II-II (Drioux 1852) Qu.183 a.4

ARTICLE IV. — la différence des états se considère-t-elle d'après ceux qui commencent, qui progressent et qui sont parfaits ?


Objections: 1. Il semble que la différence des états ne se considère pas d'après ceux qui commencent, qui progressent et qui sont parfaits. Car dans les divers genres on ne distingue pas les espèces de la même manière. Or, on divise les degrés de la charité selon la différence qu'il y a entre le commencement, le progrès et la perfection, comme nous l'avons vu (quest. xxiv, art. 9) en traitant de cette vertu. Il semble donc que l'on ne doive pas considérer ainsi la différence des états.

2. L'état, comme nous l'avons dit ( art. 1 huj. quaest. ), se rapporte à la condition de la servitude ou de la liberté, à laquelle la différence de ceux qui commencent, qui profitent et qui sont parfaits ne paraît pas appartenir. C'est donc à tort qu'on divise l'état de ces trois manières.

3. Ceux qui commencent, qui progressent et qui sont parfaits paraissent être distingués selon le plus et le moins, ce qui semble appartenir plutôt à la nature du degré. Or, la division des degrés et des états n'est pas la même, comme nous l'avons dit (art. 2 et 3 préc.). Il n'est donc pas convenable d'appliquer à l'état cette triple distinction.

clergé il r a les évéquos, les prêtres et les ministres.

En sens contraire Mais c'est le contraire. Saint Grégoire dit (Mor. lib. xxiv, cap. 7) : Il y a trois modes de conversion, le commencement, le milieu et la perfection. Et ailleurs il observe (Sup. Ezech. hom. xv) qu'autre chose est le commencement de la vertu, autre chose Je progrès et autre chose la perfection.


CONCLUSION. — L'état de servitude ou de liberté spirituelle se distingue d'après eeux qui commencent, qui progressent et qui sont parfaits.

Réponse Il faut répondre que, comme nous l'avons dit (art. 1 huj. quaest.), l'état se rapporte à la liberté ou à la servitude. Or, il y a dans les choses spirituelles deux sortes de servitude et deux sortes de liberté : l'une est la servitude du péché et l'autre la servitude de la justice. De même il y a aussi deux sortes de liberté : l'une est la liberté du mal et l'autre la liberté du bien, comme on le voit par ces paroles de l'Apôtre (Rm 6,20) : Lorsque vous étiez esclaves du péché, vous avez été libres à l'égard de la justice; mais maintenant que vous êtes affranchis du péché, vous êtes devenus esclaves de Dieu. — Or, on est esclave du péché ou de la justice quand on est porté au mal par l'habitude du péché ou quand on est porté au bien par l'habitude de la justice. De même on est affranchi du péché, quand on n'est pas vaincu par l'inclination mauvaise ; et on est affranchi de la justice quand on n'est pas éloigné du mal par l'amour de cette vertu. Cependant comme l'homme est porté à la justice conformément à sa raison naturelle, au lieu que le péché lui est contraire, il s'ensuit que l'affranchissement du péché est la vraie liberté. Cette liberté est jointe à la servitude de la justice parce que par ces deux choses l'homme tend à ce qui lui convient. De même la véritable servitude est la servitude du péché auquel est joint l'affranchissement de la justice, parce que l'homme est empêché par là de faire ce qui lui est propre. — Il dépend de l'homme de se rendre l'esclave de la justice ou du péché, comme le dit l'Apôtre (ibid.) : Nesavez- vous pas que, peu importe de qui vous vous soyez rendus esclaves pour lui obéirt vous demeurez esclaves de celui à qui vous obéissez, soit du péché pour y trouver la mort, soit de l'obéissance pour y trouver la justice. Or, en toute occupation humaine il y a un principe, un milieu et une fin. C'est pourquoi on divise de cette manière l'état de la servitude ou de la liberté spirituelle, de manière que c'est au principe que se rapporte l'état de ceux qui commencent, au milieu l'état de ceux qui progressent, et à la fin l'état de ceux qui sont parfaits.

C'est pourquoi la charité se divise comme les états qui appartiennent à la liberté spirituelle.

2. Il faut répondre au second, que ceux qui commencent, qui progressent et qui sont parfaits, selon qu'ils sont ainsi divisés en divers états, reçoivent le nom d'hommes non d'après toute espèce d'occupation, mais d'après le zèle qu'ils ont pour les choses qui appartiennent à la liberté ou à la servitude spirituelle, comme nous l'avons dit (in corp. art., et art. 4 huj. quaest.).

3. Il faut répondre au troisième, que, comme nous l'avons vu (art. préc. ad 3) , rien n'empêche que le degré et l'état ne se trouvent dans le même individu. Car dans les choses du siècle ceux qui sont libres, sont non- seulement d'un autre état que les esclaves, mais ils sont encore d'un degré plus élevé.





