Discours 2001 - Lviv (Esplanade de Sykhiv), Mardi 26 juin 2001


MESSAGE AU CARDINAL JAMES FRANCIS STAFFORD À L'OCCASION DU CONGRÈS THÉOLOGIQUE PASTORAL SUR LE THÈME "LES MOUVEMENTS ECCLÉSIAUX POUR LA NOUVELLE ÉVANGÉLISATION"


Au vénéré Frère, Monsieur le Cardinal James Francis Stafford
Président du Conseil pontifical pour les Laïcs

1. J'ai appris avec plaisir que, à l'initiative du Mouvement des "Focolari", se tiendra à Castel Gandolfo, du 26 au 29 juin, un Colloque théologique et pastoral sur le thème: "Les Mouvements ecclésiaux pour la nouvelle évangélisation". A vous qui accompagnez et orientez de manière compétente le chemin des "mouvements ecclésiaux" dans la communion et dans la mission de l'Eglise, je confie la charge de porter mon salut cordial à Mademoiselle Chiara Lubich, à ses collaboratrices et collaborateurs, aux intervenants au Colloque ainsi qu'à tous les prêtres, les diacres permanents et les séminaristes étudiants en théologie qui prendront part à cette initiative.

Dans la Lettre apostolique Novo millennio ineunte, j'ai tracé les lignes du chemin que l'Eglise, soutenue par l'abondante effusion de grâce qui s'est vérifiée au cours du récent grand Jubilé, est appelée à parcourir à l'aube du troisième millénaire. L'Eglise doit "repartir du Christ", avec le regard fixé sur Lui et, en s'immergeant dans son mystère, s'engager à être pour tous une école de communion et de charité active. Soutenue par la puissance de l'Esprit Saint, malgré les faiblesses humaines, l'Eglise pourra ainsi rendre témoignage de l'amour de Dieu dans tous les milieux où sont en jeu la vie de l'homme et la construction de la société.

Cette mission revient à toute la communauté chrétienne et les mouvements ecclésiaux constituent un "don providentiel" sur ce chemin, ainsi que j'ai tenu à le rappeler moi-même au cours de la mémorable rencontre du 30 mai 1998 sur la Place Saint-Pierre. C'est précisément pourquoi, dans la Lettre apostolique déjà citée, j'ai souligné que "le devoir de promouvoir les divers types d'association revêt une grande importance pour la communion, que ce soient les formes plus traditionnelles ou celles plus nouvelles des mouvements ecclésiaux; ces formes continuent à donner à l'Eglise une vivacité qui est un don de Dieu et qui constitue un authentique "printemps de l'Esprit"" (NM 46).


2. De nombreux prêtres, attirés par l'élan charismatique, pédagogique, communautaire et missionnaire qui accompagne les nouvelles réalités ecclésiales participent, avec les fidèles laïcs, à de nombreux mouvements ecclésiaux. Cette expérience peut être véritablement utile parce que "capable d'enrichir la vie sacerdotale des personnes et d'animer le presbytérium par de précieux dons spirituels" (Pastores dabo vobis PDV 31). Il est bien clair, dans la doctrine de l'Eglise catholique, que les prêtres sont d'abord et avant tout appelés à vivre pleinement la grâce du Sacrement par lequel ils sont configurés au Christ, Tête et Pasteur, en vue du service de toute la communauté chrétienne, en cordiale et filiale référence à l'Evêque et fraternellement unis dans le presbytérium diocésain. Ils appartiennent à une Eglise particulière et collaborent à sa mission. Mais il est également vrai que "les charismes de l'Esprit créent toujours des affinités destinées à être, pour chacun, le soutien à sa mission objective dans l'Eglise" (Insegnamenti de Jean-Paul II, VIII/2, 1985, p. 660). C'est pourquoi les mouvements peuvent être utiles aussi aux prêtres.

Leur efficacité positive se manifeste quand les prêtres trouvent dans les mouvements "la lumière et la chaleur" qui les aident à progresser dans une vie chrétienne fervente et, en particulier, dans un authentique "sensus Ecclesiae", qui les pousse à une plus solide fidélité à leurs Pasteurs légitimes, les rendant attentifs à la discipline ecclésiastique de manière à assumer dans un élan missionnaire les charges propres à leur ministère. Les mouvements ecclésiaux sont en outre "source d'aide et de soutien dans le chemin de formation vers le sacerdoce", en particulier pour ceux qui proviennent de réalités associatives spécifiques, sous réserve du respect dû à la discipline établie par l'Eglise en ce qui concerne les séminaires.

