1997 Directoire pour la catechèse 73

Le contexte scolaire et les destinataires

de l'enseignement scolaire de la religion

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L'enseignement de la religion à l'école s'exerce dans des contextes scolaires différents, ce qui fait que, tout en maintenant son caractère propre, il prend des accentuations diverses. Celles-ci dépendent des conditions juridiques et organisationnelles, de la conception de l'enseignement, des présupposés personnels des enseignants et des élèves, ainsi que des rapports de l'enseignement de la religion à l'école avec la catéchèse familiale et paroissiale.

On ne peut réduire à une seule forme tous les modèles d'enseignement de la religion à l'école qui sont apparus au cours de l'histoire, suite aux conventions avec les Etats et aux délibérations des conférences épiscopales. Il est pourtant nécessaire de s'engager afin que cet enseignement, selon ses présupposés, réponde à sa finalité et à ses caractéristiques particulières. (224)

Les élèves " ont le droit d'apprendre avec vérité et certitude la religion à laquelle ils appartiennent. On ne peut négliger leur droit à connaître plus à fond la personne du Christ ainsi que l'intégrité de l'annonce du salut qu'il a apporté. Le caractère confessionnel de l'enseignement de la religion dans l'école, dispensé par l'Eglise selon les modalités et les formes établies en chaque pays, est donc une garantie indispensable offerte aux familles et aux élèves qui choisissent cet enseignement ". (225)

Pour l'école catholique, cet enseignement de la religion, en étant qualifié et complété par d'autres formes du ministère de la Parole (catéchèses, célébrations liturgiques, etc.), est une partie indispensable de leur tâche pédagogique et le fondement de leur existence. (226)

L'enseignement de la religion, dans le cadre de l'école publique et de l'école non-confessionnelle, là où les autorités civiles ou d'autres circonstances imposent qu'il soit commun aux catholiques et aux non-catholiques, aura un caractère plus oecuménique et servira à une connaissance interreligieuse commune. (227)

En d'autres circonstances, l'enseignement scolaire de la religion pourra prendre un caractère plutôt culturel, s'intéressant à la connaissance des religions, tout en présentant la religion catholique avec l'importance qui lui revient. (228) Dans ce cas également, surtout s'il est dispensé par un professeur sincèrement respectueux, il garde une dimension de vraie " préparation évangélique ".

Notes:

(224) Cf. Jean-Paul II, Allocution au Symposium du Conseil des Conférences Episcopales d'Europe sur l'Enseignement de la Religion catholique dans l'Ecole publique (15 avril 1991), n. 5: Insegnamenti di Giovanni Paolo II, XIV1, pp. 780 ss.
(225) Ibid
(226) Cf.
CTR 69 Congrégation pour l'éducation catholique, Dimension religieuse de l'éducation dans l'école catholique, n. 66: l.c.
(227) Cf. CTR 33
(228) Cf. CTR 34


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La situation de vie et de foi des élèves qui fréquentent l'enseignement religieux dans l'école est caractérisée par une mutation continue et considérable. L'enseignement religieux à l'école doit tenir compte de ce donné pour pouvoir rejoindre ses propres finalités.

L'enseignement scolaire de la religion aide les élèves croyants à mieux comprendre le message chrétien par rapport aux grands problèmes de l'existence qui sont communs aux religions et caractéristiques de tout être humain, par rapport aux conceptions de la vie les plus répandues dans la culture, et aux principaux problèmes moraux qui concernent l'humanité actuelle.

Quant aux élèves qui sont en phase de recherche, ou confrontés à des doutes religieux, ils pourront trouver dans l'enseignement religieux scolaire ce qu'est exactement la foi en Jésus-Christ, quelles sont les réponses de l'Eglise à leurs questions, leur permettant de mieux peser leur décision personnelle.

Enfin, pour les élèves non-croyants, l'enseignement scolaire de la religion revêt les caractéristiques d'une annonce missionnaire de l'Evangile, en vue d'une décision de foi que la catéchèse, de son côté, dans un contexte communautaire, fera grandir et mûrir.



Education chrétienne en famille, catéchèse et

enseignement de la religion à l'école au service

de l'éducation dans la foi

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L'éducation chrétienne en famille, la catéchèse et l'enseignement de la religion à l'école, chacun selon ses caractéristiques propres, sont intimement liés entre eux, au service de l'éducation chrétienne des enfants, des adolescents et des jeunes. Sur le plan pratique, il faut cependant tenir compte des variations qui se présentent, afin de procéder avec réalisme et prudence pastorale à l'application des orientations générales.

Il appartient, par conséquent, à chaque diocèse ou région pastorale de discerner les diverses circonstances, soit en ce qui concerne l'existence ou non d'une initiation chrétienne dans le milieu familial, soit en ce qui concerne les tâches éducatives exercées dans la tradition ou la situation locale par les paroisses, les écoles, etc.

