Discours 2000 - Lundi 6 mars 2000


  RENCONTRE AVEC LES CURÉS ET LE CLERGÉ DU DIOCÈSE DE ROME

Jeudi 9 mars 2000



  «Repentez-vous et croyez à l'Evangile».

1. L'invitation du Seigneur, qui a retentie hier au cours du rite d'imposition des Cendres, a inauguré le temps du Carême et rythme le chemin du Peuple de Dieu vers Pâques.

La conversion et la foi dans le Christ sont au centre du pèlerinage jubilaire qu'aujourd'hui, très chers prêtres du clergé de Rome, vous avez accompli dans la basilique Saint-Pierre.

Je salue avec affection le Cardinal-Vicaire, Mgr le Vice-gérant, les évêques auxiliaires et chacun de vous. Je suis heureux de vous rencontrer comme chaque année au début du Carême pour un moment de profonde communion de l'Evêque de Rome avec ses prêtres.

Cette année, le Jubilé donne un sens particulier à notre rencontre et la rend encore plus riche de motivations spirituelles et ecclésiales. Le passage de la Porte Sainte, la profession de foi et surtout le Sacrement de la Réconciliation que vous avez célébré, témoignent à tous que le prêtre, ministre du pardon de Dieu, a besoin de recevoir lui-même ce pardon dans un esprit de foi, d'humilité et de profonde confiance. Dispensateur des divins mystères, il doit être le premier à apparaître, devant ses fidèles, comme un «sauvé» qui reçoit continuellement de Dieu et de l'Eglise la grâce de vivre uni au Christ, source d'efficacité pour son ministère.

Dans le sacrement de la Pénitence se renouvelle cette «vie dans l'Esprit» et ce radicalisme évangélique qui doit marquer la vie et le ministère du prêtre. Il est également d'une grande aide pour éviter de tomber dans des formes d'autojustification, propres à la mentalité et à la culture de notre temps, qui font perdre le sens du péché et empêchent de ressentir la joie réconfortante du pardon de Dieu.

2. Pour la vie spirituelle et l'action apostolique du prêtre, le rapport de communion et de fraternité avec l'Evêque et les autres prêtres est très important également. Pour la croissance de ce rapport, il est nécessaire que chacun de vous s'engage généreusement; il faut que l'accomplissement de l'activité pastorale n'empêche pas de cultiver l'unité profonde avec vos confrères, alimentée par la prière commune, par la rencontre et le dialogue, par la recherche d'une amitié sincère.

La participation aux initiatives de la formation permanente, l'aide spirituelle et pastorale aux confrères qui se trouvent dans des situations particulières de besoin, l'assistance aux prêtres malades ou âgés, la disponibilité au dialogue et à la rencontre également avec ceux qui ont quitté le sacerdoce, manifestent la volonté de parcourir avec fécondité et engagement les voies de la communion et de la réconciliation. Un clergé uni et qui vit en harmonie, capable de travailler ensemble, représente un puissant témoignage pour les fidèles et multiplie l'efficacité du ministère.

3. La réconciliation avec le Seigneur et la communion réciproque ouvrent de nouvelles possibilités de rencontre avec ceux qui attendent de nous, pasteurs de l'Eglise, des signes d'attention et de soin pastoral particulier.

Le sujet principal de votre sollicitude doit être les familles, auxquelles, au cours de la mission dans la Ville, est parvenue l'annonce du Christ, unique Sauveur et qui, également cette année, attendent une nouvelle visite pour continuer cette expérience si positive et féconde.

C'est pourquoi chaque paroisse est appelée à renouveler avec un profond engagement, à travers l'oeuvre précieuse des missionnaires, la rencontre quadragésimale avec toutes les familles pour faire retentir dans le coeur des personnes la puissante annonce du Jubilé: «Dieu t'aime et a envoyé son Fils Jésus-Christ pour te sauver».

La visite renforce le sens d'appartenance à la communauté de tant de personnes qui vivent souvent en marge, mais qui ne refusent pas, et attendent même, des occasions et des signes concrets d'écoute et de dialogue qui les aident à surmonter la solitude et l'anonymat et à reconstruire un tissu de relations humaines et spirituelles, sur la base d'une foi jamais totalement refusée ou oubliée.

