Discours 2001 - Vendredi 26 octobre 2001


AU NOUVEL AMBASSADEUR DU JAPON PRÈS LE SAINT-SIÈGE À L'OCCASION DE LA PRÉSENTATION DES LETTRES DE CRÉANCE

Lundi 29 octobre 2001


  Monsieur l’Ambassadeur,

1. C’est avec plaisir que je souhaite la bienvenue à Votre Excellence à l’occasion de la présentation des Lettres par lesquelles Sa Majesté l’Empereur Akihito L’accrédite auprès du Saint-Siège en qualité d’Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire du Japon. Je remercie Votre Excellence de m'avoir transmis les salutations de son Souverain. Je Lui saurais gré en retour de bien vouloir transmettre à Sa Majesté les voeux que je forme pour sa personne et pour la famille impériale. De même, par l’intermédiaire de Votre Excellence, je désire saluer avec cordialité le peuple japonais et ses dirigeants, demandant au Très-Haut de faire porter des fruits aux efforts de tous pour l'édification d'une société toujours plus fraternelle et plus solidaire, pour le bien de la nation et de l’ensemble des pays de la région.

2. Je suis particulièrement sensible, Monsieur l’Ambassadeur, à vos paroles sur ce que l’Eglise a vécu au cours du grand Jubilé et sur l’attention que vous portez à l’action du Saint-Siège en faveur du respect de la vie humaine, de la paix et de l’entente entre les peuples. Vous venez aussi d’exprimer vos vives préoccupations, qui sont largement répandues dans le monde actuel, concernant les événements qui, depuis quelques semaines, menacent les grands équilibres du monde et qui maintiennent dans l’angoisse des millions de personnes. L’histoire de votre nation au cours du vingtième siècle, marquée en particulier par les jours sombres de Hiroshima et de Nagasaki dont les reportages photographiques faisant apparaître la détresse d’adultes et d’enfants ont fait le tour du monde, continue d’habiter la conscience de la communauté internationale tout entière. C’est pourquoi la profonde et vive attention pour la paix qui caractérise la société japonaise appelle tous les peuples de la terre à faire tout ce qui est en leur pouvoir, au niveau personnel, communautaire et institutionnel, pour que triomphe la cause de la paix et de la fraternité, et que les décisions soient prises à tous les niveaux dans la perspective du bien commun de l’humanité. En ces jours où de nombreux foyers de tensions persistent et se développent, j’appelle de tous mes voeux un engagement renouvelé et toujours plus intense de tous les hommes de bonne volonté, pour que, par le dialogue et la collaboration, chaque peuple puisse avoir une terre et que chaque personne puisse vivre dans la paix. La confiance entre les personnes et entre les peuples fera reculer à tout jamais le terrorisme, qui ne peut nullement ouvrir la voie à la reconnaissance d’un groupe de personnes ou d’une idéologie, ni conduire à un mode de gouvernement dans un pays ou une région.

En effet, l’utilisation de la violence sous toutes ses formes ne permet ni de régler les conflits ni d’établir les bases d’une société respectueuse de tous ses membres; par les blessures qu’elle occasionne, elle éloigne toute vie sociale pacifique et elle réduit à néant les droits les plus fondamentaux des personnes et des peuples à la paix et à un développement intégral et solidaire. Les valeurs religieuses, spirituelles, culturelles et humaines qui fondent la société japonaise et de nombreuses autres sociétés, telles que le respect de la création et de la vie, l’esprit d’ardeur au travail, le sens profond de la solidarité, la capacité d’ouverture à la transcendance, sont des éléments essentiels pour l’édification de la civilisation de l’amour et de la paix; elles ont en particulier leur place dans la conduite de la res publica, pour transformer de l’intérieur la vie politique, économique, sociale et culturelle de la société et lui donner ce surcroît d’humanisme qui fait qu’elle sera toujours davantage au service de l’homme et de la famille.

3. Vous avez rappelé, Monsieur l’Ambassadeur, combien le dialogue entre les civilisations est une condition nécessaire pour qu’advienne la paix. Pour que s’apaisent et se résolvent les conflits et les tensions qui traversent le continent asiatique, ce dialogue doit s’y réaliser de manière toute spéciale, notamment par un échange entre les différents peuples, les différentes cultures et les diverses traditions religieuses et philosophiques, dans le respect de la légitime liberté des personnes et des peuples, notamment en matière religieuse, afin que les religions ne soient jamais prétextes à des actes contraires au respect de tout être humain et de chaque communauté humaine. Au Japon comme ailleurs, le défi du dialogue entre les cultures repose en particulier sur «la conscience qu’il existe des valeurs communes à toutes les cultures, parce qu’elles sont enracinées dans la nature de la personne». Il est donc essentiel de «cultiver l’humus culturel de nature universelle qui rend possible le développement fécond d’un dialogue constructif. Les différentes religions peuvent et doivent, elles aussi, apporter une contribution décisive en ce sens» (Message pour la Journée mondiale de la paix 2001, n. 16).

