Discours 2001 - Samedi 9 juin 2001


AUX PÈLERINS VENUS POUR LA CANONISATION DE 5 BIENHEUREUX

Lundi 11 juin 2001



Messieurs les Cardinaux,
Vénérés frères dans l'épiscopat et dans le sacerdoce,
Très chers frères et soeurs!

1. Nous avons célébré hier la première cérémonie de canonisation après le grand Jubilé de l'an 2000. A vous tous, venus pour cet heureux événement, je suis heureux de renouveler aujourd'hui ma bénédiction, dans l'ambiance plus familiale de cette rencontre, au cours de laquelle nous avons également l'opportunité de réfléchir sur les figures des nouveaux saints


2. En pensant à saint Luigi Scrosoppi, je salue affectueusement les prêtres et les fidèles du diocèse de Udine ici présents avec leur Evêque, Mgr Pietro Brollo. J'adresse une pensée particulière à la Congrégation des "Soeurs de la Providence de Saint Gaetano Thiene" qu'il a fondée en 1837. Très chères soeurs, vous êtes nées d'un groupe de femmes emplies de foi et de générosité apostolique, qui collaboraient avec le Père Luigi dans le soin affectueux des filles seules et abandonnées de Udine et de ses environs. La canonisation de votre fondateur démontre que le dessein de la Providence, à laquelle il se remettra totalement, se poursuit dans l'Eglise et dans le monde. Aujourd'hui encore, il faut des coeurs et des mains disposées à servir les personnes en difficultés, pour leur manifester la mansuétude de la divine miséricorde.

L'héritage de Saint Luigi Scrosoppi, jalousement gardé par ses filles spirituelles, est pourtant riche et précieux pour tout le Peuple de Dieu, spécialement pour les prêtres. En effet, il est le modèle de vie sacerdotale conduite dans la recherche constante de Dieu. Saint François d'Assise et Saint Philippe Neri furent les guides qu'il suivit avec élan, pour se conformer totalement au Christ Sauveur. Humilité, pauvreté, simplicité; prière, contemplation, union intime avec le Christ, furent les sources inépuisables de sa charité. Que son exemple lumineux attire non seulement les filles spirituelles et les fidèles, mais aussi tous ceux qui sont liés à l'oeuvre entamée par lui


3. Chers pèlerins venus de différentes régions pour participer à la canonisation de saint Agostino Roscelli, fondateur des "Soeurs de l'Immaculée" je m'adresse maintenant à vous avec affection. Je salue l'Archevêque de Gênes, le Cardinal Dionigi Tettamanzi, le Cardinal Giovanni Canestri et l'Evêque de Chiavari. Je salue le clergé, les religieux, les religieuses et les fidèles. Le nouveau saint exerça avec un grand dévouement son sacerdoce, à travers un apostolat fécond de bien. Il suivit le modèle d'une vie évangélique austère, dans laquelle il se distingua par l'amour envers Dieu et envers les hommes. Cet amour indivisible pour Dieu et pour les frères constitue la ligne fondamentale qui qualifie sa spiritualité, dans laquelle se fondent dans l'unité la contemplation et l'action. Il aimait répéter: "La prière aide à bien faire l'action et l'action, faite comme il se doit, aide à bien faire la prière".

J'ai plaisir à rappeler ici les paroles avec lesquelles mon vénéré prédécesseur Jean-Paul Ier, quand il était Evêque de Vittorio Veneto, eut à présenter le visage ascétique de Saint Agostino Roscelli: "Il a su à merveille unir l'activité des temps modernes à une vie intérieure élevée" (cf. Litt. Post., p. 16, n. 14). La dimension spirituelle de ce "pauvre prêtre" comme il aimait se définir, dégage une force prophétique capable de secouer et de fasciner encore aujourd'hui. Il repropose, de façon simple, des valeurs évangéliques que, au début du troisième millénaire, il faut redécouvrir et revivre avec conviction: la valeur de l'humilité et de la sobriété, du silence et du sens de la présence de Dieu qui anime l'Histoire, de la prière d'une charité qui ne dit jamais "assez", parce qu'elle est immense comme est immense Dieu, dont elle est à l'origine.

