Discours 1983 - Samedi, 22 janvier 1983


RENCONTRE AVEC LES PÈLERINS LIBANAIS

Jeudi, 3 février 1983




Chers Frères et Soeurs,

Comme je suis heureux de voir Sa Béatitude Antoine Pierre Khoraiche, nouveau cardinal, entouré de prêtres, religieux et fidèles maronites et de beaucoup de compatriotes libanais! L’importance de l’événement a été soulignée au plan civil par la présence de deux délégations officielles, celle du Gouvernement et celle du Parlement.

Oui, Béatitude, la confiance des évêques maronites vous avait désigné à votre charge patriarcale, dont vous vous acquittez avec mérite, dans des conditions difficiles et particulièrement éprouvantes pour tout le peuple libanais. Le fait que vous soyez désormais cardinal de la Sainte Eglise romaine signifie, dans le respect des traditions, de la discipline et des responsabilités propres à vos communautés orientales, que vous partagez aussi la sollicitude de toutes les Eglises dont est chargé, à un titre spécial, le successeur de Pierre, au siège de Rome.

En votre personne, je dis à l’Eglise maronite tout entière mon affection et mes encouragements à oeuvrer pour que l’Evangile dont ils tiennent en mains la lumière brille vraiment sur cette terre du Proche-Orient, avec tout ce qu’il comporte de piété, d’action pastorale, d’esprit de Justice et d’amour fraternel. Cette communauté, dont vous êtes le Père et le Chef; attend beaucoup de vous, en ce domaine, pour réaliser son unité et stimuler son dynamisme au service de tout la nation libanaise.

Et je salue tous les autres catholiques libanais, qui partagent la même responsabilité de témoignage, et de même les chrétiens des autres confessions. k salue enfin les autres communautés religieuses et tous les citoyens, afin que tous ceux qui composent le Liban ou qui y vivent se consacrent à la paix et à la reconstruction, en surmontant ensemble les obstacles et les lenteurs.

Pour ma part, je continue à penser à vous, à prier pour vous et avec vous, et de tout coeur, je vous bénis.



SALUT DU PAPE JEAN-PAUL II AUX PÈLERINS FRANÇAIS

Jeudi, 3 février 1983




Autour des chers cardinaux Jean-Marie Lustiger et Henri de Lubac, je suis heureux de saluer leurs compatriotes et leurs amis. Je vois qu’ils sont nombreux ici, mais bien plus encore ceux qui s’unissent de loin à votre joie. Je pense à tous ceux qui ont bénéficié du ministère évangélique de Monseigneur Lustiger: anciens étudiants du Centre Richelieu, pèlerins de Palestine ou de Chartres, paroissiens de Sainte-Jeanne de Chantal, diocésains d’Orléans et de Paris. Et je pense à tous ceux qui, dans la Compagnie de Jésus, à Lyon, en France et bien au-delà, à entendre ou à lire le Père de Lubac, ou à converser avec lui, ont vivement apprécié sa profondeur spirituelle, théologique et patristique, sa sagesse, son amour de l’Eglise; et vous savez que j’en suis.

Chers Frères et Soeurs, votre affection, votre reconnaissance et votre vénération pour ces nouveaux membres du Sacré Collège vont encore se renforcer, et votre prière aussi, afin qu’ils continuent, avec une autorité accrue, à promouvoir l’unité, la fidélité et le dynamisme de l’Eglise, dans une étroite collaboration avec le successeur de Pierre, en étant regardés, je le disais hier, comme des points de référence sûrs, au besoin des points de contradiction dans leur témoignage courageux, toujours des hommes de véritable paix. Je souhaite qu’ils aident leurs compatriotes de Paris et de la France à accueillir toujours davantage ou à retrouver le Don de Dieu, le don de leur baptême.

A chacun de vous, Eminences, vont mes voeux très fraternels et très chaleureux. Je remercie vivement les personnalités et les délégations officielles qui ont tenu à vous honorer de leur présence à Rome. A tous, prêtres, religieux et fidèles, je redis mes encouragements et je donne ma Bénédiction Apostolique.