4. L’Eglise catholique, par la mission qu’elle a reçue du Christ, participe activement à ce dialogue, souhaitant toujours contribuer, en harmonie avec tous les hommes de bonne volonté, à la construction d’une communauté humaine unie et solidaire. J’apprécie la grande estime et la haute réputation dont jouit l’Eglise catholique au Japon, spécialement dans les domaines de l’assistance sociale et de l’éducation. Vous savez que les établissements catholiques d’enseignement ont le souci non seulement de préparer les jeunes à structurer leur intelligence pour une meilleure maîtrise des savoirs, mais aussi de former en eux l’être intégral, pour que, en étant des acteurs de la vie sociale, ils soient d’authentiques serviteurs de l’homme et de la société japonaise, et qu’ils puissent transmettre les valeurs spirituelles et morales nécessaires à leur plein épanouissement et à celui de leurs compatriotes. A l’heure de la mondialisation, qui devrait sensibiliser les nations pour qu’elles prennent conscience «que la situation actuelle d’interdépendance planétaire aide à mieux percevoir la communauté de destin de la famille humaine tout entière» (ibid., n. 17), et au moment où la société japonaise est elle-même affrontée à l’accroissement du chômage, à la désagrégation de la relation interpersonnelle et à la fracture sociale, l’Eglise catholique souhaite faire redécouvrir le sens de la vie et de la destinée véritables de l’homme, afin que se fortifie un réel esprit d’entraide entre les personnes, en vue d’une concorde et d’une justice toujours plus intenses entre toutes les composantes de la nation.

5. Vous me permettrez, Monsieur l’Ambassadeur, de saluer très chaleureusement, par votre intermédiaire, les Evêques du Japon, que j’ai eu la joie d’accueillir ici-même, au cours de cette année, pour leur visite ad limina, ainsi que tous les membres de la communauté catholique. En leur renouvelant mes vifs encouragements, je les invite à demeurer, comme le firent leurs ancêtres dans la foi sur cette terre du Japon, de fidèles disciples du Christ, attentifs à tous leurs frères, en particulier aux plus pauvres et aux jeunes, qui sont rendus très fragiles et dont l’existence est souvent précaire dans un monde marqué par le matérialisme. Puissent-ils, avec tous les Japonais, contribuer à la construction d’une nation unie où chacun se sente respecté, accueilli et reconnu avant tout pour ce qu’il est et non pour la valeur qu’il peut avoir dans l’ordre économique!

6. Au moment où Votre Excellence commence sa mission, je Lui offre mes voeux les meilleurs pour la noble tâche qui L’attend. Je L’assure qu’Elle trouvera toujours un accueil attentif et une compréhension cordiale auprès de mes collaborateurs.

J’invoque de grand coeur sur Sa Majesté l’Empereur, sur la famille impériale, sur le peuple japonais et sur ses dirigeants, sur Votre Excellence et ses proches, ainsi que sur le personnel de l’Ambassade, l’abondance des Bienfaits divins.

           

Novembre 2001



AUX PÈLERINS RÉUNIS POUR LA BÉATIFICATION DE 8 SERVITEURS DE DIEU

Lundi 5 novembre 2001




Vénérés frères dans l'épiscopat et le sacerdoce,
Très chers religieux et religieuses,
Chers frères et soeurs!

1. Quelques jours après la solennité de la Toussaint, lors de laquelle nous avons rendu grâce à Dieu pour les merveilles accomplies chez tant de nos frère et soeurs qui nous ont précédés sur le chemin de la sainteté, l'Eglise continue à être en fête pour la proclamation de huit nouveaux bienheureux, qui a eu lieu hier.

Au cours de la rencontre de ce matin, nous avons l'opportunité de nous confronter avec les enseignements et les témoignages de charité qu'ils nous ont laissés. Tout cela doit nous inciter à trouver la confiance et le courage pour poursuivre le chemin exigeant et exaltant vers la sainteté ""haut degré" de la vie chrétienne ordinaire" (Novo millennio ineunte NM 31).


Pavel Peter Gojdic et Metod Dominik Trcka

2. Mon salut cordial s'adresse tout d'abord à vous, très chers pèlerins provenant de Slovaquie, qui vous réjouissez de la béatification de Pavel Peter Gojdic et de Metod Dominik Trcka. Suivant l'esprit évangélique et l'ardeur apostolique des saints Cyrille et Méthode, apôtres des slaves, les deux nouveaux bienheureux brillent par leur amour pour le Christ, par leur service à leurs frères et par leur fidélité au Siège de Pierre.

