Discours 1994 - Vendredi 28 octobre 1994


AUX PARTICIPANTS À UN PÈLERINAGE ORGANISÉ PAR LA «CONGRÉGATION SAINT-JEAN»

Salle Paul VI, Lundi 31 octobre 1994



Chers Frères et Soeurs de la Congrégation Saint-Jean,
Chers amis,



C’est avec beaucoup de joie que je vous accueille, pèlerins si nombreux, venus à Rome à l’occasion de l’Année de la Famille, et aussi au lendemain du Synode des Évêques sur la vie consacrée. Merci au cher Père Marie-Dominique Philippe de vous avoir conduits jusqu’auprès de moi.

Religieux et laïcs, votre présence commune montre bien que, dans l’Église, la vie consacrée et la vie conjugale et familiale sont des manières complémentaires de réaliser la condition de disciples du Christ. Familles et personnes consacrées, vous pourrez méditer en ce pèlerinage l’appel de saint Jean: « À ceci nous avons connu l’Amour: celui-là a donné sa vie pour nous. Et nous devons, nous aussi, donner notre vie pour nos frères » [1].

Ces paroles sont précieuses, car elles donnent une clé essentielle pour la vie même de la famille. En défendre la dignité et la grandeur, c’est d’abord montrer la générosité et le désintéressement du don de soi, pour qu’entre les êtres unis par les liens du mariage mûrisse la communion féconde de l’amour. Soyez toujours des témoins de cet incommensurable don de Dieu! Dans la simplicité et l’humilité mêmes de la vie quotidienne, que vos foyers reflètent la bonté divine: par le respect mutuel des époux, par l’accueil généreux de la vie des enfants, par tout le dévouement que demande l’éducation, par les liens durables gardés avec les parents plus âgés ou les frères et soeurs qui ont peut-être pris d’autres chemins, par l’ouverture de vos maisons aux hommes et aux femmes de votre entourage qui ont été blessés et qu’on ne peut laisser au bord du chemin.

Oui, dans l’intimité de votre vie de famille et dans la communauté ecclésiale et sociale où vous vivez, soyez au jour le jour des signes visibles de l’amour dont Dieu nous aime!

La patiente construction d’une famille constitue un témoignage que le monde attend de disciples du Christ, et la meilleure contribution à la défense de l’institution familiale. Nous demandons que les familles bénéficient d’une solidarité active qui les aide à s’épanouir et à faire face à leurs charges. En même temps, nous comptons sur les familles elles-mêmes, car elles sont au premier rang pour faire avancer la civilisation de l’amour.

En cette Année de la Famille, j’ai tenu à rappeler souvent que la famille est l’Ecclesiola, l’Église domestique, comme l’a souligné le Concile Vatican II [2]. En effet, la vitalité des communautés qui composent l’Église dépend pour une bonne part de la foi et de la charité vécues dans les familles chrétiennes. L’élan spirituel et missionnaire de l’Église en dépend, ne serait-ce que par le rôle des parents dans l’éveil religieux et le développement harmonieux des enfants et des jeunes. Et il me semble que votre pèlerinage illustre aussi avec éloquence l’importance primordiale de la famille pour les vocations sacerdotales et religieuses.

Chers amis, je suis heureux d’avoir cette occasion pour encourager amicalement toute la « famille » de la Congrégation Saint-Jean. Et je vous remercie tous de la fidèle attention que vous portez à mon ministère de Successeur de Pierre. Soyez, les uns et les autres, les serviteurs de l’Évangile, les témoins des merveilles de Dieu, les bâtisseurs de la communion ecclésiale dans l’unité fraternelle des Églises particulières où vous vivez!

Religieux et familles, avancez dans le pèlerinage de la foi, guidés par la Mère du Sauveur, dans la joie et l’espérance, gaudium et spes! Que le Seigneur vous bénisse!

[1] 1Jn 3,16.
[2] Cfr. Lumen Gentium, LG 11.

Novembre 1994



AU NOUVEL AMBASSADEUR DE BELGIQUE PRÈS LE SAINT-SIÈGE, S.Exc. M. JUAN CASSIERS À L'OCCASION DE LA PRÉSENTATION DES LETTRES DE CRÉANCE

Samedi 12 novembre 1994




Monsieur l’Ambassadeur,



1. C’est avec plaisir que je souhaite la bienvenue à Votre Excellence, pour la présentation des Lettres par lesquelles Sa Majesté le Roi Albert II L’accrédite auprès du Saint-Siège en qualité d’Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de Belgique.