SALUT DU PAPE JEAN-PAUL II AUX PÈLERINS DE CÔTE D'IVOIRE

Vendredi, 4 février 1983



Chers Frères et Soeurs,

Permettez-moi de vous dire combien il m’est agréable de vous recevoir dans ma maison, vous qui êtes venus nombreux accompagner le cher Cardinal Yago, afin de lui témoigner votre vénération et votre affection. Vous savez combien m’est cher le souvenir du trop bref séjour que j’ai pu faire, grâce à Dieu, parmi vous et qui m’a permis de percevoir ce qu’est l’âme ivoirienne. Ainsi, en appelant le Cardinal Yago à entrer au Sacré Collège des cardinaux, j’ai pensé non seulement à ses grandes qualités personnelles de pasteur tout entier dévoué à son peuple et à l’Eglise, mais aussi à sa riche expérience, puisée dans la profonde sagesse de votre nation, dont l’apport sera de prix pour le service de l’Eglise universelle.

En vos personnes, je suis également heureux de saluer tous les Ivoiriens. Je suis particulièrement reconnaissant à Monsieur le Président Houphouët-Boigny et aux diverses Autorités publiques qui ont su discerner l’importance que revêt la présence active de l’Eglise en Côte d’Ivoire pour le développement intégral de tous les fils de votre beau pays. Au cher Cardinal, aux frères dans l’épiscopat ici présents, à vous tous et à vos familles va, en ce jour de joie, mon affectueuse Bénédiction Apostolique.


AU PREMIER AMBASSADEUR DU ROYAUME DE NORVÈGE PRÈS LE SAINT-SIÈGE

Jeudi, 17 février 1983



Monsieur l’Ambassadeur,

Je vous accueille avec joie en cette Maison et je vous remercie vivement des sentiments délicats et des nobles propos que vous venez d’exprimer en présentant vos lettres de créance. Tous ici, nous mesurons avec émotion l’importance de ce moment historique où le Royaume de Norvège est pour la première fois représenté auprès du Saint-Siège, par un Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire, pour des relations diplomatiques permanentes.

Je vous saurais gré de bien vouloir vous faire l’interprète de ma gratitude auprès de Sa Majesté Ovale V dont vous me transmettez le témoignage de bienveillance et les voeux. Comme mon prédécesseur Paul VI, qui l’accueillait ici voilà quinze ans, je lui exprime mon salut déférent et les souhaits cordiaux que je forme pour sa personne, sa famille et tout le peuple norvégien.

Le premier sentiment dont je veux assurer Votre Excellence est la sympathie avec laquelle le Saint-Siège regarde votre pays. Sans oublier l’austérité du climat, surtout au coeur des longues nuits d’hiver, qui n’a éprouvé admiration et rêvé devant la beauté de vos montagnes, de vos forêts, des fjords qui dentellent tout le littoral? Et, sans remonter à l’épopée des Vikings et de leurs marins assoiffés d’aventures, on connaît le caractère courageux, industrieux de vos compatriotes, qui ont su doter leur pays d’un grand développement moderne et, après bien des vicissitudes, lui assurer sa pleine indépendance, tout en entretenant des rapports d’étroite solidarité au sein du Conseil nordique, du Conseil de l’Europe, de l’Organisation des Nations Unies. Oui, le Saint-Siège considère avec attention toutes ces données, car l’Eglise catholique, dont la vocation est d’être universelle, reste ouverte, avec respect, aux richesses humaines spécifiques de chacun des pays qui forment le concert des nations.

Vous avez vous-même, Monsieur l’Ambassadeur, fort bien souligné Aies éléments qui étaient de nature à tisser des liens profonds entre le Saint-Siège et la Norvège. Il y a en effet une source commune de traditions, de pensée, d’idéal humain, de comportements, à savoir la foi chrétienne que tous les pays d’Europe ont reçue au cours du premier millénaire de l’Eglise comme un don à faire fructifier. Bientôt votre pays pourra célébrer le millénaire de son baptême, avec les premiers rois chrétiens Hachons le Bon, Olaf Tryggvesson et surtout Olaf Haraldsson, si ardent à initier son peuple au christianisme et si -justement vénéré. Vous avez fait allusion aux relations étroites existant alors entre les évêques de Norvège et celui de Rome. Dans vos compatriotes qui aujourd’hui adhèrent massivement à la confession luthérienne, l’Eglise catholique aime à voir des frères, en recherche, eux aussi, de l’unité voulue par notre commun Seigneur, et engagés dans le souci de faire briller l’Evangile au coeur des hommes et de la société.