Pour exercer son ministère épiscopal, le bienheureux Pavel Gojdic choisit la devise "Dieu est amour, aimons-le!", qu'il traduisait par une dévotion profonde à l'Eucharistie et au Sacré-Coeur. Il nourrit une affection filiale pour la Mère de Dieu, particulièrement vénérée dans l'effigie de la Vierge de Klokocov, qu'il conservait dans la chapelle de sa résidence. Lorsque l'Eglise grecque-catholique fut mise hors-la-loi par le pouvoir d'Etat, le bienheureux Gojdic fut arrêté et emprisonné. Il aurait pu sortir de prison en trahissant sa fidélité à l'Eglise et au Pape; mais il resta fidèle et aujourd'hui, nous le vénérons dans la gloire des bienheureux, comme un exemple de profonde spiritualité et d'activité pastorale illuminée.

Le bienheureux Metod Dominik Trcka, accomplit son travail missionnaire comme Supérieur de la maison de Michalovce et Visiteur apostolique des Soeurs basiliennes à Presov et à Uzhorod, devenant le point de référence de nombreuses personnes en ce qui concerne la vie spirituelle et les initiatives apostoliques. Lors de l'avènement du régime communiste, le Père Trcka fut incarcéré, interrogé à plusieurs reprises, jugé et condamné à douze ans de prison. En raison des privations et des violences subies en prison, il s'éteignit dans sa cellule, en offrant un témoignage héroïque de fidélité à l'Evangile, de solidarité avec son peuple et d'amour pour la tradition du christianisme de rite oriental.


Giovanni Antonio Farina

3. Je m'adresse à présent aux pèlerins de langue italienne, en particulier à ceux qui sont venus à Rome pour participer à la béatification de Giovanni Antonio Farina, qui fut l'Evêque zélé et illuminé, tout d'abord de Trévise, puis de Vicence. Je salue les pasteurs de ces deux diocèses, successeurs du nouveau bienheureux, et les Soeurs Maîtresses de Sainte-Dorothée Filles des Sacré-Coeurs, qu'il a fondées.

Le bienheureux Farina se consacra totalement à l'authentique progrès humain et spirituel du troupeau confié à ses soins. Eprouvant le désir d'être tout à tous, il allait jusqu'à négliger ce qui était nécessaire à sa propre vie. Son intense activité apostolique, au cours de sa jeunesse comme durant les années de sa maturité, fut constamment imprégnée par l'union avec Dieu. Homme de charité, il consacra une attention particulière à la formation de la jeunesse et au soin des indigents, des laissés-pour-compte et des personnes atteintes par toutes sortes de souffrances, répondant aux graves nécessités sociales de l'époque avec une richesse créative et un esprit de total abandon à Dieu.


Paolo Manna

4. La journée missionnaire mondiale, célébrée en octobre, trouve une sorte de prolongement dans la béatification du Père Paolo Manna, qui fut le Supérieur général de l'Institut pontifical des Missions étrangères, un grand apôtre de l'évangélisation "ad gentes". A travers son existence, entièrement consacrée à la cause missionnaire, il fut un authentique précurseur des intuitions et des orientations du Concile oecuménique Vatican II. Le nouveau bienheureux possède le grand mérite d'avoir profondément insisté sur une sainteté sans compromis et sans hésitation, comme prémisse indispensable afin d'être des apôtres authentiques et crédibles de l'Evangile.


Luigi Tezza

Notre regard se tourne à présent vers le bienheureux Luigi Tezza, en qui resplendissent de façon singulière la charité et l'amour envers les plus démunis. Il vécut jour après jour une pleine fidélité à sa vocation, en recherchant, en réalisant constamment la volonté divine et en accomplissant un service généreux et désintéressé à l'égard de son prochain. L'affirmation du Seigneur Jésus: "J'étais malade et vous m'avez visité" (Mt 25, 36) se trouve à la base de son existence de religieux appartenant à l'Ordre des Ministres des malades, et de fondateur de l'Institut des Filles de saint Camille, auxquelles il voulut transmettre le charisme de "témoigner l'amour miséricordieux du Christ envers les malades avec un coeur de mère".


Gaetana Sterni

Gaetana Sterni, fondatrice des Soeurs de la Volonté Divine, sut, elle aussi, mener une vie ordinaire avec un esprit extraordinaire. Elle dut subir de nombreuses souffrances, en particulier au cours de ses années de jeunesse, qui affinèrent cependant sa sensibilité, la rendant capable d'amour gratuit, de pardon, de disponibilité envers les pauvres. Vivant dans un état de recherche et d'accomplissement permanent de la volonté de Dieu, elle comprit qu'accomplir la volonté divine signifiait s'engager à faire ressortir, avec la force de l'amour, le bien du mal lui-même, à la manière de Jésus. C'est précisément pour cela que le témoignage de sa vie est plus que jamais nécessaire, également à notre époque.


