Discours 2001 - AUX ÉVÊQUES DU GABON EN VISITE "AD LIMINA APOSTOLORUM"


MESSAGE AU REPRÉSENTANT DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DES NATIONS UNIES POUR L'ENFANCE ET LES CONFLITS ARMÉS



A M.Olara A. Otunnu, Sous-Secrétaire général de l'Organisation des Nations unies Représentant spécial du Secrétaire général pour l'Enfance et les Conflits armés

A l'occasion du Symposium Enfants dans les conflits armés: la responsabilité de tous, qui se tiendra au siège des Nations unies le 5 juin 2001, et qui est organisé, en collaboration avec votre Bureau, par la Mission de l'Observateur permanent du Saint-Siège, je vous transmets mes salutations cordiales, ainsi qu'à tous les participants, et je vous assure de ma solidarité dans la prière.

Le thème du Symposium attire une attention nécessaire sur la triste plaie des innombrables enfants qui sont victimes de la guerre dans de nombreuses parties du monde. Le souvenir de ceux qui ont été tués et les difficultés persistantes de tant d'autres nous obligent à n'épargner aucun effort pour mettre un terme à ces conflits et à ces guerres, et à faire tout notre possible afin d'aider les jeunes victimes à retourner à une vie saine et digne. A cet égard, l'Organisation des Nations unies, avec d'autres organisations humanitaires et religieuses, oeuvrent inlassablement pour soulager ces souffrances inhumaines. Elles méritent notre gratitude, notre soutien et notre encouragement.

Les enfants et les jeunes sont "des membres précieux de la société humaine, dont ils incarnent les espérances, les attentes, les possibilités" (Message pour la Journée mondiale de la Paix 1996, n. 9; cf. ORLF n. 50 du 12 décembre 1995). Le défi qui se présente aux personnes, aux organisations, mais également à toute la Communauté internationale, consiste à garantir partout la possibilité à chaque enfant de grandir dans la paix et le bonheur. Ainsi, eux aussi deviendront des artisans de paix, des artisans d'un monde de fraternité et de solidarité.

Avec ces pensées, je prie pour que ce Symposium important conduise à une plus grande conscience de la gravité du problème des enfants dans les situations de conflit armé. Sur tous les participants, j'invoque une abondance de Bénédictions divines.

Du Vatican, le 30 mai 2001


AUX PARTICIPANTS AU CHAPITRE GÉNÉRAL DES FRANCISCAINS DU TIERS ORDRE RÉGULIER

Jeudi 7 juin 2001


Chers Frères du Tiers Ordre régulier de Saint-François d'Assise!

1. Je suis heureux de vous accueillir à l'occasion de votre Chapitre général et je vous salue avec affection. J'adresse un salut particulier au Père Ilija Zivkovic, que vous avez appelé à remplir les fonctions de Ministre général. A lui et au nouveaux élus du Définitoire général, j'exprime mes félicitations, ainsi que le souhait d'un travail profitable au service de l'Ordre et de toute l'Eglise.

Vous êtes rassemblés pour effectuer une révision attentive de votre vie religieuse, personnelle et communautaire, en ayant comme terme de comparaison l'Evangile et le charisme pénitentiel, défini dès les origines du Tiers Ordre et confirmé au cours de nombreux siècles d'histoire. Dans cette perspective, vous avez ressenti l'urgence d'un renouveau continuel de votre chemin de perfection sur les traces du "Poverello" d'Assise. C'est de là, en effet, que jaillit le dynamisme apostolique, qui ouvre votre coeur à vos frères et qui vous dispose à assumer leurs problèmes existentiels pour coopérer avec le Christ au plan du Salut.

2. Votre façon de suivre le Christ selon les enseignements et les exemples de saint François d'Assise constitue pour vous un privilège singulier dont vous devez être profondément reconnaissants au Seigneur qui vous a appelés. De nombreux siècles de témoignage apostolique et caritatif ont enrichi votre Ordre de mérites et d'expériences, vous dotant d'un patrimoine spirituel particulier dont vous devez tenir compte dans vos vérifications et dans vos projets.

La vie religieuse, imprégnée de l'Evangile, ne s'arrête cependant pas à la satisfaction provoquée par le passé, mais vit intensément le présent et se projette avec enthousiasme vers l'avenir. La dialectique entre héritage et prophétie confère une base valable à vos espérances pour le troisième millénaire, déjà commencé d'une heureuse façon.