Par ailleurs - si on se place, comme il est normal en cette audience, au plan du Saint-Siège et des responsables politiques de la Norvège -, il y a des idéaux de la vie sociale et internationale, et aussi des moyens permettant de les atteindre, auxquels sont attachés les uns et les autres: la promotion de la justice pour tous, la recherche de la sécurité et de la paix par la reprise incessante d’un dialogue lucide et loyal, respectueux des droits, des traditions et des intérêts légitimes de chacun, la solidarité entre les peuples dans la lutte contre la faim et l’analphabétisme, le respect, en toute conjoncture, des droits fondamentaux de l’homme, la pratique d’une liberté bien comprise qui permet l’expression et la participation de tous les citoyens, le sens du bien commun de la nation et de la communauté internationale.

Tout cela fait comprendre le bienfait des relations diplomatiques entre le Saint-Siège et votre noble pays, inaugurées aujourd’hui et dont Votre Excellence sera le responsable privilégié, au nom de son Souverain et de son Gouvernement, comme le Pro-Nonce Apostolique l’est auprès de ceux-ci. Comme vous l’avez mentionné, il y avait déjà rencontre, et coopération, des représentants ou observateurs du Saint-Siège avec vos diplomates dans le travail des conférences internationales. Mais les nouvelles relations, sous forme bilatérale, visent aussi d’autres abjectes.

On pense tout naturellement à la présence des communautés catholiques, qui demeurent très restreintes en nombre et très disséminées, surtout en dehors du diocèse d’Oslo. Grâce à la liberté religieuse dont elles jouissent, elles peuvent entretenir leur propre foi, donner leur témoignage dans le respect de tous, apporter leurs services au plan culturel et hospitalier et participer, avec leurs autres frères chrétiens, aux efforts nécessités par le bien commun. Etant donné leurs liens organiques avec le Siège de Pierre, vous comprendrez que je manifeste à leur endroit une sollicitude particulière et pleine d’affection.

Mais précisément, en appuyant leur témoignage, le Saint-Siège s’intéresse, en même temps, au développement des valeurs spirituelles chez tous vos compatriotes, surtout lorsque l’attention privilégiée accordée aux biens matériels, grâce à l’essor économique, et l’évolution générale des courants de pensée et des moeurs inclinent un grand nombre à moins se soucier de la relation essentielle à Dieu et des vertus inspirées par l’Evangile.

Enfin, je suis persuadé qu’au niveau des rapports internationaux, les efforts du Saint-Siège et de la Norvège pourront converger toujours davantage pour le bien des personnes en détresse et pour le progrès des peuples, selon les principes que nous avons rappelés. Vous ne rencontrez pas ici un Etat comme les autres: en ce vingtième siècle, il n’est que le support d’une institution spirituelle; il n’a pas d’intérêt propre à défendre, mais ceux qui sont communs aux hommes et aux croyants, où qu’ils se trouvent.

J’espère que votre mission vous permettra d’en être, au premier chef, le témoin, et de favoriser des relations qui s’avéreront fructueuses. Je forme les meilleurs voeux pour cette mission, en priant Dieu de bénir votre personne et votre cher pays.


AUX ÉVÊQUES DU GABON EN VISITE «AD LIMINA APOSTOLORUM»

Samedi, 19 février 1983



Chers Frères dans l’épiscopat,

1. Laissez-moi vous dire bien simplement combien je suis heureux de vous retrouver, tous ensemble, dans cette maison, après l’accueil si émouvant que vous avez su me réserver lors de mon bref séjour à Libreville. Encore une fois, je tiens à vous en remercier, vous et tous ceux qui ont contribué à la réussite de cette rencontre.

Si je n’ai pas pu visiter chacun de vos diocèses, ce que j’ai entrevu de la réalité gabonaise, joint aux renseignements substantiels contenus dans vos rapports, me rend proche de vos soucis pastoraux. Je vois que vous avez déjà accordé une grande importance aux quatre objectifs que je soulignais il y a un an: la formation et la responsabilité des laïcs, la pastorale de la famille, les vocations sacerdotales et religieuses, la coresponsabilité entre évêques, et tout cela dans l’espérance que le Seigneur travaille avec vous à la mesure même de la disponibilité que nous manifestons à son Esprit. Tous ces points doivent continuer à susciter votre sollicitude.