Il est donc important d'éviter que la participation du prêtre, du diacre ou du séminariste à des associations ou des mouvements ecclésiaux se traduise par une attitude de fermeture présomptueuse et restrictive. Elle doit plutôt ouvrir leur esprit à l'accueil, au respect et à la mise en valeur d'autres modalités de participation des fidèles à l'équipe ecclésiale, en les poussant à être toujours davantage des hommes de communion, "pasteurs de l'ensemble" (cf. Pastores dabo vobis PDV 62).


3. Dans ces conditions, l'insertion dans les mouvements ecclésiaux se traduira pour les prêtres par une possibilité d'enrichissement spirituel et pastoral. En participant à ceux-ci, en effet, les prêtres peuvent apprendre à mieux vivre l'Eglise dans la co-essentialité des dons sacramentels, hiérarchiques et charismatiques qui leur sont propres, selon la pluralité des ministères, des états de vie et des missions qui la caractérise. "Touchés" et "attirés" par le même charisme, participant à une même histoire, intégrés dans une même équipe, prêtres et laïcs partagent une expérience intéressante de confraternité entre "christifideles" qui s'édifient réciproquement sans jamais se confondre.

Cela serait toutefois une grave perte si l'on allait vers une "cléricalisation" des mouvements. De la même manière, il serait néfaste que le témoignage et le ministère des prêtres soient de quelque façon troublés et progressivement assimilés à un état laïc. Le prêtre doit être à l'intérieur du mouvement, au-delà des fonctions et compétences qu'il est amené à y assumer, comme une présence singulière du Christ, Tête et Pasteur, ministre de la Parole de Dieu et des Sacrements, éducateur dans la foi, à travers la liaison avec le ministère hiérarchique. De plus, c'est de leur contribution que peut dépendre en grande partie la croissance des mouvements vers cette "maturité ecclésiale" que j'ai déjà évoquée lors de la rencontre de la Pentecôte 1998.

J'encourage donc ce dicastère à suivre avec attention le chemin des mouvements ecclésiaux, en favorisant un dialogue intense avec eux et en les accompagnant avec sagesse pastorale, ne leur faisant pas manquer, quand cela se révèle nécessaire, du discernement, des orientations et des éclaircissements opportuns.

Je confie cette rencontre à Marie, la Vierge Fidèle, et, alors que j'assure bien volontiers tous les participants de mon souvenir dans la prière, j'envoie à tous une Bénédiction apostolique spéciale.

Du Vatican, le 21 juin 2001


CÉRÉMONIE DE DÉPART À L'AÉROPORT INTERNATIONAL DE LVIV

Mercredi 27 juin 2001


  Monsieur le Président de la République ukrainienne,
Messieurs les Cardinaux,
Vénérés frères dans l'épiscopat,
Mesdames, Messieurs,
Très chers Ukrainiens!

1. Le moment du départ est venu. Je vous salue avec émotion, vous qui êtes ici présents, et je salue à travers vous le peuple de l'Ukraine, que j'ai pu mieux connaître au cours de ces journées. Ma pensée s'adresse en particulier aux habitants de la ville de Kiev et de Lviv qui m'ont accueilli, et à ceux qui sont venus d'autres villes et pays pour me rencontrer.

A mon arrivée, je me suis senti comme embrassé par l'affection de la ville de Kiev aux coupoles d'or, parsemée de jardins. J'ai ensuite goûté l'hospitalité traditionnelle de Lviv, ville aux nobles monuments si riches de mémoire chrétienne.

C'est avec une grande nostalgie que je quitte à présent cette terre, carrefour de peuples et de cultures, au sein de laquelle il y a plus de mille ans l'Evangile a commencé son chemin pour se diffuser et s'enraciner dans le tissu historique et culturel des populations de l'Europe de l'Est. A tous et à chacun de vous je voudrais répéter: merci!


2. Merci à toi, Ukraine, qui as défendu l'Europe dans ta lutte inlassable et héroïque contre les envahisseurs.

Merci à vous, Autorités civiles et militaires, pour ce que vous accomplissez dans vos domaines respectifs, au service du progrès ordonné du Peuple ukrainien, et merci du généreux dévouement avec lequel vous avez assuré le bon déroulement de mon voyage apostolique.

