Discours 1987 - Lundi, 14 décembre 1987


AUX FRÈRES ET AUX SOEURS CAPITULAIRES DE L’ORDRE DE CISTERCIENS DE LA STRICTE OBSERVANCE

Salle du Consistoire, Jeudi 17 décembre 1987




1. C’est bien volontiers que, répondant au désir que vous avez exprimé de manifester au successeur de Pierre votre affection filiale et votre fidèle attachement, je vous accueille aujourd’hui, chers Frères et Soeurs de l’Ordre des Cisterciens de la stricte Observance, en la circonstance exceptionnelle que constitue la célébration simultanée de vos Chapitres généraux respectifs.

Je suis particulièrement heureux de saluer en vous les Abbés, les Abbesses et les représentants qualifiés d’environ 150 monastères réunissant plus de 5000 moines et moniales répandus dans le monde entier. Tous les membres de votre grande famille ont actuellement les yeux et le coeur fixés sur vous; ils attendent de votre part des décisions qui les aideront à vivre la magnifique vocation à laquelle ils ont été appelés, dans une authenticité toujours plus grande.

Le Concile Vatican II, dans le décret Perfectae Caritatis, insiste en effet sur la place éminente de la vie intégralement contemplative dans le Corps mystique du Christ. Les membres de ces communautés “ offrent à Dieu un sacrifice éminent de louange; ils illustrent le peuple de Dieu par des fruits abondants de sainteté, ils l’entraînent par leur exemple et procurent son accroissement par une secrète fécondité apostolique. Ils sont ainsi l’honneur de l’Eglise et une source de grâces célestes ”.



2. Moines et moniales, vous centrez votre vie contemplative sur la prière assidue, expression de votre amour de Dieu et des hommes. Dans le silence et la solitude, vous la vivez en des monastères que vous quittez rarement, protégés par la discipline de la clôture, librement et résolument voulue en raison du grand bien spirituel qu’elle procure. Vous acceptez joyeusement une grande austérité, car elle vous aide puissamment à vous centrer sur l’essentiel et elle vous unit plus intimement au Christ.

Vous tous, Cisterciens de la stricte Observance, marchant à la suite de saint Bernard, vous vous efforcez de mettre en pratique la Règle bénédictine dans son intégrité, cherchant Dieu dans l’imitation du Christ, sous la conduite des supérieurs, selon la Charte de Charité qui fixe les modalités de votre vocation dûment authentifiée par l’Eglise.

Fils et Filles de saint Benoît, vous êtes convaincus que rien ne doit être préféré à l’oeuvre de Dieu; par la célébration de l’Office divin, vous Lui offrez le sacrifice de louange et vous intercédez pour le salut du monde. D’autre part, la lectio divina, par la méditation de la Parole de Dieu, est pour vous tous source de prière et école de contemplation. La Charte de Charité met aussi l’accent sur la charité fraternelle qui vous unit. Vous avez le souci que “personne ne soit troublé ou contristé dans la maison de Dieu” (saint Benoît), et que chaque cloître soit un lieu où l’on fait l’expérience qu’il “est bon pour des frères d’habiter ensemble”,

3. Moines et moniales, vous appartenez à la même famille spirituelle et vous partagez le même patrimoine monastique que vous vous devez de sauvegarder. Vous coopérez et vous vous entraidez en tenant compte de vos autonomies respectives et des dispositions prévues par l’Eglise.

C’est dans cet esprit que le Saint-Siège, fidèle aux enseignements conciliaires sur la place de la femme dans le monde contemporain, dès 1970, a permis à la branche féminine de votre Ordre d’avoir son propre Chapitre général pour traiter les questions particulières qui la concernent et notamment pour étudier et rédiger sa législation propre.

Depuis plusieurs années, pour répondre aux dispositions du motu proprio “ Ecclesiae Sanctae ”, vous avez oeuvré de part et d’autre à la mise au point de vos projets de Constitutions à soumettre à l’approbation du Saint-Siège.

Au moment où cette tâche parvenait à son terme, vous avez pris l’initiative de convoquer à Rome vos deux Chapitres généraux en sessions distinctes mais avec des possibilités de contacts, afin de rendre plus aisée la dernière mise au point des éléments fondamentaux communs aux deux branches. J’espère avec vous que les projets ainsi établis, répondant aux conditions requises, pourront servir alors de normes de vie tant pour les moines que pour les moniales.

