Discours 2001 - MESSAGE DU PAPE JEAN PAUL II AUX PARTICIPANTS À LA RENCONTRE INTERNATIONALE SUR LE TRAVAIL (CITÉ DU VATICAN, 13-15 SEPTEMBRE 2001)



Monsieur le Cardinal,
Vénérés frères dans l'épiscopat et le sacerdoce,
Mesdames et messieurs!

1. Je suis heureux de vous transmettre mon salut à l'occasion de la Conférence internationale sur le thème: Le travail, clé de la question sociale, que le Conseil pontifical "Justice et Paix" a promue, en collaboration avec plusieurs Institutions scientifiques et culturelles prestigieuses. Il s'agit d'une rencontre ouverte aux chercheurs en sciences sociales, qui travaillent dans les Universités et dans les centres de recherche, et qui se situe dans le cadre du vingtième anniversaire de l'Encyclique Laborem exercens, dont elle entend constituer une commémoration significative.

J'adresse mes salutations cordiales à tous les participants, avec une pensée particulière pour Monsieur le Cardinal François Xavier Nguyên Van Thuân, Président du Conseil pontifical "Justice et Paix". Je souhaite à chacun que ces journées de réflexion et d'échanges riches d'expériences constituent une occasion propice de mettre en évidence la dimension subjective du travail, face aux profondes transformations économiques et sociales de l'époque que nous vivons actuellement.


2. Dans ce domaine important de la vie sociale, nous traversons en effet actuellement une évolution profonde, qui revêt parfois les caractéristiques d'un changement radical. La forme du travail a changé, de même que ses horaires et ses lieux. Dans les pays les plus industrialisés, le phénomène a revêtu des dimensions telles que le modèle du travail des ouvriers, accompli dans les grandes usines selon des horaires rigides, appartient désormais au passé.

Comme toute transformation profonde, celle-ci présente également des éléments de tension et, dans le même temps, de complémentarité entre la dimension locale de l'économie et la dimension mondiale; entre ce que l'on qualifie d'"ancienne" économie et de "nouvelle" économie; entre l'innovation technologique et l'exigence de sauvegarder les postes de travail; entre la croissance économique et la compatibilité avec l'environnement.

Ce serait toutefois une grave erreur de considérer que les changements en cours adviennent de façon déterminée. Le facteur décisif, pour ainsi dire "l'arbitre" de cette phase complexe de changement, est encore une fois l'homme, qui doit demeurer le véritable acteur de son travail. Il peut et doit assumer de façon créative et responsable les changements actuels pour faire en sorte qu'ils servent à la croissance de la personne, de la famille, de la société dans laquelle il vit et de toute la famille humaine (cf. Laborem exercens LE 10).

A ce propos, le rappel de la dimension subjective du travail, à laquelle fait constamment référence la doctrine sociale de l'Eglise, est éclairante: "Le travail humain procède immédiatement des personnes créées à l'image de Dieu, et appelées à prolonger, les unes avec et pour les autres, l'oeuvre de la création en dominant la terre" (CEC 2427).


3. Tant qu'existera l'homme, existera le geste libre de participation authentique à la création, qu'est le travail. Celui-ci est l'une des composantes essentielles pour la réalisation de la vocation de l'homme, qui se manifeste et se révèle toujours comme celui qui est appelé par Dieu à "dominer la terre". Même s'il le voulait, il ne pourrait cesser d'être un "sujet capable de décider de lui-même" (Laborem exercens LE 6). Dieu lui a confié cette liberté suprême et difficile. Dans cette perspective, aujourd'hui plus qu'hier, nous pouvons répéter que "le travail humain est une clé, et probablement la clé essentielle de toute la question sociale" (ibid., LE LE 3).

Au cours de ces journées d'étude, il vous est donné de vérifier que certaines interprétations de type mécaniste et économiste de l'activité productive sont dépassées par l'analyse scientifique même des problèmes liés au travail. Par rapport aux années passées, ces conceptions se révèlent aujourd'hui encore plus inadaptées à interpréter les faits, car elles ne sont pas en mesure de reconnaître la nature absolument originale du travail, en tant qu'activité libre et créative de l'homme.

La phase de changement rapide et accélérée que le monde vit actuellement exige de dépasser la vision actuelle du système économique et social, dans lequel les besoins humains en particulier bénéficient d'une considération limitée et inadaptée. A la différence de tout autre être vivant, l'homme a des besoins infinis, car c'est la référence au transcendant qui détermine son être et sa vocation. A partir de ces besoins, il affronte l'aventure de la transformation de la réalité avec ses occupations professionnelles selon un élan idéal qui va toujours au-delà des résultats obtenus dans celles-ci.


