Discours 2000 - Vendredi 30 juin 2000


AVEC LES ARCHEVÊQUES MÉTROPOLITAINS

Vendredi 30 Juin 2000



Après la solennelle célébration eucharistique d'hier place Saint-Pierre, c'est avec une profonde joie que je vous rencontre ce matin, très chers Archevêques métropolitains. J'embrasse avec affection chacun de vous ici présent, et j'envoie une pensée particulière à tous ceux qui n'ont pas pu venir personnellement recevoir le Pallium.

Avec vous, je salue cordialement vos familles, vos amis et les fidèles de vos communautés chrétiennes respectives, qui vous ont accompagnés au cours de ce pèlerinage jubilaire sur le tombeau des Apôtres.

Je m'adresse avant tout à vous, vénérés Frères, qui appartenez à la bien-aimée Eglise qui est en Italie: à vous, Monseigneur Dino De' Antoni, Archevêque de Gorizia; à vous, Monseigneur Francesco Caccuci, Archevêque de Bari-Bitonto; à vous, Monseigneur Giuseppe Verucchi, Archevêque de Ravenne-Cervia; à vous, Monseigneur Angelo Bagnasco, Archevêque de Pesaro. Que le Seigneur, qui vous a choisis, vous rende toujours fidèles au devoir apostolique qui vous a été confié. Comme je le rappelais hier, soyez donc des guides attentifs et prévoyants du troupeau dont le Christ, le Bon Pasteur, vous demandera compte.

Je suis heureux de saluer les nouveaux Archevêques métropolitains de langue française, Mgr Roger Pirenne, Archevêque de Bertoua, Mgr Nestor Assogba, Archevêque de Cotonou, Mgr Fidèle Agbatchi, Archevêque de Parakou, Mgr Hubert Barbier, Archevêque de Bourges, ainsi que tous les fidèles venus les accompagner. La cérémonie du pallium est pour tous un appel incessant à témoigner du Christ ressuscité dans le monde entier et à travailler pour l'unité de l'Eglise autour du Successeur de Pierre. A tous ma Bénédiction apostolique.

Hier, avec l'imposition du Pallium s'est renouvelé un rite antique et suggestif qui scelle l'unité qui lie chacune de vos communautés au Siège apostolique et au Successeur de Pierre. Ensemble, nous formons l'unique Eglise du Christ, appelée à annoncer l'unique Evangile pour le salut de chaque homme, en chaque lieu de la terre. Vénérés frères, ayez soin de sauvegarder par tous les moyens possibles cette fidélité spéciale au mandat du divin Maître: fidélité à sa Parole, fidélité à son désir de pleine unité du peuple chrétien, racheté par son sang sur la Croix.

Pour réaliser cette union, tournons-nous vers le Christ qui, comme nous le rappelle la fête de son Sacré-Coeur d'aujourd'hui, nous répète: "Mettez-vous à mon école, car je suis doux et humble de coeur" (Mt 11,29).

Que Marie, Mère de l'Eglise, nous soutienne sur ce chemin. A vous tous et à tous ceux qui font partie des communautés ecclésiales dont vous provenez, je donne de tout coeur une Bénédiction apostolique.

     

Juillet

AUX PARTICIPANTS AU PÈLERINAGE JUBILAIRE DE L’UNION "SANGUIS CHRISTI" ET AUX AUTRES PÈLERINAGES

Samedi 1er juillet 2000



Très chers frères et soeurs!

1. Je suis heureux de vous rencontrer en ce premier jour du mois de juillet, consacré par la piété chrétienne à la méditation du "Sang du Christ, prix de notre rachat, gage de salut et de vie éternelle" (Jean XXIII, Lett. apos. Inde a primis, in AAS, 52 [1960], 545-550), vous qui êtes membres des familles religieuses masculines et féminines et des associations catholiques consacrées au culte du Très Précieux Sang de Jésus.

Aux Familles religieuses et aux associations catholiques consacrées au culte du Très Précieux Sang de Jésus

En vous saluant avec affection, je vous remercie de votre présence et j'adresse une pensée reconnaissante au Directeur provincial des Missionnaires du Très Précieux Sang de Jésus pour les paroles courtoises qu'il a bien voulu m'adresser également en votre nom.