Je voudrais tout d’abord, Monsieur l’Ambassadeur, vous exprimer ma gratitude pour les paroles que vous venez de m’adresser; elles traduisent les intentions élevées qui vous animent au moment de commencer votre nouvelle mission au service de votre pays. Elles témoignent aussi des relations franches et cordiales que le Saint-Siège entretient avec la Belgique.



2. Dans ce que vous venez de souligner, je suis particulièrement sensible à la valeur qu’attache la Belgique à la collaboration et à la solidarité entre les États, dimensions de la vie internationale essentielles à l’affermissement de la paix au sein des nations et entre les peuples; j’apprécie aussi votre attention particulière au respect de la dignité des personnes et des communautés humaines, spécialement au moment où, dans de nombreuses régions, des hommes souffrent parce que n’est pas pleinement assurée la sécurité des personnes et des biens, à laquelle tous ont droit. Le sens de la solidarité et de la justice doit être le principe essentiel de toute assistance, pour donner aux populations qui en ont besoin les appuis qui favorisent la concorde et l’entente fraternelle entre des groupes culturels différents. Par ce que vous avez exprimé, vous rejoignez certaines des préoccupations constantes du Saint-Siège dans sa mission spirituelle et dans sa vocation spécifique au service de l’ensemble des nations.



3. Je garde présent dans mon coeur le souvenir du Roi Baudouin, qui reste un exemple de vie chrétienne au milieu des occupations du monde et un modèle de générosité au service du peuple. Il est mort au lendemain de l’achèvement historique de la réforme constitutionnelle de l’État. Il demeure une lumière pour ses compatriotes et pour tous ceux qui sont appelés à gouverner le pays avec le souci de la loyauté fédérale, selon ses propres termes, loyauté qui était pour lui une des valeurs fondamentales de la vie sociale, le gage de la paix et de la croissance spirituelle et matérielle de tous.

Ma pensée se tourne aussi vers son successeur, Sa Majesté le Roi Albert II, qui poursuit la même tâche, en indiquant à ses compatriotes les grands objectifs communs, qui passent par l’exercice de la solidarité, de la justice et de la défense des plus faibles, fondements de la vie nationale. En effet, dans chaque pays, les citoyens sont conviés à construire une société où chacun est responsable de ses frères qui vivent sur le territoire. Je rejoins encore par la prière l’ensemble de vos concitoyens, et spécialement la jeunesse, qui cherche des raisons d’espérer. Il ne m’a pas été permis de les retrouver comme je le souhaitais, au mois de mai dernier, pour honorer un digne fils de votre terre, le Père Damien de Veuster. Mon désir le plus ardent est de pouvoir prochainement réaliser ce voyage.



4. Dans les difficultés de tous ordres que traverse la société contemporaine, je salue les engagements des autorités et du peuple pour que tous les hommes résidant sur la terre de Belgique vivent dans une plus grande dignité, et qu’ils puissent se nourrir, se loger décemment et subvenir aux besoins de leur famille; il convient de le rappeler tout particulièrement en cette Année internationale de la Famille. Fidèles à leur longue tradition d’ouverture sur le monde et de solidarité, de nombreux Belges s’engagent au service de tous, dans leur pays et dans d’autres continents. Ils se situent dans la droite ligne de l’oeuvre du Père Damien. Je les encourage dans leurs tâches, pour que reculent sans cesse les phénomènes d’exclusion ou les traitements indignes qui sont parfois infligés en particulier aux plus pauvres et aux enfants. Je forme le voeu que vos concitoyens poursuivent leurs aides en faveur des plus démunis de la planète, avec le souci de la promotion des personnes et du développement des peuples, pour permettre à chaque communauté humaine d’épanouir ses propres richesses spirituelles, culturelles et morales.

