Discours 2000 - Lundi 22 mai 2000


  MESSAGE DU SAINT PÈRE JEAN PAUL II AU PATRIARCHE D’ANTIOCHE DES MARONITES (LIBAN)




À Sa Béatitude le Cardinal Nasrallah-Pierre SFEIR
Patriarche d’Antioche des Maronites

Informé de l’évolution des événements dans votre pays, je tiens à vous dire ma solidarité et j’invite tous les chrétiens à se sentir eux-mêmes solidaires des populations qui, au Sud-Liban, craignent pour leur avenir en raison de la situation qui s’est créée ces derniers jours.

Je me sens poussé à rappeler à tous les responsables le grave devoir qui leur incombe de respecter le droit des individus et des peuples, et d’éviter d’accomplir des actes qui mettraient en danger la vie des personnes et la convivialité entre les communautés.

Je prie Dieu de répandre sa lumière sur les esprits et les coeurs, afin que soient épargnés à toutes les populations civiles de nouveaux massacres et que soit garantie la souveraineté de chaque pays, de manière que tous puissent regarder l’avenir avec une sereine espérance.

En gage de réconfort, je vous envoie, Monsieur le Cardinal, la Bénédiction apostolique, ainsi qu’à tous les fidèles du Christ, demandant à Dieu de faire descendre l’abondance de ses Bienfaits sur tous les Libanais.

Du Vatican, le 24 mai 2000.

IOANNES PAULUS PP II



À L'AMBASSADEUR DU CONGO PRÈS LE SAINT SIÈGE À L'OCCASION DE LA PRÉSENTATION DES LETTRES DE CRÉANCE




Monsieur l'Ambassadeur,

Je suis heureux de souhaiter la bienvenue à Votre Excellence à l'occasion de la présentation des Lettres qui L'accréditent comme Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de la République du Congo auprès du Saint-Siège.

J'ai été sensible aux paroles courtoises que vous m'avez adressées et je vous en remercie vivement. Par votre entremise, il m'est agréable de saluer Son Excellence Monsieur Denis Sassou Nguesso, Président de la République, que j'aurai le plaisir de recevoir dans quelques jours. J'adresse mes voeux cordiaux au peuple congolais tout entier, priant Dieu de lui inspirer des sentiments de fraternité et de compréhension mutuelle afin que tous puissent vivre dans la paix et la sécurité et bâtir une société réconciliée et solidaire.

Dans votre allocution, vous m'avez fait part des efforts entrepris dans votre pays afin de restaurer durablement la paix civile et de permettre à tous les citoyens de jouir de leurs droits fondamentaux dans la liberté. Je me réjouis des avancées dans la recherche d'une entente entre tous les fils de la nation, comme l'accord de cessation des hostilités signé il y a quelques mois, qui a conduit à une sensible amélioration de la situation sécuritaire. Toutefois, pour consolider l'état de non-belligérence afin de parvenir à la paix véritable et durable à laquelle le peuple congolais aspire, il est nécessaire d'approfondir un dialogue sans exclusives et de bannir définitivement le recours aux armes comme moyen de résoudre les conflits politiques.

Le chemin de la concorde entre tous les Congolais sur lequel s'est engagé votre pays est aussi un chemin vers la démocratie, qui passe par la défense des libertés publiques et des droits fondamentaux de la personne et des communautés humaines. Leur respect total est la voie la plus sûre pour tisser des relations solidaires entre les citoyens d'une même nation au-delà des clivages internes, et édifier ainsi un État de droit qui assure à tous, particulièrement aux jeunes et aux personnes les plus faibles, une insertion stable dans la vie sociale ainsi que la possibilité de vivre dans la dignité. En effet, "est voué à l'échec tout projet qui tend à séparer deux droits indivisibles et interdépendants : le droit à la paix et le droit à un développement intégral et solidaire" (Message pour la Journée mondiale de la paix 2000, n. 13).