QUESTION 184: DE CE QUI APPARTIENT A L'ÉTAT DE PERFECTION EN GÉNÉRAL.


Après avoir parlé de la différence des états, nous avons à nous occuper de ce qui appartient à l'état de perfection auquel tous les autres se rapportent. Car c'est aux législateurs à considérer les offices par rapport aux autres actes ; quant aux fonctions sacrées, elles se rapportent aux ordres dont il sera question dans la troisième partie. — Sur l'état de perfection il y a trois sortes de considération qui se présentent. — Nous traiterons : 1° de l'état de perfection en général ; 2° de ce qui appartient à la perfection des évéques; 3° de ce qui regarde la perfection des religieux. — Sur l'état de perfection en général, il y a huit questions à examiner : 1° La perfection se considère- t-eîfe d'après la charité P — 2° Peut-on être parfait en cette vie? — 3° La perfection de cette vie consiste-t-eile principalement dans les conseils ou les préceptes? — 4° Tous ceux qui sont parfaits sont-ils dans l'état de perfection ? — 5° Les prélats et les religieux sont-ils spécialement dans cet état ? — 6° Tous les prélats y sont-ils ? — 7° Lequel est îe ptus parfait de t'état des religieux ou de celui des évéques? — 8° Les curés et les archidiacres sont-ils plus parfaits que les religieux?



ARTICLE I. — la perfection de la vie chrétienne se c0ns1dëre-t-elle spécialement d'après la charité (1 ) ?



Objections: 1. Il semble que la perfection de la vie chrétienne ne se considère pas spécialement d'après la charité. Car l'Apôtre dit (1Co 14,20) : Soyez des enfants à l'égard de la malice, mais soyez des hommes par faits pour ce qui est des sens. Or, la charité n'appartient pas aux sens, mais plutôt à l'affection. Il semble donc que la perfection de la vie chrétienne ne consiste pas principalement dans la charité.

2. Saint Paul dit (Ep 4 Ep 13) : Prenez les armes de Dieu afin que vous puissiez résister au jour mauvais et rester parfaits en tout. Puis il explique en quoi consiste cette armure en disant : Que la vérité soit la ceinture qui vous ceigne les reins, que la justice soit votre cuirasse, et couvrez-vous entièrement du bouclier de la foi. La perfection de la vie chrétienne ne se considère donc pas seulement d'après la charité, mais encore d'après les autres vertus.

3. Les vertus tirent leur espèce de leurs actes, comme les autres habitudes. Or, saint Jacques dit (1,4) que les oeuvres parfaites sont produites par la patience. Il semble donc que l'état de perfection se considère plutôt d'après cette vertu.

En sens contraire Mais c'est le contraire. Il est dit (Col 1,14) : Revêtez-vous surtout de la charité qui est le lien de la perfection; parce qu'elle lie en quelque sorte toutes les autres vertus dans une unité parfaite.


CONCLUSION. — Toute fa perfection de la vie chrétienne doit se considérer d'après la charité.

Réponse Il faut répondre qu'on dit de chaque être qu'il est parfait selon qu'il atteint sa propre fin, qui est la perfection dernière d'une chose. Or, c'est par la charité que nous sommes unis à Dieu qui est la fin dernière de l'entendement humain : parce que celui qui demeure dans la charité, demeure en Dieu, et Dieu en lui, selon l'expression de saint Jean (1Jn 4,16). C'est pourquoi la perfection de la vie chrétienne se considère spécialement d'après cette vertu (2).

(D) Al égard de la vie religieuse, on peut consulter dans les Opuscules de saint Thomas les opuscules xvi, xvii et xv1, édit. de Venise. Ces trois traités forment une théorie complète sur la vie religieuse.
(2) C'est la doctrine de saint Paul (I. Cor. x1): Si habuero omnem fidem.... charitatem autem non habeam, nihil sum, nihil mihi prodest.

Solutions: 1. Il faut répondre au premier argument, que la perfection des sentiments de l'homme paraît principalement consister en ce qu'ils s'accordent dans l'unité de la vérité, suivant ces paroles de saint Paul (1Co 1,40): Soyez parfaitement unis dans les mêmes sentiments et dans les mêmes affections. Or, c'est ce que produit la charité, qui fait que les hommes sont du même sentiment. C'est pourquoi la perfection des sentiments consiste radicalement dans la perfection de la charité»

2. Il faut répondre au second, qu'on peut dire de deux manières que quelqu'un est parfait. 4° D'une manière absolue. Cette perfection se considère d'après ce qui appartient à la nature même de la chose. Ainsi on dit qu'un animal est parfait quand il ne lui manque rien relativement à la disposition de ses membres et des autres choses semblables qui sont nécessaires à sa vie. 2° On dit qu'une chose est parfaite sous un rapport. Cette perfection se considère d'après quelque accessoire extérieur, tel que la blancheur, la noirceur ou d'autres accidents semblables. Or, la vie chrétienne consiste spécialement dans la charité, par laquelle l'âme est unie à Dieu ; d'où il est dit (1Jn 3,44) : Celui qui n'aime pas demeure dans la mort. C'est ^pourquoi la perfection de la vie chrétienne se considère absolument d'après la charité, mais relativement d'après les autres vertus. Et parce que ce qui existe absolument est ce qu'il y a de plus principal et de plus grand par rapport aux autres, il s'ensuit que la perfection de la charité est la plus principale par rapport à la perfection qui se considère d'après les autres vertus.

