Discours 2001 - Samedi 19 mai 2001


AUX PARTICIPANTS AU CHAPITRE GÉNÉRAL DE LA SOCIÉTÉ DES MISSIONS AFRICAINES

Samedi 19 mai 2001



En souhaitant à tous une chaleureuse bienvenue à l'occasion de Votre Assemblée générale, je salue de façon particulière votre nouveau Supérieur général, le Père Kieran O'Reilly, que je remercie pour les paroles aimables qu'il m'a adressées en votre nom. Je salue également son prédécesseur immédiat, le Père Daniel Cardot, qui a guidé votre Société au cours des six dernières années.

Tandis que votre première Assemblée générale du nouveau millénaire touche à son terme, je vous encourage à puiser abondamment au riche patrimoine spirituel du grand Jubilé de l'An 2000, alors que vous renouvelez votre engagement pour la mission et l'évangélisation. Un nouveau siècle et un nouveau millénaire ont commencé à la lumière du Christ, mais, comme je l'ai écrit dans ma Lettre apostolique à la fin du grand Jubilé, "tous ne voient pas cette lumière. Nous avons la mission admirable et exigeante d'en être le "reflet"" (Novo millennio ineunte NM 54). Dans un monde où existent de nombreuses lumières qui détournent de la lumière pure du Christ, ou qui lui sont même contraires, vous devez vous engager à être toujours plus semblables à Jésus, en vous nourrissant de sa Parole, et en étant solidement enracinés dans la prière et dans la contemplation, afin de pouvoir refléter fidèlement sa lumière et le faire connaître aux autres de façon efficace.

Je suis heureux de constater parmi vous aujourd'hui la présence de jeunes prêtres missionnaires africains et asiatiques. Il s'agit d'un signe positif du caractère toujours plus international de votre société. Continuez à promouvoir et à alimenter les vocations missionnaires, car "l'annonce de l'Evangile requiert des annonciateurs, la moisson a besoin d'ouvriers" (Redemptoris missio RMi 79). Vos efforts pour faire participer les laïcs à votre oeuvre missionnaire représentent un autre élément essentiel de la plantatio Ecclesiae dans les terres de mission, car c'est à travers un laïcat mûr et responsable que le message chrétien et l'exemple de sainteté chrétienne sont transmis de façon plus immédiate à la vie de la société. A l'imitation de notre Seigneur et Maître, renouvelez votre engagement à travailler avec les pauvres, en particulier avec les réfugiés qui ont besoin avec une grande urgence d'un signe de l'amour de Dieu! Acceptez le défi du dialogue interreligieux, un chemin auquel l'Eglise doit consacrer une plus grande attention en ce nouveau millénaire! Défendez la vie humaine à chaque stade de son existence, de sa conception jusqu'à sa mort naturelle, et ne manquez pas de rendre les personnes plus conscientes de leur responsabilité pour transformer leur communauté et leur culture, selon les vérités salvifiques de l'Evangile!

Chers amis, à l'occasion de notre brève rencontre, je désire vous encourager dans votre entreprise missionnaire et vous exhorter à être fidèles à l'esprit que vous avez reçu de votre Fondateur, le Serviteur de Dieu Marion de Brésillac. Remplis d'espérance et d'enthousiasme, continuez donc avec confiance à affronter les défis du nouveau millénaire, toujours tournés vers la Bienheureuse Vierge Marie, qui demeure l'"aurore lumineuse et guide sûre pour notre chemin" (Novo millennio ineunte NM 58). A vous qui êtes ici présents et à tous les membres et les amis de la Société des Missions africaines, je donne de tout coeur ma Bénédiction apostolique.




CONCISTOIRE EXTRAORDINAIRE

Salle du Synode des Evêques, Lundi 21 mai 2001



Vénérés Frères cardinaux!

1. "A vous grâce et paix de par Dieu notre Père et le Seigneur Jésus-Christ" (Rm 1,7). Avec ces paroles de l'Apôtre Paul, je salue chacun de vous et je souhaite à tous une chaleureuse bienvenue.

Je remercie avec affection le Cardinal Bernardin Gantin, Doyen du Sacré Collège, qui a voulu se faire l'interprète des sentiments communs. Il m'a adressé des paroles courtoises et respectueuses, non seulement au nom des personnes présentes, mais également au nom de tous ceux qui, ne pouvant pas être avec nous physiquement, s'unissent par leur prière aux travaux de ces journées, qui manifestent la communion existant entre le Successeur de Pierre et les Pères cardinaux, ses premiers et plus proches collaborateurs. La composition de cette vénérable assemblée, qui rassemble des Cardinaux provenant de toutes les parties de la terre et appartenant à diverses cultures, représente bien l'unité, l'universalité et le caractère missionnaire de l'Eglise, projetée vers de nouveaux objectifs apostoliques.