Les Eglises particulières et la conférence épiscopale donneront donc les orientations propres aux divers milieux, en encourageant des activités qui sont, à la fois, distinctes et complémentaires.




CHAPITRE III


Nature, but et tâches de la catéchèse


" .Que toute langue proclame de Jésus-Christ qu'il est Seigneur à la gloire de Dieu le Père " (Ph 2,11) .



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Après avoir défini la place de la catéchèse dans la mission évangélisatrice de l'Eglise, ses rapports avec les divers éléments de l'évangélisation et avec les autres formes du ministère de la Parole, ce chapitre entend réfléchir particulièrement à ce qui suit:

- la nature ecclésiale de la catéchèse, c'est-à-dire le sujet agissant de la catéchèse: l'Eglise animée par l'Esprit;

- la finalité qu'elle poursuit fondamentalement en catéchisant;

- les tâches par lesquelles elle réalise cette finalité, qui constituent ses objectifs les plus immédiats;

- la gradualité interne au processus catéchistique et l'inspiration catéchuménale qui l'anime.

D'autre part, ce chapitre approfondit davantage le caractère propre de la catéchèse - déjà décrit dans le chapitre précédent lors de l'étude des relations qu'elle établit avec les autres activités ecclésiales.


La catéchèse, une action de nature ecclésiale

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La catéchèse est un acte essentiellement ecclésial. (229) Le vrai sujet de la catéchèse est l'Eglise qui, continuant la mission du Maître, Jésus, et, sous l'action de l'Esprit, a été appelée à être éducatrice de la foi. Par conséquent, l'Eglise, en imitant la Mère du Seigneur, conserve fidèlement l'Evangile dans son coeur, (230) elle l'annonce, le célèbre, le vit et le transmet, par la catéchèse, à tous ceux qui ont décidé de suivre Jésus-Christ.

Cette transmission de l'Evangile est un acte vivant de tradition ecclésiale: (231)

- En effet, l'Eglise transmet la foi qu'elle-même vit: son intelligence du mystère de Dieu et de son dessein de salut; sa vision de la très haute vocation de l'homme; le style de vie évangélique qui communique la joie du Royaume; l'espérance qui l'envahit; l'amour qu'elle ressent pour l'humanité et pour toutes les créatures de Dieu.

- L'Eglise transmet la foi d'une manière active, elle la sème dans le coeur des catéchumènes et des catéchisés, pour féconder leurs expériences les plus profondes. (232) La profession de foi reçue de l'Eglise (" traditio "), en germant et en grandissant tout au long du processus catéchistique, est restituée (" redditio "), enrichie des valeurs des différentes cultures. (233) Le catéchuménat devient ainsi un centre fondamental de développement de la catholicité et un ferment de renouveau de l'Eglise.

Notes:

(229) Cf. ce qui a été indiqué au chap. de de cette partie, dans " La transmission de la Révélation par l'Eglise, oeuvre de l'Esprit Saint ", et dans la deuxième partie au chap. 1, dans " Le caractère ecclésial du message évangélique ". Cf.
EN 60, qui parle de le caractère ecclésial de tout acte d'évangélisation.
(230) Cf. LG 64 DV 10.
(231) Cf. DGC (1971) 13.
(232) Cf. AGD 22.
(233) Cf. CTR 28, RICA 25 et 183-187. La traditio-redditio symboli (remise et restitution du symbole) a été et demeure un élément important du catéchuménat baptismal. La bipolarité de ce geste exprime la double dimension de la foi: don reçu (traditio) et réponse personnelle et inculturée (redditio). Cf. CTR 28 pour " une utilisation adaptée plus large ", dans la catéchèse, de ce rite si expressif.


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En transmettant la foi et la vie nouvelle - par l'initiation chrétienne - l'Eglise agit comme la mère des hommes qui engendre des fils conçus du Saint-Esprit et nés de Dieu. (234) Précisément " parce qu'elle est notre mère, elle est aussi l'éducatrice de notre foi ". (235) Elle est, à la fois, mère et éducatrice. Par la catéchèse, elle nourrit ses fils de sa propre foi et les incorpore dans la famille de l'Eglise. En mère pleine de bonté, elle leur offre l'Evangile dans toute son authenticité et sa pureté, comme une nourriture adaptée, culturellement enrichie, comme une réponse aux aspirations les plus profondes du coeur de l'homme.

Notes:

(234) Cf.
LG 64
(235) CEC 169 Le rapport entre la maternité de l'Eglise et son rôle d'éducatrice a été très bien exprimé par saint Grégoire le Grand: " après avoir été fécondée, concevant ses fils grâce au ministère de la prédication, l'Eglise les fait grandir en son sein par ses enseignements " (Moralia in Iob, XIX, 12: CCL 143a, 970).