3. Il faut répondre au troisième, qu'il est dit que la patience produit des oeuvres parfaites par rapport à la charité, en ce sens que c'est l'abondance de la charité qui fait qu'on supporte patiemment l'adversité, d'après ces paroles de saint Paul (Rom. v1 , 35) : Qui notis séparera de la charité de y. Dieu ? la tribulationi, les angoisses, etc.

ARTICLE II. — peut-on être parfait en cette vie?


Objections: 1. Il semble qu'on ne puisse pas être parfait en cette vie. Car l'Apôtre dit (1Co 11,40) : Quand ce qui est parfait sera venu, ce qui est imparfait s'évanouira. Or, ce qui est imparfait n'est pas détruit ici-bas ; car la foi et l'espérance qui sont imparfaites y subsistent. Personne n'est donc parfait ^ en ce monde.

2. Le parfait est une chose à laquelle rien ne manque, comme le dit Aristote (Phys. lib. 1, text. 63). Or, il n'y a personne en cette vie qui soit sans défaut; puisque l'apôtre saint Jacques dit (1, 2) : Nous faisons tous beaucoup de fautes. Et le Psalmiste s'écrie (Ps 138,46) : Vos yeux ont vu mon imperfection. 11 n'y a donc personne de parfait en ce monde.

3. La perfection de la vie chrétienne, comme nous l'avons dit (art. préc.), se considère d'après la charité qui comprend sous elle l'amour de Dieu et du prochain. Or, par rapport à l'amour de Dieu, on ne peut pas avoir de charité parfaite en cette vie; parce que, comme le dit saint Grégoire (Sup. Ezech. hom. xiv), le feu de l'amour qui commence à brûler ici s'enflammera encore davantage, quand il verra celui qu'il aime. On ne peut pas non plus avoir la charité parfaite à l'égard de l'amour du prochain', parce que nous ne pouvons pas ici-bas aimer tous nos proches d'un amour actuel, quoique nous les aimions d'un amour habituel, et cet amour est imparfait. Il semble donc que personne ne puisse être parfait en cette vie.

Mais c'est le contraire. La loi divine ne commande pas l'impossible. Cependant elle engage à la perfection, d'après ces paroles de l'Evangile

(Mt 5,48) : Soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait. Il semble donc qu'on puisse être parfait ici-bas.


CONCLUSION. — Quoique personne ne puisse en cette vie parvenir à la perfection absolue de l'amour divin, cependant on peut arriver à une perfection de charité si grande qu'on rejette et qu'on déteste tout ce qui est contraire à la charité.

Réponse Il faut répondre que, comme nous l'avons dit (art. préc.), la perfection de la vie chrétienne consiste dans la charité. Or, la perfection implique une certaine universalité ; parce que, comme le dit Aristote(Phys. lib. 1, text. 63), le parfait est ce qui ne manque de rien. On peut donc considérer trois sortes de perfection : 1° Une perfection absolue qui se considère d'après la totalité non-seulement de la part de celui qui aime, mais encore de la part de l'objet que l'on doit aimer, c'est-à-dire qui fait que l'on aime Dieu autant qu'il est aimable. Cette perfection n'est pas possible à une créature, mais elle ne convient qu'à Dieu en qui le bien se trouve intégralement et essentiellement. 2° Il y a une autre perfection qui se considère d'après la totalité absolue par rapport à celui qui aime ; c'est-à-dire qui fait que l'affection tend toujours actuellement vers Dieu et selon tout son pouvoir. Cette perfection n'est pas possible ici-bas (4), mais elle existera dans le ciel. 3° Ii y a une perfection qui ne se considère selon la totalité ni par rapport à l'objet aimé, ni par rapport au sujet qui l'aime. Elle n'a pas pour effet que l'âme se porte toujours en acte vers Dieu, mais qu'elle repousse tout ce qui est contraire au mouvement de l'amour divin. C'est ce qui fait dire à saint Augustin (Quaest. lib. lxxx1, quaest. 36) que la cupidité étant le venin de la charité, la perfection consiste à n'en point avoir. On peut avoir cette perfection en cette vie et cela de deux manières : 1° On peut l'avoir en ce sens que l'homme éloigne de ses affections tout ce qui est contraire à la charité, tel que le péché mortel. La charité ne peut exister sans cette perfection; par conséquent elle est de nécessité de salut. 2° On peut la posséder de telle sorte qu'on éloigne de ses affections non-seulement ce qui est contraire à la charité, mais encore tout ce qui empêche (2) les affections de l'âme de se porter tout entières vers Dieu. La charité peut exister sans cette perfection, et elle est telle dans les commençants et dans ceux qui font des progrès.