Que Saint Agostino Roscelli rappelle à ses filles spirituelles et à tous les croyants que les résultats de l'action pastorale ne dépendent pas principalement de nos forces, mais surtout de l'aide de Dieu, auquel nous devons recourir incessamment à travers la prière


4. Je salue maintenant tous ceux qui sont venus à Rome pour la canonisation de Bernardo da Corleone, humble frère capucin, dans lequel brille dans toute sa vivacité, la force du charisme franciscain: c'est-à-dire l'austérité, l'essentiel, l'itinéraire de charité. Je salue de manière spéciale le Cardinal Salvatore De Giorgi, Archevêque de Palerme, les Evêques et les fidèles de Sicile, terre natale de ce nouveau saint. Analphabète, il a su écrire des pages lumineuses d'histoire à travers sa vie, pétrie d'amour pour le crucifix, de service humble et silencieux, de solidarité envers le peuple.

Même en étant un homme du XVII siècle, Frère Bernardo, se présente comme un authentique disciple du divin Maître, et participe à l'actualité éternelle de l'Evangile. Le modèle de sainteté qu'il propose est toujours actuel. Surtout avec son histoire personnelle riche de grandes passions civiles et religieuses, avec un sens prononcé pour la justice et pour la vérité au milieu de tant de situations de souffrance et de misère, il incarne, dans un certain sens, l'image du saint contemporain: c'est-à-dire d'un homme qui s'ouvre au feu de l'amour surnaturel et se laisse enflammer par lui, en répercutant la chaleur sur les âmes des frères.

Comme il le montra à ses contemporains, il nous indique aujourd'hui encore que la sainteté, don de Dieu, engendre une transformation si profonde de la personne qu'elle en fait un témoignage vivant de la présence consolatrice de Dieu dans le monde.


5. Un autre exemple éloquent de sainteté pour notre époque est Teresa Eustochio Verzeri, femme à la forte personnalité, née à Bergame au début du XIX siècle. Je salue le clergé, les religieux, les religieuses, et les fidèles du diocèse avec leur Pasteur, Mgr Roberto Amadei. Sainte Teresa Verzeri, formée à une piété ardente et profonde, après une recherche longue et tourmentée, donna naissance, avec le chanoine Giuseppe Benaglio, son directeur spirituel et figure prestigieuse du clergé de Bergame, à l'institut des "Filles du Sacré-Coeur de Jésus" pour l'éducation et l'assistance des filles pauvres. Après le transfert de son oeuvre à Brescia, elle se prodigua dans une activité fiévreuse, qui l'amena à conclure son existence à l'âge de 51 ans seulement.

Au cours de son chemin spirituel, elle fut particulièrement attirée par le Sacré-Coeur de Jésus, qu'elle proposa avec insistance à la dévotion de ses consoeurs, en les exhortant à une vie religieuse faite d'obéissance, d'humilité et de générosité. Elle aimait répéter que l'âme qui veut suivre Jésus, doit l'imiter en tout, spécialement en participant à sa passion rédemptrice, à l'exemple de la Très Sainte Vierge Marie. Elle écrivait à une de ses filles spirituelles: "Tu voudrais être toujours avec Dieu sur le Mont Tabor: mais regarde la Très Sainte Vierge; elle n'est pas sur le Mont Tabor, elle est seulement au pied de la croix: tu dois savoir que la plus grande des grâces que Dieu te fait, c'est celle de souffrir avec lui et pour son amour" (Lettere, parte IV, vol. VII, n. 49).

Apprendre du Coeur de Jésus, se laisser orienter par les sentiments de ce Coeur et les transformer dans le service aux frères: voilà le message que Teresa nous transmet également à nous, à l'aube du nouveau millénaire, en nous invitant tous à coopérer activement à l'action évangélisatrice de l'Eglise.