4. Si les formes historiques à travers lesquelles s'exprime le travail humain changent, ses exigences permanentes, c'est-à-dire le respect des droits inaliénables, ne changent pas. Malheureusement, il existe le risque de voir ces droits niés. C'est le cas, en particulier, du chômage, qui dans les pays de plus ancienne industrialisation, touche de façon nouvelle des couches importantes d'hommes et de femmes: je pense à ceux qui étaient employés dans des processus de production désormais obsolètes; je pense aux jeunes et à ceux qui habitent dans des régions défavorisées, où subsistent encore des taux de chômage élevés.

Il existe, ensuite, une certaine précarité professionnelle qui, si elle peut d'un côté offrir de plus grandes opportunités de travail, présente, de l'autre, des risques et des charges qu'il faut assumer, tels que les coûts de la mobilité, du recyclage professionnel, de la sécurité sociale elle-même.

Dans les pays les moins industrialisés, on rencontre en outre des problèmes encore plus dramatiques: la subsistance de l'exploitation des mineurs dans le travail; le manque de reconnaissance de la valeur du travail, en particulier de celui de la femme, dans la famille et à l'extérieur; le manque de travail dû au cadre instable des relations entre les hommes, en particulier dans les situations de conflits, et à la fragilité du système des relations économiques locales, face aux changements provoqués par la mondialisation des processus de production.

Face à ces problèmes, il faut imaginer et édifier de nouvelles formes de solidarité, en tenant compte de l'interdépendance qui lie entre eux les hommes au travail. Si le changement en cours est profond, l'effort de compréhension et de volonté pour préserver la dignité du travail devra être encore plus décisif, en renforçant, à divers niveaux, les institutions concernées.

La responsabilité des gouvernements est grande, mais tout aussi importante est celle des organisations de défense des intérêts collectifs des travailleurs et des employeurs. Tous sont appelés non seulement à promouvoir ces intérêts de façon honnête et à travers la voie du dialogue, mais encore à revoir leurs fonctions mêmes, leur structure, leur nature et leurs modalités d'action. Comme je l'ai écrit dans l'Encyclique Centesimus annus, ces organisations peuvent et doivent devenir des "lieux d'expression de la personnalité du travailleur" (CA 15).


5. Vous aussi, scientifiques et hommes de culture, êtes appelés à apporter une contribution spécifique et décisive à la solution de ces problèmes si vastes et si complexes, qui revêtent dans certains domaines des dimensions dramatiques. En vous occupant des divers aspects du travail dans le domaine des différentes disciplines, vous partagez la responsabilité de comprendre le changement qui s'accomplit en lui. Cela signifie souligner les occasions et les risques que celui-ci comporte; cela signifie en particulier suggérer des lignes d'action pour guider le changement dans le sens le plus favorable au développement de toute la famille humaine.

C'est à vous qu'il revient de lire et d'interpréter les phénomènes sociaux avec intelligence et amour de la vérité, sans préoccupations dictées par des intérêts de groupe ou personnels. On peut même dire que votre contribution, précisément parce qu'elle est "abstraite", est essentielle pour l'action concrète des politiques économiques. Ne vous lassez donc pas de vous consacrer avec patience et rigueur scientifique à ces recherches. Que Dieu vous aide et vous illumine par la sagesse, qui est le don de son Esprit.

Vous pourrez trouver dans la doctrine sociale de l'Eglise une orientation et une référence constantes. Je souhaite également que la doctrine sociale elle-même continue à bénéficier de votre contribution, des catégories et des réflexions des sciences sociales, selon le dialogue fécond qui est toujours réciproquement bénéfique.

Avec ces sentiments, tandis que j'implore de tout coeur sur tous la protection de la Très Sainte Vierge Marie et de son Epoux Joseph, travailleur humble et généreux, j'adresse à chacun ma Bénédiction.

De Castel Gandolfo, le 14 septembre 2001


AU NOUVEL AMBASSADEUR DE LA RÉPUBLIQUE D'ARMÉNIE PRÈS LE SAINT-SIÈGE À L'OCCASION DE LA PRÉSENTATION DES LETTRES DE CRÉANCE

Samedi 15 septembre 2001


Monsieur l’Ambassadeur,

1. Je suis heureux d’accueillir Votre Excellence pour la présentation des Lettres qui L’accréditent comme Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de la République d’Arménie auprès du Saint-Siège. Je La remercie de ses paroles courtoises et Lui saurai gré de transmettre à Son Excellence Monsieur Robert Kocharian, Président de la République, mes remerciements pour les salutations qu’il m’a adressées.