Solutions: 1. Il faut répondre au premier argument, que l'Apôtre parle en cet endroit de la perfection du ciel qui n'est pas possible ici-bas.

2. Il faut répondre au second, qu'on dit que ceux qui sont parfaits en cette vie font beaucoup de fautes, ce qui s'entend des péchés véniels qui résultent de l'infirmité de notre nature dans l'état présent ; et sous ce rapport ils sont imparfaits comparativement à la perfection des élus dans le ciel.

3. Il faut répondre au troisième, que comme l'état de la vie présente ne souffre pas qu'on se porte toujours en acte vers Dieu, de même il ne souffre pas non plus que l'on se porte en acte vers tous ses proches considérés chacun en particulier. Mais il suffit que l'on se porte généralement vers tous en masse et qu'on aime chacun d'eux d'ún amour habituel, et que l'âme soit disposée à les aimer d'un amour actuel. A l'égard de l'amour du prochain, comme à l'égard de l'amour de Dieu, on peut reconnaître deux sortes de perfection : l'une, sans laquelle la charité ne peut exister, consiste en ce que l'homme n'ait rien dans son coeur qui soit contraire à l'amour du prochain ; l'autre sans laquelle la charité est possible. On la considère de trois manières : 4° selon l'extension de l'amour. Elle fait que l'on aime non-seulement les amis et les personnes que l'on connaît, mais encore les étrangers et même ses ennemis. Elle est le propre des enfants de Dieu qui sont parfaits, comme le dit saint Augustin (Ench. cap. 73). 2° Selon l'intensité qui se mesure d'après ce que l'homme méprise à cause du prochain. Ainsi elle lui fait mépriser non-seulement les biens extérieurs, mais encore les afflictions corporelles et jusqu'à la mort même, d'après ces paroles de saint Jean (15, 43) : Personne ne peut aimer d'un plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis. 3° Quant à l'effet de l'amour. Il consiste en ce que l'homme sacrifie pour son prochain non-seulement des avantages temporels, mais encore des biens spirituels, et qu'il va jusqu'à se devouer lui-même, d'après ces paroles de saint Paul (2Co 12,45) : Je donnerai avec le plus grand plaisir tout ce que j'ai, et je me donnerai encore moi- même pour vos âmes.

(M) Les nécessités de la vie présente, comme le sommeil, les repas, les travaux particuliers, empêchent de penser constamment à Dieu.
(2) On peut écarter chacune de ces choses considérées en elles-mêmes, mais il n'est pas possible qu'on les écarte toutes considérées dans leur ensemble, d'après cette décision du concile de Trente : Si quit dixerit... hominem posse in totd vitd peccata omnia venialia vitare, niti ex speciali Dei privilegio, anathema sit (sess vi, can. 23).


ARTICLE III. — la perfection consiste-t-elle dans les préceptes\b ou \Bles conseils\b (4)?


Objections: 1. Il semble que la perfection de la vie ne consiste pas dans les préceptes, mais dans les conseils. Car le Seigneur dit (Mt 19,21) : Si vous voulez être parfait, allez, vendez tout ce que vous avez et donnez-le aux pauvres, puis venez et suivez-moi. Or, c'est là un conseil. La perfection se considère donc d'après les conseils et non d'après les préceptes.

2. Tout le monde est tenu d'observer les préceptes puisqu'ils sont de nécessité de salut. Si donc la perfection de la vie chrétienne consiste dans les préceptes, il s'ensuit qu'elle est de nécessité de salut et qu'elle est obligatoire pour tous; ce qui est évidemment faux.

3. La perfection de la vie chrétienne se considère d'après la charité, comme nous l'avons dit (art. 4 huj. quaest.). Or, la perfection de la charité ne paraît pas consister dans l'observance des préceptes; parce que l'augmentation et le commencement de cette vertu en précèdent la perfection, comme on le voit dans saint Augustin (Sup. canon. Joan, tract, ix); et que d'ailleurs le commencement de la charité ne peut exister avant l'observation des préceptes. Car, comme le dit saint Jean (14, 23) : Si quelqu'un vi'aime il observera ma parole. La perfection de la vie ne se considère donc pas d'après les préceptes, mais d'après les conseils.

En sens contraire Mais c'est le contraire. Il est dit (Dt 6,5) : Fous aimerez le Seigneur votre Dieu de tout votre coeur. Et ailleurs (Lv 19,48) : Fous aimerez votre prochain comme vous-même. Ce sont là les deux préceptes dont le Seigneur dit (Mt 22,40) : Toute la loi et les préceptes se réduisent à ces deux commandements. Or, la perfection de la charité, d'après laquelle on dit que la vie chrétienne est parfaite, résulte de ce que l'on aime Dieu de tout son coeur, et le prochain comme soi-même. Il semble donc que la perfection consiste dans l'observation de ces préceptes.