Dans cette perspective, vous devez vous sentir engagés à convertir toujours davantage votre coeur à Dieu, dans lequel vous avez placé toute votre espérance. Il doit polariser votre pensée, en vous libérant des multiples freins qui pourraient réduire l'efficacité de votre témoignage évangélique dans le monde d'aujourd'hui. Que le Père "daigne... vous armer de puissance par son Esprit pour que se fortifie en vous l'homme intérieur, que le Christ habite en vos coeurs par la foi..., ainsi vous entrerez par votre plénitude dans toute la Plénitude de Dieu" (Ep 3,16 Ep 3,17 Ep 3,19).

Si, comme François d'Assise, vous portez dans le coeur l'Esprit du Seigneur et savez manifester par votre comportement l'image du Christ, votre présence dans l'Eglise produira de nombreux fruits de vie et pourra apporter une contribution efficace à la construction de la civilisation de l'amour, modelée sur l'Evangile.


3. Dans la "fidélité dynamique" à votre charisme, "regardez vers l'avenir, où l'Esprit vous envoie pour faire encore avec vous de grandes choses" (Vita Consecrata VC 110). En vous laissant transformer par l'Esprit, collaborez efficacement à l'évangélisation du monde contemporain et devenez "des acteurs privilégiés de la recherche de Dieu qui anime depuis toujours le coeur de l'homme et le conduit dans de multiples voies d'ascèse et de spiritualité" (Ibid., VC 103).

Poursuivez en particulier votre engagement dans l'apostolat missionnaire, dans lequel votre ordre s'est acquis d'appréciables titres de mérite, offrant des services de vie franciscaine, de culture et de charité active.

A travers une recherche créative, imaginez des oeuvres de miséricorde qui renouvellent votre attention traditionnelle aux pauvres et aux plus faibles de la société, parce que servir les indigents est un acte d'évangélisation qui, en même temps, scelle la fidélité à l'Evangile et invite à la conversion permanente (cf. Ibid., VC 82).

Comme François d'Assise, prêchez la paix et la pénitence, assurez la promotion de la justice, défendez les droits de la personne humaine, élevez la voix contre les exploitations et les violences, prenez soin des nombreuses blessures qui font gémir l'humanité d'aujourd'hui.


4. Si vous savez lire les signes des temps, dans une optique de foi et avec un regard d'amour, il vous sera facile d'identifier les nouvelles formes d'évangélisation et de service caritatif adaptées aux besoins de l'époque actuelle.

Contribuez à travers votre engagement à la promotion de la culture, tant comme service aux frères à la recherche de la vérité, que comme moyen de formation intégrale et comme voie d'ascèse (cf. Ibid., VC 98). L'étude est "l'expression du désir jamais comblé de connaître Dieu plus en profondeur, abîme de lumière et source de toute vérité humaine... [elle] pousse au dialogue et au partage, développe l'exercice du jugement, incite à la contemplation et à la prière dans la recherche constante de Dieu et la découverte de son action au coeur de la réalité complexe du monde contemporain" (cf. Ibid., VC 98).

Enfin, n'oubliez pas votre engagement reconnu en faveur de l'unité des chrétiens et pour le dialogue oecuménique, ainsi que l'ouverture au dialogue interreligieux, qui fait partie, lui aussi, de la mission évangélisatrice de l'Eglise (cf. Redemptoris missio RMi 55).


5. Voici devant vous, chers Frères dans le Christ, un programme enthousiasmant pour le troisième millénaire, qui attend de trouver en vous des témoins de conversion évangélique, des artisans de la charité et de l'évangélisation, des prophètes d'un monde renouvelé dans la foi et l'amour par une infusion féconde des valeurs chrétiennes.

Dans cet itinéraire pénitentiel, scandé par le rythme de la conversion du coeur et par les oeuvres de miséricorde, François d'Assise est votre maître et votre modèle. Regardez-le et il vous conduira sur les chemins de l'Evangile jusqu'au Christ, pour réaliser une profonde expérience d'amour envers Dieu et envers vos frères.

Avec ce voeu, je vous donne de tout coeur, à vous tous et à tous les Frères de l'Ordre, ainsi qu'aux Soeurs de clôture du Tiers Ordre régulier, ma Bénédiction.



