Discours 2000 - Mardi 29 août 2000


AUDIENCE DU PAPE JEAN PAUL II AU PÈLERINAGE JUBILAIRE DU SÉNÉGAL

Samedi 2 septembre 2000


1. Chers frères et soeurs du Sénégal, c'est avec une grande joie que je vous accueille alors que vous participez au pèlerinage national sénégalais à Rome, en cette année du grand Jubilé. Je salue particulièrement Mgr Maixent Coly, Evêque de Ziguinchor qui accompagne votre groupe. Je lui saurai gré de transmettre mon affectueux salut au cher Cardinal Hyacinthe Thiandoum, Archevêque émérite de Dakar.

Le pèlerinage que vous accomplissez est un moment privilégié pour rencontrer pleinement le Christ, Sauveur incarné dans le sein de Marie il y a deux mille ans. C'est en lui, source de vie divine pour l'humanité, que l'histoire du salut trouve son point culminant et son sens parfait. Que votre démarche jubilaire vous permette de renouveler votre foi dans la présence du Seigneur Jésus, particulièrement sa présence eucharistique dans notre monde et dans nos vies ! En effet, "dans le signe du Pain et du Vin consacrés, le Christ Jésus ressuscité et glorifié, lumière des nations, révèle la continuité de son Incarnation. Il reste vivant et vrai au milieu de nous pour nourrir les croyants de son Corps et de son Sang" (Bulle Incarnationis mysterium, n. 11). Que l'Eucharistie soit toujours au centre de vos vies : aimez-la, adorez-la, célébrez-la avec respect et avec foi !

Dans ce monde qui a un grand besoin de paix et de fraternité, vivez l'Eucharistie en témoignant avec ardeur que personne n'est exclu de l'amour de Dieu ! Que vos communautés chrétiennes soient des signes authentiques de communion ecclésiale, d'unité et de réconciliation entre tous les hommes !

La célébration du grand Jubilé est aussi un appel pressant à la conversion du coeur et à un engagement renouvelé afin que se développe une véritable culture de fraternité et de solidarité. Je vous invite à poursuivre, en collaboration avec tous vos compatriotes, vos efforts courageux pour que disparaissent les sources de violence, de rancoeur, d'injustice qui contribuent à maintenir dans la pauvreté et dans la marginalité des hommes et des femmes encore trop nombreux.

Chers frères et soeurs, permettez-moi de me tourner plus particulièrement vers les jeunes de vos communautés. Ne vous résignez pas à un monde où l'homme n'est pas respecté dans sa dignité, où la violence et l'injustice l'empêchent de s'épanouir pleinement ! Efforcez-vous de toute votre énergie de rendre cette terre toujours plus humaine et plus fraternelle. Remettez-vous au Christ, faites-lui confiance comme il vous fait confiance, il vous guidera vers la vérité et il vous donnera sa force !

Je vous confie tous à l'intercession maternelle de la Vierge de Poponguine, que vous aimez prier sous le vocable de Notre-Dame de la Délivrande, et je lui demande de vous guider sur la voie qui mène à son Fils. A chacun de vous, à vos familles et aux personnes qui vous sont chères, j'accorde de grand coeur la Bénédiction apostolique.



2. en allemand…






AUDIENCE DE JEAN PAUL II AUX PÈLERINS RÉUNIS POUR LA BÉATIFICATION DE 5 SERVITEURS DE DIEU

Lundi 4 septembre 2000


  Très chers frères et soeurs!

C'est avec une grande joie que je vous rencontre à nouveau, au lendemain de la béatification solennelle des Papes Pie IX et Jean XXIII, de l'Evêque Tommaso Reggio, du prêtre Guillaume-Joseph Chaminade et du bénédictin Columba Marmion.

Je vous adresse un salut cordial, à vous tous qui êtes liés aux nouveaux bienheureux par une affection et une dévotion particulières, et je vous remercie de votre présence et de votre participation active. Je salue en particulier le Cardinal Angelo Sodano, mon Secrétaire d'Etat, qui vient de célébrer la Messe en l'honneur des nouveaux bienheureux. Je salue en outre, les cardinaux et les évêques présents, ainsi que les Autorités civiles et religieuses.


2. Hier, deux Pontifes qui ont marqué l'histoire des siècles derniers ont été proposés à la vénération des fidèles: Pie IX, qui guida la barque de Pierre parmi les violentes tempêtes pendant presque trente-deux ans; Jean XXIII qui, au cours de son bref pontificat, a convoqué un Concile oecuménique d'une importance extraordinaire dans l'histoire de l'Eglise.

