Discours 2001 - Mardi 11 décembre 2001

     

Rencontre des pasteurs des Eglises de Terre Sainte

L'avenir des chrétiens en Terre Sainte

Jeudi 13 décembre 2001




Chers frères dans l'épiscopat et le sacerdoce!

Comme cela vous a déjà été précisé dans la lettre d'invitation, la rencontre d'aujourd'hui désire rappeler une fois de plus l'intérêt et la préoccupation avec lesquels le Saint-Siège suit la situation en Terre Sainte, partageant, à travers une proximité spirituelle particulière, le drame de ces populations, depuis longtemps durement éprouvées par des actes de violence et de discrimination.

Cette rencontre désire également témoigner de la sollicitude de toute l'Eglise pour les chrétiens de Terre Sainte, en particulier pour la communauté catholique, et manifester l'engagement commun pour la continuité de sa présence millénaire dans cette région et offrir sa contribution en vue de la justice et la réconciliation entre tous ceux dont les racines de la foi se trouvent dans ces lieux.
Malheureusement, nous sommes réunis à un moment que je n'hésite pas à qualifier de "dramatique", que ce soit pour les populations qui habitent dans ces chères régions, ou pour nos frères dans la foi. En effet, ceux-ci semblent écrasés par le poids de deux extrémismes différents qui, indépendamment des raisons qui les nourissent, défigurent le visage de la Terre Sainte.

A l'occasion du début du grand Jubilé de l'An 2000, les Patriarches et les responsables des communautés chrétiennes de Terre Sainte ont lancé à leurs fidèles et aux chrétiens du monde entier un message de foi, d'espérance et de charité; un message spirituel qui, de la grotte de Bethléem, invitait avec courage et détermination, tous les habitants de Terre Sainte et du monde entier à vivre dans la justice et dans la paix.

Nous aurions tant voulu que ce message soit aussitôt écouté et mis en pratique! Nous aurions tant voulu ne plus avoir à le répéter! Nous aurions tant voulu voir nos frères juifs et musulmans marcher avec nous, en un pacte solidaire d'amour, pour restituer à la Terre Sainte son véritable visage de "carrefour de la paix" et de "terre de la paix".

C'est à vous, chers frères dans l'épiscopat de Terre Sainte, que revient le lourd devoir de continuer à être des témoins de la présence de Dieu sur ces terres et d'apporter son message dans les milieux à majorité musulmane ou juive.

Dans votre message à l'occasion du début de l'année jubilaire (4 décembre 1999), en soulignant que votre vocation consiste à "être chrétiens en Terre Sainte et non pas dans un autre pays du monde", vous avez invité chacun à ne pas se laisser vaincre par la peur et à ne pas perdre espoir face aux difficultés: "Devant tout problème - lit-on dans votre touchant message - restons fermes avec la force de l'Esprit de Dieu et celle de son amour... La vie au troisième millénaire exige de nous une réflexion profonde et une plus grande conscience de notre identité et de notre mission, afin d'accepter ce que Dieu veut pour nous aujourd'hui et demain dans notre Terre Sainte".

Aujourd'hui également, comme je le fis au cours de la rencontre avec vous à Amman, le 21 mars 2000, je vous invite à avoir confiance dans le Seigneur, à demeurer unis à Lui dans la prière, afin que Lui, votre Lumière, vous aide à guider le troupeau qui vous a été confié. La présence ici parmi nous de plusieurs confrères qui représentent l'épiscopat du monde entier témoigne que, dans votre tâche difficile, vous n'êtes pas seuls: l'Eglise tout entière est avec vous. L'Eglise tout entière partage vos préoccupations, soutient vos efforts quotidiens, est proche des souffrances de vos fidèles et, à travers la prière, maintient vivante son espérance. Oui, toute l'Eglise, en ce temps de l'Avent, s'écrie: "Viens, Seigneur, nous visiter avec ta paix: Ta présence nous remplit de joie" (cf. Is 38,3).