L’Apôtre des lépreux témoigne aussi de la longue tradition missionnaire de la Belgique, que vous venez de rappeler, avec le souci de porter partout l’Évangile et de le rendre manifeste par des oeuvres éducatives et charitables. Avec sa vocation spécifique, dans votre pays comme dans tous les continents, l’Église accorde un soin particulier à la formation des jeunes, en dispensant un enseignement fondé sur les principes humains et moraux chrétiens. Les catholiques de Belgique, spécialement ceux qui sont engagés dans l’éducation, ont à coeur d’aider la génération qui est l’avenir de la nation à être consciente de ses devoirs, en vue du bien commun et de l’entente cordiale entre tous, ce qui est si nécessaire pour la vie démocratique.



5. La vie internationale est encore troublée par de nombreux conflits ethniques ou régionaux. Vous le savez, le Saint-Siège ne cesse de favoriser et d’appuyer les efforts pour des solutions négociées, afin que, grâce à des compromis, les différentes parties en présence acceptent de se parler et de s’asseoir à la même table, et que chaque peuple puisse accéder à l’autonomie nécessaire à sa reconnaissance internationale, dans des frontières sûres. L’Église n’a d’autre ambition que de promouvoir l’homme, dans sa vie personnelle comme dans sa vie sociale. Le Saint-Siège sait qu’il peut compter sur le gouvernement belge pour continuer à participer activement à la recherche de la paix, par la voie du dialogue fraternel et respectueux, partout où cela est nécessaire, sur le terrain et au sein des Organisations internationales auxquelles votre pays est particulièrement attaché. Je me réjouis aussi qu’au sein de l’Europe, qu’il convient de rendre toujours plus unie et plus solidaire, les autorités de votre pays et l’ensemble de vos compatriotes s’attachent à poursuivre inlassablement leur action.



6. Au moment où commence votre mission de Représentant du Royaume de Belgique, je souhaite, Monsieur l’Ambassadeur, que votre tâche soit fructueuse et que votre séjour vous apporte beaucoup de joie et de satisfaction, par les rencontres que vous pourrez faire comme par la découverte des richesses de la ville. Soyez assuré que vous trouverez toujours auprès de mes collaborateurs accueil et soutien, pour réaliser au mieux la charge qui vous est confiée.

Au terme de cet entretien, je vous saurais gré de bien vouloir transmettre à Sa Majesté le Roi Albert II mes salutations déférentes et les voeux fervents que je forme pour sa personne, pour la famille royale et pour l’ensemble de ses compatriotes.

Sur Votre Excellence, sur ses proches, sur ses collaborateurs, sur le peuple de Belgique et sur ses dirigeants, j’invoque de grand coeur la Bénédiction du Seigneur.




AUX MEMBRES DU SYNODE DES ÉVÊQUES DE L'ÉGLISE CHALDÉENNE EN VISITE «AD LIMINA APOSTOLORUM»

Lundi 14 novembre 1994




Béatitude,
Chers frères dans l’épiscopat,



1. C’est avec joie que je vous accueille à l’occasion de votre Visite « ad limina », démarche qui manifeste la communion des Églises locales répandues à travers le monde, avec le Successeur de Pierre. Je remercie tout d’abord votre Patriarche pour ses aimables paroles qui me permettent d’être proche des diocèses dont vous êtes les pasteurs.

En vous recevant aujourd’hui, ma pensée se tourne tout d’abord vers vos communautés, les héritières de l’Apôtre Thomas, qui, il y a bientôt 2000 ans, a porté l’Évangile depuis la Mésopotamie jusqu’aux frontières de l’Inde, après avoir été lui-même affermi dans sa foi par la contemplation du Seigneur. C’est par l’un des Douze Apôtres que Dieu « implanta le Verbe » [1], dans votre Église, qui a reçu ainsi l’annonce directe de la Résurrection du Seigneur; elle porte ce trésor dans des vases d’argile, car le salut et la puissance viennent de Dieu, comme le dit humblement l’Apôtre Paul [2].

Je rends grâce au Seigneur pour la longue tradition et pour la riche histoire de votre Église. En puisant dans son patrimoine liturgique et spirituel, le peuple chaldéen catholique célèbre, vit et annonce la foi dans la culture qui lui est propre. Dans cette perspective, je vous encourage à être aujourd’hui les dignes témoins des Apôtres, afin de poursuivre inlassablement le ministère qui vous a été confié et la nouvelle évangélisation que j’ai souhaitée, à l’aube du troisième millénaire, par des actions pastorales appropriées. Avec les prêtres, les religieux, les religieuses et les fidèles de vos diocèses, vous êtes appelés à rendre présent le visage du Christ dans votre terre, pour que nos contemporains puissent contempler la splendeur et la lumière de notre Dieu, qui éclaire toute action humaine et donne son sens plénier à l’existence.