2. C’est avec joie que je me prépare à visiter votre pays dans quelques jours, pour rencontrer les autorités civiles et le peuple arménien, et pour m’associer aux festivités du dix-septième centenaire du christianisme en Arménie. Je me réjouis de pouvoir m’entretenir avec Son Excellence Monsieur le Président de la République, me souvenant de la visite qu’il m’a faite au Vatican il y a deux ans, et de développer ainsi les relations cordiales qui existent entre le Saint-Siège et votre pays. Ce voyage permettra aussi de poursuivre et d’affermir le chemin de dialogue et la marche vers l’unité entrepris avec l’Église arménienne apostolique, notamment avec LL. SS. Vasken Ier et Karékine Ier dont je tiens ici à saluer la mémoire, me souvenant de leur attachement à la cause de l’unité et heureusement poursuivis avec Sa Sainteté Karékine II, Patriarche suprême et Catholicos de tous les Arméniens.

Permettez-moi, par votre intermédiaire, de remercier tous ceux, autorités civiles et religieuses, qui ont contribué à la préparation de mon prochain voyage.

3. Comme vous venez de le rappeler, votre pays a une longue histoire, et une longue histoire chrétienne. Après une première évangélisation, que la tradition fait remonter aux Apôtres Barthélemy et Thaddée, saint Grégoire l’Illuminateur obtint l’adhésion de l’Arménie au christianisme, au tout début du quatrième siècle, par la conversion du roi Tiridate III, puis de sa famille et de tout son peuple. "Avec le baptême de la communauté arménienne, à commencer chez ses autorités civiles et militaires, naît une identité nouvelle du peuple, qui deviendra une part constitutive et inséparable de ‘l’être arménien’ lui-même" (Lettre apostolique à l’occasion du 1700e anniversaire du baptême du peuple arménien, n. 2), faisant de lui le premier peuple officiellement chrétien dans l’histoire. Cette oeuvre d’évangélisation a dès lors suscité la naissance d’une culture originale et forte, forgée dans la foi chrétienne, qui s’est révélée tout au long des siècles comme l’authentique moyen pour les Arméniens de préserver leur identité. L’histoire de l’Arménie a été marquée par beaucoup de souffrances, dues en grande partie à sa situation géographique, aux confins de grandes puissances, et elle a subi l’occupation ou a été annexée en de multiples occasions, mais son identité culturelle et religieuse a toujours survécu. On peut donc dire que les racines religieuses chrétiennes de l’Arménie sont constitutives de la nation.

Après les immenses détresses du début du siècle dernier, culminant dans les tragiques événements de 1915 et la dispersion de l’exil qui a suivi, votre pays a repris sa marche, avant de retrouver, il y a dix ans, son indépendance. Comme vous le soulignez vous-même, ce chemin est long pour un peuple qui aspire à trouver sa juste place dans le concert des nations, grâce à une coopération plus forte avec ses voisins et à des relations internationales constructives pour son développement économique, social et culturel. Le Saint-Siège encourage chez tous les peuples l’aspiration légitime au bien-être et à la liberté, rappelant à chacun le devoir de participer avec patience et ténacité à la construction de la Nation dans la perspective du bien commun. Il les appelle aussi inlassablement au dialogue avec leurs voisins, pour favoriser une paix juste et durable entre tous, et la concorde entre les nations. Le Saint-Siège ne doute pas de la capacité du peuple arménien de réaliser ces légitimes aspirations.

4. Votre présence me donne l’occasion de saluer la communauté catholique qui vit en Arménie, rassemblée autour de son pasteur, Sa Béatitude Nerses Bedros XIX, Patriarche de Cilicie des Arméniens catholiques, y associant aussi son prédécesseur, Sa Béatitude Jean-Pierre XVIII Kasparian. Je suis heureux de pouvoir rencontrer les fidèles catholiques, de prier avec eux, et de pouvoir ainsi, comme Successeur de Pierre, les encourager, pour qu’ils affermissent toujours davantage leur foi dans la fidélité à leur Baptême et au témoignage héroïque de tant de leurs frères, et pour qu’ils contribuent, à leur place, au dialogue oecuménique et, avec l’ensemble de leurs concitoyens, au bien du pays tout entier.

5. Soyez le bienvenu, Monsieur l’Ambassadeur, au moment où vous inaugurez votre mission de représentation auprès du Saint-Siège et accueillez les voeux cordiaux que je forme pour son heureux accomplissement. Vous trouverez toujours auprès de mes collaborateurs accueil et compréhension pour vous aider dans votre noble fonction.