6. Je salue Sa Béatitude le Cardinal Sfeir, les évêques, les prêtres, les religieux et religieuses, notamment les membres de l'Ordre libanais maronite, les représentants des Autorités, ainsi que tous les fidèles du Liban, venus participer à la canonisation de Soeur Rafqa, qui est un motif de joie profonde pour l'Eglise, en particulier pour tous les chrétiens libanais. Au Moyen-Orient ravagé par tant de conflits meurtriers et par tant de souffrances injustes, le témoignage de cette religieuse libanaise demeure une source de confiance pour ceux qui sont éprouvés. Parce qu'elle a toujours vécu en union étroite avec Jésus, capable comme lui de ne jamais désespérer de l'homme, elle devient le signe discret mais efficace que le mystère pascal du Christ continue de transformer le monde pour y faire germer l'espérance de la vie nouvelle offerte à tous les hommes de bonne volonté. Accueillant la souffrance comme un moyen pour mieux aimer le Christ et ses frères, elle a vécu de façon éminente la dimension missionnaire de sa vie consacrée, puisant dans la Trinité la force d'offrir sa vie pour le monde et complétant dans sa propre chair ce qui "manque aux épreuves du Christ" (Col 1,24). Puissent les malades, les affligés, les réfugiés de guerre et toutes les victimes de la haine d'hier et d'aujourd'hui, trouver en sainte Rafqa une compagne de route afin que, par son intercession, ils continuent de rechercher dans la nuit des raisons d'espérer encore et de bâtir la paix!


7. Très chers frères et soeurs! Entraînés par ce lumineux témoignage de l'Evangile et soutenus par leur céleste intercession, nous poursuivons avec persévérance sur le chemin de la sainteté, en gardant le regard fixé sur le Christ (cf. He He 12,1-2).

Chacun des nouveaux saints confirme, de façon différente, ce que j'ai rappelé dans la Lettre apostolique Novo millennio ineunte, c'est-à-dire que l'engagement concret du croyant puise son inspiration et sa force dans la contemplation du visage du Christ.

Ainsi, nous aussi, dans les étapes successives de la vie, dans les différentes situations au sein desquelles la Providence nous a placés, nous sommes appelés à être contemplatifs dans l'action. Que les saints Luigi Scrosoppi, Agostino Roscelli, Bernardo da Corleone, Teresa Eustochio Verzeri, Rafqa Pietra Choboq Ar-Rayès nous aident sur ce chemin difficile.

Que nous vienne en aide la Très Sainte Vierge, disciple parfaite de son Fils. Pour ma part, je vous donne très affectueusement à vous tous ici présents, ainsi qu'à vos proches, une Bénédiction spéciale.



  AUX PARTICIPANTS AU CHAPITRE GÉNÉRAL DE L'ORDRE DE LA TRÈS SAINTE TRINITÉ

Vendredi 15 juin 2001



Très chers frères de l'Ordre de la Très Sainte Trinité!

1. Je suis heureux de vous rencontrer à l'occasion du Chapitre général de votre Institut. Il s'agit d'un événement de grâce qui constitue un puissant rappel à retourner à vos racines, à approfondir votre charisme spécifique, en tentant de discerner les moyens les plus adaptés de le vivre dans le contexte socio-culturel actuel.

Je salue le Ministre général, le Père José Hernández Sánchez, qui a été reconfirmé dans sa fonction, ainsi que les membres de son Conseil et les délégués à l'Assemblée capitulaire. J'adresse également une pensée cordiale à tous les Trinitaires qui accomplissent leur apostolat généreux dans diverses nations. Au cours de ces jours d'intenses travaux d'Assemblée, vous réfléchissez sur le thème: "Vivre ce que nous sommes". Fidèles au charisme trinitaire-rédempteur, vous voulez maintenir vivant et actif l'enseignement de votre Règle, dont vous avez commémoré il y a trois ans le VIIIème centenaire de l'approbation. En cette circonstance, j'ai voulu moi aussi m'unir à votre joie commune, en vous envoyant un Message, dans lequel je rappelais que votre charisme est "extraordinairement actuel dans le contexte social multiculturel d'aujourd'hui, marqué par des tensions et des défis parfois dramatiques. Il engage les Trinitaires à trouver avec courage et audace missionnaire des voies toujours nouvelles d'évangélisation et de promotion humaine" (Lettre du 17 juin 1998, cf. ORLF n. 36 du 6 septembre 1998).


