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(Rôle des chrétiens dans les institutions internationales.)

90 Une forme éminente de l’activité internationale des chrétiens est sans aucun doute la collaboration qu’ils fournissent, individuellement ou en groupes, aux institutions créées ou à créer qui visent à développer la coopération entre les nations. Capables de rendre de multiples services pour la construction d’une communauté des nations dans la paix et la fraternité, les diverses associations catholiques internationales doivent être consolidées par l’accroissement du nombre des collaborateurs bien formés, l’augmentation des subsides dont elles ont besoin, et par une coordination appropriée des forces. À notre époque, en effet, l’efficacité de l’action et la nécessité du dialogue requièrent des initiatives collectives. En outre, de telles associations contribuent pour une part non négligeable à développer le sens de l’universel, qui convient certainement aux catholiques, et à éveiller la conscience d’une solidarité et d’une responsabilité vraiment mondiales.

Enfin, il est à souhaiter que les catholiques, pour remplir dûment leur rôle dans la communauté internationale, s’efforcent de collaborer activement et positivement soit avec leurs frères séparés qui, ensemble avec eux, professent l’amour évangélique, soit avec tous les hommes qui aspirent à une paix véritable.

Prenant en considération l’immensité des tribulations qui accablent maintenant encore la plus grande partie du genre humain, le Concile estime opportune, pour favoriser la justice et en même temps pour développer partout l’amour du Christ à l’égard des pauvres, la création d’un organisme de l’Église universelle, à qui il appartient d’inciter la communauté catholique à promouvoir le développement des régions pauvres et la justice sociale entre les nations.



Conclusion


(Rôle de chaque fidèle et des Églises particulières.)

91 Ce que le saint Concile propose en le tirant des trésors de la doctrine de l’Église est destiné à aider tous les hommes de notre temps, qu’ils croient en Dieu ou qu’ils ne le reconnaissent pas explicitement, à percevoir plus clairement leur vocation intégrale, à rendre le monde plus conforme à l’éminente dignité de l’homme, à aspirer à une fraternité universelle aux fondements plus profonds, et, sous l’impulsion de l’amour, à répondre, au prix d’efforts communs et généreux, aux requêtes urgentes de notre époque.

Assurément, devant l’extrême diversité des situations et des formes de culture dans le monde, cette déclaration conciliaire ne revêt qu’un caractère général dans plusieurs de ses parties, et cela à dessein ; bien plus, quoiqu’elle propose une doctrine déjà reçue dans l’Église, elle doit cependant encore être complétée et élargie, vu qu’il s’agit assez souvent de matières qui sont soumises à une incessante évolution. Mais nous avons la ferme confiance que beaucoup de choses que nous avons exposées, en nous appuyant sur la parole de Dieu et sur l’esprit de l’Évangile, pourront apporter à tous une aide solide, surtout lorsque l’adaptation aux divers peuples et mentalités aura été réalisée effectivement par les fidèles sous la direction de leurs pasteurs.

(Le dialogue entre tous les hommes.)

92 En vertu de sa mission de répandre sur le monde ender la clarté du message évangélique et de réunir en un seul Esprit tous les hommes, à quelque nation, race, ou culture qu’ils appartiennent, l’Église est le signe de cette fraternité qui rend possible et efficace un dialogue sincère.

Cela exige en premier lieu que dans l’Église elle-même nous fassions progresser l’estime, le respect et l’entente mutuels, en reconnaissant toute légitime diversité, en vue d’instaurer un dialogue toujours plus fécond entre tous ceux qui constituent l’unique Peuple de Dieu, que ce soient les pasteurs ou les autres chrétiens. En effet, ce qui unit les fidèles est plus fort que ce qui les divise : qu’il y ait unité dans ce qui est nécessaire, liberté dans ce qui est douteux, charité en toutes choses

En même temps, en esprit nous embrassons aussi les frères et leurs communautés qui ne vivent pas encore en pleine communion avec nous, mais auxquels nous sommes cependant unis par la confession du Père, du Fils et du Saint-Esprit et par le lien de la charité, nous souvenant à la vérité que l’unité des chrétiens est attendue et souhaitée aujourd’hui même par un grand nombre de ceux qui ne croient pas au Christ. Plus en effet cette unité progressera dans la vérité et dans la charité sous la puissante impulsion de l’Esprit Saint, plus elle sera pour le monde entier un présage d’unité et de paix. C’est pourquoi, en unissant nos forces et sous des formes toujours mieux adaptées à la poursuite actuelle et efficace de ce noble but, efforçons-nous, dans une conformité toujours plus grande à l’Évangile, de collaborer fraternellement au service de la famille humaine, qui est appelée, dans le Christ Jésus, à devenir la famille des enfants de Dieu.

Nous tournons ensuite notre pensée aussi vers tous ceux qui reconnaissent Dieu et qui conservent dans leurs traditions de précieux éléments religieux et humains, en souhaitant qu’un dialogue franc nous conduise tous ensemble à accepter fidèlement les impulsions de l’Esprit et à les réaliser avec zèle.

Le désir d’un tel dialogue, qui soit conduit par le seul amour de la vérité, étant sauve de toute façon la prudence qui convient, n’exclut personne, pour ce qui est de nous, ni ceux qui tiennent en honneur les biens élevés de l’âme humaine, mais qui n’en reconnaissent pas encore l’auteur, ni ceux qui s’opposent à l’Église et la persécutent de diverses manières. Puisque Dieu le Père est le principe et la fin de tous les hommes, nous sommes tous appelés à être frères. Et puisque nous avons tous la même vocation humaine et divine, nous pouvons et nous devons coopérer, sans violence et sans déloyauté, à la construction du monde dans une paix véritable.

1 Cf. Jean XXIII, encycl. Ad Petri Cathedram, 29 juin 1959, AAS 51 (1959), p. 513.


(Un monde à construire et à conduire à sa fin.)

93 Se souvenant de la parole du Seigneur : « En ceci tous connaîtront que vous êtes mes disciples, si vous vous aimez les uns les autres » (Jn 13,35), les chrétiens ne peuvent avoir de souhait plus ardent que celui de se mettre au service des hommes de ce temps avec une générosité et une efficacité toujours plus grandes. C’est pourquoi, attachés fidèlement à l’Évangile et bénéficiant de sa force, unis à tous ceux qui aiment et pratiquent la justice, ils se sont vu confier une tâche immense à accomplir dont ils devront rendre compte à Celui qui jugera tous les hommes au dernier jour. Non pas tous ceux qui disent : « Seigneur, Seigneur » entreront dans le Royaume des cieux, mais ceux qui font la volonté du Père2 et qui se mettent résolument à l’oeuvre. Le Père veut qu’en tout homme nous reconnaissions et aimions effectivement le Christ notre frère, en parole et en acte, en rendant ainsi témoignage à la Vérité, et que nous communiquions aux autres le mystère d’amour du Père céleste. De cette manière, les hommes du monde entier seront incités à une vivante espérance qui est un don de l’Esprit, afin d’être reçus finalement un jour dans la paix et le bonheur suprêmes, dans la patrie qui resplendit de la gloire du Seigneur.

« A celui qui, par la puissance qui agit en nous, a le pouvoir de tout faire au-delà de ce que nous demandons ou concevons, à lui la gloire dans l’Église et dans le Christ Jésus, pour tous les âges et tous les siècles. Amen » (Ep 3,20-21).

2 Cf. Mt 7, 21.



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