Discours 2000 - Lundi 25 septembre 2000


MESSAGE À S.EM. LE CARD. EDWARD I. CASSIDY À L'OCCASION DE LA XIIIème RENCONTRE "HOMMES ET RELIGIONS"




Au vénéré frère Edward Idris Card. CASSIDY
Président du Conseil pontifical pour la Promotion de l'Unité des Chrétiens

Je suis particulièrement heureux de vous confier, Monsieur le Cardinal, la tâche de transmettre l'expression de mon estime ainsi que mes salutations aux éminents Représentants des Eglises et Communautés chrétiennes et des grandes Religions mondiales, réunis cette année à Lisbonne à l'occasion de la XIII Rencontre internationale sur le thème: Océans de paix. Religions et cultures comparées.

Mon esprit retourne en cette année 1986, lorsque pour la première fois, des hommes et des femmes de religions diverses se sont retrouvés pour invoquer la paix de Dieu précisément sur la colline d'Assise, marquée par le témoignage de saint François. Cet événement ne pouvait rester unique. En effet, il revêtait une force spirituelle éclatante: il était comme une source dont commençaient à jaillir de nouvelles énergies pour la paix. C'est pour cela que j'ai souhaité que l'"esprit d'Assise" ne s'éteigne pas, mais puisse s'étendre à travers le monde, suscitant dans chaque partie du monde de nouveaux témoins de foi et de dialogue.

Je voudrais donc remercier de façon particulière la Communauté de Sant'Egidio pour l'enthousiasme et le courage spirituel avec lesquels elle a su recueillir le message d'Assise et le porter dans tant de lieux du monde, à travers les rencontres d'hommes de religions diverses. Je me souviens de la Rencontre de Bucarest en 1998, qui eut un si vaste écho en Roumanie où, au cours de ma visite apostolique, j'ai entendu le cri répété avec insistance par le peuple: "Unité! Unité!". Oui, chers frères et soeurs, cette unité demeure pour nous un engagement prioritaire. Regardons avec espérance le siècle qui a commencé car - comme je l'écrivais dans l'Encyclique Ut unum sint, "la longue histoire des chrétiens marquée par de multiples fragmentations semble se rebâtir, tendant vers la source de son unité qu'est Jésus-Christ" (UUS 22).

Je suis convaincu que l'"esprit d'Assise" constitue un don providentiel pour notre époque. Dans la diversité des expressions religieuses, légalement reconnues comme telles, demeurer les uns aux côtés des autres manifeste également visiblement l'aspiration à l'unité de la famille humaine. Nous devons tous nous acheminer vers cet unique objectif. Je me souviens lorsque, jeune évêque au Concile Vatican II, j'ai apposé moi aussi ma signature au bas de la Déclaration "Nostra Aetate", avec laquelle a commencé une riche relation entre l'Eglise catholique, le judaïsme, l'islam et les autres religions. Cette Déclaration conciliaire affirme que l'Eglise, "dans sa tâche de promouvoir l'unité et la charité entre les hommes, et même entre les peuples, [...] examine d'abord ce que les hommes ont en commun et qui les pousse à vivre ensemble leur destinée" (NAE 1).

Le dialogue entre les religions doit tendre et oeuvrer à cet objectif. Aujourd'hui, par la grâce de Dieu, ce dialogue ne peut plus seulement être un souhait; il est devenu une réalité, même si le chemin qui s'ouvre à nous est encore long. Comment ne pas remercier le Seigneur pour le don de cette ouverture réciproque qui est le prélude d'une compréhension plus profonde entre l'Eglise catholique et le judaïsme, précisément alors que sont encore vifs en moi les souvenirs de mon inoubliable pèlerinage en Terre Sainte? Mais des fruits significatifs sont également nés du chemin de rencontre avec l'islam, avec les religions orientales et avec les grandes cultures du monde contemporain. Au début du nouveau millénaire, nous ne devons pas ralentir nos pas, mais, bien plus, il est nécessaire de donner une plus grande accélération à ce chemin prometteur.

Vous savez bien que le dialogue n'ignore pas les différences réelles, mais n'efface pas non plus la condition commune de pèlerins vers de nouvelles terres et de nouveaux cieux. Le dialogue invite également chacun à renforcer cette amitié qui ne sépare pas mais ne mélange pas non plus. Nous devons être tous plus audacieux sur ce chemin, car les hommes et les femmes de notre monde, quels que soient le peuple et la croyance auxquels ils appartiennent, peuvent se découvrir fils de l'unique Dieu et frères et soeurs entre eux.