2. Ma prière rejoint avant tout l’ensemble des catholiques de rite chaldéen et leurs compatriotes, qui vivent dans des situations difficiles et de multiples souffrances, en particulier à cause de l’embargo qui est imposé au peuple de votre pays. Je souhaite que vous les assuriez de mes sentiments fraternels.

Vous savez que je me suis à plusieurs reprises adressé aux responsables politiques de votre région et à la Communauté internationale, souhaitant que toutes les parties en présence fassent des efforts pour renouer le dialogue et pour offrir l’aide nécessaire aux populations. Ainsi, sera rendue possible la convivialité entre tous les habitants, quelles que soient leur religion, leur culture ou leur origine, et seront respectées la justice et l’égalité entre tous. De tels efforts éviteraient aux personnes des souffrances comme celles que vous avez en permanence sous les yeux, souffrances qui touchent spécialement les plus faibles de la société, les malades et les enfants. Les conditions de vie actuelles mettent aussi en péril la vie des familles, qui ont de moins en moins les moyens de subvenir à leurs besoins fondamentaux pour élever et éduquer les jeunes. Vous savez que le Saint-Siège manifeste inlassablement sa sollicitude pastorale et son soutien aux membres de vos communautés, pour qu’adviennent la paix et une plus grande solidarité entre tous, nécessaires aux progrès spirituels, sociaux et matériels de votre peuple. Puissiez-vous aussi entendre les paroles réconfortantes de saint Éphrem, le grand Docteur de l’Église: « Si l’espérance éclaire notre regard, nous verrons ce qui est caché » [3], nous verrons les signes de la promesse de Dieu.

Avec l’aide du Seigneur, dans ce contexte douloureux, j’invite vos communautés à être inlassablement des ferments de concorde et de réconciliation. Je les engage à apporter à leurs compatriotes des preuves tangibles de la solidarité chrétienne et des signes de l’amour du Seigneur. Ces témoignages charitables renouvellent l’espérance des personnes et rendent visible le visage du Christ, attentif à ses frères en humanité[4]. C’est à vous, les pasteurs, qu’il revient en premier lieu d’exprimer l’amour du Christ, par les oeuvres, pour que vous fassiez pour les autres ce que le Christ a fait pour vous [5]. C’est une insigne façon d’annoncer l’Évangile, d’être missionnaires et d’inviter le peuple à vivre en chrétiens que d’avoir le souci de donner sans cesse l’exemple.



3. Je désire vous encourager dans la réforme liturgique que vous avez entreprise pour mieux vivre les mystères du Seigneur, en suivant les traces du diacre saint Éphrem, auquel l’Orient chrétien a décerné le titre si expressif de « cithare du Saint-Esprit ». Dans la perspective ouverte par le deuxième Concile du Vatican et en étroite collaboration avec la Congrégation pour les Églises Orientales, quelques réalisations ont déjà vu le jour. Je m’en réjouis; mais il convient maintenant que cette réforme aboutisse dans un délai convenable, pour que les fidèles obtiennent « plus sûrement des grâces abondantes dans la liturgie » [6] et des richesses de la prière communautaire. Ainsi, uni à ses pasteurs, le peuple de Dieu pourra chanter les louanges du Seigneur et puiser à l’unique source de la vie, pour recevoir la force nécessaire à l’exercice des responsabilités quotidiennes, dans les réalités temporelles.



4. Je sais, frères très chers de l’Église chaldéenne, que vous devez faire face à de nombreuses difficultés dans la réorganisation pastorale de vos communautés, spécialement dans des territoires où les tensions politiques et sociales compromettent gravement la présence catholique; en effet, l’instabilité civile et l’insécurité poussent les chrétiens à fuir les zones de tension et à se réfugier à l’étranger, appauvrissant de ce fait les Églises locales. Puissiez-vous donner aux fidèles les moyens spirituels et les institutions leur permettant de rester présents au milieu de leurs concitoyens, pour que l’Église demeure présente et visible.



