Discours 2000 - Vendredi, 7 avril 2000


AUX PÈLERINS VENUS À ROME À L'OCCASION DE LA BÉATIFICATION DE CINQ SERVITEURS DE DIEU

Lundi 10 avril 2000


  Très chers frères et soeurs!

1. Je suis heureux de vous rencontrer à nouveau, vous qui êtes venus ici de diverses parties du monde pour la béatification de Mariano de Jésus Euse Hoyos, Franz Xaver Seelos, Anna Rosa Gattorno, Marie Elisabeth Hesselblad et Mariam Thresia Chiramel Mankidiyan. Je vous salue tous avec affection: évêques, prêtres, soeurs, religieux, ainsi que les nombreux fidèles laïcs.
Alors que nous prolongeons la joie de la célébration d'hier, nous avons l'opportunité de tourner notre regard, avec une vénération accrue, vers les nouveaux bienheureux, afin d'approfondir certains aspects de leur témoignage.

2. Je désire saluer cordialement tous les pèlerins venus ici pour participer à la béatification du prêtre colombien Mariano de Jésus Euse Hoyos. Je salue les cardinaux, les évêques, les prêtres et les fidèles colombiens, qui rendent grâce à Dieu pour les merveilles qu'il a opérées à travers le Père Marianito.

Prêtre profondément dévoué à sa mission, il fut toujours guidé par une foi solide, enracinée dans la vie et engagée en faveur du prochain. Il fut miséricordieux et très proche de tous, en particulier des pauvres et des indigents. Sa réputation est toujours vivante parmi vous et constitue un exemple à imiter, en particulier au cours de ce moment crucial de l'histoire de votre patrie bien-aimée.

Je voudrais que la figure rayonnante du bienheureux Mariano Euse apparaisse aux yeux de toute la société colombienne comme "un don de paix" dans le cadre de cette Année jubilaire. La Colombie n'obtiendra la paix que si elle respecte toujours et en tout lieu le droit à la vie, sacré et inviolable. La paix, don de Dieu, est également un devoir de l'homme. C'est pourquoi tous les Colombiens, sans aucune exception, doivent collaborer pour l'édifier, en refusant toute forme de violence, en luttant contre la pauvreté, la faim, le chômage, les conflits armés, les enlèvements de personnes, le trafic de drogue et la dégradation de l'environnement. Que l'exemple du Père Marianito nous aide à être toujours plus conscients du fait que la paix et le développement intégral et solidaire doivent aller constamment de pair!

3. Je souhaite une cordiale bienvenue aux évêques des Etats-Unis et d'Allemagne, ainsi qu'aux membres de la Congrégation rédemptoriste et à tous les pèlerins présents à la béatification du Père Franz Xaver Seelos. Dans son ministère sacerdotal et dans son apostolat missionnaire, le Père Franz Xaver était attentif à discerner les exigences spirituelles des communautés qu'il servait et son dévouement à la prédication et à la célébration des sacrements ramena de nombreuses personnes vers le Christ.

En cette année du grand Jubilé, que l'exemple du bienheureux Franz Xaver inspire toujours plus de jeunes à répondre avec générosité à l'exhortation du Christ à s'engager dans la tâche de l'évangélisation, à travers le sacerdoce et la vie religieuse.

4. Dans une société comme la nôtre, aspirant souvent aux biens matériels et tentée d'oublier Dieu, Bien Suprême, la bienheureuse Anna Rosa Gattorno, lance le défi d'une vie totalement consacrée à Lui et à nos frères les plus petits et les plus pauvres. Les douleurs et les sacrifices qui marquèrent son mariage et sa maternité l'appelèrent très tôt à embrasser, avec une singulière intensité de foi et d'amour, Jésus crucifié, afin de Le suivre de toute sa personne. L'Institut des "Filles de Sainte-Anne, Mère de Marie Immaculée" qu'elle a fondé est le fruit de sa synthèse exemplaire entre l'abandon à la Providence et l'engagement permanent pour le prochain. A sa mort, en 1900, Mère Rosa laissera trois mille cinq cents soeurs, dans divers pays du monde.