AUX PARTICIPANTS AU PÈLERINAGE PATRIARCAL D'ANTIOCHE DES SYRIENS

Vendredi 8 juin 2001


Béatitude,
Chers Frères dans l'épiscopat,
Chers Fils et Filles de l'Eglise syro-catholique,

1. C'est avec joie que, pour la première fois, j'accueille Votre Béatitude depuis son élection au siège patriarcal d'Antioche des Syriens. Votre présence ravive en mon coeur mon récent pèlerinage dans votre pays sur les pas de saint Paul, au cours duquel le clergé et les fidèles de votre Église m'ont accueilli chaleureusement et ont manifesté leur dynamisme spirituel et apostolique. Je vous demande, à vous qui êtes ici aujourd’hui, de transmettre mes ferventes salutations à tous vos frères et soeurs.

Je suis heureux de vous rencontrer ici, entouré d’évêques de votre patriarcat, de prêtres et de fidèles, que je salue cordialement, pour partager ce grand moment de communion fraternelle, par lequel s'exprime le lien qui unit l’Église syro-catholique à l’Église catholique tout entière. Nous venons de vivre cette communion dans la célébration de la Divine Liturgie où nous avons partagé l’unique Corps du Christ. À travers elle s’est exprimée en plénitude la communion ecclésiastique entre le Successeur de Pierre et Votre Béatitude, Père et chef de l’Église syro-catholique d’Antioche, siège apostolique et ville qui peut être fière de sa tradition ecclésiastique particulière. Votre communauté patriarcale, remplie d’amour et ferme dans la foi, est porteuse d'une riche tradition spirituelle, liturgique et théologique, la tradition antiochienne, qui continue à nourrir les Églises d’Orient.

2. Vous êtes appelés, par votre présence notamment dans les différents pays du Moyen-Orient, à être comme le levain qui, bien que discrètement, a cependant un rôle fondamental pour faire lever toute la pâte. Votre mission est d’une importance capitale pour les fidèles et pour tous les hommes, auxquels l'amour du Christ nous presse d'annoncer la Bonne Nouvelle du salut. Je salue en particulier le souci des chrétiens pour l’éducation humaine, spirituelle, morale et intellectuelle de la jeunesse à travers un réseau scolaire et catéchétique de qualité. Je souhaite vivement que soit toujours davantage reconnu par la société le rôle des Églises dans la formation de la jeunesse, pour que soient transmis aux jeunes générations, sans discrimination, les valeurs fondamentales et les éléments qui feront des jeunes d’aujourd’hui les responsables de demain dans leurs familles et dans la vie sociale, pour une plus grande solidarité et une plus intense fraternité entre toutes les composantes de la nation. Transmettez aux jeunes toute mon affection, en leur rappelant que l’Église et la société ont besoin de leur enthousiasme et de leur espérance.

Héritiers d’une histoire de foi nourrie de la pensée théologique de grandes écoles comme Édesse ou Nisibe, et par les enseignements d’illustres saints Pères comme Éphrem, "Harpe du Saint-Esprit" et Docteur de l’Église, Jacques de Sarug, Narsai et tant d’autres, vous avez à suivre sans cesse leurs traces, en développant la recherche théologique et spirituelle propre à votre tradition, ce qui affermira vos communautés ecclésiales et favorisera les contacts avec vos frères orthodoxes. Dans cette perspective, je vous invite donc à intensifier la formation des prêtres pour qu’ils soient des témoins du Verbe de Dieu par leur enseignement et par leur existence, et qu’ils puissent accompagner le peuple de Dieu, aidant les fidèles à fonder leur vie et leur mission sur une relation toujours plus profonde avec le Christ. C’est ainsi que l’Église sera pleinement missionnaire là où elle demeure et jusqu’aux extrémités de la terre.

3. Je profite de la circonstance pour rappeler, Béatitude, vos prédécesseurs directs, en tout premier lieu le cher Frère Mar Ignace Antoine II Hayek qui, avec un dévouement et une ferveur exemplaires, a consacré toute sa vie au service de Dieu et de la communauté qui lui était confiée. Avec une grande sagesse et une bonté toute paternelle, il a guidé l’Église syro-catholique pendant trente ans. Je vous saurais gré de lui transmettre mes voeux cordiaux et fervents pour qu’il demeure dans la sérénité dans cette étape de son existence. Je salue aussi le Cardinal Mar Ignace Moussa Ier Daoud, auquel j'ai confié dans la Curie romaine la lourde tâche de guider la Congrégation pour les Églises orientales. Je le remercie d’avoir accepté, avec désintéressement et avec un zèle ecclésial profond, manifestant ainsi son amour pour l'Église. Il rend présent aux côtés du Successeur de Pierre et dans la Curie romaine le trésor précieux que représentent les Églises d’Orient.