5. Une des tâches importantes de votre ministère est la formation des catholiques, par « l’enseignement catéchétique, dont le but est de rendre chez les hommes la foi vivante, explicite et active, en l’éclairant par la doctrine » [7]. C’est l’ensemble des fidèles qui doit porter avec vous le souci de l’éducation religieuse des enfants et des jeunes. Au terme de l’Année de la Famille, il convient de rappeler que, Église domestique, la famille est un lieu privilégié pour la formation de la personnalité de ses membres. Par le témoignage, par l’éducation et la catéchèse, chaque génération fait découvrir à celles qui la suivent les valeurs spirituelles et morales fondamentales afin que chacun puisse exercer les responsabilités qui lui seront confiées dans la famille et au sein de la société. Le noyau familial est aussi le creuset, où peuvent se faire jour et s’épanouir les vocations religieuses et sacerdotales. Je vous exhorte à aider vos frères dans la foi à rester fidèles aux saines traditions de vos familles, pour lesquelles le sens de l’unité, de l’indissolubilité et de la fidélité est si important.



6. Au cours des vos réunions régulières avec les évêques des autres communautés catholiques, vous partagez vos réflexions sur les différents aspects de votre mission et sur vos expériences pastorales. Ces dialogues offrent à chacun l’occasion de recevoir le soutien légitime, dont il a besoin, et de faire l’expérience spirituelle de la communion. Que le Seigneur vous soutienne dans votre collaboration entre pasteurs des divers rites, car vos Églises particulières sont « égales en dignité » et « aucune ne l’emporte sur les autres en raison de son rite. Elles jouissent des mêmes droits et elles sont tenues pas les mêmes obligations, également en ce qui concerne le devoir de prêcher l’Évangile... sous la conduite du Pontife romain » [8].

Je voudrais aussi vous inviter à poursuivre votre ouverture aux autres Églises et les relations oecuméniques avec elles. Par leur situation géographique et culturelle et par leurs sensibilités religieuses, les « Églises d’Orient en communion avec le Siège Apostolique » ont « à titre particulier la charge de promouvoir l’unité de tous les chrétiens, notamment des chrétiens orientaux »[9]. C’est dans cet esprit que je suis heureux d’avoir pu accueillir Sa Sainteté Mar Dinkha IV, Patriarche de l’Église assyrienne de l’Orient, venu à Rome pour signer une déclaration christologique avec l’Église catholique. Il convient aussi d’encourager le dialogue avec les autres traditions religieuses présentes dans votre pays, en particulier avec le monde musulman, ainsi qu’avec les hommes de bonne volonté, pour une meilleure compréhension mutuelle et une coopération effective en vue du bien commun.



7. Récemment, s’est achevée à Rome l’Assemblée générale du Synode des Évêques sur la vie consacrée. J’espère que ce moment important de la collégialité épiscopale portera des fruits dans les différentes communautés ecclésiales. Je confie à votre zèle pastoral le soin d’appeler des jeunes à se consacrer totalement et radicalement au Christ; pour cela, il vous revient de favoriser et de mettre en place les réformes qui s’imposent, afin que la vie religieuse soit plus crédible et que les personnes consacrées rappellent de manière prophétique, par la pratique des conseils évangéliques, que le Christ est premier et qu’il peut combler pleinement ceux qui s’engagent à sa suite. Le peuple chrétien a besoin d’hommes et de femmes qui, de manière édifiante, soient totalement dévoués au Seigneur et à leurs frères, et puissent exprimer cet amour de Dieu et du prochain par des choix cohérents et par des projets concrets.

Je partage votre préoccupation pour la formation théologique et spirituelle des séminaristes. Le dynamisme de l’Église de demain repose en grande partie sur l’attention que nous portons aujourd’hui à la préparation au ministère ordonné. Je vous encourage à attacher un soin particulier à la pastorale des vocations, car les communautés chrétiennes auront toujours besoin de pasteurs pour les conduire, pour leur annoncer la Bonne Nouvelle et pour leur transmettre le Christ par les sacrements.



8. Je voudrais rappeler avec affection le défunt patriarche Paul II Cheikho. Je me souviens avec émotion de ce vénérable frère. Que cette figure de votre Église, riche de simplicité, d’amour et de piété, soit aujourd’hui un modèle pour tous! Je prie le divin Maître de lui accorder la récompense promise aux bons et fidèles serviteurs.