(1) Cet article est opposé à l'erreur de Calvin, conseil et nn précepte, et que toutes les choses qui prétend qu'il n'y a point de conseil dans l'E- que Jésus-Christ a prescrites sont des conseils, vangile, qu'il n'y a aucune différence entre un

CONCLUSION. — La perfection de la charité consiste principalement et essentiellement dans les préceptes, secondairement et instrumentalement dans les conseils.

Réponse Il faut répondre qu'on dit que la perfection consiste dans quelqu'un de deux manières : 1° par elle-même et essentiellement ; 2° secondairement et accidentellement. — Par elle-même et essentiellement la perfection de la vie chrétienne consiste dans la charité, et elle résulte principalement de l'amour de Dieu, et secondairement de l'amour du prochain, qui sont l'objet des principaux préceptes de la loi divine, comme nous l'avons dit (quest. xliv, art. 2 et 3). Or, l'amour de Dieu et du prochain n'est pas commandé dans une certaine mesure ; de telle sorte que le degré supérieur de cet amour soit de conseil. C'est ce qu'on voit d'après la forme même du précepte qui prouve qu'il s'agit d'un amour parfait. Car, quand on dit : Vous aimerez le Seigneur votre Dieu de tout votre coeur, le mot tout exprime quelque chose de parfait, d'après ce que dit Aristote (Phys. lib. 1, text. 64) ; et quand on ajoute : Vous aimerez votre prochain comme vous- même, cette phrase offre le même sens, puisqu'il n'y a rien que l'on aime plus que soi-même. Et il en est ainsi parce que la charité est la fin de la loi, d'après saint Paul (1Tm 1). Pour la fin on n'emploie pas de mesure, on ne s'en sert que pour les moyens, comme l'observe Aristote (Pol. lib. i, cap. 6). Ainsi le médecin ne mesure pas la santé qu'il veut rendre, mais il mesure la médecine ou la diète qu'il ordonne pour arriver à la guérison. Par conséquent il est évident que la perfection consiste essentiellement dans les préceptes. D'où saint Augustin s'écrie (Lib. de per f. just. cap. 8) : Pourquoi ne ferait-on pas de cette perfection un précepte, quoiqu'il n'y ait personne en cette vie qui la possède ? — Secondairement et instrumenta- lement la perfection consiste dans les conseils, qui se rapportent tous à la charité, aussi bien que les préceptes, mais d'une autre manière. Car les autres préceptes sont ordonnés par les préceptes de la charité pour écarter ce qui est contraire à cette vertu, c'est-à-dire les choses avec lesquelles la charité est incompatible; au lieu que les conseils ont pour but d'écarter ce qui fait obstacle à l'acte de la charité, quoique ces choses ne soient pas contraires à cette vertu, comme le mariage, la préoccupation des affaires du siècle, etc. C'est ce qui fait dire à saint Augustin (Ench. cap. 121) : Toutes les choses que Dieu ordonne (comme celle-ci : Vous ne forniquerez pas), et toutes celles qu'il n'ordonne pas, mais qu'il conseille spécialement (comme celle-ci : Il est bon pour l'homme de ne pas s'approcher de la femme), sont de bonnes actions, quand elles ont pour but d'aimer Dieu et le prochain à cause de Dieu, dans cette vie et dans l'autre. C'est pour cela que dans les conférences des Pères du désert (Collât. i, cap. 7), l'abbé Moïse dit : Les jeûnes, les veilles, la méditation des saintes Ecritures, la nudité et la privation de tous les biens, ne sont pas la perfection, mais des instruments de perfection (1), parce que ce n'est pas en cela que consiste la fin de notre existence, mais c'est par ces moyens qu'on y parvient. Et il avait dit plus haut : que ce sont des degrés par lesquels nous nous efforçons de nous élever à la perfection de la charité.

Solutions: 1. Il faut répondre au premier argument, que dans ces paroles du Seigneur il y a quelque chose qui indique le chemin qui mène à la perfection. Ce sont ces mots : Allez, vendez tout ce que vous avez et donnez-le aux pauvres; puis il ajoute en quoi la perfection consiste, en disant : Suivez-moi. C'est pourquoi saint Jérôme dit (Sup. Matth, cap. 19, Ecce nos reliquimus, etc.) : que parce qu'il ne suffit pas de tout abandonner, Pierre ajoute ce qui constitue la perfection, Et nous vous avons suivi. Saint Ambroise, à l'occasion de ces paroles de saint Luc (1) : Suivez-moi, dit : qu'il ordonne de le suivre non pas corporellement, mais d'après l'affection de l'âme : ce qui se fait par la charité. C'est pour ce motif que d'après la manière dont il s'exprime on voit que les conseils sont les moyens de parvenir à la perfection. Car quand il dit : Si vous voulez êtes parfait, allez, vendez, etc., c'est comme s'il disait : en faisant cela vous parviendrez à cette fin.