Sa force fut toujours la communion eucharistique quotidienne et l'union passionnée avec le Christ crucifié et glorieux. La nouvelle bienheureuse nous adresse à tous un appel puissant à aimer, à défendre et à promouvoir la vie, en nous montrant la profondeur et la tendresse de l'amour divin envers chaque créature.

5. C'est pour moi un grand plaisir de souhaiter la bienvenue aux soeurs de l'Ordre du Très-Saint-Sauveur et aux pèlerins provenant de Suède et d'autres pays à l'occasion de la béatification de soeur Marie Elisabeth Hesselblad. J'étends en particulier mon salut chaleureux aux fidèles luthériens qui sont venus jusqu'ici pour cet événement. La bienheureuse Elisabeth nous enseigne à nous adresser à la croix salvatrice du Christ, source de force dans les moments difficiles.

Son engagement oecuménique, sa charité concrète et sa profonde spiritualité sont un modèle pour tous les disciples du Christ, en particulier pour ceux qui vivent la vie consacrée. A travers l'intercession d'Elisabeth, que la cause de l'unité des chrétiens continue à accomplir des progrès et que son oeuvre et son charisme rappellent aux chrétiens d'Europe les racines évangéliques uniques de leur culture et de leur civilisation.

6. J'étends mes salutations cordiales aux évêques d'Inde, aux membres de la Congrégation de la Sainte-Famille ainsi qu'aux prêtres, aux religieux et aux laïcs qui se réjouissent de la béatification de soeur Mariam Thresia Chiramel Mankidiyan. La bienheureuse Mariam Thresia se consacra généreusement à la pratique des conseils évangéliques et à une intense vie de prière, qui ne lui épargna pas les souffrances, mais qui la soutint dans ses nombreuses oeuvres caritatives et dans sa détermination à aider ceux qui s'étaient égarés. A travers son intercession, que l'Eglise qui est en Inde soit bénie par une croissance des vocations à la vie religieuse, imprégnée par l'esprit de prière et la charité.

7. Très chers frères et soeurs, la charité divine a ajouté cinq autres noms à la longue liste de saints et de bienheureux qui se tisse depuis deux millénaires, de génération en génération. Alors que nous les admirons et que nous les vénérons, imitons-en la foi, afin que la grâce du Christ Rédempteur puisse accomplir en chacun son oeuvre sanctificatrice. De retour dans vos pays et dans vos communautés, soyez les témoins des grandes choses que vous avez entendues et vues.

Je vous donne avec affection ma Bénédiction, que j'étends volontiers à vos proches et à toutes les personnes qui vous sont chères.


RENCONTRE AVEC LES JEUNES DU DIOCÈSE DE ROUEN À L'OCCASION DU PÈLERINAGE JUBILAIRE À ROME

Vendredi, 14 avril 2000




Cher Frère dans l’Épiscopat,
Chers jeunes du diocèse de Rouen,

Avec joie, je vous accueille à l’occasion de votre pèlerinage jubilaire à Rome, qui est à la fois un temps de retraite, de réflexion et de prière. Je salue cordialement toutes les personnes qui vous accompagnent dans votre démarche, qui vous soutiennent dans votre croissance humaine et spirituelle, vous aidant à répondre aux questions que vous vous posez.

Votre séjour dans la ville de Pierre et de Paul vous permet de découvrir que l’Église a une histoire et une tradition, et qu’elle est un peuple vivant, animé par l’Esprit Saint. En accueillant le témoignage de foi des premières communautés chrétiennes, à votre tour, vous êtes invités à être des témoins et à prendre pleinement votre place au sein du peuple de Dieu. L’Église compte sur vous; elle a besoin de votre jeunesse, de votre générosité et de votre dynamisme, afin de devenir toujours davantage le peuple que Dieu aime et que se lève une espérance nouvelle pour le monde.

Par la prière personnelle et communautaire, par les sacrements, par les échanges que vous pouvez avoir, par les visites de lieux significatifs de l’histoire de l’Église et des richesses artistiques de Rome, vous connaîtrez davantage le Christ et son Église, et vous trouverez les moyens de témoigner de la Bonne Nouvelle au milieu de vos camarades. Puissiez-vous être ces témoins dont le nouveau siècle a tant besoin! Il vous faudra, certes, du courage et de l’audace pour aller parfois à contre-courant des propositions séduisantes du monde actuel, et pour vous comporter conformément aux exigences évangéliques de l’amour vrai. Mais vous découvrirez que la vie avec le Christ, la recherche de la Vérité, la pratique des valeurs humaines et morales fondamentales, le respect de soi et des autres, sont les chemins de l’authentique liberté et du véritable bonheur. Pour réaliser l’idéal que vous portez en vous, demandez à des adultes de vous montrer le chemin et de vous aider à avancer!

