Discours 2000 - Vendredi 20 octobre 2000


LORS DE LA PRÉSENTATION DES LETTRES DE CRÉANCE DU NOUVEL AMBASSADEUR DU ROYAUME DES PAYS-BAS PRÈS LE SAINT SIÈGE

Lundi 23 octobre 2000



  Monsieur l'Ambassadeur,

Il m’est agréable de recevoir Votre Excellence au moment de la présentation des Lettres par lesquelles Sa Majesté la Reine Beatrix L'accrédite auprès du Saint-Siège en qualité d'Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire du Royaume des Pays-Bas.

Je vous remercie vivement, Monsieur l'Ambassadeur, de m’avoir transmis les salutations respectueuses de Sa Majesté la Reine Beatrix et je vous saurais gré en retour de L’assurer de mes voeux déférents pour sa personne et pour sa mission au service du Royaume. Je suis particulièrement sensible aux paroles que vous venez de m’adresser; elles manifestent votre attention, et à travers vous l’attention de votre pays, à quelques moments importants du grand Jubilé de l’An 2000, au cours duquel les chrétiens sont appelés à affermir et à renouveler leur vie spirituelle, pour s’engager toujours davantage dans l’édification de la vie sociale aux côtés de leurs frères, donnant ainsi un témoignage de plus en plus fort de l’importance des valeurs humaines, morales et chrétiennes. La participation de jeunes de votre pays aux Journées mondiales de la Jeunesse leur a permis d’exprimer leur foi et de découvrir que d’autres jeunes vivent comme eux les valeurs de l’Évangile. Ils sont repartis transformés par cette expérience ecclésiale, qu’ils sauront sans aucun doute mettre en oeuvre dans leur pays.

Comme vous le soulignez très opportunément, la valeur morale du respect d’autrui est essentielle à tous les niveaux des relations entre les personnes. En effet, pour que nos contemporains aient confiance dans les différentes institutions de la société civile, il importe avant tout qu’ils se sachent respectés et que soient pleinement reconnus leurs droits, dont les plus importants sont la dignité de toute vie humaine, dans les différentes étapes de l’existence d’une personne, et la liberté religieuse, qui est un élément fondamental de la liberté de conscience. Il en va de l’avenir de toute société, qui ne peut édicter des règles bafouant le respect le plus élémentaire dû à tout être humain, car l’homme demeure en toutes circonstances le centre de la vie sociale. Ces divers aspects de la vie morale sont des éléments importants pour la paix et la convivialité au sein d’une nation et entre les peuples. En effet, comment pourrait-on vouloir instaurer la paix en négligeant la dignité des personnes ?

Vous savez aussi l’attachement de l’Église catholique au mariage comme réalité humaine fondamentale et comme cellule de base de la société. Nulle autre forme de relation entre des personnes ne peut être considérée comme équivalente à cette relation naturelle entre un homme et une femme, qui, par leur amour, donneront naissance à des enfants. Il convient de se rappeler que toute société a besoin de structures de base pour se construire sur des fondements solides et objectifs.

Je suis particulièrement sensible à votre attention aux phénomènes de pauvreté dans le monde et aux disparités croissantes entre pays riches et pays pauvres. À maintes reprises au cours de cette année jubilaire, j’ai invité les Autorités des Nations à envisager une solidarité plus forte avec les pays les plus pauvres, notamment par un allégement de leur dette extérieure. Des décisions particulièrement significatives ont déjà été prises en ce sens, et je m’en réjouis, tout en appelant à poursuivre sur cette voie. Il importe aussi, au titre même de l’équité, que les peuples producteurs de matières premières puissent jouir de la croissance internationale et que les bénéfices ne reviennent pas uniquement à ceux qui transforment ces matières premières ou qui en font le commerce. L’économie doit être au service de tous les hommes, pour les faire vivre, et pour leur permettre d’avoir la place qui leur revient dans la société. C’est aussi un élément essentiel pour la cause de la paix. En effet, des peuples qui sont soumis aux règles du marché international sans en tirer les bénéfices vivent un certain nombre de déséquilibres sociaux et institutionnels, qui ne peuvent que favoriser les conflits. Dans le même temps, la promotion des peuples doit être le souci de tous. L’aide au développement suppose un partage à tous les niveaux et un suivi sérieux des projets engagés. De fait, accompagner la croissance d’un peuple, c’est lui permettre d’acquérir la formation et les moyens nécessaires, pour qu’il soit demain le protagoniste et l’agent principal de son progrès, dans une saine relation avec les autres pays dans le concert des nations. Je salue les efforts fait en ce sens par l’Europe, à laquelle appartient votre pays, invitant les Dirigeants du Continent à poursuivre et à intensifier leur action envers les pays pauvres et les régions où se déroulent des conflits, notamment en Afrique et au Moyen-Orient. Il importe de ne pas laisser se pérenniser des situations de tension, comme nous avons pu en connaître ailleurs, qui rendront difficile le règlement des conflits et qui hypothéqueront pour l’avenir une bonne organisation de la société civile et des institutions nationales.