2. Votre spiritualité, qui tire sa vigueur du mystère de la Trinité et de la Rédemption, n'a pas cessé de vous pousser au service des prisonniers et des pauvres, au cours de votre longue histoire, marquée par de nombreux exemples de sainteté. Parmi les membres de votre Ordre, figurent de courageux témoins du Christ, dont certains ont confirmé leur fidélité à l'Evangile à travers le martyre. Votre spiritualité vous place au coeur du message chrétien: l'amour de Dieu le Père qui embrasse chaque homme à travers la Rédemption du Christ, dans le don permanent de l'Esprit Saint.

Très chers amis, préservez cet inestimable patrimoine spirituel. Que les paroles du Christ résonnent dans votre esprit: "Duc in altum!" (Lc 5,4). J'ai voulu les rappeler dans la récente Lettre apostolique Novo millennio ineunte, afin qu'elles constituent un avertissement et une invitation pour tous les baptisés, à l'aube du troisième millénaire. Oui, avancez en eau profonde, jetez les filets au nom du Christ. "Vivez" avec passion ce que vous "êtes", en vous ouvrant avec confiance à l'avenir. A une époque marquée par une "culture du vide" préoccupante et par des existences "privées de sens", vous êtes appelés à annoncer sans compromis le Dieu trinitaire, le Dieu qui entend le cri des opprimés et des affligés. Qu'au centre et à la racine de votre engagement apostolique, figure toujours la Très Sainte Trinité. Que la communion trinitaire soit pour tous et pour chacun la source, le modèle et la fin de toute action pastorale.


3. L'Eglise compte sur vous! Oeuvrez en union avec le Christ, "révélateur du nom du véritable Dieu, glorificateur du Père et Rédempteur de l'homme" (Constitutions de l'Ordre trinitaire, n. 2). Il est le Rédempteur; en Lui, vous pouvez être "trinitaires" et "rédempteurs", participant à la charité rédemptrice qui jaillit de son Coeur miséricordieux. Vivre ce que vous êtes vous conduit à réaffirmer la fidélité au patrimoine spirituel de votre Fondateur, saint Jean de Matha. Revenez souvent sur son exemple et son enseignement. Vous êtes appelés à poursuivre sa mission, valide aujourd'hui comme hier, car elle tend à annoncer et à témoigner du Christ, mort et ressuscité pour le salut de tous les hommes.

Une importante perspective missionnaire s'ouvre devant vous. N'ayez pas peur de consacrer toutes vos énergies au Christ, que vous devez "connaître, aimer, imiter, pour vivre en lui la vie trinitaire et pour transformer avec lui l'histoire" (Novo millennio ineunte NM 29). La sainteté est un devoir essentiel pour votre Famille religieuse et pour chacun de ses membres. Ce n'est que si vous êtes saints, que vous accomplirez le service que l'Eglise et le Pape attendent de vous. D'une façon spéciale, vous êtes des modèles de vie trinitaire intense, comme vous le demande l'identité de votre vocation, dans la mesure où vous êtes consacrés de façon particulière à la Très Sainte Trinité pour la rédemption des hommes - identité exprimée par l'antique devise: Gloria tibi Trinitas et captivis libertas. Telle est votre mission; telle est la plus grande contribution que vous puissiez apporter à la nouvelle évangélisation, à travers un service apostolique en faveur des plus pauvres.


4. Des perspectives fécondes s'ouvrent devant vous, même si les difficultés et les obstacles ne manquent pas. Ayez confiance dans le Seigneur et n'hésitez pas à accepter les défis du moment historique que nous vivons. Je vous rappelle que l'effort prioritaire de chacune de vos communautés consiste à être un cénacle de louange à Dieu Un et Trine et un foyer de don gratuit aux frères (cf. Lettre aux Trinitaires, n. 3; cf. ORLF n. 36 du 8 septembre 1998). En vous répétant cette exhortation, que je vous ai adressée il y a trois ans, je vous encourage à embrasser dans la charité chaque homme, sans distinction, à rechercher courageusement, avec une liberté prophétique et un sage discernement, des voies nouvelles afin que vous puissiez être des présences vivantes dans l'Eglise, en communion avec le Pape et en collaboration avec les Evêques.