Bartolomeu dos Mártires

5. Le bienheureux Bartolomeu dos Mártires, dominicain par vocation et par idéal de vie, brûlait de zèle pour la cause de Dieu qui est le salut des hommes, en illuminant la voie par l'Evangile. Fidèle à la règle apostolique, "nous resterons assidus à la prière et au service de la parole" (Ac 6,4), il entraîna le clergé avec lui: il en promut la formation permanente, il mit à sa disposition les moyens utiles pour prêcher au peuple et il fonda le séminaire, afin de préparer dignement les futurs prêtres.
Le séminaire était seulement l'un des moyens de la réforme préconisée par le Concile de Trente, auquel il se consacra coeur et âme, non sans affronter des obstacles, certains ayant des répercussions ici à Rome. Le Pape Pie IV s'exprima ainsi, en parlant de Frère Bartolomeu: "Il nous donna une telle satisfaction à l'époque où il participa au Concile, en raison de sa bonté, de sa religion et de sa dévotion, que nous continuons à le tenir en grande considération, en ayant une telle opinion de son honneur et de sa vertu qu'elle ne pourra être altérée par les critiques d'aucune personne" (Lettre au Roi du Portugal, Cardinal Dom Henrique). Hier, à travers l'acte de sa béatification, j'ai pu confirmer ces sentiments de mon prédécesseur. Je salue l'Eglise de Lisbonne, qui a été son berceau, et de Viana do Castelo, qui l'accueillit au cours de ses dernières années et qui conserve la vénérable relique de sa dépouille mortelle. Je salue également l'archidiocèse de Braga tel qu'il était alors, et tout le Portugal qu'il servit et qu'il aima, en particulier dans la personne des pauvres.


Maria Pilar Izquierdo

6. Je salue avec une grande affection tous les pèlerins qui ont participé hier à la béatification de Mère Maria Pilar Izquierdo, provenant des lieux où l'Oeuvre missionnaire de Jésus et Marie est présente. En Europe: d'Espagne et d'Italie; en Amérique: de Colombie, de l'Equateur et du Venezuela; en Afrique: dans les villes de Nacala et de Maputo, au Mozambique.

Dans le monde actuel, où prévaut parfois la recherche démesurée du plaisir et de l'utilité immédiate, la figure de Mère Pilar Izquierdo proclame avec une sublime éloquence la valeur rédemptrice du sacrifice, librement accepté et offert, en même temps que celui du Christ pour le salut du genre humain. La bienheureuse Pilar Izquierdo fut une authentique apôtre de la diffusion de l'Evangile. Avec un groupe de disciples, elle se consacra à son annonce dans les quartiers pauvres et marginaux, affamés de pain et surtout de Dieu, au cours d'une période de sa vie où ne manquèrent pas les incompréhensions de toutes sortes. Elle ne perdit jamais son amour pour le sacrifice, constituant en ce sens un exemple lumineux pour ceux qui, même face à de nombreuses difficultés, ont consacré leur vie à la cause du Royaume des Cieux.


7. Très chers frères et soeurs! Nous adressons notre prière au Seigneur pour implorer également pour nous la même foi, le même courage et le même dévouement qui ont fait la grandeur de ces huit nouveaux bienheureux.


Que leur intercession céleste nous soutienne toujours, de même que celle de la Vierge Marie, à la protection maternelle de laquelle je vous confie tous, ainsi que vos familles et vos communautés d'origine, alors que je donne de tout coeur à chacun une Bénédiction spéciale.


  MESSAGE AU PRÉSIDENT DE LA CONFÉRENCE DES ÉVÊQUES DE FRANCE


A Monsieur le Cardinal Louis-Marie Billé
Archevêque de Lyon,
Président de la Conférence des Evêques de France

1. Au moment où à Lourdes de nombreux pèlerins, autour des évêques de France réunis en assemblée plénière, s’apprêtent à célébrer solennellement le centenaire de la consécration de la basilique Notre-Dame du Rosaire, je suis heureux d’adresser à tous mes cordiales salutations et de m’unir par la prière à leur action de grâce pour les bienfaits spirituels obtenus en ce lieu et pour les démarches de conversions qui s’y sont opérées. Afin de célébrer les merveilles de Dieu, il est heureux que les chorales liturgiques de France, rassemblées auprès des sanctuaires, accompagnent la prière des fidèles et de ceux qui s’associent à la célébration eucharistique grâce aux médias.

