Discours 1984 - Einsiedeln, Vendredi, 15 juin 1984

AUX REPRÉSENTANTS DU CLERGÉ SUISSE

Einsiedeln, Vendredi, 15 juin 1984




Liebe Brüder in der Gnade des Priestertums!

1. …



6. Ayant clarifié ces questions, en réponse à vos préoccupations, j’en viens à la situation pastorale qui peut apparaître décourageante à un certain nombre d’entre vous. Ce que vous ressentez profondément, en effet, c’est la pression progressive d’un monde qui se passe de Dieu ou croit pouvoir se passer de Dieu. Cela se manifeste statistiquement au niveau du nombre des baptêmes demandés ou de la pratique religieuse. Mais c’est un phénomène diffus, plus large et plus profond, qui touche la foi elle-même: certains doutent, d’autres altèrent la foi ou la refusent. Dans une telle situation, caractéristique des sociétés d’abondance du monde occidental, des prêtres pourraient être tentés de se décourager. Il est grave de voir les assemblées diminuer et de constater que le monde semble sombrer dans l’indifférence religieuse ou s’attacher à des “faux dieux”. Or, dans le même temps - sans doute pour la même cause -, le nombre des prêtres diminue et celui des vocations sacerdotales a bien du mal à remonter. Bien sûr, dans cette “diaspora”, des petits groupes fervents renaissent, qui sont vraiment témoins de Jésus Christ. Vous avez raison d’y attacher vos regards, comme à des signes prometteurs, et je veux partager cette espérance avec vous. Mais le problème d’ensemble demeure; il nous faut y faire face, avec courage et avec sérénité. Et j’ajoute, dans la vérité de ce qu’est le christianisme.

7. L’Eglise compte justement sur vous pour relever - comme l’un de vous le disait - le défi de la sécularisation et de l’indifférence. Pour y répondre, vous cherchez à mieux présenter le visage de Dieu, la gratuité de son amour et sa miséricorde. Vous approfondissez le respect de l’homme, de sa dignité et de sa liberté. Vous favorisez de petites communautés plus vivantes et plus responsables. Vous voudriez que la joie, la ferveur, l’espérance les habitent, et vous espérer un nouveau printemps, même modeste, à partir de leur témoignage évangélique. Tout cela est important et j’y reviendrai.

Mais je désire auparavant vous dire ce qui me paraît premier: c’est notre foi elle-même.Nous croyons que le Christ est le Sauveur. Nous croyons qu’il fait de nous ses prêtres pour le salut des hommes. Même si le monde autour de nous doute de la présence d’un Dieu qui l’aime, de la capacité du Christ à la renouveler, de la puissance de l’Esprit Saint qui poursuit son oeuvre de sanctification, même si le monde ne ressent pas le besoin de recevoir un tel salut, et semble ne compter que sur ses capacités techniques ou réduire son horizon à une vie matérialiste, l’Eglise garde la conviction qu’il n’est pas d’autre Nom que celui de Jésus-Christ pour sauver les hommes (Ac 4,12): il est le Chemin, la Vérité, la Vie. Et elle l’annonce clairement, à temps et à contretemps. C’est la force même de cette Bonne Nouvelle, avec la grâce de Dieu, qui déclenche dans les coeurs in mouvement vers la foi, au-delà de ce qui semblait prévisible. Il faut que retentisse toujours avec vigueur la parole initiale de Jésus: “Convertissez-vous et croyez à l’Evangile!” (Mc 1,15). Il est normal le rechercher les signes du printemps, mais il ne faut pas attendre de les voir pour affirmer que la Vie est là. Il faut bien sûr mettre en oeuvre tous les moyens pastoraux, mais ils sont subordonnés à cette assurance dans la foi.

En un mot, chers amis, avons-nous assez de foi dans notre sacerdoce reçu du Christ? Croyons-nous fermement que le Christ nous a sanctifiés et envoyés (Jn 17,18), qu’il agit par notre ministère, si du moins nous faisons son oeuvre? Croyons-nous assez que la semence de la Parole, que le témoignage de son Amour ne restent pas sans porter du fruit? Après nous être engagés librement, acceptons-nous de le suivre, quand son mystère rencontre l’incompréhension des hommes, quand son chemin est celui de la croix et des renoncements? (Ibid. Jn 6,66. Jn 6,71 Lc 9,23-26) Car telle est - telle a toujours été - la condition de l’apôtre, du disciple, du prêtre. Croyons-nous aussi qu’il accordera le même don de la vocation sacerdotale à tous ceux qu’il appelle à participer à son oeuvre de Médiateur? Plus le monde se déchristianise, plus il a besoin de voir, dans la personne des prêtres, cette foi radicale, qui est comme un phare dans la nuit, ou le Roc sur lequel il s’appuie. Et le Christ n’abandonnera pas ceux qui, saisis par lui, lui ont consacré toute leur vie. Voilà, fondamentalement, la source de notre espérance. Voilà ce qui permet de porter un regard neuf sur le monde, comme au matin de la Pentecôte.

