Discours 2001 - Vendredi 18 mai 2001


AU NOUVEL AMBASSADEUR D'AFRIQUE DU SUD PRÈS LE SAINT-SIÈGE À L'OCCASION DE LA PRÉSENTATION DES LETTRES DE CRÉANCE

Vendredi 18 mai 2001



Excellence,

C'est pour moi un plaisir de vous accueillir au Vatican et d'accepter les Lettres qui vous accréditent comme Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de la République d'Afrique du Sud près le Saint-Siège. Je vous suis reconnaissant pour les salutations cordiales que vous me transmettez de la part du Président M. Thabo Mbeki et du peuple de votre bien-aimée nation, et je vous prie de bien vouloir leur transmettre l'assurance de mes prières constantes pour le progrès, la paix et la prospérité de votre pays.

La Conférence mondiale sur le Racisme, la Discrimination raciale, la Xénophobie et l'Intolérance que l'Afrique du Sud accueillera cette année, offre une excellente occasion - non seulement pour votre nation et pour le continent africain, mais aussi pour toute la Communauté internationale - de soulever un thème d'une importance cruciale pour tous les peuples. Bien que les conflits fondés sur les origines ethniques et nationales ont déjà fait payer un lourd tribut à l'humanité au cours du siècle qui vient de s'écouler, de telles attitudes déplorables continuent de représenter un spectre alarmant sur la scène mondiale. C'est pourquoi, à l'aube du nouveau millénaire, toute la famille des nations fait bien de réaffirmer son engagement à reconnaître, soutenir et promouvoir la dignité fondamentale et les droits inaliénables de chaque être humain. Cela représente la voie sûre pour surmonter les préjugés et pour combattre toute forme de racisme; il s'agit d'une voie qui renforcera la conscience que tous les peuples appartiennent à une seule famille humaine, voulue et rassemblée par Dieu tout-puissant lui-même.

La récente "renaissance" de votre nation, fondée sur le rejet de la ségrégation et de la discrimination, afin que tous les citoyens puissent marcher ensemble le long de la voie de l'unité et de la fraternité, est un signe d'espérance et d'encouragement pour les sociétés qui luttent contre des problèmes semblables. La paix elle-même commence à devenir une réalité tangible lorsque l'esprit humain est déterminé à rejeter le chemin de la division et du conflit afin de suivre celui du pardon et de la réconciliation. Une telle paix exige la force d'un courage infaillible capable de dépasser un esprit de vengeance aveugle qui aurait recours à des formes de violence. Comme votre histoire l'a montré, bien qu'il soit important que la vérité sur le passé soit connue et les responsabilités établies, il est encore plus important que progresse le délicat processus d'édification d'une société harmonieuse et multiraciale.

Ce qui est essentiel à présent c'est que les individus, les familles et les peuples tout entiers puissent devenir les participants actifs et les bénéficiaires du développement économique et politique envisagé par les dirigeants des différentes nations africaines dans le "Millennium African Programme". Dans ses objectifs tournés vers l'avenir et d'une grande portée, cet effort commun devrait s'appuyer sur la vision du caractère unique de chaque être humain, fondé sur l'inviolabilité de la dignité de la personne humaine. Nous voudrions tous voir un monde dans lequel les individus ne sont pas contraints à l'anonymat qui est le fruit de la collectivité ou de l'influence écrasante des institutions, des structures ou des systèmes. En tant qu'individu, une personne n'est pas un numéro ou simplement le maillon d'une chaîne, ni encore moins un élément impersonnel dans un système quelconque. De la même façon, les peuples et les nations ont également le droit de jouir de leur plein développement, qui inclut non seulement les aspects économiques et sociaux, mais également, et cela est important, leur identité culturelle individuelle et leur caractère religieux. Pour cette raison, l'impératif du développement ne doit jamais devenir un prétexte pour imposer à d'autres des modes de vie ou des expressions culturelles qui ne reflètent pas l'individualité et l'histoire d'un peuple.

Excellence, je suis heureux de noter votre reconnaissance relative à la contribution importante apportée par l'Eglise catholique à l'édification de la société sud-africaine, dans le passé et actuellement. Les catholiques de votre pays sont engagés à oeuvrer main dans la main avec leurs concitoyens pour participer activement au progrès politique, social et culturel de la nation, en particulier en ce qui concerne la lutte contre la pauvreté, l'analphabétisme et le SIDA. A cette fin, les membres de l'Eglise, comprenant de nombreux missionnaires, des membres des communautés religieuses, des hommes et femmes laïcs, apportent leurs services dans les domaines de l'éducation, des services sociaux et de la santé. Le travail qu'ils accomplissent n'est pas seulement au bénéfice des catholiques, mais il s'adresse aussi à toutes les personnes. Je souhaite que votre gouvernement et les autorités publiques manifestent leur reconnaissance pour ce service de la part de l'Eglise en assistant les missionnaires et les autres personnes dans leurs tentatives afin de poursuivre ces efforts visant à assurer un meilleur avenir pour l'Afrique du Sud et son peuple.