Par votre entremise, Monsieur l'Ambassadeur, je voudrais saluer l'Église catholique dans votre pays; j’encourage les pasteurs et les fidèles dans leur mission d’annonce explicite de l’Évangile auprès de tous et dans leur participation à la vie sociale au milieu de leurs frères, les invitant à des gestes significatifs sur le plan oecuménique, dans le respect de la foi de chaque communauté. Mes salutations déférentes vont aussi à Sa majesté la Reine Beatrix, à toute la famille royale, à l’ensemble des Autorités civiles et religieuses, et au peuple néerlandais tout entier, auquel j’adresse mes voeux de bonheur et de prospérité, demandant au Seigneur de les assister dans leur vie personnelle, familiale et civique.

Au moment où commence votre mission de Représentant du Royaume des Pays-Bas auprès du Siège apostolique, je vous offre mes voeux les meilleurs. Soyez assuré, Monsieur l’Ambassadeur, que vous trouverez toujours auprès de mes collaborateurs un accueil chaleureux et une aide compréhensive ­pour accomplir la mission qui vous est confiée.

Je demande à Dieu de faire descendre sur vous, sur vos proches, sur vos collaborateurs de l’Ambassade et sur tous vos compatriotes, les bienfaits de ses Bénédictions.



    MESSAGE AUX JEUNES DE SICILE, À L'OCCASION DU PÈLERINAGE JUBILAIRE AU SANCTUAIRE DE LA MADONE DES LARMES À SYRACUSE



Très chers jeunes de Sicile,

1. Je suis très heureux de m'adresser à vous, alors que vous êtes réunis pour accomplir un pèlerinage jubilaire spécial au Sanctuaire de la Madone des Larmes de Syracuse, que j'ai consacré il y a six ans. J'ai appris avec une grande satisfaction que votre Jubilé se déroule en présence des Evêques de Sicile, au terme de leurs Exercices spirituels. Ce fait exprime le caractère profondément ecclésial de l'initiative et, plus généralement, l'amour et l'attention de l'Eglise qui est en Sicile à l'égard des nouvelles générations. A vous tous, jeunes siciliens, et à vous, très chers frères Evêques et prêtres, j'adresse mon salut le plus affectueux.

Chers jeunes, votre Jubilé régional est lié à la récente Journée mondiale de la Jeunesse, qui s'est déroulée à Rome, en particulier lors de la mémorable veillée du 19 août, à laquelle beaucoup d'entre vous ont pris part. A travers ce message, je voudrais reprendre le dialogue que j'ai eu avec les jeunes à Tor Vergata. J'ai dit alors: "Chers amis, je vois en vous les "veilleurs du matin"" (cf. Is 21,11-12) en cette aube du troisième millénaire.

"Veilleurs du matin"! Ces paroles du prophète Isaïe vous ont frappés, et vous les avez choisies comme thème de votre veillée-pèlerinage, pour qu'elles constituent un encouragement et une orientation pour votre engagement. La généreuse adhésion avec laquelle vous avez accueilli ma proposition a été réconfortante pour moi! Le coeur du Pape se réjouit et rend grâce à Dieu, car les jeunes non seulement écoutent, mais ils accueillent, ils réfléchissent et surtout, ils s'efforcent de mettre en pratique la parole reçue, qui n'est pas une parole d'hommes, mais la Parole de Dieu, qui agit en vous qui croyez (cf. 1Th 2,13).


2. Car vous, chers jeunes, vous voulez croire dans le Christ! La foi, comme vous vous en souviendrez, a été le contenu fondamental de la grande veillée de Tor Vergata. A Rome, ville de Pierre et de Paul, j'ai "remis" à la jeunesse du monde entier l'engagement de la profession courageuse de la foi dans le Christ, une profession pour laquelle les Apôtres et les martyrs ont donné leur vie. Jeunes de Sicile, êtes-vous disposés vous aussi à donner votre vie pour cette foi?
Certains pensent qu'adhérer au Christ signifie faire du tort à sa propre humanité, en diminuant sa valeur. Rien de plus faux! Au contraire, comme je l'ai remarqué à Tor Vergata "en disant "oui" au Christ, vous dites "oui" à chacun de vos plus nobles idéaux" (n. 6). Certes, choisir Jésus signifie renoncer au péché, mais le péché n'est pas la réalisation de la nature humaine; c'est un appauvrissement de celle-ci! Dieu ne nous a pas faits pour le mal, mais pour le bien, la vérité et la beauté, c'est-à-dire pour Lui, notre Créateur et notre Père. Comme l'écrivait saint Augustin: "Tu nous a faits pour toi et notre coeur n'aura de paix que lorsqu'il reposera en toi" (Conf., 1, 1, 1).

C'est pourquoi, chers amis, n'ayez pas peur de prononcer un oui total à Jésus, comme Pierre, comme Paul, comme François et Claire d'Assise, comme Agathe de Catane et Lucie de Syracuse, comme saint Domenico Savio et Pier Giorgio Frassati, comme les nombreux témoins de l'Evangile qui ont fleuri au cours des siècles également dans votre Sicile. Les figures lumineuses de croyants n'ont pas manqué, en ce vingtième siècle, sur votre terre elle-même, et leur exemple reste pour vous un point de référence vers lequel vous tourner pour trouver une inspiration dans vos choix concrets. Jeunes siciliens et jeunes siciliennes, soutenus par le témoignage éloquent de vos compatriotes, parcourez avec courage la voie de la sainteté personnelle, en vous nourrissant de façon assidue de la Parole de Dieu et de l'Eucharistie. Plus vous serez saints, et plus vous pourrez contribuer à édifier l'Eglise et la société.