But de la catéchèse: la communion avec Jésus-Christ

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" Le but définitif de la catéchèse est de mettre quelqu'un non seulement en contact mais en communion, en intimité, avec Jésus-Christ ". (236)

Toute l'activité évangélisatrice tend à favoriser la communion avec Jésus-Christ. A partir de la conversion " initiale " (237) d'une personne au Seigneur, provoquée par l'Esprit Saint avec la première annonce, la catéchèse se propose de donner un fondement à cette première adhésion et de la faire mûrir. Il s'agit d'aider celui qui vient de se convertir à " .mieux connaître ce Jésus auquel il s'est livré: connaître son "mystère", le Royaume de Dieu qu'il annonce, les exigences et les promesses contenues dans son message évangélique, les sentiers qu'il a tracés pour quiconque veut le suivre ". (238) Le Baptême est le sacrement " par lequel nous sommes conformés au Christ ", (239) et qui soutient par sa grâce, l'oeuvre de la catéchèse.

Notes:

(236)
CTR 5 cf. CEC 426 AGD 14. En lien avec cette finalité christologique de la catéchèse, cf. supra partie I, chap. 1: " Jésus-Christ médiateur et plénitude de toute la Révélation ", et partie II, chap. 1: " Le christocentrisme du message évangélique ".
(237) AGD 13.
(238) CTR 20.
(239) LG 7.


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La communion avec Jésus-Christ, de par sa dynamique intrinsèque, pousse le disciple à s'unir à tout ce à quoi Jésus-Christ était lui-même profondément uni: à Dieu, son Père, qui l'avait envoyé dans le monde, et à l'Esprit Saint qui lui donnait l'élan pour la mission; à l'Eglise, son corps, pour laquelle il se livra, et aux hommes, ses frères, dont il a voulu partager la condition.

Le but de la catéchèse s'exprime dans la profession de foi au Dieu unique: Père, Fils et Saint-Esprit


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La catéchèse est la forme particulière du ministère de la Parole qui fait mûrir la conversion initiale, jusqu'à ce qu'elle devienne une profession de foi vivante, explicite et agissante: " La catéchèse naît de la profession de foi et mène à la profession de foi ". (240)

La profession de foi, lors du Baptême, (241) est éminemment trinitaire. L'Eglise baptise " au nom du Père, du Fils et du Saint Esprit " (
Mt 28,19), (242) Dieu un et trine, auquel le chrétien confie sa vie. La catéchèse d'initiation prépare - avant et après le Baptême - à cet engagement décisif. La catéchèse permanente aidera à faire mûrir la profession de foi, à la proclamer dans l'Eucharistie et à renouveler les engagements qu'elle implique. Il est important que la catéchèse sache bien faire le lien entre la profession de foi christologique, " Jésus est le Seigneur " et la profession de foi trinitaire, " Je crois au Père, au Fils et au Saint-Esprit ", puisqu'il ne s'agit que de deux manières d'exprimer la même foi chrétienne. Celui qui, dans la première annonce, se convertit à Jésus-Christ et le reconnaît comme Seigneur, entreprend un processus qui, avec l'aide de la catéchèse, conduit nécessairement à la profession explicite de la Trinité.

Par la profession de foi en l'unique Dieu, le chrétien renonce à servir tout autre absolu humain: pouvoir, plaisir, race, ancêtres, Etat, argent., (243) et se libère de toute idole qui le rend esclave. Il proclame sa volonté de servir Dieu et les hommes sans aucune entrave. En professant sa foi en la Trinité, communion de personnes, le disciple de Jésus-Christ manifeste, en même temps, que l'amour de Dieu et du prochain est le principe qui informe son être et son agir.

Notes:

(240) MPD 8; Cf. CEC 185-197
(241) Cf. CEC 189
(242) Cf. CEC 189-190 CEC 197.
(243) Cf. CEC 2113


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La profession de foi n'est complète qu'en référence à l'Eglise. Chaque baptisé proclame individuellement le Credo car aucun acte n'est plus personnel. Mais il le récite dans l'Eglise et par son intermédiaire, en tant que l'un de ses membres. Le " je crois " et le " nous croyons " s'impliquent mutuellement. (244) En fondant sa profession dans celle de l'Eglise, le chrétien est incorporé à sa mission: être " sacrement universel de salut " pour la vie du monde. Celui qui proclame la profession de foi prend des engagements qui lui vaudront souvent la persécution. Dans l'histoire chrétienne, les annonciateurs et les témoins par excellence sont les martyrs. (245)