En regardant les vastes horizons de la nouvelle évangélisation, ressort avec force l'urgence de proclamer et de témoigner du message évangélique à tous, sans distinction. Combien de personnes attendent encore de connaître Jésus et son Evangile! Combien de situations d'injustice, de difficultés morales et matérielles sont présentes dans tant de parties de la terre! La mission est urgente et la contribution de chacun indispensable. Une contribution qui exige le soutien d'une prière incessante et fervente. Ce n'est qu'ainsi qu'elle peut être en mesure d'indiquer aux autres le chemin pour rencontrer le Christ et pour le suivre fidèlement. C'est ce qu'ont fait votre fondateur, saint Jean de Matha, et votre réformateur, saint Jean-Baptiste de la Concepcíon, sur les traces desquels vous entendez marcher fidèlement. Tel est le témoignage offert par tant de vos confrères, qui ont servi l'Eglise dans les domaines les plus divers, souvent dans des situations difficiles. Comme eux, devenez également de fidèles disciples du Christ et des ouvriers généreux de l'Evangile, avec une confiance constante et un élan apostolique renouvelé.

Que la Très Sainte Vierge Marie, que vous vénérez dans votre Ordre sous le beau titre de Notre-Dame du bon remède, vous protège et vous guide sur le chemin vers la sainteté, en portant à terme tous vos projets de bien.

Avec ces voeux, je vous bénis avec affection, tandis que j'assure de mon souvenir dans la prière chacun de vous, ainsi que tous ceux que vous rencontrez dans le cadre de votre ministère apostolique quotidien.

 

AUX ÉVÊQUES DU BENIN EN VISITE "AD LIMINA APOSTOLORUM"

Samedi 16 juin 2001


Chers Frères dans l'épiscopat,

1. C'est pour moi une grande joie de vous accueillir en ces jours où vous accomplissez votre visite ad limina.Par vos rencontres avec le Successeur de Pierre et avec ses collaborateurs, vous manifestez la communion des diocèses du Bénin avec l'Église universelle. Je souhaite que ces journées de pèlerinage et de réflexion soient pour chacun de vous une source de renouvellement spirituel et de dynamisme apostolique pour l'accomplissement de votre ministère épiscopal.

Par ses aimables paroles, Mgr Nestor Assogba, Archevêque de Cotonou et Président de votre Conférence épiscopale, s'est fait votre interprète pour me faire part de vos espérances et de vos préoccupations au début de ce nouveau millénaire. Je l'en remercie très cordialement. Je salue particulièrement les Évêques venus pour la première fois accomplir cette visite. Je les encourage vivement dans leur tâche de pasteurs, au service de la mission de l'Église. Portez mes affectueuses salutations à vos prêtres, aux religieux, aux religieuses, aux catéchistes et à tous les fidèles de vos diocèses. Que le Seigneur fasse fructifier en eux les grâces de l'année jubilaire ! Au peuple béninois tout entier, que par deux fois j'ai eu la joie de visiter, je souhaite de vivre dans la paix et la prospérité, demandant à Dieu de l'accompagner dans ses efforts pour construire une société toujours plus fraternelle et plus solidaire.

2. Les défis auxquels l'Église se trouve affrontée au début du nouveau millénaire sont une incitation pressante à renouveler en nous l'engagement à annoncer l'Évangile à tous les hommes. Aujourd'hui plus que jamais, l'urgence de la mission est évidente. Successeurs des Apôtres qui ont fait la vivante expérience du Verbe de vie, les Évêques ont reçu la charge d'orienter le regard des hommes vers le mystère du Christ. Dans cette nouvelle étape de l'évangélisation qui s'ouvre devant nous, seule la rencontre intime avec le Seigneur peut donner l'audace d'un engagement authentique et résolu au service de l'Évangile. Permettez au Successeur de Pierre d'inviter vos communautés et leurs pasteurs à faire un acte de foi résolu dans la parole du Christ qui nous presse avec force d'avancer au large. Que cet acte de foi s'exprime d'abord dans un engagement renouvelé de prière et de dialogue confiant avec Dieu !

