Discours 2001 - Samedi 3 mars 2001


AUX PARTICIPANTS À L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE DE L'ACADÉMIE PONTIFICALE POUR LA VIE

Samedi 3 mars 2001



1. C'est toujours avec un profond plaisir que je vous rencontre, illustres membres de l'Académie pontificale pour la Vie. Aujourd'hui, le motif qui m'en offre l'occasion est votre Assemblée générale annuelle, qui vous réunit à Rome de divers pays. J'adresse mon plus cordial salut à chacun de vous, éminents amis qui formez la famille de cette Académie qui m'est si chère. J'adresse une pensée particulière et respectueuse à votre Président, le Professeur Juan de Dios Vial Correa, que je remercie pour les aimables paroles à travers lesquelles il a interprété vos sentiments. J'étends mon salut au Vice-Président, Mgr Elio Sgreccia, aux membres du Conseil de direction, aux collaborateurs et aux bienfaiteurs.


2. Votre Assemblée a choisi comme argument pour sa réflexion un thème très intéressant: "La culture de la vie: fondements et dimensions". Déjà dans sa formulation, ce thème exprime la volonté de porter l'attention sur l'aspect positif et constructif de la défense de la vie humaine. Ces jours-ci, vous vous êtes demandé de quels fondements il faut partir pour promouvoir ou réactiver une culture de la vie et à travers quels contenus il faut la proposer à une société marquée - comme je le rappelais dans l'Encyclique Evangelium vitae - par une culture de la mort toujours plus diffuse et alarmante (cf. EV EV 7,17).

La meilleure façon de surmonter et de vaincre la dangereuse culture de la mort consiste précisément à apporter de solides fondements et des contenus lumineux à une culture de la vie qui s'oppose à elle avec force. Il n'est pas suffisant, même si cela est nécessaire et juste, de se limiter à exposer les effets dangereux de la culture de la mort. Il faut plutôt régénérer constamment le tissu intérieur de la culture contemporaine, entendue comme mentalité vécue, comme convictions et comportements, comme structures sociales qui la soutiennent.

Cette réflexion apparaît d'autant plus précieuse si l'on considère que la culture influence non seulement le comportement individuel, mais également les choix législatifs et politiques qui, à leur tour, véhiculent des courants culturels qui empêchent malheureusement souvent l'authentique renouveau de la société.

En outre, la culture oriente les stratégies de la recherche scientifique qui, aujourd'hui plus que jamais, est en mesure d'offrir des moyens puissants, malheureusement pas toujours employés pour le bien véritable de l'homme. Plus encore, dans de nombreux domaines, la recherche semble même parfois s'orienter contre l'homme.


3. C'est pourquoi vous avez voulu de façon opportune préciser les fondements et les dimensions de la culture de la vie. Dans cette perspective, vous avez placé l'accent sur les grands thèmes de la création, en soulignant que la vie humaine doit être perçue comme don de Dieu. L'homme, créé à l'image et à la ressemblance de Dieu, est appelé à être son collaborateur libre et, en même temps, responsable dans sa "gestion" du créé.

Vous avez voulu également répéter la valeur inaliénable de la dignité de personne qui caractérise tout individu, de sa conception à sa mort naturelle; vous vous êtes penchés à nouveau sur le thème de la corporéité et de sa signification pour la personne; vous avez porté l'attention sur la famille comme communauté d'amour et de vie. Vous vous êtes arrêtés pour considérer l'importance des moyens de communication pour une vaste diffusion de la culture de la vie et la nécessité de s'engager dans un témoignage personnel en sa faveur. Vous avez en outre rappelé qu'il faut poursuivre, dans ce domaine, toute voie visant à favoriser le dialogue, dans la conviction que la pleine vérité sur l'homme soutient la vie. Le croyant est encouragé, en cela, par l'enthousiasme enraciné dans la foi. La vie vaincra: pour nous, cela est une espérance certaine. Oui, la vie vaincra, car la vérité, le bien, la joie, le véritable progrès sont du côté de la vie. Dieu, qui aime la vie et la donne avec générosité, est du côté de la vie.


4. Comme cela a toujours lieu dans le rapport entre réflexion philosophique et méditation théologique, dans ce cas également, la parole et l'exemple de Jésus, qui a donné sa vie pour vaincre notre mort et pour associer l'homme à sa résurrection, sont une aide incontournable. Le Christ est "la résurrection et la vie" (Jn 11,25).

En raisonnant dans cette optique, dans l'Encyclique Evangelium vitae, j'ai écrit: "L'Evangile de la vie n'est pas une simple réflexion, même originale et profonde, sur la vie humaine; ce n'est pas non plus seulement un commandement destiné à alerter la conscience et à susciter d'importants changements dans la société; c'est encore moins la promesse illusoire d'un avenir meilleur. L'Evangile de la vie est une réalité concrète et personnelle, car il consiste à annoncer la personne même de Jésus. A l'Apôtre Thomas et, en lui, à tout homme, Jésus se présente par ces paroles: "Je suis le chemin, la vérité et la vie" (Jn 14,6)" (EV 29).

Il s'agit d'une vérité fondamentale que la communauté des croyants, aujourd'hui plus que jamais, est appelée à défendre et à diffuser. Le message chrétien sur la vie est "inscrit en quelque sorte dans le coeur de tout homme et de toute femme, [et] retentit dans chaque conscience "dès le commencement", c'est-à-dire depuis la création elle-même, en sorte que, malgré les conditionnements négatifs du péché, il peut aussi être connu dans ses traits essentiels par la raison humaine" (Evangelium vitae EV 29).