4. Béatitude, je forme pour vous des voeux fraternels afin que soit fécond l’exercice de votre charge au sein de l’Église syro-catholique. Au moment où j’échange avec vous le saint baiser de paix, en vous confiant à l'intercession de la Bienheureuse Vierge Marie, "fille digne de Dieu et beauté de la nature humaine" (S. Jean Damascène, Homélie sur la naissance de Marie, 7), et des saints de votre Église, je vous accorde de grand coeur la Bénédiction apostolique, ainsi qu'aux évêques, aux prêtres, aux religieux et religieuses, et à tous les fidèles de votre patriarcat.



AUX ÉVÊQUES DU CONGO EN VISITE "AD LIMINA APOSTOLORUM"

Samedi 9 juin 2001




Chers Frères dans l'épiscopat,

1. C'est avec joie que je vous accueille au moment où vous accomplissez votre visite ad limina. Vos rencontres avec le Successeur de Pierre et avec ses collaborateurs sont une occasion importante pour manifester votre communion ainsi que celle des diocèses du Congo avec l'Église universelle. Je souhaite que vous trouviez ici les encouragements et le réconfort nécessaires pour accomplir votre ministère épiscopal dans votre pays.

Je remercie le Président de votre Conférence épiscopale, Mgr Anatole Milandou, Archevêque de Brazzaville, de la présentation qu'il m'a faite en votre nom des grands problèmes auxquels l'Église et le peuple congolais se trouvent affrontés aujourd'hui.

À votre retour dans vos diocèses, portez à vos prêtres, aux religieux, aux religieuses, aux catéchistes et à tous les fidèles, le salut affectueux du Pape, qui demeure proche de chacun d'eux par la pensée et par la prière. Transmettez à tous vos compatriotes mes souhaits cordiaux pour un avenir de paix et de réconciliation, afin que tous puissent vivre dans la sécurité et la fraternité retrouvées.

2. Après avoir vécu une période tragique qui a fait de nombreuses victimes, imposant à un grand nombre de vos compatriotes de connaître l'exil et causant des destructions matérielles considérables, votre pays a entrepris des efforts importants pour permettre à tous les Congolais de vivre dans la sécurité et de parvenir définitivement à la concorde nationale. Au cours de cette période d'épreuves, vous avez fait entendre votre voix pour appeler à la paix et à la réconciliation. Tout récemment encore, vous avez adressé à vos fidèles et à tous les hommes de bonne volonté un vigoureux message sur le dialogue, la vérité et la justice, comme chemin de paix. Je vous remercie de votre engagement et de celui de vos communautés aux côtés de votre peuple dans la détresse et le désarroi. Tout au long de ces dramatiques événements, l'attitude de l'Église et de ses ouvriers apostoliques pour aider les populations dans l'épreuve commune a été admirable. Toutefois, on ne peut que regretter le trop grand nombre de prêtres, de religieux et de religieuses qui ont quitté le pays en cette période troublée. Je souhaite vivement qu'ils puissent reprendre rapidement leur place dans vos diocèses et accepter courageusement une mission pastorale auprès de leurs compatriotes.

Aujourd'hui, en une étape de la vie du pays qui est décisive pour son avenir, je vous encourage à avoir toujours plus d'audace pour ouvrir des chemins de réconciliation entre tous les fils de la nation et à inciter les catholiques et tous les hommes de bonne volonté à être plus que jamais des artisans infatigables de paix.

Poursuivez avec ardeur l'annonce de l'Évangile que nous a laissé le Seigneur. Invitez sans relâche les fidèles de vos diocèses à revenir au Christ, apprenez-leur à fixer leur regard sur son visage qui manifeste l'amour du Père pour tous les hommes ! L'expérience tragique qu'a vécue le peuple congolais doit inciter les catholiques à regarder résolument en avant et à se lancer dans des initiatives apostoliques courageuses, fermement enracinées dans la contemplation et dans la prière.

3. Pour manifester la communion profonde qui vous unit dans cette tâche apostolique, il est indispensable que se développe toujours plus entre les pasteurs une authentique cohésion, notamment en donnant l'importance qui convient à la Conférence épiscopale, lieu de confrontation fraternelle des idées et de collaboration en vue du bien commun de vos Églises particulières. En étant toujours plus proches de vos prêtres et de vos fidèles, par une présence active dans vos diocèses, vous serez à même de reconstruire les communautés disloquées par la guerre, de soigner les coeurs blessés et d'aider tous ceux qui vous sont confiés à progresser sur les chemins de l'Évangile.