Madame l'Ambassadeur, alors que vous commencez votre mission diplomatique près le Saint-Siège, soyez assurée que vous pourrez compter sur toute l'assistance dont vous aurez besoin dans l'accomplissement de vos res-ponsabilités. Tandis que j'exprime mes meilleurs voeux pour le succès de votre travail, j'invoque cordialement sur vous, sur les dirigeants et sur le peuple de la République d'Afrique du Sud une abondance de Bénédictions de Dieu tout-puissant.



AU NOUVEL AMBASSADEUR DE GAMBIE PRÈS LE SAINT-SIÈGE À L'OCCASION DE LA PRÉSENTATION DES LETTRES DE CRÉANCE

Vendredi 18 mai 2001

  Monsieur l'Ambassadeur,

Tandis que vous présentez les Lettres qui vous accréditent en tant qu'Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de la République de Gambie près le Saint-Siège, je vous offre mes salutations cordiales et je vous souhaite la bienvenue au Vatican. En vous remerciant pour les voeux que vous me transmettez de la part de S.E. le Président M. Yahya Jammeh, je vous prie de bien vouloir lui transmettre mes salutations cordiales et l'assurance de mes prières pour la paix et le bien-être de la nation.

Bien que neuf ans se soient écoulés depuis ma visite pastorale en Gambie, le souvenir des moments passés en compagnie de votre peuple demeurent gravés dans ma mémoire. Mes voyages dans les divers pays du monde sont accomplis principalement en tant qu'Evêque de Rome et Successeur de Pierre au service de l'Eglise universelle. Dans le même temps, toutefois, ils me permettent de mettre en évidence la solidarité de l'Eglise avec les peuples du monde dans leurs efforts pour la cause de la paix, du développement humain et pour apporter une réponse adéquate aux questions morales et éthiques qui se présentent à eux aujourd'hui.

C'est dans ce contexte que je suis heureux de noter vos observations, Excellence, qui identifient l'éducation et les valeurs religieuses comme facteurs clés dans la création d'une culture de la moralité et d'un sens de responsabilité personnelle et collective pour l'avenir. L'Eglise catholique sera toujours un fervent et inlassable défenseur des principes moraux universels et immuables, un rôle qu'elle exerce dans le seul but de servir la véritable liberté de l'homme. Etant donné qu'"il n'y a de liberté ni en dehors de la vérité, ni contre elle, on doit considérer que la dé- fense catégorique, c'est-à-dire sans édulcoration et sans compromis, des exigences de la dignité personnelle de l'homme auxquelles il est absolument impossible de renoncer, est la condition et le moyen pour que la liberté existe" (Veritatis splendor VS 96). De plus, ce service de la part de l'Eglise s'adresse non seulement aux individus, mais aussi à toute l'humanité: il s'adresse à chaque personne, à la communauté politique et à la société humaine en tant que telles. "En effet, ces normes représentent le fondement inébranlable et la garantie solide d'une convivialité humaine juste et pacifique, et donc d'une démocratie véritable qui ne peut naître et se développer qu'à partir de l'égalité de tous ses membres, à parité de droits et de devoirs" (ibid. VS VS 96).

Il existe donc des lois morales fondamentales de la vie sociale qui comportent des exigences spécifiques auxquelles doivent se soumettre les autorités publiques comme les citoyens privés, et que la Communauté internationale doit elle aussi respecter. Cette moralité sous-jacente doit guider tous les aspects de la vie sociale et politique. Il est en effet triste de constater qu'à l'aube de ce nouveau millénaire, de graves formes d'injustice sociale et économique, et de domination politique, frappent encore des populations et des nations entières dans différentes parties du monde, sur votre continent africain et ailleurs. Une indignation croissante s'élève des innombrables hommes et femmes dont les droits fondamentaux continuent d'être foulés aux pieds et méprisés. Pour cette raison, le besoin urgent d'un renouveau personnel et social radical est apparu avec une clarté encore plus évidente dans le domaine de la justice, de l'honnêteté, de l'ouverture et de la solidarité.