     

AUX MEMBRES DU SÉNAT ACADÉMIQUE DE L’UNIVERSITÉ "KARDYNAL STEFAN WYSZYNSKI" DE VARSOVIE (POLOGNE)

Samedi 15 décembre 2001




Je vous adresse une cordiale bienvenue à tous, et je vous remercie pour la bienveillance que vous m'avez exprimée en me remettant le titre de docteur Honoris causa de votre Université. Je l'accepte avec gratitude, par égard au souvenir cordial du Primat du Millénaire, dont votre Université porte le nom, en particulier parce que cette année, à l'occasion du centième anniversaire de sa naissance, revivent de façon particulière les souvenirs de ce grand pasteur et homme d'Etat. J'accepte ce titre également en raison de l'espérance que je nourris, celle que l'Université, qui porte le nom du Cardinal Stefan Wyszynski, dont l'histoire est brève mais les racines anciennes, se développe sous chaque aspect et devienne un centre scientifique et culturel toujours plus dynamique et toujours plus important en Pologne.

Avant de partager avec vous la réflexion qui s'élève de mon âme en ce jour, je voudrais saluer Monsieur le Cardinal-Primat, grand Chancelier de l'Université, et le Recteur magnifique. Je leur suis reconnaissant des paroles qu'ils m'ont adressées. J'embrasse également dans une pensée cordiale chacun de vous: le Sénat, les professeurs, le personnel enseignant et administratif, les étudiants, les personnes qui vous accompagnent et le choeur. Je vous remercie de votre présence et de votre proximité spirituelle.

Le portrait du Cardinal Wyszynski comme celui d'un grand Pasteur est souvent associé à l'oeuvre de préparation de l'Eglise de Pologne à l'entrée dans le nouveau millénaire du christianisme. Lorsque, au contraire, nous parlons de lui comme d'un homme d'Etat, nous avons habituellement à l'esprit son attitude ferme à l'égard de l'athéisme communiste, du totalitarisme: grâce à cette attitude, l'Eglise, malgré de dures épreuves, a réussi à maintenir sa position dans la nation et la juste direction de son développement interne. Il semble que cette façon de voir sa personne, bien que juste sous tout point de vue, exige aujourd'hui un certain approfondissement. Il faut souligner le fait, qui semble rarement être mis en valeur, que le Cardinal Wyszynski, que ce soit comme pasteur ou comme homme d'Etat, mettait un profond accent sur le rôle de la culture, entendue dans son sens large, dans la formation du visage spirituel de l'Eglise et de la nation. Il ne séparait même jamais ces deux domaines dans l'influence exercée par la culture. Cette question devait lui tenir très à coeur puisque, en 1966, il dit: "Les études sur notre passé culturel, à cause du travail de l'Eglise et de l'inspiration que l'Eglise donne à l'art et à toute sorte de créativité, sont toujours ouvertes et très souhaitables. L'actuel appauvrissement de la pensée [...] met en évidence une certaine malchance de la culture, vécue comme conséquence de l'abandon des inspirations religieuses" (Varsovie, 23/06/1966).

Le passé culturel, le patrimoine de l'effort créatif de la pensée et du travail de générations animées par l'esprit de foi enraciné dans l'Evangile, est le fondement de l'identité de la nation polonaise. Le Primat du Millénaire indiquait à juste titre la nécessité d'étudier ce patrimoine, de connaître les fondements qui, mille ans auparavant, furent placés sous l'inspiration que, de génération en génération, la communauté de l'Eglise unie autour du Christ porte en elle, inspirée par l'Esprit Saint en chemin vers la maison du Père. N'est-ce pas là le premier devoir des Universités? Plus encore, n'est-ce pas là le devoir d'une Université qui porte le nom du Primat du Millénaire? De même que le siège primatial de Gniezno conserve la tradition religieuse de saint Adalbert, ainsi votre Université préserve le patrimoine culturel qui a sa source dans cette tradition. Soyez fidèles à l'appel du Cardinal Stefan Wyszynski à porter un grand intérêt à la culture.

Récemment, j'ai parlé à plusieurs reprises aux représentants des centres universitaires polonais de la nécessité urgente non seulement de la formation intellectuelle de la jeune génération, mais également de celle de former en elle l'esprit d'un sain patriotisme, qui consiste précisément dans une découverte incessante des racines de son identité humaine, nationale et religieuse, et dans l'effort de participer à la création d'un tel patrimoine, dont est issue la réalité d'aujourd'hui. La conscience de ce que je suis et la capacité d'assumer la responsabilité de ce que je suis, permettra aux générations successives de jeunes Polonais de puiser dans la totalité, mais sans sentiment d'égarement, au riche patrimoine de la culture européenne et mondiale. Elle leur permettra de faire la distinction entre les valeurs éternelles et authentiques de l'esprit humain et les substituts illusoires du bien, qui prennent forme dans l'impératif culturel d'aujourd'hui.