Béatitude, je désire aussi vous adresser mes voeux chaleureux à l’occasion du 50ème anniversaire de votre ordination sacerdotale, pour raviver en vous le don de Dieu reçu par l’imposition des mains. Que l’Esprit Saint vous accompagne et vous comble de ses dons, pour que vous poursuiviez inlassablement votre ministère apostolique et pastoral!

Au terme de notre rencontre, chers frères dans l’épiscopat, je vous demande de porter aux prêtres, aux religieux, aux religieuses et aux laïcs de vos communautés mon salut affectueux, en les assurant de ma prière pour que, dans les difficultés présentes, ils ne perdent pas l’espérance et que l’Esprit inspire à tous des sentiments de concorde et de paix. Par l’intercession de l’Apôtre saint Thomas, je vous accorde de grand coeur ma Bénédiction Apostolique, ainsi qu’aux membres du peuple de Dieu, confié à votre sollicitude pastorale.

[1] Ephraem Syri Hymnus, 7.
[2] Cfr. 2Co 4,7.
[3] Ephraem Syri Carmina Nisibena, 70.
[4] Cfr. Mt 25,40.
[5] Cfr. Jn 13,15.
[6] Sacrosanctum Concilium, SC 21.
[7] Christus Dominus, CD 14.
[8] Orientalium Ecclesiarum, OE 3.
[9] Ibid. OE 24.






AU NOUVEL AMBASSADEUR DE SUÈDE PRÈS LE SAINT-SIÈGE, S.Exc. M. CARL TORSTEN WILHELM ÖRN, À L'OCCASION DE LA PRÉSENTATION DES LETTRES DE CRÉANCE

Jeudi 17 novembre 1994



Monsieur l’Ambassadeur,



Il m’est agréable d’accueillir Votre Excellence, en cette cérémonie qui marque le commencement de sa mission d’Ambassadeur de Suède par la présentation des Lettres qui l’accréditent auprès du Saint-Siège.

Je vous remercie, Monsieur l’Ambassadeur, des paroles courtoises que vous venez de m’adresser et du message que vous me transmettez de la part de Sa Majesté Carl XVI Gustav; je vous saurai gré de bien vouloir lui exprimer mes voeux fervents pour sa personne, pour la famille royale, pour les membres du gouvernement et pour l’ensemble du peuple suédois. J’ai été sensible à l’intérêt que portent les autorités de votre pays à l’action du Siège Apostolique, spécialement en ce qui concerne la promotion de la dignité de la personne, la coopération et les solutions pacifiques dans la vie internationale. Elles constituent en effet des axes essentiels de la mission de l’Eglise dans le cadre des compétences particulières qui sont les siennes, au sein de la communauté des nations.

Par vos propos, vous exprimez aussi l’ouverture de vos compatriotes à l’ensemble du continent et les sentiments qui les animent en ce moment historique où ils se sont déterminés en faveur de l’appartenance à l’Union européenne. C’est toujours une satisfaction pour le Saint-Siège, lorsque des peuples acceptent de s’unir. Ils témoignent ainsi du désir profond de se donner des moyens communs pour favoriser le bonheur spirituel et matériel de leurs habitants, pour manifester une solidarité toujours plus vaste avec les autres nations, ainsi que pour promouvoir la paix dont tous les hommes ont besoin. L’union ne peut pas se faire au détriment des communautés nationales qui, au long de leur histoire, ont élaboré une forme de vie politique, économique et sociale particulière. Au contraire, par l’union, chacun devient davantage un acteur dans la vie internationale et apporte à l’ensemble des éléments de son patrimoine propre et de sa pratique sociale.

En cette fin du XXème siècle, après les multiples épreuves et les blessures qui ont marqué l’Europe, il importe de trouver des voies nouvelles pour vivre dans une plus grande solidarité et dans la concorde; je voudrais souligner l’intérêt des autorités suédoises à cette démarche, notamment par leur participation à des organisations comme la Conférence sur la Sécurité et la Coopération en Europe, que vous venez d’évoquer. Je n’oublie pas que votre pays compte un des artisans principaux de la difficile recherche de la paix dans les pays de l’ex-Yougoslavie. Permettez-moi saluer le travail accompli patiemment pour tenter de résoudre les conflits par les moyens du dialogue et de la négociation, en permettant aux adversaires de se parler et de se tendre la main. J’appelle de tous mes voeux la fin des hostilités et de la course aux armements en Europe comme sur l’ensemble de la planète, pour que cessent définitivement les violences aveugles qui défigurent l’homme et l’humanité tout entière.