Pie IX était aimé de tous pour sa bonté paternelle: il aimait prêcher comme un simple prêtre, administrer les sacrements dans les églises et dans les hôpitaux, rencontrer le peuple romain le long des rues de la Ville. Le monde ne le comprit pas toujours: aux "hosanna" du début suivirent très tôt des accusations, des attaques et des calomnies. Pourtant, il ne manqua jamais d'indulgence envers ses propres ennemis. L'esprit de pauvreté, la foi en Dieu et l'abandon à la Providence, uni à un sens aigu de l'humour, l'aidèrent à surmonter également les moments les plus difficiles. "Ma politique" - aimait-il à répéter - est: "Notre Père qui es aux cieux", indiquant ainsi que son guide dans les choix de vie et de gouvernement de l'Eglise était Dieu, envers lequel il nourrissait une confiance totale. Il vécut également un abandon filial envers la Vierge Marie, dont il définit le Dogme de l'Immaculée Conception.

Il m'est également cher de rappeler que Pie IX fut particulièrement attentif à la Terre Sainte, où il voulut rétablir le Patriarcat latin de Jérusalem. Pour le soutenir, il rétablit ensuite l'Ordre équestre du Saint-Sépulcre de Jérusalem. Tandis que je repense avec affection et gratitude aux Lieux Saints et aux personnes que j'ai rencontrées au cours de mon récent pèlerinage en Terre Sainte, je salue la délégation guidée par la Patriarche latin de Jérusalem, Michel Sabbah et je renouvelle à tous mes sentiments de proximité spirituelle. En particulier, je désire saluer les évêques et les fidèles venus des Marches et, notamment, de Senigallia et d'Imola.


3. Parmi les dévots du nouveau bienheureux Pie IX se détache son successeur, le Pape Jean XXIII qui aurait désiré - il l'écrivit lui-même - le voir élevé aux honneurs des autels. Le Pape Jean unissait aux vertus chrétiennes une profonde connaissance de l'humanité dans ses lumières et ses ombres. La passion longuement cultivée pour l'histoire l'aidait en cela.

Angelo Giuseppe Roncalli acquit les traits fondamentaux de sa personnalité dans le milieu familial. "Le peu de choses que j'ai appris de vous à la maison - écrivait-il à ses parents - sont encore les plus précieuses et les plus importantes; elles soutiennent et donnent vie et chaleur aux nombreuses choses que j'ai apprises par la suite". Plus il avançait dans la vie et dans la sainteté, plus il gagnait le coeur de tous par sa simplicité et sa sagesse.

Dans la célèbre Encyclique Pacem in terris, il proposa aux croyants et aux non-croyants l'Evangile comme voie pour atteindre le bien fondamental de la paix: en effet, il était convaincu que l'Esprit de Dieu fait entendre sa voix d'une façon ou d'une autre à chaque homme de bonne volonté. Il ne se troubla pas face aux épreuves, mais sut toujours regarder avec optimisme les divers épisodes de l'existence. "Il suffit de prendre soin du présent: il n'est pas nécessaire d'utiliser l'imagination et la préoccupation pour la construction de l'avenir". C'est ce qu'il écrivait en 1961 dans le Journal de l'Ame.

En adressant mon salut à tous ceux qui sont venus spécialement de Bergame et de Venise avec le Cardinal Cé et Mgr Amadei, je souhaite que l'exemple du Pape Jean encourage à avoir toujours confiance dans le Seigneur, qui guide ses fils le long des sentiers de l'histoire.


4. Je m'adresse maintenant à vous, fidèles de Gênes, de Vintimille et de toute la Ligurie ainsi qu'à vous, soeurs de Sainte-Marthe, pour rappeler la figure lumineuse de l'Evêque Tommaso Reggio. Dans la seconde moitié du siècle dernier, il fut éducateur dans les séminaires de Gênes et de Chiavari, et journaliste, promouvant le premier journal catholique gênois. Mais la Providence a voulu qu'il fût Pasteur et il fut appelé à guider le diocèse de Vintimille; par la suite, précisément lorsque, en raison de son âge, il avait demandé à être relevé de sa charge, le Pape lui confia l'archidiocèse de Gênes.

Sa vie fut profondément active, mais le secret de tant d'activité fut toujours une profonde communion avec Dieu: "Je suis un ecclésiastique - écrivait-il - il est nécessaire que je sois saint... il faut donc mettre en pratique les moyens pour le devenir. Quel que soit le prix, il faut y arriver". Cet idéal de sainteté, il le proposa à toutes les catégories de fidèles: laïcs, prêtres et personnes consacrées et de façon particulière à ses soeurs. Aujourd'hui, en tant que bienheureux, il le repropose à tous en offrant son intercession du ciel.