Nous, prêtres, en tant que premiers missionnaires de l'Evangile et sur l'exemple de Jésus, le Bon Pasteur, qui va à la recherche de la brebis perdue, nous devons nous consacrer avec une charité pastorale particulière aux familles en difficulté, à celles qui vivent loin de l'Eglise et qui ont de graves problèmes de foi ou de morale, à celles dans lesquelles se trouvent des malades et des personnes âgées souffrantes, à celles qui font l'expérience de drames particulièrement douloureux provoqués par des situations de séparation entre conjoints ou avec les enfants. Que l'Année Sainte, année du grand pardon et de la miséricorde de Dieu, offre à tous la possibilité d'être écoutés, accueillis et encouragés à retrouver des voies de réconciliation avec le Seigneur et avec les frères, même là où tout semble perdu ou irréversible. Ce qui apparaît impossible à l'homme n'est pas impossible à Dieu, lorsque l'on s'ouvre avec humilité et disponibilité à la grâce de son pardon.

4. Vous aurez également soin de faire en sorte que l'annonce de la miséricorde de Dieu et la vive expérience de son pardon atteignent, à travers l'engagement concret des laïcs chrétiens, chaque milieu de vie et de travail pour réaffirmer la puissance de l'amour du Christ qui fait vaincre les divisions et les incompréhensions et recrée des rapports plus fraternels et solidaires. Aucun milieu ou situation de vie n'est étranger à l'Evangile et à l'engagement d'une présence évangélisatrice active du prêtre et de chaque baptisé.

Un autre sujet d'attention pastorale sont les jeunes, sur lesquels se pose le regard bienveillant du Christ, même lorsqu'ils s'éloignent de la communauté chrétienne qui les a éduqués à la foi et aux sacrements. Combien d'adolescents et de jeunes de notre ville ne savent pas qu'ils sont aimés et recherchés par le Seigneur, parce que personne ne le leur annonce et que personne ne les rencontre avec une amitié et une fraternité sincères, là où ils se trouvent: dans les milieux d'étude ou de travail, de sport et de temps libre, dans les rues du quartier!

Il s'agit d'un devoir qui concerne en premier lieu les jeunes croyants, appelés à être missionnaires auprès des jeunes de leur âge et à redécouvrir, dans les communautés et dans les groupes, que la joie de la foi dans le Christ est communiquée et offerte à tous, sans crainte et avec courage apostolique.

Toutefois, nous ne pouvons oublier que le prêtre est, de par sa vocation, évangélisateur et père spirituel des jeunes que le Seigneur lui confie. Ceux-ci ont besoin de trouver dans le prêtre un ami disponible et sincère, mais également un témoin qui vit avec joie et cohérence spirituelle et morale son appel. Alors, ils seront aidés à découvrir et à accueillir à leur tour la vocation qui donne sa signification et sa valeur à toute leur vie.

La préparation et la célébration de la prochaine Journée mondiale de la Jeunesse est une occasion véritablement providentielle pour renouveler la pastorale des jeunes et imprimer dans les paroisses, dans les mouvements et dans les groupes, un élan vocationnel et missionnaire renouvelé.

5. Célébrer le Jubilé signifie ouvrir le coeur aux frères et soeurs plus pauvres, reconnaissant en eux la présence du Christ souffrant qui demande à être accueilli avec un amour actif.

Dans la Lettre que j'ai envoyée à toute la communauté du diocèse et de la ville, j'ai souligné que l'Eglise de Rome «a écrit le long des siècles des pages lumineuses d'accueil en particulier à l'occasion des jubilés, à travers des signes concrets et permanents d'amour envers le prochain».

La «charité romaine», qui s'est concrétisée dans l'accueil des pèlerins pauvres et dans le besoin, encourage aujourd'hui également la communauté diocésaine, les familles et chaque réalité sociale à se rendre disponible à l'accueil, en particulier au cours des grands événements, comme le sont le Jubilé des jeunes et des familles, qui verront une nombreuse participation de pèlerins venus du monde entier.