Dans votre tradition nationale, j’apprécie aussi l’attention portée à la création et à la protection de la nature. Notre monde technique a tendance à oublier que nous sommes appelés à être des intendants des richesses du globe et qu’il nous appartient de les préserver pour laisser aux générations futures une terre habitable.

Bien que peu nombreux, vous savez que les catholiques de votre pays, en collaboration avec les chrétiens des autres Eglises, s’attachent à promouvoir les valeurs spirituelles et morales fondatrices d’une vie sociale juste et équitable, valeurs qui font partie de la tradition suédoise. C’est aussi pour moi l’occasion de souligner la place des enfants et le statut primordial de l’institution familiale dans la société; vous avez rappelé, Monsieur l’Ambassadeur, la sollicitude du Siège Apostolique à l’égard des hommes et des femmes les plus démunis, en Occident et dans les pays en voie de développement. C’est la force d’un peuple que de leur accorder la place qui leur revient, par des législations sociales justes et grâce à l’appui des autres nations, car la plus grande richesse d’un Etat est assurément ses ressources humaines et l’attention que l’on porte à la croissance et au développement des personnes.

Alors que commence votre mission, je vous offre mes voeux les meilleurs et je puis vous assurer que vous trouverez toujours auprès de mes collaborateurs une aide attentive et une compréhension cordiale.

Sur votre Excellence, sur votre famille et sur le peuple suédois, j’invoque le soutien et la protection de Dieu.




AUX MEMBRES DE L'ASSOCIATION DES JOURNALISTES CATHOLIQUES DE BELGIQUE POUR LA PRÉSENTATION DES «ÉTRENNES PONTIFICALES»

Salle Clémentine, Samedi 19 novembre 1994


Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,



C’est pour moi une grande joie de recevoir la délégation de l’Association des journalistes catholiques et de l’Union des journaux catholiques de Belgique. Je remercie tout d’abord votre Président pour ses paroles chaleureuses. Votre présence est aussi une nouvelle occasion pour m’unir par la pensée à tous vos compatriotes, auxquels je n’ai pu rendre visite comme je l’avais prévu, au mois de mai dernier.

Votre démarche auprès du Successeur de Pierre est un témoignage de l’attention filiale que vous portez au Saint-Siège et à sa mission spirituelle et charitable à travers le monde, mission rendue possible grâce au partage et à la solidarité des Eglises locales, des mouvements et des associations comme les vôtres, à l’exemple de la première communauté chrétienne [1].



… en flamand …



D’autre part, lorsque nous sommes informés des besoins de ceux qui souffrent, notre responsabilité suppose des actes concrets: nous avons la charge de présenter au Seigneur nos frères qui sont dans des situations difficiles; il nous appartient aussi de nous mobiliser pour donner réconfort et assistance, ce qui est un devoir non seulement de justice mais surtout de charité, charité par laquelle nous rendons présent le Christ [2]. Comme le précise encore Origène, « par nature, nous sommes tous réciproquement le prochain les uns des autres; mais par les oeuvres de charité, on se rend le prochain de celui à qui on fait le bien » [3].

Notre rencontre me permet de vous remercier chaleureusement pour votre soutien. Je vous saurai gré d’exprimer ma vive gratitude à vos lecteurs pour leur aide généreuse. Je souhaite que votre pèlerinage à Rome vous conforte dans votre mission de chrétiens, dans l’Eglise et dans le monde. En vous confiant à l’intercession des saints Apôtres Pierre et Paul, qui ont su répandre la Bonne Nouvelle de l’Evangile, et de saint François de Sales, patron des journalistes, de grand coeur, je vous accorde ma Bénédiction Apostolique.

[1] Ac 4,32-34.
[2] Cfr. S. Thomae Summa Theologiae, II-II 23,0.
[3] Origène, Commentaire sur le Cantique.