5. Je vous salue cordialement, vous qui êtes venus à Rome pour la béatification du Père Guillaume-Joseph Chaminade, notamment vous qui êtes de la région du Sud-Ouest de la France, où il se forma et commença sa vie pastorale et missionnaire. J'adresse un salut particulier aux membres des Congrégations et de l'ensemble de la Famille marianiste. Chers jeunes, avec le Père Chaminade, vous avez un exemple de vie chrétienne, qui conduit à une vie belle et au bonheur promis par le Seigneur. Vous tous, prêtres, religieux, religieuses et laïcs, qui vivez le charisme du Père Chaminade, apportez votre dynamisme à l'Eglise et soyez dans le monde des ferments du Royaume! La personnalité et l'action du nouveau bienheureux, qui souhaitait faire en tout l'oeuvre de Dieu, invite tous les fidèles à une formation catéchétique sérieuse, pour développer et affermir leur vie spirituelle, et entrer plus profondément dans la rencontre avec le Christ, en particulier dans la vie sacramentelle, au sein de leur communauté chrétienne. Puissiez-vous à l'image du nouveau bienheureux vous tourner sans cesse vers Marie, Mère des chrétiens, Mère des disciples de son Fils!


6. A vous qui êtes venus à Rome pour la béatification de dom Columba Marmion, en particulier aux membres et aux amis de la grande famille bénédictine, venus d'Irlande, de Belgique et d'autres pays, j'adresse mon cordial salut. Ma pensée rejoint aussi les religieux de l'Abbaye de Maredsous, dont le Père Columba fut l'Abbé et où il exerça avec zèle son ministère de guide spirituel au service de sa communauté et, notamment par ses écrits, au service de nombreux prêtres, religieux et laïcs.
Je souhaite une cordiale bienvenue aux pèlerins de langue anglaise qui sont venus pour la béatification de dom Columba Marmion. Cette béatification attire l'attention sur la place particulière de la vie monastique dans l'Eglise, dont l'Irlande natale de Marmion possède une riche et longue tradition. Dans le grand esprit bénédictin, le bienheureux Columba, contemplatif et apôtre, fut un enseignant sans égal de la vie intérieure, fondée sur la méditation de la Parole de Dieu, la célébration de la Liturgie et la prière personnelle. Puisse le bienheureux Columba Marmion nous aider à vivre toujours plus intensément et à comprendre toujours plus profondément notre appartenance à l'Eglise, Corps mystique du Christ! Dieu vous bénisse tous!


7. Très chers frères et soeurs! L'Année jubilaire nous invite tous à un pèlerinage vers le Christ. Pèlerinage que les nouveaux bienheureux ont parcouru avec engagement et fatigue, en passant à travers la "porte étroite" qui est le Christ. C'est précisément pour cela qu'ils participent maintenant à sa gloire. Encouragés par leur exemple et aidés par leur intercession, hâtons nous aussi le pas vers la Patrie céleste.

A cette fin, j'invoque sur chacun la protection maternelle de la Très Sainte Vierge Marie et des nouveaux bienheureux, tandis que je vous bénis tous de tout coeur.

 



AUX PARTICIPANTS À LA RENCONTRE DES FAMILLES ADOPTIVES PROMUE PAR LES MISSIONNAIRES DE LA CHARITÉ

Mardi 5 septembre 2000


  Monsieur le Cardinal Laghi,

très chers Missionnaires de la Charité,
parents et enfants des familles adoptives,
amis et collaborateurs de l'oeuvre de Mère Teresa de Calcutta!

1. Je suis heureux de vous rencontrer aussi nombreux, et je remercie Soeur Mary Simon des paroles cordiales qu'elle m'a adressées, exprimant ainsi vos sentiments.

Vous avez voulu célébrer votre Jubilé au cours de la Journée qui coïncide avec le troisième anniversaire de la mort de Mère Teresa. Il s'agit d'une façon très significative de suivre le Christ sur les traces de cette singulière fille de l'Eglise, qui s'est donnée entièrement pour la charité. Comment pourrait-on l'oublier? Au fil des années, son souvenir demeure plus vivant que jamais. Nous la rappelons avec son sourire, ses yeux profonds, sa couronne du Rosaire. Il nous semble encore la voir en chemin à travers le monde à la recherche des plus pauvres parmi les pauvres, toujours prête à ouvrir de nouveaux espaces de charité, accueillante envers tous comme une véritable mère.


2. Appeler "mère" une religieuse est plutôt habituel. Mais cette appellation revêtait pour Mère Teresa une intensité particulière. Une mère se reconnaît par la capacité à se donner. Observer Mère Teresa dans ses traits, dans son attitude, dans sa façon d'être, aidait à comprendre ce que signifiait pour elle, au-delà de la dimension purement physique, le fait d'être mère; cela l'aidait à aller à la racine spirituelle de la maternité.