Sur Votre Excellence, sur sa famille, sur ses collaborateurs et sur le peuple arménien tout entier, j’invoque de grand coeur l’abondance des Bénédictions divines.

   

AUX SOEURS DE SAINT-PAUL DE CHARTRES

Samedi 15 septembre 2001



Aux Soeurs de Saint-Paul de Chartres

Je suis heureux de vous accueillir et de vous souhaiter une cordiale bienvenue. À l’occasion de votre quarante-cinquième Chapitre général, au moment où vous vous apprêtez à élire un nouveau conseil général, vous avez tenu à rencontrer le Successeur de Pierre, manifestant ainsi votre filial attachement à sa personne et votre vif sens de l’Église. En vous assurant de ma proximité spirituelle tout au long de vos travaux, j’invoque volontiers l’Esprit Saint, afin qu’il vous donne d’imiter l’élan de l’Apôtre Paul, votre saint patron, pour participer à cette nouvelle imagination de la charité que j’appelais de mes voeux au début de ce nouveau millénaire. Que la contemplation du visage du Christ, source de toute fécondité apostolique, stimule votre fidélité à votre charisme fondateur et dynamise votre engagement missionnaire, en particulier auprès des plus démunis !

Depuis le temps de votre fondation en 1696 par l’abbé Louis Chauvet, vous avez toujours voulu maintenir cette fidélité à votre charisme, vous consacrant de manière particulière au service de la jeunesse et des plus pauvres. Votre désir de vous conformer totalement au Seigneur lui-même vous a poussées à chercher sa face dans le visage de ceux auxquels il a voulu lui-même s’identifier. Aujourd’hui encore, sur les cinq continents, votre présence dans le monde de l’éducation, dans le monde de la santé et auprès des marginaux demeure un signe éminent de la "folie" de l’amour du Christ pour tous les hommes et un appel courageux à travailler à l’avènement du Royaume de Dieu.

La jeunesse actuelle vit dans tous les continents des situations difficiles, liées au matérialisme, aux mutations culturelles, aux divisions familiales, à la violence sous toutes ses formes, au manque de repères moraux et spirituels. Dans vos missions d'éducation, avec les laïcs qui collaborent à vos oeuvres, il importe que vous offriez une formation scientifique, humaine, morale et religieuse de qualité, donnant ainsi aux jeunes la possibilité d'édifier et de structurer leur personnalité, et de surmonter les difficultés rencontrées, leur permettant d'envisager un avenir plus serein. N'ayez pas peur de proposer le chemin de la foi et de transmettre avec joie l'appel du Seigneur au sacerdoce ou à la vie consacrée. De même, il importe que les adultes leur fassent découvrir la beauté de l’appel spécifique que constitue le mariage chrétien. Les jeunes attendent que leurs aînés leur montrent les chemins de la sainteté.

Alors que votre Chapitre général vous donne l’occasion de trouver un élan nouveau pour repartir dans l’espérance, je vous encourage à enraciner votre consécration dans le Christ, le consacré du Père, dont vous êtes invitées à manifester la présence amoureuse et salvifique, montrant par toute votre vie le bonheur qu’il y a à se consacrer totalement dans la sequela Christi. Dans le mystère de sa mort et de sa résurrection, il a révélé à toute l’humanité la vérité sur Dieu et sur l’homme, invitant chaque croyant à communier à cette dynamique pascale pour porter l’Évangile au monde. Attentives à répondre dans la confiance aux nouveaux défis que vous aurez à relever, réconfortées par la prière des Soeurs âgées, apprenez à passer chaque jour avec le Christ de la mort à la vie ! Laissez-vous renouveler par lui, "pour construire avec l’aide de son Esprit des communautés fraternelles, pour laver avec Lui les pieds des pauvres et pour apporter votre contribution irremplaçable à la transfiguration du monde" (Vita consecrata, n. 110) !

Vous confiant à l’intercession de la Vierge Marie, Notre-Dame des Douleurs, que l’Église nous invite à fêter aujourd’hui, je vous accorde une particulière Bénédiction apostolique, et je l’étends à toutes les Soeurs de votre Congrégation, aux laïcs qui travaillent avec vous et à toutes les personnes qui bénéficient de votre apostolat.

   


AUX PARTICIPANTS AU PÈLERINAGE PROMU PAR LES OBLATS DU SACRÉ-COEUR

Samedi 15 septembre 2001



Très chers Oblats et Oblates du Sacré-Coeur!

1. C'est pour moi une grande joie de vous rencontrer dans le contexte des célébrations solennelles pour le centenaire de la naissance de votre Fondateur, le Serviteur de Dieu Dom Francesco Mottola. Prêtre généreux et illuminé de votre cher diocèse, il a laissé une empreinte profonde dans la vie ecclésiale et dans le contexte culturel et social dans lequel il vécut, diffusant l'influence de son action apostolique bien au-delà des frontières de la Calabre.