2. Il faut répondre au second, que, comme le dit saint Augustin (Lib. de perf. just. cap. 8), la perfection de la charité est ordonnée à l'homme en cette vie, parce que l'on ne court pas droit, si l'on ne sait où l'on doit courir. Et comment le saurait-on, si l'on n'obéissait à aucun précepte ? Ce qui tombe sous le précepte, pouvant être accompli de différentes manières, on n'en est pas transgresseur parce qu'on ne le remplit pas de la meilleure manière (2) ; il suffit qu'on le remplisse d'une manière quelconque. La perfection de l'amour divin est de précepte dans toute son universalité : de telle sorte que le précepte n'exclut pas la perfection céleste, comme le dit saint Augustin (loc. cit.), et qu'on ne peut pas regarder comme un transgresseur celui qui atteint de quelque manière la perfection de l'amour divin qu'il ordonne. Le degré le plus infime de cet amour consiste à ne rien aimer plus que lui, ni contre lui, ni autant que lui. Celui qui ne s'élève pas à ce degré de perfection, ne remplit d'aucune manière le précepte. Mais il y a un autre degré d'amour parfait qui n'est pas possible ici-bas, comme nous l'avons dit (art. préc.). Il est évident que celui qui reste au-dessous n'est pas un transgresseur du précepte. De même on ne transgresse pas non plus la loi quand on ne s'élève pas aux degrés de perfection intermédiaires, pourvu qu'on atteigne le plus infime.

3. Il faut répondre au troisième, que comme l'homme a, aussitôt qu'il naît, une perfection naturelle qui appartient à l'essence de son espèce, et qu'il y en a une autre à laquelle il arrive en se développant ; de même il y a une perfection de la charité qui appartient à l'essence même de cette vertu, et qui consiste à aimer Dieu par-dessus toutes choses et à ne rien aimer qui lui soit opposé ; mais il y a aussi une perfection ici-bas, à laquelle on arrive par le moyen d'un accroissement spirituel : comme quand l'homme s'abstient de choses qui lui sont permises, pour se livrer plus librement au service de Dieu.

ARTICLE IV. — \Btous ceux qui sont parfaits sont-ils dans un état de perfection ?


Objections: 1. Il semble que tous ceux qui sont parfaits soient dans un état de perfection. Car comme on parvient à la perfection du corps par un accroissement corporel; de même on parvient à la perfection de l'âme par un accroissement spirituel, ainsi que nous l'avons dit (art. préc. ad 3). Or, après que le corps s'est développé, on dit qu'on est arrivé à l'état d'homme fait. Il semble donc qu'après le progrès spirituel, quand on est déjà parvenu à la vie parfaite, on soit dans l'état de perfection.

2. La raison qui fait qu'une chose va d'un contraire à un autre fait aussi qu'elle va de c» qui est moindre à ce qui est plus grand, selon l'expression d'Aristote (Phys. lib. v, text. 19). Or, quand on passe du péché à la grâce, on dit qu'on change d'état, de telle sorte qu'on distingue l'état du péché de l'état de grâce. Il semble donc que pour la même raison, quand on va d'une moindre grâce à une plus grande, on acquiert un état de perfection jusqu'à ce qu'on soit arrivé à ce qui est parfait.

(1) Voyez ce que nous avons dit en examinant si le mode de la charité était de précepte, tome 1, p. AU.

3. On acquiert un état par là même qu'on est délivré de la servitude. Or, on est délivré de la servitude du péché par la charité; puisque c'est elle qui couvre toutes nos fautes, selon l'expression du Sage (Pr 10,42). Or, on dit qu'un individu est parfait en raison de sa charité, comme nous l'avons vu (art. 4 huj. quaest.). Il semble donc que celui qui est parfait ait par là même un état de perfection.

En sens contraire Mais c'est le contraire. Il y en a qui sont dans un état de perfection et qui manquent absolument de la charité et de la grâce, comme les mauvais évêques ou les mauvais religieux. Il semble donc qu'au contraire il y en ait qui soient parfaits, sans être pour cela dans un état de perfection.


CONCLUSION. — Rien n'empêche qu'il n'y ait des parfaits qui ne sont point du tout dans un état de perfection, et qu'il y en ait dans un état de perfection qui ne soient point du tout parfaits.