Notes:

(244) Cf.
CEC 166-167 CEC 196
(245) Cf. RMi 45


Les tâches de la catéchèse réalisent son but

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Le but de la catéchèse est atteint à travers diverses tâches qui s'impliquent mutuellement. (246) Pour les mettre en oeuvre, la catéchèse s'inspirera de la méthode suivie par Jésus pour former ses disciples: il leur faisait connaître les diverses dimensions du Royaume de Dieu (" A vous il a été donné de connaître les mystères du Royaume de Dieu " -
Mt 13,1) ; (247) il leur apprenait à prier (" Lorsque vous priez, dites: Père. " - Lc 11,2) ; (248) il leur proposait les attitudes évangéliques (" Mettez-vous à mon école car je suis doux et humble de coeur " - Mt 11,29) , il les initiait à la mission (" Il les envoya deux par deux. " Lc 10,1) . (249)

Les tâches de la catéchèse correspondent à l'éducation des diverses dimensions de la foi, car la catéchèse est une formation chrétienne intégrale, " ouverte à toutes les composantes de la vie chrétienne ". (250) En vertu de sa dynamique interne, la foi exige d'être connue, célébrée, vécue et traduite en prière. La catéchèse doit promouvoir chacune de ces dimensions. Mais la foi se vit dans la communauté chrétienne et s'annonce dans la mission: c'est une foi partagée et annoncée. Ces dimensions doivent également être favorisées par la catéchèse.

Le Concile Vatican II a exprimé ces tâches ainsi: " la formation catéchistique qui éclaire et fortifie la foi nourrit la vie selon l'Esprit du Christ, achemine à la participation consciente et active au mystère liturgique et incite à l'action apostolique ". (251)


Notes:

(246) Le DGC (1971) 21-29 distingue lui aussi la finalité (finis) et les tâches (munera) de la catéchèse. Ces derniers sont des objectifs spécifiques dans lesquels se concrétise la finalité.
(247) Cf. Mc 4,10-12
(248) Cf. Mt 6,5-6
(249) Cf. Mt 10,5-15
(250) CTR 21.
(251) GE 4 cf. RICA 19; CIC 788,2


Les tâches fondamentales de la catéchèse:

aider à connaître, à célébrer, à vivre et

à contempler le mystère du Christ

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Les tâches fondamentales de la catéchèse sont:

- Favoriser la connaissance de la foi

Celui qui a rencontré le Christ souhaite le connaître toujours plus, tout comme il souhaite connaître le dessein du Père qu'il a révélé. La connaissance des contenus de la foi (fides quae) est requise par l'adhésion à la foi (fides qua). (252) Dans l'ordre humain déjà, lorsqu'on aime une personne, on souhaite la connaître toujours davantage. La catéchèse doit donc conduire " à faire percevoir peu à peu la vérité tout entière du dessein divin ", (253) en formant les disciples de Jésus-Christ à la connaissance de la Tradition et des Ecritures qui sont " la science éminente de Jésus-Christ " (
Ph 3,8) . (254)

L'approfondissement dans la connaissance de la foi donne une lumière chrétienne à l'existence humaine, nourrit la vie de foi, et permet d'en rendre raison dans le monde. La remise du symbole, synthèse de l'Ecriture Sainte et de la foi de l'Eglise, exprime la réalisation de cette tâche.

- L'éducation liturgique

En effet, " le Christ est toujours là, auprès de son Eglise, surtout dans les actions liturgiques ". (255) La communion avec Jésus-Christ conduit à célébrer sa présence salutaire dans les sacrements, et, en particulier, dans l'Eucharistie. L'Eglise souhaite ardemment que tous les fidèles chrétiens soient conduits à cette participation pleine, consciente et active qu'exige la nature de la liturgie elle-même, comme aussi la dignité de leur sacerdoce baptismal. (256) Aussi, la catéchèse doit-elle favoriser non seulement la connaissance de la signification de la liturgie et des sacrements, mais aussi éduquer les disciples de Jésus-Christ " à la prière, à l'action de grâce, à la pénitence, aux prières faites avec confiance, au sens communautaire, au langage des symboles. "; (257) tout cela est nécessaire à une vie liturgique authentique.