Merci à vous, chers frères et soeurs, qui faites partie de cette communauté chrétienne, "fidèle jusqu'à la mort" (Ap 2,10). Depuis longtemps je désirais vous manifester mon admiration et ma satisfaction pour le témoignage héroïque que vous avez apporté au cours du long hiver de la persécution au siècle dernier.

Merci des prières et de la longue préparation spirituelle avec laquelle vous avez voulu rencontrer le Successeur de Pierre, pour être confirmés par Lui dans la foi et aidés à vivre dans cet amour fraternel qui "excuse tout, croit tout, espère tout, supporte tout" (1Co 13,7).

Au moment de quitter le sol ukrainien, je désire envoyer un salut respectueux et cordial aux frères et soeurs de la vénérable Eglise orthodoxe et à leurs pasteurs.

J'accompagne chacun de ma prière et, comme voeu, j'adresse à tous les paroles de bénédiction de l'Apôtre Paul aux chrétiens de Thessalonique: "Que le Seigneur de la paix vous donne lui-même la paix en tout temps et de toute manière" (2Th 3,16).


3. Que le Seigneur t'accorde la paix, peuple ukrainien; toi qui, ayant finalement recouvré la liberté avec un dévouement tenace et unanime, as commencé une oeuvre de redécouverte de tes racines les plus authentiques et qui t'es engagé sur un chemin difficile de réformes, pour donner à tous la possibilité de vivre et d'exprimer sa foi, sa culture et ses convictions dans un cadre de liberté et de justice.

Voit l'avenir avec confiance, même si les cicatrices des terribles blessures subies au cours des interminables années d'oppression, de dictature et de totalitarisme, lors desquelles les droits des peuples on été niés et piétinés, sont encore douloureuses. C'est le moment propice! C'est le moment de l'espérance et de l'audace!

Mon souhait est que l'Ukraine puisse s'insérer à plein titre, dans une Europe qui comprenne tout le continent de l'Atlantique à l'Oural. Comme je le disais au terme de l'année 1989, qui a eu tant d'importance dans l'histoire récente du continent, il ne pourra pas exister "une Europe pacifique faisant rayonner sa civilisation, sans cette osmose et cette communication de valeurs différentes mais complémentaires" qui sont typiques des peuples de l'Est et de l'Ouest (Enseignements de Jean-Paul II, XII/2, 1989, p. 1591.).


4. Au cours de cet important changement d'époque l'Eglise, consciente de sa mission, ne manquera pas d'exhorter ses fidèles à coopérer activement avec l'Etat à la promotion du bien commun. Il existe en effet une charité sociale, qui se traduit en "service de la culture, de la politique, de l'économie, de la famille, pour que partout soient respectés les principes fondamentaux dont dépendent les destinés de l'être humain et l'avenir de la civilisation" (Novo millennio ineunte NM 51).

Les chrétiens savent qu'ils font de plein droit partie intégrante de la nation ukrainienne. Ils lui appartiennent en vertu d'une histoire millénaire, qui a commencé avec le baptême de la Rus' de Kiev, en 988, dans les eaux du fleuve Dniepr; mais ils lui appartiennent surtout aujourd'hui, en vertu du baptême de sang qu'ils ont reçu lors des terribles persécutions du XXème siècle: au cours de ces années les témoins de la foi ont été très nombreux, non seulement des catholiques mais également des orthodoxes et des réformés, qui par amour du Christ ont affronté des privations de tout ordre, allant dans de nombreux cas jusqu'au sacrifice de leur vie.


5. L'unité et la concorde! Voilà le secret de la paix et la condition d'un progrès social véritable et stable. C'est grâce à cette synergie d'intentions et d'actions que l'Ukraine, patrie de foi et de dialogue, pourra voir sa dignité reconnue dans le concert des nations.

L'avertissement solennel de votre grand poète Taras Shevchenko me revient à l'esprit: "Ce n'est que dans ta maison que tu trouveras la vérité, la force et la liberté". Ukrainiens, c'est dans le terrain fécond de vos traditions que plongent les racines de votre avenir! Ensemble vous pouvez le construire; ensemble vous pouvez affronter les défis de l'heure présente, animés par les idéaux communs qui constituent le patrimoine éternel de votre histoire passée et récente. La mission est commune; que l'engagement pris par tout le peuple de l'Ukraine soit également commun!