Le Jubilé est une occasion particulièrement importante pour faire l’expérience de l’amour miséricordieux de Dieu qui, en nous donnant son pardon, nous ouvre un avenir nouveau et nous communique la plénitude de la vie divine en se faisant pour nous nourriture dans l’Eucharistie. N’ayez pas peur de revenir sans cesse au Christ, source de la Vie! Il veut vous soutenir dans votre démarche de conversion, vous combler de grâce et vous donner sa joie! Dans la période présente de votre existence, vous vous interrogez légitimement sur votre avenir. Vous manifestant sa confiance, Jésus pose sur vous son regard et il vous appelle à faire de votre existence quelque chose de beau, en faisant fructifier les talents qui vous ont été confiés, pour le service de l’Église et de vos frères, ainsi que pour la construction d’une société plus solidaire, plus juste et plus pacifique.

Le Christ vous appelle à placer votre espérance en Lui et à le suivre dans la voie du mariage, du sacerdoce ou de la vie consacrée. Dans le silence de votre coeur, n’ayez pas peur d’écouter le Seigneur vous parler! Par les prêtres, les religieux et religieuses, et les laïcs, l’Église est à vos côtés pour vous aider à discerner ce qui correspond à votre vocation authentique. Jésus vous donnera la grâce nécessaire pour répondre à son appel. Il vous procurera la joie profonde des véritables disciples.

À tous, je souhaite une bonne montée vers Pâques. Que votre pèlerinage jubilaire ravive en vous le désir de vivre intensément le grand mystère du Christ mort et ressuscité ! Je vous accorde volontiers, ainsi qu’à toutes les personnes qui vous sont chères, la Bénédiction apostolique.




À L'AMBASSADEUR D'ARGENTINE PRÈS LE SAINT SIÈGE LORS DE LA REMISE DES LETTRES DE CRÉANCE

Vendredi 14 avril 2000,




Monsieur l'Ambassadeur,

1. C'est avec joie que je reçois les Lettres qui vous accréditent comme Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de la République d'Argentine près le Saint-Siège. Je vous remercie sincèrement des paroles que vous avez bien voulu m'adresser, qui sont un signe des bonnes relations qui existent entre le Siège apostolique et cette noble nation d'Amérique du Sud, dont les habitants, comme vous l'avez remarqué, conservent de profondes valeurs humaines dans leurs traditions et se sentent profondément enracinés dans la foi catholique, de laquelle émane le sens de la vie et des orientations morales ayant des répercussions bénéfiques sur la vie sociale argentine.

Je vous remercie également du salut cordial du Président de la République, M. Fernando de la Rúa, dans lequel il manifeste ses sentiments personnels et son désir d'accroître la collaboration traditionnelle entre l'Eglise et l'Etat pour l'obtention du bien commun. Je vous prie, Monsieur l'Ambassadeur, de vous faire l'interprète de ma reconnaissance auprès du premier Mandataire du pays, à qui je présente mes meilleurs voeux pour sa haute et délicate responsabilité.


2. Ces dernières années, vous avez représenté votre nation en Israël, un pays que j'ai eu l'occasion de visiter récemment lors du grand pèlerinage sur les lieux liés à l'histoire du salut. A présent, après avoir accompli votre mission diplomatique sur la terre où vécut le Fils de Dieu fait homme, vous poursuivez votre travail auprès du Siège apostolique, dans la même représentation diplomatique où vous avez prêté vos services il y a quelques années.