2. Le 6 octobre 1901, mon prédécesseur le Pape Léon XIII invitait tous les évêques du monde à partager la joie que lui procurait la consécration de cette église dédiée à Notre-Dame du Rosaire, se félicitant de l’occasion ainsi offerte aux chrétiens d’approfondir la signification de la pratique antique et vénérable de la prière à la Mère de Dieu. En effet, comme cela ressort de toute la tradition liturgique, l’Eglise tient en grande considération le culte envers Marie, indissolublement lié à la foi au Christ

3. Parabole vivante de pierre et de lumière, cette basilique déploie aux yeux des pèlerins les quinze mystères de la vie du Christ, révélant ainsi le sens profond du Rosaire. Cette prière, centrée sur la contemplation de l’Incarnation rédemptrice, nous fait participer sous la conduite de la Vierge Marie aux actes du Sauveur. Avec cette Mère très pure, nous parcourons l’histoire du salut et, à travers la méditation des mystères du Rosaire, nous accueillons l’amour de Dieu, manifesté de manière sublime dans le don du Verbe Incarné. Ainsi, grâce au culte rendu à la Vierge, l’Eglise ne perd jamais de vue son but ultime qui est "de glorifier Dieu et d’engager les chrétiens dans une vie totalement conforme à sa volonté" (Paul VI, Exhortation apost. Marialis cultus, n. 39).

4. A l’aube du troisième millénaire, c’est le Christ que nous sommes invités à «connaître, aimer et imiter, pour vivre en lui la vie trinitaire et pour transformer avec lui l’histoire jusqu’à son achèvement dans la Jérusalem céleste» (Lettre apost. Novo millennio ineunte NM 29). Comme le disait saint Louis-Marie Grignion de Montfort, il est impossible «qu'une personne puisse acquérir une union intime avec Notre Seigneur et une parfaite fidélité au Saint-Esprit sans une très grande union avec la Très Sainte Vierge» (Traité de la vraie dévotion). J’encourage donc vivement les fidèles à grandir dans la connaissance des mystères du Christ par la méditation du chapelet, le laissant peu à peu purifier et illuminer leurs âmes pour devenir, à la suite de Marie, de véritables disciples du Seigneur et pour conformer leurs vies à la Passion et à la Résurrection du Sauveur.

5. Invoquant l’intercession de Notre-Dame de Lourdes et de sainte Bernadette, je vous accorde la Bénédiction apostolique, que j’étends bien volontiers à Mgr Jacques Perrier, évêque de Tarbes et Lourdes, à tous les évêques, aux chorales liturgiques réunies dans le cadre d’Ancoli, aux fidèles rassemblés et à ceux qui sont en communion avec eux par le moyen de la radio et de la télévision, ainsi qu’à tous les pèlerins qui, à l’occasion des fêtes du centenaire de cette consécration, viendront en ce lieu.

Du Vatican, le 7 octobre 2001.

IOANNES PAULUS II



AUX RESPONSABLES DU "POPE JOHN PAUL II CULTURAL CENTER" DE WASHINGTON

Mardi 6 novembre 2001


  Eminences,
Chers amis,

Je suis heureux de vous souhaiter la bienvenue au Vatican pour la première fois depuis l'inauguration du nouveau Centre culturel de Washington. Je remercie le Cardinal Maida pour les paroles courtoises qu'il m'a adressées et pour son compte-rendu relatif aux progrès de la mission du Centre en matière de promotion du dialogue ecclésial sous les différentes formes dans lesquelles s'exprime l'aspiration universelle de l'homme à la vérité.

Les événements qui ont ébranlé la Communauté internationale au cours de ces deux derniers mois nous ont rendus tous conscients, une fois de plus, de la fragilité de la paix et de la nécessité de construire une culture du dialogue et de la coopération respectueuse entre tous les membres de la famille humaine. J'ai confiance dans le fait que la communauté catholique des Etats-Unis continuera d'affirmer les valeurs de la compréhension et du dialogue entre les fidèles des religions du monde. Comme vous le savez, l'engagement de l'Eglise dans ce dialogue s'inspire de sa propre conviction selon laquelle le message évangélique a le pouvoir d'illuminer toutes les cultures et d'agir comme levain salvifique d'unité et de paix pour toute l'humanité. Dans un monde où croît le pluralisme culturel et religieux, un tel dialogue est essentiel pour surmonter les conflits tragiques hérités du passé et pour garantir que "le nom du Dieu unique doit devenir toujours plus ce qu'il est, un nom de paix et un impératif de paix" (Novo millennio ineunte NM 55).

Le Centre culturel peut offrir sa contribution à cette importante entreprise. Encore une fois, je profite de l'occasion pour vous remercier, tout comme les nombreux bienfaiteurs du Centre, pour votre engagement constant dans la mission d'expansion de l'Eglise et de diffusion de sa doctrine. En invoquant sur vous et sur vos familles la paix du Christ qui dépasse toute intelligence (cf. Ph Ph 4,7), je vous donne de tout coeur ma Bénédiction apostolique.