Jusqu'à la réforme liturgique organisée par le Concile Vatican II, ce même jour on célébrait également dans toute l'Eglise catholique la fête liturgique du mystère du Sang du Christ. Ensuite, mon Prédécesseur de vénérée mémoire, Paul VI, a uni le souvenir du Sang du Christ à celui de son Corps en la solennité qui prend précisément le nom du "Très Saint Corps et Sang du Christ". En effet, dans chaque célébration eucharistique se rend présent, en même temps que le Corps du Christ, son Sang précieux, le Sang de la nouvelle et éternelle Alliance, versé pour tous en rémission des péchés (cf. Mt 26,27).


2. Très chers frères et soeurs, le mystère du Sang du Christ est grand! Dès l'aube du christianisme, il a saisi l'esprit et le coeur de nombreux chrétiens et, de façon particulière, de vos saints fondateurs et fondatrices, qui en ont fait l'étendard de vos Congrégations et Associations. L'Année jubilaire donne une nouvelle impulsion à une dévotion aussi significative. En effet, en célébrant le Christ, 2000 ans après sa naissance, nous sommes également invités à le contempler et à l'adorer dans la très sainte humanité assumée dans le sein de Marie et unie de façon hypostatique à la Personne divine du Verbe. Si le Sang du Christ est une source précieuse de salut pour le monde, cela dérive précisément de son appartenance au Verbe qui s'est fait chair pour notre salut.

Le signe du "sang répandu", comme expression de la vie donnée de façon sanglante en témoignage de l'amour suprême, constitue un acte de la sollicitude divine à l'égard de notre condition humaine. Dieu a choisi le signe du sang, car aucun autre signe n'est aussi éloquent pour indiquer l'engagement total de la personne.

Le mystère d'un tel don trouve sa source dans la volonté salvifique du Père céleste et sa réalisation dans l'obéissance filiale de Jésus, vrai Dieu et vrai Homme, à travers l'oeuvre de l'Esprit Saint. L'histoire de notre salut porte donc l'empreinte et le sceau indélébile de l'amour trinitaire.


3. Face à cette merveilleuse oeuvre divine, tous les fidèles s'unissent à vous, très chers frères et soeurs, en élevant des hymnes de louange au Dieu Un et Trine sous le signe du Sang précieux du Christ. Mais à la confession des lèvres doit s'unir le témoignage de la vie, selon l'exhortation qui nous vient de l'Epître aux Hébreux: "Ayant donc, frères, l'assurance voulue pour l'accès au sanctuaire par le sang de Jésus [...] faisons attention les uns les autres pour nous stimuler dans la charité et les oeuvres bonnes" (He 10,19 He 10,24).

Aux membres de l'Avis

Et les "bonnes oeuvres" que la méditation du sacrifice du Christ nous inspire sont nombreuses. En effet, celui-ci nous pousse à donner notre vie pour Dieu et nos frères sans nous épargner, "usque ad effusionem sanguinis", comme l'ont fait tant de martyrs. Comment ne pas reconnaître toujours à nouveau la valeur de chaque être humain, alors que pour chacun, sans distinction, le Christ a versé son sang? La méditation de ce mystère nous pousse, en particulier, vers ceux qui pourraient être guéris de leurs souffrances morales et physiques et que l'on laisse en revanche dépérir en marge d'une société opulente et indifférente. C'est dans cette perspective qu'apparaît dans toute sa noblesse le service que vous rendez, membres de l'Avis. Je vous salue cordialement, ainsi que votre Président, que je remercie de l'hommage qu'il m'a adressé. Vous ne vous limitez pas à donner ce qui vous appartient: vous donnez quelque chose de vous-mêmes. Qu'y a-t-il de plus personnel que son propre sang? A la lumière du Christ, donner à son frère cet élément vital acquiert une valeur qui transcende l'horizon simplement humain. A vous, membre de l'Avis, j'adresse donc l'expression de mon estime et de mon encouragement.