- La formation morale

Se convertir à Jésus-Christ implique de marcher à sa suite. Aussi la catéchèse doit-elle transmettre aux disciples les attitudes mêmes du Maître. Ils suivront ainsi un itinéraire de transformation intérieure, au long duquel, par leur participation au mystère pascal du Seigneur, ils " passent du vieil homme à l'homme nouveau dans le Christ ". (258) Le Sermon sur la Montagne, dans lequel Jésus reprend le décalogue et le marque de l'esprit des Béatitudes, (259) est une référence indispensable dans l'éducation morale, aujourd'hui si nécessaire. L'évangélisation, qui " comporte également l'annonce et la proposition de la morale ", (260) répand toute sa puissance d'interpellation, quand, avec la parole annoncée, elle sait offrir également la parole vécue. Ce témoignage moral, auquel la catéchèse prépare, doit savoir mettre en valeur les conséquences sociales des exigences évangéliques. (261)

- Enseigner à prier

La communion avec Jésus-Christ conduit les disciples à prendre la même attitude de prière et de contemplation qui fut celle du Maître. Apprendre à prier avec Jésus c'est prier avec les mêmes sentiments qu'il exprimait lorsqu'il s'adressait au Père: d'adoration, de louange, d'action de grâce, de confiance filiale, de supplication, d'admiration pour sa gloire. Ces sentiments se reflètent dans le Notre Père, la prière que Jésus enseigna à ses disciples et qui est le modèle de toute prière chrétienne. La " remise du Notre Père ", (262) synthèse de tout l'Evangile, (263) est donc l'expression authentique de l'accomplissement de cette tâche. Lorsque la catéchèse est donnée dans un climat de prière, l'apprentissage de toute la vie chrétienne atteint toute sa profondeur. Ce climat devient particulièrement nécessaire lorsque le catéchumène et les catéchisés ont à faire face aux aspects les plus exigeants de l'Evangile et se sentent faibles, ou lorsqu'ils découvrent - avec émerveillement - l'action de Dieu dans leur vie.

Notes:

(252) Cf. DGC (1971) 36a.
(253) DGC (1971) 24.
(254) DV 25.
(255) SC 7
(256) Cf. SC 14
(257) DGC (1971) 25b; cf. SC 19
(258) AGD 13
(259) Cf. CEC 1965-1986 Le CEC 1697 précise notamment les caractéristiques que doit revêtir la catéchèse dans l'éducation morale.
(260) VS 107
(261) Cf. CTR 29
(262) RICA 25 et 188-191.
(263) Cf. CEC 2761



Autres tâches fondamentales de la catéchèse:

initiation et éducation à la vie

communautaire et à la mission

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La catéchèse rend le chrétien capable de vivre en communauté et de participer activement à la vie et à la mission de
l'Eglise. Le Concile Vatican II souligne la nécessité, pour les pasteurs, de " développer vraiment l'esprit communautaire ", (264) et, pour les catéchumènes, d'" apprendre à coopérer activement à l'évangélisation et à la construction de l'Eglise ". (265)

- L'éducation à la vie communautaire

a) La vie chrétienne en communauté ne s'improvise pas; il y faut éduquer avec soin. Dans cet apprentissage, l'enseignement de Jésus sur la vie communautaire, rapporté dans l'Evangile de Saint Matthieu, appelle certaines attitudes que la catéchèse devra inculquer: l'esprit de simplicité et d'humilité (" si vous ne retournez à l'état des enfants. " -
Mt 18,3) ; le souci des plus petits (" si quelqu'un scandalise l'un de ces petits. " - Mt 18,6) ; l'attention particulière pour ceux qui se sont éloignés (" aller à la recherche de la brebis égarée " - Mt 18,12) ; la correction fraternelle (" reprends-le, seul à seul " - Mt 18,15) ; la prière en commun (" si deux d'entre vous unissent leurs voix pour demander quoi que ce soit " - Mt 18,19) ; le pardon réciproque (" jusqu'à soixante-dix-sept fois. " - Mt 18,22) . L'amour fraternel unifie toutes ces attitudes (" aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés " - Jn 13,34) .

b) En éduquant au sens communautaire, la catéchèse prendra soin aussi de la dimension oecuménique et encouragera les attitudes fraternelles à l'égard des membres des autres Eglises et communautés chrétiennes. Dans ce but, la catéchèse exposera donc clairement toute la doctrine de l'Eglise catholique en évitant des expressions ou des développements qui risquent d'induire en erreur. Elle favorisera en outre " une bonne connaissance des autres confessions ", (266) avec lesquelles existent des biens communs tels que " la parole de Dieu écrite, la vie de la grâce, la foi, l'espérance et la charité, et d'autres dons intérieurs du Saint-Esprit ". (267) La catéchèse aura une dimension oecuménique dans la mesure où elle saura susciter et alimenter un " vrai désir de l'unité ", (268) non pas en vue d'un irénisme facile, mais en vue de l'unité parfaite, quand le Seigneur le voudra et par les voies qu'il voudra.