 

AU COURS DE LA SÉANCE PUBLIQUE DES ACADÉMIES PONTIFICALES

Jeudi 8 novembre 2001



Messieurs les Cardinaux,
Messieurs les Ambassadeurs,
Chers académiciens pontificaux,
Très chers frères et soeurs!

1. Je suis heureux d'adresser mon salut cordial à chacun d'entre vous qui, à l'occasion de cette Séance publique des Académies pontificales, désirez renouveler votre fidélité au Successeur de Pierre et votre engagement en vue de la promotion de l'humanisme chrétien à l'heure de la mondialisation.

J'adresse une pensée affectueuse au Cardinal Paul Poupard, Président du Conseil de coordination des Académies pontificales, et je le remercie des paroles qu'il a voulu m'adresser au nom des personnes présentes. Avec lui, je salue les Cardinaux, mes Frères dans l'épiscopat, les Ambassadeurs, les prêtres, les personnes consacrées, ainsi que les membres de la Chorale interuniversitaire de Rome qui ont voulu enrichir notre rencontre par la beauté de la musique.

2. Cette année, l'Académie pontificale Saint-Thomas d'Aquin et l'Académie pontificale de Théologie organisent la Séance publique sur le thème: Dimensions culturelles de la mondialisation: un défi pour l'humanisme chrétien. Ainsi que je l'ai rappelé plusieurs fois, les aspects culturels et éthiques de la mondialisation constituent pour la communauté chrétienne un motif d'intérêt spécial et de plus grande attention par rapport aux effets purement économiques et financiers du phénomène.

La réflexion chrétienne à propos de la mondialisation peut trouver des indications utiles dans l'événement de la Pentecôte. Saint Luc, dans les Actes des Apôtres, raconte que, remplis de l'Esprit Saint, les Apôtres "commencèrent à parler en d'autres langues, selon que l'Esprit leur donnait de s'exprimer" et la foule nombreuse, provenant "de toutes les nations qui sont sous le ciel", entendit annoncer dans les diverses langues du monde "les merveilles de Dieu" (cf. Ac 2,4-11). L'Eglise, envoyée aux nations pour être "sacrement universel du salut" (Lumen gentium LG 48), au début du troisième millénaire - tertio millennio ineunte - continue de parcourir les mille routes du monde pour annoncer partout l'Evangile de Jésus, "le Chemin, la Vérité et la Vie" (Jn 14,6). En enseignant toutes les nations (cf. Mt 28,19), elle inscrit dans les cultures du monde le sel de la vérité et le feu de la charité avec la nouveauté et le salut apportés par le Christ. Dans sa mission quotidienne, l'Eglise "parle toutes les langues, comprend et embrasse dans sa charité toutes les langues, et triomphe ainsi de la dispersion de Babel" (Ad gentes AGD 4).

Experte en humanité, elle est interpellée afin de discerner et d'évaluer le novum culturel produit par la mondialisation. Il s'agit d'un novum qui concerne l'ensemble de la communauté des hommes, appelée par Dieu, Créateur et Père, à former une seule famille au sein de laquelle sont reconnus à tous les mêmes droits et devoirs, en vertu de la dignité commune et fondamentale de la personne humaine.


3. Le discernement que nous sommes appelés à opérer en tant que disciples du Christ, tout en concernant également l'aspect économique et financier de la mondialisation, a pour objet premier ses inévitables conséquences humaines, culturelles et spirituelles. Quelle image de l'homme est proposée et, dans un certain sens, imposée? Quelle culture est favorisée? Quel espace est réservé à l'expérience de foi et à la vie intérieure?

On a l'impression que les dynamiques complexes, provoquées par la mondialisation de l'économie et par les moyens de communication, tendent à réduire progressivement l'homme à l'état de valeur variable de marché, de monnaie d'échange, de facteur sans aucune importance dans les choix fondamentaux. L'homme risque de se sentir ainsi écrasé par des mécanismes de dimensions mondiales sans visage et de perdre toujours davantage son identité et sa dignité de personne.

En raison de telles dynamiques, les cultures elles-mêmes, si elles ne sont pas accueillies et respectées dans leur propre originalité et richesse, mais adaptées de force aux exigences du marché et des modes, peuvent courir le risque de l'homologation. Il en découle un produit culturel caractérisé par un syncrétisme superficiel, dans lequel s'imposent de nouvelles échelles de valeurs, dérivant de critères souvent arbitraires, matérialistes et consuméristes et, qui plus est, réticents à toute ouverture au Transcendant.


