remplacer la " mission ad gentes ", qui continue d'être l'activité missionnaire spécifique et première. (179)

- " Le modèle de toute catéchèse est le catéchuménat baptismal. Il constitue la formation spécifique par laquelle l'adulte converti à la foi est conduit à la profession de foi baptismale pendant la veillée pascale ". (180) Cette formation catéchuménale doit inspirer les autres formes de catéchèse, dans leurs objectifs et dans leur dynamisme.

- " La catéchèse des adultes, s'adressant à des hommes capables d'une adhésion pleinement responsable, doit être considérée comme la forme privilégiée de la catéchèse, à laquelle toutes les autres - non moins nécessaires -, sont d'une certaine manière ordonnées ". (181) Cela implique que la catéchèse qui s'adresse aux autres tranches d'âge doit s'y référer et former avec elle un projet catéchistique cohérent de pastorale diocésaine.

Ainsi, la catéchèse qui fait partie de la mission évangélisatrice de l'Eglise et qui en est un " moment " essentiel, puise dans l'évangélisation le dynamisme missionnaire qui la féconde du dedans et lui donne son identité propre. Le ministère de la catéchèse est donc un service ecclésial fondamental dans l'accomplissement du mandat missionnaire de Jésus.

Notes:

(177)
RMi 34.
(178) RMi 34. Le texte parle concrètement de l'enrichissement mutuel entre la mission ad intra et la mission ad extra. au $ 59c, montre comment " la mission ad gentes " stimule les peuples au développement, tandis que la " nouvelle évangélisation " dans les pays développés crée une claire conscience de solidarité à l'égard d'autrui.
(179) Cf. RMi 31 RMi 34
(180) MPD 8.
(181) DGC (1971) 20; cf. CTR 43 infra partie IV, chap. 2.




CHAPITRE II

La catéchèse dans le processus d'évangélisation


" Nous l'avons entendu et connu, nos pères nous l'ont raconté; nous ne le tairons pas à leurs enfants; nous raconterons à la génération qui vient la puissance du Seigneur et les merveilles qu'Il a accomplies " (Ps 78,3-4) .

" Apollos avait été instruit de la Voie du Seigneur et, dans la ferveur de son âme, il prêchait et enseignait avec exactitude ce qui concerne Jésus " (Ac 18,25) .


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Ce chapitre expose le rapport de la catéchèse avec les autres éléments de l'évangélisation dont elle est partie intégrante.

Il commence par décrire le rapport entre la catéchèse et la première annonce, qui se réalise dans la mission. Il souligne ensuite le lien étroit entre la catéchèse et les sacrements de l'initiation chrétienne. Puis il met en évidence le rôle fondamental de la catéchèse dans la vie ordinaire de l'Eglise, dans sa tâche d'éduquer en permanence à la foi.

Ce chapitre porte une attention particulière au rapport entre la catéchèse et l'enseignement de la religion à l'école car les deux activités sont interdépendantes et, avec l'éducation chrétienne dans la famille, elles sont essentielles à la formation de l'enfance et de la jeunesse.


Première annonce et catéchèse

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La première annonce est destinée aux non-croyants et à ceux qui, de fait, vivent dans l'indifférence religieuse. Elle a pour objet l'annonce de l'Evangile et l'appel à la conversion. La catéchèse, qui se " distingue de la première annonce de l'Evangile ", (182) développe et porte à maturité la conversion initiale en éduquant le converti à la foi et en l'incorporant dans la communauté chrétienne. Ainsi, ces deux formes du ministère de la Parole sont distinctes et se complètent.

La première annonce qui est du devoir de chaque chrétien est une réponse à l'appel de Jésus à ses disciples: " Allez ". (183)

Cette première annonce engage par conséquent à sortir, à se hâter, à proposer. La catéchèse, au contraire, part de la condition mise par Jésus lui-même: " celui qui croira ", (184) celui qui se convertira, celui qui se décidera. Les deux actions sont essentielles et s'appellent mutuellement: aller et accueillir, annoncer et éduquer, appeler et incorporer.