Le concept de création n'est pas seulement une annonce merveilleuse de la Révélation, mais également une sorte de pressentiment profond de l'esprit humain. De même, la dignité de la personne n'est pas une notion qui dérive uniquement de l'affirmation biblique selon laquelle l'homme est créé "à l'image et à la ressemblance" du Créateur, mais est un concept enraciné dans sa nature spirituelle, grâce à laquelle il se manifeste comme un être transcendant par rapport au monde qui l'entoure. La revendication de la dignité du corps comme "sujet", et non comme simple "objet" matériel, constitue la conséquence logique de la conception biblique de la personne. Il s'agit d'une conception unitaire de l'être humain, que de nombreux courants de pensée, de la philosophie médiévale jusqu'à nos jours, ont enseigné.


5. L'engagement en vue du dialogue entre foi et raison ne peut que renforcer la culture de la vie, en conjugant dignité et sacralité, liberté et responsabilité de toute personne, en tant qu'éléments incontournables de son existence même. Avec la défense de la vie personnelle, sera également garantie la protection de l'environnement, tous deux créés et ordonnés par Dieu, comme le prouve la structure naturelle elle-même de l'univers visible.

Les grandes instances relatives au droit à la vie de tout être humain, de sa conception à sa mort, l'engagement en vue de la promotion de la famille selon le dessein originel de Dieu et le besoin urgent, désormais ressenti par tous, de protéger l'environnement dans lequel nous vivons, représentent pour l'éthique et pour le droit un terrain d'intérêt commun. C'est en particulier dans ce domaine, qui concerne les droits fondamentaux de la coexistence humaine, que vaut ce que j'ai écrit dans l'Encyclique Fides et ratio: "L'Eglise demeure en effet profondément convaincue que la foi et la raison "s'aident mutuellement", exerçant l'une à l'égard de l'autre une fonction de crible purificateur ou bien de stimulant pour avancer dans la recherche et l'approfondissement" (FR 100).

La radicalité des défis que présentent aujourd'hui à l'humanité, d'une part les progrès de la science et de la technologie et, d'autre part, les processus de laïcisation de la société, exigent un effort passionné d'approfondissement de la réflexion sur l'homme et sur son existence dans le monde et dans l'histoire. Il est nécessaire de faire preuve d'une grande capacité de dialogue, d'écoute et de proposition, en vue de la formation des consciences. Ce n'est qu'ainsi que l'on pourra donner vie à une culture fondée sur l'espérance et ouverte au progrès intégral de tout individu dans les divers pays, de façon juste et solidaire. Sans une culture qui maintient solidement ancré le droit à la vie et qui promeut les valeurs fondamentales de toute personne, il ne peut y avoir de société saine ni de garantie de la paix et de la justice.


6. Je prie Dieu afin qu'il illumine les consciences et guide tous ceux qui sont engagés, à divers niveaux, dans l'édification de la société de demain. Que la protection et la défense de la vie soient toujours l'objectif prioritaire.

A vous, illustres membres de l'Académie pontificale pour la Vie, qui consacrez vos énergies au service d'un objectif si noble et exigeant, j'exprime mon appréciation la plus vive et la plus reconnaissante. Que le Seigneur vous soutienne dans le travail que vous accomplissez, et qu'il vous assiste dans la mission qui vous a été confiée. Que la Très Sainte Vierge Marie vous réconforte à travers sa protection maternelle.

L'Eglise vous est reconnaissante pour l'important service que vous rendez à la vie. Quant à moi, je désire vous accompagner de mon  encouragement constant, confirmé par une Bénédiction spéciale.



  CONCLUSION DES EXERCICES SPIRITUELS DE LA CURIE ROMAINE

Samedi 10 mars 2001


1. Nous avons conclu les Exercices spirituels par une méditation sur le "Magnificat". Je voudrais que ma brève intervention fasse écho au cantique de Marie, en exprimant à travers ses paroles un remerciement sincère au Seigneur, pour ce qu'il nous a donné en ces jours de silence et de recueillement.

La prédication du cher Archevêque de Chicago, le Cardinal Francis Eugene George, nous a guidés dans la contemplation des mystères divins. Je vous exprime, vénéré Frère, également au nom des Cardinaux et des Prélats de la Curie Romaine, qui ont participé aux Exercices, mon remerciement le plus cordial. Le style personnel et sobre que vous avez adopté fait ressortir dans toute son efficacité la Parole évangélique. Vous nous avez fait véritablement ressentir saint Luc comme compagnon de voyage au cours de notre itinéraire quadragésimal. A l'approfondissement du texte biblique, vous avez uni des témoignages stimulants tirés de votre riche expérience de missionnaire et d'Evêque, qui ont facilité l'application de nos réflexions à la vie. Autour des grands thèmes de la conversion, de la liberté et de la communion, vous nous avez conduits chaque jour à contempler le Christ et à approfondir notre foi en Lui, cette foi qui est "pour tous les peuples".


2. Les références aux Documents préparés après les récentes Assemblées synodales et continentales ont également été fréquentes. Cela a contribué à conférer à notre retraite un climat intensément apostolique, plus que jamais approprié à la saison ecclésiale que nous vivons, au lendemain du grand Jubilé de l'An 2000.