2. La rencontre qui commence ce matin est plus que jamais importante et se relie en esprit au grand Jubilé, dont l'écho demeure encore vif en chacun de nous. Alors que je repense avec émotion aux diverses phases et aux multiples rendez-vous que nous avons vécus ensemble au cours de l'Année Sainte, je prie afin que l'Esprit du Seigneur, qui nous a permis de vivre des expériences ecclésiales extraordinaires, continue à nous guider et nous aide à présent à reconnaître les nouveaux défis au cours de l'actuel changement d'époque. Dans la Lettre apostolique Novo millennio ineunte, que j'ai précisément voulu signer au cours du rite solennel de conclusion de l'itinéraire jubilaire, j'ai souligné l'exigence de bien mettre en évidence les "orientations concrètes" de l'action évangélisatrice de l'Eglise, à l'aube d'un nouveau millénaire. Il s'agit de définir les objectifs missionnaires prioritaires et les méthodes de travail les plus adaptées, ainsi que de rechercher les moyens nécessaires. Il faut se consacrer à une formation et une valorisation adaptée de tous les agents de pastorale, car le domaine de l'action apostolique qui s'ouvre à nous est vaste et complexe.

Nous savons cependant que si notre engagement est indispensable, tout dépend de l'action divine. C'est pourquoi, l'effort prioritaire de chaque croyant et de la communauté ecclésiale ne peut être que celui de tendre à la sainteté, à la recherche passionnée de Dieu, à la contemplation pleine d'amour de son visage.


3. Chers et vénérés frères, au cours de ces journées nous aurons l'occasion d'écouter des réflexions et des témoignages; nous nous confronterons de façon fraternelle sur les problèmes et les défis pastoraux; nous rechercherons ensemble les lignes les plus adaptées pour être, également aujourd'hui, un signe crédible de l'amour de Dieu pour chaque homme. Nous resterons surtout en prière, dociles à l'Esprit Saint et à ses inspirations, en ressentant qu'est uni à nous, comme cela se produisit au début du christianisme, le Peuple de Dieu tout entier, au service duquel le Père céleste nous envoie constamment.

Que Marie, Mère de l'Eglise et Etoile de l'évangélisation, nous accompagne, comme elle accompagna les Apôtres au Cénacle. Entre ses mains maternelles je voudrais en particulier déposer les travaux de ce Consistoire extraordinaire et les fruits spirituels et pastoraux attendus qui en découleront pour le bien de l'Eglise et du monde entier.




AUX CARDINAUX À LA FIN DU VIème CONCISTOIRE EXTRAORDINAIRE

Jeudi 24 mai 2001



Chers Cardinaux!

Le moment est venu de prendre congé. Nous rendons grâce au Seigneur pour les jours de grâce et de profonde communion ecclésiale que nous avons vécus ensemble. Ce Consistoire extraordinaire a permis de renforcer les liens de fraternité, d'estime réciproque et d'entente bénéfique qui nous unissent au service de l'Eglise. Une heureuse expression du climat détendu et fraternel, vécu au cours de nos travaux, est également ce repas fraternel, qui touche à sa fin.

Je désire remercier chacun de vous pour la présence et pour la contribution significative généreusement offertes au cours de ces journées d'écoute et de réflexion commune.

Vous retournez à présent dans vos sièges. Je vous demande d'apporter à ceux que le Seigneur confie à vos soins pastoraux mon salut cordial, alors que nous demeurons unis dans l'invocation de l'Esprit Saint, dont nous attendons les dons lors de la prochaine Pentecôte pour l'exercice fécond de notre travail apostolique quotidien.

J'adresse un remerciement particulier au très cher Cardinal-Doyen Bernardin Gantin pour les paroles qu'il a voulu m'adresser, ici, au nom de tous. Dans celles-ci, j'ai perçu l'affection avec laquelle le Collège cardinalice accompagne le Successeur de Pierre et le désir ardent de chacun de ses membres de l'aider dans le ministère pétrinien au service de l'Eglise universelle. En outre, j'exprime ma vive gratitude à tous ceux qui, de différentes façons, ont collaboré à la réalisation du bon déroulement du Consistoire. J'adresse également un remerciement de tout coeur aux très chères Filles de la Charité et à tout le personnel de la Domus Sanctae Marthae. Nous avons bénéficié encore une fois du charisme de sainte Marthe, dans cette maison qui en porte le nom.