Nous savons bien quel était son secret: elle était emplie du Christ, et c'est pourquoi elle regardait chacun avec les yeux et le coeur du Christ. Elle avait pris au sérieux ses paroles: "J'ai eu faim et vous m'avez donné à manger" (Mt 25,35). C'est pourquoi elle n'avait aucun mal à "adopter" les pauvres comme ses fils. Son amour était concret, entreprenant; il la poussait là où peu de personnes avaient le courage d'arriver, là où la pauvreté était si grande qu'elle faisait peur.
Il n'est pas étonnant que les hommes de notre temps aient été comme fascinés par elle. Elle a incarné l'amour que Jésus a indiqué comme signe distinctif pour ses disciples: "A ceci tous reconnaîtront que vous êtes mes disciples: si vous avez de l'amour les uns pour les autres" (Jn 13,35).


3. Parmi les oeuvres nées du coeur de Mère Teresa, l'une des plus significatives est le mouvement pour les adoptions. C'est pourquoi tant de familles adoptives sont aujourd'hui présentes ici.
Je vous salue avec affection, chers parents et enfants! Je suis heureux de cette rencontre qui me permet de réfléchir avec vous sur le chemin que vous parcourez. Adopter un enfant est une grande oeuvre d'amour. Lorsqu'on l'accomplit, on donne beaucoup, mais on reçoit également beaucoup. Il s'agit d'un véritable échange de dons.

Notre époque connaît malheureusement également dans ce domaine de nombreuses contradictions. Face à tant d'enfants qui, en raison de la mort ou de l'incapacité des parents, restent sans famille, il existe tant de couples qui décident de ne pas avoir d'enfant pour des raisons souvent égoïstes. D'autres se laissent décourager par des difficultés économiques, sociales ou bureaucratiques. D'autres encore, dans leur désir d'avoir un enfant "à eux" à n'importe quel prix, vont bien au-delà de l'aide légitime que la science médicale peut assurer à la procréation, allant jusqu'à des pratiques moralement répréhensibles. A l'égard de telles tendances, il faut rappeler que les indications du droit moral ne trouvent pas de solutions dans des principes abstraits, mais protègent le véritable bien de l'homme, et dans ce cas le bien de l'enfant, par rapport à l'intérêt des parents eux-mêmes.

Comme alternative à ces méthodes discutables, l'existence même de tant d'enfants sans famille suggère l'adoption comme une voie concrète de l'amour. Des familles comme les vôtres sont ici pour témoigner qu'il s'agit d'une voie possible et belle, même si elle comporte des difficultés; une voie, par ailleurs, encore plus praticable qu'hier, à l'époque de la mondialisation, qui réduit toutes les distances.


4. Adopter des enfants, les considérer et les traiter comme ses propres enfants, signifie reconnaître que la relation entre parents et enfants ne se mesure pas seulement à travers des paramètres génétiques. L'amour qu'elle engendre est avant tout don de soi. Il s'agit d'une "génération" qui a lieu à travers l'accueil, le soin, le dévouement. La relation qui en jaillit est si intime et durable, qu'elle n'est pas inférieure à celle fondée sur l'appartenance biologique. Lorsque celle-ci, comme dans l'adoption, est également préservée de façon juridique, dans une famille liée de façon stable par le lien du mariage, elle assure à l'enfant le climat serein et l'affection à la fois maternelle et paternelle dont il a besoin pour son plein développement humain.

C'est précisément ce qu'il ressort de votre expérience. Votre choix et votre engagement représentent une invitation au courage et à la générosité pour toute la société, afin que ce don soit toujours plus estimé, favorisé et également soutenu de façon légale.


5. Je vous remercie pour votre témoignage! En célébrant les deux mille ans de la naissance du Christ, au cours de ce grand Jubilé, nous rappelons également que chaque homme qui vient au monde, dans quelque condition que ce soit, porte le signe de l'amour de Dieu. Pour chaque enfant du monde, le Christ est né est a donné sa vie. Il n'y a donc aucun enfant qui ne lui appartienne pas.

"Laissez les petits enfants venir à moi" (Mc 10,14). Mère Teresa fit en quelque sorte écho à ces paroles du Christ, lorsqu'aux mères tentées d'avorter, elle dit: "Donnez-moi vos enfants". Sur ses traces, vous vous êtes placés avec le Christ du côté des enfants. Que le Seigneur vous comble de réconfort et vous soutienne dans les difficultés sur ce chemin.

En son nom, je vous embrasse tous et je vous bénis.