Il s'agit d'une saison que j'ai voulu placer sous le signe de la parole du Christ à Pierre: "Duc in altum", "Avance en eau profonde" (Lc 5,4). Nous savons quelle fut la réponse de Simon: "Sur ta parole, je vais lâcher les filets" (Lc 5,5). "Sur ta parole": c'est ce que nous avons voulu faire ces jours-ci. Nous sommes restés à l'écoute du Seigneur pour renforcer, avec l'aide de l'Esprit Saint, la foi, fortifier l'espérance, raviver la charité. En plaçant sa confiance dans l'efficacité de la parole du Christ, l'Eglise jette les filets dans le vaste océan du nouveau millénaire qui vient de commencer. Il s'agit d'un filet particulier: celui qui y est pris est libéré! La foi dans le Christ est, en effet, une liberté qui naît de la conversion personnelle et qui ouvre à la communion avec tous les hommes.


3. Merci, Monsieur le Cardinal, de nous avoir guidés sur ce chemin. Que le Seigneur vous récompense. Pour notre part, ayez l'assurance que nous vous rappellerons dans nos prières, en invoquant pour vous et pour votre ministère l'assistance maternelle de la Madone Immaculée, Mère de votre consécration missionnaire.

J'adresse un remerciement cordial également à tous ceux qui ont collaboré au meilleur déroulement possible des Exercices spirituels, que ce soit en ce qui concerne l'animation liturgique ou le service d'accueil.

Que Marie nous aide tous à préserver ces dons spirituels reçus au cours des Exercices spirituels, et à poursuivre avec un élan renouvelé l'itinéraire quadragésimal. Avec ces sentiments, je donne de tout coeur à chacun, une Bénédiction apostolique particulière.


AUX PÈLERINS RÉUNIS POUR LA BÉATIFICATION DE JOSÉ APARICIO SANZ ET 232 COMPAGNONS MARTYRS EN ESPAGNE

Lundi 12 mars 2001



Chers frères et soeurs,

Je suis heureux de vous rencontrer, bien-aimés pèlerins espagnols, vous qui, accompagnés par un groupe nombreux d'Evêques et de prêtres, ainsi que par les autorités civiles de vos villes et régions, avez participé hier à la béatification solennelle de deux cent trente trois martyrs de la persécution religieuse qui, dans les années 1936-1939, a frappé l'Eglise de votre patrie. La béatification d'hier est la première du nouveau siècle et du nouveau millénaire, et il est significatif qu'elle ait été une béatification de martyrs. En effet, le siècle qui vient de se conclure a été un siècle au cours duquel n'ont pas manqué les tribulations dans lesquelles de nombreux chrétiens "ont voué leur vie au nom de Notre Seigneur Jésus-Christ" (Ac 15,26).

Je salue avec affection Messieurs les Cardinaux Antonio María Rouco, Archevêque de Madrid et Président de la Conférence épiscopale espagnole, et Ricardo María Carles, Archevêque de Barcelone, ainsi que Mgr Agustin García-Gasco, Archevêque de Valence, diocèse dont proviennent la majorité des nouveaux bienheureux, Mgr Francisco Ciuraneta, Evêque de Lleida, et les autres Archevêques et Evêques ici présents. Je désire également souhaiter la bienvenue aux autorités des communautés autonomes, provinciales et locales, qui représentent les pays qui comptent les nouveaux bienheureux au nombre de leurs illustres fils. Ces nouveaux martyrs ont semé leur message dans toute la géographie espagnole. En effet, si nous regardons leur origine, ils proviennent de trente-sept diocèses et représentent treize communautés autonomes, mais leur témoignage inclut tout le territoire espagnol, et c'est pourquoi toute l'Eglise qui est en Espagne s'est réjouie de cette reconnaissance.


2. Un grand nombre d'entre vous sont des descendants, des parents ou des proches des nouveaux bienheureux. Je sais qu'est présente la veuve de l'un d'entre eux, militant de l'Action catholique, ainsi que de nombreux frères, fils et petit-fils des martyrs. Certains parmi vous sont frères en religion, des religieux élevés à la gloire des autels. D'autres sont proches de leurs lieux d'origine, des lieux où ils exercèrent leur ministère, où ils furent martyrisés et où ils sont enterrés. J'imagine l'émotion que vous éprouvez en ce moment que vous attendu pendant tant d'années. Dans votre vie de foi, leur exemple vous a sans aucun doute encouragés, car vous avez préservé leur mémoire, et, dans certains cas, également des souvenirs personnels.

La cérémonie de béatification d'hier a compté le plus grande nombre de Serviteurs de Dieu béatifiés au cours de mon pontificat. En effet, deux cent trente trois martyrs ont été élevés aux honneurs des autels. Un nombre si élevé ne fait pourtant pas oublier les caractéristiques de chacun. En effet, chacun d'eux possède une histoire particulière, un nom et un prénom propres, des circonstances qui font de chacun un modèle de vie, qui devient encore plus éloquent avec la mort librement accueillie comme preuve suprême de leur adhésion au Christ et à son Eglise.

Ces martyrs, que nous rappelons aujourd'hui avec gratitude et vénération, sont comme un grand cadre de l'Evangile des Béatitudes, un bel éventail de la variété de la vocation unique et universelle à la sainteté (cf. Constitution dogmatique Lumen gentium, chap. V). En proclamant hier la sainteté de ce groupe important de martyrs, l'Eglise rend gloire à Dieu.

La sainteté n'est pas un privilège réservé à quelques personnes. Les voies de la sainteté sont multiples et se parcourent à travers de petits événements concrets de tous les jours, accomplissant dans chaque situation un acte d'amour. Comme l'ont fait les nouveaux bienheureux martyrs. C'est en cela que réside le secret du christianisme vécu pleinement. Le christianisme réellement vital que tous les chrétiens, de quelque classe ou condition que ce soit, sont appelés à vivre. Nous sommes tous appelés à la sainteté. Ce que Dieu en définitive veut de nous est que nous soyons saints (cf. 1Th 4,3). Chers frères et soeurs d'Espagne, à vous aussi, comme je l'ai fait à tous les fidèles dans la récente Lettre apostolique Novo millennio ineunte, je voudrais proposer à nouveau avec conviction "ce "haut degré" de la vie chrétienne ordinaire" (NM 31). Que votre chemin personnel, celui de vos familles et communautés paroissiales soit, aujourd'hui plus que jamais, un chemin de sainteté!