En outre, la sollicitude de toute la communauté diocésaine ne pourra manquer envers les nombreux pauvres qui habitent dans notre ville. La sensibilité et l'attention pour les frères les plus nécessiteux, deviendront certainement actives si les communautés chrétiennes savent puiser dans l'Eucharistie, pain de vie nouvelle pour le monde, la force particulière d'amour, qui est capable de changer également la société, la rendant plus juste, plus pacifique et solidaire.

Le signe de la charité qui sera inauguré au cours du Congrès eucharistique international, représente l'engagement de la communauté diocésaine à témoigner, dans le service concret des pauvres, de la rencontre avec le Seigneur, dans le sacrement de son corps donné et de son sang versé.

6. «Repentez-vous et croyez à l'Evangile».

Que l'invitation de la liturgie des Cendres soutienne et accompagne notre chemin quadragésimal à la suite du Christ, Porte du Salut et notre Paix, pour rendre fécond de grâce le ministère de la réconciliation que, en ce temps favorable et au cours de toute l'Année Sainte, nous sommes appelés à exercer avec un dévouement spécial.

Que la Très Sainte Vierge Marie, Mère de miséricorde, qui nous précède sur la voie de la foi et de la charité, guide le pèlerinage jubilaire de l'Eglise de Rome, de ses prêtres et fidèles, afin que le don de la réconciliation du Seigneur soit accueilli avec un coeur humble, confiant et sincère.

Et je voudrais ajouter enfin que ce matin, j'ai célébré la Messe selon les intentions de tous mes confrères prêtres du clergé de Rome.



AUX CARDINAUX, AUX ARCHEVÊQUES, AUX ÉVÊQUES ET AUX PRÉLATS QUI ONT PARTICIPÉS AUX EXERCICES SPIRITUELS

Samedi 18 mars 2000



  En conclusion des Exercices spirituels, je rends grâce au Seigneur qui m'a offert la joie de partager avec vous, chers et vénérés frères de la Curie romaine, ces jours de grâce et de prière. Ce furent des jours d'écoute intense et approfondie de l'Esprit qui a parlé à nos coeurs dans le silence et dans la méditation attentive de la Parole de Dieu. Ce furent des jours de profonde expérience communautaire, qui nous ont donné l'occasion de nous sentir, comme les Apôtres au Cénacle, «tous d'un même coeur assidus dans la prière [...] avec Marie, la mère de Jésus et avec ses frères» (Ac 1,14).

Je remercie, également au nom de chacun de vous, le très cher Mgr François Xavier Nguyên Van Thuân, Président du Conseil pontifical «Justice et Paix», qui, avec simplicité et un souffle spirituel inspiré, nous a guidés dans l'approfondissement de notre vocation de témoins de l'espérance évangélique au début du troisième millénaire. Lui même témoin de la Croix au cours de ses longues années de prison au Viêt-Nam, nous a fréquemment raconté des faits et des épisodes de son douloureux emprisonnement, en nous renforçant ainsi dans la certitude réconfortante que lorsque tout s'effondre autour de nous, et peut-être également en nous, le Christ reste notre soutien indéfectible. Nous sommes reconnaissants à Mgr Van Thuân — lorsqu'il était en prison il était seulement Monsieur Van Thuân — de son témoignage, qui apparaît plus que jamais significatif en cette Année jubilaire.

Le Christ crucifié et ressuscité est notre unique véritable espérance. Forts de son aide, ses disciples deviennent également des hommes et des femmes d'espérance. Non pas d'espérances fugaces et à court terme qui laissent ensuite le coeur humain las et déçu, mais de l'espérance véritable, don de Dieu qui, soutenue d'en-haut, vise à obtenir le vrai Bien et est certaine de l'atteindre. Le monde d'aujourd'hui a également besoin de cette nécessité urgente. Le grand Jubilé, que nous célébrons, nous conduit pas à pas à approfondir les raisons de cette espérance chrétienne, qui demandent et qui encouragent une confiance croissante en Dieu et une ouverture toujours plus généreuse envers nos frères.

Que Marie, Mère de l'espérance, que hier soir le prédicateur nous a invités à contempler comme modèle de l'Eglise, nous obtienne la joie de l'espérance afin que pour nous aussi dans les moments d'épreuve, comme ce fut le cas pour les voyageurs d'Emmaüs, la présence du Christ change notre tristesse en joie. «Tristitia vostra vertetur in gaudium».