En ces circonstances, la nature de cette nouvelle et importante responsabilité dont votre gouvernement vous a chargé vous paraîtra familière. Il s'agit, d'une certaine façon, d'une mission tout à fait singulière, en raison du rôle que joue le Saint-Siège dans le concert des nations pour obtenir de meilleures relations entre les peuples, une coexistence plus pacifique et une collaboration plus étroite entre tous. Son activité, à caractère éminemment spirituel, s'inspire de la conviction que "la foi, en effet, éclaire toutes choses d'une lumière nouvelle et nous fait connaître la volonté divine sur la vocation intégrale de l'homme, orientant ainsi l'esprit vers des solutions pleinement humaines" (Gaudium et spes GS 11). C'est pourquoi le Saint-Siège prête non seulement attention aux Eglises particulières de chaque nation mais se soucie également du bien de tous les citoyens et cherche à faire valoir dans les forums internationaux les droits des personnes et des peuples qui font honneur à sa dignité et à la vocation élevée que Dieu a confiée à chaque être humain.


3. Je désire vous assurer, Monsieur l'Ambassadeur, que dans ma sollicitude à l'égard de toutes les Eglises je me sens très proche de l'Argentine, que je me réjouis de ses succès et que je partage ses préoccupations.

C'est pourquoi, les événements que le pays a vécu ces dernières années dans un climat de sérénité politique, sans grandes tensions, malgré un héritage de sérieuses difficultés en ce qui concerne la coexistence sociale et des situations délicates dans le domaine économique, est un motif de grande satisfaction. Il a ainsi été démontré que le pays peut affronter son propre destin dans le cadre d'une activité démocratique normale, qui assure la participation des citoyens dans les choix politiques et dans l'alternance ordonnée des dirigeants, dans la reconnaissance de l'apport que chacun doit donner à la vie de la nation. Je désire ardemment que cette maturité civique aille toujours davantage de pair avec une juste conception de la personne humaine. Une profonde conscience de ces valeurs favorisera le fait que, malgré les différences légitimes, il doit se produire une union des diverses forces politiques pour résoudre les questions les plus pressantes qui touchent les intérêts généraux de la nation et, surtout, les exigences de la justice et de la paix.

Dans cette tâche, votre gouvernement est conscient de l'importance qu'il faut accorder non seulement aux moyens propres à la technique administrative ou financière, mais également à l'éveil de la conscience des citoyens pour qu'ils participent avec espérance et esprit de collaboration au bien commun, sans que les divergences légitimes ne se transforment en antagonismes irréductibles. Il y a donc besoin d'idéaux véritablement profonds et durables ancrés dans la vérité objective sur l'être humain, et dont les plus hauts responsables de la société doivent témoigner à travers leur ardeur à servir, leur transparence et leur loyauté, contaminant, pour ainsi dire, toute la population par leur propre engagement à construire un avenir meilleur.
4. Il est également important que les programmes d'un gouvernement visant à donner une impulsion décisive à la croissance de la nation tiennent compte de l'intégralité du progrès de l'être humain, qui est à la fois individuel et social, et dans lequel les valeurs spirituelles et religieuses sont tout aussi fondamentales que les valeurs matérielles.
En effet, la croissance d'un pays ne peut pas seulement se mesurer à partir de la richesse qu'il produit, même lorsque celle-ci est une condition indispensable et, donc, un objectif à poursuivre. C'est pourquoi, lorsque l'on néglige certaines des dimensions essentielles du développement humain, on court le risque de créer de nouveaux déséquilibres et, en fin de compte, de mettre également en danger les conquêtes déjà obtenues. Votre gouvernement est conscient qu'une croissance de la production ne suffit pas si celle-ci ne se transforme pas en bien-être réel pour tous; qu'il n'existe pas de véritable bien-être sans une éducation adéquate aux divers niveaux et accessible à tous, sans un ordre social juste et une administration rapide de la justice.

De même, l'on ne construira pas un avenir solide et porteur d'espérance si l'on abandonne les valeurs et les institutions fondamentales pour chaque société, comme la famille, la protection des mineurs et des plus défavorisés et, moins encore, si l'on oublie les fondements mêmes du droit, la liberté et la dignité de la personne, en attentant à la vie dès le moment de sa conception. Comme vous l'avez indiqué, ces valeurs constituent un patrimoine commun, qui doit également être défendu dans les institutions internationales pour offrir un avenir plus riche d'espérance pour tout le genre humain.