Aujourd'hui, vous vous trouvez à Lisbonne, sur les rives de l'Océan atlantique, et votre regard se porte vers les peuples et les cultures du monde. Lisbonne représente la première étape de votre chemin en commun au cours de ce nouveau siècle. Je remercie donc Monsieur le Patriarche José da Cruz Policarpo d'avoir accueilli avec toute son Eglise ce pèlerinage. Je salue en Vous, mes confrères dans l'épiscopat, et tout le cher peuple portugais, que j'ai eu l'occasion de rencontrer au cours de mon récent pèlerinage à Fatima.

Nombreux sont les problèmes qui obscurcissent l'horizon du monde. Mais l'humanité est à la recherche de nouveaux équilibres de paix: "Il est donc nécessaire - comme je l'écrivais pour la Rencontre d'"Hommes et religions" de Milan en 1993 - de retrouver le goût et la volonté de cheminer ensemble pour construire un monde plus solidaire, en surmontant les intérêts particuliers de groupe, d'ethnie et de nation. Quel important devoir à cet égard, peuvent jouer les religions! Pauvres de moyens humains, elles sont riches de l'aspiration universelle qui s'enracine dans le rapport sincère avec Dieu" (Insegnamenti, vol. XVI/2, 1993, 778).

En vous confiant, Monsieur le Cardinal Edward Idris Cassidy, mon Message aux participants à la Rencontre de Lisbonne, auxquels je renouvelle mon salut cordial, j'invoque sur toutes les personnes présentes les Bénédictions de Dieu tout-puissant. A travers son aide, puissent les hommes et les femmes de chaque peuple de la terre poursuivre avec une volonté renouvelée la voie de la paix et de la compréhension réciproque!

Du Vatican, le 21 septembre 2000




AUX PARTICIPANTS AU CHAPITRE GÉNÉRAL DES SOEURS CARMÉLITES MISSIONNAIRES

Vendredi 29 septembre 2000


  Chères Soeurs carmélites missionnaires,

1. Au terme de votre XVIIIème Chapitre général, je suis heureux de vous adresser un salut cordial, en particulier à vous qui, au nom de vos Soeurs présentes dans 35 pays de quatre continents, avez participé aux travaux capitulaires dans le but de discerner ce que l'"Esprit suggère aux diverses communautés" (Tertio millennio adveniente TMA 23), pour renouveler avec fidélité le charisme de fondation du bienheureux Francisco Palau y Quer et répondre avec promptitude aux exigences de l'Eglise et de l'humanité d'aujourd'hui, que vous voulez continuer à servir avec générosité.

Je salue en particulier la nouvelle Supérieure générale, Mère Maria Esperanza Izco et ses conseillères, pour lesquelles je demande d'abondants dons divins qui les aideront dans leur responsabilité de guider la Congrégation avec clairvoyance et de suivre avec un esprit fraternel leurs propres soeurs, afin que chacune d'elles soit une femme d'expérience de Dieu et audacieuse dans sa réponse aux défis de la mission au cours du troisième millénaire, comme vous l'avez proposé dans votre Chapitre. En effet, unir de façon harmonieuse la dimension contemplative et l'impulsion missionnaire, deux piliers fondamentaux de votre identité religieuse, est une nécessité particulièrement ressentie à une époque si souvent menacée par la fragmentation ou la superficialité de l'existence humaine. C'est pourquoi, chères Soeurs carmélites missionnaires, je vous rappelle que "le Christ contemplé dans la prière est Celui-là même qui vit et qui souffre dans les pauvres" (Vita consecrata VC 82). Face aux difficultés que vous pouvez rencontrer dans le déroulement de ce mandat délicat, je vous invite à vous rappeler des paroles de votre Fondateur: "Etant comme nous le sommes bien disposés à seconder les desseins de Dieu, il ne nous laissera pas sans lumière ni orientation" (Lettre à Juana Gracias, 26 juin 1860, n. 2).


2. En commençant vos travaux capitulaires à Ibiza, source de l'inspiration de votre fondation et pour le bienheureux Francisco Palau, lieu d'exil, de silence et de discernement, vous avez voulu approfondir la raison originelle de votre existence. Ce retour aux racines, que l'Eglise propose avec insistance à tous les Instituts religieux, n'est pas un retour nostalgique au passé, mais ressemble plutôt au parcours de ces disciples qui, en marche vers Emmaüs, se rendirent compte que leur véritable destin était de revenir à Jérusalem, pour y découvrir l'immense richesse et nouveauté du mystère du Christ. Ils purent ainsi suivre le cours de l'histoire et contribuer à ouvrir aux hommes les nouveaux horizons proposés par le message de l'Evangile. Je vous invite donc à conserver de façon particulièrement vivante cette expérience d'un contact étroit et constant avec le Christ et avec les dons que son Esprit a répandus sur votre Congrégation, comme cela correspond, par ailleurs, à votre tradition carmélite imprégnée de contemplation. En outre, en ce moment où toute l'Eglise célèbre le grand Jubilé pour commémorer les deux mille ans du mystère de l'Incarnation, il devient encore plus évident que "Jésus est la véritable nouveauté, qui dépasse toute attente de l'humanité, et il le restera pour toujours, dans la succession des périodes de l'histoire" (Bulle Incarnationis mysterium, n. 1).