3. Nous rencontrons ainsi des prêtres, jeunes ou anciens, qui exerçaient les ministères les plus divers: curés, vicaires, chanoines, professeurs; religieux provenant des vastes domaines de l'exercice de la charité, au moyen de l'enseignement, de l'attention envers les personnes âgées et les malades; hommes et femmes, célibataires ou mariés, parents, employés dans tous les secteurs. A l'origine de leur martyre et de leur sainteté, il y a le même Christ. Le dénominateur commun de tous est leur option radicale pour le Christ au-delà de toute chose, même de leur vie. Ils pouvaient bien dire avec saint Paul: "pour moi, la Vie c'est le Christ et mourir représente un gain" (Ph 1,21). A travers leur vie, et surtout leur mort, ils nous enseignent que rien ne peut être placé avant l'amour que Dieu a pour nous et nous manifeste en Jésus-Christ.

En eux, comme chez tous les martyrs, l'Eglise a toujours trouvé une semence de vie, de telle sorte que nous pouvons affirmer que les communautés des premiers temps se forgèrent avec le sang des martyrs. Toutefois, le martyre est une réalité qui n'appartient pas seulement au passé, mais également au temps actuel. C'est pourquoi, dans la récente Lettre apostolique, j'ai écrit: N'en sera-t-il pas de même pour le siècle, le millénaire que nous commençons? (cf. Novo millennio ineunte NM 41).

C'est un fait que les martyrs sont réapparus à notre époque. Tout comme il est certain que les temps ont changé, de même, il est certain que chaque jour, apparaît la possibilité de continuer à souffrir par amour pour le Christ. L'horizon qui se présente à nous est donc vaste et passionnant. Les chrétiens, toujours et en tout lieu, doivent être disposés à diffuser la lumière de la vie, qui est le Christ, jusqu'à verser leur sang (cf. Dignitatis humanae DH 14). Nous devons être disposés à suivre les traces des martyrs et à vivre pleinement, comme eux, la sainteté avec Lui, pour Lui, et en Lui.

L'héritage de ces courageux témoins de la foi, "archives de la Vérité écrites en lettres de sang" (Catéchisme de l'Eglise catholique CEC 2474) nous a transmis un patrimoine qui parle avec une voix plus forte que celle de la honteuse indifférence. C'est la voix qui exige une présence urgente dans la vie publique. Une présence vive et sereine, qui, à travers la transparence de l'Evangile, nous conduira à présenter avec naturel, mais également avec fermeté, sa radicalité toujours actuelle aux hommes et aux femmes de notre temps.

Il s'agit donc d'un héritage dont le langage est celui du témoignage. Que ce patrimoine continue à apporter des fruits abondants à travers votre vie et votre engagement et manifeste l'extraordinaire présence du Mystère de Dieu qui, agissant toujours et en tout lieu, nous invite à la réconciliation et à la vie nouvelle dans le Christ!


4. Chers frères: leur témoignage ne peut ni ne doit être oublié. Ils manifestent la vitalité de vos Eglises locales. Que leur exemple fasse de chacun un témoin vivant et crédible de la Bonne Nouvelle! Que leur imitation porte à produire dans la société des fruits abondants d'amour et d'espérance! Tel est mon souhait. Promouvez la culture de la vie. Faites-le à travers les paroles, mais également les gestes concrets. La prière pour la conversion sincère et radicale de tous à la loi de l'Amour et l'engagement spécifique et généreux en sa faveur constituent le fondement de la coexistence entre les hommes, les familles et les peuples. Retournez dans vos pays et dans vos communautés disposés à accomplir un travail apostolique dans l'Eglise et pour l'Eglise. Transformez dans la réalité les béatitudes dans vos lieux d'origine. Imprégnez la réalité quotidienne de l'unique programme de l'Evangile, qui est le programme de l'amour. Apportez le Christ dans vos vies, dans vos communautés, dans vos pays et dans votre histoire. Soyez toujours et dans chaque lieu des témoins vivants et crédibles de l'amour, de l'unité et de la paix. Que vous accompagnent toujours dans ce devoir ma prière, mon affection et la Bénédiction que je vous donne de tout coeur.

 

AUX PARTICIPANTS À L'ASSEMBLÉE PLÉNIÈRE DU CONSEIL PONTIFICAL DES COMMUNICATIONS SOCIALES

Vendredi 16 mars 2001



Eminences,
chers frères dans l'épiscopat,
chers amis dans le Christ,

1. Je suis heureux de vous saluer à l'occasion de l'Assemblée plénière du Conseil pontifical pour les Communications sociales. Je profite de cette occasion pour vous exprimer mes remerciements pour tout ce que vous faites pour soutenir la présence diversifiée de l'Eglise dans le monde des moyens de communication sociale. De façon particulière, je désire féliciter votre Conseil pour sa contribution spécifique au grand Jubilé de l'An 2000.