3. Soyez des "pierres vivantes" (cf. 1P 2,5) dans vos communautés paroissiales, en collaborant généreusement avec les prêtres et entre vous. Apprenez à assumer vos responsabilités, et entraînez-vous à cela dans les groupes, dans les associations et dans les mouvements de laïcs, parmi lesquels je recommande en particulier l'Action catholique, école d'engagement ecclésial et civil. De cette façon, vous apporterez une contribution importante au cheminement des Eglises de Sicile, également en vue du prochain Congrès ecclésial régional, qui traitera précisément des laïcs.

Soyez missionnaires! La foi est un don qui, partagé avec les autres croyants, croît et mûrit. Apportez l'Evangile à tous, en particulier aux jeunes de votre âge, et tout d'abord à ceux qui sont moins considérés et davantage en difficulté. Unissez toujours les faits aux paroles; que votre force soit celle de la vérité.

Résistez aux logiques négatives, que malheureusement vous rencontrez parfois autour de vous. Rappelez-vous que Jésus dit à ses Apôtres: "Voici que je vous envoie comme des brebis au milieu des loups; montrez-vous donc prudents comme les serpents et candides comme les colombes" (Mt 10,16). Ne vous contentez pas d'être un pain frais et parfumé: vous devez être le levain évangélique dans l'école et l'Université, dans le monde du travail et celui du sport, en famille et parmi vos amis. Participez à la vie publique et aux institutions en restant détachés de tout intérêt personnel et en agissant toujours et seulement pour le bien commun.


4. Le patrimoine naturel et culturel de votre Sicile est grand: il est en particulier confié à vous, jeunes du troisième millénaire. Apprenez à le connaître, à le reconnaître, à le valoriser. Vous avez la chance de vivre dans une région parmi les plus riches d'histoire: puisez à ces racines, pour accroître votre humanité, faire vôtres et développer les valeurs religieuses, artistiques, culturelles et morales dont vous êtes les héritiers. Dans ces valeurs, vous pourrez également trouver un terrain de rencontre avec des personnes d'autres nationalités et cultures, et renouveler ainsi la vocation de la Sicile à être un carrefour de peuples au coeur de la Méditerranée.

L'héritage le plus précieux de ce patrimoine est sans aucun doute la foi dans le Christ et l'amour envers sa Très Sainte Mère. Le sanctuaire vers lequel, en tant que pèlerins, vous vous acheminez, rappelle le mystère des larmes de Marie et de Jésus lui-même: tournez le regard de votre coeur vers ce mystère, pour contempler l'amour immense de Dieu, qui a envoyé son Fils comme victime d'expiation pour nos péchés. Que ces larmes vous purifient intérieurement et vous communiquent la paix et la joie, qui sont un don du Christ et que rien ni personne ne pourra vous enlever.

Dans votre prière, je vous demande de garder à l'esprit également mes intentions, de même que je vous assure de ma proximité spirituelle. En signe de ma grande affection, j'envoie de tout coeur à chacun de vous et à vos Evêques la Bénédiction apostolique, en l'étendant volontiers aux prêtres, à vos proches et à ceux qui vous accompagnent sur le chemin de la vie quotidienne.

Du Vatican, le 18 octobre 2000.



LORS DE LA PRÉSENTATION DES LETTRES DE CRÉANCE DU NOUVEL AMBASSADEUR DE LA RÉPUBLIQUE DU LIBAN PRÈS LE SAINT SIÈGE

Jeudi 26 octobre 2000


Monsieur l'Ambassadeur,

1. Je suis particulièrement heureux de souhaiter la bienvenue à Votre Excellence à l'occasion de la présentation des Lettres qui L'accréditent comme Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de la République du Liban auprès du Saint Siège.

Je vous remercie des aimables paroles que vous m'avez adressées et je vous saurai gré de bien vouloir faire part de ma gratitude à son Excellence le Général Emile Lahoud, Président de la République libanaise, pour les voeux qu'il m'a fait parvenir par votre intermédiaire. À travers vous, je désire saluer avec affection le peuple libanais tout entier. Le souvenir de l'accueil chaleureux qu'il m'a réservé lors de mon voyage au Liban demeure encore présent à mon coeur.

2. J'ai accueilli avec attention ce dont vous m'avez fait part à propos des développements de la situation dans le sud du Liban ainsi que des évolutions politiques qui se sont produites au cours des dernières semaines. Je souhaite que l'amour que tous les Libanais portent à leur patrie les aide à vivre ensemble en se tournant vers l'avenir, animés par un souci ardent de «réussir ce défi de la réconciliation et de la fraternité, de la liberté et de la solidarité, qui est la condition essentielle de l'existence du Liban et le ciment de votre unité sur cette terre que vous aimez» (Exhortation apostolique Une espérance nouvelle pour le Liban, n. 120). La tentation d'une renaissance des sentiments qui dans le passé ont eu de graves conséquences saura être évitée notamment grâce au développement de la démocratie et à la possibilité donnée à tous les citoyens de participer à la vie du pays, indépendamment de leur appartenance religieuse ou communautaire.