La seconde partie de votre chapitre s'est déroulée à Rome, pour indiquer que tout charisme authentique afflue dans l'unique Eglise pour l'enrichir et la servir, devenant toujours plus universelle, comme une trame de communion entre mentalités et cultures différentes. Il s'agit d'un aspect qui met en valeur votre âme missionnaire. De ce point de vue, vous avez, à partir de votre fondation, une belle histoire à raconter, une histoire faite de collaboration remplie d'abnégation dans le domaine toujours urgent de l'évangélisation et du service à la cause des hommes, en particulier des plus indigents. Je désire exprimer ma reconnaissance et ma gratitude pour tout cela. Mais je désire surtout vous encourager dans votre projet d'annoncer de façon prophétique le Royaume de Dieu dans le monde et dans l'histoire qui vous reste à construire, car "l'Esprit vous envoie pour faire encore avec vous de grandes choses" (Vita consecrata VC 110).

Continuez à prêter attention aux besoins naissants de notre époque, en leur donnant une réponse qui naît du Coeur du Christ et de la mission originelle de l'Eglise. En effet, "plus on vit dans le Christ, mieux on peut le servir dans les autres, en se portant jusqu'aux avant-postes de la mission et en prenant les plus grands risques" (Vita consecrata VC 76).


3. Pour conclure, je désire placer entre les mains de la Vierge Marie les fruits du Chapitre et l'avenir de la Congrégation. Vous qui l'invoquez comme votre Patronne, avec l'antique titre de Notre-Dame du Mont-Carmel, vous savez bien que vous ne pouvez pas vous trouver dans de meilleures mains. Elle vous aidera à combattre les forces du péché qui, de façons diverses, nichent dans le coeur humain et dans les structures sociales, ouvrant ainsi votre âme à la joie et à l'espérance qui doivent envahir votre vie personnelle et communautaire, vos oeuvres et votre mission.

Avec ces voeux sincères, en invoquant l'intercession céleste du bienheureux Francisco Palau, je vous donne de tout coeur la Bénédiction apostolique, que j'étends avec un grand plaisir à toutes vos Soeurs de profession religieuse.


Octobre





AUX PÈLERINS RÉUNIS À ROME POUR LES CANONISATIONS

Lundi 2 octobre 2000



Très chers frères et soeurs!

1. Hier, sur la place Saint-Pierre, nous avons vécu un moment singulier de joie, en célébrant la canonisation de plusieurs saints. La Providence nous accorde aujourd'hui la possibilité de nous retrouver, pour prolonger l'action de grâce à Dieu, qui donne à l'Eglise des modèles de vie évangélique toujours nouveaux, et pour contempler ensemble les figures exemplaires des martyrs de Chine, de María Josepha du Coeur de Jésus Sancho Guerra, de Katharine Drexel et de Giuseppina Bakhita.

A vous tous, pèlerins venus de divers pays, je renouvelle mon salut, ainsi qu'une parole cordiale de remerciement pour le cadre suggestif que vous avez créé autour de cet événement ecclésial grâce à votre présence.


2. Je m'adresse à présent de façon particulière aux pèlerins venus ici pour la canonisation des cent-vingt martyrs de Chine. Tout d'abord à vous, fidèles d'origine chinoise, avec lesquels je désire partager la joie profonde pour ces fils et ces filles du peuple chinois qui, pour la première fois, sont présentés à toute l'Eglise et au monde entier dans leur fidélité héroïque au Christ Seigneur et dans leur grandeur d'âme. Oui, ils honorent véritablement le noble peuple de Chine!

Ma joie est encore plus grande en pensant qu'en cette circonstance sont intimement unis à nous tous les fidèles de la Chine continentale, conscients, - comme vous l'êtes - de posséder dans les martyrs non seulement un exemple à suivre, mais également des intercesseurs auprès du Père. Nous avons en effet besoin de leur aide, car nous sommes appelés à affronter la vie quotidienne avec le même dévouement et avec la même fidélité dont les martyrs firent preuve à leur époque.