Et je dois même ajouter ceci: la constatation du succès éventuel de nos efforts d’évangélisation, accomplis au nom du Christ, ne constitue pas le ressort habituel de notre courage, ni la source ultime de notre joie. Le jour où les soixante-douze disciples, tout joyeux au retour de leur mission, confièrent à Jésus: “Même les démons nous sont soumis en ton Nom”, Jésus leur répondit: “Ne vous réjouissez pas de ce que les esprits vous sont soumis, mais réjouissez-vous de ce que vos noms se trouvent inscrits dans les cieux” (Lc 10,17 Lc 10,20). De même, chers frères prêtres, ne vous attristez pas de ce que les démons ne vous sont pas soumis de façon visible, de ce que le monde n’acquiesce pas d’emblée au Message, mais réjouissez-vous d’avoir fait l’oeuvre du Christ et de mériter de partager son sort dans le Ciel. Cette oeuvre est accomplie, vos noms sont inscrits dans le Ciel, lorsque vous cherchez à vivre, selon la foi, toute la plénitude du sacerdoce sacramentel, de ce don ineffable que le Christ vous a fait et dont vous devez toujours rendre grâce.

8. Notre foi se manifeste spécialement dans la place que nous accordons à la prière, au coeur de notre ministère. Les disciples de Jésus ont éprouvé un certain découragement devant la résistance du mal malgré leurs efforts de prédication et de guérison. Mais Jésus leur a répondu: “Cette espèce de démons, on ne la fait sortir que par la prière et le jeûne” (Mc 9,29 Mt 17,21). C’est le Christ qui convertira et qui sauvera ce monde sécularisé; et il le fera par les actes de notre ministère, mais à condition qu’on ne se contente pas de les accomplir rituellement, formellement: “Imitamini quod tractatis”. Ils doivent être situés dans tout un climat de prière et de sacrifice, par lesquels toute notre personne s’unit intimement à l’action du Christ Médiateur.

L’Eucharistie que nous célébrons chaque jour est évidemment au sommet de notre vie sacerdotale. Je pense aussi à l’oraison quotidienne, à la prière de la liturgie des heures, faite au nom de l’Eglise, au rythme de nos journées; à la grâce de la Réconciliation que nous offrons et que nous demandons pour nous-mêmes; à tous les autres sacrements et à leur préparation avec les fidèles. Les multiples contacts pastoraux sont encore une occasion merveilleuse d’incarner la sollicitude patiente et confiante du Christ pour tous, et de rejoindre ces hommes et ces femmes au coeur de leurs préoccupations, pour les mettre en face des appels de la foi.

Oui, c’est à travers notre comportement, le soin et la conviction avec lesquels nous accomplissons toutes nos tâches sacerdotales, que les personnes, les familles et les groupes, même éloignés de la pratique religieuse, découvrent la foi qui nous habite et le Mystère dont nous sommes porteurs, même à travers les “vases d’argile” que nous sommes, invités constamment à l’humilité (2Co 4,7).

Le prêtre annonce l’Evangile avant tout par la vérité de sa vie. Comme le Christ disait aux Apôtres: “Avec le Saint-Esprit..., vous me rendrez témoignage” (Ac 1,8). Il est salutaire pour nous de fixer aussi les yeux sur les prêtres modèles qui nous ont précédés, illustrant chacun à sa façon la grâce du sacerdoce: saint François de Sales, saint Vincent de Paul, saint Jean Bosco, saint Jean-Marie Vianney - le patron des curés -, le Père Charles de Foucauld, saint Maximilien Kolbe.

C’est dans la même ligne - prière et témoignage - que se trouve la clé du grave problème des vocations. Elles naissent de la prière et de la force de l’Esprit Saint qui agit par la vie “exemplaire” des prêtres.

9. Quant au message lui-même, il est vraiment de nature à toucher les gens d’aujourd’hui comme ceux d’hier, à combler leur attente ou du moins leur besoin inexprimé, s’il reflète vraiment l’Evangile et les béatitudes. Ce monde qui fait grand cas de la liberté individuelle a besoin d’une parole qui donne sens à cette liberté, en appelant l’homme à être responsable, procréateur avec Dieu, libre aussi de tout esclavage, à commencer par celui où l’enferme le péché. Le Christ l’invite à se remettre, par amour, entre les mains du Père qui, le premier, l’a aimé gratuitement et qui veut que l’homme accomplisse sa liberté dans le don de l’amour. Le désir de posséder et de jouir, la tendance à dominer et à traiter l’autre en objet, laissent en fait une insatisfaction devant laquelle les béatitudes constituent une Bonne Nouvelle: elles apprennent à trouver le bonheur en étant - comme le Christ et avec lui - pauvres, chastes, miséricordieux, artisans de paix et assoiffés de justice, respectueux de la dignité de l’autre dans son esprit et dans son corps. La société sécularisée où règne un certain matérialisme dans l’abondance a sûrement besoin d’une parole et d’un témoignage, qui invitent à créer, grâce à cette abondance même, un espace de générosité et de partage. Il nous appartient donc, par une pastorale évangélique des béatitudes, de présenter le vrai visage de Dieu et de l’homme, de conduire par là à l’expérience de l’amour pour Dieu et pour l’homme d’une façon toujours nouvelle.