5. Monsieur l'Ambassadeur, en cet instant où vous commencez l'exercice de la haute fonction pour laquelle vous avez été désigné, je souhaite que votre mission soit fructueuse et qu'elle contribue à consolider toujours davantage les bonnes relations existant entre le Siège apostolique et la République argentine, une tâche pour laquelle vous pourrez toujours compter sur l'accueil et l'appui de mes collaborateurs. En vous demandant de bien vouloir vous faire l'interprète auprès du Président de votre pays et du cher peuple argentin de mes sentiments et de mes voeux, je vous assure de ma prière devant le Tout-Puissant, par l'intercession de la Vierge de Luján, afin qu'il vous assiste toujours de ses dons, ainsi que votre éminente famille, le personnel de cette mission diplomatique, les dirigeants et les citoyens de votre pays, que j'évoque avec affection et sur lesquels j'invoque d'abondantes Bénédictions du Seigneur.



AUX PARTICIPANTS AU CONGRÈS INTERNATIONAL "UNIV 2000"

Lundi 17 avril 2000


  1. Chers jeunes participants au Congrès universitaire international UNIV 2000, je vous salue tous avec affection.

Je vous souhaite la bienvenue à cette rencontre, qui se déroule également cette année à l'approche des fêtes de Pâques. Mon salut, en cette Semaine Sainte de l'Année jubilaire, revêt une signification particulière: il s'agit d'une invitation cordiale à vous laisser conquérir toujours plus totalement par le Christ, Rédempteur de l'homme. Et, à travers vous, je voudrais faire parvenir cette invitation aux jeunes du monde entier. Soyez profondément persuadés que la société a besoin de trouver, dans votre témoignage cohérent de jeunes chrétiens, un profond encouragement pour un solide renouvellement spirituel et social.
[en anglais]
2. Le thème du Congrès vous invite a devenir plus conscients de votre mission de croyants à l'aube du troisième millénaire. Il est remarquablement exprimé: l'image de l'homme deux mille ans plus tard. Vous êtes invités, en quelque sorte, à vous pencher sur deux mille ans d'histoire. En effet, l'événement central de l'histoire humaine, l'avènement du Christ sur la terre, divise le cours de l'histoire en deux: avant et après le Christ. Pour les chrétiens, toutefois, la centralité de Jésus ne consiste pas seulement à mesurer l'écoulement du temps. Le Verbe incarné est le véritable protagoniste de l'histoire, et la rédemption, toujours à l'oeuvre dans le flux souvent confus des événements humains, est la clef herméneutique définitive de l'histoire.

Nous pourrions affirmer que les deux mille ans qui viennent de se terminer ne sont pas seulement deux mille ans après le Christ, mais de façon plus concrète, deux millénaires du Christ. Telle est la vérité exprimée dans le thème du grand Jubilé: "Jésus-Christ est le même hier, aujourd'hui et à jamais" (He 13,8). Malgré l'expérience humaine, souvent constituée d'échecs, de guerres, de violences et d'injustices, le Christ à vaincu le mal une fois pour toute, en clouant sur la Croix la phrase de notre condamnation (cf. Col Col 2,14). Comme l'écrit l'Apôtre Pierre: "Lui dont la meurtrissure vous a guéris" (1P 2,25). C'est pourquoi chaque moment du temps de l'histoire appartient complètement à Lui.

L'Année Sainte que nous célébrons souligne de façon particulière le fait que le Christ est le centre, ainsi que la signification de ce qui se produit, même lorsque, humainement parlant, les événements semblent éluder la loi de sa Providence. Il a lui-même promis: "Et voici que je suis avec vous pour toujours jusqu'à la fin du monde" (Mt 28,20). En sachant cela, nous sommes encouragés à agir toujours avec une grande confiance, car c'est le Christ qui oeuvre en nous et parce que nous reconnaissons qu'en Lui, Dieu porte à terme son dessein éternel de salut (cf. Ep 3,11).
[en espagnol]
3. Chers jeunes, l'"événement" de la Rédemption, nous ouvre, dans notre engagement quotidien, un horizon empli de perspectives: même face aux contradictions dont nous faisons souvent l'expérience dans le présent, nous savons que nous avançons constamment vers un but certain. Le vrai progrès tend vers le Christ, vers la pleine union avec Lui, la sainteté, qui est également la perfection humaine. C'est ce que souligne saint Paul dans l'Epître aux Ephésiens, dans laquelle il écrit que le Seigneur a tout établi "en vue de la construction du Corps du Christ, au terme de laquelle nous devons parvenir [...] à constituer cet homme parfait, qui réalise la plénitude du Christ" (Ep 4,13). C'est ainsi que les croyants lisent et interprètent l'histoire: c'est l'histoire du Christ et nous vivons avec Lui, plongés en Lui, avançant avec Lui. Le bienheureux Josemaría Escrivá écrivait: "Dans l'ordre religieux, l'homme continue à être homme et Dieu continue à être Dieu. Dans ce domaine, le sommet du progrès a déjà été atteint: c'est le Christ, l'alpha et l'oméga, le principe et la fin" (Es Cristo que pasa, 104).