Avec ces sentiments, je vous bénis de tout coeur en vous demandant à tous de continuer à m'accompagner par la prière, en particulier lors de mon pèlerinage en Terre Sainte que, si Dieu le veut, j'aurai la joie d'accomplir la semaine prochaine.



À L'ARRIVÉE À L'AÉROPORT "QUEEN ALIA" DE AMMAN EN JORDANIE

Lundi 20 mars 2000


  Vos Majestés,

Mesdames et Messieurs les membres du gouvernement,

1. C'est dans un esprit de profond respect et d'amitié que je salue tous les habitants du Royaume hashémite de Jordanie: les membres de l'Eglise catholique et les autres Eglises chrétiennes, le peuple musulman pour lequel nous, fidèles de Jésus-Christ, avons une grande estime, ainsi que tous les hommes et les femmes de bonne volonté.

Ma visite dans votre pays et tout le voyage que je commence aujourd'hui font partie du Programme jubilaire religieux que j'accomplis pour commémorer le deux-millième anniversaire de la naissance de Jésus-Christ. Depuis le début de mon ministère en tant qu'Evêque de Rome, j'ai toujours désiré ardemment marquer cet événement en me rendant pour prier dans certains lieux liés à l'histoire du salut — des lieux qui nous parlent de la longue préparation à ce moment à travers les époques bibliques, des lieux où Notre Seigneur Jésus-Christ a vécu, ou qui sont liés à son oeuvre de rédemption. Mon esprit se tourne tout d'abord vers Ur des Chaldéens, où a commencé le chemin de foi d'Abraham. Je suis déjà allé en Egypte et au Mont Sinaï, où Dieu a révélé son nom à Moïse et lui a confié les Tables de la Loi.

2. Aujourd'hui, je suis en Jordanie, un pays qui m'est familier à travers l'Ecriture Sainte: un pays sanctifié par la présence de Jésus lui-même, par la présence de Moïse, Elia et Jean le Baptiste, ainsi que celle de saints et de martyrs de l'Eglise des débuts. Votre pays est célèbre pour son hospitalité et son ouverture à tous. Il s'agit de qualités du peuple de Jordanie que j'ai constatées à plusieurs reprises au cours de mes conversations avec le défunt Roi Hussein, et qui ont été confirmées à nouveau au cours de mes rencontres avec Votre Majesté au Vatican en septembre dernier.

Votre Majesté, je sais combien vous êtes préoccupé pour la paix dans votre pays et dans toute la région, et combien il est important pour vous que tous les Jordaniens — musulmans et chrétiens — se considèrent comme un seul peuple et une seule famille. Dans cette région du monde, il existe de graves et urgents problèmes de justice, de droits des peuples et des nations, qui doivent être résolus pour le bien de toutes les personnes concernées et comme condition pour une paix durable. Quelles que soient sa difficulté et sa durée, le processus de paix doit se poursuivre. Sans paix, il ne peut y avoir aucun développement authentique pour cette région, ni de meilleure vie pour ses populations, ni de meilleur avenir pour ses enfants. C'est pourquoi l'engagement démontré par la Jordanie pour assurer les conditions nécessaires à la paix est si important et digne de louanges.

Edifier un avenir de paix requiert une compréhension toujours plus mûre et une coopération toujours plus concrète parmi les peuples qui reconnaissent le seul véritable Dieu indivisible, créateur de tout ce qui existe. Les trois religions monothéistes historiques comptent la paix, l'harmonie et le respect pour la personne humaine parmi leurs plus hautes valeurs. Je souhaite sincèrement que ma visite renforce le dialogue entre musulmans et chrétiens, déjà fécond, qui est conduit en Jordanie en particulier à travers l'Institut royal interreligieux.

3. L'Eglise catholique, sans oublier que sa mission fondamentale est de nature spirituelle, est toujours désireuse de coopérer avec les nations et les peuples de bonne volonté pour promouvoir et faire progresser la dignité de la personne humaine. Elle le fait en particulier dans les écoles et dans ses programmes d'éducation, et à travers ses institutions caritatives et sociales. Votre noble tradition de respect pour toutes les religions garantit la liberté religieuse qui permet cela, et qui est en réalité un droit humain fondamental. Lorsque c'est le cas, tous les citoyens se sentent égaux entre eux et chacun d'eux, inspiré par ses propres convictions spirituelles, peut contribuer à l'édification de la société comme d'une maison partagée par tous.