Notes:

(182)
CTR 19
(183) Mc 16,15 cf. Mt 28,19
(184) Mc 16,16



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Dans la pratique pastorale, cependant, les frontières entre les deux actions ne sont pas facilement définissables. Souvent, les personnes qui accèdent à la catéchèse ont besoin, de fait, d'une conversion authentique. C'est pourquoi l'Eglise souhaite, en général, qu'une première étape du processus catéchistique soit consacrée à susciter la conversion. (185) Dans la " missio ad gentes ", cette tâche s'effectue dans le " pré-catéchuménat ". (186) Dans la situation qui requiert la " nouvelle évangélisation, on a recours à la catéchèse kérygmatique " que certains appellent " précatéchèse ", (187) parce que, en s'inspirant du pré-catéchuménat, elle est une proposition de la Bonne Nouvelle en vue d'une option de foi solide. C'est uniquement à partir de la conversion, c'est-à-dire en comptant sur l'attitude intérieure de " celui qui croira ", que la catéchèse proprement dite jouera son rôle spécifique d'éducation à la foi. (188)

Le fait que la catéchèse accomplisse, en un premier temps, cette tâche missionnaire, ne dispense pas l'Eglise particulière de promouvoir une intervention action institutionnelle de première annonce comme accomplissement plus direct du mandat missionnaire de Jésus. Le renouveau catéchistique doit se fonder sur cette évangélisation missionnaire préalable.

Notes:

(185) Cf.
CTR 19 DGC (1971) 18.
(186) RICA 9-13; cf. CIC 788
(187) Dans ce Directoire, on suppose que, d'ordinaire, le destinataire de la " catéchèse kérygmatique " ou " précatéchèse " a un intérêt ou une préoccupation pour l'Evangile. Si ce n'est absolument pas le cas, c'est une " première annonce " qui est requise.
(188) Cf. RICA 9, 10, 50; CTR 19



La catéchèse, " moment " essentiel du processus d'évangélisation

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L'exhortation apostolique Catechesi Tradendae, en situant la catéchèse dans la mission de l'Eglise, rappelle que l'évangélisation est une réalité riche, complexe et dynamique, faite de " moments " essentiels et différents entre eux. Et elle ajoute: " La catéchèse est l'un de ces moments - et combien remarquable - de tout le processus d'évangélisation ". (189) Cela veut dire qu'il y a des activités qui " préparent " (190) la catéchèse et d'autres qui en " découlent ". (191)

Le " moment " de la catéchèse est le temps pendant lequel prend forme la conversion à Jésus-Christ; il établit les fondements de la première adhésion. Les convertis, par " une formation à la vie chrétienne intégrale et un apprentissage mené de la façon qui convient ", (192) sont initiés au mystère du Salut et à un mode de vie évangélique. Il s'agit, en effet, de les " initier à la plénitude de la vie chrétienne ". (193)

Notes:

(189)
CTR 18 cf. .
(190) CTR 18
(191) Ibid
(192) AGD 14
(193) CTR 18


64

En exerçant de diverses manières cette tâche d'initiation du ministère de la Parole, la catéchèse établit les fondements de l'édifice de la foi. (194) D'autres tâches de ce ministère élèveront ensuite les étages de l'édifice.

La catéchèse d'initiation est ainsi le maillon reliant l'activité missionnaire, qui appelle à la foi, à l'activité pastorale qui régénère la communauté chrétienne. Il ne s'agit donc pas d'une activité facultative, mais fondamentale pour développer aussi bien la personnalité du disciple que celle de la communauté. Sans elle, l'activité missionnaire serait vaine. Sans elle, encore, l'activité pastorale n'aurait pas de fondement et serait donc superficielle, vague: le moindre coup de vent ferait s'écrouler l'édifice. (195)

En vérité, " la croissance intérieure de l'Eglise, sa correspondance avec le dessein de Dieu, dépendent essentiellement d'elle ". (196) En ce sens, la catéchèse doit être considérée comme un moment prioritaire dans l'évangélisation.