Comme il était juste en la fête liturgique d'aujourd'hui, cette salle accueillante nous a aidés à rester dans le climat du Cénacle. Nous nous quittons à présent dans cet esprit, dans la certitude du souvenir réciproque du Seigneur. Au mois d'octobre prochain, nous nous retrouverons avec certains d'entre vous à l'occasion du Synode des Evêques, et nous pourrons ainsi encore une fois faire l'expérience de cette forme très valable d'exercice de la collégialité épiscopale.

Que Marie, que nous vénérons aujourd'hui sous le beau titre de "Secours des chrétiens", vous accompagne et vous protège toujours. Je suis proche de vous par la prière et je vous bénis de tout coeur.



À LA DÉLÉGATION DE L'EX-RÉPUBLIQUE YOUGOSLAVE DE MACÉDOINE À L'OCCASION DE LA FÊTE DES SAINTS CYRILLE ET MÉTHODE

Vendredi 25 mai 2001


Mesdames et Messieurs,

Une fois de plus, cette année, la visite de votre délégation pour la fête des saints Cyrille et Méthode me donne l'occasion de vous assurer de mes prières pour la paix et la sécurité de votre peuple. La mission des deux saints Frères, les Apôtres des Slaves, a laissé des marques indélébiles dans la vie religieuse et culturelle de votre nation. Votre pèlerinage annuel exprime  votre conscience toujours plus grande de la nécessité de leur héritage pour la vie de votre pays et de l'Europe en général.

Par la puissance de la grâce de Dieu, les deux Frères de Salonique ont apporté une contribution décisive et d'une valeur durable à l'édification de l'Europe. Non seulement ils ont réuni des peuples différents sous le sceau de la communion chrétienne, mais ils ont également apporté une unité culturelle et civile dans les pays où ils ont oeuvré. Au cours des dernières années, les peuples des Balkans ont connu de profondes souffrances et peurs, et je me sens donc obligé de rappeler l'importance immédiate et pratique de l'enseignement que les saints Cyrille et Méthode ont laissé. "Etre chrétien en notre temps signifie être artisan de communion dans l'Eglise et dans la société. A cette fin, il importe d'avoir l'âme ouverte à ses frères, de vivre la compréhension mutuelle, de coopérer spontanément par l'échange généreux des biens culturels et spirituels" (Slavorum apostoli, n. 27). Etant donné les tensions et les conflits dans votre région, et la menace qu'ils représentent pour les individus et la société, le chemin tracé par les saints Cyrille et Méthode reste toujours aussi valable.

Ceux qui occupent à présent des postes de responsabilité pour le destin de votre région peuvent trouver dans les valeurs de l'Evangile proclamées par les saints Frères une puissante inspiration dans la recherche d'une paix juste et générale. Puisse le Dieu de toutes miséricordes vous bénir, ainsi que vos peuples, de son amour et de sa protection.



À LA DÉLÉGATION BULGARE POUR LA FÊTE DES SAINTS CYRILLE ET MÉTHODE

Vendredi 25 mai 2001



Mesdames, Messieurs,

1. Je suis heureux d’accueillir votre délégation, qui vient, comme chaque année, accomplir un pèlerinage sur la tombe de saint Cyrille, dans l’antique basilique Saint-Clément, pour signifier l’attachement du peuple bulgare à la mémoire des deux frères, saints apôtres du monde slave, et qui vient en même temps rendre visite à l’Evêque de Rome. A travers vous, je salue cordialement le cher peuple bulgare, les Autorités civiles du pays, l’Eglise catholique et l’Eglise orthodoxe de Bulgarie.

2. Comme j’ai eu l’occasion de le redire lors de mon récent pèlerinage jubilaire sur les pas de saint Paul, la vie des saints frères Cyrille et Méthode reste un exemple particulièrement éloquent de l’évangélisation à laquelle l’Eglise tout entière est appelée. Partis à la rencontre des peuples slaves, les deux frères de Salonique se sont d’abord consacrés à la traduction de la Bible, apprenant la langue, mais aussi les coutumes et les usages des peuples qui les accueillaient. En créant un nouvel alphabet, adapté à la langue slave, ils ont apporté une contribution essentielle à la culture et à la littérature de l'ensemble des nations slaves. Non seulement ils “ont rempli leur mission en respectant pleinement la culture qui existait déjà chez les peuples slaves, mais ils la soutinrent et la développèrent inlassablement et de manière éminente en même temps que la religion” (Slavorum apostoli, n. 26). Dans une Europe qui cherche son identité et son unité, ils présentent une voie exemplaire et stimulante pour que l’Evangile, enraciné dans la culture des peuples, la féconde et la nourrisse. C’est là une contribution spécifique au développement du continent que votre démarche souligne avec force.