Toutefois, le chemin qui reste à parcourir demeure long et difficile. Apporter les changements nécessaires exigera un grand effort, en particulier en vue du nombre et de la gravité des causes qui provoquent et aggravent les nombreuses situations d'injustice présentes dans le monde. Mais en reconnaissant et en respectant les vérités éternelles et objectives - l'obéissance aux principes universels à travers lesquels l'homme atteint sa pleine liberté et sa pleine identité - nous trouverons la base pour des relations justes et durables entre les peuples. Le Saint-Siège élèvera toujours sa voix haut et fort dans le forum international, pour défendre et promouvoir la dignité transcendentale de la personne humaine. C'est en vertu de cette dignité que toutes les personnes - les bien portants et les malades, les jeunes et les vieux, les forts et les faibles, les nouveau-nés et les enfants à naître - sont sujets de droits que personne ne peut violer: aucun individu, aucun groupe, aucune classe, aucune nation, aucun Etat, aucun organisme international.

La Gambie est un pays ayant une profonde tradition de coexistence pacifique enracinée dans son peuple, un pays dans lequel les idéaux de la tolérance, de la justice et de la liberté jouissent d'un profond respect. Les catholiques gambiens, bien qu'en minorité, se considèrent comme des fils et des filles véritables de leur pays, et comme partie intégrante de la nation. La Communauté catholique continuera de faire tout son possible pour soutenir un développement qui soit au profit de tous, en particulier à travers l'activité de l'Eglise dans les domaines de l'éducation, de la santé et des services sociaux. La promotion de politiques de justice, de solidarité et de service du bien commun est la voie le long de laquelle la société gambienne peut marcher avec confiance vers une prospérité toujours plus grande et une paix stable. Je vous remercie d'avoir reconnu la contribution que l'Eglise catholique a apportée et continue d'apporter à votre nation.

Monsieur l'Ambassadeur, tandis que vous commencez votre mission, je vous assure de toute l'assistance dont vous aurez besoin dans l'accomplissement de vos fonctions. Je suis certain que votre travail servira à renforcer les bonnes relations qui existent déjà entre le Saint-Siège et la République de Gambie. Sur vous, Excellence, et sur tout le peuple de votre pays, j'invoque une abondance de Bénédictions de Dieu tout-puissant.


LORS DE LA PRÉSENTATION DES LETTRES DE CRÉANCE DEX NOUVEAUX AMBASSADEURS PRÈS LE SAINT-SIÈGE

Vendredi 18 mai 2001


  Excellences,

1. Je vous accueille avec plaisir au Vatican au moment où vous me remettez les Lettres qui vous accréditent comme Ambassadeurs extraordinaires et plénipotentiaires de vos pays: le Népal, la Tunisie, l’Estonie, la Zambie, la Guinée, le Sri Lanka, la Mongolie, l’Afrique du Sud et la Gambie. Votre présence me donne l’occasion de saluer vos Responsables politiques et tous ceux qui ont la charge de servir le bien commun dans les fonctions qui leur sont confiées. Je voudrais saluer cordialement tous vos compatriotes, les assurant de mes pensées ferventes à leur intention. Je vous remercie vivement des messages cordiaux dont vous êtes porteurs de la part de vos Chefs d’État respectifs; je vous saurais gré de bien vouloir leur exprimer en retour mes salutations déférentes et mes voeux chaleureux pour leurs personnes et pour la haute mission qu’ils sont appelés à remplir.

2. Au cours de mon pèlerinage jubilaire sur les pas de saint Paul en Grèce, en Syrie et à Malte, j’ai suivi avec attention les événements dramatiques qui se déroulaient dans la région du Proche-Orient. Je voudrais à nouveau profiter de la présence d’un nombre important de diplomates pour renouveler avec une plus grande force mon appel à la paix sur tous les continents, invitant les Responsables de la vie sociale à prendre des décisions courageuses qui engageront les peuples de manière résolue sur la voie de la paix et de la réconciliation. La paix et la sécurité des personnes et des communautés sont des biens essentiels. On ne peut envisager qu’un pays construise son avenir en faisant abstraction des peuples qui l’entourent ou des diversités culturelles et ethniques qui le composent. Il convient que toutes les instances locales, nationales et internationales s’engagent pour que se résolvent enfin des conflits qui ont déjà fait trop de victimes innocentes. Dans ce domaine, le rôle de la diplomatie est particulièrement important. J’appelle donc de tous mes voeux un engagement de tous les services diplomatiques en faveur d’une résolution négociée des différents conflits et des foyers de tensions existant dans les différents continents. Un tel engagement contribuera à redonner confiance et espérance aux populations soumises depuis trop longtemps à des situations d’instabilité.