En effet, le Jubilé a représenté une expérience extraordinaire de foi dans la Ville de Rome et partout dans l'Eglise. Une part importante de son impact a été due à la retransmission des événements du Jubilé par les médias. Le Conseil pontifical a apporté un service inestimable en coordonnant les retransmissions télévisées mondiales des nombreuses cérémonies de l'Année Sainte, et en offrant une assistance professionnelle et pastorale aux milliers d'hommes et de femmes qui travaillent dans le domaine de la radio, de la télévision, de la presse et de la photographie. Le Conseil a également été responsable de l'organisation du mémorable Jubilé des journalistes en juin, et du Jubilé du monde du spectacle en décembre. Votre engagement a été indubitablement soutenu par le désir de faire de l'Année jubilaire une réponse authentique à l'invitation de l'Evangile de "porter la bonne nouvelle aux pauvres, [...] annoncer aux captifs la délivrance, et aux aveugles le retour à la vue" (Lc 4,18).


2. Au cours des années, le Conseil pontifical pour les Communications sociales a acquis une expérience très positive de coopération avec les médias internationaux dans le but de faire parvenir les événements importants de la vie de l'Eglise à tous les peuples, partout dans le monde. Je me souviens du début de cette activité, et en particulier de l'Année Sainte 1975, au cours de laquelle votre Conseil, sous la direction du Cardinal Andrezj Maria Deskur et avec l'assistance généreuse des Chevaliers de Colomb, ont établi en quelque sorte un modèle pour ce type de retransmission religieuse. En remerciant Dieu pour ce qui a déjà été accompli, j'encourage votre Conseil à poursuivre la tâche qui vous a été confiée par la Constitution apostolique Pastor Bonus.


3. Le travail accompli lors de votre Assemblée plénière de 1999 a permis au Conseil de publier en juin dernier le document Ethique dans les Communications sociales, dans le but d'offrir une orientation morale en ce qui concerne l'utilisation des médias, une réalité humaine complexe et variée, dans laquelle les préoccupations éthiques sont souvent soumises aux intérêts commerciaux. Je suis heureux qu'au cours de ces jours-ci, vous ayez envisagé un document similaire sur le thème Ethique dans internet, qui serait en effet très utile, étant donné la diffusion rapide de la cyber-communication et les nombreuses questions morales que celle-ci suscite. L'Eglise ne peut se limiter à être un spectateur des conséquences sociales des progrès technologiques, qui ont des effets décisifs sur la vie des personnes.

Votre réflexion sur Ethique dans internet peut donc être d'une grande aide pour les Pasteurs et les fidèles de l'Eglise tandis qu'ils font face aux nombreux défis de la "culture des médias" naissante.
Les problèmes et les opportunités créées par la nouvelle technologie, par le processus de mondialisation, par la dérèglementation et par la privatisation des médias présentent des défis éthiques et même spirituels nouveaux à ceux qui travaillent dans le domaine des communications sociales. Ces défis seront résolus de façon efficace par ceux qui acceptent que "servir la personne humaine, édifier la communauté humaine fondée sur la solidarité, la justice et l'amour et dire la vérité sur la vie humaine et son accomplissement en Dieu sont, et resteront au coeur de l'éthique dans les médias" (Ethique dans les communications sociales, n. 33). En priant pour que ces nobles objectifs guident toujours le travail du Conseil pontifical pour les Communications sociales, et en confiant chacun de vos efforts à l'intercession de Marie, Mère du Verbe incarné, je vous donne de tout coeur, ainsi qu'à vos familles, ma Bénédiction apostolique.

Au terme du discours, après la prière de l'Angelus Domini, le Saint-Père a ajouté:

L'"Angelus" est la première communication, la plus importante dans l'histoire de l'humanité.


À LA CONFÉRENCE ÉPISCOPALE DES ÉVÊQUES LATINS DES RÉGION ARABES (C.E.L.R.A.) EN VISITE "AD LIMINA APOSTOLORUM"

Samedi 17 mars 2001

  Béatitude,
Chers Frères dans l'épiscopat,

1. Je suis heureux de vous accueillir au moment où vous accomplissez votre visite ad limina Apostolorum, manifestant ainsi votre communion avec le Successeur de Pierre. Je souhaite que dans vos rencontres avec l'Évêque de Rome et avec ses collaborateurs vous trouviez les encouragements nécessaires pour donner un dynamisme spirituel et un élan apostolique renouvelés au peuple dont vous avez reçu la charge pastorale.

Je remercie Sa Béatitude Michel Sabbah, Patriarche latin de Jérusalem, des paroles cordiales qu'il m'a adressées en votre nom. Elles manifestent la profondeur de vos engagements au service de l’annonce de l’Évangile. À travers vous, Évêques latins des régions arabes, je rejoins par la pensée et par le coeur les prêtres, les religieux et les religieuses, ainsi que tous les fidèles de chacun de vos diocèses, qui, dans des situations diverses, rendent un témoignage courageux au Seigneur Jésus. Que Dieu les soutienne et les guide chaque jour!

C'est avec une grande émotion que je garde présent dans ma mémoire le souvenir des pèlerinages que j'ai eu la joie d'accomplir au cours de l'année jubilaire sur la terre où Dieu s'est manifesté aux hommes, du Sinaï jusqu'à Jérusalem, la Ville Sainte où le Christ est mort et ressuscité pour le salut de l'humanité. Je demande à Dieu de m'accorder la grâce de poursuivre prochainement ma démarche de pèlerin en me rendant en Syrie, sur les lieux qui évoquent la conversion de l'Apôtre Paul et l'élan missionnaire des premières communautés chrétiennes.