Mais nous savons aussi que ce message est prophétique. Il attire et en même temps il est signe de contradiction. Il passe au crible les notions humaines de bonheur, de liberté, de sincérité, pour les purifier. Et il ne comporte pas que les aspects séduisants des béatitudes: il suppose l’intégralité des commandements donnés à Moïse et commentés par les prophètes, il embrasse l’ensemble de la Révélation et ses conséquences, telles que l’Eglise a la charge de les présenter. Dieu est Dieu, au-dessus de nos pensées et plus grand que notre coeur limité et pécheur. Aussi le prêtre, tout en s’efforçant d’aplanir les obstacles au niveau du langage et d’ouvrir la porte du Royaume à tous les hommes qui cheminent plus ou moins vers Lui, doit s’attendre, comme on l’a déjà souligné, à ce que le Message ne suscite pas immédiatement l’assentiment de tous: celui-ci passe par une conversion. Il nous faut vivre parmi nos contemporains comme des frères, tout en étant les “témoins et dispensateurs d’une vie autre que la vie terrestre” (Presbyterorum Ordinis PO 3).

10.


AUX REPRÉSENTANTS DES LAÏCS ENGAGÉS AU SERVICE DE L'ÉVANGÉLISATION

Einsiedeln, Vendredi, 15 juin 1984




Liebe Brüder und Schwestern in Christus!

1. …



2. Chers laïcs chrétiens, engagés au service de l’évangélisation!

Il n’est pas nécessaire d’insister sur les besoins considérables de cette évangélisation contemporaine. Vous savez fort bien que le nombre des jeunes et des adultes, accablés de questions et souvent de souffrances engendrées par les mutations socio-culturelles de notre époque, va croissant. Vous savez que les secteurs vitaux de la vie en société, tels que la famille, les vastes domaines de la culture, l’enseignement, le monde du travail, les applications de la science, les réalités économiques et politiques, requièrent des guides éclairés, capables d’aider leurs frères et soeurs à déchiffrer ces questions nombreuses et complexes, et à les vivre en y trouvant peu à peu leur chemin de croissance humaine et de perfection chrétienne. La marche continue de l’histoire requiert sans cesse de nouveaux apôtres, qui annoncent l’Evangile et en vivent au sein des réalités temporelles, comme le levain dans la pâte. Ces nouveaux apôtres seront les disciples fervents de Jésus-Christ, tout à fait en prise sur leur temps et leurs divers milieux de vie. Ils seront en même temps des chrétiens très engagés dans le mouvement apostolique le plus adéquat à leur insertion socio-professionnelle et toujours soucieux de vivre en situation de complémentarité avec d’autres associations. L’apostolat est d’autant plus crédible et efficace que les mouvements s’acceptent divers et concourent au même but de l’évangélisation, dans une collaboration fraternelle: alors ils représentent une richesse pour l’unité de l’Eglise en état de mission.

Jeunes et adultes des mouvements, prenez de plus en plus votre place dans les communautés de vos paroisses et de vos diocèses, très unis entre vous, avec vos prêtres et vos évêques! Sans m’attarder aux buts et aux méthodes de chaque mouvement, je tiens à vous encourager très vivement à puiser quotidiennement aux sources de la vie chrétienne. Sur ce plan, l’expérience du Seigneur Jésus est impressionnante, exemplaire! En pleine mission, il interrompt ses activités pour s’entretenir expressément avec son Père, lui dire sa volonté de se conformer à ses desseins, intégrer à cette relation toute filiale les joies et les échecs de son annonce de la Bonne Nouvelle. A l’exemple de leur Maître, les premiers Apôtres - et saint Paul tout spécialement - manifestent clairement cette continuelle imbrication de l’action et de la contemplation. En définitive, c’est le mystère du Fils de Dieu, l’Envoyé du Père, que tout apôtre est appelé à vivre et à révéler aux autres. Le mystère du Verbe incarné, venu dévoiler et consacrer la dignité de l’homme et de ses activités, éclairer le sens de son existence terrestre et de son destin d’éternité, ôter à la souffrance individuelle et aux vicissitudes de l’histoire leur aspect de fatalité, et cela avec le libre concours de la personne humaine. C’est le Christ Rédempteur, assidûment fréquenté dans son message évangélique, dans les sacrements confiés à son Eglise, qui transforme les apôtres d’aujourd’hui au point de les rendre capables de donner leur vie sans compter pour la libération humaine et chrétienne de leurs contemporains, à commencer par les plus proches, et quel que soit le milieu social auquel ils appartiennent.



3.



AUX PROFESSIONNELS DES MÉDIAS

Einsiedeln, Samedi, 16 juin 1984


Sehr geehrte Damen und Herren!