Vous savez tous que la plupart des cent-vingt martyrs versa son sang lors de moments historiques qui revêtent, justement, une signification particulière pour votre peuple. Il s'est agi, en réalité, de situations dramatiques caractérisées par de violents bouleversements sociaux. L'Eglise, à travers cette canonisation, ne veut absolument pas prononcer un jugement historique sur ces périodes, ni encore moins légitimer certains comportements des gouvernements de l'époque, qui pesèrent sur l'histoire du peuple chinois. Elle désire, en revanche, mettre en lumière la fidélité héroïque de ces dignes fils de la Chine, qui ne se laissèrent pas intimider par les menaces d'une cruelle persécution.

Je suis également heureux de la présence de nombreux pèlerins de divers pays, dont étaient originaires les 33 missionnaires, hommes et femmes, morts martyrs en Chine en même temps que les fidèles chinois auxquels ils avaient annoncé l'Evangile. D'aucuns, effectuant une lecture historique partielle et non objective, ne voient dans leur action missionnaire que des limites et des erreurs. S'il y en a eu - l'homme est-il jamais exempt de défauts? - nous demandons pardon. Mais aujourd'hui nous les contemplons dans la gloire et nous rendons grâce à Dieu, qui utilise des instruments pauvres pour ses grandes oeuvres de salut. Ils annoncèrent, également à travers le don de leur vie, la Parole qui sauve et ils entreprirent d'importantes initiatives de promotion humaine. Soyez-en fiers, vous pèlerins, leurs concitoyens et frères dans la foi! Par leur témoignage, ils nous indiquent que le véritable chemin de l'Eglise est l'homme: un chemin tissé par un dialogue interculturel profond et respectueux, comme l'a déjà enseigné avec sagesse et maîtrise le P. Matteo Ricci; un chemin soutenu par l'offrande quotidienne de la vie.


3. Je salue avec affection les nombreux pèlerins venus pour participer à la canonisation de sainte María Josepha du Coeur de Jésus Sancho Guerra, provenant du Pays Basque, où la nouvelle sainte naquit et mourut, ainsi que d'autres lieux d'Espagne et de divers pays d'Europe, d'Amérique et des Philippines, où les Servantes de Jésus de la Charité vivent et travaillent en diffusant le charisme et les enseignements de cette illustre fille de l'Eglise. Je souhaite à tous une cordiale bienvenue.

Sainte María Josepha vous est très chère. En effet, son profil spirituel nous révèle sa générosité et son dévouement dans l'accueil des paroles du Seigneur, j'étais "malade et vous m'avez visité" (Mt 25,36). Exigeante avec elle-même, elle n'épargna pas les efforts ni les oeuvres pour servir les malades, fondant dans ce but les Servantes de Jésus de la Charité. C'est à celles-ci que je confie la mission de montrer le visage miséricordieux de Dieu à ceux qui souffrent, en contribuant à soulager leurs souffrances grâce à l'assistance généreuse à domicile et dans les hôpitaux.

Son témoignage éloquent doit aider chacun à découvrir la beauté d'une vie entièrement consacrée au Seigneur et l'importance du service visant à essuyer les larmes de ceux qui souffrent sous le poids de la maladie.


4. C'est pour moi une joie particulière de saluer le Cardinal Bevilacqua et les nombreux pèlerins qui sont venus à Rome pour la canonisation de Mère Katharine Drexel, en particulier ses filles spirituelles, les Soeurs du Très Saint Sacrement. Sainte Katharine Drexel prit à coeur les paroles de Jésus au jeune homme de l'Evangile, "Si tu veux être parfait, va, vends ce que tu possèdes et donne-le aux pauvres, et tu auras un trésor dans les cieux" (Mt 19,21).

En consacrant sa fortune familiale à l'oeuvre missionnaire et éducative parmi les membres les plus pauvres de la société, Mère Drexel fit un voyage à Rome au cours duquel elle demanda au Pape Léon XIII d'envoyer des missionnaires pour soutenir les divers projets qu'elle finançait. Le Pontife lui répondit en l'invitant à devenir missionnaire elle-même. Cela constitua certainement un tournant dans la vie de sainte Katharine et avec un grand courage, elle plaça sa confiance dans le Seigneur et donna totalement sa vie et ses biens à son service. Son apostolat porta des fruits à travers l'établissement de nombreuses écoles pour les natifs américains et pour les noirs, et servit à accroître la conscience du besoin permanent, même à notre époque, de combattre le racisme sous toutes ses formes.

Puisse l'exemple de sainte Katharine Drexel être un phare de lumière et d'espoir qui nous inspire tous à faire un don encore plus grand de notre temps, de notre talent et de notre richesse au bénéfice de ceux qui en ont le plus besoin.