Après tant d'années de souffrance, pour parvenir à une paix véritable, il est nécessaire que le pays tout entier s'engage avec toujours plus de courage et de détermination sur les voies de la réconciliation et du pardon. L'entrée dans le nouveau millénaire est une occasion privilégiée pour travailler à rendre justice aux victimes innocentes des conflits, à éliminer les violences qui engendrent la domination des uns sur les autres et à créer une nouvelle culture de solidarité.

Pour sa part l'Église catholique, qui a été elle aussi durement touchée par la violence, s'est engagée résolument dans une pastorale qui puisse aider le peuple à se réconcilier et favoriser la guérison intérieure. Je me réjouis de savoir que les Autorités de votre pays souhaitent lui assurer toujours davantage la possibilité d'exercer librement sa mission. En se mettant inlassablement au service de la paix et de la fraternité entre les hommes, en cherchant à développer une prise de conscience plus grande des valeurs morales universelles indispensables pour affronter les situations présentes, elle accomplit sa mission évangélisatrice, partage son espérance en l'avenir et participe à l'édification sociale.

Par ailleurs, devant les graves menaces qui hypothèquent l'avenir des jeunes, l'Église catholique souhaite apporter une contribution efficace à leur formation humaine, spirituelle, morale et civique, à travers ses oeuvres d'éducation, en particulier par les écoles. Il est en effet primordial que les générations nouvelles soient éduquées avec patience et ténacité à la justice, à la paix et au respect fraternel, afin qu'elles trouvent le goût de ce qui est juste et vrai, et rejettent fermement la tentation du ressentiment et de la violence.

Par votre intermédiaire, permettez-moi, Monsieur l'Ambassadeur, d'adresser aux Évêques et à la communauté catholique de votre pays mes salutations affectueuses. Je connais les épreuves qu'ils ont endurées avec tous leurs compatriotes et je rends grâce à Dieu pour leur courage et leur fidélité à l'Évangile. Ils sont les témoins de ce que le Christ accomplit dans les coeurs, pour faire de tous des messagers de l'amour. En cette année jubilaire, je les invite à être avec toujours plus d'assurance des artisans de paix et de réconciliation, manifestant à leurs frères et à leurs soeurs que Dieu ne les a pas abandonnés, qu'il ne les a pas oubliés. Qu'ils se souviennent que le nom de chacun est gravé sur les mains du Christ, percées par les clous de la crucifixion (cf. Ecclesia in Africa ) ! Je souhaite qu'en ce moment particulier de l'histoire du peuple congolais, les catholiques unissent leurs efforts à ceux des hommes de bonne volonté pour construire une nation solidaire et prospère.

Alors que vous inaugurez votre mission auprès du Siège apostolique, je vous offre mes meilleurs voeux pour son heureux accomplissement. Soyez assuré que vous trouverez ici, auprès de mes collaborateurs, l'accueil attentif et compréhensif dont vous pourrez avoir besoin.

Sur Votre Excellence, sur le peuple congolais et sur ceux qui président à ses destinées, j'invoque de grand coeur l'abondance des Bénédictions divines.

Au Vatican, le 25 mai 2000.


  DISCOURS DU SAINT PÈRE À L'AMBASSADEUR DU KOWEIT PRÈS LE SAINT SIÈGE À L'OCCASION DE LA PRÉSENTATION DES LETTRES DE CRÉANCE



Monsieur l'Ambassadeur,

Soyez le bienvenu au Vatican; c'est pour moi un plaisir d'accueillir Votre Excellence à l'occasion de la présentation des Lettres qui L'accréditent comme Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de l'État du Koweït auprès du Saint-Siège.

Je vous remercie des salutations que vous m'avez transmises de la part de Son Altesse l'Émir Sheikh Jaber Al-Ahmad Al-Sabah. En retour, vous voudrez bien lui faire part, ainsi qu'au peuple koweitien tout entier, de mes sentiments d'estime et de mes voeux cordiaux de bonheur et de prospérité; je prie le Très-Haut d'accorder à tous de vivre dans la fraternité et la solidarité.