1. …

2. Comme professionnels des médias, vous avez, du fait même de votre mission, une grande responsabilité. Grâce au développement et aux progrès constants des moyens de communication sociale, les hommes et les peuples sont devenus plus proches les uns des autres. Les influences réciproques et les dépendances mutuelles s’accentuent de plus en plus. Votre rôle et votre compétence dans le domaine des médias vous amènent quotidiennement à vous poser des questions: comment parvenir à mettre au service des hommes, de façon toujours plus efficace, les moyens et les connaissances disponibles? Que faut-il proposer à l’auditeur ou au lecteur pour son information, son épanouissement et le progrès de sa formation, afin d’approfondir en lui le sens de la communauté humaine et d’éclairer son regard sur ses frères? Dans une juste réponse à ces questions se trouve engagée votre haute responsabilité devant Dieu et devant les hommes, ainsi que l’influence décisive que vous exercez pour former l’opinion publique.

Dans son travail, le journaliste sait que sa responsabilité ne porte pas seulement sur ce que l’on dit, ce que l’on écrit ou ce que l’on montre, mais aussi sur la manière dont on le fait. Ne laissez pas utiliser les médias pour manipuler l’opinion publique. Restez attentifs à éviter qu’on en reste à l’aspect superficiel des choses dans les informations, et à éviter aussi la tendance à souligner les côtés négatifs ou sensationnels sans prendre en compte les droits individuels de chaque personne. Il n’y a pas d’information ou de communication qui n’engage des valeurs. Il vous appartient d’exprimer les valeurs dignes d’être diffusées dans la mesure où elles contribuent à la construction de la communauté et à la promotion de l’homme. Je vous y encourage: dans un contexte souvent hostile à l’idéal chrétien de la vie, engagez toute votre compétence dans la défense de l’homme et de sa dignité ainsi que dans le maintien et le développement des valeurs positives de la société contemporaine. Je souhaite que ma visite pastorale dans votre pays et notre présente rencontre vous apportent un soutien dans vos tâches et vos responsabilités si importantes. De tout coeur je confie à l’aide et à la bénédiction de Dieu votre action dans le domaine des communications sociales.



AU GROUPE SPORTIF DE SKIEURS SUISSES POUR LA BÉNÉDICTION DE LEUR NOUVEAU DRAPEAU

Cours du Palais de l'évêché de Sion, Dimanche 17 juin 1984



Frères et Soeurs,

il m'est agréable de retrouver les montagnards et les sportifs que vous êtes, car, vous le savez sans doute, j’ai beaucoup aimé gravir les montagnes de mon pays et pratiquer le ski à l’occasion.

Chez vous, la montagne et le climat ont exigé de vos ancêtres une rude énergie pour tirer du sol de quoi vivre. Et ils ont été fidèles à leur foi chrétienne. Ils vous ont légué de solides traditions: les croix et les chapelles jusqu’aux sommets des montagnes en sont des signes visibles; l’énergie, le caractère fraternel et l’esprit chrétien des Suisses manifestent aussi qu’ils gardent le meilleur de leur héritage.

L’avènement du tourisme et des sports d’hiver a transformé certaines préoccupations d’autrefois en sources de revenus. Beaucoup de gens viennent chez vous chercher à s’échapper de la tension qui pèse sur eux dans la société moderne. Par les sports de plein air, ils trouvent un facteur d’équilibre pour leur santé physique et morale, un stimulant pour toutes leurs tâches.

Votre Association soutient les clubs de ski locaux, les réunit dans certains objectifs communs. Son but n’est pas à proprement parler religieux. Mais votre présence même montre que vous en percevez l’aspect chrétien. Tout simplement votre action contribue à servir l’homme en offrant à ceux qui viennent ici un climat sain et fraternel, une possibilité de ressourcement personnel et communautaire où la dimension spirituelle peut librement apparaître, où les valeurs chrétiennes ont leur place, où le culte de Dieu a sa place par le rassemblement dominical des chrétiens.

Parce que vous voulez vous garder de faire du sport un absolu sacralisé, et parce que vous savez que le plein épanouissement de l’homme appelle à ne pas séculariser son activité, votre Association a demandé symboliquement que son drapeau soit béni. Que votre emblème vous rappelle toujours que vous situez votre vie, votre sport et l’amitié qui vous unit dans le plan de Dieu! Avec joie je vous bénis et je bénis maintenant votre drapeau.



AUX FIDÈLES PRÉSENT DANS LA CATHÉDRALE DE SION

Cathédrale de Sion, Dimanche 17 juin 1984




Chers Frères et Soeurs,

nous avons tous de nombreuses raisons de rendre grâce à Dieu.

1. Cette église-cathédrale, au coeur de la ville de Sion et de ce diocèse qui est le plus ancien de toute la Suisse, est, comme toutes les cathédrales, le symbole de la maison “spirituelle”, faite de pierres vivantes (1P 2,5), disposées autour de la pierre angulaire qu’est le Christ, cimentées, en quelque sorte, par l’Esprit Saint, pour “former un sacerdoce saint”, où chaque membre du Christ prend sa place, selon sa vocation, afin de contribuer à l’édification de l’ensemble de l’Eglise, autour de l’Evêque qui préside la communauté diocésaine au nom et à la place du Christ. J’encourage les membres du Chapitre dans leur service de cette église et dans les tâches que leur confie leur évêque.