AU NOUVEL AMBASSADEUR DE LA RÉPUBLIQUE ARABE D'ÉGYPTE PRÈS LE SAINT SIÈGE LORS DE LA PRÉSENTATION DES LETTRES DE CRÉANCE

Jeudi 7 septembre 2000


  Monsieur l'Ambassadeur,

C'est avec plaisir que je vous accueille aujourd'hui et que je reçois les Lettres qui vous accréditent comme Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de la République arabe d'Egypte près le Saint-Siège. Je vous remercie des aimables paroles que vous avez prononcées et des voeux que vous m'avez transmis de la part de S.E. le Président M. Mohamed Hosni Mubarak. Je vous prie de bien vouloir transmettre à Son Excellence mes salutations cordiales, ainsi que l'assurance de mes prières pour la paix et le bien-être du peuple égyptien.

Votre présence me rappelle la joie des journées passées dans votre pays en février dernier, et j'exprime une fois de plus mes remerciements sincères au Président Mubarak et au gouvernement pour avoir rendu cette visite si mémorable et si féconde. En cette année du deux-millième anniversaire de la naissance de Jésus-Christ, ce fut une immense grâce pour moi de voyager dans des lieux qui revêtent une signification vitale pour l'histoire religieuse du monde. Je me souviens en particulier du Mont Sinaï, où j'ai pu commémorer le don de la Loi que Dieu écrivit il y a longtemps sur des tables de pierre et qu'il continue d'écrire en tout temps dans le coeur humain.

Je garde un souvenir particulièrement cordial de ma rencontre avec le grand Cheikh Mohammed Sayed Tantawi. Nous avons tous deux exprimé le désir d'une nouvelle ère de dialogue religieux et culturel entre l'Islam et le christianisme. C'est dans ce contexte, Monsieur l'Ambassadeur, que je suis particulièrement heureux que vous ayez parlé de l'Egypte comme d'un pays où l'unité et l'harmonie sont profondément appréciés et où les différences de religion ne sont pas considérées comme des obstacles, mais comme des instruments d'enrichissement mutuel au service de la nation. Je souhaite sincèrement que cela soit toujours le cas, et que les difficultés qui sont apparues de temps à autre seront surmontées, grâce, en particulier, à la volonté générale et aux conditions positives pour le dialogue interreligieux et la coopération qui existent en Egypte.

Dans un monde profondément marqué par la violence, il est tristement ironique qu'aujourd'hui encore, certains des conflits les plus graves aient lieu entre les croyants d'un même Dieu, qui considèrent Abraham comme un saint Patriarche et qui s'efforcent de suivre la Loi du Sinaï. Chaque acte de violence accroît l'urgence pour les musulmans et les chrétiens partout dans le monde de reconnaître ce que nous avons en commun, de témoigner que nous sommes tous des créatures du Dieu miséricordieux et de nous accorder une fois pour toutes à reconnaître que le recours à la violence au nom de la religion est totalement inacceptable. En particulier lorsque l'identité religieuse coïncide avec l'identité culturelle et ethnique, les croyants ont le devoir solennel de garantir que le sentiment religieux n'est pas utilisé comme justification pour la haine et le conflit. La religion est l'ennemi de l'exclusion et de la discrimination; elle recherche le bien de chacun et devrait donc toujours être une incitation à la solidarité et à l'harmonie entre les personnes et les peuples.

En visitant votre pays, ce fut également une joie pour moi de rencontrer Sa Sainteté le Pape Shenouda III et les représentants des anciennes Eglises d'Egypte et de célébrer avec eux le glorieux passé du christianisme dans votre pays. Je fus profondément ému par le souvenir de la riche culture chrétienne issue d'Alexandrie, des nombreux saints et martyrs égyptiens de l'Eglise et du monachisme chrétien qui est apparu d'abord dans le désert d'Egypte et qui de là, s'est diffusé à travers le monde. Il s'agit d'une riche page de l'histoire chrétienne et de l'histoire de votre peuple; et la communauté catholique en Egypte, bien que modeste, est déterminée à continuer d'oeuvrer de toutes les façons possibles en vue du progrès du pays qui a apporté une telle impulsion au développement spirituel et théologique du christianisme.

Aujourd'hui, l'Egypte occupe une place centrale parmi les nations qui cherchent à apporter une paix juste et durable au Moyen-Orient. Bien que des développements positifs aient eu lieu récemment, le chemin long et difficile vers une solution aux nombreux problèmes encore en suspens qui touchent cette région profondément perturbée, connaît actuellement des jours difficiles. Je suis réconforté par l'assurance que l'Egypte partage la préoccupation constante du Saint-Siège pour l'avenir de cette partie du monde, envers laquelle les trois religions monothéistes nourrissent une si profonde estime. Aucun effort ne doit être épargné pour promouvoir une solution authentique et équitable qui respecte les droits et les aspirations légitimes de tous les peuples concernés. Je suis reconnaissant pour ce que votre pays et en particulier le Président Mubarak ont fait pour assurer que les atrocités de la guerre et son caractère vain soient évitées et que la paix fondée sur la justice prévale après tant d'années de douleur.