3. Au moment où vous inaugurez votre mission auprès du Siège apostolique, je vous offre mes voeux les plus cordiaux. Je demande au Très-Haut de faire descendre sur vous l’abondance de ses Bénédictions, ainsi que sur les membres de vos familles, sur vos collaborateurs et sur les habitants des nations que vous représentez.




AUX ÉVÊQUES DU PAKISTAN EN VISITE "AD LIMINA APOSTOLORUM"

Samedi 19 mai 2001



Chers Frères dans l'Episcopat,

1. C'est avec une grande joie que je vous accueille, Evêques du Pakistan, à l'occasion de votre visite ad limina Apostolorum. Après l'expérience de mon récent pèlerinage sur les pas de saint Paul, les mots de l'Apôtre continuent de résonner dans mon coeur et je vous accueille avec son exhortation: "frères bien-aimés et tant désirés, ma joie et ma couronne, tenez bon de la sorte dans le Seigneur" (Ph 4,1). La visite ad limina est toujours un moment enrichissant et significatif pour le Successeur de Pierre, c'est une visite au cours de laquelle il a la possibilité de rencontrer ses frères évêques de différentes parties du monde et de passer du temps avec eux dans la prière et la réflexion fraternelle à propos de leurs joies et de leurs espoirs, de leurs douleurs et de leurs peines.

Au Pakistan, la communauté chrétienne est un petit troupeau vivant au milieu d'une large majorité de musulmans. Bien qu'un grand nombre de ses membres soient pauvres et vivent dans des conditions difficiles, ils sont riches de foi et de fidélité à l'Evangile de Jésus-Christ. Au cours de votre pèlerinage auprès des tombeaux des saints Pierre et Paul, je sais que vos communautés d'origine demeurent très proches de vos coeurs, alors que vous confiez leurs besoins et leurs préoccupations, ainsi que votre propre ministère épiscopal, à la protection céleste des Apôtres. Je me joins à vous pour rendre grâce à Dieu pour les bénédictions qu'il vous a accordées à tous.

Le grand Jubilé de l'An 2000 a été un temps de grâce dans la vie de l'Eglise tout entière. Au cours de l'année, l'Eglise qui est au Pakistan a, elle aussi, fait l'expérience de nombreux bienfaits spirituels, lorsque les croyants ont pris part à des initiatives jubilaires, y compris divers pèlerinages à Rome, d'où un grand nombre sont retournés dans leurs familles et leurs communautés avec une foi renouvelée et un engagement renforcé. Le Jubilé ne devrait pas constituer simplement un moment privilégié dans la vie de l'Eglise, après lequel tout retournerait pour ainsi dire à la normalité. Comme je l'ai souligné dans ma Lettre apostolique Novo millennio ineunte, il est maintenant temps de construire sur les conquêtes du grand Jubilé de façon à planifier l'avenir, notre regard fixé fermement sur le Christ, l'Unique Médiateur et Sauveur de tous. C'est une tâche qui revient spécialement à chaque Eglise locale, qui doit saisir cette occasion pour évaluer sa propre ferveur et trouver un nouvel enthousiasme dans ses responsabilités spirituelles et pastorales (cf. Novo millennio ineunte NM 3).


2. Lorsque nous avons célébré le deux-millième anniversaire de sa naissance, nous avons réfléchi sur le Christ "considéré dans ses traits historiques et dans son mystère, accueilli dans sa présence multiple dans l'Eglise et dans le monde, proclamé comme sens de l'histoire et lumière sur notre route" (Novo millennio ineunte NM 15). Cette contemplation du Christ est au coeur de votre ministère épiscopal. Puisse-t-elle susciter en vous une nouvelle énergie, en vous encourageant à promouvoir la ferveur que vous avez constatée chez votre peuple dans des initiatives concrètes. Elle vous conduit également à réfléchir sur la qualité de votre propre vie intérieure et sur votre relation avec le Seigneur. A travers une intense vie de prière, vous obtiendrez cette sérénité intérieure qui nous conduit à être des "contemplatifs dans l'action", des témoins crédibles capables de transmettre à d'autres ce que nous avons reçu: la Parole de Vie (cf. 1Jn 1,1). Sainteté rayonnante, fidélité à l'Evangile, courage face aux défis de l'apostolat: telles sont les conditions essentielles d'un ministère épiscopal fructueux au service de la nouvelle évangélisation à laquelle Dieu appelle l'Eglise au début de ce nouveau millénaire.