La consolidation de la confiance entre les communautés humaines et religieuses qui composent le pays est une condition nécessaire pour bannir la peur de l'autre et pour retrouver le goût de vivre ensemble. Cette confiance mutuelle, qui doit inspirer la vie sociale à tous les niveaux, s'appuie d'abord sur l'acceptation par tous des valeurs morales universelles telles que le respect de la vie et des droits humains fondamentaux ou encore la liberté de conscience et de religion. Il est en particulier urgent de permettre à chacun d'avoir des conditions de vie décentes et dignes. La confiance s'approfondit aussi par un dialogue patient et respectueux entre les composantes de la nation ainsi que par la participation commune au développement du pays.



Pour y parvenir, il revient aux personnes qui ont reçu la charge de conduire la nation de travailler avec détermination, désintéressement et persévérance pour le bien commun, et de favoriser un partage équitable des responsabilités, sans rechercher de privilèges pour soi-même ou pour sa communauté. Toutefois, comme j'ai déjà eu l'occasion de le souligner, «cela suppose aussi que le pays recouvre sa totale indépendance, une souveraineté complète et une liberté sans ambiguïté» (Une espérance nouvelle pour le Liban, n. 121)



3. La conjoncture actuelle au Moyen-Orient demeure particulièrement inquiétante. L'établissement définitif de la paix et de la sécurité dans la région se fait toujours plus attendre et semble parfois s'éloigner. On ne peut que constater que l'enchaînement de la violence conduit toujours à un plus grand malheur pour tous, ravivant les oppositions et rendant plus difficile toute perspective de réconciliation. La Terre Sainte, où Dieu s'est manifesté et a parlé aux hommes, doit devenir le lieu par excellence où fleurissent la paix et la justice. Jérusalem doit être un symbole particulièrement fort d'unité, de paix et de réconciliation pour toute la famille humaine!  



Vous avez rappelé, Monsieur l'Ambassadeur, les efforts accomplis par le Saint Siège afin de contribuer à trouver une solution juste et équitable pour la Ville sainte et notamment pour les Lieux saints des trois religions qui y coexistent. Les relations confiantes qui se développent entre le Siège apostolique et les peuples de la région laissent espérer que viendra le jour où, par le dialogue et la négociation, dans le respect de la dignité et de l'identité des communautés, pourra être établi pour les lieux les plus saints de la Ville un statut spécial internationalement garanti.



4. Permettez-moi, Monsieur l'Ambassadeur, d'adresser par votre entremise mon plus cordial salut aux Patriarches, aux Evêques et à tous les fidèles des communautés catholiques du Liban. En cette année du grand Jubilé, je les invite à se laisser renouveler par le Christ et à trouver en lui force, joie et espérance. En poursuivant avec détermination leurs efforts pour affermir des relations toujours plus fraternelles avec les fidèles des autres Églises et Communautés ecclésiales ainsi qu'avec les membres des religions monothéistes, en particulier avec les musulmans, ils contribuent à édifier un Liban nouveau, capable de dépasser les incompréhensions et de rechercher d'abord le bonheur et la prospérité pour tous ses enfants. Qu'en demeurant fermement attachés à leur terre, ils continuent à travailler sans relâche, avec tous leurs compatriotes, à servir le bien commun, en tirant de leur foi leur inspiration et leurs principes de vie, pour être témoins des valeurs évangéliques dans la société!



5. Monsieur l'Ambassadeur, alors que commence officiellement votre mission auprès du Siège apostolique, je vous offre mes voeux cordiaux pour la noble tâche qui vous attend. Soyez assuré que vous trouverez ici, auprès de mes collaborateurs, l'accueil attentif et compréhensif dont vous pourrez avoir besoin.



Sur Votre Excellence, sur ses collaborateurs et sur ses proches, sur les responsables de la nation et sur le peuple libanais tout entier, j'invoque de grand coeur l'abondance des Bénédictions divines.




JUBILÉ DES SPORTIFS

Samedi 28 octobre 2000


Mesdames, Messieurs!

1. J'interviens bien volontiers au cours de votre Congrès international sur le thème significatif: "En temps de Jubilé: le visage et l'âme du sport". Dans l'attente de rencontrer demain, au Stade olympique, tout le monde du sport qui célèbre son Jubilé, j'ai aujourd'hui l'agréable occasion de vous saluer, vous qui êtes à divers titres des représentants qualifiés du sport.

Je salue les organisateurs de cette rencontre, en particulier le Président du Comité olympique international, M. Juan Antonio Samaranch, le Président du Comité olympique italien, M. Giovanni Petrucci, et j'étends mon salut aux divers rapporteurs et représentants des multiples réalités sportives dans le monde. Je remercie, en particulier, Mgr Crescenzio Sepe qui s'est fait l'interprète des sentiments communs, illustrant la signification de cette rencontre.

Le thème que vous avez choisi pour votre réflexion attire l'attention sur la nature et les finalités de la pratique sportive à notre époque, qui est caractérisée par des changements sociaux multiples et profonds. Le sport est certainement l'un des phénomènes importants qui, à travers un langage compréhensible à tous, peut communiquer des valeurs très profondes. Il peut être le véhicule de valeurs humaines et spirituelles élevées lorsqu'il est pratiqué dans le plein respect des règles; mais il peut également manquer son but authentique lorsqu'il laisse place à d'autres intérêts, qui ignorent le caractère central de la personne humaine.

