Jean-Paul Ier

LE PAPE AU MAIRE DE ROME



Sur le chemin qui, du Vatican le menait à la Basilique du Latran, le Saint-Père à fait halte au Campidogliola Mairie de Romeoù il a reçu l'hommage du Maire et des Autorités municipales au grand complet. Répondant au discours du Professeur Argan, Maire de Rome, le Saint-Père a prononcé un discours dont voici notre traduction :



Honorable Monsieur le Maire,



Je vous suis vivement reconnaissant pour les paroles déférentes et sincères que, vous faisant l'interprète de vos collègues de l'Administration publique et de tous les citoyens de Rome, vous avez bien voulu nous adresser durant l'itinéraire qui de la rési­dence vaticane me conduit à la Cathédrale de Saint-Jean-de-Latran.

Cette halte intermédiaire aux pieds des collines du Capitole a pour moi une toute particulière signification non seulement pour la masse de souvenirs historiques qui s'entrecroisent ici et intéres­sent, conjointement, la Rome civile et la Rome chrétienne, mais aussi parce qu'elle me permet d'avoir un premier et direct contact avec les responsables de la vie citadine et de son administration. C'est donc une occasion favorable pour leur adresser mes saluta­tions cordiales et mes meilleurs voeux.

Les problèmes de l'Urbs auxquels vous avez fait allusion de manière justement préoccupée, me trouvent particulièrement attentif et sensible en raison de leur urgence, de leur gravité et surtout des malaises et des drames humains et familiaux dont ils sont bien souvent le signe manifeste. Comme Evêque de la Ville, qui est le siège premier du ministère pastoral qui m'a été confié, je ressens de la manière la plus vive se réfléchir dans mon coeur ces expériences pleines de souffrances qui sollicitent ma disponi­bilité à la collaboration, à cet apport moral et spirituel qui corres­pond à la nature spécifique de mon service, de manière à pouvoir tout au moins alléger ces souffrances. Ceci, je ne le dis pas seule­ment à titre personnel mais aussi au nom des fils de l'Eglise de Dieu, ici, à Rome : des évêques mes collaborateurs, des prêtres et des religieux, des membres des associations catholiques et de chacun des fidèles, engagés de manière diverse dans l'action pasto­rale, éducative, assistentielle, scolaire.

L'espérance, dont j'ai entendu, avec plaisir, l'écho dans votre aimable adresse est pour nous, chrétiens — comme je l'ai rappelé au cours de l'audience générale de mercredi dernier — une vertu obligatoire et un don choisi de Dieu. Puisse-t-elle redresser en chacun de nous et, comme je le crois avec confiance — en tous les concitoyens de bonne volonté, les énergies et les propos ; puisse-t-elle inspirer des initiatives et des programmes, afin que ces problèmes trouvent la solution qui leur convient et que Rome reste fidèle, dans les faits, à ces idéaux irréfutablement chrétiens qui s'appellent faim et soif de justice, contribution active à la paix, dignité supérieure du travail de l'homme, respect et amour pour les frères, solidarité à toute épreuve envers les plus faibles.






23 septembre 1978



« S'ATTACHER À L'EVÊQUE COMME L'ÉGLISE À JÉSUS-CHRIST ... »



Le Pape à Saint Jean de Latran



Je remercie de tout coeur le Cardinal-Vicaire pour les délicates paroles par lesquelles — en son nom comme au nom du Chapitre du Latran, du clergé, des religieux, des religieuses et des fidèles — il a voulu exprimer sa dévotion et la leur ainsi que les propos d'activé collaboration dans le diocèse de Rome. Le premier témoignage de cette collaboration m'est donné par la très importante somme recueillie parmi les fidèles du diocèse et mise à la disposition pour donner une église et des structures parois­siales à une agglomération sise à la périphérie de la ville, encore démunie de ces éléments communautaires essentiels, si nécessaires pour la vie chrétienne. Oui, vraiment, merci de tout coeur.

Le Maître des Cérémonies a choisi les trois lectures bibliques pour cette liturgie solennelle. Il a estimé qu'elles étaient bien adap­tées et, moi, je cherche à vous les expliquer.