En dehors du gouvernement pastoral de leurs diocèses, les Evêques, en vertu de leur appartenance au Collège épiscopal, devraient être profondément soucieux de l'Eglise, tant au niveau national qu'universel. Pour répondre de manière plus efficace aux nombreux problèmes pastoraux et sociaux de votre pays, il est important de renforcer la collaboration au sein de votre Conférence épiscopale, de façon à parler d'une seule voix et à offrir des directives fortes aux catholiques du Pakistan. A cet égard, je vous invite à prendre en considération les moyens d'améliorer et de renforcer les institutions et les activités de la Conférence. En particulier, la création d'un secrétariat permanent et une organisation plus précise des réunions de la Conférence pourraient être de grande utilité.


3. Mes encouragements et l'assurance de mes prières s'adressent à vos prêtres. Je connais les conditions souvent difficiles dans lesquelles ils exercent leur ministère. Vous avez une responsabilité particulière à leur égard, et c'est sur vos épaules que repose la tâche de promouvoir leur bien-être et leur sainteté. Les prêtres doivent continuellement rallumer dans leurs coeurs la flamme du don extraordinaire qu'ils ont reçu quand le Seigneur les a appelés à son service. Cela signifie qu'eux aussi doivent être des hommes de prière, soucieux des choses de Dieu. Leur position ne constitue pas un privilège, mais un ministère de service, visant à aider le Peuple de Dieu à répondre à sa vocation la plus profonde, qui est d'entrer en communion avec la Très Sainte Trinité.

Une attention particulière doit donc être consacrée à la formation des prêtres et des séminaristes, de façon à ce qu'ils puissent répondre à la grâce de l'Esprit Saint, qui les appelle continuellement à la conversion, à la sainteté et à la charité pastorale. Je me réjouis du fait que le nombre de vocations au Pakistan continue de croître et je vous encourage à donner à ces jeunes gens la meilleure formation possible afin qu'ils puissent devenir les prêtres dont le Peuple de Dieu a besoin et auxquels il a "droit" (cf. Pastores dabo vobis PDV 79). Vos petits séminaires, en plus d'apporter une éducation de très haute qualité, doivent aider les jeunes gens à discerner l'appel de Dieu et à y répondre généreusement. En travaillant ensemble, vous devez faire en sorte que l'Institut national de Théologie catholique, fondé en 1997, réussisse à améliorer la formation intellectuelle des séminaristes, des religieux et des laïcs qui fréquentent les cours qui y sont dispensés, en fixant des niveaux académiques élevés et en étant fidèles à l'enseignement de l'Eglise et aux traditions authentiques de la spiritualité chrétienne.


4. Les laïcs devraient être eux aussi encouragés à jouer un rôle plus important et plus visible dans la mission de l'Eglise. Pour que cela se réalise de manière efficace, les communautés catholiques locales devraient être solidement ancrées dans les racines de la foi. A ce propos, je souhaite exprimer ma reconnaissance aux religieux et aux catéchistes laïcs, dont le dévouement à la catéchèse et à l'instruction sont d'une si grande importance pour la croissance de l'Eglise au Pakistan. Je les encourage à faire pleinement usage du Catéchisme de l'Eglise catholique, qui n'est pas seulement une synthèse systématique des contenus essentiels de la Doctrine catholique, mais également un instrument de base et efficace pour l'oeuvre d'évangélisation.

Nous ne devons pas oublier que la foi se transmet en premier lieu dans le foyer. Pour cette raison, la famille doit être l'une des priorités de votre action pastorale. Les familles chrétiennes actuelles font l'objet de pressions provenant de différentes forces externes. Vos efforts doivent se concentrer sur la famille afin qu'elle soit réellement une "Eglise domestique", marquée par un climat de prière, le respect mutuel et le service des autres. En vivant sa vocation chrétienne dans l'humilité et l'amour, la famille chrétienne deviendra véritablement "un foyer d'évangélisation, où chaque membre fait l'expérience de l'amour de Dieu et le communique aux autres" (Ecclesia in Asia ).

De même, l'Eglise a toujours eu à coeur la pastorale des jeunes. Aujourd'hui, dans les conditions sociales en rapide mutation, les pasteurs doivent encourager et soutenir les jeunes au cours de toutes les étapes de leur vie, afin de garantir qu'ils acquièrent une maturité humaine et spirituelle suffisante pour jouer un rôle actif dans l'Eglise et dans la société. L'Eglise leur présente la vérité de Jésus-Christ, "un mystère qui apporte joie et libération; un mystère qui doit être scruté, vécu et partagé par d'autres, avec conviction et courage" (Ecclesia in Asia ).