5. Je suis également heureux de saluer les évêques et les fidèles soudanais qui sont venus à Rome pour la canonisation de Soeur Giuseppina Bakhita. De façon particulière, je salue également les Filles de la Charité, la grande famille canossienne à laquelle appartenait Giuseppina Bakhita.

Cette sainte fille d'Afrique se révéla être véritablement une enfant de Dieu: l'amour et le pardon de Dieu furent des réalités tangibles qui transformèrent sa vie de façon extraordinaire. Elle en arriva même à ressentir de la gratitude pour les esclavagistes qui l'avaient capturée et ceux qui l'avaient maltraitée: car, comme elle devait le dire plus tard, si ces choses n'étaient pas arrivées, elle ne serait pas devenue chrétienne, ni une Soeur de la Communauté canossienne.

A travers l'intercession de sainte Bakhita, prions pour que tous les hommes et toutes les femmes ressentent un jour la présence salvifique du Seigneur Jésus et soient ainsi libérés de l'esclavage du péché et de la mort. Et en particulier, rappelons son pays, le Soudan, où la guerre et la violence continuent de semer la destruction et le désespoir: puisse la main salvifique du Seigneur toucher les coeurs de ceux qui sont responsables de cette souffrance et ouvrir la voie à la réconciliation, au pardon et à la paix.


6. Très chers amis, avant de vous quitter, je désire vous faire part d'un poids qui, en ces heures, pèse sur mon âme. Depuis quelques jours, la Ville Sainte de Jérusalem est le théâtre de violents affrontements, qui ont provoqué de nombreux morts et blessés, parmi lesquels également plusieurs enfants. Spirituellement proche des familles de ceux qui ont perdu la vie, j'adresse un appel implorant à tous les responsables, afin que les armes se taisent, que les agressions soient évitées, et que l'on reprenne la voie du dialogue. La Terre Sainte doit être la terre de la paix et de la fraternité. C'est ce que Dieu veut!

Je demande aux nouveaux saints d'intercéder, afin que les âmes de tous retrouvent des pensées de compréhension réciproque et de paix.

Avec ces voeux, je donne de tout coeur à vous tous et à vos proches, la Bénédiction apostolique.




AUX PARTICIPANTS AU CHAPITRE GÉNÉRAL DE LA CONFÉDÉRATION DE L’ORATOIRE DE SAINT PHILIPPE NERI (ORATORIENS)

Jeudi 5 octobre 2000



  Très chers prêtres et laïcs oratoriens!

1. Je suis heureux de souhaiter une cordiale bienvenue à chacun de vous, participants au Congrès général de la Confédération de l'Oratoire de saint Philippe Neri, qui à travers cette visite, avez voulu réaffirmer votre sincère dévotion au Vicaire du Christ et votre pleine adhésion à son Magistère, dans l'esprit de votre Fondateur, qui a aimé l'Eglise de toute sa personne, et qui vous a laissé en héritage sa fidélité sans réserve au Siège de Pierre.

En saluant avec affection le Père Antonio Rios Chavez, Délégué du Siège apostolique, j'adresse une pensée cordiale à chacune des Congrégations représentées à votre Congrès général et je leur exprime ma vive gratitude pour le bien qu'elles accomplissent, en me réjouissant de la croissance que l'Oratoire connaît dans diverses parties du monde.


2. Votre Confédération, instituée par le Siège apostolique pour unir par le lien de la charité et de l'aide réciproque les diverses Congrégations de l'Oratoire, s'est engagée au cours des récents Congrès généraux à revoir les textes constitutionnels selon l'orientation indiquée par le Concile oecuménique Vatican II. A l'aube du troisième millénaire chrétien, votre Congrès se propose de revisiter, sous l'angle principalement pastoral, les sources du mouvement spirituel qui tire ses origines de saint Philippe Neri, dans l'intention de répondre fidèlement à la mission de toujours: conduire l'homme à la rencontre de Jésus-Christ "Chemin, Vérité et Vie", réellement présent dans l'Eglise et "contemporain" de chaque homme.

Cette rencontre, vécue et proposée par saint Philippe Neri de façon originale et convaincante, conduit à devenir des hommes nouveaux dans le mystère de la Grâce, en suscitant dans l'âme cette "joie chrétienne" qui constitue le "centuple" donné par le Christ à celui qui l'accueille dans sa propre existence. Favoriser une rencontre personnelle avec le Christ représente également la "méthode missionnaire" fondamentale de l'Oratoire. Celle-ci consiste à "parler au coeur" des hommes pour les conduire à faire l'expérience du Maître divin, capable de transformer la vie. Cela peut être obtenu en particulier en témoignant de la beauté d'une telle rencontre, qui donne un sens plein à la vie. Il est nécessaire de proposer à ceux qui sont "loin" non pas une annonce théorique, mais la possibilité d'une existence réellement renouvelée et donc comblée de joie.