3. Au terme de notre entretien, je vous remercie vivement de votre aimable visite et je forme des voeux fervents pour tout le peuple bulgare. Puisse-t-il continuer son chemin vers l’épanouissement de ses légitimes aspirations à la paix et à la concorde ! Je confie ces souhaits à Dieu et, par l’intercession des saints Cyrille et Méthode, j’invoque sur vous et sur tous ceux que vous représentez l’abondance des Bénédictions divines.



AUX PARTICIPANTS AU XVème CHAPITRE GÉNÉRAL DES FILLES DE JÉSUS

Samedi 26 mai 2001


Chères soeurs,

1. Je suis très heureux de pouvoir vous rencontrer, alors que se déroule votre XVème Chapitre général au cours duquel vous souhaitez discerner la volonté de Dieu pour votre Institut en ce moment de l'histoire, au début d'un nouveau millénaire.

Je salue avec affection soeur María Pilar Martínez García, réélue Supérieure générale, ses conseillères et ses autres proches collaboratrices, ainsi que les participantes à ce Chapitre. Faites également parvenir ce salut aux soeurs que vous représentez, et qui accomplissent leur mission dans divers pays d'Afrique, d'Amérique, d'Asie et d'Europe. Elles enrichissent les Eglises particulières où elles vivent en exerçant leur activité pastorale et éducative, et surtout comme porte-parole de leur propre charisme, qui est toujours un don accordé par l'Esprit à l'Eglise.


2. Il y a quelques jours a eu lieu le Vème anniversaire de la béatification de Cándida María de Jesús, votre Fondatrice. J'ai eu la joie de l'élever aux honneurs des autels avec l'une de vos premières soeurs, la bienheureuse María Antonia Bandrés Elósegui. Mère Cándida sut parcourir avec fidélité et constance le chemin de la sainteté et, dans le même temps, il y a presque 130 ans, elle lança à Salamanque un projet de vie religieuse afin que d'autres personnes, en se consacrant entièrement à Dieu et en servant mieux l'Eglise, suivent ses pas. Ce fut le cas de la bienheureuse María Antonia, dont la sainteté de vie est la confirmation de ce projet original, car "tout arbre bon produit de bons fruits" (Mt 7,17). C'est à vous qu'il revient de produire les fruits d'aujourd'hui, avec un dévouement toujours plus radical à votre vocation et l'aspiration permanente à être, à travers votre témoignage de vie, le signe de la présence du Christ et le véhicule de l'appel de Dieu.

La coïncidence entre cette commémoration et les travaux de votre Chapitre général est donc une invitation éloquente à reproduire avec force l'audace, la créativité et la sainteté de la Fondatrice, comme réponse aux signes des temps qui apparaissent dans le monde d'aujourd'hui (cf. Vita consecrata VC 37). Le dévouement total et inconditionné à Dieu continue à être un point de référence solide pour tout programme, car on ne doit pas oublier que "Dieu nous demande une réelle collaboration à sa grâce, et il nous invite donc à investir toutes nos ressources d'intelligence et d'action dans notre service de la cause du Royaume. Mais prenons garde d'oublier que "sans le Christ nous ne pouvons rien faire"" (Novo millennio ineunte NM 38).


3. Ces considérations acquièrent une signification particulière dans la pastorale de l'éducation, l'un des aspects qui caractérisent le plus votre charisme et votre tradition et qui est un élément essentiel de la mission de l'Eglise (cf. Vita consecrata VC 96). En effet, celui qui a perçu intérieurement la beauté sublime de Dieu et qui se sent enraciné dans le Christ, Chemin, Vérité et Vie, ne se contentera pas de transmettre aux enfants et aux jeunes un pur bagage de connaissance, mais il suscitera en eux le désir de croître selon tous les aspects de l'existence humaine, et il promouvra surtout la passion pour "une vérité ultérieure qui soit susceptible d'expliquer le sens de la vie; [et] donc une recherche qui ne peut aboutir que dans l'absolu" (Fides et ratio FR 33). Face à cette tâche sublime, l'éducateur ne peut pas rester étranger à ce qu'il enseigne. Jésus lui-même présente "ce que le Père m'a enseigné" (Jn 8,28) et l'apôtre annonce "ce que nous avons vu et entendu" (1Jn 1,3 Ac 4,20).