AU NOUVEL AMBASSADEUR DE TUNISIE PRÈS LE SAINT-SIÈGE, S.Exc. M. ISMAIL LEJIRI, À L'OCCASION DE LA PRÉSENTATION DES LETTRES DE CRÉANCE

Samedi 19 novembre 1994




Monsieur l’Ambassadeur,



C’est avec joie que j’accueille Votre Excellence et que je Lui souhaite la bienvenue en cette demeure à l’occasion de la présentation des Lettres qui L’accréditent comme Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de la République Tunisienne.

Je vous remercie des paroles courtoises que vous avez eues à mon égard et auxquelles j’ai été très sensible. En cette circonstance solennelle, ma pensée va en premier lieu vers Son Excellence le Président Zine El Abidine Ben Ali: je vous prie de bien vouloir lui présenter mes salutations déférentes et lui exprimer ma gratitude pour l’aimable message qu’il m’adresse par votre entremise. Je forme les meilleurs voeux pour sa personne ainsi que pour ceux qui collaborent avec lui au service de la nation tunisienne. Enfin, je salue de grand coeur les hommes et les femmes de votre pays engagés, sous l’impulsion du chef de l’État, dans l’exaltante construction d’une société moderne et ouverte, qui réponde à leurs aspirations vers un développement intégral et harmonieux. Bien volontiers, je prie Dieu de bénir les efforts de tous dans l’édification d’une Tunisie toujours plus digne et prospère, qui apporte, selon sa vocation, une juste contribution à l’équilibre et à la paix dans le continent africain comme entre les nations méditerranéennes en quête de concorde et de coopération.

Il m’est agréable de constater, suivant vos propos Monsieur l’Ambassadeur, le désir de vos concitoyens de promouvoir l’homme dans un Etat de droit, où la souveraineté appartient à la loi et n’est pas le fait de l’arbitraire de quelques-uns. En effet, une authentique démocratie n’est possible que dans un Etat de droit et sur la base d’une conception correcte de la personne humaine. L’Eglise apprécie le système démocratique en ce qu’il assure la participation des citoyens aux choix politiques et garantit aux gouvernés la possibilité de choisir leurs gouvernants. Elle observe que l’action politique doit être fondée, en dernier ressort, sur la vérité de l’homme, afin que les idées et les convictions ne soient pas détournées au profit d’un petit nombre de personnes.

Vous avez bien voulu relever, Monsieur l’Ambassadeur, les efforts qu’avec mes collaborateurs je poursuis afin de venir en aide aux peuples qui souffrent encore de la guerre. C’est mon souhait ardent, en effet, que la paix devienne une réalité dans la famille des nations. En raison de notre foi, nous sommes plus particulièrement appelés, chrétiens et musulmans, à être des artisans de paix. Pour les Livres sacrés des différentes religions, l’aspiration à la paix et sa réalisation occupent une place considérable dans la vie de l’homme et dans ses rapports avec Dieu. On peut même dire qu’une vie religieuse authentiquement vécue produit des fruits de fraternité et de paix, car il est dans la nature de la religion de favoriser des relations toujours plus solidaires entre les hommes, précisément par des liens toujours plus étroits avec la divinité.

Vous me permettrez de saisir l’occasion de cette rencontre pour saluer, par votre entremise, la communauté catholique de votre pays, qui, en famille unie dans la joie et dans la peine autour de son pasteur, Monseigneur Fouad Twal, s’efforce de promouvoir la charité, la justice et la compréhension au service de tous les Tunisiens. Les efforts que les catholiques déploient notamment dans la formation des jeunes et dans des oeuvres d’assistance, les contacts amicaux qu’ils cherchent à entretenir avec leurs compatriotes d’autres croyances, sont une contribution qu’ils ont la joie d’apporter à la vie de leur pays.

Votre présence ici, Monsieur l’Ambassadeur, raffermira, j’en suis sûr, les liens qui existent déjà entre la Tunisie et le Saint-Siège, et je m’en réjouis. Au moment où commence votre mission, je vous adresse mes souhaits sincères. Soyez assuré que vous trouverez au Vatican un accueil attentif et une compréhension cordiale auprès de mes collaborateurs.

Sur Votre Excellence, sur Monsieur le Président de la République, le gouvernement et le peuple tunisiens, j’invoque de grand coeur l’assistance du Très-haut et l’abondance des Bénédictions divines.





Discours 1994 - Vendredi 28 octobre 1994