Aux fidèles du diocèse de Bergame

4. Je désire à présent adresser mon salut cordial aux pèlerins du diocèse de Bergame, guidés par leur Evêque, Mgr Roberto Amadei, que je remercie des sentiments exprimés dans son hommage chaleureux. Très chers amis, au cours de la visite d'aujourd'hui, vous entendez manifester votre affection et votre proximité au Succeseur de Pierre. Merci de tout coeur! Au cours des siècles, votre Eglise a conservé des liens très étroits de communion avec le Siège apostolique. Comment ne pas rappeler, dans ce contexte, votre compatriote et mon prédécesseur, le Pape Jean XXIII, qui sera bientôt inscrit dans l'Album des bienheureux? Que le chemin de prière et de méditation qui vous conduit sur les lieux jubilaires soit pour vous, très chers amis, une occasion pour réaffirmer votre adhésion convaincue au Christ, "Porte Sainte" pour entrer dans le royaume du Père. En rentrant chez vous, apportez le salut et l'encouragement du Pape aux prêtres, aux personnes consacrées et à tous vos frères et soeurs dans la foi. Que l'Année Sainte soit pour chacun un encouragement à raviver sa foi et à poursuivre l'engagement de la nouvelle évangélisation, qui trouve sa confirmation et sa force dans la charité.

Aux nombreux pèlerins présents

5. Enfin, ma pensée s'adresse aux fidèles de Sainte Marie de la Victoire, de Montebelluna; de Saint Bernardino in Tordandrea d'Assise; de Saint Jean-Baptiste, à Acconia di Curinga; ainsi qu'à l'Institut "Beata Maria De Mattias" de Frosinone, et à la Communauté de la "Piccola Casa" d'Aversa.

Très chers amis, que la célébration des deux mille ans de l'incarnation du Fils de Dieu vous trouve attentifs dans la foi, solides dans l'espérance et fervents dans la charité. Le Christ passe encore aujourd'hui à côté de chacun pour lui offrir le don de l'infinie miséricorde de Dieu. Soyez vous aussi riches de cette miséricorde, comme l'est notre Père qui est dans les cieux.

Avec ces sentiments, et dans l'amour de Celui qui nous a "aspergés de son sang" (cf. 1P 1,2), je vous bénis tous de grand coeur.



AUX PARTICIPANTS AU CHAPITRE GÉNÉRAL DE L'ORDRE DES MINIMES

Lundi 3 juillet 2000



Très chers frères de l'Ordre des Minimes!

1. Je vous accueille en vous souhaitant une affectueuse bienvenue, reconnaissant pour la visite que vous avez voulu me rendre au début de votre Chapitre général. Je salue cordialement le
P. Giuseppe Fiorini Morosoni, votre Supérieur général, les Pères capitulaires et les délégations des moniales et des tertiaires qui interviendront au cours de la première partie de votre importante réunion, ainsi que les religieux, les religieuses et les laïcs qui composent les trois Ordres de la Famille religieuse fondée par saint François de Paule.

Avec vous tous, je rends grâce au Seigneur pour le bien accompli au cours d'une longue et méritoire histoire au service de l'Evangile. Ma pensée remonte, en particulier, aux temps difficiles pour la vie de l'Eglise, lors desquels saint François de Paule s'engagea à réaliser une réforme qui entraîna sur un chemin de perfection renouvelée ceux qui étaient "appelés par le désir d'une plus grande pénitence et par l'amour de la vie quadragésimale" (IV Règle, chap. 2).


2. Animé par des intentions apostoliques, il fonda l'Ordre des Minimes, un Institut religieux clérical de voeux solennels, placé comme "un bon arbre dans le champ de l'Eglise militante" (Alexandre VI) pour produire des fruits dignes de pénitence sur les traces du Christ, qui "s'anéantit lui-même, prenant condition d'esclave" (Ph 2,7). En suivant l'exemple de son Fondateur, votre Famille religieuse se propose de rendre un témoignage quotidien particulier de la pénitence évangélique, à travers la vie quadragésimale, comme conversion totale à Dieu, participation intime à l'expiation du Christ et rappel des valeurs évangéliques du détachement du monde, de la primauté de l'esprit sur la matière et de l'urgence de la pénitence, qui comporte la pratique de la charité, l'amour de la prière et l'ascèse physique" (Constitutions, art. 3).

Très chers amis, inspirez-vous constamment de votre Fondateur, l'humble pénitent plongé en Dieu, qui savait transmettre à ses frères une authentique expérience du Divin. En lui, le Seigneur voulut réaliser de "grandes choses", en lui confiant des tâches extraordinaires, qui le conduisirent à parcourir une grande partie de l'Italie et de la France et à les illuminer par la splendeur de sa sainteté.