Notes:

(194) S. Cyrille de Jérusalem: Catecheses illuminandorum I, 11: PG 33, 351-352.
(195) Cf.
Mt 7,24-27
(196) CTR 13 cf. CTR 15


La catéchèse au service de l'initiation chrétienne

65

La foi, par laquelle l'homme répond à l'annonce de l'Evangile, exige le baptême. Le lien intime entre foi et baptême s'enracine dans la volonté même du Christ qui ordonne à ses apôtres de faire de toutes les nations ses disciples et de les baptiser. " La mission de baptiser, donc la mission sacramentelle, est impliquée dans la mission d'évangéliser ". (197)

En recevant les sacrements de l'initiation chrétienne - le Baptême, la Confirmation et l'Eucharistie -, ceux qui se sont convertis à Jésus-Christ et ont été éduqués à la foi par la catéchèse, sont " délivrés de la puissance des ténèbres; morts avec le Christ, ensevelis avec Lui et ressuscités avec lui, ils reçoivent l'Esprit d'adoption des enfants et célèbrent avec tout le Peuple de Dieu le mémorial de la mort et de la résurrection du Seigneur ". (198)

. La catéchèse est ainsi un élément fondamental de l'initiation chrétienne; elle est étroitement liée aux sacrements de l'initiation, surtout au Baptême, " sacrement de la foi ". (199) Le maillon qui relie la catéchèse au baptême est la profession de foi; celle-ci est, à la fois, l'élément intérieur de ce sacrement et l'objectif de la catéchèse. La finalité de l'activité catéchistique est précisément de favoriser une profession de foi vivante, explicite et agissante. (200) Pour y parvenir, l'Eglise transmet aux catéchumènes et à ceux qu'il faut catéchiser, son expérience vivante de l'Evangile, sa foi, afin qu'ils se l'approprient en la professant à leur tour. Par conséquent, " la catéchèse authentique est toujours initiation ordonnée et systématique à la Révélation que Dieu a faite de lui-même à l'homme, en Jésus-Christ, Révélation gardée dans la mémoire profonde de l'Eglise et dans les Saintes Ecritures, et constamment communiquée, par une " traditio " vivante et active, d'une génération à l'autre ". (201)

Notes:

(197)
CEC 1122
(198) AGD 14 cf. CEC 1212 CEC 1229
(199) CEC 1253 Dans le catéchuménat baptismal des adultes, propre à la mission ad gentes, la catéchèse précède le baptême. Dans la catéchèse des baptisés (enfants, jeunes ou adultes) la formation suit le baptême. Mais dans ce cas également, l'objectif de la catéchèse est de faire découvrir et vivre les immenses richesses du Baptême reçu. CEC 1231 utilise l'expression catéchuménat post-baptismal. CL 61 parle de catéchèse post-baptismale.
(200) Cf. CD 14
(201) CTR 22 cf. CTR 18 CTR 21.



Caractéristiques fondamentales de la catéchèse d'initiation

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" Moment essentiel " du processus d'évangélisation, au service de l'initiation chrétienne, la catéchèse revêt certaines caractéristiques. (202) Elle est:

- Une formation organique et systématique de la foi. Le Synode de 1977 a souligné la nécessité d'une catéchèse " structurée et cohérente ", (203) étant donné que l'approfondissement du mystère chrétien distingue fondamentalement la catéchèse de toutes les autres formes d'annonce de la Parole de Dieu.