4. Ce grand défi, qui au début du nouveau millénaire, met en jeu la vision même de l'homme, son destin et l'avenir de l'humanité, impose un discernement attentif et approfondi, intellectuel et théologique du paradigme anthropologique et culturel produit par ces changements radicaux. Dans ce contexte, les Académies pontificales peuvent offrir une contribution précieuse, en orientant les choix culturels de la communauté chrétienne et de toute la société et en proposant des occasions et des instruments de dialogue entre foi et culture, entre révélation et problématiques humaines. Elles sont par ailleurs appelées à suggérer des parcours de connaissance critique et de dialogue authentique qui placent toujours l'homme et sa dignité au centre de tout projet, afin d'en promouvoir le développement intégral et solidaire.

Il faut vaincre toute peur et affronter de tels défis radicaux, confiants dans la lumière et dans la force de l'Esprit que le Seigneur ressuscité continue de donner à son Eglise. "Duc in altum! - Avance en eau profonde!", ai-je répété plusieurs fois dans la Lettre apostolique Novo millennio ineunte. Aujourd'hui, je vous confie, à vous aussi, cette invitation du Christ afin que vous puissiez affronter avec courage et compétence les problèmes, multiples et complexes de notre temps, pour soutenir un humanisme dans lequel l'homme puisse retrouver la joie d'être l'image la plus vivante et la plus belle du Créateur.


5. Très chers frères et soeurs! Comme vous le savez bien, il y a six ans, j'ai institué le Prix des Académies pontificales, afin de susciter de nouveaux talents et d'encourager l'engagement de jeunes chercheurs, d'artistes et d'institutions qui consacrent leur activité à promouvoir l'humanisme chrétien. Accueillant la proposition du Conseil de coordination des Académies pontificales, en cette occasion solennelle, je suis heureux de remettre ce prix à Mlle Pia Francesca de Solenni, pour son travail en théologie thomiste intitulé: A Hermeneutic of Aquina's Mens through a Sexually Differenciated Epistemology. Towards an Understanding of Woman as Imago Dei, présenté à l'Université pontificale Sainte-Croix.

Je désire par ailleurs offrir, en signe d'estime, une médaille du pontificat à M. Johannes Nebel, membre de la famille spirituelle "L'Opera" qui vient juste de finir sa maîtrise, pour sa thèse sur Die Entwicklung des römischen Messritus im ersten Jahrtausend anhand der Ordines Romani. Eine synoptische Darstellung, présenté au Collège pontifical Saint-Anselme de Rome.

Au terme de cette Séance solennelle, je tiens à manifester à tous les Académiciens, et spécialement aux membres des Académies pontificales de Théologie et Saint-Thomas, ma vive satisfaction pour leur activité et exprimer le souhait d'un engagement renouvelé dans les domaines philosophique et théologique, ainsi qu'en matière de formation des jeunes chercheurs.

Avec de tels sentiments, je confie chacun d'entre vous, ainsi que votre précieuse oeuvre d'étude et de recherche, à la protection maternelle de la Vierge Marie, Sedes sapientiae, et je vous donne à tous et de tout coeur une Bénédiction apostolique spéciale.

 


AUX PARTICIPANTS À L'ASSEMBLÉE PLÉNIÈRE DU CONSEIL PONTIFICAL POUR LE DIALOGUE INTERRELIGIEUX

Vendredi 9 novembre 2001



Cher Cardinal Arinze,
Très chers frères et soeurs dans le Seigneur,

1. C'est avec un grand plaisir que je vous salue, vous tous qui participez à l'Assemblée plénière du Conseil pontifical pour le Dialogue interreligieux: "A vous grâce et paix de par Dieu, notre Père, et le Seigneur Jésus-Christ" (1Co 1,3).

Votre Assemblée réfléchit actuellement sur le progrès du dialogue interreligieux à un moment où toute l'humanité est encore sous le choc des événements du 11 septembre dernier. Certains ont dit que nous assistons à un véritable conflit entre religions. Toutefois, comme je l'ai déjà affirmé à de nombreuses occasions, cela signifierait défigurer la religion elle-même. Les croyants savent que, loin de devoir accomplir le mal, ils sont obligés de faire le bien, d'oeuvrer pour soulager la souffrance humaine et, dans le même temps, d'édifier ensemble un monde juste et harmonieux.


2. S'il est impératif que la Communauté internationale promeuve de bons rapports entre les personnes appartenant à diverses traditions ethniques et religieuses, il est d'autant plus urgent que les croyants eux-mêmes promeuvent des rapports caractérisés par l'ouverture et la confiance, qui conduisent à une préoccupation commune pour le bien-être de toute la famille humaine.