Transmettre avec compétence le savoir et la culture, réveiller la responsabilité sociale, imprégner la conscience morale des plus hautes valeurs éthiques et illuminer l'éminente vocation transcendante de chaque être humain sont assurément des tâches urgentes, notamment dans un monde souvent tenté par la banalité et par le profit matériel immédiat. Mais en plus, cela doit également constituer un signe prophétique pour les religieuses. C'est pourquoi dans votre mission doit tout d'abord apparaître votre fidélité au Christ, en montrant clairement que vous continuez à cultiver dans l'histoire "les semences du Règne de Dieu que Jésus lui-même a déposées au cours de sa vie terrestre en allant à la rencontre de ceux qui recouraient à lui pour tous leurs besoins spirituels et matériels" (Novo millennio ineunte NM 49).

De cette façon, on proclame également sa propre espérance dans un avenir de l'humanité selon les desseins de Dieu, sans laisser place au découragement, ni à d'obscurs pressentiments. Au contraire, l'éducatrice atteste sa foi dans les "prodiges de grâce que le Seigneur accomplit en ceux qu'il aime" (Vita consecrata VC 20) et, avec sa confiance tenace dans les possibilités de chaque personne humaine, elle est capable de surprendre le monde et d'y faire naître sans cesse de nouvelles espérances. Il s'agit d'une façon quotidienne d'indiquer à "tous les croyants les biens célestes déjà présents en ce temps" (Lumen gentium LG 44).

4. Au terme de cette rencontre, je vous invite, dans tous les domaines de votre activité apostolique, à prêter attention aux nécessités naissantes de notre époque, en leur apportant une réponse née du coeur du Christ et de la mission originelle de l'Eglise. En effet, "plus on vit dans le Christ, mieux on peut le servir dans les autres, en se portant jusqu'aux avant-postes de la mission et en prenant les plus grands risques" (Vita consecrata VC 76).

J'adresse à la Supérieure générale et à ses collaboratrices mes meilleurs voeux pour l'exercice de la responsabilité qui leur a été confiée. L'importance que vous attribuez, conformément à votre héritage ignatien, au discernement pondéré de la volonté de Dieu et à la ferme détermination à la suivre, constitue une base solide pour affronter sans crainte les décisions, parfois difficiles, qui sont propres à votre service de gouvernement.

Pour conclure, je désire placer entre les mains de la Vierge Marie les fruits de ce XVème Chapitre général et l'avenir de l'Institut. En Elle, vous trouverez la joie et l'espérance qui doivent combler votre vie personnelle et communautaire, vos oeuvres et votre mission. Avec ces souhaits, je donne de tout coeur ma Bénédiction apostolique, que j'étends avec plaisir à toutes les Filles de Jésus.



AUX ÉVÊQUES DU GUATEMALA EN VISITE "AD LIMINA APOSTOLORUM"

Mardi 29 mai 2001


Chers frères dans l'épiscopat,

1. C'est avec plaisir que je vous reçois, Pasteurs de l'Eglise de Dieu qui est au Guatemala, venus à Rome pour la visite "ad limina", au cours de laquelle vous rencontrez le Successeur de Pierre, vous maintenez des contacts opportuns avec les divers dicastères de la Curie romaine, vous priez auprès des tombes des Bienheureux Apôtres Pierre et Paul, piliers de l'Eglise, pour continuer ainsi affermis, votre mission de chefs et de guides du Peuple de Dieu qui est en pèlerinage dans le "Pays du printemps éternel".

Je remercie Mgr Víctor Hugo Martínez Contreras, Archevêque de Los Altos, Quetzaltenango-Totonicapán et Président de la Conférence épiscopale, pour les paroles cordiales qu'il m'a adressées, manifestant votre communion avec l'Evêque de Rome et les sentiments qui vous animent dans votre action pastorale en faveur du bien-aimé peuple guatémaltèque. J'ai été le témoin de la richesse de ses valeurs, à l'occasion de mes deux voyages apostoliques dans votre pays, qui ont eu lieu dans des circonstances très différentes. A l'époque du premier voyage, votre pays vivait une situation cruelle de guerre civile, alors qu'au cours du deuxième, on entrevoyait déjà des horizons de paix, que j'ai voulu encourager. J'ai toujours eu la satisfaction de rencontrer une Eglise vivante, dynamique, proche de tous et sérieusement engagée dans l'annonce de Jésus-Christ et de sa Bonne Nouvelle.