2. Le thème du Congrès parle du "visage" et de l'"âme" du sport. En effet, l'activité sportive met en lumière, outre les riches possibilités physiques de l'homme, également ses capacités intellectuelles et spirituelles. Le sport ne signifie pas uniquement la puissance physique et la force musculaire, mais il possède également une âme et il doit montrer son visage intégral. Voilà pourquoi le véritable athlète ne doit pas se laisser emporter par l'obsession de la perfection physique, ni se laisser asservir par les dures lois de la production et de la consommation, ou par des considérations purement utilitaristes et hédonistes.

Les potentialités du phénomène sportif en font un instrument significatif pour le développement global de la personne et un facteur plus que jamais utile pour l'édification d'une société davantage à mesure de l'homme. Le sens de la fraternité, la magnanimité, l'honnêteté et le respect du corps - vertus sans aucun doute indispensables à tout bon athlète - contribuent à l'édification d'une société civile, où l'antagonisme laisse place à l'esprit sportif, où l'on préfère la rencontre à l'affrontement et la confrontation loyale à l'opposition hostile. Compris de cette façon, le sport n'est pas un but, mais un moyen; il peut devenir un véhicule de civilisation et de saine détente, en incitant la personne à mettre en jeu le meilleur de soi et à fuir ce qui peut être dangereux ou porter gravement atteinte à soi-même ou aux autres.


3. On constate malheureusement de nombreux signes, qui deviennent peut-être davantage évidents, d'un malaise qui remet parfois en discussion les valeurs éthiques qui fondent la pratique sportive elle-même. A côté d'un sport qui aide la personne, il en existe en effet un autre qui lui porte atteinte; à côté d'un sport qui exalte le corps, il en existe un autre qui le blesse et le trahit; à côté d'un sport qui poursuit de nobles idéaux, il en existe un autre qui ne recherche que le profit; à côté d'un sport qui unit, il en existe un autre qui divise.
Mon voeu est que ce Jubilé du Sport constitue une occasion pour tous, chers responsables, dirigeants, passionnés de sport et athlètes, de retrouver un nouvel élan créatif et dynamique, à travers une pratique sportive qui sache concilier dans un esprit constructif les exigences complexes requises par les changements culturels et sociaux en cours, avec celles de l'être humain qui sont immuables.


4. Permettez-moi d'ajouter une considération. Le sport, alors qu'il développe la force physique et fortifie le caractère, ne doit jamais distraire de leurs devoirs spirituels ceux qui le pratiquent et l'apprécient. Ce serait comme si l'on courait, selon ce qu'écrit saint Paul "pour une couronne périssable", en oubliant que les chrétiens ne doivent jamais perdre de vue "celle qui est impérissable" (cf. 1Co 9,25). La dimension spirituelle doit être cultivée et harmonisée avec les diverses activités de détente, auxquelles appartient également le sport.

Les rythmes de la société moderne et de certaines activités de compétition pourraient parfois faire oublier au chrétien la nécessité de participer à l'assemblée liturgique le Jour du Seigneur. Les exigences d'une détente juste et méritée ne peuvent cependant pas exister au détriment de l'obligation du fidèle de sanctifier le jour de fête. Au contraire, le Jour du Seigneur, l'activité sportive doit être insérée dans un contexte de détente sereine, qui encourage le fait d'être ensemble et de croître dans la communion, en particulier familiale.

Je forme de tout coeur des voeux fervents pour votre rencontre et, alors que j'invoque sur vous la protection de Marie, je vous assure tous de mon souvenir dans la prière et je vous bénis volontiers.

 
Jubilé 2000


Novembre




AUX PARTICIPANTS À LA CONFÉRENCE MINISTÉRIELLE DU CONSEIL DE L’EUROPE ET À LA CÉLÉBRATION DU 50ème ANNIVERSAIRE DE LA CONVENTION EUROPÉENNE DES DROITS DE L’HOMME

Vendredi 3 novembre 2000


  Mesdames et Messieurs,

1. Je suis heureux de vous accueillir aujourd'hui à l'occasion de la Conférence ministérielle qui se tient sous la présidence de l'Italie pour commémorer le 50e anniversaire de la signature à Rome, le 4 novembre 1950, de la Convention européenne des Droits de l'Homme. Je salue le Ministre italien des Affaires étrangères et Président de la Conférence ministérielle, M. Lamberto Dini; le Secrétaire général du Conseil de l'Europe, M. Walter Schwimmer; le Président de l'Assemblée parlementaire, Lord Johnston, ainsi que son Secrétaire général, M. Bruno Haller.


2. Après la Deuxième Guerre mondiale, le Conseil de l'Europe a adopté une nouvelle vision politique et établi un nouvel ordre juridique, enracinant le principe selon lequel le respect pour les droits humains transcende la souveraineté nationale et ne peut être subordonné à des buts politiques ou compromis par des intérêts nationaux. A travers cela, le Conseil a contribué à établir les fondements de la reprise morale, nécessaire après les destructions de la guerre, et la Convention européenne sur les Droits de l'Homme s'est révélée être un élément vital de ce processus.