Réponse Il faut répondre que, comme nous l'avons dit (quest. préc. art. 4), l'état appartient proprement à la condition de la liberté ou de la servitude. Or, la liberté ou la servitude spirituelle peut se considérer dans l'homme de deux manières : 4° selon ce qui se passe dans son intérieur; 2° selon les actes qu'il produit extérieurement ; parce que, selon l'expression de l'Ecriture (1S 16,7), les hommes voient ce qui parait, tandis que Dieu regarde le coeur, il s'ensuit que selon la disposition intérieure de l'homme, la condition de son état spirituel se considère par rapport au jugement de Dieu; au lieu que d'après les actes qu'il produit extérieurement, on considère son état spirituel par rapport à l'Eglise. Et c'est dans ce sens que nous parlons ici des états, selon que leur diversité produit la beauté de l'Eglise. — Or, il est à remarquer que relativement aux hommes, pour que quelqu'un ait un état de liberté ou de servitude, il faut qu'il y ait une obligation ou une exemption de service. Car de ce qu'on sert quelqu'un, on ne devient pas esclave, puisque les hommes libres servent aussi, d'après ces paroles de l'Apôtre (Ga 5,43) : Assujettissez-vous les uns les autres par une charité spirituelle. De ce qu'on cesse de servir on ne devient pas libre non plus, comme on le voit à l'égard des esclaves fugitifs. Mais, à proprement parler, le serf est celui qui est obligé de servir, et l'homme libre celui qui reste affranchi de la servitude. 2° Il est nécessaire que cette obligation ait été contractée avec une certaine solennité, semblable à celle dont on environne toutes les autres choses qui obtiennent parmi les hommes une durée perpétuelle. Par conséquent on dit donc qu'une personne est dans un état de perfection, non parce qu'elle produit des actes de dilection parfaite, mais parce qu'elle s'oblige perpétuellement avec solennité à ce qui est de perfection (4). — Il arrive aussi qu'il y en a qui s'obligent à des choses qu'ils n'observent pas, et d'autres qui remplissent des devoirs auxquels ils ne sont pas obligés, comme on le voit (Mt 21,28) à l'égard des deux fils, dont l'un répond à son père qui lui disait de travailler à la vigne : Je ne veux pas, et qui y va ensuite; tandis que l'autre dit : J'y vais, et n'y va pas. C'est pourquoi rien n'empêche qu'il y ait des hommes parfaits qui ne sont pas dans un état de perfection (2), et qu'il y en ait dans un état de perfection qui ne soient cependant pas parfaits (3).

Solutions: 1. Il faut répondre aupremier argument, que par le développement du corps on progresse dans ce qui appartient à la nature, et c'est pour cela qu'on arrive à un état naturel; surtout parce que ce qui est conforme à la nature est en quelque sorte immuable, dans le sens que la nature n'a qu'une détermination unique. De même, par les progrès spirituels intérieurs, on arrive à un état de perfection relativement au jugement divin ; mais quant à la distinction des états ecclésiastiques, on n'obtient l'état de perfection qu'autant que le progrès a lieu par des actes extérieurs.

(U) Le religieux entre dans l'état de perfection quand il fait profession, et l'évêque quand on lui confie la charge pastorale. (2) Tels sont les bons chrétiens, qui pratiquent dans le monde toutes les vertus les plus eminentes.
(3) C'est l'état déplorable des religieux qui n'observent pas leurs devoirs.

2. Il faut répondre au second, que ce raisonnement ne se rapporte qu'à l'état intérieur (1 ). Toutefois, quand on passe du péché à la grâce, on va de la servitude à la liberté; ce qui n'a pas lieu par le simple accroissement de la grâce, sinon quand on s'oblige à l'égard de ce qui appartientà la grâce (2).

3. Il faut répondre au troisième, que ce raisonnement repose aussi sur l'état intérieur. Cependant quoique la charité change la condition de la servitude et de la liberté spirituelle, l'augmentation de cette vertu ne produit pas le même effet.

ARTICLE V. — les religieux et les prélats sont-ils dans l'état de perfection\b (3)?


Objections: 1. Il semble que les prélats et les religieux ne soient pas dans l'état de perfection. Car l'état de perfection se distingue de l'état de ceux qui commencent et de ceux qui progressent. Or, il n'y a pas de genres d'hommes spécialement consacrés à l'état de ceux qui progressent ou de ceux qui commencent. Il semble donc qu'il ne doive pas y en avoir qui soient particulièrement consacrés à l'état de perfection.

2. L'état extérieur doit répondre à l'état intérieur; autrement il mérite d'être accusé de mensonge ; car le mensonge n'existe pas seulement dans les discours faux, mais encore dans les actions feintes, comme le dit saint Ambroise (Serm. xliv de temp.). Or, il y a beaucoup de pr élats ou de religieux qui n'ont pas la perfection intérieure de la charité. Par conséquent, si tous les religieux et les prélats sont dans l'état de perfection, il s'ensuit que tous ceux d'entre eux qui ne sont pas parfaits, sont dans le péché mortel, comme des hypocrites et des menteurs.