La première lecture (Is 60,1-6) peut être mise en relation avec Rome. Chacun sait que le Pape tient son autorité sur toute l'Eglise du fait qu'il est Evêque de Rome, successeur donc, en cette ville de l'Apôtre Pierre. Et grâce spécialement à Pierre, la Jérusalem, dont parlait Isaïe, peut être comparée à une image, comme une lointaine annonce de Rome. De Rome, aussi, en tant que siège de Pierre, lieu de son martyre et centre de l'Eglise Catho­lique, on peut dire : « au-dessus de toi, resplendira le Seigneur et sa gloire se manifestera... les peuples marcheront à ta lumière » (Is 60,2). En évoquant les pèlerinages des Années Saintes et ceux qui, dans un constant afflux, continuent à se dérouler les années normales, on peut, avec le prophète, s'adresser ainsi à Rome : « Tourne les yeux autour de toi et regarde : ... les fils viennent à toi de loin... et en toi se déversera la multitude des nations de la mer et les légions des peuples viendront à toi » (Is 60,4-5).

Ceci est un honneur pour l'Evêque de Rome et pour vous tous. Mais aussi une responsabilité. Les pèlerins trouveront-ils ici un modèle de véritable communauté chrétienne ? Serons-nous capables, avec l'aide de Dieu, nous, évêque et fidèles, de réaliser ici les paroles d'Isaïe qui suivent celles que nous venons de citer : « ... on n'entendra plus parler de violence dans la terre... ton peuple sera tout entier un peuple de justes » (Is 60,18 Is 60,21) ? Il y a quelques minutes le Professeur Argan, maire de Rome, m'a adressé courtoisement son salut et ses voeux. Quelques-unes de ses paroles m'on remis mémoire une des prières qu'enfant, je réci­tais avec ma maman. C'était à peu près ceci : « les péchés qui crient vengeance au ciel sont... opprimer les pauvres... frustrer les ouvriers de leur juste salaire ». A son tour, le curé m'interrogeait au cours de catéchisme : « Les péchés qui crient vengeance au ciel, pourquoi sont-ils des plus graves et des plus funestes ? » Et moi je répondais, avec le catéchisme de Pie X : «... parce qu'ils sont directement opposés au bien de l’humanité et tellement odieux que, plus que tous autres, ils provoquent les châtiments de Dieu » (Catéchisme de Pie X, n. 154). Rome sera une vraie communauté chrétienne si Dieu y est honoré non seulement par l’affluence des fidèles dans les églises, non seulement par la vie privée vécue moralement, mais encore par l'amour pour les pauvres. Comme le disait le diacre romain Laurent, ceux-ci sont les vrais trésors de l'Eglise ; ils doi­vent donc être aidés, par ceux qui le peuvent, à voir plus et à être plus, sans être humiliés ou offensés par des richesses étalées, par de l'argent gaspillé en choses futiles au lieu d'être investi, quand c'est possible, dans des entreprises d'intérêt commun.