4. Vous terminez vos travaux durant l’Avent, au moment où l’Eglise se prépare de manière plus immédiate à accueillir le Sauveur. Cette période est toute remplie de la présence de Marie, Mère de Dieu et Icône resplendissante de l’Eglise, envers laquelle saint Bernard montrait une dévotion ardente et filiale, demeurée pleinement dans le patrimoine de votre Ordre.

Je vous demande de porter dans vos monastères, à tous vos Frères et Soeurs, spécialement aux malades et aux infirmes, mon salut, mes encouragements affectueux et ma Bénédiction. Je prie la Vierge Marie de vous guider et de vous aider tous dans votre vie consacrée au Christ et à l’Eglise.

Et je vous bénis au nom du Seigneur.




A UN GROUPE D'INDUSTRIELS FRANÇAIS

Salle du Trône, Vendredi 18 décembre 1987




Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,



1. Je suis heureux de vous souhaiter la bienvenue dans cette maison, alors que vous venez prendre contact avec le Saint-Siège dans le cadre des réflexions que vous avez menées en commun sur le thème général du rapport entre les décisions des dirigeants et la pensée fondamentale. Réunissant les compétences diverses de dirigeants économiques, de hauts fonctionnaires et d’universitaires, vous êtes naturellement conduits à établir un diagnostic nuancé sur le monde où vous devez agir.

En effet, comment pourrait-on prendre la responsabilité de décisions qui ont de réelles répercussions humaines, sans tenter de discerner les courants qui marquent notre époque? Je sais que vous avez ces jours-ci des entretiens approfondis avec certains de mes principaux collaborateurs. Dans le cadre de cette rencontre nécessairement brève, je voudrais simplement vous inviter à poursuivre vos recherches.



2. On est naturellement sensible aujourd’hui à tout un ensemble de nouveautés qui affectent la vie de la société et très directement l’activité économique. Les possibilités ouvertes par le développement scientifique et technique peuvent griser, mais il reste à contrôler la fragilité nouvelle des équilibres et à répartir avec justice les richesses produites. Par ailleurs, on met beaucoup de notions disparates sous le terme de “ modernité ”: il ne faudrait pas que l’individualisme triomphant que cette notion recouvre souvent devienne une cause de renoncement aux solidarités naturelles des personnes les unes à l’égard des autres ou d’un isolement déshumanisant. Que l’homme utilise pleinement son intelligence, son énergie, mais qu’il ne les galvaude pas, qu’il ne prenne pas le risque de perdre sa propre dignité! Un regard objectif sur des comportements trop courants permet de saisir l’urgence d’une réflexion d’ordre éthique lucide, et d’autant plus exigeante que c’est l’amour de l’homme qui l’inspire.



3. Le caractère international des vos expériences me dispense d’insister sur la nécessité de travailler sans relâche à de meilleures relations entre les peuples et les nations. Les grands clivages portent en eux des menaces que vous connaissez. Ne faudrait-il pas que tous sachent passer d’une analyse des données chiffrées à un regard sur les hommes que cela concerne? Ne faudrait-il pas que l’on ait le courage de dire à haute voix que les déséquilibres des échanges sont le reflet de disparités terribles dans les moyens de vivre ou de survivre, d’un continent à l’autre, d’un pays à l’autre, d’un groupe social à l’autre?



4. Si l’Eglise pose de pareilles questions, c’est parce qu’elle reçoit la mission, de par la révélation de Dieu, d’éclairer l’homme sur sa vocation, sur les valeurs irremplaçables qui font sa dignité; c’est parce qu’elle a la certitude que l’être humain ne peut s’épanouir sans une libre rencontre avec Dieu, son Créateur et son Sauveur. Le fait religieux ne se réduit pas à un facteur observable parmi d’autres; la foi religieuse unifie toute l’existence autour des valeurs essentielles. Dans une telle perspective seulement, il est possible d’accéder à une pensée justement nommée “ fondamentale ”.



5. Mesdames, Messieurs, les orientations que je viens de suggérer brièvement rejoignent, j’en ai l’assurance, vos préoccupations: votre visite en témoigne. Je vous remercie d’être venus auprès du successeur de Pierre. Avec confiance, je forme le voeu que les dirigeants d’aujourd’hui aient la capacité d’intégrer de plus en plus clairement dans leurs motivations les facteurs humains les plus importants et les exigences de la solidarité fraternelle, tant dans les domaines économiques et institutionnels que du point de vue culturel, éthique et spirituel.

Que Dieu vous aide et vous bénisse, ainsi que tous ceux qui vous entourent!