3. La perfection se considère d'après la charité, comme nous l'avons vu (art. 4 huj. quaest.). Or, la charité la plus parfaite paraît exister dans les martyrs, d'après ces paroles de saint Jean (15, 13) : Personne ne peut avoir un plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis. Et à l'occasion de ce passage de saint Paul (He 12) : Nondum enim usque ad sanguinem, etc., la glose dit (Aug. serm. xvii, de verb. apost.) : Il n'y a pas ici-bas d'amour plus parfait que celui auquel sont parvenus les martyrs qui ont combattu contre le péché jusqu'à donner leur sang. Il semble donc qu'on doive plutôt attribuer l'état de perfection aux martyrs qu'aux religieux et aux évêques.

En sens contraire Mais c'est le contraire. Saint Denis (De eccles. hier. cap. 5) attribue la perfection aux évêques comme aux plus parfaits, et il l'attribue aussi (cap. 6) aux religieux qu'il appelle des moines ou des thérapeutes, c'est-à- dire des serviteurs de Dieu, comme à ceux qui sont parfaits.


CONCLUSION. — Les religieux et les prélats sont dans un état de perfection, non qu'ils se regardent comme parfaits, mais parce qu'ils font profession de s'efforcer de le devenir.

(!) An lieu que la distinction des états repose principalement sur les faits extérieurs.
(2) Comme le font les religieux.
(3) Cet article est opposé à l'erreur des pauvres de Lyon, de Wiclef et de tous les autres novateurs qui ont attaqué les ordres religieux. On peut voir la condamnation de ces erreurs dans le concile de Constance.

Réponse Il faut répondre que, comme nous l'avons dit (art. préc.), pour l'état de perfection il faut prendre avec solennité l'engagement de s'attacher perpétuellement à ce qui est de perfection. Or, ces deux choses conviennent aux religieux et aux évêques. En effet, les religieux font voeu de s'abstenir des choses du siècle, dont ils pouvaient licitement user, et ils s'en détachent pour vaquer plus librement au service de Dieu. C'est en cela que consiste la perfection de la vie présente. C'est ce qui fait dire à saint Denis, en parlant d'eux (De eccles. hier. cap. 6) : Il y en a qui les appellent thérapeutes, c'est-à-dire serviteurs de Dieu, à cause de la pureté du service qu'ils remplissent. D'autres les appellent moines par suite de l'indivisibilité et de l'unité de la vie qu'ils mènent, en s'attachant par la contemplation à l'unité de Dieu et à l'amabilité de ses perfections. Cet engagement est pris avec toute la solennité de la profession et de la bénédiction. C'est pourquoi saint Denis ajoute : que la loi sainte leur donnant la grâce parfaite, les a rendus dignes de la prière qui sanctifie. — De même les évêques s'obligent aux choses qui sont de perfection, en acceptant la charge pastorale. C'est pour cela qu'il est dit : que le pasteur donne sa vie pour ses brebis (Jn 10,15), et que saint Paul écrit à Timothée (1Tm 6 1Tm 12) : Fous avez fait une excellente confession de votre foi devant plusieurs témoins, c'est- à-dire dans son ordination, observe la glose (interl.). Cette profession est accompagnée d'une consécration solennelle, d'après ces autres paroles de l'Apôtre (2Tm 1,6) : Ressuscitez en nous la grâce de Dieu que vous avez reçue par l'imposition des mains; ce que la glose (interl.) entend de la grâce épiscopale. Et saint Denis dit (De coel. hier. cap. 5) que le souverain prêtre, c'est-à-dire l'évêque, reçoit dans son ordination les saintes lettres qu'on lui place sur la tête, afin de montrer qu'il participe à la vertu tout entière de la hiérarchie, et que non-seulement il éclaire tous les autres (ce qui appartient aux paroles et aux actions saintes), mais qu'il leur transmet encore ce don.

Solutions: 1. Il faut répondre au premier argument, qu'on ne cherche pas le commencement et l'accroissement pour eux-mêmes, mais en vue de la perfection. C'est pourquoi on n'élève à l'état de perfection que ceux qui s'y obligent avec solennité.

2. Il faut répondre au second, que l'on redresse l'état de perfection, non pour dire que l'on est parfait, mais pour témoigner qu'on tend à le devenir. D'où l'Apôtre dit (Ph 1,12) : Ce n'est pas que j'aie reçu ce que j'espère ou que je sois parfait, mais je poursuis ma course pour tâcher d'atteindre mon but; puis il ajoute : Tout ce que nous sommes de par faits, soyons dans ce sentiment. Celui qui embrasse l'état de perfection n'est donc ni un menteur, ni un hypocrite, s'il n'est pas parfait; mais il pèche s'il renonce au but de perfection qu'il s'était proposé.

3. Il faut répondre au troisième, que le martyre consiste dans l'acte de charité le plus parfait (1). Mais un acte de perfection ne suffit pas pour établir un état, comme nous l'avons dit (art. préc.).

ARTICLE VI. — tous les supérieurs ecclésiastiques sont-ils dans l'état de perfection\b (2)?


II-II (Drioux 1852) Qu.183 a.4