Je salue tout d'abord Mgr Domenico Cortese, Evêque de Mileto-Nicotera-Tropea, et je le remercie des paroles courtoises avec lesquelles il s'est fait l'interprète des sentiments communs, rappelant de façon éloquente la figure et le message spirituel de Dom Mottola. Très chers frères et soeurs, j'étends cette pensée affectueuse également à vous, membres de la grande Famille oblate. A vous qui êtes présents, ainsi qu'à tous les fils spirituels du Serviteur de Dieu, je désire faire parvenir mon salut, en même temps que mes vives félicitations pour votre généreux témoignage évangélique, en particulier aux côtés des pauvres et des personnes dans le besoin.


2. Comme votre Evêque l'a souligné de façon opportune, la parole clef de la vie, de la spiritualité et de l'action pastorale et caritative de Dom Mottola est "oblation". Doté d'une vive personnalité riche de sensibilité, il affronta dès les années de sa formation sacerdotale une ascèse exigeante, alimentée par une prière quotidienne, afin de dominer son caractère exubérant et de s'identifier toujours plus au Christ. Dans la Règle de vie il écrit: "La voie maîtresse de ma vie spirituelle sera l'abandon, complet et absolu, au Coeur de Jésus". Cet abandon total au Christ trouve son centre et son essence dans l'Eucharistie et se présente comme une "oblation" sans réserve à Dieu et aux frères.

De ces prémisses dérive dans l'expérience de Dom Mottola une synthèse harmonieuse entre contemplation et action, inséparables entre elles, selon le principe célèbre: "Contemplare et contemplata aliis tradere". Le modèle de cet itinéraire spirituel est la Vierge Marie, à laquelle votre Fondateur avait recours avec une confiance filiale, en l'imitant aussi bien dans la "contemplation" que dans le "service", et en indiquant à ses Oblats cette parfaite intégration comme une véritable "sainteté sociale", forme d'apostolat efficace pour notre époque.

Cette spiritualité élevée qui, tout en ne renonçant pas à la primauté de la contemplation, incite à vivre les con-seils évangéliques dans le monde et à accueillir les besoins des frères, ne pouvait être que féconde en initiatives et en activités en faveur des pauvres et des personnes dans le besoin. Je souhaite de tout coeur que les célébrations du centenaire constituent un stimulant puissant pour vous tous, afin d'approfondir et de diffuser le trésor de spiritualité et d'apostolat que ce bien-aimé Serviteur de Dieu vous a transmis.


3. Je désire à présent m'adresser de façon particulière à vous, chers Prêtres du Sacré-Coeur, qui vivez votre identité de prêtres diocésains dans l'esprit et avec les idéaux de Dom Mottola. Vous diffusez, à travers votre témoignage personnel et votre apostolat, les grandes valeurs que votre Fondateur vous a transmises. Sachez être, pour reprendre l'une de ses images suggestives, les "cénobites" de la rue. Il aimait à répéter: "L'apostolat de fait - pour lequel nous avons refusé la cellule et sommes restés en voyage dans le monde - découle de la plénitude de la contemplation: comme coule des glaciers la force des fleuves, qui retournent cependant vers la mer, aspirant à l'azur, pour être réabsorbés par le soleil".

Je vous adresse également une parole d'encouragement et d'affection, chères Oblates du Sacré-Coeur. En suivant les enseignements de Dom Mottola, vous exprimez votre don total à Dieu et à vos frères qui souffrent, non pas dans la solitude du cloître, mais dans la vie souvent frénétique du monde, en harmonisant prière et action, recherche de Dieu et témoignage de la charité. Aimez et conservez jalousement votre charisme pour le bien de l'Eglise et de la société. Votre Fondateur vous rappelle que vous devez "parvenir à la perfection spirituelle à travers la prière contemplative et l'apostolat: rester dans le monde pour être davantage prêtes à percevoir la voix de la douleur et de la solitude".

Vous aussi, chers Oblats laïcs, sachez être des témoins de cette contemplation à laquelle chaque chrétien, jeune ou adulte, célibataire ou marié, est appelé selon les devoirs de son état. Forts de cette spiritualité, vous serez en mesure de renouveler le milieu qui vous entoure à travers des initiatives de prière appropriées, comme par exemple les "Venerdi di Corello", et un engagement civil et social, comme vous le faites déjà pour soutenir de nombreux jeunes chômeurs.