2. En tant qu'Evêques, vous avez la mission fondamentale d'édifier vos communautés sur le roc qui est le Christ (cf. 1Co 10,4), à travers la prédication de la Parole de Dieu, la célébration des Sacrements et la promotion de la charité. Encouragés par les promesses du Seigneur et par la force que nous communique son Esprit, vous êtes appelés à être les premiers à mener à bien la mission que l'Eglise a confiée à son Eglise, sachant que dans ce but, il faut affronter et accepter la croix, qui peut se manifester sous de multiples formes dans la société contemporaine.

Que ce soit individuellement ou collégialement, à travers la Conférence épiscopale et les autres organismes ecclésiaux, vous participez à l'analyse des succès et des attentes de la société guatémaltèque, en cherchant à les interpréter à la lumière de l'Evangile, en aidant la société elle-même à progresser dans le domaine des valeurs morales et, de façon particulière, en favorisant la réconciliation nationale, si nécessaire après les années sanglantes de la guerre civile.

En écoutant ce que l'"Esprit dit aux Eglises" (Ap 2,7), vous sentez également de votre devoir d'accomplir un discernement serein, ouvert et compréhensif, des divers circonstances et événements, initiatives et projets, sans négliger les graves problèmes et les aspirations les plus profondes de la société. C'est pourquoi je vous encourage à poursuivre inlassablement, et sans vous décourager, votre tâche d'enseigner et d'annoncer l'Evangile du Christ aux hommes (cf. Christus Dominus CD 11), en élaborant et en mettant en pratique les projets pastoraux opportuns (cf. Ecclesia in America ). Bien que vos responsabilités soient très grandes, l'Esprit du Seigneur vous illuminera et vous donnera toujours les forces nécessaires.


3. En accomplissant votre mission, vous pouvez tout d'abord compter sur l'aide des prêtres. La société actuelle, si diversifiée, exige du prêtre qu'il soit un signe d'unité, en exerçant son ministère de façon humble et avec charité pastorale, pour conduire les fidèles à la rencontre de Jésus-Christ (cf. Ecclesia in America ). Connaissant la façon dont vous exercez votre ministère, je rends grâce à Dieu pour votre esprit de fraternité et de sacrifice, pour votre témoignage d'austérité et de pauvreté, et pour votre dévouement généreux au service des frères. Je sais que, dans certaines régions, le travail pastoral rencontre des difficultés particulières et cela demande une très grande disponibilité. Comme je l'ai dit dans ma Lettre pour le Jeudi Saint de cette année, il s'agit d'un "travail souvent caché qui, sans accéder aux feux de la rampe, fait avancer le Règne de Dieu dans les consciences" et c'est pourquoi je vous renouvelle "mon admiration pour ce ministère discret, tenace, créatif, bien qu'il soit parfois traversé par les larmes de l'âme que Dieu seul voit" (n. 3).

Afin que le service des prêtres soit toujours plus efficace face aux défis que le monde contemporain lance à la nouvelle évangélisation, il est nécessaire qu'ils bénéficient d'une solide spiritualité, afin d'imiter le Christ, le Bon Pasteur, et qu'ils suivent une formation permanente qui les rende toujours plus aptes à transmettre le message évangélique. A ce propos, je me réjouis de la création, au sein du Programme général de la CEG, de la Commission du Clergé et de la Pastorale sacerdotale, qui a publié le Programme national de Pastorale sacerdotale 2001-2006. Dans le cadre de ce programme, veillez à la situation particulière de chacun et offrez à tous l'aide dont ils ont besoin, en les encourageant à poursuivre avec joie et espérance le chemin de la sainteté sacerdotale. Que ne manquent jamais à vos prêtres les moyens nécessaires pour vivre leur vocation sublime et leur ministère!


4. Dans les Rapports quinquennaux, vous soulignez l'estime et la gratitude pour le don de la vie consacrée dans vos Eglises particulières. En effet, au Guatemala, on constate une présence importante de religieux et de religieuses qui contribuent à l'évangélisation, que ce soit à travers une pastorale directe dans les paroisses ou dans les missions, ou à travers diverses oeuvres d'apostolat éducatif ou d'assistance.