La deuxième lecture (He 13,7-8 He 15-17 He 20-21) s'adapte aux fidèles de Rome. Comme je l'ai dit, c'est le Maître de cérémonies qui l'a choisie. J'avoue que, parlant d'obéissance, elle me met quelque peu en embarras. Il est difficile, aujourd'hui, de convain­cre quand on met dans la balance les droits de la personne humaine et les droits de l'autorité et de la loi ! Dans le livre de Job, on trouve la description d'un cheval en bataille : il bondit comme une sauterelle et s'ébroue ; creuse la terre du sabot puis s'élance avec ardeur; quand sonne la trompette, il hennit de joie ; il flaire de loin la lutte, le cri des chefs, la clameur des troupes (cf. Jb Jb 39,15-25). Symbole de la liberté. L'autorité, par contre, ressemble au cavalier prudent, qui monte le cheval et, tantôt d'une voix suave, tantôt travaillant habilement de l'éperon, du mors et du fouet, le stimule, ou bien modère sa course impétueuse, le freine, le retient. Mettre d'accord cheval et cavalier, liberté et autorité, est devenu un problème social. Et d'Eglise, également. Au Concile, on a tenté de le résoudre au quatrième chapitre de Lumen Gentium. Voici les indications conciliaires pour le cavalier : « Les Pasteurs savent parfaitement quelle contribution les laïcs apportent au bien de toute l'Eglise. Les Pasteurs savent qu'ils ont été institués par le Christ, non pour assumer à eux seuls toute la mission de salut que l'Eglise a reçue à l'égard du monde, mais que leur charge magni­fique consiste à « paître » les fidèles et à reconnaître leurs services et leurs charismes de façon que tous à leur manière coopèrent unanimement à l'oeuvre commune » (Lumen Gentium, LG 30). Et encore : les Pasteurs savent que « dans les batailles décisives, c'est parfois du front que partent les plus heureuses initiatives » (ibid. note 118). Voici, par contre, une indication du Concile pour le « généreux destrier », c'est-à-dire pour les laïcs : « les fidèles doi­vent s'attacher à leur évêque comme l'Eglise à Jésus-Christ et comme Jésus-Christ à son Père » (Lumen Gentium, LG 27). Prions pour que le Seigneur aide tant l'évêque que les fidèles, c'est-à-dire tant le cavalier que les chevaux. On m'a dit qu'il y a dans le diocèse de Rome de nombreuses personnes qui se prodiguent pour leurs frères et aussi de nombreux catéchistes ; beaucoup d'autres encore, attendent un signe pour intervenir et collaborer. Que le Seigneur nous aide tous à constituer à Rome une communauté chrétienne vive et active. Ce n'est pas sans raisons que j'ai cité le chapitre quatre de Lumen Gentium : c'est le chapitre de la « com­munion ecclésiale ». Toutefois ce qui a été dit regarde spécialement les laïcs. Les prêtres, les religieux et les religieuses ont une position particulière, liés comme ils le sont par le voeu ou la promesse d'obéissance. Je me souviens, comme de l'un des points essentiels de mon existence, du moment où, ayant mis mes mains dans celles de l'Evêque, j'ai dit : « Je promets ». Dès lors, je me suis senti engagé pour toute la vie et je n'ai jamais pensé qu'il s'était agi d'une cérémonie sans importance. J'espère que les prêtres de Rome le pensent également. A eux et aux religieux Saint François de Sales rappellerait l'exemple de Saint Jean Baptiste qui vécut dans la soli­tude, loin du Seigneur, bien qu'il eût un si grand désir de se trouver près de lui. Pourquoi ? Par obéissance ; « il savait, écrit le Saint, que trouver le Seigneur en dehors de l'obéissance signi­fiait le perdre » (F. de Sales, Oeuvres, Annecy, 1896, p. 16-20).

La troisième lecture (Mt 28,16-20) rappelle ses devoirs à l'Evêque de Rome. Le premier est d'« enseigner », en proposant la parole du Seigneur, en toute fidélité soit à Dieu soit à ceux qui l'écoutent, avec humilité mais aussi avec une franchise sans timi­dité, Parmi mes saints prédécesseurs, évêques de Rome, figurent également deux Docteurs de l'Eglise : St Léon, le vainqueur d'Attila et Saint Grégoire le Grand. Dans les écrits du premier, il y a une pensée théologique très élevée et il y rayonne une langue latine merveilleusement orchestrée ; nous n'imaginons même pas de pou­voir jamais l'imiter, fut-ce de très loin. Quant au second, ses livres nous le montrent « comme un père qui instruit ses propres enfants et leur fait part de ses soucis pour leur salut éternel » (I. Schuster, Liber Sacramentorum, vol. I, Turin, 1929, p. 46). Je voudrais chercher à imiter le second qui consacre tout le tome III de sa Regula Pastoralis au thème « qualiter doceat » c'est-à-dire com­ment le Pasteur doit enseigner. Tout au long de quarante chapitres, Grégoire indique de manière concrète différentes formes d'ins­truction, adaptées aux diverses circonstances de condition sociale, d'âge, de santé et de tempérament moral des auditeurs. Pauvres et riches, joyeux et mélancoliques, supérieurs et sujets, savants et ignorants, audacieux et timides, et ainsi de suite, tous, ils sont tous dans ce livre qui est comme la vallée de Josaphat. Au Concile, il sembla nouveau qu'on appelât « pastorale », non plus ce qui était enseigné aux pasteurs, mais ce que les pasteurs faisaient pour rencontrer les besoins, les anxiétés, les espérances des hommes. Ce « nouveau », Grégoire l'avait déjà mis en oeuvre pas mal de siècles auparavant, tant dans ses écrits que dans le gouvernement de l'Eglise.