- L'initiation à la mission

a) La catéchèse est également ouverte au dynamisme missionnaire. (269) Elle s'efforce de faire en sorte que les disciples de Jésus sachent être présents, en chrétiens, dans la société, dans la vie professionnelle, culturelle et sociale. Elle les préparera aussi à apporter leur collaboration dans les divers services d'Eglise, selon la vocation de chacun. Cet engagement pour l'évangélisation découle, chez les fidèles laïcs, des sacrements de l'initiation chrétienne et du caractère séculier de leur vocation. (270) Il est également important de tout mettre en oeuvre en vue de susciter des vocations sacerdotales et de particulière consécration à Dieu dans les diverses formes de vie religieuse et apostolique, et en vue d'allumer dans le secret des coeurs des vocations spécifiquement missionnaires.

Les attitudes évangéliques proposées par Jésus à ses disciples, lorsqu'il les initia à la mission, sont celles-là mêmes que la catéchèse doit promouvoir: aller à la recherche de la brebis égarée; annoncer et guérir en même temps; se présenter comme pauvres, sans or ni besace; savoir accepter le rejet et la persécution; mettre sa confiance dans le Père et dans le soutien de l'Esprit Saint; n'attendre en récompense que la joie de travailler pour le Royaume. (271)

b) En éduquant à ce sens missionnaire, la catéchèse formera au dialogue interreligieux qui peut rendre les fidèles capables d'une communication fructueuse avec les hommes et les femmes appartenant à d'autres religions. (272) La catéchèse fera ressortir que le lien de l'Eglise avec les religions non chrétiennes est, tout d'abord, celui de l'origine et de la destinée communes du genre humain, tout comme celui des multiples " semences de la Parole " déposées par Dieu dans ces religions. La catéchèse aidera aussi à savoir concilier, et, en même temps, distinguer, l'" annonce du Christ " et le " dialogue interreligieux ". Ces deux éléments, bien que restant intimement liés, ne doivent être ni confondus ni tenus pour équivalents. (273) En effet " le dialogue ne dispense pas de l'évangélisation ". (274)

Notes:

(264) PO 6.
(265) AGD 14.
(266) DGC (1971) 27.
(267) UR 3.
(268) CTR 32 cf. CEC 821 CTR 32-34
(269) Cf. CTR 24 cf. DGC (1971) 28.
(270) Cf. LG 31 cf. CL 15 CEC 898-900
(271) Cf. Mt 10,5-42 cf. Lc 10,1-20
(272) Cf. EN 53 cf. RMi 55-57
(273) Cf. RMi 55 Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux et Congrégation pour l'évangélisation des peuples, Instruction Dialogue et Annonce. Réflexions et orientations " de Evangelio nuntiando et de Dialogo interreligioso " (19 mai 1991), nn. EN 14-54: AAS 84 (1992) pp. 419-432; CEC 839-845 la quatrième partie reprend ce thème, au chap. 4 sur les destinataires de la catéchèse, dans la section " La catéchèse dans le contexte des autres religions ".
(274) RMi 55.



Quelques considérations sur l'ensemble de ces tâches

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Les tâches de la catéchèse constituent donc un ensemble, aux aspects riches et variés, qui mérite quelques considérations:

- Les tâches sont toutes nécessaires. Comme l'organisme humain a besoin pour vivre que tous ses organes fonctionnent, la vie chrétienne, pour atteindre sa maturité, a besoin que soient cultivées toutes ses dimensions: la connaissance de la foi, la vie liturgique, la formation morale, la prière, l'appartenance communautaire, l'esprit missionnaire. Si la catéchèse néglige une seule de ces dimensions, la foi chrétienne n'atteindra pas son plein développement.

- Chaque tâche, à sa manière, réalise le but de la catéchèse. La formation morale, par exemple, est essentiellement christologique et trinitaire, pleine de signification ecclésiale et ouverte à la dimension sociale. Il en est de même de l'éducation liturgique, essentiellement religieuse et ecclésiale, mais aussi très exigeante dans son engagement d'évangélisation en faveur du monde.

- Les tâches s'impliquent mutuellement et se développent ensemble. Chaque grand thème catéchistique, comme, par exemple, la catéchèse sur Dieu le Père, a une dimension de connaissance et des implications morales; elle est intériorisée dans la prière et assumée dans le témoignage. Une tâche en appelle une autre: la connaissance de la foi rend apte à la mission; la vie sacramentelle donne la force pour la transformation morale.

- Pour réaliser ses tâches, la catéchèse a recours à deux grands moyens: la transmission du message évangélique et l'expérience de la vie chrétienne. (275) Dans l'éducation liturgique, par exemple, il faut expliquer ce qu'est la liturgie chrétienne et ce que sont les sacrements; mais il faut aussi faire faire l'expérience des différents types de célébration, faire découvrir et aimer les symboles, le sens des gestes corporels, etc. Dans la formation morale, il faut non seulement transmettre le contenu de la morale chrétienne, mais cultiver activement les attitudes évangéliques et les valeurs chrétiennes.