Voilà le grand héritage reçu de votre Père Philippe! Voilà une voie pastorale toujours valable, car elle est inscrite dans l'expérience chrétienne éternelle! Je souhaite que le retour aux sources de la spiritualité et de l'oeuvre de saint Philippe, effectué par votre Congrès, suscite au sein de chaque Congrégation une conscience renouvelée de la validité et de l'actualité de la "méthode missionnaire" de votre Fondateur et apporte une contribution significative à l'engagement à la "nouvelle évangélisation".


3. L'Oratoire naquit de la foi et du génie de saint Philippe Neri, qui sut composer en une synthèse harmonieuse la dimension charismatique et la pleine communion avec les pasteurs de l'Eglise et qui, dans la Rome de son époque, vint à la rencontre, avec une grande sagesse, des nécessités spirituelles et matérielles de la jeunesse, en témoignant à un tel degré de la dimension joyeuse de la foi, qu'il fut considéré comme "le prophète de la joie chrétienne". L'Oratoire caractérise depuis ses débuts votre Congrégation, qui en prend le nom, comme le rappelle la Bulle "Copiosus in misericordia", avec laquelle Grégoire XIII l'institua en l'Année Sainte 1575. Née avec la participation de prêtres séculiers, provenant de la première expérience de l'Oratoire et placée à son service, votre Congrégation doit continuer à conserver au centre de ses intérêts cette institution digne d'éloges, avec ses orientations originelles, sa méthode et son style, qui peuvent toujours être adaptés aux nécessités des temps.

Comme le rappelle l'"Itinéraire Spirituel", approuvé lors du Congrès général de 1994: "Le but spécifique et la mission de la Congrégation de l'Oratoire est la naissance et la croissance d'authentiques communautés chrétiennes, lumière et sel de la terre". Dans vos Constitutions, celles-ci sont présentées, dès les premiers articles, comme une union fraternelle de fidèles qui, en suivant les traces de saint Philippe Neri, se fixent pour but ce qu'il enseigna et accomplit, devenant ainsi "un seul coeur et une seule âme" (Ac 4,3). Les modèles dont elles s'inspirent sont les rencontres de prière simples et familiales et les colloques spirituels de votre Père Philippe avec des pénitents et des amis. Dans cette perspective, l'Oratoire reconnaît son identité dans le fait de "pratiquer en commun l'approche de la Parole de Dieu de façon familière, ainsi que la prière intérieure et à haute voix, pour promouvoir chez les fidèles, comme dans une école, l'esprit contemplatif et l'amour des choses divines".

Je forme des voeux afin que l'Oratoire, en se plaçant au service des hommes avec simplicité d'âme et joie, sache manifester et diffuser cette méthode spirituelle de manière toujours plus attrayante et efficace. Il pourra ainsi offrir un témoignage cohérent et marquant, en vivant en plénitude la ferveur des origines et en proposant aux hommes d'aujourd'hui une expérience de vie fraternelle fondée principalement sur la réalité, écoutée et vécue, de la communion surnaturelle en Christ.

"Celui qui désire une autre chose que le Christ, ne sait pas ce qu'il veut; celui qui demande une autre chose que le Christ, ne sait pas ce qu'il demande; celui qui n'agit pas pour le Christ, ne sait pas ce qu'il fait". Ces paroles de votre saint Fondateur indiquent le critère toujours valable de chaque renouveau de la communauté chrétienne, qui consiste à revenir à Jésus-Christ: à sa parole, à sa présence, à l'action salvifique qu'Il accomplit dans les Sacrements de l'Eglise. Cet engagement conduira les prêtres à privilégier, comme le veut votre tradition, le ministère des Confessions et l'accompagnement spirituel des fidèles, pour répondre pleinement à votre charisme et aux attentes de l'Eglise. Ils aideront ainsi les laïcs appartenant aux Oratoires séculiers à comprendre la valeur essentielle d'être "christifideles", à la lumière de saint Philippe qui, à propos du laïcat, anticipa les idées et les méthodes qui devaient se révéler fécondes dans la vie de l'Eglise.


4. Vos Congrégations, fidèles à l'autonomie voulue par le saint Fondateur, vivent particulièrement liées à la réalité des Eglises particulières et aux situations locales. Mais il ne faut pas oublier l'importance que revêt également, dans la vie des Communautés et de leurs membres, le lien fraternel avec les autres Congrégations qui constituent la Confédération. C'est à travers ce lien que l'autonomie caractéristique de chaque Maison s'ouvre au don de la charité effective et que les Communautés confédérées trouvent une aide valable pour croître dans la fidélité au charisme oratorien.