4. L'invitation cordiale que Vos Majestés, le gouvernement et le peuple de Jordanie m'ont adressée est une expression de notre souhait commun d'une nouvelle ère de paix et de développement dans cette région. Je suis véritablement reconnaissant et, appréciant profondément votre cordialité, je vous assure de mes prières pour vous, pour tout le peuple de Jordanie, pour les personnes déplacées qui se trouvent parmi vous, et pour les jeunes, qui représentent une grande partie de la population.

Puisse Dieu tout-puissant accorder à Vos Majestés le bonheur et une longue vie!

Puisse-t-il combler la Jordanie de la prospérité et de la paix!

  VISITE DE JEAN PAUL II AU MONASTÈRE DU MONT NÉBO

Lundi 20 mars 2000


Père Ministre général,
Chers amis,

Ici, sur les hauteurs du Mont Nébo, je commence cette phase de mon pèlerinage jubilaire. Je pense à la grande figure de Moïse et à l'Alliance que Dieu établit avec lui sur le Mont Sinaï. Je rends grâce à Dieu pour le don ineffable de Jésus-Christ, qui scella la nouvelle alliance avec son propre sang et qui porta la Loi à son accomplissement. A Lui, qui est "L'Alpha et l'Oméga, le Premier et le Dernier, le Principe et la Fin" (Ap 22,13), je dédie chaque pas de ce voyage sur la terre qui fut la sienne.

En ce premier jour, je suis particulièrement heureux de vous saluer, Père Ministre général, et de rendre honneur au témoignage magnifique offert au cours des siècles à cette terre par les fils de saint François à travers le service fidèle de la Custodie dans les lieux saints. Je suis également heureux de saluer le Gouverneur de Madaba et le Maire de la Ville. Que les Bénédictions du Tout-Puissant retombent sur les habitants de cette région! Que la paix des cieux remplisse le coeur de ceux qui s'unissent à moi tout au long de mon chemin de pèlerin!


VISITE À WADI AL-KHARRAR - PRIÈRE DE JEAN PAUL II

Mardi 21 marzo 2000


  Je désire saluer chacun de vous, réunis ici pour cette brève prière. Je prie en particulier pour Sa Majesté le Roi et je le remercie à nouveau pour l'accueil que j'ai reçu ici en Jordanie
Dans l'Evangile de saint Luc, nous lisons que "la Parole de Dieu fut adressée à Jean, fils de Zacharie, dans le désert. Et il vint dans toute la région du Jourdain, proclamant un baptême de repentir pour la rémission des péchés" (Lc 3,2-3). Ici, sur le fleuve du Jourdain, où les deux rives sont visitées par des foules de pèlerins qui rendent honneur au Baptême du Seigneur, j'élève moi aussi mon coeur en prière:

Gloire à toi, O Père,
Dieu d'Abraham, Isaac et Jacob!
Tu as envoyé tes serviteurs,
les prophètes,
pour annoncer ta parole
d'amour fidèle
et appeler ton peuple au repentir.
Sur les rives du fleuve Jourdain;
tu as envoyé Jean le Baptiste;
une voix qui crie dans le désert,
envoyé dans toute la région
du Jourdain
pour préparer la voie du Seigneur,
pour annoncer la venue du Christ.

Gloire à toi, ô Christ, Fils de Dieu!
tu es venu dans les eaux
du Jourdain
pour être baptisé
par la main de Jean.
Sur toi l'Esprit est descendu
comme une colombe.
Au-dessus de toi
les cieux se sont ouverts,
et la voix du Père a retenti:
"Celui-ci est mon Fils bien-aimé!"
Du fleuve béni par ta présence
tu es parti pour baptiser
non seulement avec l'eau
mais avec le feu et l'Esprit Saint.