Au cours des presque cinq siècles qui nous séparent de sa mort, qui eut lieu le 2 avril 1507, ses fils, fidèles au charisme de leur Fondateur, ont continué à annoncer l'"Evangile de la pénitence". Ils se sont efforcés de vivre son esprit d'humilité, de pauvreté et de profonde oraison, en imitant sa tendre dévotion à l'Eucharistie, au Crucifié et à la Madone. En particulier, ils ont continué à s'engager dans l'observance du "quatrième voeu du carême perpétuel". Ainsi, ils ont prolongé dans le monde entier le sillage lumineux de saint François de Paule, en témoignant partout du rôle incontournable de la pénitence dans l'itinéraire de la conversion et en enrichissant la vie de l'Eglise d'admirables oeuvres de charité et de sainteté.


3. "Vous n'avez pas seulement à vous rappeler et à raconter une histoire glorieuse, mais vous avez à construire une grande histoire! Regardez vers l'avenir, où l'Esprit vous envoie pour faire encore avec vous de grandes choses" En cette circonstance particulière, je désire vous répéter ces paroles de l'Exhortation apostolique Vita consecrata (VC 110), dans lesquelles se reflètent bien les objectifs de votre Chapitre général. Celui-ci, en approfondissant le thème "Identité et mission des Minimes au début du troisième millénaire après 500 ans d'histoire: Religieux et laïcs ensemble avec un unique charisme, pour la même mission", se propose de repenser le charisme de la pénitence quadragésimale, à la lumière des défis du monde d'aujourd'hui, en définissant les nouveaux aréopages à privilégier pour l'annonce évangélique de la conversion et de la réconciliation.

Cet engagement, déjà apparu au cours de la dernière Assemblée ordinaire, demande à être traduit par une présence significative et pleine d'amour des Minimes dans les contextes de grande pauvreté spirituelle, à travers l'écoute, la direction spirituelle et la formation des consciences à la réflexion et à la prière. Votre présence sur le front de l'indigence matérielle pour apporter aux déshérités une solidarité effective pourra être d'une grande importance, également grâce à la participation aux oeuvres des organismes qui s'y consacrent. Je suis certain que l'exemple de votre Fondateur, messager de la paix du Christ, vous soutiendra dans votre mission d'apporter le don de la réconciliation et de la communion dans les familles, dans les réalités ecclésiales, auprès des diverses confessions chrétiennes, parmi ceux qui sont indifférents ou lointains.


4. En évangélisant les nouveaux aréopages, il faut tout d'abord avoir à l'esprit que la créativité et le dialogue avec les diverses cultures ne doivent pas amoindrir les richesses de la propre identité et de la propre histoire. En effet, créativité et dialogue deviennent des voies efficaces de l'annonce évangélique lorsqu'ils peuvent compter sur la solide fidélité au propre charisme. Une vie conventuelle et pénitentielle fervente constitue sûrement le préalable indispensable pour que chaque religieux offre en lui l'image limpide du Christ, chaste, pauvre, obéissant, image qui, seule, fascine et conquiert ceux qui sont à la recherche de la vérité et de la paix.

Une pastorale authentique et incarnée présuppose la sainteté, que les Minimes, suivant l'exemple de leur fondateur, s'engageront à atteindre, en parcourant la voie de la pénitence. Celle-ci, si elle consiste en particulier dans la conversion du coeur, repose cependant également sur les moyens ascétiques propres à la tradition spirituelle de l'Eglise et de l'Institut. Dans ce contexte, la fidélité au quatrième voeu solennel de la vie quadragésimale, que saint François de Paule voulut que professent les Frères et les Moniales des Ordres qu'il avait fondés, acquiert une importance particulière. Ce signe particulier d'appartenance à l'Ordre des Minimes, apparaît très efficace dans le témoignage des "choses d'en-haut" à un monde distrait et plongé dans l'hédonisme. En effet, il est non seulement un puissant moyen de sanctification personnelle, mais il constitue une occasion pour réparer les péchés de tous les hommes et une façon pour implorer pour eux la grâce d'un retour à Dieu.

La tendance dominante dans la société contemporaine, et en particulier parmi les jeunes, à rechercher une gratification immédiate, loin de conduire les Minimes à atténuer la dimension quadragésimale de leur Institut, devra plutôt les engager à se placer avec une ardeur renouvelée au service de leurs frères, pour les éduquer à la grande voie spirituelle de la pénitence. Certes, il est nécessaire de rechercher un langage et des motivations appropriées, mais il reste toujours indispensable de témoigner de la joie qui est propre à celui qui renonce aux commodités du monde pour trouver la perle précieuse du Royaume de Dieu (cf. Mt 13,45-46). Ce témoignage constituera un don précieux que votre Ordre fera à toute l'Eglise, en rappelant l'exigence pour tous d'accueillir l'Evangile de la conversion et de l'ascèse.