Les écoles catholiques sont largement reconnues au Pakistan pour la qualité de leur enseignement et pour les valeurs humaines qu'elles enseignent. Etant donné que des élèves de toutes les traditions religieuses fréquentent ces écoles, leur contribution à la promotion d'un climat de dialogue et de tolérance ne peut être sous-estimée et constitue un défi sérieux pour la communauté catholique. Sans distinction de religion ou de culture, les élèves doivent apprendre à travers l'exemple et l'enseignement de leurs éducateurs à apprécier et à rechercher toujours "ce qu'il y a de vrai, de juste, de pur, d'aimable, d'honorable" (Ph 4,8).


5. Dans votre pays, le dialogue interreligieux constitue un aspect essentiel de votre mission pastorale. Au cours de ma récente visite en Syrie, j'ai à nouveau appelé à une plus grande compréhension et coopération entre chrétiens et musulmans. Pour assurer que de telles initiatives soient fructueuses, il est important de disposer de personnes correctement formées, qui aient accompli une étude sérieuse des croyances religieuses, des valeurs et des traditions de l'Islam. Le dialogue n'implique pas l'abandon de ses propres principes, pas plus qu'il ne doit conduire à un faux irénisme (cf. Redemptoris missio RMi 59). En revanche, dans la fidélité à nos propres traditions et convictions religieuses, nous devons être ouverts à la compréhension de celles des croyants d'autres religions dans un esprit d'humilité et de franchise.

J'ai déjà fait état de l'importance des écoles catholiques dans la promotion de la tolérance mutuelle et du dialogue. D'autres institutions catholiques, telles que les hôpitaux, les foyers et les oeuvres d'assistance sociale, permettent de témoigner de manière concrète des valeurs de l'Evangile; elles permettent d'instaurer un "dialogue de vie" entre les croyants des différentes religions et de contribuer ainsi à l'édification d'une société plus juste et plus fraternelle (cf. Redemptoris missio RMi 57).

Etant donné que les cultures se développent comme des moyens de traiter les questions les plus profondes de l'existence humaine, elles doivent aborder, en dernière analyse, la question de Dieu: "Au centre de toute culture se trouve l'attitude que l'homme prend devant le mystère le plus grand, le mystère de Dieu" (Centesimus annus CA 24). La culture pakistanaise reconnaît et défend la place de Dieu dans la vie publique. Ce fait doit permettre aux croyants des différentes religions d'oeuvrer ensemble pour défendre la dignité inestimable de chaque homme et de chaque femme, depuis sa conception jusqu'à sa mort naturelle, et d'édifier une société dans laquelle les droits inaliénables de tous soient respectés et protégés, en particulier le droit à la vie, le droit à la liberté (y compris la liberté de pensée, de conscience et de religion) et le droit à participer pleinement à la vie de la société. De ceux-ci dérivent les droits civils, économiques, sociaux et culturels qui sont essentiels pour le bien-être des individus et des sociétés. Une base commune en vue de la coopération entre chrétiens et musulmans et de la promotion de l'authentique développement social et politique doit être trouvée dans les normes morales universelles et immuables, qui dérivent de l'ordre de la création et sont inscrites dans le coeur de l'homme (cf. Veritatis splendor VS 96).

Malgré les possibilités de compréhension et d'assistance mutuelle, on doit malheureusement constater que nombreux sont ceux qui, parmi vos fidèles, rencontrent des difficultés en raison de leur fidélité au Christ. Ils sont parfois considérés avec méfiance et ne se sentent pas traités comme des citoyens à part entière dans leur propre pays, en particulier par rapport à des lois qui ne respectent pas suffisamment la liberté religieuse des minorités. Mes pensées se tournent vers tous les chrétiens de votre pays qui, de quelque façon, souffrent à cause de leur foi. Dans leurs épreuves et leurs souffrances, je souhaite les assurer de ma solidarité et de mon soutien dans la prière. Le Seigneur Jésus-Christ, vers lequel je les invite à se tourner avec confiance, est avec eux, d'une manière particulièrement intime, pour les réconforter et les soutenir. En tant que Pasteurs de l'Eglise du Pakistan, vous avez courageusement pris la défense de la liberté religieuse, qui est au coeur même des droits de l'homme (cf. Message pour la Journée mondiale de la Paix 1999, n. 5, ORLF n. 50 du 15 décembre 1998). J'encourage vos efforts en vue de faire prévaloir un esprit de tolérance et de respect mutuels et je vous invite à continuer à offrir l'orientation nécessaire afin de permettre à tous les chrétiens de parvenir à une approche commune, caractérisée par un esprit de dialogue respectueux et fidèle, libre de toute action excessive et imprudente, et visant à améliorer la situation.