Gloire à toi, ô Esprit Saint,
Seigneur et Dispensateur de vie!
Par ta puissance,
l'Eglise est baptisée,
sombrant avec le Christ
dans la mort
et s'élevant avec lui
à la vie nouvelle.
Par ta puissance,
nous somme libérés du péché
pour devenir les enfants de Dieu;
le corps glorieux du Christ.
Par ta puissance,
toute peur est vaincue,
et l'Evangile de l'amour est prêché
dans tous les coins de la terre,
pour la gloire de Dieu,
le Père, le Fils et le Saint-Esprit;
à lui toute gloire
en cette année du Jubilé,
et dans tous les siècles à venir.
Amen.

Je désire remercier tous ceux qui ont participé et tous ceux qui ont contribué à l'organisation.

J'adresse un remerciement particulier aux patriarches, aux évêques, aux prêtres et aux religieuses. Prier avec la communauté catholique en Jordanie a été une expérience émouvante.

Je salue cordialement les représentants des autres communautés venus ici de nombreuses autres parties du Moyen-Orient. Je suis reconnaissant à chacun d'entre vous.

Je suis particulièrement proche des enfants et des jeunes. Sachez que l'Eglise et le Pape placent une grande confiance en vous!

J'adresse un salut particulier à Son Altesse royale le Prince Mohammed.

Dans mes prières, je me souviendrai du peuple de Jordanie tout entier - chrétiens et musulmans - et de manière spéciale des malades et des personnes âgées.

Avec gratitude, j'invoque d'abondantes bénédictions sur Son Altessse le roi et sur toute la nation.

Que Dieu vous bénisse tous! Que Dieu bénisse la Jordanie!

Que saint Jean-Baptiste protège l'Islam, tout le peuple de la Jordanie et tous ceux qui ont participé à cette célébration, une célébration mémorable! Je vous suis reconnaissant à tous.

Merci.


À L'ARRIVÉE À L'AÉROPORT "BEN GOURION" DE TEL AVIV EN ISRAËL

   Mardi 21 mars 2000



Monsieur le Président et Madame Weizman,
Monsieur le Premier Ministre et Madame Barak,
Chers frères israéliens,
Excellences, Mesdames et Messieurs,

1. Hier, du sommet du Mont Nébo, j'ai regardé au-delà de la vallée du Jourdain vers cette terre bénie. Aujourd'hui, c'est avec une profonde émotion que je foule le sol du pays où Dieu a choisi "d'habiter parmi nous" (Jn 1,14 cf. Ex Ex 40,34-35 1R 8,10-13) et permis à l'homme de le rencontrer plus directement.

En cette année du deux-millième anniversaire de la Naissance de Jésus-Christ, j'ai désiré ardemment venir ici et prier dans les lieux les plus importants qui, depuis les temps reculés, ont été le théâtre des interventions de Dieu et des miracles qu'il a accomplis. "Toi le Dieu qui fait merveille, tu fis savoir parmi les peuples ta force" (Ps 77 [76] 15).

Monsieur le Président,

je vous remercie de votre accueil chaleureux, et à travers votre personne, je salue tout le peuple de l'Etat d'Israël.

2. Ma visite est à la fois un pèlerinage personnel et un voyage spirituel de l'Evêque de Rome aux origines de notre foi dans le "Dieu d'Abraham, d'Isaac et de Jacob" (Ex 3,15). Elle fait partie d'un pèlerinage plus vaste de prière et d'action de grâce qui m'a conduit d'abord au Mont Sinaï, la Montagne de l'Alliance, le lieu de la révélation décisive qui a formé successivement l'histoire du salut. A présent, j'ai le privilège de visiter certains des lieux les plus étroitement liés à la Vie, à la Mort et à la Résurrection de Jésus-Christ. Le long de chaque étape du chemin, je suis mû par un sens profond de Dieu qui nous a précédés et nous a conduits, qui veut que nous l'honorions en esprit et en vérité, que nous reconnaissions les différences qui existent entre nous, mais également que nous reconnaissions dans chaque être humain l'image et la ressemblance du Créateur unique du ciel et de la terre.