Terre d'Ukraine, je te renouvelle mes voeux de prospérité et de paix. Tu laisses dans mon coeur des souvenirs inoubliables! Au revoir, peuple ami, que j'embrasse avec sympathie et affection! Merci de l'accueil cordial et de l'hospitalité que je n'oublierai jamais!

Au revoir, Ukraine! Je fais miennes les paroles de ton grand poète et j'invoque de "Dieu fort et juste" toutes ses bénédictions pour les enfants de ta terre, "cent fois ensanglantée, autrefois terre glorieuse". Très chers frères et soeurs, moi aussi je dis avec votre poète et avec vous: Que Dieu te protège toujours "ô ma sainte patrie!".

Je demande à Dieu tout-puissant de te bénir, ô peuple ukrainien, et de guérir toutes tes blessures. Que son grand amour comble ton coeur et te guide dans le troisième millénaire chrétien vers un nouvel avenir d'espérance. Au nom du Père, du Fils et du Saint Esprit.



À LA DÉLÉGATION DU PATRIARCAT OECUMÉNIQUE

Vendredi 29 juin 2001




Chers Frères dans le Christ,

1. "Béni soit Dieu, le Père de notre Seigneur Jésus Christ: dans sa grande miséricorde, il nous a fait renaître pour une espérance vivante, par la résurrection de Jésus Christ d’entre les morts, pour un héritage qui ne se peut corrompre, ni souiller, ni flétrir" (1P 1,3).

C’est par les paroles de Pierre aux chrétiens du Pont, de Galatie, de Cappadoce, d’Asie et de Bithynie que j’ai voulu vous accueillir aujourd’hui, Frères bien-aimés, membres de la délégation du Patriarche oecuménique, Sa Sainteté Bartholomaios Ier, et du Saint-Synode du Patriarcat de Constantinople, à l’occasion de la visite que vous rendez à l’Église de Rome et dont je me réjouis du fond du coeur. "Que la grâce et la paix soient avec vous de la part de Dieu notre Père et du Seigneur Jésus Christ" (Ga 1,3). Soyez les bienvenus parmi nous en ces jours où nous célébrons la fête des saints Pierre et Paul.

Cet échange de délégations entre l’Église de Rome et le Patriarcat oecuménique pour les fêtes patronales au cours desquelles est honorée la mémoire des Apôtres Pierre et Paul, et André, est une initiative bénie par le Seigneur. Nous pouvons même dire qu’elle est devenue désormais une pratique naturelle de fraternité ecclésiale. Je suis profondément heureux de cet usage et vivement reconnaissant au Patriarche oecuménique et au Saint-Synode des sentiments qu’ils éprouvent, comme l’Église de Rome, à l’égard de cette initiative qui nous permet de célébrer l’oeuvre accomplie par le Seigneur grâce aux premiers Apôtres. De plus, cela nous permet de participer ensemble à la prière et c’est en même temps une occasion de dialogue régulier et harmonieux. Votre présence, chers Frères, vous rend participants de cette fête de l’Église de Rome.

2. Parmi les premiers disciples, Jésus a appelé deux frères, Simon et André. Ils étaient pêcheurs. "Il leur dit: ‘Venez à ma suite, et je vous ferai pêcheurs d’hommes’. Aussitôt, laissant leurs filets, ils le suivirent" (Mt 4,19).

Depuis lors, le message évangélique a été porté jusqu’aux confins de la terre et nous sommes appelées à poursuivre dans l’histoire la mission confiée aux Apôtres. Comme le Seigneur a appelé "ensemble" Pierre et André pour être pêcheurs d’hommes pour le Royaume de Dieu, c’est aussi ensemble que les successeurs des Apôtres sont invités à annoncer la Bonne Nouvelle du salut, afin que, par nos paroles et notre unité fraternelle, le monde croie.

Chaque année, la présence d’une délégation catholique à la célébration eucharistique du Phanar et votre participation à la célébration qui se tient à Saint-Pierre font apparaître que nous sommes appelés par le Seigneur à cette mission commune. Cependant, l’impossibilité de prendre part ensemble à l’unique sacrifice du Christ, est pour nous tous une souffrance et un appel, pour que nous tendions à rechercher des voies qui permettront de résoudre les divergences persistant encore entre orthodoxes et catholiques.