5. Aux côtés des religieux et des religieuses du premier et du second Ordre, saint François de Paule voulut, avec une intuition prophétique, initier à la spiritualité de la vie quadragésimale également les laïcs, pour lesquels il fonda le Tiers Ordre. Ceux-ci, depuis presque cinq cents ans, participent à la mission de l'Ordre à travers de multiples formes de partage et de collaboration.

La complexité et les rapides mutations du monde contemporain exigent une prompte capacité de discernement et une présence toujours plus qualifiée des chrétiens dans les réalités du monde. Dans ce but, en s'enrichissant des expériences positives accumulées au cours des années, il faut encourager et soutenir la collaboration entre les laïcs et les religieux. En effet, de cette collaboration pourront naître des approfondissements féconds et inattendus de certains aspects du charisme (cf. Vita consecrata VC 55). Dans cette optique, il faut que les religieux se consacrent avec toujours plus de soin à la formation des laïcs: qu'ils soient des guides expérimentés de vie spirituelle, attentifs aux personnes et aux signes des temps, des témoins joyeux du charisme qu'ils entendent partager avec ceux qui oeuvrent plus directement dans le monde.


6. Très chers amis, le grand Jubilé invite toute l'Eglise à contempler avec une gratitude renouvelée le mystère de l'Incarnation pour annoncer avec une ardeur croissante l'Evangile du Christ dans le nouveau millénaire: devant vous s'ouvre un vaste domaine de perspectives et d'engagements.

Que votre Ordre, après avoir surmonté de nombreux moments difficiles au cours de l'histoire, continue à être la lumière qui illumine les pénitents de l'Eglise: qu'il appelle ceux qui sont loin à la nécessité de la conversion et de la pénitence, qu'il encourage par l'exemple et la prière ceux qui se sont mis en marche, qu'il témoigne d'une vie quadragésimale qui, en suivant Jésus sur son chemin vers le Calvaire, permette de goûter dès à présent, d'une certaine façon, la joie de la Pâque éternelle.

Que vos communautés, en puisant à leur propre trésor des choses nouvelles et des choses antiques (cf. Mt 13,53), soient l'expression de l'éternelle force de la voie de la pénitence qui, en conduisant à renier l'homme ancien, établit les prémisses de la venue du Royaume.

Je confie chacune de vos intentions généreuses, ainsi que les travaux capitulaires, à la Sainte Vierge, à saint François de Paule et aux nombreux saints et bienheureux qui enrichissent votre histoire séculaire, afin qu'ils vous aident à reproposer aujourd'hui votre charisme, comme signe éloquent de fécondité évangélique et de renouvellement de la vie ecclésiale.

Avec ces voeux, je vous donne volontiers, à vous ici présents et à tout l'Ordre des Minimes, dans la triple expression des Frères, des Moniales et des Tertiaires, ma Bénédiction apostolique spéciale.





AUX CONSEILS D'ADMINISTRATION DES FONDATIONS "JEAN PAUL II POUR LE SAHEL" ET "POPULORUM PROGRESSIO"

Mardi 4 juillet 2000




1. C'est avec un grand plaisir que je vous accueille et que je vous salue cordialement, chers membres des Conseils d'administration des Fondations "Jean-Paul II pour le Sahel" et "Populorum Progressio". Je salue de façon particulière Mgr Joseph Paul Cordes, Président du Conseil pontifical "Cor Unum", et je le remercie des paroles de bienvenue qu'il m'a courtoisement adressées en votre nom à tous. Je salue ses collaborateurs et je leur suis reconnaissant de l'aide et du soutien qu'ils offrent à ces institutions providentielles, qui manifestent de façon concrète la proximité du Saint-Siège à ceux qui souffrent de la pauvreté et de la faim.