Enfin, ma pensée se tourne vers les Consacrées du Sacré-Coeur, que j'exhorte à vivre le charisme oblat en se donnant au Seigneur et à leurs frères, en collaborant généreusement à la vie et aux activités de la communauté paroissiale et en s'engageant dans l'animation de la vie familiale, pour favoriser "le retour du Christ dans les familles".


4. Très chers frères et soeurs, votre famille spirituelle, tout en conservant l'autonomie de chaque groupe, vit dans une communion constante d'idéaux et promeut des initiatives communes. Persévérez avec générosité et clairvoyance dans cette voie authentiquement évangélique et ecclésiale!

Que vous encourage l'exemple de votre Fondateur, toujours prêt à suivre le Christ, même lorsqu'il dut affronter de longues années de maladie, un authentique calvaire qui perfectionna sa configuration au Christ Crucifié. "Usque ad sanguinem!", avait-il l'habitude de dire. L'immobilité physique ne l'arrêta pas, et rendit au contraire plus intense et efficace le rayonnement de son influence, marquant en profondeur les consciences et laissant un héritage spirituel encore aujourd'hui fécond de bien.

Je vous confie à l'intercession maternelle de la Madone de Romania, Patronne spéciale de Tropea, aimée et vénérée par Dom Mottola avec une affection filiale, et je donne de tout coeur à vous qui êtes ici présents, à tous les Oblats et les Oblates du Sacré-Coeur et à ceux que vous rencontrez dans votre service quotidien une Bénédiction apostolique spéciale.




AU NOUVEL AMBASSADEUR DE LA RÉPUBLIQUE DU KAZAKHSTAN PRÈS LE SAINT-SIÈGE À L'OCCASION DE LA PRÉSENTATION DES LETTRES DE CRÉANCE

Lundi 17 septembre 2001\i  




Monsieur l’Ambassadeur,

1. C’est avec plaisir que j’accueille Votre Excellence à l’occasion de la présentation des Lettres qui L’accréditent comme premier Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de la République du Kazakhstan auprès du Saint-Siège et je La remercie de ses paroles aimables. Je Lui saurai gré de transmettre à Son Excellence Monsieur Nazarbaiev, Président de la République, mes remerciements pour les salutations cordiales qu’il m’a adressées.

2. Je me réjouis de visiter dans quelques jours votre pays et de nouer ainsi un contact plus direct avec ses autorités et avec ses habitants, dans leur riche diversité. Comme vous l’avez souligné, différentes ethnies vivent sur le sol du Kazakhstan, avec des cultures, des langues et des religions différentes. Cette situation pluraliste est un défi en même temps qu’une chance. C’est un défi car, comme je le disais dans mon message pour la Journée mondiale de la paix du 1er janvier 2001, "dans le passé, les diversités entre les cultures se sont souvent révélées source d’incompréhensions entre les peuples, et aussi motif de conflits" (n. 8). Il convient donc que chaque groupe particulier s’oblige au respect attentif des autres, en s’efforçant de mieux les connaître, pour dépasser d’éventuelles tensions.

Former ensemble une communauté nationale, enrichie des diversités de chacun, est aussi une chance. Cela suppose d’apprendre à vivre en union les uns avec les autres, ce qui "n’est jamais une réduction à l’uniformité, ni une reconnaissance forcée, ni une assimilation ; la communion est en réalité la convergence d’une variété multiforme et elle devient donc signe de richesse et promesse de développement" (ibid., n. 10). Puisse votre pays, qui fête ses dix ans d’indépendance, continuer sa marche paisible vers cet objectif, dans un souci toujours plus grand de dialogue entre ses cultures, de développement de la collaboration avec les pays voisins et d’intégration à la communauté internationale !

3. La diversité culturelle de votre pays s’accompagne d’une grande diversité religieuse et confessionnelle, et vous avez insisté, Monsieur l’Ambassadeur, sur l’importance qu’accorde votre gouvernement à ce pluralisme religieux, au dialogue entre les diverses religions, de même qu’à la dimension spirituelle de la vie de l’homme qu’elles expriment. Je me félicite à cet égard des bonnes relations qui existent entre le Saint-Siège et votre pays, et des accords qui garantissent les droits et les devoirs de la communauté catholique vivant au Kazakhstan ainsi que les obligations de l’État envers elle. En effet, dans un état de droit, la liberté religieuse est un bien précieux, expression de la dignité fondamentale de la personne humaine qui choisit librement, selon sa conscience, la religion à laquelle elle adhère. À n’en pas douter, une telle liberté invite les personnes et les communautés religieuses à concourir au bien commun, dans le respect de chacun et dans le cadre des lois du pays. Je souhaite que le Kazakhstan trouve dans cette riche diversité un fondement solide pour son développement humain et spirituel.