3. Monsieur le Président, vous êtes un homme de paix et un artisan de paix. Nous savons tous combien le besoin de paix et de justice est urgent, non seulement pour Israël, mais aussi pour toute la région. De nombreuses choses ont changé dans les relations entre le Saint-Siège et l'Etat d'Israël depuis que mon prédécesseur le Pape Paul VI est venu ici en 1964. L'établissement de relations diplomatiques entre nous en 1994 a scellé nos efforts en vue d'inaugurer une ère de dialogue sur des questions d'intérêt commun comme la liberté religieuse, les relations entre l'Eglise et l'Etat et, plus généralement, les relations entre chrétiens et juifs. Sur un autre niveau, l'opinion mondiale suit avec une étroite attention le processus de paix qui concerne tous les peuples de la région, engagée dans la difficile recherche de la paix durable et d'une justice pour tous. Grâce à une nouvelle ouverture réciproque, les chrétiens et les juifs doivent accomplir ensemble des efforts courageux pour éliminer toute forme de préjudice. Nous devons toujours et partout nous efforcer de présenter le véritable visage des juifs et du judaïsme, de même que celui des chrétiens et du christianisme, et cela à tous les niveaux des comportements, des enseignements et de la communication (cf. Discours à la communauté juive de Rome, 13 avril 1986, n. 5).


4. Mon voyage est donc un pèlerinage, dans un esprit d'humble gratitude et d'espérance, aux origines de notre histoire religieuse. Il s'agit d'un tribut aux trois traditions religieuses qui coexistent sur cette terre. Cela fait longtemps que je voulais rencontrer les fidèles des communautés catholiques dans leur riche diversité, et les membres des diverses Eglises et communautés chrétiennes présentes en Terre Sainte. Je prie pour que ma visite serve à encourager un approfondissement du dialogue interreligieux qui conduira les juifs, les chrétiens et les musulmans à rechercher dans leurs croyances respectives et dans la fraternité universelle qui unit tous les membres de la famille humaine, la motivation et l'espérance d'oeuvrer pour la paix et la justice que les populations de Terre Sainte n'ont pas encore, et à laquelle ils aspirent si profondément. Le Psalmiste nous rappelle que la paix est un don de Dieu: "J'écoute. Que dit Dieu? Ce que dit Yahvé, c'est la paix pour son peuple et ses amis, pourvu qu'ils ne reviennent pas à leur folie" (Ps 85,8). Puisse la paix être le don de Dieu à la terre qu'il a choisi d'habiter!


  VISITE À AL-MAGHTAS

Mardi 22 mars 2000



Excellence,
Chers amis,

Je suis reconnaissant pour cette occasion de visiter un lieu aussi imprégné d'histoire. Pendant des milliers d'années, cette zone autour de Jéricho a été habitée par l'homme. Près d'ici se trouvent les vestiges de la ville la plus antique du monde. Toutefois, sa mémoire devient encore plus riche si nous nous référons aux Saintes Ecritures qui décrivent Jéricho comme un lieu qui porte l'empreinte non seulement de l'homme, mais de Dieu lui-même.

Avec les yeux de l'âme, je vois Jésus s'approcher des eaux du Jourdain, non loin d'ici, pour être baptisé par Jean le Baptiste (cf. Mt 3,13); je vois Jésus aller vers la Ville Sainte où il mourra et il ressuscitera; je le vois ouvrir les yeux de l'aveugle le long de la route (cf. Lc 18,35-43).

Aujourd'hui, Jéricho est devenu une oasis florissante dans le désert. Que cette ville si riche de mémoire soit également riche de promesses! Que son développement annonce l'espérance de cet avenir plus pacifique que les habitants de ce lieu et tous les peuples de cette Terre désirent depuis si longtemps!

Que Dieu vous bénisse tous!

À L'ARRIVÉE À L'HÉLIPORT DE BETHLÉEM DANS LES TERRITOIRES AUTONOMES PALESTINIENS

Mercredi 22 mars 2000



Monsieur le Président Arafat,
Excellences,
Chers amis Palestiniens,

1. "Ici, de la Vierge Marie, Jésus-Christ est né": ces paroles, inscrites sur le lieu où, selon la tradition, Jésus est né, sont le motif du grand Jubilé de l'An 2000. Elles sont le motif de ma visite d'aujourd'hui à Bethléem. Elles sont la source de la joie, de l'espérance et de la bonne volonté qui, pendant deux millénaires, ont rempli d'infinis coeurs humains en entendant le nom de "Bethléem".