Le deuxième devoir de l'évêque, rendu par le mot « baptiser », se réfère aux sacrements et à toute la liturgie. Le diocèse de Rome a suivi le programme de la Conférence Episcopale Italienne « Evangélisation et Sacrements » ; il sait déjà qu'évangélisation, sacrement et vie sainte sont trois moments d'une démarche unique : l'évangélisation prépare au sacrement, le sacrement conduit celui qui l'a reçu à vivre chrétiennement. Je voudrais que ce grand concept soit appliqué de manière toujours plus ample. Je voudrais égale­ment que Rome donne le bon exemple en fait de liturgie célébrée pleinement et sans « créations » hors de propos. De tels abus en matière liturgique ont pu favoriser, par réaction, des attitudes qui ont entraîné des prises de position insoutenables en elles-mêmes et en contradiction avec l'Evangile. En faisant appel, avec affection et avec espoir, au sens de responsabilité de chacun devant Dieu et devant l'Eglise, je voudrais pouvoir assurer que toute irrégularité liturgique sera diligemment évitée.

Et me voici au dernier devoir épiscopal : « apprendre à obser­ver » : c'est la diaconie, le service de guider et de gouverner. Bien que j'aie déjà été pendant 20 ans, évêque à Vittorio Veneto et à Venise, j'avoue que je n'ai pas encore bien « appris le métier ». A Rome, je me mettrai à l'école de Saint Grégoire le Grand qui a écrit « que le pasteur entoure chacun de ses sujets de sa compas­sion ; qu'oubliant son grade il se considère comme l'égal de ses bons sujets, mais qu'il ne craigne pas d'exercer contre les mauvais les droits de son autorité. Rappelle-toi : alors que tous les sujets por­tent aux nues ce qu'il a fait de bon, personne n'ose blâmer ce qu'il a fait de mal ; quand il réprime les vices, qu'il ne cesse de se reconnaître avec humilité pareil aux frères qu'il a corrompus ; et qu'il se sente d'autant plus débiteur devant Dieu que ses actions restent plus impunies devant les hommes » (Reg. Past. II° Partie.)

Ici prend fin l'explication des trois lectures bibliques. Qu'il me soit permis d'ajouter encore quelque chose : c'est la loi de Dieu que nul ne peut faire du bien à autrui sans que d'abord on l'aime. C'est pourquoi, devenant Patriarche à Venise, Saint Pie X s'était exclamé à St-Marc : « Qu'en serait-il de moi, Vénitiens, si je ne vous aimais pas ? » Aux Romains, je dirai quelque chose de semblable ; je puis vous assurer que je vous aime, que je désire seulement entrer à votre service et mettre à votre disposition, toutes mes pauvres forces, le peu que j'ai et le peu que je suis.






24 septembre 1978



MESSAGE AUX ÉVÊQUES ET AUX FIDÈLES DE L'EQUATEUR



Le 24 septembre a été rendu public le message du Saint-Père aux Evêques et aux fidèles de l'Equateur. Il s'agit d'une lettre adressée au Cardinal Joseph ratzinger, archevêque de Munich et Freizing, délégué par le Pape pour pré­sider, en son nom, aux fêtes de l'Année Mariale qui se déroulait dans la République de l'Equa­teur. Voici la traduction de cette lettre, écrite en latin.