Je me réjouis de savoir que dans votre pays la communauté catholique jouit de la faculté de professer librement sa foi. En effet, comme j'ai souvent eu l'occasion de le déclarer, la liberté religieuse constitue le coeur même des droits humains. Dans la profession de sa religion, la personne exprime ses aspirations les plus profondes et développe ce qui lui est le plus intime : son intériorité, le sanctuaire de l'être qu'aucune personne ne peut fracturer. Aussi est-il indispensable que chacun puisse suivre sa conscience en toute circonstance et que personne ne le contraigne à agir contre elle. D'autre part, le droit à la liberté religieuse, aujourd'hui reconnu par la plupart des États, "inclut celui de manifester sa croyance, seul ou avec d'autres, en public ou en privé" (Message pour la Journée mondiale de la Paix 1999, n. 5).

La paix au Moyen-Orient, et particulièrement dans la région du Golfe, est une préoccupation constante du Saint-Siège. En effet, le recours à la guerre ne peut régler les problèmes entre les nations. Seule la voie de la paix est digne de l'homme ! Il est urgent que disparaissent tous les germes d'antagonisme qui demeurent encore. Les suites néfastes des guerres qui ont meurtri les peuples de votre région entretiennent des divisions et des tensions. Pour les dépasser, il est donc à espérer que les problèmes humains liés aux derniers conflits, en particulier le retour des prisonniers de guerre dans leurs familles, trouveront une solution rapide, afin de permettre la consolidation du nécessaire processus de réconciliation entre les peuples de la région. Je souhaite vivement que chaque nation puisse voir respecté son droit à l'existence et à la paix et vivre dans des dispositions pacifiques et solidaires à l'égard des autres.

J'ai accueilli avec intérêt, Monsieur l'Ambassadeur, ce que vous m'avez dit de l'appui apporté par votre pays au dialogue entre les musulmans et les chrétiens. L'Église catholique pour sa part s'est engagée résolument sur la voie d'une rencontre fraternelle entre les hommes afin de favoriser la paix et la solidarité entre les peuples. En progressant toujours plus dans la connaissance mutuelle et en s'engageant généreusement à promouvoir les valeurs essentielles de l'homme, comme le droit à la vie et au développement matériel et spirituel, les croyants contribuent à manifester pleinement la dimension trancendante de l'être humain et à répondre aux aspirations légitimes des personnes et des peuples pour le bien de l'humanité entière. La convivialité pacifique entre les croyants est une forme de respect du dessein de Dieu qui a voulu que les hommes constituent une seule famille et entretiennent des relations fraternelles. Chrétiens et musulmans sont appelés à unir leurs efforts pour participer à une lutte digne de l'homme, celle qui s'oppose aux désordres de ses passions, à toutes les formes d'égoïsme, aux tentatives d'asservissement du prochain et à toutes sortes de haine et de violence, c'est-à-dire à tout ce qui est à l'opposé de la paix et de la réconciliation (cf. Message pour la Journée mondiale de la Paix 1999, n. 7).

Vous me permettrez, Monsieur l'Ambassadeur, de saluer chaleureusement, par votre intermédiaire, la communauté catholique du Koweït. Unie à son Évêque, elle rend à Dieu le témoignage d'adoration qui lui est dû et ses membres participent, selon leurs compétences, au développement du pays. J'invite tous les catholiques à vivre avec une ardeur renouvelée, entre eux et avec tous, le commandement nouveau que nous a laissé le Seigneur Jésus. En cette année du grand Jubilé, je les encourage à demeurer fermes dans la foi et à la vivre dans la confiance, en mettant leur espérance en Celui qui ne cesse de guider l'humanité vers sa véritable destinée.

Au moment où vous commencez votre mission, je vous présente mes voeux les meilleurs pour la noble tâche qui vous attend. Je vous assure que vous trouverez toujours auprès de mes collaborateurs un accueil attentif et une compréhension cordiale.

Sur Votre Excellence, sur Son Altesse l'Émir de l'État du Koweït, et sur tous les Koweitiens, j'invoque de grand coeur l'abondance des Bénédictions du Tout-Puissant.

Au Vatican, le 25 mai 2000.