Aujourd’hui je souligne quelques aspects qui me paraissent importants au regard de l’ensemble de la tâche à accomplir. Un des fruits de mes visites pastorales est de renforcer le caractère fraternel des relations du Pape avec ses collègues dans l’épiscopat.

2. Dans l’esprit de votre prière aux tombeaux des Apôtres, vous savez que cet esprit fraternel est, en effet, une donnée essentielle de la vie apostolique telle qu’elle nous est décrite dans les Actes. Et la devise des Actes des Apôtres “cor unum et anima une” imprègne les écrits et l’action des premiers évêques: je pense à Polycarpe de Smyrne - que nous fêtons ces jours-ci - ou à son contemporain, Ignace d’Antioche. Si vous le voulez, cette devise guidera mes réflexions sur l’avenir de votre Eglise.

C’est un fait que les prêtres originaires du pays sont chez vous peu nombreux. C’est une raison supplémentaire pour resserrer toujours davantage les liens qui vous unissent aux collaborateurs que le Seigneur vous a confiés. De bien des façons concrètes, manifestez leur votre accueil, comme un Père, votre proximité, non seulement au plan des préoccupations pastorales, mais à celui de l’amitié, soit chez vous, soit au cours des visites que vous faites à ceux qui, dans des postes éloignés, peuvent être tentés, à certaines heures, par le découragement. Ainsi votre style de vie journalier, comme les priorités de votre action pastorale, discutées et décidées ensemble, s’en trouveront renouvelés, grâce à l’esprit d’humble service fraternel qui guide votre ministère apostolique.

Ce climat d’amitié entre prêtres et évêques sera le meilleur ciment de la cohésion qui doit s’étendre également entre tous les ouvriers apostoliques, qu’ils soient religieux ou religieuses, catéchistes, enseignants, et tous ceux qui participent en quelque manière à la tâche de l’Eglise. Car c’est, à coup sûr, dans l’unité de sentiment et de décision que se trouve la force dont l’Eglise du Gabon a besoin pour affronter les dures réalités où se débattent les hommes aujourd’hui.

3. Parmi ces difficultés, Je pense à une persistance ou même à un certain retour du paganisme et à l’emprise paralysante qu’il fait peser sur ceux qui sont encore trop faibles pour se laisser guider au plus intime d’eux-mêmes par la grâce du Christ, seule source véritable de liberté. On pourrait également mentionner la difficulté à vivre dans l’unité, au-dessus des particularismes ethniques, qui, à sa façon, entrave aussi la liberté chrétienne et entraîne des jugements passionnels, quand ce n’est pas la violence. Je pense encore à une certaine ambiance Laïciste dans l’enseignement, due au mirage d’une modernité factice, quand elle n’est pas le fruit d’un parti-pris antireligieux systématique, nourri d’intérêts égoïstes. J’évoque enfin la montée du matérialisme qui, n’envisageant que l’accumulation des richesses matérielles, a tôt fait de corrompre les coeurs et les empêche de s’ouvrir à la générosité propre à la foi.

4. Ces divers problèmes, que je ne peux qu’esquisser ici, trouveront d’autant mieux une réponse pastorale adéquate que vous continuerez sur la route, déjà tracée, d’un partage toujours plus grand des responsabilités entre tous les ouvriers apostoliques, et d’une hiérarchisation, établie d’un commun accord, des urgences pastorales au service de la prédication de la Parole de Dieu et de la sanctification de la vie des familles et des individus.

Vous-mêmes, comme je vous le disais à Libreville, essayez de vous libérer da charges trop uniquement administratives, pour vous consacrer à ce qui est fondamental. Certes, la gestion des biens d’Eglise est nécessaire pour soutenir efficacement les oeuvres apostoliques; elle est délicate et difficile, étant donné vos ressources limitées. Mais efforcez-vous davantage encore de trouver et de former des personnes compétentes pour leur confier cette gestion, en relation avec vous, comme le droit de l’Eglise invite à choisir “un économe”. Ainsi apparaîtra mieux encore le souci primordial, l’activité prioritaire de l’évêque: l’oeuvre d’évangélisation.