A notre vénérable Frère Joseph, Cardinal ratzinger,

Archevêque de Munich et Freising



Le concert de louanges qui célèbre habituellement la très Sainte Vierge Marie, s'élèvera encore plus haut — on peut le prévoir — pendant ce mois de septembre en Equateur, et particu­lièrement à Guayaquil, où, pour accomplir et terminer l'année mariale qui a été organisée, un rassemblement de tout le pays aura lieu en l'honneur de la Mère de Dieu. Le souvenir d'une réunion sem­blable, tenue il y a vingt ans dans cette même ville, y demeure encore vivant. En effet, cette assemblée avait été remarquable par la beauté de ses cérémonies et par l'abondance de ses fruits spirituels.

En un très sage projet, ordonné aux exigences et aux besoins de ce temps, deux documents du magistère pontifical romain sont proposés à un examen plus approfondi au cours de ces célébrations : l'un s'intitule Marialis Cultus et l'autre Evangelii Nuntiandi. On espère ainsi obtenir un double fruit de ce Congrès : l'accroissement d'une authentique piété à l'égard de la Mère de Dieu et une ardeur plus empressée pour répandre partout l'annonce du salut du Christ.

Dans notre sincère charité à l'égard du peuple de l'Equateur, nous avons le désir de prendre part, d'une certaine manière, à ces solennités pour leur donner davantage d'importance et d'éclat.

C'est pourquoi, par cette lettre, nous vous choisissons, nous vous créons et nous vous proclamons notre envoyé extraordinaire, et nous vous confions la mission de présider à ces célébrations en notre nom et avec notre autorité. Vous vous recommandez par votre grande connaissance de la sainte doctrine et, comme on le sait, vous brûlez d'amour pour la Mère du Christ Sauveur et notre Mère. Sans aucun doute par conséquent, vous remplirez la fonction qui vous a été confiée avec intelligence, sagesse et succès.

Qu'à Guayaquil brille donc d'une nouvelle splendeur mariale le mystère dont Saint Augustin s'exclamait dans une admiration étonnée : « Quel esprit pourra méditer, quelle langue pourra expri­mer non seulement que le Verbe était au commencement, sans aucun principe de naissance, mais aussi que le Verbe s'est fait chair, qu'il a choisi une vierge pour en faire sa mère, une mère restée vierge... Qu'est cela ? Qui parlera ? Qui se taira ? C'est étran­ge à dire : ce que nous ne pouvons exprimer, nous ne pouvons le taire; nous prêchons à haute voix ce que notre intelligence ne saisit pas » (Serm 215, 3 ; PL 38, 1073).

Nous souhaitons dans notre prière à Dieu que ces solennités retentissent salutairement dans la vie de chaque homme et dans la société. Et, comme gage des dons célestes, nous accordons volon­tiers notre bénédiction apostolique à vous-même, vénérable frère, à celui qui partage votre dignité, Paul, Cardinal Mufíoz Vega, arche­vêque de Quito et qui, avec ses collaborateurs, a dépensé beaucoup de peine pour la préparation de cette assemblée, ainsi qu'aux autres évêques, magistrats, prêtres, religieux et fidèles qui seront rassem­blés autour de vous à cette occasion.

Fait à Rome à Saint-Pierre le 1er septembre de l'année 1978, première de notre pontificat.



JEAN PAUL Ier






28 septembre 1978



PROCLAMER JÉSUS CHRIST



Aux Evêques des Philippines en visite « Ad limina »

Le 28 septembre Jean Paul 1er a reçu, pour leur visite « ad limina », un groupe d'Archevêques et d'Evêques des Philippines entourant le Car­dinal Julio Rosales, Archevêque de Cebu. Le Saint-Père leur a adressé, en langue anglaise, un discours dont voici la traduction :



Chers Frères dans le Christ,



En vous souhaitant la bienvenue avec une profonde affection, nous désirons vous rappeler un passage puisé dans le Bré­viaire. Ce passage nous a vivement frappé. Il concerne le Christ, et Paul VI l'a cité lors de sa visite aux Philippines : « Je dois ren­dre témoignage à son nom : Jésus est le Christ, le Fils du Dieu vivant... Il est le roi du monde nouveau; il est le secret de l'histoire : il est la clé de notre destin» (Brév. : 13ème samedi de l'année. Homélie du 29 novembre 1970).

De notre côté, nous espérons vous aider, vous soutenir, vous encourager dans la grande mission de l'Episcopat : proclamer Jésus-Christ et évangéliser son peuple.