A l'époque du Cardinal Wyszynski, on a dû souligner l'importance de la culture et de la science pour la survie de la nation face aux dangers du totalitarisme. Il semble qu'aujourd'hui, en continuant cette oeuvre face aux autres menaces soulevées par le nouveau siècle, il faille aller au-delà. Nous observons le processus d'unification des pays d'Europe et de la mondialisation de nombreux secteurs de la vie dans le monde. Ce processus ne peut se réaliser sans prendre en considération les traditions spirituelles et culturelles des nations. Il faut donc faire en sorte qu'il se déroule dans le cadre d'une participation positive et créative des personnes et des milieux responsables de la culture, de la conservation et du développement de l'héritage de siècles entiers.

Il y a quelques jours, je disais aux étudiants réunis dans la basilique Saint-Pierre: "L'Europe a besoin d'une nouvelle vitalité intellectuelle. Une vitalité qui propose des projets de vie austère, marqués par la nécessité de l'engagement et du sacrifice, simples quant à ses légitimes aspirations, droite dans sa réalisation, transparente dans son comportement. Une nouvelle hardiesse dans la pensée, libre et créatrice, prête à recueillir, dans la perspective de la foi, les questions et les défis proposés par la vie, de façon à y faire apparaître clairement les vérités dernières sur l'homme est nécessaire [...] Vous êtes une sorte de symbole de l'Europe, que vous devez construire ensemble" (Messe en préparation de Noël pour les étudiants des Universités romaines, 11 décembre 2001, cf. ORLF n. 51/52 du 18 décembre 2001). Aujourd'hui, je vous adresse à vous, représentants de l'Université "Kardynal Stefan Wyszynski", ces paroles, prononcées il y a quelques jours, en espérant que celles-ci, à travers l'honnête engagement scientifique des professeurs et des étudiants, contribuent à former le visage spirituel non seulement de la Pologne, mais de l'Europe tout entière. Il s'agit d'une grande tâche, - qui pourrait même sembler trop grande - mais c'est une mission à laquelle est appelé chaque milieu scientifique européen qui se réfère à la tradition chrétienne. Acceptez avec confiance cet appel. La jeunesse de votre Institution peut être votre force, la source de nouvelles énergies qui jaillissent de la façon nouvelle d'affronter les problèmes auxquels les autres milieux scientifiques sont confrontés depuis des siècles. Exploitez les possibilités qui découlent de la jeunesse - de la jeunesse de l'institution et de la jeunesse de l'esprit! De votre jeunesse!

Tel est également mon souhait pour toute l'Université "Kardynal Stefan Wyszynski": que celle-ci se développe, vibre d'une vie créative, s'insère avec élan dans l'avenir de la Pologne et de l'Europe, façonnant son identité spirituelle, et conservant toute la richesse du patrimoine chrétien. Que la Bénédiction divine accompagne votre travail créatif et éducatif.

Je veux encore saluer les représentants de la jeunesse de Varsovie, qui ont apporté un don particulier: la photo des huit mille participants à la rencontre de prière qui s'est déroulée le 22 septembre aux champs de Wilanów. Je vous remercie cordialement pour cette expression de souvenir et de bienveillance, et surtout pour le don de votre prière. Je vous bénis de tout coeur, ainsi que tous les jeunes de Varsovie et de Pologne.

Le Cardinal-Primat m'avait demandé de bénir, à l'occasion de notre rencontre, la copie de l'image de la Madone de Czestochowa, qui poursuivra son pèlerinage de paroisse en paroisse dans les diocèses de Pologne. Je le fais avec plaisir. Je sais combien elle contribue au bien spirituel. Il s'agit d'une référence particulièrement riche à l'oeuvre du Millénaire réalisée par le Cardinal Wyszynski. Je bénis de tout coeur tous ceux qui devant cette effigie, demanderont à être confirmés dans la foi, dans l'espérance et la charité. Que la protection de Notre-Dame de Jasna Góra vous accompagne tous, mes concitoyens de Pologne. Que Dieu vous remplisse de grâce!