La Convention fut un document véritablement historique, et elle demeure un instrument juridique unique, qui vise à proclamer et à sauvegarder les droits fondamentaux de chaque citoyen des Etats signataires. Il s'agit d'une réponse concrète et créative à la Déclaration universelle des Droits de l'Homme, qui née en 1948 de la tragique expérience de la guerre et qui était profondément enracinée dans la double conviction de la centralité de la personne et de l'unité de la famille humaine. En tant que telle, la Convention a représenté un moment important dans la maturation du sens de la dignité innée de la personne humaine et de la conscience des droits et des devoirs qui en dérivent.

Il est également significatif que, après avoir été libérées d'une idéologie aliénante et de formes totalitaires de gouvernement, les nouvelles démocraties de l'Europe de l'Est se sont tournées vers le Conseil de l'Europe comme point central d'unité pour tous les peuples du continent, une unité qui ne peut être conçue sans les valeurs morales et religieuses qui forment l'héritage commun de toutes les nations européennes. Leur désir d'adhérer à la Convention européenne des Droits de l'Homme reflète la volonté de préserver les libertés fondamentales qui leur ont été niées pendant si longtemps. A cet égard, j'ai toujours été convaincu que les peuples de l'Europe de l'Est et de l'Ouest, profondément unis par l'histoire et la culture, partagent un destin commun. Au centre de notre héritage européen commun, - religieux, culturel et juridique - réside la notion de la dignité inviolable de la personne humaine, qui implique des droits inaliénables conférés non pas par les gouvernements ou les institutions, mais par le Créateur seul, à l'image duquel ont été créés tous les hommes (cf. Gn 1,26).


3. Tout au long des années, le Saint-Siège a participé à l'activité du Conseil de l'Europe, s'efforçant, de la façon qui lui est propre, d'accompagner et d'aider l'oeuvre toujours plus vaste du Conseil dans le domaine des droits de l'homme. Conscient du rôle unique que la Cour européenne des Droits de l'Homme joue dans les affaires de l'Europe, le Saint-Siège s'est intéressé de façon particulière à la jurisprudence de la Cour. Les juges sont les gardiens de la Convention et de sa vision des droits humains, et je suis heureux d'avoir l'occasion aujourd'hui d'accueillir le Président de la Cour, M. Lucius Wild-haber, ainsi que les autres juges, et de vous transmettre mes meilleurs voeux pour votre tâche noble et exigeante.

Le cinquantième anniversaire de la Convention est un temps pour rendre grâce pour ce qui a été fait et pour renouveler notre engagement à faire respecter toujours plus pleinement et amplement les droits humains en Europe. Il s'agit donc d'un temps pour identifier clairement les problèmes qui doivent être affrontés pour y parvenir. Parmi ceux-ci, la tendance à séparer les droits humains de leur fondement anthropologique - c'est-à-dire de la vision de la personne humaine originaire de la culture européenne - est fondamentale. Il existe également une tendance à interpréter les droits uniquement dans une perspective individualiste, en portant peu de considération pour le rôle de la famille comme "noyau fondamental de la société" (Déclaration universelle des Droits de l'Homme, art. 16). Il existe également le paradoxe selon lequel, d'un côté, le besoin de respecter les droits humains est fortement affirmé tandis que, d'un autre côté, le plus fondamental d'entre eux - le droit à la vie - est nié. Le Conseil de l'Europe a réussi à éliminer la peine de mort de la législation d'une grande majorité de ses Etats-membres. Tout en me réjouissant de cette noble conquête et dans l'attente qu'elle s'étende au reste du monde, je forme des voeux fervents afin que l'on parvienne au plus tôt à comprendre également qu'une grave injustice est commise lorsqu'une vie innocente n'est pas sauvegardée dans le sein de la mère. Cette contradiction radicale n'est possible que lorsque la liberté est détachée de la vérité inhérente à la réalité des choses et que la démocratie est séparée des valeurs transcendantes.


4. En dépit de tous les problèmes qui apparaissent à présent évidents et des défis qui se présentent à nous, nous devons être certains que le véritable génie de l'Europe émergera de la redécouverte de la sagesse humaine et spirituelle intrinsèque à l'héritage commun du respect pour la dignité humaine et des droits qui en découlent. Tandis que nous entrons dans le troisième millénaire, le Conseil de l'Europe est appelé à consolider le sens d'un bien européen commun. Ce n'est qu'à cette condition que le continent, à l'Est et à l'Ouest, apportera sa contribution spécifique et d'une importance unique au bien de toute la famille humaine. En formant des prières ferventes à cette fin, j'invoque sur vous, sur vos familles et sur vos efforts au service des peuples d'Europe, les Bénédictions abondantes de Dieu tout-puissant.


  JUBILÉ DES RESPONSABLES DE GOUVERNEMENTS, DES PARLEMENTAIRES ET DES HOMMES POLITIQUES

Samedi 4 novembre 2000


1. Je suis heureux de vous accueillir en cette audience spéciale, vous qui êtes Responsables de Gouvernements, Parlementaires et administrateurs des affaires publiques et qui êtes venus à Rome pour le Jubilé. Je vous adresse mes salutations déférentes et je remercie Monsieur le Sénateur Nicola Mancino pour les aimables paroles par lesquelles il s’est fait l’interprète de vos sentiments. Ma pensée reconnaissante s’étend à Monsieur le Sénateur Francesco Cossiga, promoteur actif de la proclamation de saint Thomas More comme Patron des Responsables de Gouvernements et des Hommes politiques. Je salue également les autres personnalités qui ont pris la parole, et parmi elles Monsieur Michaïl Gorbatchev. J'adresse une parole spéciale de bienvenue aux Chefs d'État présents.