- On éduque aux différentes dimensions de la foi aussi bien sous leur aspect de " don " que sous leur aspect d'" engagement ", de devoir. La connaissance de la foi, la vie liturgique, la " sequela Christi " sont chacune un don de l'Esprit reçu dans la prière et, en même temps, une incitation à étudier, au niveau spirituel, moral et du témoignage. Il faut cultiver les deux aspects. (276)

- Chaque dimension de la foi, comme celle-ci dans son ensemble, doit s'enraciner dans l'expérience humaine, et ne pas rester un élément postiche ou isolé. La connaissance de la foi est pleine de sens, elle illumine toute l'existence et elle dialogue avec la culture; dans la liturgie, toute la vie personnelle est une offrande spirituelle; la morale de l'Evangile assume et élève les valeurs humaines; la prière est ouverte à tous les problèmes personnels et sociaux. (277)

Comme l'indiquait le Directoire de 1971, " il est très important que la catéchèse conserve cette richesse d'aspects variés, de sorte qu'aucun aspect ne soit isolé au détriment des autres ". (278)

Notes:

(275) Cf.
CIC 773 CIC 788,2
(276) Cf. DGC (1971) 22 et 23.
(277) Cf. DGC (1971) 26.
(278) DGC (1971) 31b.



Le catéchuménat baptismal: structure et gradualité

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La foi, animée par la grâce de Dieu et alimentée par l'action de l'Eglise, connaît un processus de maturation. La catéchèse, au service de cette croissance, est une activité graduelle. Une catéchèse opportune se fait par degrés. (279)

Dans le catéchuménat baptismal, la formation s'échelonne sur quatre étapes:

- le pré-catéchuménat, (280) temps de la première évangélisation en vue de la conversion, pendant lequel on explicite le kérygme de la première annonce;

- le catéchuménat (281) proprement dit, destiné à la catéchèse intégrale et au commencement duquel a lieu la " remise des Evangiles "; (282)

- le temps de la purification et illumination, (283) qui prépare plus intensément aux sacrements d'initiation, et pendant lequel ont lieu " la remise du Symbole " (284) et la " remise de la Prière du Seigneur "; (285)

- le temps de la mystagogie, (286) caractérisé par l'expérience des sacrements et par l'entrée dans la communauté.

Notes:

(279) Cf. RICA 19.
(280) RICA 9-13.
(281) RICA 14-20; 68-72; 98-105.
(282) RICA 93; cf. MPD 8c.
(283) RICA 21-26; 133-142; 152-159.
(284) RICA 25 et 183-187.
(285) RICA 25 et 188-192.
(286) RICA 37-40; 235-239.


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Ces étapes, pleines de la sagesse de la grande tradition catéchuménale, inspirent la gradualité de la catéchèse. (287) Au temps des Pères de l'Eglise, en effet, la formation proprement catéchuménale se faisait par la catéchèse biblique, centrée sur la narration de l'Histoire du Salut; la préparation immédiate au Baptême, par la catéchèse doctrinale, qui expliquait le Symbole et le Notre Père qui venaient d'être remis, ainsi que leurs implications morales; et l'étape qui suivait les sacrements de l'initiation, par la catéchèse mystagogique, qui aidait à intérioriser ces sacrements et à s'incorporer dans la communauté. Cette conception patristique continue d'être une source de lumière pour le catéchuménat actuel et pour la catéchèse d'initiation.

Celle-ci, comme accompagnement du processus de conversion, est essentiellement graduelle; et, étant au service de celui qui a décidé de suivre Jésus-Christ, elle est éminemment christocentrique.


Notes:

(287) Cette gradualité se perçoit aussi dans les noms que l'Eglise utilise pour désigner ceux qui suivent les diverses étapes du catéchuménat baptismal: " sympathisant " (RICA 12), pour celui qui a un penchant pour la foi même s'il ne croit pas pleinement; " catéchumène " (RICA 17-18) pour celui qui est fermement décidé à suivre Jésus; " élu ", ou " concourant " (RICA 24) pour celui qui est appelé à recevoir le baptême; " néophyte " (RICA 31-36), pour celui qui vient de naître à la lumière grâce au baptême; " fidèle chrétien " (RICA 39), pour celui qui atteint la maturité de la foi et qui est membre actif de la communauté chrétienne.