6. Chers Frères dans l'Episcopat, le Père des miséricordes et le Dieu de toute consolation (cf. 2Co 1,3), qui vous aime en Jésus-Christ et qui répand les dons de l'Esprit Saint sur ceux qui croient, est la source de votre confiance et de votre courage. Je suis certain que vous continuerez à proclamer avec courage la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ à votre peuple, qui est particulièrement cher à votre coeur. En vous confiant, ainsi que les prêtres, les religieux et les laïcs du Pakistan à la protection maternelle de Marie, aube radieuse et guide sûr de vos pas, je vous donne cordialement ma Bénédiction apostolique.



AU NOUVEL AMBASSADEUR DU MEXIQUE LORS DE LA PRÉSENTATION DES LETTRES DE CRÉANCE

Samedi 19 mai 2001



Monsieur l'Ambassadeur,

1. Je suis très heureux de vous souhaiter la bienvenue et de recevoir à l'occasion de cet acte solennel les Lettres qui vous accréditent comme Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de la République du Mexique près le Saint-Siège. Je vous suis très reconnaissant pour les paroles courtoises que vous m'avez adressées, ainsi que pour le salut respectueux que vous m'avez transmis de la part du Président constitutionnel des Etats-Unis mexicains, M. Vicente Fox Quesada, auquel j'envoie en retour mes meilleurs voeux pour le bien-être et le progrès intégral de tous les citoyens de ce bien-aimé pays.


2. Le Mexique s'est toujours distingué par ses valeurs spirituelles, culturelles et humaines, authentiques et riches, comme j'ai eu l'occasion de le constater au cours de mes quatre voyages apostoliques. Actuellement, comme vous l'avez indiqué, il est en train de vivre un processus de maturation politique à travers un changement profond dans de nombreux aspects de la vie sociale, aspirant à surmonter les causes structurelles de la pauvreté et de l'exclusion à travers un modèle de développement intégral fondé sur la justice sociale. C'est pourquoi il faut promouvoir une culture qui renforce les institutions démocratiques et de participation, fondées sur la reconnaissance des droits humains et les valeurs culturelles et transcendantes du peuple mexicain. A ce propos, je désire rappeler qu'une "démocratie sans valeurs se transforme facilement en un totalitarisme déclaré ou sournois, comme montre l'histoire" (Centesimus annus CA 46). Ce n'est que de cette façon que l'on pourra mieux affronter les défis que la nouvelle étape socio-politique comporte, tant dans son développement intérieur que dans ses relations avec la Communauté internationale.


3. Je désire encourager les acteurs de la vie politique et sociale de votre pays à affronter la situation économique globale de manière responsable. En diverses occasions, j'ai fait référence à des situations semblables qui, à l'échelle mondiale, présentent de nombreux problèmes et empêchent de nombreux pays de sortir du sous-développement et de parvenir au niveau souhaité de bien-être. Du point de vue du développement intégral, la mondialisation de l'économie a, jusqu'à présent, profité à certaines personnes et à des groupes très particuliers. On a par contre vu apparaître de nouvelles formes de pauvreté, de marginalisation et même d'exclusion de grands groupes sociaux, en particulier les paysans et les autochtones. C'est pourquoi, il faut faire en sorte que les institutions politiques et culturelles se placent véritablement au service de l'homme, sans distinction de races, ni de classes sociales. A ce propos, l'Eglise se sent "appelée non seulement à promouvoir une plus grande union entre les nations, contribuant ainsi à créer une authentique culture mondialisée de la solidarité, mais encore à collaborer par tous les moyens légitimes à la réduction des effets négatifs de la mondialisation" (Ecclesia in America ).

Il est important que la société mexicaine prenne conscience de cela et, avec une attitude véritablement solidaire, soit disposée à affronter les sacrifices nécessaires qui, en aucun cas, ne doivent aggraver les conditions de pauvreté des classes les plus humbles. C'est pourquoi il est indispensable d'améliorer progressivement les conditions de vie des plus pauvres, en garantissant des mesures justes pour tous, y compris au niveau fiscal.


4. En ce qui concerne les relations entre l'Eglise et l'Etat au Mexique, elles se caractérisent par un respect et une cordialité mutuels croissants. Du respect, pour ne pas interférer dans ce qui est propre à chaque institution, mais qui conduit à se soutenir réciproquement et à collaborer pour parvenir à un plus grand bien-être de la communauté nationale. C'est pourquoi, à travers un dialogue constructif, il est possible de promouvoir des valeurs fondamentales pour l'organisation et le développement de la société. A ce propos, l'heure est venue pour la vérité historique intégrale du Mexique, à partir de ses origines, de briller avec une plus grande clarté, en surmontant les préjugés et les discriminations, les dualismes et le réductionnisme.