J’encourage les prêtres de Sion à former un presbyterium uni, à s’épauler de façon fraternelle, dans la prière et la réflexion commune, pour répondre toujours mieux aux problèmes spirituels de leurs fidèles. J’encourage les religieuses à apporter, dans l’office de la louange ou dans les différentes formes de l’apostolat, le dynamisme qu’elles puisent dans leur consécration au Christ et leurs talents de femmes. J’encourage tous ceux qui participent aux différents services de l’Eglise: animation de la prière, catéchèse, organisation de la charité, et je veux nommer plus spécialement la liturgie, en voyant les chanteurs et les chorales de ce matin, que je remercie vivement.

Oui, apportez tous un grand soin à préparer de dignes liturgies, où le peuple participe activement selon les normes et les orientations de l’Eglise d’aujourd’hui, et se trouve disposé, par la beauté, le recueillement et la ferveur, à entrer dans le Mystère du Christ.

2. Cette cathédrale n’est pas que le symbole du rassemblement de toute l’Eglise particulière de Sion. Elle est pour ce quartier, pour cette ville, la Maison de Dieu. Je souhaite que les habitants de cette cité - tout en priant dans leur foyer et au coeur de leurs occupations - comprennent de plus en plus qu’il est bon pour eux de venir prier ici, ensemble ou personnellement, dans un climat qui permet d’élever leur pensée, d’approfondir leur méditation, d’élargir leur coeur. Encourageons cette prière, par l’exemple et l’exhortation. Beaucoup de gens en sont capables, et même en ont soif; certains attendent qu’on leur apprenne à prier. Ici, c’est le lieu privilégié de l’Eucharistie et du sacrement de la Réconciliation. Mais, à tout moment, la présence du Saint-Sacrement à la place d’honneur est un rappel constant de l’Eucharistie célébrée, et elle permet d’entrer dans la prière du Christ, avec un esprit d’adoration et d’oblation dont je tiens à redire l’importance.

3. L’antique cathédrale de Sion a été dédiée à Notre-Dame. Je sais que ce patronage marial de l’église-mère du diocèse correspond à une dévotion fidèle à l’égard de la Mère de Dieu dans tout votre diocèse.

Votre ancien évêque, Mgr Nestor Adam, l’avait solennellement consacré à Marie au début de son épiscopat. Son successeur, votre pasteur actuel, a renouvelé cet acte, et sa première lettre pastorale était dédiée au Cantique du “Magnificat”. Il avait alors exprimé le désir suivant: “Comme un rappel réciproque à la veille de sanctifier le jour du Seigneur, comme signe sensible et renouvelé d’unité, et en hommage à Notre-Dame qui nous conduit à Jésus, je vous invite tous à prier le "Magnificat", au moins une fois par semaine, le samedi soir”.

Frères et Soeurs, je me réjouis de votre piété mariale et vous en félicite. Je suis sûr qu’elle comporte notamment le rosaire. Avec vous maintenant, je prie la Très Sainte Vierge Marie de nous garder fidèles disciples du Christ, en reprenant son cantique d’action de grâce.



CÉRÉMONIE DE DÉPART DE SUISSE

Aéroport de Sion, Dimanche, 17 juin 1984



Mesdames, Messieurs,
chers Frères et Soeurs,

1. Me voici au terme du voyage passionnant que le Seigneur m’a donné d’accomplir à travers la Suisse depuis six jours, et selon un rythme intense de rencontres variées. Il fallait ces différentes étapes pour prendre contact avec un pays qui regroupe, dans une unité très souple, des traditions si diverses.

Je retrouve ici mes chers Frères dans l’épiscopat qui m’ont accompagné tout au long de ce voyage, et je leur redis, à eux et à leurs collaborateurs, ma gratitude pour leur contribution diligente à la préparation et au déroulement de l’ensemble. Je remercie les prêtres de Sion et les autres catholiques ici présents, et à travers eux je remercie toute la communauté catholique de Suisse; c’est elle essentiellement que je désirais rencontrer au cours de cette visite pastorale. Je salue aussi avec reconnaissance les autres communautés chrétiennes qui ont accepté de dialoguer et de prier avec l’Evêque de Rome.

Mais je me tourne également vers les Autorités civiles, Monsieur le Président de la Confédération et Messieurs les Conseillers fédéraux, qui avez eu la délicatesse de venir jusqu’ici prendre congé de moi. Je garde un heureux souvenir de notre rencontre à Lohn. Et je salue avec gratitude toutes les Autorités locales, notamment Monsieur le Président du Gouvernement valaisan, Messieurs les Conseillers d’Etat, Monsieur le Président du grand Conseil valaisan, Monsieur le Préfet, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les Conseillers municipaux de la ville de Sion, Monsieur le Président de la Bourgeoisie de Sion. Aux différents échelons, vous avez eu la bonté de tout mettre en oeuvre pour faciliter ma mission pastorale auprès de vos compatriotes. Je pense, entre autres, à tous ceux qui ont participé au service d’ordre et de sécurité, dont ils se sont acquittés avec l’efficacité, la discipline et l’amabilité qui font traditionnellement honneur à la Suisse: je pense à ceux qui, militaires ou civils, ont assuré les multiples transports, d’une façon si bien organisée et agréable pour moi. Ils m’ont d’ailleurs permis d’admirer d’en haut de vos merveilleux paysages. Je ne voudrais oublier, dans mon merci, aucun de ceux qui ont participé généreusement, souvent de façon cachée à la préparation et à l’aménagement des voyages, aux installations, décoration, etc. Je sais que vous avez formé pour cela des comités diocésains efficaces travaillant en liaison étroite avec les services civils des Cantons, et je veux citer plus encore le Comité central.