Ainsi que l'a souligné avec force le Concile Vatican II, "en tant que guides vers la perfection, les Évêques s'attacheront à faire progresser dans la sainteté leurs clercs, les religieux et les laïcs, selon la vocation particulière de chacun, ayant conscience d'être eux-mêmes tenus de donner l'exemple de la sainteté par leur charité, leur humilité et la simplicité de leur vie" (Décret Christus Dominus CD 15). La charge de sanctification qui est confiée aux Évêques est en effet d'une importance capitale pour la vie de l'Église et de tous ses membres. Je vous invite à porter une attention particulière dans ce domaine à vos prêtres qui, avec vous, coopèrent à la mission de faire progresser le peuple de Dieu dans la sainteté. Soyez attentifs aux difficultés qu'ils rencontrent dans leur existence quotidienne, humainement et spirituellement ! Leur exemple de vie spirituelle et morale doit être pour tous un signe clair de l'Évangile et de ses exigences. Apportez-leur le réconfort et le soutien de votre amitié, surtout dans les périodes plus éprouvantes pour leur ministère. Que celui qui tombe trouve en vous un père qui affronte les difficultés avec charité mais qui sait aussi faire preuve de rigueur au moment opportun!

4. Dans la lettre apostolique Novo millennio ineunte, que j'ai adressée à toute l'Église au terme du grand Jubilé de l'An 2000, j'ai souhaité que les communautés catholiques retrouvent le même enthousiasme que les chrétiens de la première heure pour annoncer l'Évangile du Christ et en témoigner par toute leur existence. Il est en effet urgent de donner à l'évangélisation un souffle nouveau. Dans la période particulière que vit votre pays, une vigoureuse pastorale familiale est nécessaire afin que "les familles chrétiennes donnent un exemple convaincant de la possibilité d'un mariage vécu de manière pleinement conforme au dessein de Dieu et aux vraies exigences de la personne humaine : de la personne des conjoints et surtout de celle, plus fragile, des enfants" (NM 47). Les violences, la dispersion des familles ces dernières années, ont eu de graves conséquences sur l'unité de la cellule familiale et sur le respect de la dignité humaine. Aussi est-il nécessaire que les chrétiens soient toujours plus conscients de la responsabilité qui leur incombe pour préserver et développer les valeurs essentielles de la famille et du mariage chrétien. Une attention spéciale doit être donnée à la formation des consciences afin que la société entière respecte, défende et promeuve la dignité de toute personne humaine, à tous les moments et en tous les états de sa vie (cf. encyclique Evangelium vitae EV 81). En effet, plus que jamais, les catholiques doivent témoigner avec force que toute vie humaine possède un caractère sacré et inviolable dès son origine. Pour inciter à cette prise de conscience, il est essentiel de développer une large action éducative et de prendre des initiatives concrètes, notamment auprès des jeunes générations, afin que tous puissent entendre et accueillir les exigences évangéliques concernant le respect de la vie humaine et de sa dignité. Elles seront pour chacun un guide et un moyen précieux pour réussir pleinement son existence.

5. Les difficultés que connaissent les jeunes, dues notamment aux conditions de grande pauvreté ou aux conséquences des violences qui souvent les marquent encore profondément, doivent inciter les pasteurs à développer une pastorale de la jeunesse adaptée à leurs situations et aux problèmes auxquels ils sont affrontés. Je souhaite que l'Église les aide à vaincre toute tentation de violence, afin que le désir qu'ils portent en eux de changer la vie devienne un engagement authentique pour édifier une société nouvelle sans divisions, sans oppositions, sans discriminations, un engagement fondé sur la fraternité et la solidarité. Qu'ils manifestent avec audace que tous les hommes sont frères, parce qu'ils ont un même Père qui les aime passionnément ! Aux jeunes du Congo, dites que, par le coeur et par la prière, le Pape est proche d'eux, de leurs préoccupations quotidiennes, et qu'il les invite à ne jamais désespérer de la vie!

Par son engagement dans les écoles et d'une manière générale dans l'éducation, l'Église apporte une contribution importante à la formation humaine, morale et spirituelle des jeunes. Pour coopérer avec toujours plus d'efficacité à la recherche du bien commun de l'ensemble de la société et à la réduction des fractures qui la divisent encore trop souvent, il est nécessaire d'éduquer la jeunesse au respect mutuel entre les personnes, entre les groupes humains et entre les communautés religieuses, et de favoriser l'esprit d'accueil et de dialogue. Je souhaite que, par leur témoignage ardent de vie chrétienne, les éducateurs transmettent aux jeunes des convictions assez fortes pour les aider à porter courageusement les épreuves et à prendre la part qui leur revient à la vie de la nation et de l'Église.