AUX JEUNES PARTICIPANT A LA RÉUNION EUROPÉENNE ORGANISÉE PAR LA COMMUNAUTÉ DE TAIZÉ

Mercredi, 30 décembre 1987




1. Merci Roger, pour vos paroles pleines de confiance et d’espérance en Dieu et dans les jeunes. Vous le savez, c’est parce que je partage cette confiance et cette espérance que j’ai tenu à m’arrêter à Taizé au cours de ma visite pastorale en France, l’année dernière.

Ces jours-ci, chers jeunes, c’est vous qui vous arrêtez à Rome au cours de votre “pèlerinage de confiance sur la terre”. Vous avez choisi d’y faire halte, de rencontrer le Pape et les fidèles de son diocèse, et de prier avec eux en ces lieux où les apôtres Pierre et Paul et beaucoup d’autres martyrs ont versé leur sang par fidélité au Christ. C’est une joie et un encouragement pour nous de vous recevoir, si nombreux, et de bénéficier de l’élan de votre jeunesse et de votre foi, en cette période où nous préparons un synode diocésain pour approfondir le sens de la communion et de la mission que nous avons reçues du Seigneur Jésus.



2.

3.

4.

5. …

Seigneur Jésus, donne-nous confiance en ta Parole!
Donne-nous la force de ton amour!
Donne-nous la joie d’être pour tous les hommes des frères!


  AUX PARTICIPANTS AU CONGRÈS INTERNATIONAL DES «PUERI CANTORES»

Jeudi, 31 décembre 1987




Chers Jeunes de la Fédération Internationale des “Pueri Cantores”,



Demain, nous aurons la grande joie de vivre ensemble le premier jour de 1988, de célébrer ensemble la plus sainte des mamans, la Mère du Christ, la Mère du Peuple des Baptisés. Mais je savais votre grand désir de rencontrer le Pape dès aujourd’hui. Moi aussi, je le souhaitais. Alors, nous sommes tous très heureux! Pour ma part, je suis enchanté de voir vos dix mille visages, bien vivants, joyeux, transparents, sérieux, et sans doute malicieux!

Tout d’abord, je tiens à vous féliciter d’appartenir à une Manécanterie ou Schola ou Psalette ou Maîtrise. Ces Institutions d’Eglise sont très anciennes. Je suis sûr que dans vos villes d’origine, il existe des rues ou des places qui portent ces noms. Comme ce serait intéressant pour vous de connaître la longue histoire de votre Ecole de chant liturgique!

Ensuite, je vous encourage chaleureusement à cultiver et à exécuter les mélodies sacrées: l’incomparable grégorien, la polyphonie d’inspiration ancienne ou moderne, dans vos cathédrales, vos basiliques ou collégiales, dans vos églises urbaines et rurales. Sans mésestimer les oeuvres musicales profanes, vous avez le privilège de chanter Dieu, de célébrer les événements du Salut accomplis par le Christ toujours accompagné de sa Mère et notre Mère. Vous ne charmez pas seulement les oreilles de vos auditeurs. Vous les faites entrer en communion avec Dieu. Vous aidez les assemblées chrétiennes à désirer des liens plus forts avec Lui, comme avec tous les êtres et les peuples qu’il aime.

Votre vocation, chers Jeunes, est enracinée dans la tradition de l’Ecriture et des Pères de l’Eglise, saint Augustin spécialement. Tradition qui invite sans cesse à célébrer le Seigneur, “ par l’éclat du cor, par la harpe et la cithare, par les flûtes et les cymbales retentissantes ” [1]. Mais la voix humaine, seule et surtout unie à d’autres, exprime à Dieu plus merveilleusement encore, la joie, l’adoration, la souffrance, le repentir, la confiance, l’amour.

Enfin, ma dernière confidence est un appel à persévérer dans le service de la sainte Liturgie et à encourager d’autres jeunes à rejoindre vos manécanteries et vos psallettes. Ecoutez aussi cette conviction du Pape: certains d’entre vous, s’ils écoutent vraiment la voix du Seigneur, mûriront peu à peu la décision de lui appartenir tout entiers. Je prie à cette intention.

Chers Jeunes, en union avec vos Evêques et vos prêtres, en union avec vos Maîtres de choeur que je félicite de tout coeur, je vous envoie en mission dans le monde entier. Oui, je vous confie la responsabilité de contribuer généreusement à la dignité et à la splendeur du Culte divin. A tous, ainsi qu’à vos chers parents, je donne mon affectueuse Bénédiction Apostolique.


[1] Cf. Ps 150.









Discours 1987 - Lundi, 14 décembre 1987