DISCOURS DU SAINT PÈRE À S. E. Mme CHRISTINE HEATHER BOGLE NOUVEL AMBASSADEUR DE NOUVELLE-ZÉLANDE PRÈS LE SAINT SIÈGE

Jeudi 25 mai 2000




Excellence,

C'est avec plaisir que je vous accueille au début de votre mission en tant qu'Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire près le Saint-Siège. En acceptant vos Lettres de Créance, j'étends mes salutations au Gouverneur-général, Sir Michael Hardie Boys, et au Premier ministre, Mme Helen Clark. Je vous prie de leur transmettre, ainsi qu'au peuple de Nouvelle-Zélande, mes meilleurs voeux et l'assurance de mes prières pour l'harmonie et la prospérité de la nation.

Je vous suis reconnaissant pour vos paroles d'appréciation à l'égard de l'activité diplomatique du Saint-Siège, à travers laquelle celui-ci s'efforce d'être un partenaire actif des peuples du monde dans leur recherche d'une vie pleinement humaine et dans leurs efforts en vue de leur développement et du progrès des autres. Vous avez mentionné que la paix, la justice et le respect pour les droits humains sont importants pour votre pays, et ces valeurs et objectifs sont également au centre de ce que vous avez appelé la perspective unique du Saint-Siège sur les questions internationales.

L'activité du Saint-Siège sur la scène internationale découle d'une perspective qui est le résultat d'une vision spécifique de la personne humaine, et de la conviction selon laquelle lorsque cette vision est amoindrie ou abandonnée, ce sont les bases mêmes de la société qui chancellent. Il s'agit d'une perspective fondée sur le respect de la dignité inaliénable de chaque être humain, une dignité intrinsèque à la vie elle-même et non pas accordée par un individu, groupe ou Etat. Il s'agit d'une vision qui exige la perfection de la liberté, mais de la liberté liée à la vérité, en particulier à la vérité de la personne humaine, qui seule constitue une base certaine pour une activité politique et diplomatique constructive. Partout, même dans un pays comme le vôtre, la liberté est un acquis fragile; et le siècle dernier nous a enseigné combien la liberté est facilement minée lorsque la vérité de la personne humaine est niée.

Les mensonges les plus destructeurs sur la personne humaine que le XXème siècle ait produit étaient issus de visions matérialistes du monde et de la personne. Les systèmes totalitaires ont certes sombré, mais de nouvelles formes de matérialisme sont apparues, sans doute moins fondées sur l'idéologie et moins spectaculaires dans leur manifestation, mais ayant néanmoins des effets destructeurs sur les personnes et sur le tissu de la société. Nous apprenons rapidement combien il est vital de respecter l'écologie de la nature, si nous voulons éviter de provoquer de graves dommages au monde que les générations futures recevront de nous. Encore plus urgent, et plus difficile, est le besoin d'apprendre à respecter l'écologie du monde humain, par lequel j'entends la vérité de la personne humaine et ses implications sociales. L'action du Saint-Siège dans le domaine international provient de sa conviction selon laquelle certains éléments fondamentaux de cette écologie humaine doivent absolument être compris et défendus.

L'un de ces éléments est la famille, la cellule de base de la société humaine et l'indicateur le plus fiable de la santé et de la stabilité d'une nation. Les tentatives visant à définir la famille comme autre chose qu'une union à vie solennelle entre un homme et une femme, visant à mettre au monde et à éduquer des enfants, s'avérera nécessairement destructrice. Cette revendication n'est pas un attachement à un modèle culturel dépassé qui refuse de voir la réalité en face, mais précisément une reconnaissance d'une vérité fondamentale: la famille est la cellule de base de la société humaine, non seulement parce que c'est là que la vie humaine naît, mais parce que c'est là que les enfants apprennent le mieux les dispositions et les qualités dont ils ont besoin pour devenir des adultes mûrs capables de contribuer à la vie commune et au bien de la société. C'est au sein de la famille qu'ils apprennent le mieux ce que signifie être une personne dotée d'intelligence et de volonté, appelée à la liberté et aux responsabilités, et défiée par des droits et des devoirs. Les faits démontrent une logique claire et certaine: les familles faibles conduisent à une société incapable de soutenir ses membres, en particulier les jeunes, dans l'édification du bien commun. Les individus et même les structures sociales sont affaiblies par des formes d'égoïsme et de désir d'évasion de la réalité, qui laissent peu de place à l'engagement, à l'amour généreux, et à la solidarité envers les membres les plus faibles de la société.