2. Comme je l'ai écrit dans la Lettre apostolique Novo millennio ineunte que j'ai adressée à toute l'Église au terme du grand Jubilé, le temps est arrivé pour que "chaque Église, en réfléchissant sur ce que l’Esprit a dit au peuple de Dieu durant cette année spéciale de grâce, et même durant la période plus longue qui va du Concile Vatican II au grand Jubilé, se livre à un examen de sa ferveur et trouve un nouvel élan pour son engagement spirituel et pastoral" (NM 3). Il est en effet essentiel que les communautés chrétiennes avancent résolument vers le large, fortes des grâces reçues du Seigneur pendant l'année jubilaire et animées d'une espérance solidement enracinée dans la contemplation du visage du Christ.

Il y a un an se concluait le Synode pastoral qui regroupait pour la première fois les membres de toutes les communautés catholiques de Terre Sainte. Je vous encourage vivement à mener à bien le plan pastoral qui s'est dégagé de votre cheminement ecclésial : "Fidèles au Christ, corresponsables dans l'Eglise, témoins dans la société".

Vos communautés, qui vivent en situation minoritaire dans des sociétés dont la culture et la vie quotidienne sont profondément marquées par la présence d'autres religions, doivent continuer sans relâche à approfondir leur identité chrétienne pour la maintenir dans son authenticité évangélique. Elles ne doivent jamais oublier que le chrétien tire son identité personnelle et ecclésiale de sa relation intime au Christ, qui aide à vivre toute situation et qui éclaire ses choix, et non de son action ou de ses options personnelles au sein de la société. Ainsi elles pourront s'ouvrir sans crainte aux autres et contribuer à faire resplendir le visage d'amour de Dieu parmi les nations. Qu'elles se souviennent que se tourner vers le Christ, Verbe Incarné, et marcher avec lui sur les chemins de la sainteté conduit à refuser toute forme de médiocrité et de religiosité superficielle pour pénétrer toujours plus profondément son mystère!

Le témoignage rendu au Christ et la participation à l'édification de son Corps exigent de développer une authentique communion à l'intérieur même de l'Église, notamment par des relations toujours plus confiantes entre les pasteurs et les fidèles, ainsi que par une collaboration pastorale habituelle entre les diverses communautés catholiques, dans une généreuse ouverture d'esprit et de coeur. Que les paroisses et les familles soient des foyers vivants d’unité et d’amour authentique ! En effet, "faire de l'Église la maison et l'école de la communion : tel est le grand défi qui se présente à nous dans le millénaire qui commence, si nous voulons être fidèles au dessein de Dieu et répondre aussi aux attentes profondes du monde" (Lettre apostolique Novo millennio ineunte NM 43). C'est en réalisant cette communion que l'Église se manifeste comme le signe et l'instrument de l'union intime avec Dieu et de l'unité de tout le genre humain (cf. Lumen gentium LG 1).

3. Dans cette même perspective, les laïcs sont invités à prendre une part toujours plus grande à la vie et au témoignage de l'Église, afin de rendre compte effectivement de l'espérance qui est en eux (cf. 1P 3,15). La prise de conscience par les laïcs de leur vocation et de leur mission est une source de réconfort et de joie profonde. Il convient donc de leur témoigner une confiance qui les stimule à vivre en fidélité à l'Évangile et au Magistère de l'Église, et à assumer les responsabilités qui leur reviennent en participant activement à la vie de leurs communautés aux différents niveaux. De même, leur engagement dans la gestion des affaires publiques, partout où cela est possible, revêt une grande importance, spécialement dans le domaine de la justice et de la paix.

Il est donc indispensable de poursuivre l'effort que vous avez mis en oeuvre pour assurer la formation des laïcs afin de les aider à acquérir de véritables compétences, y compris pour ce qui concerne la vie sociale, économique et politique. En s'engageant dans la recherche intellectuelle et dans l'étude, ils contribueront aussi à développer une véritable culture chrétienne, en collaboration avec les autres Églises, proposant ainsi à la société la perspective chrétienne sur l'homme et des principes qui peuvent guider l'action de ceux qui se mettent au service de leurs frères. L'accompagnement pastoral des universitaires catholiques est important pour les aider à traduire leur foi dans leur propre culture et à prendre leur place dans la mission de l’Église.

4. Dans votre ministère au service de la communion dans l'Église, les prêtres sont vos premiers collaborateurs. À travers vous, je les salue cordialement en les invitant à mettre une confiance inconditionnelle en Celui qui les a appelés et qui ne cesse de se tenir à leurs côtés pour les guider dans leur charge d'annoncer l'Évangile et d'éduquer la foi des fidèles. Face aux grands défis de l'évangélisation, qu'ils n'aient pas peur de miser toute leur vie sur le Christ et de s'abandonner à lui avec générosité ! En ouvrant largement leur coeur à l'amour de Dieu, en se mettant à l'écoute de leurs frères, ils deviendront toujours plus des hommes de l'espérance et de la rencontre de Dieu.

Pour cela les prêtres doivent revenir sans cesse à la source de leur ministère pour y retrouver un élan apostolique nouveau. Leur activité missionnaire produira du fruit dans la mesure où ils affermiront leur vie spirituelle par la célébration et par la fréquentation assidue des sacrements de l'Eucharistie et de la Réconciliation, lieux privilégiés de la communion. Par une intense vie de prière personnelle et communautaire, âme de la vie sacerdotale et condition de toute vie pastorale fructueuse sous la mouvance de l'Esprit, ils entreront dans un dialogue toujours plus intime avec le Seigneur, qu'ils ont pour mission d'annoncer à leurs frères. En acquérant une grande familiarité personnelle avec la Parole de Dieu, accueillie avec un coeur docile et priant, ils pourront annoncer l'Évangile de manière authentique et conduire les fidèles à une connaissance toujours plus profonde du mystère de Dieu.