L'Eglise également est profondément intéressée par la recherche de la paix dans la région, même si celle-ci, en servant la cause de la paix, joue un rôle différent de celui des autorités civiles et politiques. En remplissant sa mission religieuse, l'Eglise est présente dans l'ordre temporel avant tout à travers ses efforts pour éduquer les consciences aux vérités et aux valeurs qui sont les fondements du bien-être des individus et des sociétés. Cela signifie proclamer et défendre la dignité humaine, oeuvrer en vue de renforcer l'harmonie et la solidarité, et promouvoir une action efficace en faveur du bien commun.

Tandis que ses efforts sont orientés en premier lieu vers les fidèles catholiques, l'Eglise demeure fermement engagée à coopérer avec tous les hommes et toutes les femmes de bonne volonté pour le véritable bien-être de toute la famille humaine. L'Eglise offre volontiers son soutien et son encouragement partout où des efforts pacifiques et légaux sont accomplis pour s'opposer à tout ce qui menace la santé morale des nations et des peuples, ou met en danger la compréhension et l'harmonie qui devrait exister entre elles.

Monsieur l'Ambassadeur, je suis certain que votre mission renforcera ultérieurement les liens d'amitié et de coopération qui existent déjà entre l'Egypte et le Saint-Siège, et que ces liens porteront des fruits pour servir la cause importante de la paix. Sur vous et votre famille, et sur tout le peuple de votre bien-aimée nation, j'invoque une abondance de Bénédictions de Dieu tout-puissant.




AUX PARTICIPANTS AU CONGRÈS DES ABBÉS, DES PRIEURS ET DES ABBESSES DES ORDRES BÉNÉDICTINS

Vendredi 8 septembre 2000


  1. C'est avec une grande joie que je vous accueille et que je vous salue tous, chers Abbés, Prieurs conventuels et Administrateurs de l'Ordre de saint Benoît, à l'occasion de votre Congrès qui, en l'Année jubilaire, se déroule ici à Rome. En exprimant ma reconnaissance à l'Abbé dom Marcel Rooney pour le travail accompli au cours de ces années, je présente mes meilleurs voeux au nouvel Abbé Primat dom Notker Wolf, que je remercie pour les paroles qu'il m'a adressées au nom de tous. Je salue également le groupe des Abbesses venues représenter leurs consoeurs de toutes les parties du monde.

Cette rencontre avec l'Evêque de Rome s'insère dans le cadre de votre pèlerinage jubilaire très riche et intense, et elle met bien en lumière sa signification spirituelle et ecclésiale. Je repense en ce moment à mon glorieux prédécesseur saint Grégoire le Grand, dont la fête a marqué le début de votre assemblée, et je rends grâce avec vous à Dieu pour le grand don qu'ont été et que sont, dans l'Eglise et pour l'Eglise, les fils et les filles de saint Benoît.

Vous avez franchi les Portes Saintes des Basiliques majeures, en apportant spirituellement avec vous vos communautés. De votre part, cela constitue tout d'abord un témoignage de foi louable, et cela devient, dans le même temps, un symbole de la signification profonde de votre réunion: en l'Année Sainte 2000, l'Ordre bénédictin, présent dans le monde entier, désire passer à travers le Christ, pour entrer avec Lui et en Lui dans le nouveau millénaire, en serrant entre les mains l'Evangile, Parole de salut pour l'homme de chaque époque et de chaque culture.


2. En Orient et en Occident, la vie monastique constitue pour l'Eglise un patrimoine d'une valeur inestimable. Dans l'Exhortation apostolique post-synodale Vita consecrata, j'écrivais que: "Les monastères ont été et sont encore, au coeur de l'Eglise et du monde, un signe éloquent de communion, une demeure accueillante pour ceux qui cherchent Dieu et les réalités spirituelles, des écoles de la foi et de vrais centres d'études, de dialogue et de culture pour l'édification de la vie ecclésiale et de la cité terrestre elle-même, dans l'attente de la cité céleste" (VC 6).

Le monachisme occidental s'est surtout inspiré de saint Benoît et de sa Règle, qui a formé des générations d'hommes et de femmes appelés à quitter le monde pour se consacrer entièrement à Dieu, en plaçant l'amour du Christ au centre et au-dessus de tout (cf. Règle, RB 4,21 ; 72,11).