Dans ma Lettre apostolique Novo millennio ineunte, j'ai écrit: "Dans un contexte de pluralisme culturel et religieux plus marqué, tel qu'il est prévisible dans la société du nouveau millénaire, un tel dialogue est important pour assurer aussi les conditions de la paix et éloigner le spectre épouvantable des guerres de religion qui ont ensanglanté tant de périodes de l'histoire humaine. Le nom du Dieu unique doit devenir toujours plus ce qu'il est, un nom de paix et un impératif de paix" (NM 55). Nous savons combien il est difficile d'atteindre cet objectif, et nous en faisons l'expérience chaque jour. En effet, nous comprenons que la paix ne sera pas le résultat de nos efforts. Il ne s'agit pas de quelque chose que le monde peut donner. C'est un don du Seigneur. Pour le recevoir, nous devons préparer notre coeur. Lorsque des conflits naissent, la paix ne peut être que le résultat d'un processus de réconciliation, qui exige humilité et générosité.


3. En ce qui concerne le Saint-Siège, c'est votre Conseil qui, dès son institution par mon prédécesseur le Pape Paul VI en tant que Secrétariat pour les Non-Chrétiens, a reçu la tâche particulière de promouvoir le dialogue interreligieux. Au cours des années, le Conseil a contribué à approfondir des contacts avec les représentants des diverses religions, dans un esprit croissant de compréhension et de coopération, un esprit qui est apparu de façon évidente, par exemple, à l'occasion de l'Assemblée interreligieuse qui s'est déroulée ici, au Vatican, à la veille du grand Jubilé. Au cours de la cérémonie de conclusion de cette Assemblée, j'ai rappelé que l'une des tâches fondamentales que nous devons accomplir consiste à montrer de quelle façon la croyance religieuse inspire la paix, encourage la solidarité, promeut la justice et soutient la liberté (cf. Discours à l'Assemblée interreligieuse, Place Saint-Pierre, 28 octobre 1999; cf. ORLF n. 44 du 2 novembre 1999).


4. Je formule ces brèves observations en rappelant le thème choisi pour votre Assemblée plénière, "La spiritualité du dialogue". Vous avez choisi de réfléchir sur l'inspiration spirituelle qui devrait soutenir ceux qui sont engagés dans le dialogue interreligieux. Lorsque, nous chrétiens, nous considérons la nature de Dieu telle qu'elle est révélée dans les Ecritures et surtout en Jésus-Christ, nous comprenons que la communion du Père, du Fils et de l'Esprit Saint est le modèle parfait et éminent du dialogue entre les êtres humains. La Révélation nous enseigne que Dieu a toujours entretenu un dialogue avec l'humanité, un dialogue qui imprègne l'Ancien Testament et qui atteint son point culminant dans la plénitude des temps, quand Dieu parle directement à travers son Fils (cf. He He 1,2). Par conséquent, dans le dialogue interreligieux, nous devons garder à l'esprit l'exhortation de saint Paul : "Ayez entre vous les mêmes sentiments qui sont dans le Christ Jésus" (Ph 2,5). L'Apôtre poursuit ensuite en soulignant l'humilité de Jésus, sa kenosis. C'est dans la mesure où, comme le Christ, nous sommes capables de nous dépouiller de nous-mêmes, que nous serons vraiment en mesure d'ouvrir notre coeur aux autres et de marcher avec eux comme des compagnons de voyage vers le destin que Dieu a préparé pour nous.


5. Cette référence à la kenosis du Fils de Dieu sert à nous rappeler que le dialogue n'est pas toujours facile, ni exempt de souffrances. Des incompréhensions peuvent naître, des préjugés peuvent également faire obstacle à l'accord commun et la main tendue en signe d'amitié peut être refusée. Une authentique spiritualité du dialogue doit prendre en considération ces situations et fournir des motivations pour continuer, même face à des oppositions ou lorsque les résultats apparaissent médiocres. Une grande patience sera toujours nécessaire, car les fruits viendront en leur temps (cf. Ps 1,3), lorsque ceux qui auront semé dans les larmes moissonneront dans la joie (cf. Ps 126,5).

Dans le même temps, le contact avec les fidèles d'autres religions est souvent une source de grande joie et d'encouragement. Il nous conduit à découvrir de quelle façon Dieu est à l'oeuvre dans l'esprit et dans le coeur des personnes, ainsi que dans leurs rites et leurs coutumes. Ce que Dieu a semé de cette façon peut être purifié et perfectionné à travers le dialogue (cf. Lumen gentium LG 17). La spiritualité du dialogue cherchera donc à discerner soigneusement l'action de l'Esprit Saint et rendra grâce pour les fruits d'amour, de joie et de paix que l'Esprit apporte.


6. Que Marie, Mère de Jésus et Mère de l'Eglise, intercède pour vous tous, que le Père céleste vous emplisse de sagesse et de force, afin que vous suiviez et encouragiez les autres à suivre le chemin authentique du dialogue! Avec gratitude, je vous donne de tout coeur ma Bénédiction apostolique.

 


Discours 2001 - Vendredi 26 octobre 2001