Je remercie aussi les Autorités des autres Cantons qui partout sont venues m’accueillir d’une façon très courtoise. D’ailleurs, en ce moment, je ne pense pas seulement à ces multiples services d’ordre pratique; je considère qu’il est aussi de ma mission pastorale de rencontrer les hommes et les femmes qui ont la noble mission du bien commun de leur pays; et je suis toujours heureux, dans le respect plénier de leurs compétences propres, de les écouter, de leur exprimer mon estime et mes souhaits pour leurs tâches exigeantes.

Enfin, à travers vos personnes, je salue et remercie tout le peuple helvétique dont, partout, j’ai apprécié l’accueil bienveillant, confiant, et je puis dire chaleureux.

2. Je quitte donc aujourd’hui ce pays, l’esprit et le coeur remplis de souvenirs marquants. Je pourrais évoquer vos paysages toujours si attachants, la majesté des montagnes et des glaciers, le miroitement des lacs et des paisibles rivières, la verdure des prairies et le parfum des fleurs à l’approche de l’été. Je pense plus encore aux populations rencontrées à Lugano, à Fribourg, à Flüeli, à Einsiedeln, à Lucerne, à Sion. Beaucoup y sont venus des autres Cantons que, malheureusement, nous ne pouvions pas visiter. Nous avons prié et chanté ensemble; ensemble, nous nous sommes ouverts à la joie de nous savoir fils de Dieu et de l’Eglise; nous avons regardé et prié ceux qui nous ont précédé dans la foi et la sainteté: Saint Maurice, Saint Meinrad, Saint Nicolas de Flue, Saint Pierre Canisius, Saint Charles Borromé. Nous nous sommes affermis dans notre vocation d’évêques, de prêtres, de religieux, de religieuses, de laïcs, fortifiant notre identité, afin de mieux remplir notre rôle spécifique dans l’Eglise; nous n’avons pas oublié les graves problèmes du monde contemporain; nous étions en communion avec ceux qui peinent et qui souffrent. Et, au milieu des citoyens originaires de ce pays, nous avons été heureux de rencontrer des groupes importants d’étrangers de tous les continents, auxquels la Suisse sait donner l’hospitalité qu’ils soient touristes, travailleurs immigrés, réfugiés.

3. De tout coeur, je forme des voeux fervents pour ce pays, qui occupe une place un peu privilégiée au coeur de l’Europe, une situation qui peut être signe d’une vocation d’accueil et de paix. La Suisse aime la paix et elle a appris à faire cohabiter, dans le respect et la démocratie, des cultures et des convictions diverses, en équilibrant les courants distincts dans une complémentarité active qui va au-delà du simple compromis.

Je souhaite que cette sagesse et cette philanthropie fassent école dans notre monde si enclin à l’agressivité et au cloisonnement, qu’elles soient sans cesse approfondies et qu’elles incluent toujours le respect de la vie sous toutes ses formes, le souci de la justice, les liens de fraternité avec l’entourage, la sympathie, la générosité et l’amour envers tous ceux qui, à travers le monde, souffrent du manque de pain, d’affection, de considération et de liberté. Pour les chrétiens, c’est la charité - la charité véritable - qui anime tous ces comportements humains.

4. Et j’adresse aussi plus particulièrement des souhaits fervents à mes frères catholiques, aux prêtres, aux religieux et religieuses, aux différents mouvements ecclésiaux, aux familles, à tous les baptisés et confirmés, et à ceux qui cherchent la vérité. Malgré les tentations de sécularisation ou l’indifférence religieuse, j’ai rencontré un peuple de croyants, qui a été heureux d’exprimer sa foi autour du Successeur de Pierre et des autres évêques. N’ayez pas peur, chers amis. Dieu est plus grand que nos coeurs hésitants. Ouvrez les portes au Rédempteur qui se tient au milieu de vous. Ouvrez votre coeur à l’Esprit Saint de Jésus Christ. Qu’il fortifie votre foi! Qu’il anime votre prière sans laquelle la foi ne saurait se maintenir fidèle! Qu’il vous fasse comprendre et aimer l’Eglise, dont vous êtes membres! Qu’il vous inspire un amour fraternel entre vous! Qu’il vous garde solidaires de l’Eglise universelle!