6. Par votre intermédiaire, chers Frères dans l'épiscopat, je voudrais dire à vos prêtres toute mon estime et mes encouragements très cordiaux pour leur engagement sacerdotal dans des conditions souvent très éprouvantes. Je les invite à développer en eux un esprit apostolique qui les conduise à répondre généreusement aux sollicitations de la mission, particulièrement dans les postes les plus humbles qui nécessitent un détachement de soi et une fidélité quotidienne au Seigneur qui les a appelés à sa suite. Je souhaite vivement que tous, sans oublier ceux qui vivent à l'extérieur de leur pays, aient présents au coeur les immenses besoins pastoraux de leurs frères et de leurs soeurs qui, dans leurs diocèses, attendent que leur soit annoncé l'Évangile et que leur soient distribués les Sacrements de l'Église.

L'attachement généreux et inconditionnel des prêtres à la personne du Christ se manifeste de manière remarquable dans le célibat qu'ils ont accepté librement. En respectant l'obligation canonique, qu'ils le vivent de façon joyeuse et transparente, en en faisant un témoignage prophétique de l'amour sans limites qui les unit au Christ ! Une vie spirituelle intense, accompagnée d'une formation permanente rigoureuse, leur permettra de répondre dans la sérénité et sans réticence à cette exigence évangélique que leur demande l'Église.

Chers Frères dans l'épiscopat, vous savez l'importance de la formation des futurs prêtres pour l'avenir de l'Église. Je vous encourage à donner à vos séminaires une place de choix dans vos priorités pastorales, afin que les jeunes puissent vérifier sereinement leur vocation et recevoir dans leur pays une solide formation humaine, spirituelle, morale, intellectuelle et pastorale. Une grande partie de l'efficacité de la formation dépend de la qualité des équipes de formateurs, appréciés pour leur compétence et l'exemplarité de leur vie sacerdotale. C'est pourquoi, je vous invite à faire les sacrifices nécessaires pour choisir avec soin les prêtres les plus aptes à une telle charge.

7. Je suis reconnaissant aux Congrégations et aux Instituts de vie consacrée pour leur engagement constant et courageux au service de l'Église au Congo, notamment par le travail généreux de leurs membres en faveur de l'éducation, de la formation, de la santé ou d'autres aides sociales. J'encourage les responsables religieux à donner une impulsion nouvelle à leurs structures de concertation diocésaines et nationales. Il est en effet important que, en relation étroite avec les Évêques et dans le respect des charismes propres, tous puissent collaborer fraternellement à l'unique mission de l'Église et apporter ainsi leur contribution à la communion ecclésiale.

Dans une société qui a connu tant de divisions et d'incompréhensions, les personnes consacrées ont une vocation particulière à annoncer "par le témoignage de leur vie, la valeur de la fraternité chrétienne et la force transformante de la Bonne Nouvelle, qui fait reconnaître chacun comme enfant de Dieu et pousse à l'amour oblatif envers tous et spécialement envers les plus humbles" (Exhortation apostolique Vita consecrata VC 51). Que toutes les communautés de consacrés, animées d'un ardent esprit de prière et d'ouverture à tous, soient vraiment des lieux d'accueil, de communion et d'espérance!

8. Je connais la présence active de l'Église, notamment à travers ses organismes caritatifs nationaux et internationaux, auprès des personnes atteintes par de graves maladies comme le Sida, auprès des réfugiés provenant de pays voisins et, d'une manière générale auprès de tous ceux qui souffrent des conséquences de la pauvreté. Je remercie et j'encourage très vivement tous ceux et toutes celles qui, avec tant de générosité et de désintéressement, se mettent au service de leurs frères et de leurs soeurs. Ils sont ainsi, au nom de toute l'Église, les témoins de la charité du Christ parmi les plus démunis et les plus faibles de la société.

À tous les fidèles de vos diocèses et à tous les Congolais, je voudrais adresser un message particulier de paix et d'espérance. Pour dépasser les conséquences des conflits, des violences et des haines, et parvenir à une véritable réconciliation, le seul chemin à parcourir ensemble est celui de la fraternité et de la solidarité. Que tous soient des hommes et des femmes capables de vivre dans l'unité la riche diversité de leurs origines, de leurs cultures, de leurs langues, de leurs traditions et de leurs mentalités. Que jamais plus des frères ne se dressent contre des frères ! Avec pleine confiance, allez de l'avant dans l'espérance ! Dieu est fidèle, il n'abandonne jamais ses enfants.