3. C’est dans ce but que les relations fraternelles entre les Églises particulières catholiques et orthodoxes, et le dialogue théologique doivent être intensifiés. Il importe d’affronter et d’éclaircir ce qu’il reste du contentieux théologique, en se fondant sur la sainte Écriture et la Tradition. Le travail de la Commission mixte doit être complété selon le programme qu’elle s’est fixé. Je sais que le Conseil pontifical pour la Promotion de l’Unité des Chrétiens, le Patriarcat oecuménique et le co-président orthodoxe de la Commission mixte sont en contact étroit pour décider ensemble de la meilleure manière de relancer le dialogue. L’Église catholique est également en liaison avec les Églises orthodoxes autocéphales et autonomes. La promotion du dialogue de la charité, qui a permis de créer les conditions nécessaires à l’ouverture du dialogue théologique, se révèle encore une fois le moyen le plus direct pour que nous nous rencontrions dans la vérité et l’affection réciproque dans le Christ.

4. La fête des saints Pierre et Paul nous a de nouveau offert l’occasion de prier ensemble les saints Apôtres qui intercèdent pour tous les disciples du Christ, afin que "tous soient un" et soient ensemble "pêcheurs d’hommes" parmi les jeunes générations de ce nouveau millénaire, qui ont soif de connaître le Christ et de marcher à sa suite. Puissions-nous annoncer ensemble le Sauveur, afin de donner à ces générations "une espérance vivante" qui ne déçoit pas.

5. Chers Frères, je vous remercie de votre visite et je vous prie de transmettre mes salutations fraternelles à Sa Sainteté Bartholomaios Ier ainsi qu’à tous les membres du Saint-Synode du Patriarcat oecuménique. Que le Seigneur demeure toujours avec nous ! Qu’Il nous guide sur les routes de son Royaume!

    

AUX ARCHEVÊQUES MÉTROPOLITAINS AYANT REÇU LE PALLIUM EN LA SOLENNITÉ DES SAINTS APÔTRES PIERRE ET PAUL

Samedi 30 juin 2001



Très chers Archevêques métropolitains!

1. Après la solennelle célébration d'hier soir, au cours de laquelle je vous ai remis le Pallium, j'ai la joie de vous rencontrer à nouveau ce matin pour vous renouveler mon baiser fraternel. Je suis heureux d'accueillir avec vous vos familles, vos amis et les fidèles de vos communautés respectives, qui ont voulu vous entourer en ce moment d'une importance ecclésiale particulière.

Je vous salue tout d'abord, vénérés frères qui appartenez à la bien-aimée Eglise qui est en Italie: Mgr Pietro Brollo, Archevêque d'Udine; Mgr Carmelo Ferraro, Archevêque d'Agrigente; Mgr Agostino Superbo, Archevêque de Potenza-Muro Lucano-Marsico Nuovo; Mgr Antonio Cantisani, Archevêque de Catanzaro-Squillace; Mgr Giuseppe Agostino, Archevêque de Cosenza-Bisignano; Mgr Ennio Antonelli, Archevêque de Florence; Mgr Antonio Buoncristiani, Archevêque de Sienne-Colle di Val d'Elsa-Montalcino. Que le Seigneur dispense abondamment ses grâces à chacun de vous, ainsi qu'au ministère pastoral qu'il vous a confié. Quant à vous, très chers amis, servez-Le de tout votre coeur et de toutes vos forces, sur le modèle des saints Apôtres Pierre et Paul.

[en français]
2. Je salue cordialement les nouveaux Archevêques métropolitains venus recevoir le Pallium, Mgr Arthé Guimond, de Grouard Mc-Lennan (Canada); Mgr Laurent Ulrich, de Chambéry (France); Mgr Pierre-Marie Carré, d'Albi (France); Mgr Anselme Titianma Sanon, de Bobo-Dioulasso (Burkina Faso); Mgr Séraphim Rouamba, de Koupéla (Burkina Faso); Mgr François Garnier, de Cambrai (France); Mgr Anatole Milandou, de Brazzaville (République du Congo) et Mgr Charles Kambale Mbogha, de Bukavu (République démocratique du Congo). Puisse cette liturgie en la fête des saints Apôtres Pierre et Paul être un soutien pour leur ministère épiscopal! J'adresse mes salutations à leurs familles, à leurs amis, aux prêtres et aux fidèles qui les ont accompagnés. Ce signe est pour tous un appel à participer toujours plus activement à la mission de l'Eglise en communion avec leurs évêques. Avec la Bénédiction apostolique.