Chers jeunes de l'UNIV, puisez dans cette conscience une solide confiance: l'effort du chrétien n'est jamais vain. Le chrétien n'agit jamais seul. Ne l'oubliez pas! Chaque croyant est un instrument de Dieu et le Christ agit à travers lui au moyen de l'Esprit Saint. Laissez Dieu agir en vous et à travers vous. Afin que cela se produise, sachez bien quels moyens utiliser: il s'agit des sacrements, de la prière, de la pratique des vertus, de la sanctification du travail, ainsi que de la direction spirituelle.

Vous avez besoin du Christ, mais le Christ a lui aussi besoin de vous, afin que vous le fassiez connaître aux jeunes de votre âge, avec lesquels vous partagez les expériences et les espérances. L'Eglise vous confie la mission de leur apporter la lumière de la vérité du Christ et son annonce universelle du salut. Soyez toujours disposés à penser aux autres, en vous oubliant vous-mêmes pour rapprocher vos frères de Dieu. De cette façon, vous pourrez contribuer à l'édification d'un monde meilleur et plus solidaire, car la conversion et l'engagement d'un seul constituent un germe de salut pour tous.
[en italien]
4. Très chers jeunes, je vous confie, de même que votre engagement quotidien, à Marie, Reine des Apôtres. Invoquez-la souvent et imitez-en les vertus. Elle vous aidera à connaître plus intimement Jésus et à le suivre avec une fidélité et une joie croissantes.

Je vous adresse de tout coeur, ainsi qu'aux personnes qui vous sont chères, des voeux fervents pour la sainte Pâque et, alors que j'assure chacun de mon souvenir dans la prière, je vous bénis de tout coeur.


CHEMIN DE CROIX AU COLISÉE PRÉSIDÉ PAR LE PAPE JEAN-PAUL II

VENDREDI SAINT DE L’AN 2000, ANNÉE SAINTE


MÉDITATIONS ET PRIÈRES DU PAPE JEAN-PAUL II


Prière initiale


Le Saint-Père:

Au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit.
-. Amen.

«Si quelqu'un veut marcher derrière moi, qu'il renonce à lui-même,
qu'il prenne sa croix et qu'il me suive» (Mt 16,24)

Soir du Vendredi saint.
Depuis vingt siècles,
l'Église se rassemble en cette soirée,
pour se rappeler et pour revivre
les événements de l'ultime étape
du chemin terrestre du Fils de Dieu.
Aujourd'hui, comme chaque année,
l'Église qui est à Rome
se réunit au Colisée,
pour se mettre à la suite de Jésus
qui, «portant lui-même sa croix,
sortit en direction du lieu dit : Le Crâne, ou Calvaire,
en hébreu : Golgotha» (Jn 19,17).

Nous nous trouvons ici,
convaincus que le chemin de croix du Fils de Dieu
ne fut pas le simple fait de marcher
vers le lieu de son supplice.
Nous croyons que chaque pas du Condamné,
chacun de ses gestes et chacune de ses paroles,
et aussi ce qu'ont vécu et accompli
ceux qui ont pris part à ce drame,
nous parlent continuellement.
C’est aussi dans sa souffrance et dans sa mort
que le Christ nous révèle la vérité sur Dieu et sur l'homme.