Cette rencontre me donne l’occasion de réfléchir avec vous – notamment à la lumière des motions qui viennent d’être présentées – sur la nature de la mission à laquelle Dieu vous a appelés dans sa bienveillante providence et sur la responsabilité qu’elle comporte. Votre vocation peut bien, en effet, être considérée comme une véritable vocation à l’action politique, ce qui veut dire en pratique vocation au gouvernement des nations, à la formation des lois et à la gestion des affaires publiques, tout cela à différents niveaux. Il est alors nécessaire de s’interroger sur la nature, sur les exigences et sur les finalités de la politique afin de la vivre en chrétiens et en hommes conscients de sa noblesse en même temps que des difficultés et des risques qu’elle implique.

2. La politique est l’utilisation du pouvoir légitime pour atteindre le bien commun de la société, bien commun qui, comme l’affirme le Concile Vatican II, se concrétise dans «l’ensemble des conditions de vie sociale qui rendent possible pour les hommes, les familles et les groupes un accomplissement d’eux-mêmes plus plénier et plus aisé» (Gaudium et spes GS 74). L’activité politique doit donc s’exercer en esprit de service. Mon prédécesseur Paul VI a affirmé à juste titre que «la politique est une manière exigeante [...] de vivre l’engagement chrétien au service des autres» (Octogesima adveniens, n. 46).

Voilà pourquoi le chrétien qui fait de la politique – et qui veut la faire «en chrétien» – doit agir avec désintéressement, cherchant non pas sa propre utilité ni celle de son groupe ou de son parti, mais le bien de tous et de chacun, et donc avant tout le bien de ceux qui, dans la société, sont les plus désavantagés. Dans la bataille de l’existence, qui prend parfois des formes impitoyables et cruelles, nombreux sont les «vaincus» qui se retrouvent inexorablement mis à l’écart. Parmi eux, je ne puis oublier ceux qui sont détenus dans les prisons; je me suis rendu au milieu d’eux le 9 juillet dernier, à l’occasion de leur Jubilé. En cette circonstance, me référant à la coutume des précédentes Années jubilaires, j’ai demandé aux Responsables des États «un signe de clémence au bénéfice de tous les détenus», qui constituerait «un signe clair de sensibilité à l’égard de leur situation». Poussé par les multiples requêtes qui me parviennent de toute part, je renouvelle aujourd’hui encore cet appel, convaincu qu’un tel geste les encouragerait sur la route du repentir intérieur et les entraînerait à adhérer de façon plus convaincue aux valeurs de la justice.

Telle doit être précisément la préoccupation essentielle de l’homme politique : la justice, une justice qui ne se contente pas de donner à chacun son dû mais qui tende à créer entre les citoyens des conditions d’égalités de chances et donc à favoriser ceux qui, en raison de leur condition sociale, de leur culture, de leur santé, risquent de rester en arrière ou d’être toujours aux dernières places dans la société, sans aucune possibilité de se racheter personnellement.

C’est le scandale des sociétés opulentes du monde d’aujourd’hui, dans lesquelles les riches deviennent toujours plus riches, parce que la richesse produit la richesse, et les pauvres deviennent toujours plus pauvres, parce que la pauvreté tend à créer d’autres pauvretés. Ce scandale n’existe pas seulement à l’intérieur des diverses nations : il a des dimensions qui dépassent largement leurs frontières. Aujourd’hui surtout, avec le phénomène de la mondialisation des marchés, les pays riches et développés tendent à améliorer davantage encore leur situation économique, tandis que les pays pauvres – à l’exception de quelques-uns qui connaissent un développement prometteur – tendent à sombrer dans des formes de pauvreté toujours plus pénibles.

3. Je pense avec angoisse aux régions du monde qui sont affligées par des guerres et des guérillas sans fin, par la faim endémique et par de terribles maladies. Parmi vous, beaucoup sont préoccupés autant que moi par cet état de chose qui, d’un point de vue chrétien et humain, constitue le péché d’injustice le plus grave du monde moderne et doit donc secouer profondément la conscience des chrétiens d’aujourd’hui, à commencer par ceux qui, ayant en mains les leviers politiques, économiques et financiers du monde, peuvent déterminer – en bien ou en mal – les destinées des peuples.

En réalité, c’est l’esprit de solidarité qui doit croître dans le monde, pour vaincre l’égoïsme des personnes et des nations. Ce n’est qu’ainsi que l’on pourra mettre un frein à la recherche de la puissance politique et de la richesse économique en dehors de toute référence à d’autres valeurs. Dans un univers désormais mondialisé, où le marché – qui a en soi un rôle positif sur la libre créativité humaine dans le secteur de l’économie (cf. Centesimus annus CA 42) – tend toutefois à se libérer de toute considération morale, retenant comme règle unique la loi du profit maximal, les chrétiens qui se sentent appelés par Dieu à la vie politique ont pour tâche – très difficile, certes, mais nécessaire – de soumettre les lois du marché «sauvage» aux lois de la justice et de la solidarité. C’est l’unique moyen d’assurer à notre monde un avenir pacifique, en détruisant à la racine les causes de conflits et de guerres : la paix est le fruit de la justice.