Que chaque Congrégation consacre un soin particulier à la formation initiale et permanente des personnes et des Communautés, pour s'imprégner de l'idéal transmis par saint Philippe et reproposé par les textes constitutionnels, en vue d'une vitalité spirituelle croissante et d'une présence apostolique efficace.

En particulier, je vous exhorte à vous laisser guider par ces valeurs, surtout en approchant le monde des jeunes, chargé de promesses, malgré les difficultés, en vous sentant envoyés de façon spéciale vers ceux qui sont "loin", mais si proches du Coeur du Sauveur. Dans ce contexte, la sensibilité traditionnelle des Oratoriens pour l'art et la culture, qui sont des voies particulièrement appropriées pour une présence évangélisatrice significative, vous sera d'un grand soutien.

Que la Vierge Marie, "Mère et fondatrice de l'Oratoire", soit pour chacun de vous le modèle dont vous inspirer constamment pour accueillir dans une pleine disponibilité le don de l'Esprit et pour annoncer la joie du Christ à vos frères.

Avec ces voeux, alors que je vous confie à l'intercession céleste de saint Philippe Neri, je donne à chacun de vous et à toute la Confédération de l'Oratoire, une Bénédiction apostolique spéciale.




MESSAGE AU PRÉSIDENT DU SYMPOSIUM DES CONFÉRENCES ÉPISCOPALES D’AFRIQUE ET DE MADAGASCAR




À Monseigneur Laurent Monsengwo Pasinya
Archevêque de Kisangani
Président du Symposium des Conférences épiscopales
d'Afrique et de Madagascar

1. Au moment où le Symposium des Conférences épiscopales d'Afrique et de Madagascar tient sa douzième Assemblée plénière, je suis heureux d'adresser mes plus cordiales salutations à tous les participants et de les assurer de ma prière fervente. À travers eux, je salue avec affection tous les fils du continent africain, "nouvelle patrie du Christ, terre aimée du Père éternel "(Ecclesia in Africa ).

En cette année où l'Église célèbre le grand Jubilé, vous avez souhaité vous retrouver auprès du tombeau des Apôtres pour cette importante rencontre qui vous permet de revivre spirituellement l'événement de grâce que fut, voici déjà six années, l'Assemblée spéciale du Synode des Évêques pour l'Afrique. Le thème de vos travaux, L'Église-famille de Dieu, lieu et sacrement de réconciliation, de pardon et de paix en Afrique, est lui-même en pleine harmonie avec l'événement jubilaire. En effet, "l'engagement pour la justice et pour la paix en un monde comme le nôtre, marqué par tant de conflits et par d'intolérables inégalités sociales et économiques, est un aspect caractéristique de la préparation et de la célébration du Jubilé" (Tertio millennio adveniente TMA 51).

2. À cinq ans de la promulgation de l'Exhortation apostolique post-synodale Ecclesia in Africa, nous devons constater que la vision d'ensemble de la situation du continent, telle qu'elle y est exprimée, n'a pas changé substantiellement. De nombreuses nations continuent d'être le théâtre de conflits dont les populations sont les victimes innocentes. En parcourant la tragique géographie des luttes armées, on constate que celle qui intéresse la région des Grands Lacs est, en un certain sens, la plus symbolique. Toutefois, nous devons garder présents dans notre coeur de pasteurs d'autres conflits, parfois oubliés, qui affectent de nombreux pays africains, souvent depuis plusieurs années. Ces conflits, dus à la fois à des causes externes et internes, constituent un mépris de la personne humaine, de ses droits et de sa dignité. Cette attitude est en grande partie à l'origine de nombreux autres maux qui affligent le continent, comme le sous-développement économique, la pauvreté, les migrations forcées, la diffusion du SIDA et de pandémies que l'on croyait définitivement éradiquées, le pillage des richesses naturelles et la dégradation de l'environnement.

3. L'histoire chargée de souffrance des peuples de l'Afrique est aussi celle de l'Église sur ce continent. Au cours des dernières décennies, des Évêques, des prêtres, des missionnaires, des religieux, des religieuses et des laïcs ont été brutalement persécutés et même assassinés. Des structures qui servaient au bien de l'ensemble de la population, sans discrimination aucune, ont été saccagées et détruites à de nombreuses reprises. Des communautés entières ont été dispersées.