Le catéchuménat baptismal, inspirateur de la catéchèse dans l'Eglise

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La mission ad gentes étant le paradigme de toute l'action missionnaire de l'Eglise, le catéchuménat baptismal, qui lui est lié, est le modèle dont s'inspire son action catéchistique. (288) Aussi est-il important de souligner les éléments du catéchuménat qui doivent inspirer la catéchèse actuelle, ainsi que la signification de cette inspiration. Cependant, il faut relever qu'il y a une différence fondamentale entre les catéchisés et les catéchumènes, (289) et de même entre la catéchèse post-baptismale et la catéchèse pré-baptismale qui leur sont respectivement dispensées. Les premiers ont reçu les sacrements d'initiation, ils " ont déjà été introduits dans l'Eglise et sont devenus fils de Dieu par le Baptême. Le fondement de leur conversion est donc le Baptême déjà reçu, dont ils doivent développer la puissance ". (290)

Notes:

(288) Cf. MPD 8;
EN 44 CL 61.
(289) Dans ce Directoire Général pour la Catéchèse on distingue les expressions " catéchumèmes " et " catéchisés " pour marquer cette différence. De son côté, le CIC; aux can CIC 204 CIC 206, rappelle la différence dans le mode d'union à l'Eglise des " catéchumènes " et des " fidèles chrétiens ".
(290) RICA 295. Le " Rituel de l'initiation chrétienne des adultes ", au chap. IV, cite le cas des adultes baptisés qui ont besoin d'une catéchèse d'initiation. CTR 44 précise les diverses circonstances dans lesquelles cette catéchèse d'initiation devient nécessaire.


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Face à cette différence substantielle, il est utile de considérer maintenant quelques éléments du catéchuménat baptismal qui doivent inspirer la catéchèse post-baptismale:

- Le catéchuménat baptismal ne cesse de rappeler à toute l'Eglise l'importance fondamentale de la fonction de l'initiation, avec les facteurs de base qui la constituent: la catéchèse et les sacrements du Baptême, de la Confirmation et de l'Eucharistie. La pastorale d'initiation chrétienne est vitale pour chaque Eglise particulière.

- Le catéchuménat baptismal est une responsabilité de toute la communauté chrétienne. En effet, " cette initiation chrétienne doit être l'oeuvre non pas des seuls catéchistes ou des seuls prêtres, mais de toute la communauté des fidèles, spécialement celle des parrains ". (291) L'institution catéchuménale accroît ainsi dans l'Eglise la conscience de la maternité spirituelle qu'elle exerce dans toute forme d'éducation à la foi. (292)

- Le catéchuménat baptismal est tout imprégné du mystère de la Pâque du Christ. C'est pourquoi " toute l'initiation doit révéler clairement son caractère pascal ". (293) La Veillée pascale, centre de la liturgie chrétienne, et sa spiritualité baptismale, sont une source d'inspiration pour toute la catéchèse.

- Le catéchuménat baptismal est aussi le premier lieu d'inculturation. En suivant l'exemple de l'Incarnation du Fils de Dieu, qui s'est fait homme à un moment concret de l'histoire, l'Eglise accueille les catéchumènes tels qu'ils sont, avec leurs liens culturels. Toute l'action catéchistique participe à cette fonction d'incorporer dans la catholicité de l'Eglise les authentiques " semences de la Parole " répandues parmi les individus et les peuples. (294)

- Enfin, concevoir le catéchuménat baptismal comme "un processus de formation et une véritable école de la foi ", c'est doter la catéchèse post-baptismale d'une dynamique et de certaines notes qui la qualifient: l'intensité et l'intégrité de la formation; son caractère graduel, avec des étapes définies; son lien avec des rites, des symboles et des signes, spécialement bibliques et liturgiques; sa référence constante à la communauté chrétienne.

La catéchèse post-baptismale, sans se calquer sur la configuration du catéchuménat baptismal, et en reconnaissant aux catéchisés leur état de baptisés, fera bien de s'inspirer de cette " école préparatoire à la vie chrétienne ", (295) en se laissant féconder par les principaux éléments qui la caractérisent.

Notes:

(291)
AGD 14.
(292) Méthode d'Olympe, par exemple, désigne cette action maternelle de la communauté chrétienne lorsqu'il affirme: " Par rapport à ceux qui sont encore imparfaits (dans la vie chrétienne), les plus mûrs sont ceux qui les forment et les font venir à la lumière comme dans un acte maternel ": Methode d'Olympe, Symposium, III, 8: SCh 95, 111; dans le même sens, voir aussi: S. Grégoire le Grand, Homiliarum in Evangelia I, III, 2: PL 76, 1086.
(293) RICA 8.
(294) Cf. CTR 53
(295) DGC (1971) 130. Ce numéro s'ouvre par l'affirmation suivante: " Le catéchuménat des adultes qui est à la fois catéchèse, participation liturgique et vie communautaire, fournit un remarquable exemple d'une telle institution qui naît de la collaboration de diverses charges pastorales ".



1997 Directoire pour la catechèse 73