[en anglais]
Je suis heureux de saluer les Archevêques métropolitains anglophones qui ont reçu hier le Pallium: le Cardinal Theodore Edgar McCarrick,  de Washington (U.S.A.), Mgr Roger Lawrence Schweitz, d'Anchorage (U.S.A.); Mgr Vincent Michael Concessao de Delhi (Inde); Mgr Oswald Gracias, d'Agra (Inde); Mgr George Pell, de Sydney (Australie); Mgr Denis James Hart, de Melbourne (Australie); Mgr Brendan Michael O'Brien, de Saint John's, New-foundland (Canada) et Mgr Edward Joseph Gilbert, de Port of Spain (Trinité et Tobago). J'accueille leurs familles, leurs amis et les fidèles de leurs archidiocèses qui les ont accompagnés à Rome.

Le Pallium est le symbole du lien spécial de communion qui vous unit au Siège de Pierre et il est l'expression de l'universalité de l'unique Eglise du Christ, fondée sur le "roc" de la foi apostolique. Que votre témoignage de foi soit solide et inlassable, afin que vous puissiez effectivement guider vos communautés le long du chemin de la vérité, de la vie et de l'amour. De retour dans vos Eglises locales, apportez à vos fidèles mon salut affectueux dans le Seigneur, qui "est le même hier, aujourd'hui et à jamais" (He 13,8).

[en espagnol]
4. Je suis heureux de recevoir les Archevêques Ubaldo Ramón Santana, de Maracaibo (Venezuela), Cristian Caro Cordero, de Puerto Montt (Chili); Felipe Aguirre Franco, d'Acapulco (Mexique), Luis Abilio Sebastiani, d'Ayacucho (Pérou) et Rodolfo Quezada, de Guatemala (Guatemala), accompagnés de leurs familles, de prêtres et de fidèles, ainsi que de représentants des Autorités qui ont assisté hier à la remise du Pallium. Cet antique symbole ecclésial manifeste le lien étroit de l'Archevêque métropolitain avec le Siège apostolique et la responsabilité particulière de conserver et de promouvoir la communion avec les diocèses suffragants.

Je confie ce nouvel engagement ecclésial à l'intercession maternelle de la Vierge Marie, invoquée avec tant de dévotion dans les pays latino-américains. Je suis certain que ne manqueront pas dans votre ministère pastoral les prières, la proximité et la collaboration généreuse de tous vos fidèles. Je vous prie de transmettre à vos provinces ecclésiastiques respectives le salut cordial du Pape, qui vous donne de tout coeur sa Bénédiction apostolique.

[en portugais]
5. Je te salue avec affection, nouvel Archevêque de Luanda (Angola), Mgr Damião António Franklin, et toi, Mgr Tomé Makhweliha, Archevêque de Nampula (Mozambique); je salue également les nouveaux Archevêques du Brésil: Mgr Celso José Pinto da Silva, de Teresina; Mgr Dadeus Grings, de Porto Alegre et Mgr Geraldo Majela de Castro, de Montes Claros. En vous présentant mes félicitations pour ce jour, je forme des voeux afin que, de retour dans vos archidiocèses, revêtus du Pallium, signe du lien de communion particulier avec le Siège de Pierre, vous vous prodiguiez avec un engagement renouvelé en faveur de cette communion et de l'unité de l'Eglise, pour la cause de laquelle vous devez toujours vous sentir engagés.

[en croate]
6. Je te salue de tout coeur, cher Archevêque métropolitain de Rijeka en Croatie, Mgr Ivan Devcic, ainsi que ton clergé et tous tes fidèles. A travers mes paroles de bienvenue, je m'adresse en particulier au groupe nombreux venu avec toi pour reconfirmer les liens de la charité qui unissent l'Eglise de Rijeka avec le Siège apostolique.

Je te salue avec affection, cher Archevêque métropolitain de Belgrade en Yougoslavie, Mgr Stanislav Hocevar, ainsi que tes prêtres et tes fidèles, en particulier ceux qui t'accompagnent en cette occasion de l'imposition du Pallium, signe de l'unité et preuve de communion avec le Successeur de Pierre.

Je donne volontiers à tous ma Bénédiction apostolique.