9. Chers Frères dans l'épiscopat, à la fin de cette rencontre, je confie chacun de vos diocèses à la protection maternelle de la Vierge Marie, Reine de l'Afrique. Qu'elle vous accompagne dans l'oeuvre d'évangélisation et qu'elle vous guide dans votre marche vers son divin Fils. Je vous encourage vivement à avancer sans crainte, avec un élan missionnaire renouvelé pour que, forts de la grâce du Christ et tendus vers le but auquel il nous convie, vous sachiez ouvrir au peuple qui vous est confié un avenir d'espérance et de paix. À chacun de vous et à tous vos diocésains, j'accorde de grand coeur une affectueuse Bénédiction apostolique.

    


AUX MEMBRES DU CONSEIL D' ADMINISTRATION DE LA "CAISSE NATIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE" (FRANCE)

Samedi 9 juin 2001



Chers Amis,


Je vous souhaite la bienvenue, à vous, membres du Conseil d’administration de la Caisse nationale du Crédit Agricole, présents aujourd’hui à Rome dans le cadre d’un voyage de travail. Je salue bien cordialement vos conjoints. Je remercie votre Président, Monsieur Marc Bué, pour ses aimables paroles qui rendent compte de l’esprit dans lequel vous travaillez, appréciant aussi la généreuse offrande par laquelle les instances du Crédit agricole ont tenu à manifester leur solidarité avec les pays les plus pauvres de la planète.

Le contexte d’une économie toujours plus mondialisée contraint les entreprises à conquérir de nouveaux marchés en adoptant des stratégies de développement souvent agressives, liées à des impératifs de performance et de rentabilité. Cette logique économique ne cesse d’engendrer de criantes inégalités entre les pays. Et la dette internationale des pays pauvres constitue un obstacle majeur au processus de croissance de nombreuses nations, car elle compromet l’économie locale et le développement intégral des personnes, et elle met en péril la vie des familles et l’avenir des sociétés. En proposant des valeurs à la fois humanistes et mutualistes de progrès et de promotion de l’homme dans l’entreprise comme dans l’économie, vous travaillez à affermir la paix et la solidarité du genre humain. Dans cette perspective, je vous encourage à enraciner vos décisions dans une vision chrétienne de l’homme et de l’humanité, afin de contribuer efficacement à la construction d’un monde où les choix politiques et les options économiques répondent véritablement aux aspirations les plus profondes des nouvelles générations.

Confiant à la Vierge Marie tous les efforts déployés par vos soins pour édifier la civilisation de l’amour et de la fraternité, je vous accorde bien volontiers la Bénédiction apostolique, que j’étends à tous vos collaborateurs et à vos familles.



  AUX PARTICIPANTS À L'ASSEMBLÉE PLÉNIÈRE DE LA COMMISSION PONTIFICALE D'ARCHÉOLOGIE SACRÉE

Samedi 9 juin 2001



Très chers frères et soeurs!

1. Je désire souhaiter une cordiale bienvenue à chacun de vous, qui participez à la réunion plénière de la Commission pontificale d'Archéologie sacrée. Vous me rendez aujourd'hui visite au terme de deux intenses journées consacrées à un examen approfondi de l'activité que vous avez exercée au cours du grand Jubilé de l'Année Sainte 2000.

Je salue avec affection Mgr Francesco Marchisano, votre Président, et je le remercie des paroles courtoises qu'il a voulu m'adresser en votre nom. Je lui suis également reconnaissant pour avoir voulu m'illustrer le thème de votre rencontre: Les catacombes chrétiennes d'Italie et l'Année Sainte: bilan d'un pèlerinage.

En effet, vous avez offert une contribution importante à la réussite de l'Année jubilaire, qui a suscité un si grand écho dans le monde. Merci de votre service; merci de l'amour et de la compétence avec lesquels vous continuez à vous engager pour faire des catacombes chrétiennes de Rome et d'Italie des lieux de nouvelle évangélisation, de prière et de promotion culturelle pour les pèlerins du monde entier.


2. Fidèles à la finalité institutionnelle de votre Commission, vous vous êtes proposés, à l'occasion de l'Année Sainte, de faciliter le pèlerinage des pèlerins et de rendre plus accueillantes les catacombes ouvertes au public.