Un autre élément-clé de l'écologie humaine est l'inviolabilité de la vie humaine, en particulier au début et au terme de celle-ci. Le Saint-Siège proclame avec insistance que le premier droit et le plus fondamental de tous les droits humains est le droit à la vie, et que lorsque ce droit est nié, tous les autres droits sont menacés. L'affirmation selon laquelle l'avortement et l'euthanasie sont des droits humains qui méritent des mesures législatives est considérée par le Saint-Siège comme une contradiction qui équivaut à une négation de la dignité humaine et de la liberté que la loi est sensée protéger. Une société sera jugée sur la façon dont elle traite ses membres les plus faibles; et parmi les membres les plus vulnérables figurent certainement l'enfant à naître et la personne mourante. Une vision matérialiste de la personne humaine n'accordera que peu de valeur et de dignité à l'un ou à l'autre. Ce qui est alors revendiqué comme une victoire des droits humains n'est en réalité que la sanction d'une liberté séparée de la vérité. En dernière analyse, il ne s'agit pas de liberté, mais d'une descente vers l'arbitraire et la domination des faibles par les forts. Le Saint-Siège espère donc une profonde réflexion de la part des communautés politiques et diplomatiques sur les défis importants qui accompagnent l'ouverture du nouveau millénaire: le défi d'assurer une nouvelle floraison de l'esprit humain, au moyen d'une authentique culture de la liberté, de l'espérance et de la confiance (cf. Discours à la V Assemblée générale de l'Organisation des Nations unies, 5 octobre 1995, n. 16).

Excellence, tandis que vous prenez votre place dans la communauté des diplomates accrédités près le Saint-Siège, je vous assure de la collaboration des divers bureaux et institutions de la Curie romaine. Puisse votre mission servir à renforcer les liens d'amitié et de coopération entre votre gouvernement et le Saint-Siège. Sur vous, ainsi que sur vos concitoyens néo-zélandais, j'invoque une abondance de Bénédictions de Dieu tout-puissant.

 



À S.E. M. HARRY OSEI BLAVO, NOUVEL AMBASSADEUR DU GHANA PRÈS LE SAINT SIÈGE

Jeudi 25 mai 2000



Monsieur l'Ambassadeur,

Je vous souhaite une chaleureuse bienvenue tandis que j'accepte les Lettres de Créance qui vous nomment Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de la République du Ghana près le Saint-Siège. Votre présence ici aujourd'hui évoque le souvenir de la première visite pastorale qu'en tant qu'Evêque de Rome, j'ai accomplie sur le continent africain: ce voyage m'a conduit dans votre pays, où j'ai eu la chance de faire l'expérience personnelle de l'hospitalité, de la cordialité et des riches traditions culturelles du peuple du Ghana. Ayant à l'esprit ces vifs souvenirs, je vous suis reconnaissant des salutations et des meilleurs voeux que vous me transmettez de la part du Président Jerry John Rawlings. Je réponds volontiers à ces sentiments cordiaux en vous priant de transmettre aux Autorités et au peuple du Ghana l'expression de mon estime et l'assurance de mes prières pour le bien-être et la prospérité de votre pays.

La famille humaine se trouve à l'aube d'un nouveau millénaire et est profondément réconfortée par les incroyables progrès réalisés, en particulier au cours des cent dernières années, dans le domaine social, économique et scientifique. Toutefois, en dépit de ces nombreux progrès culturels et technologiques, il subsiste d'importants domaines dans la vie contemporaine qui n'ont vu que peu d'amélioration ou qui ont même connu un déclin. Je pense en particulier au besoin urgent de faire face aux défis de l'inégalité et de la pauvreté à travers des structures efficaces de solidarité et de coopération mondiales parmi les nations. Comme vous l'avez remarqué, Excellence, il est nécessaire de restructurer les relations économiques internationales afin que les moins favorisés, en Afrique et ailleurs, puissent recevoir une part équitable des ressources du monde; et il est également nécessaire de promouvoir des voies de dialogue, en vue de résoudre de façon pacifique les crises au sein des pays et entre les nations. De façon très concrète, la voie que la famille des nations et la famille humaine doivent emprunter au XXI siècle est la voie de la solidarité et de la paix.