Avec la force de cette mission, l'Ordre bénédictin n'a pas cessé de contribuer à l'activité apostolique de l'Eglise. Avec cette même force, il oeuvre pour la nouvelle évangélisation. En sont les témoins ceux qui, jeunes et adultes, chrétiens et non chrétiens, croyants et non croyants, trouvent en vous et dans vos monastères des points de référence, comme des puits auxquels puiser l'"eau vive" du Christ, qui seule peut étancher la soif des hommes. Et comment ne pas souligner que la caractéristique d'un grand nombre de vos maisons est aujourd'hui celle de se trouver aux "frontières du christianisme", dans des lieux où le christianisme est en minorité? Parfois, le témoignage de certains membres de l'Ordre bénédictin a été couronné par le martyre. Malgré cela, vous continuez à rester dans ces terres, en ne craignant pas les dangers et les difficultés. En mettant en oeuvre une activité oecuménique significative et un dialogue interreligieux patient, vous offrez un service précieux à l'Evangile. Vous témoignez que Dieu seul suffit.


3. Oui, Dieu seul, le Christ seul est "la vie de l'âme". Ces paroles rappellent à l'esprit le titre d'un livre célèbre de votre vénéré confrère Columba Marmion, que j'ai eu la joie d'inscrire dimanche dernier dans l'Album des bienheureux. La vie et l'action du grand Abbé de Maredsous a profondément marqué la spiritualité du vingtième siècle, en parfaite harmonie avec le chemin d'authentique renouveau ecclésial, qui a atteint son sommet dans le Concile oecuménique Vatican II. Vous désirez vous placer dans ce même sillage, en suivant les exemples lumineux du bienheureux Columba Marmion, ainsi que des bienheureux Dusmet de Catane et Schuster de Milan, fils fidèles de saint Benoît.

Votre Congrès est non seulement un pèlerinage jubilaire mais il constitue également un moment fort de réflexion et de dialogue, au seuil du nouveau millénaire. En tant que responsables de l'Ordre, vous vous proposez de considérer le rôle même de l'Abbé dans la communauté. En outre, votre intention est d'examiner, dans l'écoute et dans l'échange des richesses et des différentes expériences, quelle est la "mission" du monastère dans le monde actuel.


4. A ce propos, en tant que Pasteur de l'Eglise, dans un monde au sein duquel se multiplient les activités où l'on s'égare et où l'on risque même parfois de perdre le sens de la vie et de la mort, je voudrais rappeler - en sachant bien que vous êtes précisément des maîtres en cela - le primat de l'intériorité. Plus que jamais l'homme d'aujourd'hui a besoin, pour ne pas s'égarer lui-même, de retrouver Dieu et de se retrouver en Dieu. Et cela n'est possible que lorsque le coeur se met à l'écoute du Seigneur dans le silence et dans la contemplation prolongée, c'est-à-dire dans la rencontre avec l'"unique médiateur entre Dieu et les hommes, le Christ Jésus lui-même"(1Tm 2,5).

C'est à partir de là que je forme mes voeux, en vous assurant d'un souvenir spécial devant l'autel. Très chers amis, soyez des signes éloquents pour nos contemporains de la valeur de la vie monastique. Il s'agit de la première forme de vie consacrée apparue dans l'Eglise et qui, au cours des siècles, continue à rester un don pour tous. Soyez des contemplateurs assidus du mystère de Dieu et offrez vos existences "ut in omnibus glorificetur Deus".

Je confie ces voeux à l'intercession de la Très Sainte Vierge Marie, dont nous célébrons aujourd'hui la Nativité. Comme une bonne mère, qu'elle vous protège à chacun de vos pas. Avec affection, je vous donne ma Bénédiction apostolique, en vous priant de l'apporter à vos communautés.




AUX PARTICIPANTS AUX DIVERS PÈLERINAGES JUBILAIRES

Samedi 9 septembre 2000


  
Très chers frères et soeurs!

1. Je suis heureux de vous rencontrer et je vous salue tous avec joie. Votre rencontre se déroule le jour consacré à la mémoire de saint Pierre Claver, prêtre jésuite, apôtre parmi les Noirs déportés et modèle pour ceux qui aujourd'hui encore, se prodiguent pour soulager les conditions de ceux qui souffrent. Dans l'esprit du Jubilé, son exemple nous aide à comprendre l'un des engagements qui jaillit de cet événement fondamental, l'attention pour ceux qui, contraints par les circonstances, abandonnent leur pays et subissent les vexations de ceux qui profitent de la pauvreté des autres.
Que cet esprit, l'esprit véritable du Jubilé que nous célébrons, puisse imprégner la vie de nos communautés chrétiennes et animer chaque activité des Eglises diocésaines. A deux mille ans de sa naissance, nous célébrons le Christ et nous le contemplons dans le mystère de son Incarnation. Il nous apparaît comme une source authentique de salut pour le monde et pour chaque être humain. La vie humaine est l'histoire de la rencontre entre la pauvreté spirituelle de chacun et la grandeur salvifique d'un Dieu qui aime sans limite sa créature.