Ainsi donc, la tâche missionnaire doit consister d'abord à aider les fidèles à affermir leur foi dans le Christ Sauveur, pour que, face aux multiples sollicitations qui se présentent à eux, ils ne se laissent pas aller à tout vent de doctrine, mais qu'en vivant dans la vérité et dans l'amour, ils grandissent dans le Christ pour s'élever en tout jusqu'à lui (cf. Ep 4,14-15). Que tous trouvent dans leur attachement à la personne de Jésus et dans le soutien de leur communauté la force d'avancer sur les chemins de l'Évangile et de ses exigences, se souvenant que "celui qui met la main à la charrue et regarde en arrière n'est pas fait pour le royaume de Dieu" (Lc 9,62) !

Dans leurs efforts pour édifier l'Église famille de Dieu, que les chrétiens de vos diocèses soient aussi des hommes et des femmes de communion et d'unité ! Comme je l'ai écrit dans la lettre apostolique Novo millennio ineunte, avant de programmer des initiatives concrètes pour être fidèles au dessein de Dieu et pour répondre aux attentes profondes du monde, "il faut promouvoir une spiritualité de la communion, en la faisant ressortir comme principe éducatif partout où sont formés l'homme et le chrétien, où sont éduqués les ministres de l'autel, les personnes consacrées, les agents pastoraux, où se construisent les familles et les communautés" (NM 43). Dans cet esprit de communion se trouve un cheminement essentiel pour que chacun soit reconnu et respecté dans sa vocation propre, partageant les dons reçus de l'Esprit, et pour que s'édifie une humanité solidaire et fraternelle.

Que l'unité de vos communautés, fondée dans le dessein du Christ sur son Église, soit un signe concret de la présence de Dieu qui habite en elles et dont la lumière doit resplendir sur le visage de tous les hommes !

3. Depuis plusieurs années, vous avez accompli un bel effort pour favoriser les vocations. Le nombre des jeunes qui entrent dans les séminaires est en progression continue. Il importe donc que ces jeunes aient une vive conscience que la vocation est un don du Seigneur qu'ils reçoivent par l'intermédiaire de l'Église et que c'est par l'Église que s'accomplit cette vocation. "Le candidat au presbytérat doit recevoir la vocation sans imposer ses propres conditions personnelles, mais en acceptant aussi les normes et les conditions posées par l'Église elle-même, selon sa propre responsabilité" (Exhortation apostolique Pastores dabo vobis PDV 35). Aussi, est-ce une grave responsabilité pour l'Évêque de discerner les aptitudes humaines, intellectuelles, morales et spirituelles des candidats, et de reconnaître l'authenticité de leur vocation.

La vie dans les séminaires est pour vous une préoccupation constante. Je vous engage vivement à demeurer exigeants sur la qualité de la formation qui y est donnée dans tous les domaines. Les séminaires doivent permettre aux jeunes qui sont appelés au sacerdoce de se mettre généreusement à la suite du Christ pour se laisser initier par lui au service du Père et des hommes. Pour cela, il est nécessaire que les formateurs, professeurs et directeurs spirituels, bien préparés et exemplaires dans leur vie sacerdotale, soient en nombre suffisant. Il est à souhaiter que, grâce au concours généreux d'autres Églises locales, vous puissiez assurer un accompagnement effectif des séminaristes afin qu'ils aient une vision claire de leur véritable vocation et qu'ils y répondent de manière libre et consciente.

4. À votre retour dans vos diocèses, portez mon cordial salut à chacun de vos prêtres. L'Église compte sur eux, afin que, par leur vie exemplaire, ils soient des témoins crédibles de la Parole qu'ils annoncent, pleinement engagés sur les chemins de la sainteté à laquelle le Christ les appelle et vers laquelle ils doivent guider les fidèles. Tout au long de leur ministère, les prêtres sont invités à être attentifs à leur formation permanente, devenue indispensable pour répondre aux exigences nouvelles de l'évangélisation. Qu'ils y trouvent avant tout l'expression et la condition de leur fidélité à leur ministère et à leur être même! Qu'ils soient convaincus d'y accomplir un acte d'amour et de justice envers le peuple de Dieu dont ils sont les serviteurs ! Par ailleurs, j'invite avec insistance les prêtres à prendre une conscience toujours plus grande de la dimension missionnaire de leur sacerdoce. En effet, ainsi que l'a rappelé le Concile Vatican II, "le don spirituel que les prêtres ont reçu à l'ordination les prépare non pas à une mission limitée et restreinte, mais à une mission de salut d'ampleur universelle [...]. Les prêtres se souviendront donc qu'ils doivent avoir au coeur le souci de toutes les Églises" (Décret Presbyterorum ordinis PO 10). Dans cette perspective, j'encourage les diocèses qui sont plus largement munis à poursuivre généreusement les échanges de prêtres avec ceux qui sont moins pourvus. De tels échanges favoriseront aussi l'unité du peuple de Dieu dans les différentes régions du pays qui connaissent des situations missionnaires et pastorales très variées.