Parmi les droits de la foi, l'un des plus grands est celui de recevoir la parole dans toute sa plénitude, dans toute sa pureté, avec toutes ses exigences et toutes ses facultés. Un des grands devoirs de nos jours est la pleine évangélisation de tous ceux qui ont reçu le baptême. En ceci, les Evêques de l'Eglise sont les pre­miers responsables. Notre message doit être une claire proclama­tion du salut en Jésus-Christ. Avec Pierre, nous devons dire au Christ, en présence de notre peuple : « Tu as les paroles de la vie éternelle » (Jn 6,68). Pour nous, l'évangélisation comporte un enseignement explicite au sujet du nom de Jésus, de son identité, de son enseignement, de son Royaume et de ses promesses. Et la principale de ses promesses est la vie éternelle. Jésus a vraiment des paroles qui nous conduisent à la vie éternelle.

Tout récemment, au cours d'une audience générale nous avons parlé aux fidèles de la vie éternelle. Nous sommes convaincu qu'il est nécessaire pour nous de mettre vigoureusement l'accent sur cet élément pour que notre message soit complet et pour modeler notre enseignement sur celui du Christ.

Depuis les jours de l'Evangile, et à l'imitation du Seigneur « qui a passé en faisant le bien » (Ac 10,38), l'Eglise est irrévo­cablement mandatée pour contribuer au soulagement de la misère et des besoins physiques. Mais sa charité pastorale serait incom­plète si elle n'attirait pas l'attention sur tous les « besoins supé­rieurs ». C'est cela précisément que Paul VI a fait aux Philippines. Au moment qu'il avait choisi pour parler des pauvres, de la jus­tice et de la paix, des droits humains, de la libération économique et sociale — un moment où il avait, de manière si effective, engagé l'Eglise dans le soulagement des misères — il ne resta pas, et ne voulut pas rester silencieux au sujet du « bien supérieur », la plé­nitude de vie dans le Royaume des cieux.

Plus que jamais, nous devons aider notre peuple à comprendre exactement combien il a besoin de Jésus-Christ, le Fils de Dieu et Fils de Marie. Il est leur Sauveur, la clé de leur destinée et de celle de toute l'humanité.

Chers Frères, nous sommes spirituellement à vos côtés dans tous les efforts que vous faites au nom de l’évangélisation : quand vous vous efforcez de former des catéchistes, de promouvoir l'apostolat bi­blique, d'assister et encourager vos prêtres dans leur grande mission au service de la Parole de Dieu, de conduire vos fidèles à com­prendre et à observer les impératifs de la justice et de l'amour chrétien. Nous apprécions vivement ces efforts-là, comme tous ceux que vous exercez au nom du Royaume de Dieu. Particuliè­rement, l'affirmation de la vocation missionnaire a notre plus total appui et nous espérons sérieusement qu'elle s'épanouira largement parmi vos jeunes.

Nous savons que les Philippines ont comme grande vocation celle d'être la lumière du Christ en Extrême-Orient : proclamer sa vérité, sa justice, son salut, par la parole et par l'exemple, face aux pays voisins et à tous les peuples d'Asie. Nous savons que vous possédez à cet effet un instrument privilégié : Radio Veritas.

Nous sommes convaincu que les Philippines sauront utiliser ce grand moyen et tous les autres possibles pour proclamer avec l'Eglise tout entière que Jésus-Christ est le Fils de Dieu et le Sauveur du monde.

Nous adressons nos salutations à toutes vos Eglises locales et, en particulier, à vos prêtres, à vos religieux et religieuses. Nous les encourageons à une toujours plus effective sainteté de vie, condi­tion de la fécondité surnaturelle de leur apostolat. Nous aimons et bénissons les familles de vos Diocèses et tous les laïcs. Nous demandons aux malades et aux handicapés de comprendre la place importante qu'ils ont dans le plan divin et de réaliser combien l'évangélisation en dépend.

Et à vous tous, Frères, nous donnons notre spéciale bénédiction apostolique, invoquant sur vous la joie et la force en Jésus-Christ.



Jean-Paul Ier