En effet, sans solidarité, il ne peut y avoir de véritable paix. Comme je l'ai écrit dans mon Message pour la Journée mondiale de la Paix 2000, "est voué à l'échec tout projet qui tend à séparer deux droits indivisibles et interdépendants: le droit à la paix et le droit au développement intégral et solidaire" (n. 13). Il semblerait que le temps est venu de réfléchir sur la nature de l'économie - nationale et internationale - et sur les objectifs qu'elle devrait véritablement servir. C'est pourquoi, au niveau mondial, tant dans les nations riches que dans les pays en voie de développement, on devrait reconnaître que les pauvres ont le droit de recevoir une part des biens matériels de la terre et de promouvoir l'utilisation de leur capacité à travailler, "afin de créer un monde plus juste et plus prospère pour tous. Le progrès des pauvres est une grande chance pour la croissance morale, culturelle et même économique de toute l'humanité" (Encyclique Centesimus annus CA 28). Il est nécessaire de reconsidérer "la conception même du bien-être, afin qu'elle ne soit pas dominée par une étroite perspective utilitariste, laissant un espace tout à fait marginal et résiduel à des valeurs comme la solidarité et l'altruisme" (Message pour la Journée mondiale de la Paix, n. 15).

Dans le même temps, le siècle qui vient de se terminer a donné d'amples exemples de la violence, de la destruction et de la mort, fruits du recours aux armes des peuples et des nations, plutôt qu'au dialogue, lorsque l'on préfère la guerre au chemin souvent plus difficile de la compréhension et du respect mutuels. Si l'on veut une paix juste et durable, fondée sur les aspirations légitimes des peuples et des groupes sociaux, il faut la rechercher dans le cadre du dialogue: non seulement le dialogue pour la paix est possible, mais il est le seul chemin digne de l'homme. Paradoxalement, après la violence et la destruction, la nécessité du dialogue subsiste; le recours aux armes n'a jamais résolu un conflit ou un désaccord, mais retarde simplement son véritable règlement - et comporte toujours des conséquences tragiques, comme nous le constatons aujourd'hui dans diverses parties d'Afrique. Le dialogue authentique présuppose une recherche honnête de ce qui est vrai, bien et juste pour chaque personne, chaque groupe et chaque société; il s'agit d'un effort sincère pour identifier ce que les personnes ont en commun en dépit des tensions, des oppositions et des conflits. De plus, le dialogue authentique devient de plus en plus intimement lié à la solidarité au fur et à mesure que les peuples et les nations de la terre reconnaissent leur interdépendance mutuelle dans les domaines économiques, politiques et culturels (cf. Message pour la Journée mondiale de la Paix 1983, n. 6).

Le Saint-Siège joue un rôle actif sur la scène internationale et de façon spécifique pour promouvoir un tel dialogue et une telle solidarité. Comme vous l'avez mentionné, Excellence, l'Eglise elle-même est engagée avec ardeur à la cause de la paix. En effet, son Fondateur divin lui a confié une mission religieuse et humanitaire, différente de celle de la communauté politique, mais néanmoins ouverte à de nombreuses formes de coopération et de soutien mutuel. C'est cette mission qui sous-tend la présence du Saint-Siège dans la Communauté internationale, une présence qui vise exclusivement le bien de la famille humaine: promouvoir la paix, défendre la dignité humaine et les droits humains, oeuvrer pour le développement intégral des peuples. Il s'agit d'un devoir qui découle nécessairement de l'Evangile de Jésus-Christ, et d'une responsabilité partagée par tous les chrétiens. Pour cette raison, le Saint-Siège continuera d'être un partenaire actif avec votre pays tandis que le Ghana s'efforce de faire progresser son développement - politique, social et économique - et que votre nation cherche à être une force pour la stabilité et la paix dans votre région de l'Afrique occidentale et au sein de la communauté des nations.