AU NOUVEL AMBASSADEUR DE BULGARIE PRÈS LE SAINT-SIÈGE À L'OCCASION DE LA PRÉSENTATION DES LETTRES DE CRÉANCE

Vendredi 21 décembre 2001



Monsieur l’Ambassadeur,


1. Je suis heureux d’accueillir Votre Excellence pour la présentation des lettres qui L’accréditent comme Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de la République de Bulgarie auprès du Saint-Siège. Je La remercie de ses paroles courtoises et je Lui saurai gré de bien vouloir remercier Monsieur le Président de la République de ses voeux aimables et de L’assurer en retour de mes souhaits pour sa personne et pour le peuple bulgare.

2. Comme vous l’avez fait remarquer, même si les relations diplomatiques entre la Bulgarie et le Saint-Siège ont été récemment réinstaurées, en revanche les liens entre l’Église catholique et le peuple bulgare remontent au premier millénaire de notre ère, à l’époque de la conversion de l’Europe orientale à la foi chrétienne, sous l’impulsion décisive des deux frères Cyrille et Méthode. En traduisant la Bible dans la langue locale, en adaptant la liturgie byzantine et le droit, ils ont vraiment semé la Bonne Nouvelle dans la terre slave et ils ont fait naître une culture originale nourrie de la tradition chrétienne, qui est reconnue aujourd’hui par tous les peuples slaves comme une matrice de leur identité. À une époque où l’Europe connaissait de profondes divisions, dues aux rivalités politiques des deux empires byzantin et carolingien, et où l’Église elle-même connaissait la désunion, ils ont travaillé en ardents serviteurs de l’unité dans l’Église mais aussi en faveur de l’Europe dont ils sont devenus, avec saint Benoît, les patrons célestes.

3. Leur exemple nous indique la route à suivre aujourd’hui, celle du dialogue entre les cultures et entre les peuples, qui s’attache à respecter chacun dans son identité et ses richesses propres, mais aussi à l’ouvrir, au-delà de tout nationalisme étroit, à la connaissance et à la reconnaissance de l’autre. C’est là un chemin de paix exemplaire, qui impose de renoncer aux moyens de puissance et à toute volonté de domination, pour travailler ensemble au bien commun. C’est aussi un chemin de vérité, qui demande souvent de reconnaître les fautes commises dans le passé les uns contre les autres. C’est encore un chemin de justice, qui demande de réparer les torts et les dommages faits à autrui et de veiller au respect des droits et des devoirs de chacun.

Le monde d’aujourd’hui, tenté de nouveau par les affrontements et par la violence aveugle du terrorisme, a grand besoin d’entendre la voix d’hommes de dialogue et d’artisans de paix, et je souhaite ardemment que ce soit le cas le 24 janvier prochain, quand se réuniront à Assise, pour une journée de prière en faveur de la paix, les responsables religieux du monde entier. Je me réjouis également de savoir que votre nation, dont la situation originale de pont entre l’Europe orientale et l’Europe du sud l’établit en quelque sorte comme une terre de rencontre et de tolérance, se fait un devoir de travailler, dans le concert des nations et particulièrement sur le continent européen, en faveur de la paix et de la coopération entre les peuples.

4. Vous avez souhaité, Monsieur l’Ambassadeur, rendre hommage à l’action apostolique de deux apôtres du siècle dernier : Monseigneur Angelo Roncalli, qui fut Visiteur apostolique puis Délégué apostolique à Sofia pendant de longues années avant de devenir mon vénéré prédécesseur le bienheureux Pape Jean XXIII, et Monseigneur Eugène Bossilkov, évêque et martyr de la foi, lui aussi bienheureux. Je vous en remercie vivement. En eux, votre nation reconnaît de vrais serviteurs de l’Évangile pour le peuple bulgare, et vous honorez l’action de l’Église dans deux dimensions essentielles de sa mission, à savoir l’exercice de la charité et la défense de la liberté religieuse. Permettez-moi de vous assurer de la volonté ferme et constante de l’Église catholique de toujours travailler, à l’exemple de ces deux témoins, pour le bien des peuples, en leur communiquant son unique richesse, celle de la Parole de Dieu qui veut féconder et nourrir les cultures. Je souhaite que la nouvelle loi sur la liberté religieuse permette à l’Église catholique, tout comme aux autres religions reconnues, d’exercer librement et sans restrictions sa mission spirituelle dans votre pays, selon des droits et des devoirs garantis par la loi. Dans cet esprit, j’espère que les différents services administratifs concernés continueront à favoriser toutes les démarches permettant aux fidèles de bénéficier des moyens nécessaires à l’exercice de la liberté de culte.