[en polonais]
7. Je salue cordialement l'Archevêque de Byalystok, Wojciech Ziemba, sa famille et les pèlerins de l'archidiocèse, qui sont venus à Rome et qui ont participé à la solennité des saints Apôtres Pierre et Paul, et à la remise du Pallium. Que ce Pallium représente un signe de l'union de l'archidiocèse de Byalystok avec le Peuple de Dieu dans le monde entier.

Je confie à la protection de la Très Sainte Vierge Marie d'Ostra Brama, Patronne de l'archidiocèse, l'Archevêque Wojciech, ainsi que vous tous ici présents, et je vous bénis de tout coeur.

[en italien]
8. Vénérés frères, en retournant dans vos Eglises particulières, vous emporterez avec vous le Pallium que vous avez reçu hier de mes mains. Sachez traduire en choix pastoraux cohérents ce que ce signe liturgique traditionnel entend signifier, c'est-à-dire la fidélité et la communion effective avec le Siège apostolique. Que sur ce chemin vous aide également la Lettre apostolique Novo millennio ineunte, que vous êtes en train d'approfondir avec les diverses composantes de vos communautés.

Notre unité doit toujours être animée et alimentée en premier lieu par la prière. Si nous gardons ensemble le regard tourné vers le Christ, nous contribuerons de façon efficace à guider le Peuple de Dieu sur les voies du Seigneur. Que dans cet engagement nous soutienne l'intercession des saints Apôtres Pierre et Paul, et celle, maternelle et attentive, de la Très Sainte Vierge Marie, Mère de l'Eglise.

A chacun de vous, vénérés Frères, ainsi qu'à vos proches et à tous les fidèles qui vous sont confiés, je renouvelle de tout coeur ma Bénédiction apostolique.



MESSAGE AU COLLOQUE ORGANISÉ POUR LA CÉLÉBRATION DU CENTENAIRE DE L’ORDINATION SACERDOTALE DE PÈRE CHARLES DE FOUCAULD



A Monseigneur François Blondel,
Evêque de Viviers

1. A l’occasion du Colloque organisé au Grand Séminaire de Viviers pour célébrer le centenaire de l’ordination sacerdotale de Père Charles de Foucauld, je m'unis volontiers par la prière aux organisateurs et à l'ensemble des participants. Je rends grâce pour le témoignage de vie contemplative et apostolique de l'humble et pauvre ermite du Hoggar, qui s'est attaché à suivre Jésus de Nazareth. Le Frère Charles invite aujourd'hui tous les fidèles à puiser dans la contemplation du Christ et dans une relation intime avec lui des forces nouvelles, pour nourrir leur vie spirituelle et pour proposer l’Evangile aux hommes de notre temps; ils deviendront ainsi des serviteurs de la rencontre entre Dieu et l’humanité appelée au salut.

2. "Le Père de Foucauld [...] tient à nous par l’acte le plus mémorable de son existence et par la meilleure partie de sa vie. [...] Il devient prêtre" (Mgr Bonnet, Lettre du 28 mai 1917). A l'âge de 43 ans, après un temps de formation à la Trappe de Notre-Dame-des-Neiges, Frère Charles est ordonné prêtre le 9 juin 1901, dans la Chapelle du Grand Séminaire de Viviers, par Mgr Joseph Bonnet, votre prédécesseur. Cette ordination, qui le rend conforme au Christ, Tête et Pasteur, et qui fait de lui son ministre, marque une étape importante dans sa "vie cachée" avec le Seigneur. Depuis le jour d’octobre 1886 où, par la grâce du sacrement de la réconciliation et par le ministère de l’abbé Huvelin, il retrouva le chemin de l’Eucharistie, jusqu’à son assassinat en décembre 1916, il n’exprimera par toute sa vie qu’un seul désir: demeurer le grain semé pour mourir, en imitant silencieusement, par l’offrande de sa vie, le Christ qui a aimé tous les hommes "jusqu’à l’extrême" (Jn 13,1), pour se faire proche d’eux.