Oui, chers Frères, il vous faut, dans le contexte actuel, réaffirmer sans relâche les valeurs morales et spirituelles, et l’année Sainte de la Rédemption en sera une bonne occasion. Il faut y éduquer le peuple chrétien, dans la patience et dans l’espérance, car, en même temps que nous rappelons les exigences de l’Evangile, nous devons montrer qu’il s’agit d’une Bonne Nouvelle, d’un salut pour les personnes et pour la société, et surtout nous devons toujours donner à ce peuple chrétien l’assurance que, malgré ses faiblesses et sa fragilité, il peut les vivre grâce aux dons de l’Esprit Saint reçus avec la foi, dans le baptême et les autres sacrements, à la mesure de notre prière et de notre charité.

Dans cette perspective, il faut aider d’abord les évangélisateurs à mener une vie sainte: les parents, les enseignants chrétiens, les catéchistes, pour lesquels vous avez fait de beaux efforts, les animateurs de mouvements, et surtout les prêtres, les frères, les religieuses. Je pense, entre autres, à la fidélité au célibat sacerdotal et religieux qui, bien que relevant d’abord de la responsabilité personnelle de ceux qui se sont librement engagés, est en même temps une richesse qui distingue la communauté chrétienne tout entière, à laquelle par conséquent incombe le devoir de soutenir ceux qui ont répondu à l’appel du Seigneur.

5. J’aborde maintenant un problème qui vous préoccupe à bon droit: l’éducation.

Grâce à vos efforts, souvent bien méritoires, l’Eglise apporte au Gabon, par ses écoles, une contribution de prix à la construction de l’avenir de la radon tout entière. Je m’étais exprimé là-dessus lors de mon voyage, et particulièrement au stade de Libreville. Il importe que soit bien mis en relief, aux yeux de tous, comme du reste vous vous attachez à le faire, le caractère propre de cette oeuvre d’Eglise. Il ne s’agit pas seulement de rechercher auprès des écoles catholiques un enseignement profane de qualité. Il s’agit d’un choix par lequel les familles s’engagent à faire élever leurs enfants dans l’esprit chrétien, sûres qu’ils y puiseront pour demain une énergie spirituelle capitale pour leur propre enrichissement, pour leurs responsabilités et leur service des autres. Je souligne volontiers le bien-fondé de votre action visant à ce que les maîtres de cet enseignement soient les premiers convaincus de la grandeur de leur mission et s’emploient, après une formation adéquate, à se renouveler sans cesse tant sur le plan spirituel que professionnel. Avec vous, j’invite également les jeunes à embrasser généreusement et avec compétence une éventuelle carrière d’enseignement. En renonçant à des situations peut-être plus lucratives, ils obtiendront la joie de réaliser une vocation authentique, pleinement humaine et chrétienne. Enfin, je veux encourager les prêtres et les religieuses qui travaillent à apporter à tous ces maîtres le soutien spirituel et pédagogique dont ils ont besoin. L’école catholique doit clairement apparaître comme une responsabilité commune de l’Eglise tout entière.

Le fruit principal d’une éducation authentiquement chrétienne est évidemment l’élévation du niveau moral et spirituel des adultes que vos élèves seront demain. Cela est particulièrement sensible dans le domaine familial. Les élèves doivent pouvoir compter sur l’exemple de la vie familiale de leurs maîtres, et apprécier à travers leur enseignement et leur comportement les bienfaits que procure la réalisation de l’idéal chrétien du mariage et de la famille. En particulier, ces maîtres ne doivent pas craindre, devant les sollicitations diverses de l’opinion publique dans le domaine des moeurs, de donner une formation claire et authentique sur l’amour humain, afin de permettre aux jeunes de se forger un jugement moral sain et d’acquérir une maîtrise de soi à la fois exigeante et épanouissante.