En cette année jubilaire,
nous voulons réfléchir avec une intensité particulière
sur le contenu de cet événement,
afin qu'il parle avec une force nouvelle
à nos esprits et à nos coeurs,
et qu’il devienne pour nous source de la grâce
d'une authentique participation.

Participer signifie avoir part.
Que veut dire avoir part
à la croix du Christ ?
Cela veut dire faire l'expérience dans l'Esprit Saint
de l'amour que la croix du Christ cache en elle.
Cela veut dire reconnaître, à la lumière de cet amour,
sa propre croix.
Cela veut dire la prendre sur ses épaules et,
toujours en vertu de cet amour, marcher...
Marcher tout au long de la vie, en imitant Celui qui «endura une croix, dont il méprisa l'infamie,
et qui est assis désormais à la droite du trône de Dieu» (He 12,2).

Brève pause en silence

Prions.

Seigneur Jésus Christ,
remplis nos coeurs de la lumière de ton Esprit,
afin que, te suivant sur ton ultime chemin,
nous connaissions le prix de notre rédemption
et devenions dignes de participer
aux fruits de ta passion, de ta mort et de ta résurrection.

-. Amen.
* * * * *



PREMIÈRE STATION Jésus est condamné à mort


. Adoramus te, Christe, et benedicimus tibi.
-. Quia per sanctam crucem tuam redemisti mundum.

«Es-tu le roi des Juifs ?» (Jn 18,33).
«Ma royauté ne vient pas de ce monde; si ma royauté venait de ce monde, j'aurais des gardes qui se seraient battus pour que je ne sois pas livré aux Juifs. Non, ma royauté ne vient pas d'ici» (Jn 18,36).
Pilate ajouta :
«Alors, tu es roi ?»
Jésus répondit :
«C'est toi qui dis que je suis roi. Je suis né, je suis venu dans le monde pour ceci : rendre témoignage à la vérité. Tout homme qui appartient à la vérité écoute ma voix».
Pilate répliqua :
«Qu'est-ce que la vérité ?».
À ce point, le Procureur romain considéra l'interrogatoire comme terminé. Il alla chez les Juifs et leur dit : « Moi, je ne trouve en lui aucun motif de condamnation» (cf. Jn 18,37-38).
Le drame de Pilate se cache dans la question : Qu'est-ce que la vérité ?
Ce n'était pas une question philosophique sur la nature de la vérité, mais une question existentielle sur son rapport à la vérité. C'était une tentative de se dérober à la voix de sa conscience qui lui ordonnait de reconnaître la vérité et de la suivre. L'homme qui ne se laisse pas conduire par la vérité se dispose même à émettre une sentence de condamnation à l'égard d'un innocent.

Les accusateurs devinent cette faiblesse de Pilate et c'est pourquoi ils ne cèdent pas. Avec détermination ils réclament la mort en croix. Les demi-mesures auxquelles Pilate a recours ne l'aident pas. La peine cruelle de la flagellation infligée à l'Accusé n'est pas suffisante. Quand le Procureur présente à la foule Jésus flagellé et couronné d'épines, il semble chercher une parole qui, à son avis, devrait faire céder l'intransigeance de la foule. Montrant Jésus, il dit : «Ecce homo ! Voici l'homme !»
Mais la réponse est : «Crucifie-le, crucifie-le !»
Pilate cherche alors à discuter : «Reprenez-le, et crucifiez-le vous-mêmes; moi, je ne trouve en lui aucun motif de condamnation» (cf. Jn 19,5-6).
Il est toujours plus convaincu que l'Accusé est innocent, mais cela ne lui suffit pas pour émettre une sentence d'acquittement.
Les accusateurs recourent à l'ultime argument : «Si tu le relâches, tu n'es pas ami de l'empereur. Quiconque se fait roi s'oppose à l'empereur» (Jn 19,12).
La menace est claire. Devinant le danger, Pilate cède définitivement et émet la sentence. Mais non sans faire le geste lâche de se laver les mains : «Je ne suis pas responsable du sang de cet homme; cela vous regarde !» (Mt 27,24).
C'est de cette façon que Jésus a été condamné à la mort sur une croix, Lui le Fils du Dieu vivant, le Rédempteur du monde.
Tout au long des siècles, la négation de la vérité a engendré souffrance et mort.
Ce sont les innocents qui paient le prix de l'hypocrisie humaine.
Les demi-mesures ne sont pas suffisantes. Il ne suffit pas non plus de se laver les mains.
La responsabilité pour le sang du juste demeure.
C'est pour cela que le Christ a prié avec tant de ferveur pour ses disciples de tous les temps : Père, «consacre-les par la vérité: ta parole est vérité» (Jn 17,17).