Chez les religieux et les religieuses, l'Eglise apprécie la disponibilité et la capacité de répondre avec promptitude aux défis que comporte la diffusion de la Bonne Nouvelle, en tenant compte dans le même temps que la vie consacrée est elle-même un moyen privilégié d'évangélisation. Je vous rappelle donc la nécessité de toujours conserver une "fidélité créative" à votre propre charisme (cf. Vita consecrata VC 37). Je désire en outre souligner la responsabilité qu'ont les évêques de conserver et de défendre le riche patrimoine spirituel de chaque Institut (cf. Catéchisme de l'Eglise catholique CEC 585,2), en accueillant "le don de la vie consacrée, que l'Esprit suscite dans l'Eglise particulière, en le recevant généreusement dans l'action de grâce" (Vita consecrata VC 48). En outre, face à l'exigence diffuse de spiritualité, que l'on peut considérer comme un "signe des temps" en ce début de millénaire (cf. Novo millennio ineunte NM 33), on attend des personnes consacrées, conformément à leur charisme originel, un témoignage de vie authentiquement évangélique, ce qui enrichira certainement chaque Eglise particulière, en contribuant à conserver vivant le sens de la présence de Dieu et en encourageant chez tous les fidèles "une réelle aspiration à la sainteté, un fort désir de conversion et de renouveau personnel, dans un climat de prière toujours plus intense" (Tertio millennio adveniente TMA 42 Vita consecrata, n. 39).


5. Même si "la mission salvifique de l'Eglise dans le monde est réalisée non seulement par les ministres qui ont reçu le sacrement de l'Ordre, mais aussi par tous les fidèles laïcs" (Christifideles laici CL 23), il ne fait aucun doute que les ministres ordonnés jouent un rôle fondamental dans cette mission. Je désire donc partager votre préoccupation pour la promotion des vocations au sacerdoce et pour la formation des futurs pasteurs du Peuple de Dieu.

L'importance de ce thème exige une réflexion constante et un engagement nouveau et décisif de la part de toutes les communautés chrétiennes sous la direction de ceux que "l'Esprit Saint" a établis comme "gardiens pour paître l'Eglise de Dieu" (Ac 20,28). La pastorale des vocations doit être envisagée à partir de l'appel que le Seigneur lance, de façon personnelle, à le suivre et de l'appel au ministère, à travers la fécondité de l'Eglise et la profondeur de sa vie, alimentée par la pureté de la foi, par la grâce des Sacrements, par l'esprit de conversion et par la prière ardente des membres du Corps mystique du Christ. Tous doivent donc participer d'une façon ou d'une autre à la pastorale des vocations, en étant certains que Dieu répondra en donnant à son peuple, s'il le demande avec persévérance, les ministres nécessaires.

Il est également important de ne pas oublier que la pastorale des vocations trouve un cadre privilégié dans la pastorale des jeunes, orientée vers la formation doctrinale, spirituelle et apostolique des jeunes, que ce soit dans les paroisses et dans les écoles, ou dans les associations apostoliques et dans les mouvements. Il est fondamental que, dans ce domaine, il existe une formation intégrale et cohérente, fondée sur l'intimité avec le Christ, qui prédispose ceux qui sont élus à recevoir avec joie la grâce du don.

Le témoignage de fidélité des prêtres, dans le ministère desquels s'intégreront les nouveaux prêtres ordonnés, constitue à son tour un facteur important pour la formation des séminaristes. En répondant avec générosité et avec un amour indivis à leur "vocation au sacerdoce", les prêtres seront un modèle de charité pastorale, de prière et de dévouement, riche de sacrifice pour les jeunes candidats aux ordres sacrés.


6. Je constate avec satisfaction la façon dont vous accompagnez votre peuple dans la recherche d'une coexistence harmonieuse et pacifique, fondée sur les valeurs de la réconciliation, de la justice, de la solidarité et de la liberté. C'est pourquoi, lorsque cela est nécessaire, n'hésitez pas à dénoncer l'injustice et proposez les principes à caractère moral qui doivent également orienter les réalisations dans la vie civile.

L'Eglise qui est au Guatemala a été le témoin de l'épanchement du sang d'un grand nombre de ses fils. Outre l'effort légitime pour révéler la vérité sur ces crimes intolérables - dont celui de Mgr Juan Gerardi Conedera, Evêque auxiliaire de Guatemala, assassiné il y a trois ans - il est urgent de rappeler leur mémoire comme des "exemples de dévouement sans limite à la cause de l'Evangile" (Ecclesia in America ). A ce propos, je désire rappeler ce que j'ai déjà dit dans votre pays, le 6 février 1996, au Champ de Mars: "Je désire maintenant rendre un hommage affectueux et mérité aux centaines de catéchistes qui, avec quelques prêtres, ont risqué leur vie et l'ont également offerte pour l'Evangile. Par leur sang, ils ont fécondé pour toujours la terre bénie du Guatemala. Cette fécondité doit se traduire par des familles unies et profondément chrétiennes, par des paroisses et des communautés évangélisatrices, par de nombreuses vocations sacerdotales, religieuses et missionnaires. En imitant le courage et la fermeté de Marie, ces catéchistes "ont vaincu par le sang de l'Agneau et par la parole dont ils ont témoigné, car ils ont méprisé leur vie jusqu'à mourir" (Ap 12,11)" (n. 4; cf. ORLF n. 8 du 20 février 1996).