- Cette formation organique est plus qu'un enseignement: elle est un apprentissage de toute la vie chrétienne, " une initiation chrétienne intégrale " (204) qui permet une vie authentique à la suite du Christ, centrée sur sa Personne. Il s'agit, en effet, d'éduquer à la connaissance et à la vie de foi, de sorte que l'homme tout entier, dans ses expériences les plus profondes, se sente fécondé par la Parole de Dieu. Le disciple du Christ sera ainsi aidé à transformer le vieil homme, à assumer les promesses de son Baptême et à professer la foi à partir du " coeur ". (205)

- Elle est une formation de base, essentielle, (206) centrée sur le noyau de l'expérience chrétienne, sur les certitudes de la foi et sur les valeurs évangéliques les plus fondamentales. La catéchèse établit les fondements de l'édifice spirituel du chrétien, nourrit les racines de sa vie de foi, en le préparant à recevoir la nourriture solide dans la vie ordinaire de la communauté chrétienne.

Notes:

(202) Cf.
CTR 21
(203) CTR 21 Deux raisons méritent d'être soulignées dans cet apport du Synode, contenu dans " Catechesi Tradendae ": le souci de tenir compte d'un problème pastoral (" j'insiste sur la nécessité d'un enseignement chrétien organique et systématique, parce que de divers côtés, on tend à en minimiser l'importance "); et le caractère organique qui distingue la catéchèse.
(204) CTR 21
(205) Cf. CTR 20 Saint Augustin, De catechizandis rudibus IV, 8: CCL 46, 128-129.
(206) Cf. CTR 21.


68

En résumé, organique et systématique, la catéchèse d'initiation ne peut être un fait circonstanciel ou occasionnel; (207) apprentissage de la vie chrétienne, elle va au-delà - d'un simple enseignement tout en l'incluant -; (208) essentielle, elle porte sur ce qui est " ordinaire " pour le chrétien, sans aborder les questions disputées ni se transformer en recherche théologique. Enfin, initiation, elle incorpore dans la communauté qui vit, célèbre et témoigne de la foi. Elle accomplit donc en même temps des tâches d'initiation, d'éducation et d'instruction. (209) Cette richesse, inhérente au catéchuménat des adultes non-baptisés, doit inspirer les autres formes de catéchèse.

Notes:

(207) Cf.
CTR 21.
(208) Cf. AGD 14 CTR 33 cf. CEC 1231
(209) Cf. DGC (1971) 31.



La catéchèse au service de l'éducation permanente de la foi

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L'éducation permanente de la foi suit l'éducation de base et la suppose. Toutes deux sont des formes du ministère de la Parole, distinctes et complémentaires, au service du processus permanent de conversion.

La catéchèse d'initiation établit les fondements de la vie chrétienne chez les disciples de Jésus. Le processus permanent de conversion va au-delà de ce qu'apporte la catéchèse de base. Pour favoriser ce processus, il faut une communauté chrétienne qui accueille les catéchumènes, les soutienne et les forme dans la foi. " La catéchèse risque de se stériliser si une communauté de foi et de vie chrétienne n'accueille pas le catéchumène à un certain stade de sa catéchèse ". (210) En accompagnant le catéchumène, la communauté le fait vivre pleinement au milieu d'elle.

Notes:

(210)
CTR 24


L'éducation permanente de la foi dans la communauté chrétienne

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Dans la communauté chrétienne, les disciples de Jésus s'alimentent à une double table: " tant celle de la Parole de Dieu que celle du Corps du Christ ". (211) L'Evangile et l'Eucharistie sont la nourriture constante du pèlerin dans sa marche vers la maison du Père. L'action de l'Esprit Saint fait que le don de la " communion " et l'engagement pour la " mission " sont vécus de manière toujours plus profonde et intense.

L'éducation permanente de la foi s'adresse non seulement à chaque chrétien qu'elle accompagne dans sa marche vers la sainteté, mais aussi à la communauté chrétienne qu'elle fait mûrir dans sa vie intime d'amour de Dieu et des frères et dans son ouverture missionnaire au monde. Le désir et la prière de Jésus au Père sont un appel incessant: " Que tous soient un, comme toi, Père, tu es en moi et moi en toi, afin que le monde croie que tu m'as envoyé ". (212) Pour s'approcher peu à peu de cet idéal, la communauté a besoin d'une grande fidélité à l'action de l'Esprit Saint, de s'alimenter sans cesse au Corps et au Sang du Seigneur et d'éduquer sa foi en permanence, dans l'écoute de la Parole.