La formation permanente, notamment par la lecture, les rencontres de réflexion et de prière, ainsi que par la participation à des programmes d'enseignement théologique et pastoral, est pour chaque prêtre un devoir essentiel afin de demeurer fidèle à son identité et à sa mission dans l'Église et pour l'Église.

Chers frères dans l'épiscopat, je connais votre souci de favoriser les vocations sacerdotales et religieuses, et de transmettre l'appel du Christ. Je vous encourage dans vos efforts pour la formation première des candidats au sacerdoce. Soyez attentifs à leur assurer une bonne formation intellectuelle, théologique, biblique et spirituelle ! Mais, il est indispensable que cela repose sur une formation humaine "qui les aide à acquérir une maturité personnelle et qui les rende attentifs à la complexité culturelle dans laquelle ils auront à exercer leur ministère" (Exhortation apostolique Une espérance nouvelle pour le Liban, n. 62).

5. Les Instituts religieux sont présents dans de nombreux domaines de la vie de vos diocèses où leurs membres oeuvrent généreusement et collaborent activement à la pastorale diocésaine. Assurez-les de ma prière et transmettez-leur mes encouragements affectueux ! Dans certaines régions, les religieux et les religieuses sont une présence essentielle pour la visibilité de l'Église. Par leurs divers engagements ils contribuent à la promotion humaine et spirituelle des personnes, sans distinction d'origine ou de religion, notamment dans les domaines de l'éducation, de la santé ou des services sociaux. Je rends grâce à Dieu pour ce qu'ils ont accompli et pour ce qu'ils continuent à réaliser, avec les personnes qui collaborent avec eux, pour le service de tous, dans un esprit de désintéressement exemplaire. Par leur vie toute donnée à Dieu et à leurs frères, ils sont un point de référence pour les jeunes qui fréquentent leurs institutions d'éducation comme pour toutes les personnes qui bénéficient de leur soutien et de leur dévouement. Qu'ils continuent à témoigner par toute leur existence d'une Église qui soit un véritable lieu de fraternité, de partage, de ressourcement, d'espérance et d'ouverture aux autres!

Chers frères dans l'épiscopat, la présence de l’Église dans les milieux scolaires et éducatifs a une importance particulièrement significative. Les écoles catholiques sont des lieux où les jeunes peuvent acquérir une solide formation pour préparer leur avenir. Elles sont aussi des lieux du dialogue de vie entre jeunes de traditions religieuses et de milieux sociaux différents. Je vous engage à favoriser toujours davantage, en collaboration avec les autres communautés catholiques, un renouveau de la catéchèse et à développer une pastorale qui s'appuie sur des valeurs solides, pour contribuer à former le type d'hommes et de femmes dont l'Église et la société ont besoin.

6. La division entre les chrétiens est une infidélité à la volonté du Seigneur qui obscurcit leur identité de disciples du Christ. Alors que nous venons d'entrer dans le troisième millénaire, nous devons manifester avec détermination l'engagement de l'Église catholique en faveur de la promotion de l'unité, conscients que si nous ne cherchons pas ardemment à être fidèles à la prière intense du Seigneur "que tous soient un", nous risquons d’affaiblir notre identité chrétienne et notre crédibilité dans l'annonce de l'Évangile de paix et de réconciliation. La division des chrétiens sépare souvent des personnes qui se côtoient tous les jours, qui s'aiment et qui, sur des points essentiels, partagent une même foi au Christ et au Baptême; cela cause de nombreuses souffrances dans les familles. Ces situations difficiles ne doivent pas nous décourager mais nous stimuler à oeuvrer avec conviction en faveur de la communion et du pardon. Dans toutes les régions arabes, l'Église latine doit poursuivre courageusement ses efforts de rencontre fraternelle et de collaboration avec les autres Églises et Communautés ecclésiales, assurée que le dialogue oecuménique ne progressera que s'il implique la vie concrète des fidèles.

Que le désir ardent de l'unité soit présent dans toutes vos démarches pastorales, notamment en poursuivant la réflexion et l'engagement sur les questions d'intérêt commun, en priant et en agissant ensemble chaque fois que cela est possible! L'ouverture oecuménique de l'année jubilaire à Bethléem a été une grande espérance qui doit permettre de développer un climat fraternel entre les Églises et Communautés ecclésiales, afin de progresser vers l’unité tant espérée dans la sérénité, la confiance et l’estime mutuelle.

7. Les conditions dans lesquelles doit vivre la communauté chrétienne au Moyen-Orient, spécialement en Terre Sainte, ne permettent pas toujours à ses membres de mener une existence personnelle et familiale telle qu’ils le souhaiteraient pour eux-mêmes et pour leurs enfants. J'encourage vivement les chrétiens à garder confiance en eux-mêmes et à demeurer fermement attachés à la terre qui fut aussi celle de leurs ancêtres. Je leur redis à tous aujourd'hui encore avec force : "Ne craignez pas de préserver votre présence de chrétiens et votre patrimoine chrétien dans le lieu même où le Sauveur est né!" (Homélie à Bethléem, 22 mars 2000, n. 5). La permanence des chrétiens à Jérusalem et auprès des Lieux Saints de la Chrétienté est particulièrement importante, car l'Église ne peut oublier ses racines. Elle doit témoigner de la vitalité et de la fécondité du message évangélique sur la terre de la Révélation et de la Rédemption.