Enfin, est-il besoin de le souligner, votre responsabilité pastorale vis-à-vis des jeunes dépasse de beaucoup le cadre de l’école catholique. Elle s’étend à la catéchèse des enfants chrétiens qui fréquentent les écoles primaires et les lycées d’Etat, sans oublier la réflexion chrétienne à offrir aux étudiants de l’Université. Il ne s’agit pas seulement de la formation doctrinale, mais de leur participation active à la liturgie, et à une action chrétienne, notamment au sein des mouvements. Vous vous souvenez de ce que je disais à ces jeunes au stade de Libreville. L’Eglise doit prendre pour chacun d’eux le visage concret d’une communauté chrétienne chaleureuse et formatrice, dans le cadre de la paroisse, de l’aumônerie ou du mouvement.

6. Je ne veux pas allonger cet entretien sur d’autres sujets dont nous avons déjà parlé au Gabon. Mais je voulais du moins vous assurer de la part que je prends à votre labeur pastoral. Mon souhait le plus cher pour vous est que vous continuiez à trouver auprès des prêtres, des religieux, des religieuses, des catéchistes et de tous les membres de l’Eglise au Gabon un soutien unanime et cordial. Dites-leur mon bon souvenir, mon affection, la confiance que je mets en eux. Puisiez-vous tous ensemble rendre grâce à Dieu, notamment aux Assembles eucharistiques, de ce que vous forez en vérité le Corps du Christ qui grandit chaque jour davantage au Gabon, comme en d’autres Eglises particulières.

C’est au Christ, notre Rédempteur, la source de notre force et de notre joie, que je demande de vous bénir, vous et tous ceux dont le souvenir est présent à votre coeur de Pasteurs!



Mars 1983




CÉRÉMONIE DE BIENVENUE

Port-au-Prince (Haïti), Mercredi, 9 mars 1983


Monsieur le Président,
Chers Frères dans l’épiscopat,
Chers Frères et Soeurs,

Je salue avec joie et émotion cette terre d’Haïti. Voilà bientôt cinq cents ans que la croix du Christ y a été plantée, qu’on y a célébré la première Eucharistie, récité le premier Ave Maria. Aujourd’hui enfin, le successeur de l’Apôtre Pierre vient à vous. Je sais avec quel empressement vous avez attendu et préparé ma venue. Je vous en remercie.

Je salue tout le peuple haïtien dont l’histoire s’est tissée peu à peu au milieu de conquêtes et d’épreuves qui ont forgé ses traits caractéristiques, particulièrement attachants. Je salue les dirigeants, ceux qui exercent les plus grandes responsabilités, et je leur sais gré de m’accueillir ainsi. Et je salue en même temps chaque citoyen haïtien, chaque famille haïtienne, surtout ceux qui souffrent. Je ne peux me rendre auprès de chacun, mais je veux que tous sachent qu’ils sont également présents à la pensée et au coeur du Pape.

Bonjour tout peuple Haïtien

Moin vini oué nou.

Moin poté la pé ak Ké Kontan Gran Mèt la pou nou.

(Bonjour à tout le peuple haïtien; je viens vous voir, et je vous apporte la paix et la joie du Seigneur).

Je salue avec une joie particulière l’Eglise catholique qui est en Haïti, ses évêques, ses prêtres, religieux, religieuses, ses laïcs: une Eglise jeune, une Eglise à la foi fervente, à la prière vibrante, une Eglise très liée au sort du peuple haïtien. Durant mon bref séjour, je ne pourrai pas aborder tous ses problèmes qui me tiennent à coeur. Mais je viens avant tout confirmer son oeuvre dans ce qu’elle a de meilleur, et son projet d’évangélisation. J’ai entendu beaucoup de témoignages sur sa vie méritante. J’ai lu le message du Symposium de décembre dernier: je viens encourager mes frères et soeurs d’Haïti à le réaliser. L’Eglise y a pris conscience de ses possibilités, des grâces que le Seigneur lui a faites, et aussi de ses limites, des obstacles, des difficultés; elle a appelé chacun à la conversion, riche ou pauvre, pour déraciner le mal dans les personnes et dans la société; elle a réaffirmé la dignité de tous, voulu que l’Evangile soit toujours la Bonne Nouvelle pour les pauvres; elle a appelé tous ses membres à une pastorale solidaire, pour un avenir religieux et humain digne de ce peuple, dans la liberté et la responsabilité.