A cet égard également, je suis heureux de noter que vous avez reconnu, Excellence, la contribution importante apportée par l'Eglise catholique à la société ghanaise en général, et en particulier dans les domaines de l'éducation et des services de la santé. En effet, l'Eglise considère son apostolat dans ces domaines comme un élément essentiel de sa mission religieuse, et elle a plus que jamais à coeur d'accomplir cette mission en harmonie avec d'autres personnes engagées dans ces mêmes domaines. La coopération entre l'Eglise et l'Etat est très importante pour le progrès de la formation intellectuelle et morale des citoyens, qui seront alors mieux préparés pour édifier une société véritablement juste et stable.

Monsieur l'Ambassadeur, je suis certain que votre mission près le Saint-Siège renforcera les liens de compréhension et d'amitié entre nous. Soyez assuré que les divers bureaux de la Curie romaine seront toujours prêts à vous assister dans l'accomplissement de votre haute fonction. Sur vous et sur le bien-aimé peuple du Ghana, j'invoque cordialement une abondance de Bénédictions de Dieu tout-puissant.





À L'OCCASION DE LA PRÉSENTATION DES LETTRES DE CRÉANCE

25 mai 2000



Excellences,

I. Je suis heureux de vous accueillir aujourd’hui et de recevoir les Lettres de Créance qui vous accréditent comme Ambassadeurs extraordinaires et plénipotentiaires de vos pays : la Nouvelle-Zélande, le Koweït, la République du Congo et le Ghana. Votre présence me donne l’occasion d’adresser aux Autorités de vos nations et à tous vos concitoyens mes salutations cordiales et de leur redire mon estime et mon amitié. Je vous remercie vivement des messages cordiaux dont vous étiez porteurs de la part de vos chefs d’État respectifs. Je vous saurais gré de leur exprimer en retour mes salutations déférentes et mes voeux chaleureux pour leur personne et pour leur haute mission au service de l’ensemble de leurs compatriotes.

II. Vous savez l’importance spirituelle de l’année jubilaire pour l’Église, qui a souhaité en même temps lancer un appel pressant à la Communauté internationale, au tournant du millénaire, pour que chaque nation, chaque peuple soit aidé dans sa croissance, notamment sur le continent africain, dont de nombreuses populations sont durement éprouvées par des conflits qui touchent de manière dramatique les populations civiles. Le changement de siècle est en effet une occasion particulièrement opportune pour que l’on puisse envisager d’avancer encore davantage sur la question de la dette des pays les plus pauvres, afin de les aider à prendre une part active dans la vie internationale. Une telle démarche est une main tendue aux nations qui vivent au-dessous du seuil de pauvreté, pour qu’elles ravivent leur espérance en un avenir meilleur; elle doit s’accompagner d’une réflexion profonde pour reconsidérer l’organisation de l’économie mondiale, qui fait peser sur certains pays des charges trop lourdes, au détriment des pays producteurs de matières premières et au profit des nations les plus riches.

III. Dans la perspective d’un rééquilibrage juste et équitable, ces dernières doivent aussi accompagner la remise de la dette d’un soutien en personnel et en matériel, afin de former des cadres capables de prendre en charge, dans l’avenir, les destinées de leur pays de manière désintéressée et de rendre ces pays plus autonomes et moins immédiatement tributaires des pays les plus avancés, harmonisant leur économie avec leur culture particulière. La mise en place d’infrastructures locales appropriées et des mesures d’assainissement des économies nationales donneront aux populations autochtones les moyens d’être véritablement les protagonistes de la construction sociale et des partenaires à part entière dans les relations internationales. Nous avons là un élément essentiel pour la construction d’une société fraternelle, au sein de laquelle chaque peuple apporte sa contribution spécifique. C’est aussi la voie d’établissement de la paix et du respect des droits de l’homme, qui demande que soit reconnue chaque personne, avec sa culture et sa démarche spirituelle, que soit pris en considération le désir de chaque peuple d’avoir une terre et d’avoir part aux richesses de la création.