Chers frères dans l'épiscopat, pour que les fidèles puissent continuer à vivre sereinement dans ces situations, vous avez entrepris des efforts louables en leur donnant des motivations profondes, évangéliques et ecclésiales, afin qu'ils ne cèdent pas à la tentation d'abandonner leur terre mais qu'ils soient toujours plus assurés de l'importance de leur présence et de la beauté de leur témoignage. Ne vous résignez pas à la pensée d'un inévitable départ! Je suis conscient des sacrifices et de l'ascèse que cela nécessite pour les familles et les personnes qui acceptent généreusement de résister à la tentation de rechercher ailleurs un bien-être économique et une tranquillité sociale. Au nom de l'Église je leur en suis vivement reconnaissant. Elles peuvent compter sur le soutien de la grâce de Dieu et sur celui de leurs frères dans la foi qui les regardent avec admiration. Je vous encourage aussi dans votre souci apostolique à l’égard des catholiques originaires d'autres pays, toujours plus nombreux, venus dans votre région le plus souvent pour trouver un travail; ils ont besoin d'une aide pastorale spécifique. Leur témoignage de foi vécue courageusement au milieu des hommes et des femmes de vos pays est une manifestation de l'universalité du salut en Jésus Christ.

8. Je connais les grandes difficultés auxquelles sont affrontées les populations de votre région. Je voudrais en particulier assurer encore de ma proximité et de mon affection tous ceux qui souffrent et qui sont victimes de la violence. Avec vous souffre et pâtit toute l'Église, dans l'espérance de pouvoir avec vous bientôt se réjouir de la réalisation d'un désir unique auquel on ne peut renoncer : la paix! "La Terre Sainte doit être la terre de la paix et de la fraternité. C’est ce que Dieu veut!" (Appel pour la paix, 2 octobre 2000). Les événements qui se déroulent actuellement en Terre Sainte, et que je suis avec attention, sont préoccupants et ils mettent à rude épreuve l'espérance de paix. Je souhaite vivement que soit relancée rapidement la table des négociations, en mettant au centre de toute préoccupation le respect de la dignité de tout homme qui, dans son propre territoire, a le droit de vivre en paix et en sécurité. Cela ne se réalisera que dans le respect de la loi internationale et par le refus de la violence qui ne peut qu’exacerber les haines et les sentiments de rancoeur, creusant encore plus profondément les dissensions entre les personnes et entre les communautés. En de telles circonstances, il est plus que jamais nécessaire d'en appeler au dialogue et à la rencontre, à l'amour que chacun ressent pour ses frères et pour tous les hommes, afin de ne négliger aucune possibilité qui pourrait ouvrir une perspective vers une paix juste et durable. L’importance que revêt cette espérance ne permet pas de céder à la tentation du découragement.

L'Église latine qui se trouve en Terre Sainte et dans les régions limitrophes doit se rendre disponible pour être toujours porteuse et inspiratrice de sentiments de compréhension réciproque, de dialogue et de solidarité. C’est par une véritable éducation à la paix que les coeurs pourront enfin s’ouvrir et les esprits s’engager résolument dans l’édification de sociétés fondées sur la fraternité et le respect mutuel dans la justice.

Le dialogue interreligieux est aussi un moyen privilégiée pour avancer sur les chemins de la paix. La recherche d'un dialogue vrai et confiant avec le Judaïsme et avec l’Islam est l’une des grandes urgences auxquelles l’Église ne peut se soustraire, pour le bien de tous les peuples de la région. Une telle disposition doit aussi contribuer à assurer une véritable liberté religieuse, afin que nul ne puisse être l’objet de discrimination et de marginalisation à cause de sa croyance religieuse, et que le statut spécial accordé à une religion ne se fasse au détriment des autres.

Je voudrais enfin mentionner une nouvelle fois les situations dramatiques que connaissent d’autres pays de votre région. En Irak, l’embargo continue à faire des victimes, trop d'innocents paient les conséquences d'une guerre néfaste dont les effets continuent à retomber sur les personnes les plus faibles et sans défense. L'afflux des réfugiés du Soudan vers l'Égypte est en forte progression. Il est donc urgent de trouver des solutions pour accueillir décemment les personnes déplacées et pour permettre une bonne intégration à ces populations, ainsi que de procurer une assistance spirituelle aux nombreux chrétiens qui se trouvent parmi elles. Ma pensée rejoint aussi la communauté catholique de Somalie qui dans le passé a été victime de nombreuses violences, espérant qu’une activité ecclésiale normale pourra enfin être rétablie dans ce pays. À toutes ces communautés, à tous les peuples de la région je redis l’attention et l'affection que leur porte le Successeur de Pierre.

9. Chers frères dans l’épiscopat, au terme de notre rencontre je vous exprime ma vive gratitude pour le travail pastoral que chacun de vous réalise avec dévouement et profond amour de l’Église au service du peuple qui lui a été confié, en étant souvent affronté à des conditions très difficiles et parfois à la solitude. À votre retour chez vous, portez à tous les fidèles catholiques, qu'ils soient de rite latin ou orientaux, le salut et l’affection du Pape. Il vous accompagne de sa prière et vous invite à cultiver toujours plus les liens de l’amour et de la collaboration entre les communautés catholiques. Que ce souhait soit le meilleur encouragement pour votre retour dans vos Églises particulières!

Je vous confie ainsi que vos diocèses à l’intercession maternelle de la Vierge Marie, Reine de la paix. Qu’elle vous protège et vous guide sur vos chemins! À chacun de vous, aux prêtres, aux religieux, aux religieuses et aux fidèles laïcs de vos diocèses, j’accorde de grand coeur une particulière Bénédiction apostolique.

     


Discours 2001 - Samedi 3 mars 2001