3. Dans la Lettre apostolique Novo millennio ineunte, j’ai rappelé que la contemplation du Christ était la source du dynamisme missionnaire de l’Eglise. Cette contemplation est le fondement de la vie spirituelle et de la fécondité apostolique du Frère Charles, imprimant à son existence une tonalité éminemment eucharistique. La charité pastorale de son bien-aimé frère et Seigneur Jésus Christ, accueillie au quotidien dans la méditation de sa parole et dans le Sacrement de sa présence réelle, le pousse à partager la vie de la Sainte Famille à Nazareth, pour être plus proche du Maître. C'est à la Trappe d’Akbès, puis à Nazareth, qu'il a fait une profonde expérience du mystère de l'Incarnation, dont il parlait en citant les paroles mêmes de l'Ecriture: "'Emmanuel, Dieu-avec-nous', voici pour ainsi dire le premier mot de l'Evangile. [...] 'Je suis avec vous jusqu’à la consommation des siècles', voici le dernier" (La bonté de Dieu, méditations sur les saints Evangiles, 147e méditation).

4. "Mes dernières retraites de diaconat et de sacerdoce m’ont montré que cette vie de Nazareth, ma vocation, il fallait la mener, non dans la Terre Sainte tant aimée, mais parmi les âmes les plus malades, les brebis les plus délaissées. Ce banquet divin, dont je suis le ministre, il fallait le présenter non aux frères, aux parents, aux voisins riches, mais aux plus boiteux, aux plus aveugles, aux âmes les plus abandonnées, manquant de prêtres" (Lettre du 8 avril 1905 à l’abbé Caron). Cette lumineuse prise de conscience révèle le sens pastoral, ecclésial et missionnaire de celui que l'on appelle "le frère universel". Durant les quinze dernières années de sa vie, à Béni-Abbès et à Tamanrasset, demeurant longuement devant le Saint Sacrement dans le silence du désert, le Père Charles de Foucauld présente le monde à Dieu et contribue humblement à faire connaître la Bonne Nouvelle du salut, remplissant ainsi fidèlement sa mission sacerdotale.

5. Rendant grâce pour le témoignage du Père de Foucauld, j’encourage tous ceux qui s’inspirent aujourd’hui de son charisme à poursuivre leur apostolat dans une unité toujours plus grande entre les différents Instituts, et à suivre, avec générosité et audace, son message et son exemple. Au début du nouveau millénaire, "c’est l’heure d’une nouvelle 'imagination de la charité'" (Novo millennio ineunte, n. 50) à laquelle les membres de la famille foucauldienne sont invités, notamment dans les pays où existent des tensions entre les communautés culturelles et religieuses, dans les pays où les personnes sont soumises à des conditions de vie difficiles et auprès des nombreux pauvres de la société moderne. Fidèles à l’Eucharistie, ils seront proches de tout homme et seront capables d'aimer à la manière de Jésus. Fidèles à leur engagement auprès des pauvres, ils témoigneront de l’amour de Dieu, semant "dans l’histoire les semences du Règne de Dieu que Jésus lui-même y a déposées au cours de sa vie terrestre en allant à la rencontre de ceux qui recouraient à lui pour tous leurs besoins spirituels et matériels" (Ibid., NM NM 49).

Le Frère Charles qui, pour traduire les Evangiles, apprit la langue des Touaregs et en composa un lexique et une grammaire, n’appelle-t-il pas ceux qui s’inspirent de son charisme à entrer en dialogue avec les cultures des hommes d’aujourd’hui, et à poursuivre le chemin de la rencontre avec les autres traditions religieuses, en particulier avec l’Islam ? Ainsi, les différentes communautés religieuses seront véritablement "comme des communautés engagées dans un dialogue respectueux, et plus jamais comme des communautés en conflit" (Discours à la Mosquée Omeyade de Damas, Syrie, 6 mai 2001). Je souhaite que les intuitions spirituelles du Père Charles de Foucauld continuent à irriguer la vie de l’Eglise, témoignant ainsi que l'amour est plus fort que toutes les sortes de tension et de division.

6. Cher Frère dans l’épiscopat, je confie le diocèse de Viviers et toute la grande famille foucauldienne à l’intercession du vénérable Charles de Foucauld, dont l’Eglise a récemment reconnu les vertus héroïques. A vous-même, à vos diocésains, à la communauté trappiste de Notre-Dame-des-Neiges, à la famille de Charles de Foucauld et aux Instituts qui vivent de son charisme, aux organisateurs et aux participants au Colloque, j’accorde de grand coeur une affectueuse Bénédiction apostolique.

Du Vatican, le 26 mai 2001.

IOANNES PAULUS II

  


Juillet 2001


Discours 2001 - Lviv (Esplanade de Sykhiv), Mardi 26 juin 2001