5. Depuis les origines de l'annonce de la foi chrétienne dans votre pays, les Instituts religieux ont joué un rôle important. On ne peut qu'admirer le travail des missionnaires, religieux, religieuses et laïcs qui, au prix d'une grande abnégation, ont permis à l'Église de naître et de croître chez vous. Aujourd'hui, si leur nombre diminue, leur travail courageux et désintéressé demeure appréciable, manifestant l'universalité de l'Église. Je souhaite que, dans un esprit d'estime mutuelle, la collaboration fraternelle s'affermisse toujours plus entre les prêtres diocésains et les membres des Instituts missionnaires.

Je connais aussi la grande considération dont jouissent dans la population les religieuses qui se donnent sans compter pour le service des plus pauvres et des plus délaissés de la société, sans aucune distinction d'origine. L'Église leur est reconnaissante d'exprimer ainsi, souvent de manière très humble et dans des conditions difficiles, la charité du Christ pour l'humanité souffrante. En effet, l'engagement des religieux et des religieuses dans la mission de l'Église est une manifestation éloquente de l'amour de Dieu pour tout homme. Par leur fidélité à leurs engagements et l'approfondissement de leur amitié avec Dieu dans la prière et dans le renoncement intérieur, que les personnes consacrées soient aussi pour leurs frères et leurs soeurs des exemples audacieux, qui les aideront dans la recherche de la perfection à laquelle ils sont tous appelés ! Je souhaite que nombreux soient les jeunes qui, se sentant attirés par ce don de soi au Christ et aux autres, acceptent d'y répondre afin de manifester aux yeux du monde le primat de Dieu et des valeurs de l'Évangile dans la vie chrétienne.

6. Pour élargir les horizons de l'évangélisation, il convient de stimuler et de soutenir par une formation humaine et spirituelle solide un laïcat mûr et responsable, conscient de ses responsabilités dans l'Église et dans la société. De fait, parce qu'ils sont membres de l'Église, les laïcs ont la vocation et la mission d'annoncer l'Évangile dans leurs milieux de vie. Les domaines où ils peuvent exercer une action missionnaire sont très étendus. C'est ainsi qu'une place spéciale leur revient dans l'animation chrétienne de l'ordre temporel. Les chrétiens doivent prendre leur place et agir avec compétence dans le monde si complexe de la politique, de la vie sociale et de l'économie, selon les enseignements de la doctrine sociale de l'Église, proposant à leurs compatriotes une vision de l'homme et de la société conforme aux valeurs humaines fondamentales. Je les invite tout particulièrement à travailler sans relâche à promouvoir le respect de la dignité inviolable de toute personne humaine. "Sa dignité de personne est le bien le plus précieux que l'homme possède, grâce à quoi il dépasse en valeur tout le monde matériel" (Exhortation apostolique Christifideles laici CL 37). C'est un devoir impérieux pour le chrétien de s'engager pour le respect de la vie de tout être humain depuis sa conception jusqu'à sa fin naturelle. Ce respect de la personne doit aussi se manifester particulièrement à l'égard des plus démunis, des malades, de tous les blessés de la vie. Que dans vos communautés ils ne soient jamais oubliés! "Dans la personne des pauvres il y a une présence spéciale du Fils de Dieu qui impose à l'Église une option préférentielle pour eux" (Novo millennio ineunte NM 49).