Ces deux objectifs ont été gardés à l'esprit dans la création d'itinéraires alternatifs à l'intérieur des catacombes romaines de Saint-Callixte, Saint-Sébastien, Domitille, Priscilla et Sainte-Agnès, dans les travaux d'éclairage et de restauration réalisés à Rome et dans d'autres catacombes présentes sur le territoire italien. Presque à la fin de l'Année Sainte, la réfection de la couverture de la splendide basilique des Saints Nérée et Achillée dans les catacombes de Domitille, dans lesquelles il est possible de revivre l'atmosphère spirituelle que l'on respirait lors des premiers siècles de l'ère chrétienne, a été particulièrement importante.

Cet événement enrichit de façon supplémentaire le patrimoine archéologique qui représente le témoignage le plus concret et tangible du monde des catacombes, où les premiers chrétiens eurent l'idée d'un système funéraire nouveau, en enterrant les fidèles dans des tombes toutes semblables, humbles et sobres, à l'enseigne de l'égalité et de l'esprit communautaire.


3. En effet, en visitant les catacombes, le pèlerin peut revenir en esprit aux gestes des premiers chrétiens, qui organisèrent une sorte de "cercueil commun" pour assurer une sépulture digne à tous les frères, y compris les veuves, les orphelins et les indigents. A la base de ce choix, ils placèrent la valeur de la solidarité et celle, encore plus grande, de la charité.

La structure même des catacombes souligne le profond enracinement de ces valeurs dans la vie de ces premiers frères dans la foi: celles-ci, comme l'atteste la dénomination coemeteria, se présentent comme de grands dortoirs communautaires, où tous, indépendemment de leur rang et de leur profession, reposaient dans une étreinte idéale, dans l'attente de la résurrection finale.

Dans la pénombre des catacombes, l'attention des visiteurs est attirée par ces tombes simples, toutes égales, fermées par des dalles de marbre ou de pierre, sur lesquelles apparaissent uniquement les noms des défunts. Dans de nombreux cas, ce simple élément d'identification est absent, comme pour souligner, à travers l'anonymat, l'égalité des hospites. D'autres fois, celle-ci est mise en évidence par divers symboles: l'ancre, qui ramène au concept de la sécurité de la foi; le poisson, qui fait allusion au Christ Sauveur et la colombe, qui rappelle la simplicité et la candeur de l'âme, expressions de la foi commune.


4. A côté des simples fidèles, de nombreuses tombes de martyrs des persécutions de Decius, de Valérien et de Dioclétien, immédiatement profondément vénérées par les premiers chrétiens, furent placées, comme on le sait, dans les catacombes. Sur leurs tombes, comme sur celles des papes et des saints des premiers siècles, les pèlerins provenant également de régions lointaines de la Méditerranée et du Nord de l'Europe laissèrent leur nom. Ces graffiti, extrêmement précieux pour les chercheurs travaillant sur le culte antique, garantissent une vénération ininterrompue jusqu'à aujourd'hui.

Très chers frères et soeurs! Le très riche patrimoine de foi, d'art et de culture, représenté par les catacombes, trouve dans votre Commission pontificale d'Archéologie sacrée un gardien compétent, respectueux des objectifs de piété et plein de zèle pour en développer la connaissance et en permettre un accès enrichissant. A ce propos, je désire manifester ma satisfaction pour l'engagement dont vous avez fait preuve en vue de l'ouverture d'autres catacombes, comme celles de Saint-Laurent au Verano et, malgré les difficultés et la complexité des situations, de Saint-Pancrace et des Saints-Marcellin-et-Pierre. En encourageant votre précieux et généreux travail, je souhaite que cet effort soit rapidement couronné de succès. Celui-ci restitue non seulement une trace significative des premiers siècles chrétiens, pour la plus grande joie de l'historien et de l'amateur des monuments antiques, mais il rend aussi un service utile à la nouvelle évangélisation. En effet, le pèlerin moderne, souvent désorienté et incertain, en reparcourant les itinéraires suivis par les premiers chrétiens et en reprenant leurs gestes de dévotion, peut être conduit plus aisément à redécouvrir son identité religieuse et à se décider, avec un enthousiasme renouvelé, à suivre le Christ, comme le firent tant de martyrs des premiers siècles du christianisme.

Je vous remercie donc de votre collaboration à l'annonce du Christ aux hommes de notre époque. Que le Seigneur remplisse vos coeurs de l'ardeur des saints et des martyrs, que vous contribuez à faire connaître et honorer.

Alors que je confie chacun de vous et vos proches à la protection céleste de la Mère de Dieu, je donne à tous une Bénédiction apostolique spéciale.

 

Discours 2001 - AUX ÉVÊQUES DU GABON EN VISITE "AD LIMINA APOSTOLORUM"