7. D'autre part, diffuser la doctrine sociale de l'Eglise acquiert une dimension d'"authentique priorité pastorale" (Ecclesia in America ), que ce soit pour affronter de façon appropriée les diverses situations avec la rectitude d'une conscience illuminée par la foi, ou pour promouvoir et orienter l'engagement des laïcs dans la vie publique. En effet, les dénonciations, la proclamation théorique des principes ne serviraient pas à grand chose, si ceux-ci n'étaient pas fermement intériorisés grâce à une formation intégrale et systématique. C'est de cette façon que les valeurs inspirées de l'Evangile peuvent avoir une influence concrète sur le monde de la culture, de la technologie, de l'économie et de la politique.

A cette formation, qui doit accompagner la croissance dans la foi de chaque fidèle chrétien, il faut ajouter un effort pour évangéliser également ceux qui ont des responsabilités dans les différents secteurs de l'administration publique. L'Evangile ayant également un message à leur adresser, il est nécessaire de les aider à découvrir que le message de Jésus est valable et pertinent, également en ce qui concerne la fonction qu'ils exercent (cf. Ecclesia in America ).


8. On sait qu'au Guatemala, la diffusion de la Parole de Dieu est réalisée en grande partie par de nombreux catéchistes. J'ai noté, dans les rapports quinquennaux, que vous louez l'oeuvre pleine d'abnégation et de sacrifice qu'ils accomplissent. Je les remercie de tout coeur pour ce service, qui fait partie de leur mission au sein de l'Eglise.

Un moyen particulièrement adapté afin que les fidèles laïcs répondent aux grandes espérances que l'Eglise dépose en eux, dans les tâches qui leur reviennent, est celui d'une organisation appropriée, qui facilite la formation, l'incorporation progresssive des nouvelles générations, l'aide réciproque et l'action apostolique coordonnée. L'apparition de divers mouvements de laïcs peut être, à cet égard, un phénomène flatteur qui mérite une attention particulière de la part des évêques, auxquels, comme le dit l'Apôtre saint Paul, il est dit: "N'éteignez pas l'Esprit, ne dépréciez pas les dons de prophétie; mais vérifiez tout: ce qui est bon, retenez-le" (1Th 5,19-21). De cette façon, avec l'aide de leur pasteurs et en parfaite communion avec ceux-ci, sera formé un laïcat vigoureux, fermement engagé sur le chemin de la sainteté personnelle, dans l'édification de l'Eglise et dans la construction d'une société plus juste.

Ce sera, en outre, une façon efficace de surmonter l'ignorance religieuse et de renforcer la foi, parfois vécue de façon routinière, en rendant ainsi les baptisés moins vulnérables face à la progression du prosélytisme des sectes et à d'autres propositions soi-disant spirituelles (cf. Ecclesia in America, n. 73).


9. Au terme de cette rencontre, je désire vous encourager à poursuivre, avec le dynamisme et l'enthousiasme qui vous caractérisent, et avec une espérance renouvelée, l'exercice de la mission que le Seigneur vous a confiée. Je vous demande de vous faire les interprètes de mon affection et de ma proximité spirituelle auprès de vos prêtres, des religieux et des religieuses, et de tous les fidèles guatémaltèques qui vont joyeusement à la rencontre du Seigneur. A ce propos, je rappelle que "les routes sur lesquelles marche chacun de nous, chacune de nos Eglises, sont nombreuses, mais il n'y a pas de distance entre ceux qui sont étroitement unis dans l'unique communion, la communion qui chaque jour se nourrit à la table du Pain eucharistique et de la Parole de Vie" (Novo millennio ineunte NM 58).

Que la Très Sainte Vierge, Mère de l'Eglise, vous accompagne sur votre chemin et vous réconforte toujours à travers sa tendresse maternelle! Que vous soutienne également la Bénédiction apostolique que je vous donne volontiers, et que j'étends à vos Eglises particulières.



Discours 2001 - Samedi 19 mai 2001