Des personnes de tout lieu se tournent vers cet endroit unique de la terre avec une espérance qui transcende tous les conflits et les difficultés. Bethléem - où le choeur des Anges chantait: "Gloire à Dieu au plus haut des cieux et paix sur terre aux hommes..." (Lc 2,14) - se présente, en chaque lieu et à chaque époque, comme la promesse du don de la paix de la part de Dieu. Le Message de Bethléem est la Bonne Nouvelle de la réconciliation entre les hommes, de la paix à chaque niveau de la relation entre individus et nations. Bethléem est le carrefour universel où tous les peuples peuvent se rencontrer pour édifier ensemble un monde qui soit à la hauteur de notre dignité humaine et de notre destin. Le Musée de la Nativité, inauguré récemment, montre comment la célébration de la naissance du Christ est devenue une partie de la culture et de l'art des peuples, partout dans le monde.


2. Monsieur Arafat, en vous remerciant de l'accueil cordial que vous m'avez réservé au nom de l'Autorité et du Peuple palestinien, j'exprime tout mon bonheur d'être ici aujourd'hui. Comme puis-je ne pas prier afin que le don divin de la paix devienne toujours plus une réalité pour tous ceux qui vivent sur cette terre, marquée de façon unique par les interventions de Dieu? Paix pour le peuple palestinien! Paix pour tous les peuples de la région! Personne ne peut ignorer combien le peuple palestinien a dû souffrir au cours des dernières décennies. Votre tourment est présent aux yeux du monde. Il a duré pendant trop longtemps.

Le Saint-Siège a toujours reconnu que le peuple palestinien a le droit naturel de posséder une patrie et le droit de pouvoir vivre en paix et sereinement avec les autres peuples de cette région (cf. Lettre apostolique Redemptionis anno, 20 avril 1984). Au niveau international, mes prédécesseurs et moi-même avons plusieurs fois proclamé que l'on n'aurait pas pu mettre fin au triste conflit en Terre Sainte sans de solides garanties pour les droits de tous les peuples concernés, sur la base de la loi internationale et des importantes résolutions et déclarations des Nations unies.

Nous devons tous continuer à agir et à prier pour le succès de chaque effort authentique visant à apporter la paix sur cette terre. Ce n'est qu'avec une paix juste et durable - qui n'est pas imposée mais garantie par des négociations - que les aspirations palestiniennes légitimes seront satisfaites. Alors seulement, la Terre Sainte verra la possibilité d'un nouvel avenir lumineux, qui ne sera plus perdu en rivalités et en conflits, mais solidement fondé sur la compréhension et la coopération pour le bien de tous. Le résultat dépend en large mesure de la disponibilité courageuse des responsables du destin de cette partie du monde à adopter de nouvelles attitudes de compromis ou d'acceptation des exigences de justice.


3. Chers amis, je suis pleinement conscient des grands défis auxquels les autorités et le peuple palestinien doivent faire face dans chaque domaine du développement économique et culturel. J'adresse en particulier mes prières à ces Palestiniens - musulmans et chrétiens - qui sont encore privés d'un logement, de la place qui leur revient dans la société et de la possibilité d'une vie de travail normale. Je souhaite que ma visite d'aujourd'hui au "Camp de réfugiés de Deheisheh" serve à rappeler à la Communauté internationale la nécessité d'une action décisive pour améliorer la situation du peuple palestinien. J'ai été particulièrement heureux de l'acceptation unanime de la part des Nations unies de la Résolution sur Bethléem 2000, qui engage la Communauté internationale à contribuer au progrès de cette région et à l'amélioration de conditions de paix et de réconciliation dans l'un des lieux les plus aimés et significatifs de la terre.

La promesse de paix faite à Bethléem ne deviendra une réalité pour le monde que lorsque la dignité et les droits de tous les êtres humains créés à l'image de Dieu (cf. Gn 1,26) seront reconnus et respectés.

Aujourd'hui et à jamais le peuple palestinien est présent dans mes prières à Celui entre les mains duquel est déposé le destin du monde. Puisse le Très-Haut illuminer, soutenir et guider tout le peuple palestinien le long du chemin de la paix!





Discours 2000 - Lundi 6 mars 2000