Ma prière se nourrira de ce que j’ai vu et entendu chez tous ceux que j’ai rencontrés. Comment d’ailleurs oublierais-je la Suisse, alors que certains de vos compatriotes sont traditionnellement les gardiens de ma maison à Rome! Priez aussi pour moi, afin que le Seigneur me donne, malgré mes limites, d’accomplir partout le ministère qu’il m’a confié dans le sillage de Pierre, pour professer la foi, servir l’unité et affermir mes frères. Loué soit Jésus Christ! Qu’il vous bénisse en vous comblant tous de sa paix et de sa joie!

Im Augenblick des Abschieds aus eurem geschätzten Land danke ich Gott für die Gnadentage dieses Pastoralbesuches und allen Schweizer Bürgern für die mir gewährte herzliche Gastfreundschaft. Möge die geistliche Gemeinschaft, die uns hier in religiöser Besinnung und gemeinsamem Gotteslob so eng miteinander verbunden hat, diese Stunde der äußeren Trennung überdauern und für alle reiche Frucht bringen. Der hl. Bruder Klaus erhalte euch Frieden und Eintracht in euren Familien und Gemeinden!

Prima di concludere, desidero salutare con affetto anche tutti i fratelli di lingua italiana.

Nel manifestare la mia riconoscenza per la testimonianza di fede offertami in questi giorni, chiedo al Signore che susciti sempre energie nuove di buona volontà, benedica quanti lavorano onestamente per il bene dell’uomo e della società, e sostenga quanti con dedizione sono impegnati a costruire la Chiesa come Corpo mistico di Cristo e come Popolo di Dio in cammino.

Auguro a questo nobile Paese un costante progresso economico, sociale, culturale, morale e spirituale, affinché tutti in esso possano continuare a vivere in un clima di libertà, di fiducia e di pace.



DÉCLARATION COMMUNE ENTRE LE PAPE JEAN-PAUL II ET S.S. MORAN MAR IGNATIUS ZAKKA Ier IWAS


1. S. S. Jean-Paul II, Évêque de Rome et Pape de l’église catholique, et S. S. Moran Mar Ignatius Zakka 1er Iwas, patriarche syrien d’Antioche et de tout l’Orient et chef suprême de l’Église universelle syrienne orthodoxe s’agenouillent humblement devant le trône de gloire de Notre Seigneur Jésus-Christ, en rendant grâce à Dieu qui leur a donné la merveilleuse occasion de se rencontrer dans son amour pour approfondir les relations entre les deux Églises soeurs, l’Église de Rome et l’Église syrienne orthodoxe d’Antioche, relations déjà excellentes grâce à l’initiative prise en commun par Leurs Saintetés d’heureuse mémoire, le Pape Paul VI et le patriarche Moran Mar Ignatius Jacoub III.

2. Le Pape et le Patriarche désirent affirmer ici solennement tout ce qui les unit déjà dans une profonde communion spirituelle, eux et les évêques, les prêtres et les fidèles de leurs Églises, pour resserrer davantage encore ces liens de foi, d’espérance et d’amour et pour retrouver progressivement une vie ecclésiale entièrement commune.

3. Tout d’abord, Leur Saintetés confessent la foi des deux Églises, formulée par le Concile de Nicée en 325, exprimée dans le Credo de Nicée. Les mésententes et les schismes qui sont survenus dans les siècles suivants entre les deux Églises, — ils le reconnaissent aujourd’hui — n’atteignent pas la substance de leur foi, étant donné que ces difficultés ont surgi seulement pour des raisons de divergences dans la terminologie, de différences culturelles, de formulations variées préconisées par diverses écoles théologiques pour exprimer la même réalité. C’est pourquoi, ils estiment qu’aujourd’hui il n’y a pas de fondement réel aux tristes divisions et schismes qui se sont produits par la suite entre les deux Églises en ce qui concerne la doctrine de l’Incarnation. En paroles et en actes, ils confessent la vraie doctrine au sujet du Christ Notre Seigneur en dépit des différences dans l’interprétation de cette doctrine qui ont eu lieu au temps du Concile de Chalcédoine.

4. Nous voulons donc réaffirmer solennellement notre profession de foi en l’Incarnation de notre Seigneur Jésus-Christ, telle que l’ont déjà déclarée en 1971 le Pape Paul VI et le patriarche Moran Mar Ignatius Jacoub III. Ils ont nié qu’il existe une différence dans la foi qu’ils confessent dans le mys­tère du Verbe de Dieu fait chair et devenu réellement homme. A notre tour nous confessons qu’il s’est incarné pour nous, en prenant pour lui-même un corps réel avec une âme raisonnable. Il a partagé en toutes choses notre humanité à l’exclusion du péché. Nous confessons que notre Seigneur et notre Dieu, notre Sauveur et Roi de l’univers, Jésus-Christ, est Dieu parfait pour ce qui est de sa divinité et homme parfait pour ce qui est de son humanité. En lui sa divinité est unie à son humanité. Cette union est réelle, parfaite, sans mélange, sans commixtion, sans confusion, sans altération, sans division, sans la moindre séparation. Lui qui est le Dieu éternel et indivisible est devenu visible dans la chair et a pris la forme du Serviteur. En lui sont unies de façon réelle, parfaite, indivisible et inséparable l’humanité et la divinité et toutes leurs propriétés sont en lui présentes et agissantes.