4. À travers votre personne, je suis heureux de saluer la communauté catholique, ses pasteurs et ses fidèles que j’aurai la joie de rencontrer bientôt en de multiples occasions. Je les exhorte à former des communautés vivantes et fraternelles, témoignant des richesses de l’Évangile, dans le souci du dialogue avec tous leurs frères. Je sais qu’ils participent déjà activement, avec tous leurs concitoyens, à la vie de la nation et à son développement matériel et spirituel. Permettez-moi de m’adresser, à travers vous, à tous ceux, autorités civiles et religieuses, qui se sont investis généreusement dans la préparation de mon voyage. Qu’ils soient vivement remerciés !

5. Monsieur l’Ambassadeur, vous inaugurez aujourd’hui la noble mission de représenter votre pays auprès du Saint-Siège. Veuillez accepter les voeux très cordiaux que je forme pour son heureuse réussite et soyez sûr de toujours trouver auprès de mes collaborateurs la compréhension et le soutien nécessaires ! Sur Votre Excellence, sur sa famille, sur tous ses collaborateurs et sur tous ses compatriotes, j’invoque de grand coeur l’abondance des Bénédictions divines.

      

AUX RELIGIEUX ET RELIGIEUSES DES INSTITUTS DE LA FAMILLE MARISTE

Lundi 17 septembre 2001




Aux religieux et religieuses des Instituts de la famille mariste

1. Je salue avec joie tous les représentants de la famille mariste en cette heureuse occasion qui fait coïncider les chapitres généraux de vos quatre instituts et qui permet votre visite commune au Successeur de Pierre. Qu’il nous soit permis d’y voir comme un signe de l’Esprit et un appel à vous laisser conduire sur les chemins d’une plus grande communion et d’une plus intense collaboration ! Je remercie le Père Joaquín Fernández, Supérieur général de la Société de Marie, pour ses paroles cordiales qui reflètent l’esprit dans lequel vous vivez vos chapitres, votre enracinement marial et votre souci missionnaire.

2. Vous avez choisi dans l’Église la vie de consacrés, à la suite de Marie, dans la fidélité aux intuitions de vos fondateurs et au charisme de vos instituts. Vos prédécesseurs se sont voués à l’évangélisation dans les paroisses, à l’éducation des enfants et à la promotion de la femme. Puis ils ont engagé généreusement toute la famille mariste dans l’annonce de l’Évangile aux peuples de l’Océanie occidentale, marquant cette oeuvre de leur empreinte : notamment l’éducation à la ferveur chrétienne et le souci des vocations locales. L’Église accueille aujourd’hui avec reconnaissance le travail missionnaire accompli et les dons de la grâce de Dieu manifestés dans la vie de vos instituts. Ces dons, elle les a reconnus de manière particulière comme fruits de sainteté en saint Pierre Chanel et en saint Marcellin Champagnat.

3. Aujourd’hui, il vous appartient de manifester d’une façon originale et spécifique la présence de la Vierge Marie dans la vie de l’Église et des hommes, et, pour cela, de développer une attitude mariale. Celle-ci se caractérise par une disponibilité joyeuse aux appels de l’Esprit Saint, par une confiance inébranlable dans la Parole du Seigneur, par une démarche spirituelle en relation avec les différents mystères de la vie du Christ et par une attention maternelle aux besoins et aux souffrances des hommes, spécialement des plus petits. "Le rapport filial avec Marie constitue la voie privilégiée de la fidélité à l’appel reçu et une aide très efficace pour progresser dans sa réponse et vivre en plénitude sa vocation" (Vita consecrata VC 28). C’est donc en vous tournant vers Marie, avec fidélité et audace, en vous laissant guider par elle à "faire tout ce qu’il dira" (cf. Jn 2,5), que vous trouverez des chemins nouveaux pour l’évangélisation de notre temps.

4. En se mettant en route rapidement vers les monts de Judée pour aller à la rencontre de sa cousine Elisabeth, Marie ne nous enseigne-t-elle pas la liberté spirituelle ? Il importe en effet de ne pas vous laisser accaparer par la seule gestion de l’héritage du passé, mais de discerner ce qu’il convient de quitter, avec un esprit de pauvreté mais surtout avec cette liberté évangélique qui rend disponible aux appels de l’Esprit. Devant la multiplicité des sollicitations, il faut en effet une vraie liberté pour discerner les urgences. "Avance au large !" ; cette parole de Jésus à Pierre nous invite à "aller de l’avant dans l’espérance" sur les routes du monde, sûrs que "la Vierge très sainte nous accompagne sur ce chemin"(cf. Novo millennio ineunte NM 58).