À l'intérieur de l'Église, les divers types de services et de formes d'animation qui sont confiés aux laïcs doivent être valorisés afin de donner une vigueur renouvelée à la vie chrétienne et à l'apostolat. Permettez-moi, chers Frères dans l'épiscopat, d'adresser une parole particulière de reconnaissance et d'encouragement aux catéchistes de vos diocèses. Dans la vie de vos communautés, ce sont des évangélisateurs irremplaçables. Que par leur témoignage de vie irréprochable et par leur engagement au service de l'Évangile, ils manifestent toujours aux yeux de leurs frères le bonheur d'avoir découvert le Christ et de vivre de sa vie!

7. L'engagement des laïcs trouve dans le couple et la famille un espace primordial pour se développer. Dans vos rapports quinquennaux, vous avez relevé les graves problèmes qui se posent aujourd'hui à la famille, à son unité et à son indissolubilité. Je vous encourage vivement à poursuivre une pastorale familiale vigoureuse, et je me réjouis des efforts de formation que vous avez engagés, notamment par la création d'un centre universitaire. Il est particulièrement fondamental pour l'avenir d'éduquer les jeunes à une juste hiérarchie des valeurs et de les préparer à vivre l'amour conjugal de façon responsable, en rapport avec ses exigences de communion et de service de la vie. La vision chrétienne du mariage doit être présentée dans toute sa grandeur, en soulignant que, sans amour, la famille ne peut vivre, grandir et se perfectionner en tant que communauté de personnes, et que les époux sont appelés à grandir sans cesse dans leur communion à travers la fidélité quotidienne à la promesse du don mutuel total, unique et exclusif que comporte le mariage. Il est donc nécessaire que la sollicitude de l'Église se manifeste aussi par un accompagnement discret et délicat des familles, qui sera une aide efficace pour affronter et résoudre les problèmes de la vie conjugale.

8. La rencontre avec les fidèles des autres religions, qui souvent se vit paisiblement dans le partage quotidien de l'existence, peut parfois connaître des situations plus difficiles. Pour l'Église catholique, le dialogue interreligieux est un engagement de grande importance, avec comme objectif de promouvoir l'unité et la charité parmi les hommes et parmi les peuples. "Tous les fidèles et toutes les communautés chrétiennes sont appelés à pratiquer le dialogue, même si ce n'est pas au même niveau et sous des modalités identiques" (Encyclique Redemptoris missio RMi 57). Je vous encourage dans vos efforts en vue de favoriser une meilleure connaissance mutuelle ainsi que des relations plus vraies et plus fraternelles entre les personnes et entre les communautés, particulièrement avec les musulmans. Tout en souhaitant vivement une véritable réciprocité, il est nécessaire de persévérer avec foi et amour, là même où les efforts ne rencontrent ni attention ni réponse (cf. ibid. RMI RMi 57). La formation de personnes compétentes dans ce domaine est essentielle pour aider les fidèles à avoir un regard évangélique sur leurs compatriotes de religions différentes et à collaborer avec tous au bien commun de la société. De plus, dès la première éducation, les jeunes doivent être incités au respect et à l'estime mutuelle dans un esprit qui favorise le développement d'une authentique liberté de conscience.

9. Chers Frères dans l'épiscopat, au moment d'achever notre rencontre, je vous engage à poursuivre votre ministère épiscopal avec une confiance inconditionnelle en la fidélité du Christ à sa promesse de demeurer avec nous jusqu'à la fin du monde (cf. Mt 28,20). Face aux difficultés, sa présence aimante ne manque jamais à celui qui demeure fidèle à la grâce reçue. Comme je l'ai souligné dans la lettre apostolique Novo millennio ineunte, "au début de ce nouveau millénaire, notre marche doit être plus alerte en parcourant à nouveau les routes du monde" (NM 58).

Demeurez proches de votre peuple et plus particulièrement des jeunes, que j'invite à envisager l'avenir avec un regard plein d'espérance. Qu'ils gardent leur enthousiasme pour construire un monde nouveau! Veilleurs du matin, plus que jamais laissez grande ouverte la porte vivante qu'est le Christ!

Je vous confie tous à l'intercession maternelle de la Vierge Marie, Mère du Christ et Mère des hommes, et, de grand coeur, je vous accorde une affectueuse Bénédiction apostolique, que j'étends à tous vos diocésains.

       

Discours 2001 - Samedi 9 juin 2001