4. Je voudrais maintenant dire un mot particulier à ceux d’entre vous qui ont la tâche très délicate d’élaborer et d’approuver les lois; c’est une tâche qui rapproche l’homme de Dieu, Législateur suprême : dans sa Loi éternelle toute loi puise, en dernière analyse, sa valeur et sa force contraignante. C’est précisément à cela que l’on se réfère quand on affirme que la loi positive ne peut contredire la loi naturelle, cette dernière n’étant pas autre chose que l’indication des normes premières et essentielles qui règlent la vie morale, et donc de ce qui constitue les caractères, les exigences et les valeurs les plus hautes de la personne humaine. Comme j’ai déjà eu l’occasion de le dire dans l’encyclique Evangelium vitae, «le fondement de ces valeurs ne peut se trouver dans des “majorités” d'opinion provisoires et fluctuantes, mais seulement dans la reconnaissance d'une loi morale objective qui, en tant que “loi naturelle” inscrite dans le coeur de l'homme, est une référence normative pour la loi civile elle-même» (EV 70).

Cela veut dire que les lois, quels que soient les domaines dans lesquels le législateur intervient ou est obligé d’intervenir, doivent toujours respecter et promouvoir – dans la variété de leurs exigences spirituelles et matérielles, personnelles, familiales et sociales – les personnes humaines. C’est pourquoi une loi qui ne respecterait pas le droit à la vie – de la conception à la mort naturelle – de l’être humain, quelle que soit la condition dans laquelle il se trouve – qu’il soit sain ou malade, encore à l’état embryonnaire, âgé ou en phase terminale – n’est pas une loi conforme au dessein divin; aussi un législateur chrétien ne peut-il ni contribuer à la formuler ni l’approuver en séance parlementaire, bien que, là où cela existe, il lui soit licite de proposer des amendements qui en atténuent le caractère dommageable lors des discussions au Parlement. Il faut en dire autant de toute loi qui nuirait à la famille et porterait atteinte à son unité et à son indissolubilité, ou bien qui conférerait une valeur légale à des unions entre personnes, y compris de même sexe, qui prétendraient se substituer avec les mêmes droits à la famille fondée sur le mariage entre un homme et une femme.

Il n’y a pas de doute que, dans l’actuelle société pluraliste, le législateur chrétien se trouve face à des conceptions de la vie, à des lois et à des demandes de légalisation qui sont contraires à sa conscience. C’est alors la prudence chrétienne, vertu propre à l’homme politique chrétien, qui lui indiquera comment se comporter pour ne pas manquer, d’une part, à l’appel de sa conscience correctement formée, ni d’autre part à sa tâche de législateur. Il ne s’agit pas, pour le chrétien d’aujourd’hui, de sortir du monde où l’appel de Dieu l’a placé, mais de donner un témoignage de sa foi et d’être logique avec ses principes, dans les circonstances difficiles et toujours nouvelles qui caractérisent la sphère de la politique.

5. Mesdames et Messieurs, les temps que Dieu nous donne de vivre sont, sous bien des aspects, obscurs et difficiles, car ce sont des temps où est mis en jeu l’avenir même de l’humanité dans le millénaire qui s’ouvre devant nous. En beaucoup d’hommes de notre époque dominent la peur et l’incertitude : où allons-nous ? Quel sera le destin de l’humanité dans le prochain siècle ? Où nous conduiront les extraordinaires découvertes scientifiques, surtout dans le domaine biologique et génétique, faites ces dernières années ? Nous avons conscience, en effet, de n’être qu’au début d’un chemin dont nous ne savons pas où il pourra aboutir ni s’il sera au bénéfice ou au détriment des hommes du XXIe siècle.

Nous autres, chrétiens de ce temps, redoutable et en même temps merveilleux, tout en participant aux peurs, aux incertitudes et aux interrogations des hommes d’aujourd’hui, nous ne sommes pas pessimistes en ce qui concerne l’avenir, parce que nous avons la certitude que Jésus Christ est le Seigneur de l’histoire, et parce que nous avons dans l’Évangile la lumière qui éclaire notre chemin, même dans les moments difficiles et obscurs.

La rencontre avec le Christ a transformé un jour votre vie, et aujourd’hui vous avez voulu renouveler sa splendeur par ce pèlerinage aux tombeaux des Apôtres Pierre et Paul. Dans la mesure où vous conserverez un lien étroit avec Lui, par la prière personnelle et la participation persévérante à la vie de l’Église, Lui-même, le Vivant, continuera à répandre sur vous l’Esprit Saint, l’Esprit de vérité et d’amour, la force et la lumière dont nous avons tous besoin.

Par un acte de foi sincère et convaincue, renouvelez votre adhésion à Jésus Christ, Sauveur du monde, et faites de son Évangile le guide de votre pensée et de votre vie. Vous serez alors dans la société d’aujourd’hui le ferment de vie nouvelle dont l’humanité a besoin pour bâtir un avenir plus juste et plus solidaire, un avenir ouvert à la civilisation de l’amour.

     


Discours 2000 - Vendredi 20 octobre 2000