IV. Vous savez l’attachement et les engagements du Saint-Siège en faveur de la reconnaissance des peuples et d’une entente toujours plus intense entre les nations. Plus que jamais, nos contemporains aspirent à la paix et à la fraternité. Les différentes Journées mondiales de la Jeunesse, particulièrement celles que nous vivrons au mois d’août prochain, nous montrent que les jeunes nous appellent à tout faire pour que ces aspirations deviennent réalité. En tant que diplomates, vous êtes, j’en suis sûr, particulièrement sensibles à cette requête des jeunes, que nous ne pouvons pas décevoir et auxquels nous devons préparer un monde où ils auront les moyens de conduire leur vie personnelle, familiale et sociale, afin de trouver dans les responsabilités qu’ils pourront exercer joie et bonheur.

V. Alors que vous inaugurez votre mission, permettez-moi de vous offrir mes voeux les plus cordiaux. J’invoque sur vous l’abondance des Bénédictions divines, ainsi que sur vos familles, sur vos collaborateurs et sur les nations que vous représentez, demandant au Tout-Puissant de combler chacun de ses dons.




À L'OCCASION DU JUBILÉ DES SCIENTIFIQUES

Jeudi 25 mai 2000


Messieurs les Cardinaux,
Chers Frères dans l’épiscopat et dans le sacerdoce,
Chers Amis représentant le monde de la science et de la recherche!

1. Je vous accueille avec une joie profonde à l’occasion de votre pèlerinage jubilaire. Je remercie le Cardinal Paul Poupard, Président du Conseil pontifical pour la Culture, de ses paroles de bienvenue et de l’organisation de ce jubilé, avec l’ensemble de ses collaborateurs. J’exprime ma vive gratitude à Son Excellence le Professeur Nicola Cabibbo, Président de l’Académie pontificale des Sciences, pour l’hommage qu’il vient de m’adresser en votre nom à tous.

Au cours des siècles passés, la science, dont les découvertes sont fascinantes, a occupé une place prépondérante et s’est parfois considérée comme l’unique critère de la vérité ou comme la voie du bonheur. Une réflexion basée exclusivement sur des éléments scientifiques avait tenté de nous habituer à une culture du soupçon et du doute. Elle se refusait à considérer l’existence de Dieu et à envisager l'homme dans le mystère de son origine et de sa fin, comme si une telle perspective pouvait remettre en cause la science elle-même. Elle a parfois envisagé que Dieu était une simple construction de l’esprit qui ne résisterait pas à la connaissance scientifique. De telles attitudes ont conduit à éloigner la science de l’homme et du service qu’elle est appelée à lui rendre.

2. Aujourd’hui, “un grand défi qui se présente à nous [...] est celui de savoir accomplir le passage, aussi nécessaire qu'urgent, du phénomène au fondement. Il n'est pas possible de s'arrêter à la seule expérience; [...] il faut que la réflexion spéculative atteigne la substance spirituelle et le fondement sur lesquels elle repose” (Encyclique Fides et ratio FR 83). La recherche scientifique est basée, elle aussi, sur les capacités de l'esprit humain à découvrir ce qui est universel. Cette ouverture à la connaissance introduit au sens ultime et fondamental de la personne humaine dans le monde (cfr Encyclique Fides et ratio FR 81).

“Les cieux proclament la gloire de Dieu, le firmament raconte l’ouvrage de ses mains” (Ps 18 A, 2); par ces paroles, le psalmiste évoque le “témoignage silencieux” de l’oeuvre admirable du Créateur, inscrite dans la réalité même de la création. Ceux qui sont engagés dans la recherche sont appelés à faire, d'une certaine manière, la même expérience que le psalmiste et à avoir le même émerveillement. “Il faut cultiver l’esprit de façon que soient développées les facultés d’admiration, d’introspection, de contemplation, ainsi que la capacité de former un jugement personnel et de développer le sens religieux, moral et social” (Gaudium et spes GS 59).

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Discours 2000 - Lundi 22 mai 2000