PRIÈRE

Ô Christ, toi qui as accepté une condamnation injuste,
accorde-nous, ainsi qu’à tous les hommes de notre temps,
la grâce d'être fidèles à la vérité;
ne permets pas que le poids de la responsabilité
pour la souffrance des innocents
retombe sur nous
et sur ceux qui viendront après nous.
À toi, Jésus, juste Juge,
l’honneur et la gloire pour les siècles sans fin.

-. Amen.

Tous:

Pater noster, qui es in caelis:
sanctificetur nomen tuum;
adveniat regnum tuum;
fiat voluntas tua, sicut in caelo, et in terra.
Panem nostrum cotidianum da nobis hodie;
et dimitte nobis debita nostra,
sicut et nos dimittimus debitoribus nostris;
et ne nos inducas in tentationem;
sed libera nos a malo.

Stabat mater dolorosa - Debout, la Mère douloureuse
iuxta crucem lacrimosa, - près de la Croix était en larmes
dum pendebat Filius. - devant son Fils suspendu.
* * * * *



DEUXIÈME STATION Jésus est chargé de sa croix


. Adoramus te, Christe, et benedicimus tibi.
-. Quia per sanctam crucem tuam redemisti mundum.

La croix. Instrument de mort infamante.

Il n'était pas licite de condamner à la mort de la croix un citoyen romain : c'était trop humiliant. Le moment où Jésus de Nazareth s'est chargé de la croix pour la porter sur le Calvaire marque un tournant dans l'histoire de la croix.
Signe d'une mort infamante, réservée à la catégorie la plus basse des hommes, la croix devient une clé. Désormais, avec l'aide de cette clé, l'homme ouvrira la porte des profondeurs du mystère de Dieu.
Par le geste du Christ qui accepte la croix, instrument de son dépouillement, les hommes sauront que Dieu est amour.
Amour sans limites: «Dieu a tant aimé le monde qu'il a donné son Fils unique : ainsi tout homme qui croit en lui ne périra pas, mais il obtiendra la vie éternelle» (Jn 3,16).
Cette vérité sur Dieu s'est révélée par la croix.
Ne pouvait-elle pas se révéler d'une autre façon ?
Peut-être que oui. Toutefois Dieu a choisi la croix.
Le Père a choisi la croix pour son Fils, et le Fils l'a prise sur ses épaules, il l'a portée sur le Calvaire et sur elle il a offert sa vie.
«Sur la croix il y a la souffrance,
sur la croix il y a le salut,
sur la croix il y a une leçon d'amour.
Ô Dieu, celui qui une fois t'a compris
ne désire rien d'autre, ne cherche rien d'autre» (Chant polonais de Carême).
La Croix est signe d'un amour sans limites !


PRIÈRE

Ô Christ, toi qui acceptes la croix de la main des hommes,
pour en faire le signe
de l'amour salvifique de Dieu pour l'homme,
accorde-nous, ainsi qu'à tous les hommes de notre temps,
la grâce de la foi en cet amour infini,
afin que, en transmettant au nouveau millénaire
le signe de la croix,
nous soyons des témoins authentiques de la Rédemption.
À toi, Jésus, prêtre et victime,
la louange et la gloire pour les siècles.

-. Amen.

Tous: Pater noster, qui es in caelis:
sanctificetur nomen tuum;
adveniat regnum tuum;
fiat voluntas tua, sicut in caelo, et in terra.
Panem nostrum cotidianum da nobis hodie;
et dimitte nobis debita nostra,
sicut et nos dimittimus debitoribus nostris;
et ne nos inducas in tentationem;
sed libera nos a malo.

Cuius animam gementem, - Dans son âme qui gémissait,
contristatam et dolentem - toute brisée, endolorie,
pertransivit gladius. - le glaive était enfoncé.
* * * * *



Discours 2000 - Vendredi, 7 avril 2000