A cette table de la Parole de Dieu, l'homélie occupe une place privilégiée car " elle reprend l'itinéraire de foi proposé par la catéchèse et le porte à son achèvement naturel; en même temps, elle pousse les disciples du Seigneur à reprendre chaque jour leur itinéraire spirituel dans la vérité, l'adoration et l'action de grâce ". (213)

Notes:

(211)
DV 21
(212) Jn 17,21
(213) CTR 48 cf. SC 52 DV 24 DGC (1971) 17; Misssale Romanum, Ordo lectionum Missae, n. 24, Editio typica altera, Libreria Editrice Vaticana 1981.


Les nombreuses formes de catéchèse permanente

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Dans l'éducation permanente de la foi, le ministère de la Parole peut compter sur de nombreuses formes de catéchèse, parmi lesquelles:

- L'étude et l'approfondissement de l'Ecriture Sainte, lue non seulement dans l'Eglise, mais avec l'Eglise et avec sa foi toujours vivante. Cela aide à découvrir la vérité divine, de façon à susciter une réponse de foi. La " lectio divina " est une des formes par excellence de cette étude vitale de l'Ecriture. (214)

- La lecture chrétienne des événements, que réclame la vocation missionnaire de la communauté chrétienne. A ce sujet, l'étude de la doctrine sociale de l'Eglise est indispensable puisque " son but principal est d'interpréter ces réalités (celles, complexes, de la vie de l'homme dans la société et dans le contexte international), en examinant leur conformité ou leurs divergences avec les orientations de l'enseignement de l'Evangile ". (215)

- La catéchèse liturgique qui prépare aux sacrements et favorise une compréhension et une expérience plus profonde de la liturgie. Elle explique les contenus des prières, le sens des gestes et des signes, elle éduque à la participation active, à la contemplation et au silence. Elle doit être considérée " comme une forme éminente de catéchèse ". (216)

- La catéchèse occasionnelle qui aide à interpréter et à vivre dans une vision de foi certaines circonstances de la vie personnelle, familiale et sociale. (217)

- Les initiatives de formation spirituelle qui renforcent les convictions, ouvrent à de nouveaux horizons et aident à persévérer dans la prière et dans les engagements de la " sequela Christi ".

- L'approfondissement systématique du message chrétien par un enseignement théologique qui éduque vraiment à la foi, qui fait grandir dans l'intelligence de la foi et donne au chrétien la capacité de rendre compte de son espérance dans le monde actuel. (218) En un certain sens, on pourrait appeler cet enseignement " catéchèse de perfectionnement ".

Notes:

(214) Cf.
DV 21-25 Commission biblique pontificale, Document L'interprétation de la Bible dans l'Eglise (21 septembre 1993), IV, C 2-3.
(215) SRS 41 cf. CA 5 CA 53-62 DGC (1971) 26; Congrégation pour l'éducation catholique, Document Orientations pour l'étude et l'enseignement de la doctrine sociale de l'Eglise dans la formation des prêtres (30 décembre 1988), Rome 1988.
(216) CTR 23 cf. SC 35 ad 3; CIC 777, ad 1 et 2.
(217) Cf. CTR 21 CTR 47 DGC (1971) 96 ad c, d, e, f.
(218) Cf. 1P 3,15 Congrégation pour la doctrine de la foi, Instruction Donum veritatis, n. 6b: l.c. 1552; CTR 61, sur le rapport entre catéchèse et théologie.