Dans ce contexte, je remercie de tout coeur Monsieur le Président de la République, qui vient de faire connaître au grand public la nouvelle selon laquelle il est disposé à renoncer de lui-même au privilège, dont jouit actuellement le Chef de l’état Haïtien en vertu du Concordat du 28 mars 1860, de nommer les archevêques et les évêques.

Je vous assure, Monsieur le Président, que ce désir, inspiré par les voeux du Concile OEcuménique Vatican II, ne pourra que profiter tant au développement harmonieux de l’Eglise Catholique dans ce Pays qu’à L’état Haïtien.

Je viens encourager ce réveil, ce sursaut et cette marche de l’Eglise, pour le bien de tout le pays. Nous allons le faire maintenant au cours d’une assemblée eucharistique et mariale qui clôture votre Congrès. C’est dans la prière et dans l’amour que nous puisons la lumière et la force de servir nos frères.


Que le Seigneur bénisse notre ministère sur cette chère terre d’Haïti!



CÉRÉMONIE DE DÉPART

Port-au-Prince (Haïti), Mercredi, 9 mars 1983



En quittant cette terre d’Haïti, je renouvelle l’expression de ma gratitude à tous ceux qui m’ont réservé un accueil si chaleureux. Principalement à Son Excellence Monsieur le Président de la République, qui s’est directement intéressé à la préparation de ma visite et aux responsables des différents services qui ont permis l’heureux déroulement de mon bref séjour, mon contact avec le peuple haïtien.

De ce peuple, j’emporte un souvenir inoubliable et je lui exprime mes voeux les plus sincères pour son bien-être et sa prospérité. A cet effet, j’encourage les efforts que les dirigeants sont en train d’accomplir. Je suis conscient des graves difficultés qu’ils rencontrent et je leur assure pour cela l’union de mes prières, tandis que je lance un vibrant appel aux Pays amis de Haïti et aux organismes internationaux afin qu’ils lui apportent leur concours généreux.

Je renouvelle aussi ma grande gratitude et mes voeux cordiaux à tous les pays que j’ai pu visiter en Amérique Centrale, et à toute l’Amérique Latine, représentée ici par les pasteurs qui font partie du CELAM.

Que Dieu vous permette avec toutes les forces vives de ces nations pleines de jeunesse de construire pour chaque personne et chaque communauté un avenir digne de l’homme, digne de la foi chrétienne si largement partagée dans ce continent. Mon merci particulier va évidemment à tous les habitants d’Haïti qui sont venus à ma rencontre avec bienveillance et confiance, frères d’autres confessions chrétiennes et amis de notre religion.

Je remercie particulièrement tous mes frères et soeurs catholiques avec qui j’ai eu la joie de vivre un temps fort, le sommet de leur Congrès Eucharistique et Marial; celui-ci doit se poursuivre, je veux dire porter ses fruits. Chers amis, donnez libre cours à votre prière fervente. Puisez aux sources authentiques de la Foi. Restez fidèles à l’église.

Les chrétiens d’ici font partie de la grande Eglise du Christ répandue dans tous les continents que j’ai reçu mission de garder dans la fidélité et la dignité au service du Seigneur Jésus. Je vous demeurerai très uni, j’emporte toutes vos intentions, toutes vos préoccupations, toutes vos inspirations dans ma prière, priez aussi pour moi. J’embrasse mes Frères dans l’Episcopat et j’assure tous les collaborateurs, prêtres, religieux, religieuses et laïcs de mon affection.

Kinbè fè-m: Têt ansanm, min nan min.

Mèsi... Mèsi... Au revoir.

(Tenez ferme. Soyez bien d’accord, la main dans la main. Merci beaucoup. Au revoir).






AU NOUVEL AMBASSADEUR DU JAPON PRÈS LE SAINT-SIÈGE

Vendredi, 18 mars 1983



Monsieur l’Ambassadeur!

Je vous souhaite la bienvenue dans cette Maison. Et je vous remercie vivement des paroles pleines d’estime et de bienveillance que vous venez d’exprimer pour le Saint-Siège, en exaltant la mission de paix qu’il m’est donné d’accomplir.