2. A cet amour doit correspondre le témoignage d'une vie tendue à configurer le disciple à son Maître. A travers la confession individuelle et les célébrations pénitentielles propres au Jubilé, comme à travers les célébrations des autres Sacrements, le croyant accomplit un chemin de configuration au Christ.

Ce chemin est représenté de façon symbolique par le pèlerinage et le passage à travers la Porte Sainte. C'est pourquoi, à juste titre, "le mot Jubilé évoque la joie, non seulement intérieure, mais la joie qui se manifeste extérieurement, car la venue de Dieu est un événement qui est également extérieur, visible, audible et tangible, comme le rappelle saint Jean (cf. 1Jn 1,1)" (Tertio millennio adveniente TMA 16 et 32). Il s'agit également de la joie pour la rémission des péchés, la joie de la conversion.

Aux pèlerins du diocèse de Lucera-Troia

3. Avec ces sentiments, je vous souhaite une cordiale bienvenue, chers pèlerins venus du diocèse de Lucera-Troia accompagnés par votre Evêque, Mgr Francesco Zerrillo et également à vous, pèlerins du diocèse de Caserta. En franchissant la Porte Sainte, je vous souhaite de faire l'expérience de la richesse que Dieu déverse dans les célébrations jubilaires, afin que votre coeur et vos communautés s'ouvrent à la vie nouvelle qui est le Christ.

A la course de relais des sportifs de Bologne

A vous, très chers frères et soeurs venus de diverses paroisses, et à vous, participants à la course de relais des sportifs de Bologne, je souhaite que le pèlerinage d'aujourd'hui laisse dans vos coeurs des signes concrets de justice et de charité. Dans l'itinéraire jubilaire, vous avez l'opportunité de vous approcher du sacrement de la Pénitence et de la Réconciliation; de vous nourrir à la table de l'Eucharistie; de rendre visite aux lieux de la mémoire des Apôtres. Que cela soit pour vous des moments intenses de communion avec Dieu. En retournant dans vos communautés, vous vous sentirez renforcés dans la foi et pousser à faire le bien et la charité dans votre état de vie et dans l'engagement auquel le Seigneur vous appelle.

Aux anciens étudiants du Séminaire français de Rome

4. Je suis heureux d'accueillir le groupe des anciens étudiants du Séminaire français de Rome. Soyez les bienvenus, chers frères dans le sacerdoce et dans l'épiscopat! Votre présence, ce matin, est un signe de la reconnaissance que, jeunes ou anciens, vous portez toujours à votre Séminaire. Vous pouvez témoigner de sa formation humaine, spirituelle, doctrinale et pastorale. J'encourage vivement les responsables du Séminaire à poursuivre leur mission si importante pour la vie de l'Eglise, en souhaitant que le Séminaire français demeure, en particulier pour le monde francophone, un lieu privilégié où viendront fleurir encore de nombreuses générations de prêtres appelés à être les "hérauts de l'Evangile" pour le nouveau millénaire. A tous, de grand coeur, je donne bien volontiers la Bénédiction apostolique.

Aux fidèles du diocèse de "Saint Catharines" au Canada

5. Je suis heureux de saluer les pèlerins du diocèse de Saint Catharines au Canada, guidés par leur Vicaire général. En cette année du grand Jubilé, vous avez effectué un long voyage pour visiter ces lieux rendus sacrés par le sang des martyrs. Je prie pour que vos journées à Rome vous donnent une expérience nouvelle et plus profonde de la miséricorde de Dieu, afin que lorsque vous retournerez au Canada, vous apportiez un témoignage puissant de l'Evangile de Jésus-Christ, le Fils de Dieu et le Sauveur du monde. A travers vous, j'envoie des salutations affectueuses à Mgr O'Hara, à Mgr Fulton et aux fidèles du Christ dans le diocèse. Puisse la bienheureuse Vierge Marie et sainte Catherine vous protéger toujours, et puisse Dieu tout-puissant vous accorder, ainsi qu'à vos familles, d'abondants dons de paix.

6. Sur tous, j'invoque la protection maternelle de la Très Sainte Vierge Marie, dont nous avons célébré hier la Nativité. Que la Mère du Sauveur obtienne pour vous tous la paix et la sérénité. Avec ce souhait, je donne volontiers à chacun de vous une Bénédiction apostolique particulière.




Discours 2000 - Mardi 29 août 2000