La Fondation "Jean-Paul II pour le Sahel" a commencé son activité en 1984, à la suite de l'appel que j'avais dû lancer à Ouagadougou, en 1980, à la Communauté internationale en vue d'une mobilisation générale contre la grave désertification qui frappe les pays du Sahel. Vingt ans plus tard, cet appel n'a malheureusement pas perdu de son actualité: dans les zones désertiques de l'Afrique septentrionale, mais également sur toute la planète, le problème de l'eau est devenu plus grave et pressant. La carence d'eau sera peut-être le problème principal auquel l'humanité devra faire face dans un proche avenir. Voilà pourquoi il est opportun que les responsables des nations ne manquent pas d'adopter des mesures adaptées pour permettre un accès équitable à un bien si précieux pour l'humanité tout entière. Il ne suffit pas de penser aux besoins présents; nous avons en effet une sérieuse responsabilité envers les générations futures, qui nous demanderont des comptes de notre engagement pour préserver les biens naturels que le Créateur a confiés aux hommes, pour qu'ils les valorisent avec sollicitude et respect.

Quant à la Fondation "Populorum Progressio", née dans le contexte des célébrations pour le cinquième centenaire de l'évangélisation du continent américain, elle entend promouvoir, dans l'optique du développement intégral de la personne, les populations les plus défavorisées des sociétés d'Amérique latine et des Caraïbes. Il s'agit d'une fondation destinée à venir au secours des plus pauvres parmi les pauvres. En effet, de vastes couches de la population latino-américaine attendent encore de pouvoir parvenir à un développement digne de l'être humain.

2. L'heureuse circonstance de ma première rencontre avec vos deux Fondations, en même temps qu'avec le Conseil pontifical "Cor Unum", au cours de l'Année jubilaire, m'offre l'opportunité de réfléchir avec vous sur la valeur et sur la signification de l'oeuvre que l'Eglise accomplit en faveur des plus pauvres. En effet, le Jubilé ne constitue pas seulement une occasion de conversion, mais il est également une invitation à des gestes de solidarité concrète envers les indigents. Et face à l'ampleur des nécessités du monde d'aujourd'hui, l'Eglise entend offrir sa contribution.

Certes, avec le peu de moyens dont elle dispose, elle sait qu'elle ne peut pas faire face à chaque nécessité, mais elle s'efforce d'apporter divers signes d'espérance concrète, qui soient des signes de la présence aimante du Christ. L'Evangile rapporte comment le Christ entendait manifester à travers ses miracles la miséricorde de Dieu pour l'homme. Ainsi, à travers son action, l'Eglise désire indiquer que Dieu est proche de celui qui est en difficulté pour lui redonner l'espérance et la dignité. L'Eglise n'entend pas être une simple agence d'aide humanitaire; elle désire plutôt témoigner de toutes les façons possibles de la charité du Christ, qui libère l'être humain de tout mal.

3. L'une de vos deux Fondations combat la désertification de la terre. Parler du désert rappelle à l'esprit la condition dans la quelle se trouve une partie de l'humanité, frappée par la violence, par les catastrophes naturelles, par l'égoïsme. L'Eglise veut apporter l'eau de la vérité et de l'amour à celui qui se trouve dans ce "désert" de notre temps. L'Eglise entend répondre aux grandes pauvretés qui asservissent les peuples en donnant le Christ, Fils de Dieu incarné par amour pour l'homme.

C'est de cet amour que chaque coeur a vraiment faim et soif. Les efforts pour aider les hommes en difficulté à récupérer leur dignité d'êtres humains sont les bienvenus. Chaque contribution au progrès social des individus et des peuples, écrasés par le poids de la maladie et de la pauvreté, est louable. Quand les chrétiens prennent en charge la souffrance et les problèmes de leurs frères et soeurs pauvres et indigents, ils désirent surtout les aider à ressentir que Dieu les aime et désire qu'ils soient les acteurs de leur propre développement.

4. C'est dans cette lumière que doivent être considérées les initiatives entreprises par ces deux Fondations dans des pays et des continents particulièrement éprouvés. C'est dans cette lumière que se situe toute l'action caritative de l'Eglise, que le Conseil pontifical "Cor Unum" est appelé à inspirer et à coordonner. Au mois de mai dernier, à l'occasion de la "Journée des témoins de la charité", je rappelais à ce propos que ceux qui oeuvrent dans l'Eglise pour la charité sont bien plus que de simples assistants sociaux, mais de véritables témoins.