Désormais, Votre Excellence prend rang dans cette lignée d’Ambassadeurs extraordinaires et plénipotentiaires qui, depuis plus de trente ans, sont venus représenter le Japon auprès du Saint-Siège. Vous apportez ici le témoignage d’un pays qui s’est acquis un renom universel, aussi bien par la profondeur et le charme de ses traditions que par son engagement résolu dans le progrès technique moderne. Il me semble que vos compatriotes gardent toujours, dans sa fraîcheur et son dynamisme, la soif de découvrir, de savoir, d’expérimenter, d’entreprendre, avec courage et discipline. Pour moi - vous avez eu la bonté de l’évoquer -, votre pays a pris, en février 1981, un visage plus concret, et je suis loin d’oublier l’accueil émouvant qui m’a été réservé aux diverses étapes de mon voyage à Tokyo, à Hiroshima, à Nagasaki, avec les Autorités du pays, avec les savants, avec les jeunes, avec les représentants des religions shintoïstes et bouddhistes, et bien sur avec les communautés catholiques et les diverses catégories qui les composent. Celles-ci manifestent que le christianisme n’est pas étranger à votre pays, mais qu’il a su produire des fruits admirables chez les Japonais qui l’ont assimilé en profondeur, en lui permettant d’épanouir leurs qualités naturelles dans un climat de foi et de charité.

Ainsi l’église catholique s’est-elle enrichie chez vous d’un témoignage remarquable. Je suis toujours heureux de saluer vos nombreux compatriotes qui viennent à Rome pour découvrir les sources des civilisations occidentales et mieux connaître aussi le coeur de l’église.

Vous-même, Monsieur l’Ambassadeur; vous faisant ici l’écho des préoccupations humaines, culturelles ou spirituelles du peuple japonais et de son Gouvernement, vous serez le témoin de ce que le Saint-Siège cherche à accomplir, avec l’ensemble des catholiques, au service des hommes. Il est bien vrai, comme vous le soulignez, que le monde connaît beaucoup de difficultés et de soubresauts et que, même là ou un grand progrès semble se réaliser, de nouveaux problèmes de rapports pacifiques et solidaires, d’harmonie et d’équilibre, ou même de sens de la vie surgissent qui retardent ou mettent en échec l’accomplissement, sur cette terre, d’un véritable humanisme. Trop d’hommes, de par le monde, n’arrivent pas à se procurer le minimum vital, et le reste de l’humanité ne saurait l’oublier. Trop souffrent de l’injustice, ou de conditions qui briment leur légitime liberté. Les réfugiés, les laissés pour compte sont légion. La paix, précaire, est toujours menacée, et la menace comporte des risques énormes dont votre pays a fait l’angoissante expérience. Comme je le disais chez vous, aux représentants de l’Université, il faut un retournement moral, une redéfinirions des priorités pour faire croître l’homme dans son être, il faut que l’approfondissement des consciences soit au niveau du progrès des sciences. L’Eglise s’associe donc aux efforts de tous les hommes de bonne volonté pour la concorde, pour la solidarité, pour le respect de l’homme, de ses droits fondamentaux et de ses aspirations transcendantes, en écartant les fausses solutions de la violence et aussi du matérialisme.

Mais l’église puise la force de son amour de l’homme, et de son amour de l’homme, et de son espérance invincible, dans le secret de sa foi, c’est-à-dire dans la façon dont le Christ a aimé les hommes et libéré leur coeur, selon la mission reçue de Dieu le Père. Cette attitude est toujours sous-jacente aux multiples façons dont le Saint-Siège participe, dans le cadre de sa compétence spécifique, à la vie internationale, dans ses rapports avec les Etats ou avec les Organisations mondiales.

Je vous confie le soin d’exprimer à Sa Majesté l’Empereur HiroHito ma gratitude pour ses voeux délicats, le souvenir inoubliable que je garde de son accueil et les souhaits les meilleurs que je forme à son intention. Je suis heureux de redire ma sympathie à tout le peuple japonais qui demeure proche à ma pensée, à mon coeur et à ma prière. Et je vous souhaite à vous-même, Monsieur l’Ambassadeur, une fructueuse mission au service des relations amicales entre votre pays et le Saint-Siège. Que Dieu bénisse le Japon!





Discours 1983 - Samedi, 22 janvier 1983