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Il est extrêmement important que la catéchèse d'initiation pour les adultes - baptisés ou non -, la catéchèse d'initiation - pour les enfants et les jeunes - et la catéchèse permanente soient reliées entre elles dans le projet catéchistique de la communauté chrétienne, afin que l'Eglise particulière grandisse harmonieusement et que son activité évangélisatrice découle de sources sûres. " Il importe que catéchèse d'enfants et de jeunes, catéchèse permanente, catéchèse d'adultes ne soient pas des domaines étanches. Il faut favoriser leur parfaite complémentarité ". (219)

Notes:

(219)
CTR 45.



Le caractère propre de l'enseignement de la

religion à l'école : Catéchèse et enseignement

de la religion a l'école

73

Une attention spéciale mérite d'être portée - au sein du ministère de la Parole - sur le caractère propre de l'enseignement religieux à l'école et sur son rapport avec la catéchèse des enfants et des jeunes.

L'enseignement de la religion à l'école et la catéchèse ont un rapport distinct et complémentaire: " Il existe un lien indissoluble et, à la fois, une nette distinction entre l'enseignement de la religion et la catéchèse ". (220)

Ce qui confère à l'enseignement de la religion à l'école sa caractéristique, c'est qu'il est appelé à pénétrer le milieu culturel et à entrer en relation avec d'autres formes du savoir. En tant que forme originale du ministère de la parole, en effet, cet enseignement insère l'Evangile dans le processus personnel d'assimilation, systématique et critique, de la culture.(221)

Dans l'univers culturel intériorisé par les élèves et défini par les connaissances et par les valeurs offertes par d'autres disciplines scolaires, l'enseignement de la religion à l'école dépose le ferment dynamique de l'Evangile et tente de " rejoindre vraiment les autres éléments du savoir et de l'éducation, afin que l'Evangile imprègne la mentalité des élèves sur le terrain de leur formation et que l'harmonisation de leur culture se fasse à la lumière de la foi ". (222)

D'où la nécessité que l'enseignement de la religion à l'école apparaisse comme une discipline scolaire, avec la même exigence d'ordre et de rigueur qu'ont les autres disciplines. Il doit présenter le message et l'événement chrétien avec le même sérieux et la même profondeur que ceux mis en oeuvre par les autres disciplines pour présenter leurs connaissances. A leurs côtés, il ne se situe pas comme une chose accessoire, mais comme l'élément d'un indispensable dialogue interdisciplinaire. Ce dialogue doit s'instaurer, avant tout, à ce niveau où chaque discipline influe sur la personnalité de l'élève. Ainsi, la présentation du message chrétien jouera sur la manière de concevoir l'origine du monde et le sens de l'histoire, le fondement des valeurs éthiques, le rôle de la religion dans la culture, la destinée de l'homme, le rapport avec la nature. L'enseignement religieux à l'école, à travers ce dialogue interdisciplinaire, fonde, renforce, développe et complète l'action éducative de l'école. (223)

Notes:

(220) Congrégation pour l'éducation catholique, Dimension religieuse de l'éducation dans l'Ecole catholique - Lineamenta pour la réflexion et la révision (7 avril 1988), n. 68; cf.
CD 13 Jean-Paul II, Allocution aux prêtres du diocèse de Rome (5 mars 1981): Insegnamenti di Giovanni Paolo II, IV1, pp. 629-630; CIC 761
(221) Cf. Sacrée Congrégation pour l'éducation catholique, Document L'Ecole catholique (19 mars 1977), n. 26.
(222) CTR 69 A noter, comme pour CTR 69, que l'originalité de l'enseignement de la religion à l'école ne consiste pas seulement à rendre possible le dialogue avec la culture en général, puisque cela concerne toutes les formes du ministère de la Parole. Par l'enseignement de la religion à l'école on cherche, plus directement, à promouvoir ce dialogue dans le processus personnel d'initiation systématique et critique, et de rencontre avec le patrimoine culturel promu par l'école.
(223) Cf. Congrégation pour l'éducation catholique, Dimension religieuse de l'éducation dans l'Ecole catholique., n. 70: l.c.




1997 Directoire pour la catechèse 53