En ce sens, l'Eglise dont la mission est d'ordre spirituel et non politique, promeut des relations cordiales avec l'Etat, en contribuant ainsi à l'harmonie et au progrès de tous, sans aucune distinction. C'est pourquoi il est souhaitable que l'Eglise mexicaine puisse jouir d'une plus grande liberté dans les divers domaines où elle exerce sa mission pastorale et sociale.

A ce propos, la communauté politique et les institutions publiques de l'Etat doivent s'articuler de façon à respecter le principe de subsidiarité et à garantir la liberté religieuse des personnes et des groupes. Cela demande d'éviter les formes d'intolérance et de considérer de façon positive la contribution religieuse au bien commun, de même que les organes de l'Etat et les partis ne doivent pas supplanter de façon directe ou indirecte les instances religieuses. C'est pourquoi le Concile Vatican II définit ces domaines selon les termes suivants: "Il est juste que l'Eglise puisse partout et toujours prêcher la foi avec une authentique liberté, enseigner sa doctrine sociale, accomplir sans entraves sa mission parmi les hommes, porter un jugement moral, même en des matières qui touchent le domaine politique, quand les droits fondamentaux de la personne ou le salut des âmes l'exigent, en utilisant tous les moyens, et ceux-là seulement, qui sont conformes à l'Evangile et en harmonie avec le bien de tous, selon la diversité des temps et des situations" (Gaudium et spes, n. 76).


5. L'une des préoccupations de l'Eglise qui est au Mexique et des Mexicains est celle d'un développement légal et juridique, qui établisse un ordre toujours plus juste pour les peuples autochtones. Ce qui a parfois donné lieu à des comportements opposés qui, considérant la rencontre de cultures comme un problème, ont choisi l'une au détriment de l'autre. Certains, dans le but de protéger les autochtones, se sont engagés dans des idéologies fondées sur une lecture mal comprise de l'histoire. D'autres, au contraire, ont exalté les valeurs apportées de l'extérieur comme étant les seules valables et authentiques.

Face à cet état de fait, il est inévitable de mener à bien une purification de la mémoire et d'effectuer une valorisation de l'identité métisse, à partir des deux cultures qui fusionnèrent, cette identité possédant un immense potentiel pour l'avenir si elle réussit à se réconcilier avec elle-même. On pourra ainsi parvenir à une identité saine qui assume avec joie et avec espérance les deux racines de sa particularité actuelle.

C'est pourquoi il faut continuer à mûrir, sans aucun type de crainte, en reconnaissant sa valeur à la dignité des autochtones. Dans l'alliance de la pluralité et de la multiplicité ethnique du Mexique se trouve la racine qui possède une influence sur la religiosité et l'identité nationale. Si l'on parvient à mieux la connaître, la conscience d'être tous frères dans la grande famille mexicaine sera renforcée. A ce propos, je sais que les évêques, à travers une attitude d'intense collaboration, invitent à ne pas élever des murs de division et d'hostilité qui pourraient séparer les Mexicains, mais "à construire ensemble un pays juste, réconcilié, solidaire et fraternel". A ce propos, au cours de mon dernier voyage au Mexique, j'ai parlé d'un "dialogue dont personne n'est exclu et qui rassemble encore plus les habitants, les croyants fidèles à leur foi dans le Christ ainsi que ceux qui sont loin de Lui. Seul le dialogue fraternel entre tous apportera une vigueur aux projets de réforme futurs, souhaités par les citoyens de bonne volonté, appartenant à toutes les croyances religieuses et aux divers secteurs politiques et culturels" (Discours de départ, Aéroport international, 26 janvier 1999; cf. ORLF n. 5 du 2 février 1999).


6. Au moment où vous commencez la haute mission pour laquelle vous avez été désigné, je désire vous présenter mes voeux pour l'heureux et fructueux déroulement de celle-ci auprès du Siège apostolique. En vous demandant de transmettre ces sentiments au Président de la République, à votre gouvernement, aux Autorités et au cher peuple mexicain, je vous assure de ma prière au Tout-Puissant, afin qu'il vous assiste toujours de ses dons, ainsi que votre noble famille, vos collaborateurs, les dirigeants et les citoyens de votre noble pays, dont je me souviens toujours avec une affection particulière.



Discours 2001 - Vendredi 18 mai 2001