5. Ayant donc une même conception du Christ, nous confessons aussi une même conception de son mystère. Incarné, mort et ressuscité, notre Seigneur, Dieu et Sauveur a vaincu le péché et la mort. Par lui, durant le temps entre la Pentecôte et la seconde venue, période qui est aussi la fin des temps, il est donné à l’homme de faire déjà l’expérience de la nouvelle création, royaume de Dieu, ferment transformant (cf. Mt 13,33) déjà présent parmi nous. Pour cela Dieu s’est choisi un peuple nouveau, son Église sainte qui est le Corps du Christ. Par la Parole et les sacrements, l’Esprit-Saint agit en elle pour appeler tous les hommes et en faire des membres de ce Corps du Christ. Ceux qui croient sont baptisés dans l’Esprit au nom de la Sainte Trinité pour former un seul corps et, par le sacrement de l’onction de la confirmation, leur foi est accomplie et fortifiée par ce même Esprit-Saint.

6. La vie sacramentelle trouve dans l’Eucharistie son achèvement et son sommet en sorte que c’est par l’Eucharistie que l’Église réalise et manifeste sa nature la plus profonde. Par l’Eucharistie, l’événement de la Pâque du Christ se dilate en Église. Par le baptême et la chrismation, en effet, les membres du Christ sont oints par l’Esprit, greffés sur le Christ. Et par l’Eucharistie, l’Église devient ce qu’elle est appelée à être de par le baptême et la chrismation. Par la communion au Corps et au Sang du Christ, les fidèles croissent en cette divinisation mystérieuse qui, par l’Esprit-Saint, les fait demeurer dans le Fils comme les enfants du Père.

7. Les autres sacrements, que l’Église catholique et l’Église syrienne d’Antioche tiennent ensemble dans une même succession du ministère apostolique, à savoir ceux de l’ordre, du mariage, de la réconciliation des pénitents et de l’onction des malades, sont ordonnés à cette célébration de l’Eucharistie qui est le centre de la vie sacramentelle et l’expression visible majeure de la communion ecclésiale. Cette communion des chrétiens entre eux et des Églises locales unies autour de leurs pasteurs légitimes s’actualise dans la communauté rassemblée qui confesse la même foi, est tendue dans l’espérance du monde à venir et dans l’attende du retour du Seigneur et, par l’Esprit-Saint qui l’habite, est animée de la charité qui ne déçoit pas.

8. Expression majeure de l’unité chrétienne entre les fidèles et entre les pasteurs, l’Eucharistie ne peut pas encore être concélébrée par nous. Une telle célébration suppose une complète identité de foi qui n’existe pas encore entre nous. En effet, certaines questions doivent encore trouver leur solution, qui touchent à la volonté du Seigneur sur son Église, comme aussi aux implications doctrinales et canoniques particulières des traditions propres à nos communautés trop longtemps séparées.

9. Cette identité de foi, quoique incomplète, nous autorise à envisager une collaboration pastorale dans les situations qui se présentent fréquemment de nos jours en raison tant de la dispersion de nos fidèles à travers le monde que des conditions pastorales précaires que créent les difficultés des temps. Il n’est pas rare en effet que, pour nos fidèles, l’accès à un prêtre de leur Église s’avère matériellement ou moralement impossible. Soucieux de répondre à leurs nécessités et en vue de leur utilité spirituelle, nous les autorisons dans ce cas à demander aux pasteurs légitimes de l’autre Église le secours des sacrements de pénitence, d’eucharistie et d’onction des malades, selon leurs besoins. Coopérer aussi dans la formation des prêtres et dans l’enseignement théologique serait un corollaire logique de la collaboration pastorale. Nous encourageons les évêques à promouvoir la mise en commun des moyens à leur disposition pour l’éducation théologique partout où ils jugeront que c’est souhaitable. Ce faisant, nous n’oublions pas que nous devons encore faire tout ce qui est en notre pouvoir pour arriver à la pleine communion visible entre l’Église catholique et l’Église syrienne d’Antioche et implorer sans cesse du Seigneur qu’il nous rende cette unité qui seule nous permettra de donner devant le monde un témoignage pleinement unanime à l’Évangile.

10. Rendant grâce au Seigneur qui nous a donné de nous rencontrer pour jouir du réconfort de la foi qui nous est commune (cf. Rm 1,12) et pour proclamer devant le monde le mystère de la personne du Verbe de Dieu incarné et de son oeuvre de salut, fondement inébranlable de cette foi commune, nous nous engageons solennellement à faire tout ce qui dépend de nous pour faire disparaître les derniers obstacles qui empêchent encore la pleine communion entre l’Église catholique et l’Église syrienne d’Antioche, afin que d’une voix unanime et d’un seul coeur nous puissions annoncer le Verbe «lumière véritable qui éclaire tout homme» et que «tous ceux qui croient en son nom puissent devenir enfants de Dieu» (cf. Jn 1,9-12).

Rome, 23 juin 1984



Discours 1984 - Einsiedeln, Vendredi, 15 juin 1984