A l'aube du nouveau millénaire, telle est la perspective dans laquelle chaque intervention caritative ecclésiale doit s'insérer. Très chers frères et soeurs, en souhaitant que cela constitue le principe inspirateur de chacune de vos oeuvres et activités, j'invoque pour vous du Seigneur Jésus et de Marie, Mère de l'Espérance, un soutien constant et leur protection. Je vous assure à cet effet de ma prière et je donne volontiers à vous tous qui êtes ici présents et à ceux que vous représentez, ainsi qu'aux populations qui bénéficient de votre service, une Bénédiction apostolique spéciale.




AUX PARTICIPANTS AU CHAPITRE GÉNÉRAL DE L'ORDRE FRANCISCAIN DES FRÈRES MINEURS CAPUCINS

Vendredi 7 juillet 2000



Chers frères de l'Ordre capucin!

1. Je vous accueille avec affection à l'occasion de votre Chapitre général. Je salue cordialement le Ministre général, le Frère John Corriveau, et, en le remerciant pour les sentiments qu'il m'a manifestés en votre nom à tous, je lui transmets mes félicitations et mes voeux pour la fonction qui lui a été confirmée par le Chapitre au service de l'Ordre.

L'une des biographies les plus autorisées de votre Fondateur rapporte que le Pape Innocent III, tandis qu'il évaluait la requête de saint François à être autorisé à fonder une "nouvelle" forme de vie consacrée, se sentit encouragé par un rêve à lui donner une réponse affirmative: la Basilique du Latran lui apparut, sur le point de tomber en ruines, mais à ses côtés, un homme pauvre et petit la soutenait de ses épaules afin qu'elle ne tombe pas (cf. saint Bonaventure, Grande Légende, III, 10 FF 1064). Votre famille religieuse, dès ses origines, a été marquée par l'engagement, qui lui a été laissé par le saint d'Assise, d'un grand amour pour l'Eglise, d'une obéissance et d'une fidélité filiale à ses pasteurs. Tout cela explique bien le besoin de votre visite d'aujourd'hui et rend donc opportun que le Successeur de Pierre s'adresse à vous, représentants de vos Confrères présents dans le monde entier, pour vous exhorter à persévérer sur le chemin entrepris.


2. La récente célébration de la Pentecôte a attiré une fois de plus notre attention sur les multiples dons dont l'Esprit Saint a voulu enrichir l'Eglise. La vie même de l'Epouse du Christ est le fruit de l'effusion de l'Esprit promis par Jésus au cours de la Dernière Cène (cf. Jn 15,26-27 Jn 16-4). Cette effusion, ressentie de façon si vivante le soir de Pâques (cf. Jn 20,21-23) et le matin de la Pentecôte (cf. Ac 2,1-4), fait de l'Eglise une splendide équipe de réalités personnelles, différentes, réunies dans une profonde communion de foi et d'amour et engagées dans le témoignage de Jésus ressuscité parmi les peuples.

Les Instituts religieux individuels, avec leurs charismes respectifs, sont également le fruit de l'amour de l'Esprit pour l'Eglise. A la suite du Christ et dans l'adhésion à sa personne, la "fidélité au charisme fondateur et au patrimoine spirituel ensuite constitué dans chaque Institut" (Vita Consecrata VC 36), mérite avant tout d'être mise en évidence aujourd'hui de façon particulière. "Le "charisme des fondateurs" (EV 11) se révèle comme une "expérience de l'Esprit" transmise à leurs disciples, pour être vécue par ceux-ci, gardée, approfondie développée constamment en harmonie avec le Corps du Christ en croissance perpétuelle. "C'est pourquoi l'Eglise défend et soutient le caractère propre des divers Instituts religieux" (Lumen gentium LG 44 cf. Christus Dominus CD 33, 35, CD 1-2, etc. ) [...] Il est nécessaire que chaque institut conserve son identité avec une assurance telle qu'on puisse éviter le péril d'une situation insuffisamment définie qui porterait les Religieux à s'insérer dans la vie de l'Eglise d'une manière vague et ambiguë, sans se référer suffisamment à leur caractère propre" (Mutuae relationes, n. 11).


3. Les rencontres avec vous, à l'occasion de vos Chapitres généraux, m'ont donné l'occasion, entre autres, d'apprécier l'engagement avec lequel vous avez tenté de redécouvrir, à la lumière des enseignements conciliaires, l'héritage culturel de saint François, en identifiant avec un grand sérieux ce qui est réellement essentiel dans votre charisme. Je vous encourage à poursuivre dans cette voie, en demeurant toujours attentifs et dociles aux indications du Magistère.