5. Marie s’est donnée totalement au Seigneur, faisant confiance en tout à la Parole de Dieu. Comment ne vous apprendrait-elle pas à demeurer dans la force de cette Parole, à choisir, comme l’autre Marie, la meilleure part (cf. Lc 10,42) ? Dans le monde d’aujourd’hui, la dispersion guette facilement les disciples du Christ, parce que l’abondance des biens matériels peut les détourner de l’essentiel et que les sollicitations pastorales sont multiples. Comme je l’ai écrit récemment à toute l’Église, nous avons besoin de contempler le visage du Christ (cf. Novo millennio ineunte, II), de chercher davantage la profondeur de son mystère, car il est la source véritable où puiser l’amour que nous voudrions donner. Ne laissez pas se dénouer ce lien essentiel de consécration au Christ ! Choisissez plutôt de vous mettre humblement à la suite du Seigneur, à la manière discrète de Marie ! Travaillez avec elle à faire l’unité de votre vie dans l’Esprit car, comme le rappelle saint François de Sales, "une des conditions requises pour recevoir le Saint-Esprit, ce sera d’être avec Marie" (Sermon 1 pour la Pentecôte), et laissez-le vous configurer davantage au Christ ! Alors votre vie et votre mission trouveront leur signification profonde et porteront des fruits pour les hommes et les femmes d’aujourd’hui !

6. Gardez vivante la tradition missionnaire de votre famille ! Avec Marie, elle vous porte à être particulièrement attentifs aux détresses de nos contemporains, de ceux qui, dans nos sociétés modernes, sont privés de dignité, de reconnaissance, d’amour.

L’Église a particulièrement besoin de vous dans un domaine essentiel pour la famille mariste: l’éducation des enfants et des jeunes. Cette priorité missionnaire s’enracine dans l’esprit de Marie, mère et éducatrice auprès de Jésus à Nazareth, et plus tard dans la première communauté chrétienne. Le monde de l’éducation est difficile et exigeant, demandant sans cesse aux éducateurs de s’adapter aux jeunes et à leurs attentes nouvelles. Ne vous laissez pas décourager par les difficultés du moment, celles de l’âge qui vous éloigne apparemment des plus jeunes, celle du manque de moyens et d’abord d’ouvriers pour travailler à la vigne ! Regardez plutôt les jeunes avec les yeux du Bon Pasteur, comme une foule qui va sans berger (cf. Mt 9,36), mais aussi comme ce champ qui se dore pour la moisson et qui portera du fruit au temps voulu (cf. Jn 4,35-38) ! Formez également les laïcs qui oeuvrent avec vous afin qu’ils vivent du charisme qui vous anime. Par votre existence, vous êtes appelés à faire découvrir à des jeunes la joie qu’il y a à suivre le Christ dans la vie consacrée. N’ayez pas peur de proposer cette démarche à la jeunesse en quête de vérité !

7. Les chapitres généraux que vous vivez valorisent la fidélité à l’esprit fondateur mais aussi le renouveau nécessaire, conservant et enrichissant le patrimoine spirituel des instituts. Qu’ils vous aident à trouver les signes nouveaux de la communion entre vos quatre instituts, à renforcer une collaboration qui donnera des fruits pour l’accomplissement fidèle de votre mission ! Que la Vierge Marie vous guide sur ces chemins de rencontre !

8. C’est dans ces sentiments que je suis heureux de vous saluer, et de saluer, à travers vous, les membres de la grande famille mariste, dispersés à travers le monde dans des apostolats variés. Je salue en particulier, et avec reconnaissance, vos supérieurs généraux, le Père Joaquín Fernández, le Frère Benito Arbués, Soeur Gail Reneker et Soeur Patricia Stowers, qui ont exercé au cours de ces dernières années le difficile service de l’autorité dans vos instituts. Mes voeux accompagnent aussi leurs successeurs, qui seront prochainement élus, pour qu’à l’exemple de Marie, ils conduisent avec audace et fidélité la famille mariste sur les chemins du nouveau millénaire !

En vous confiant à Notre Dame de Fourvière, qui vit naître vos instituts, je vous accorde volontiers une particulière Bénédiction apostolique, ainsi qu’à toute la famille mariste.

  

Discours 2001 - MESSAGE DU PAPE JEAN PAUL II AUX PARTICIPANTS À LA RENCONTRE INTERNATIONALE SUR LE TRAVAIL (CITÉ DU VATICAN, 13-15 SEPTEMBRE 2001)