Je voudrais cependant dire ici ma satisfaction pour l'heureuse issue des douloureux événements qui ont récemment frappé l'Église en Afrique à travers l'épreuve qu'ont connue deux de ses pasteurs : Mgr Misago, Évêque de Gikongoro, et Mgr Kataliko, Archevêque de Bukavu. Puisse la mort inattendue de Mgr Kataliko, dont la triste nouvelle vient de nous parvenir, être pour l’Église et pour l’Afrique une semence d’espérance et de paix! Je voudrais aussi rendre hommage à tous ceux qui, avec courage et abnégation, dans des situations difficiles, rendent témoignage au Christ, parfois jusqu'au don de leur vie; et je souhaite vivement que dans toute l'Afrique l'Église puisse librement annoncer le message d'amour du Christ, par sa parole comme par ses actes.

4. L'Assemblée plénière du Symposium des Conférences épiscopales d'Afrique et de Madagascar est un moment privilégié pour confirmer l'option de l'Église comme famille de Dieu, "expression particulièrement appropriée de la nature de l'Église pour l'Afrique" (Ecclesia in Africa ), et pour en déterminer avec toujours plus de précision les conséquences concrètes, en vue d'une pastorale toujours plus adaptée. Pour répondre au mandat que Jésus lui a confié et pour jouer son rôle prophétique au milieu des nations, l'Église est engagée dans de nombreux domaines de la vie locale aux côtés des hommes et des femmes du continent, notamment pour contribuer à la réconciliation entre les personnes et entre les peuples ainsi qu'à l'établissement de la justice, de la solidarité, de la démocratie et de la paix. Plus que jamais, l'Église doit chercher des voies nouvelles et efficaces pour participer, selon sa vocation propre, au développement intégral de l'homme dans des sociétés fraternelles et pacifiques. Dans ce but, la collaboration sincère avec les autres croyants et avec tous les hommes de bonne volonté est un impératif qui doit animer les fidèles, unis à leurs pasteurs, dans un esprit de vérité et de respect mutuel.

J'exhorte les communautés catholiques à être des lieux d'authentique réconciliation et à témoigner énergiquement de la justice et de la paix dans leurs propres structures et dans les relations entre leurs membres, se souvenant que "si l'Église doit témoigner de la justice, elle reconnaît que quiconque ose parler aux hommes de justice doit aussi s'efforcer d'être juste à leurs yeux" (Ecclesia in Africa ).

Le témoignage de l'Église comme communauté, doit aller de pair avec l'engagement de chacun de ses membres. Pour cela, il est nécessaire que des laïcs bien formés, humainement et spirituellement, prennent la place qui leur revient dans la vie publique pour y être le sel de la terre. Tous doivent aussi se souvenir qu'ils sont appelés à la sainteté de vie pour être des signes authentiques et crédibles de l'amour de Dieu dans le monde.

5. Me tournant vers mes frères dans l'épiscopat et vers tous les peuples de ce continent bien-aimé, je leur renouvelle mon appel vibrant à l'espérance. Dans les situations difficiles que vous vivez, les rayons de lumière ne manquent pas, le Seigneur ne vous a pas abandonnés ! Pour construire le monde réconcilié auquel tous aspirent, c'est d'abord aux Africains eux-mêmes qu'il revient de prendre en mains l'avenir de leurs nations. J'invite à nouveau la communauté internationale à ne pas abandonner l'Afrique. Je connais les efforts qui sont déjà entrepris et qui manifestent une véritable solidarité. Ces efforts doivent être poursuivis et rendus plus efficaces, en particulier grâce à l'effacement ou à la réduction de la dette des pays les plus pauvres.

Ma pensée rejoint avec affection les pays qui souffrent de la guerre. J'exhorte avec force tous les responsables à chercher sans relâche et avec sincérité les chemins de la réconciliation et à faire en sorte que les accords de paix ne deviennent pas des engagements sans lendemains, mais soient effectivement appliqués pour le bien commun des peuples.

6. En cette année du grand Jubilé de l'An 2000, la récente canonisation de soeur Joséphine Bakhita est un motif de joie et de confiance non seulement pour le Soudan toujours durement éprouvé, mais pour l'Afrique tout entière. Le chemin qu'elle a suivi dans son existence personnelle peut et doit devenir un signe vivant pour tout le continent : de l'esclavage à la libération et à la pleine réalisation humaine et spirituelle. Avec tous les autres saints et bienheureux africains, elle ne manquera pas d’intercéder pour sa terre et pour un fructueux déroulement des travaux de votre Assemblée.

Cher Frère dans l'épiscopat, je vous confie, ainsi que tous les membres du Symposium des Conférences épiscopales d'Afrique et de Madagascar et leurs diocésains, à l'intercession de la Vierge très sainte, reine de l'Afrique, et à tous j'accorde de grand coeur une particulière Bénédiction apostolique.

Du Vatican, le 4 octobre 2000.


IOANNES PAULUS II


    


Discours 2000 - Lundi 25 septembre 2000