Vous devrez en particulier avoir toujours deux aspects présents à l'esprit: en premier lieu, la priorité et la centralité, comme l'a voulu saint François, de la fraternité évangélique, qui vous caractérise en tant que frères et qui fait de vous un Ordre de frères. Dans cette perspective, votre engagement sera de conformer chaque aspect de votre vie à ce qui est typique du charisme franciscain et capucin: l'esprit de prière, la minorité et la simplicité, la pauvreté et l'austérité, le contact avec le peuple, la proximité avec les personnes dans le besoin, le zèle pour l'évangélisation, la joie et l'espérance chrétiennes. Parmi ces valeurs, récemment, au cours de votre VI Conseil plénier, vous avez repris en considération le choix de la pauvreté. Vous y avez été poussés par le sens renouvelé de fraternité, que la diffusion de l'Ordre dans le monde entier a aiguisé. Les nouveaux problèmes de notre société, en effet, vous invitent à approfondir la signification de la pauvreté évangélique dans la fraternité, c'est-à-dire vécue dans une dimension communautaire, institutionnelle et structurelle (cf. Propositions, 4; Analecta OFM Cap. 114 [1998] 825). Dans la contemplation du Christ pauvre, vous trouverez une inspiration non seulement pour pratiquer personnellement une vie pauvre, mais également pour aimer et servir les pauvres, que mon prédécesseur Paul VI désigna comme un "sacrement" du Christ (Acta Apostolicae Sedis, 60 [1968] 620).

En second lieu, vous ressentez l'opportunité de souligner l'attitude cohérente, pratique et concrète de saint François. Il est nécessaire de passer aux faits, aux valeurs vécues, à la méthode du témoignage direct. Vous connaissez tous en effet le critère auquel aimait faire référence votre Fondateur: plus exemplo quam verbo, à travers l'exemple plus que les paroles (Légende des trois compagnons, 36; FF 1440).


4. Votre Chapitre général se déroule en l'Année du grand Jubilé. Il s'agit d'une circonstance providentielle, qui ne peut être ignorée. Le Jubilé est une année de grâce pour tout le Peuple de Dieu: il s'agit d'un temps de conversion pour se mettre à la suite du Christ de façon plus authentique, d'un temps de renouveau intérieur, de plus grande cohérence et de disponibilité à l'égard de l'Esprit qui interpelle les conscience à travers les signes des temps. Vous serez pleinement en harmonie avec la grâce de cette célébration jubilaire dans la mesure où vous vous efforcerez de vivre de façon authentique votre vocation franciscaine et capucine. Que les décisions mûries au cours du Chapitre vous aident à vous conformer toujours plus au Christ, né dans notre histoire il y a deux mille ans.

Que votre Chapitre vous aide à accueillir avec un courage franciscain les défis du nouveau millénaire. C'est de ceux-ci, dans la perspective de la nouveauté évangélique, que naît l'invitation à la créativité, à l'audace et à l'optimisme. "Notre temps exige des Religieux d'une façon spéciale cette authenticité charismatique, vive et ingénieuse dans ses inventions, qui excelle nettement dans les fondateurs" (Mutuae relationes, n. 23f).


5. Que votre Père et Frère François vous guide et vous accompagne toujours dans l'engagement de cohérence avec votre forme de vie, afin de devenir, comme il le voulait, d'authentiques frères mineurs. Que vous accompagnent également tant de vos confrères qui vous ont précédés et qui représentent pour vous des exemples d'inspiration et des modèles à imiter. Parmi ceux-ci, ma pensée s'adresse en particulier au grand nombre de ceux que j'ai eu le plaisir de canoniser et de béatifier au cours de mon pontificat. Que vous assiste, enfin, de son amour maternel, Marie, la Vierge fidèle, "sur l'exemple de laquelle vous avez consacré votre vie à Dieu" (ET 56), "par une réponse d'amour et d'offrande totale au Christ" (Vita consecrata VC 112).

Je vous prie de vous faire les interprètes auprès de vos Confrères dans le monde entier de mon estime et de ma gratitude pour leur témoignage et leur service à la mission universelle de l'Eglise. A tous les Frères de l'Ordre, partout où ils se trouvent, et à vous, Frères capitulaires, je donne de tout coeur ma Bénédiction apostolique.



Discours 2000 - Vendredi 30 juin 2000