5. Je suis heureux de pouvoir saluer, en cette occasion et par l’entremise de votre personne, la communauté catholique de différents rites qui vit en Bulgarie. Elle est certes peu nombreuse, dans un pays majoritairement orthodoxe, mais elle est bien vivante et elle souhaite entretenir de bonnes relations avec toutes les traditions religieuses présentes dans le pays. Je salue cordialement ses évêques et ses prêtres, ainsi que les religieux et religieuses et tous les fidèles laïcs, rendant grâce pour leur fidélité au Christ et à l’Église catholique. Je sais qu’ils participent activement à la construction commune, en prenant leur place au sein de la société et en oeuvrant pour le développement du pays. Qu’ils reçoivent ici les encouragements du Successeur de Pierre dans leur volonté de servir et de témoigner de leur foi. Je salue également, avec respect, estime et affection fraternelle, nos frères de l’Église orthodoxe bulgare, et je souhaite que soient multipliées, entre nous et aux yeux du monde, les occasions de manifester notre fraternité spirituelle dans le Christ.

Chaque année au mois de mai, une délégation de votre pays rend visite à l’Évêque de Rome, à l’occasion de la fête des saints Cyrille et Méthode, exprimant ainsi son attachement à ces deux hautes figures spirituelles mais aussi son désir de développer, à leur exemple, des liens de fraternité et de paix. Je souhaite vivement pouvoir à mon tour rendre cette visite au cher peuple bulgare, en venant prochainement dans votre pays, afin d’y rencontrer les Autorités civiles, de m’entretenir avec les responsables religieux, notamment ceux de l’Église catholique et ceux de l’Église orthodoxe, et d’y exprimer aux fidèles catholiques ma sollicitude pastorale. Je continuerai ainsi, après mon pèlerinage aux sources de la foi, mon pèlerinage aux origines des communautés chrétiennes et en faveur de la paix et du dialogue entre tous.

6. Monsieur l’Ambassadeur, au moment où commence officiellement votre mission auprès du Saint-Siège, je vous offre mes voeux les meilleurs pour son heureux accomplissement. Soyez sûr que vous trouverez toujours auprès de mes collaborateurs un accueil attentif et une compréhension cordiale.

Sur Votre Excellence, sur sa famille, sur ses collaborateurs de l’Ambassade et sur le peuple bulgare tout entier, j’invoque de grand coeur l’abondance des Bénédictions divines.




LORS DE LA PRÉSENTATION DES VOEUX AUX CARDINAUX ET À LA CURIE ROMAINE

Samedi 22 décembre 2001



1. Prope est iam Dominus. Venite, adoremus!

Avec ces paroles de la Liturgie de l'Avent, je vous accueille et je vous salue cordialement, Messieurs les Cardinaux, vénérés frères dans l'épiscopat et le sacerdoce, religieux et laïcs, qui faites partie de la Curie Romaine et du Vicariat de Rome.

Je remercie le cher Cardinal-Doyen, Bernardin Gantin, pour les sentiments qu'il a exprimés en votre nom et à tous, j'exprime ma joie de me retrouver avec vous pour ce traditionnel rendez-vous familial.

Il s'agit d'une rencontre qui exprime bien le sens de profonde communion avec le Successeur de Pierre, qui anime et soutient votre travail. Je vous suis reconnaissant pour le dévouement dont vous faites preuve à l'égard du Siège apostolique et pour l'engagement généreux avec lequel vous participez chaque jour, de diverses façons, à ma sollicitude en vue d'accomplir le ministerium petrinum qui m'a été confié. A tous, merci de tout coeur!

Espérer l'avent d'une humanité nouvelle

Le Noël du Seigneur est proche. Venez, adorons! C'est avec un émerveillement toujours renouvelé que nous nous approchons du mystère de la naissance du Christ, sur le visage duquel resplendit la tendresse de Dieu. Oui, Dieu nous aime vraiment! Il n'a pas oublié les hommes, les abandonnant à l'impuissance et à la solitude, mais il a envoyé son Fils revêtir leur chair mortelle pour les soustraire au vide du péché et du désespoir.

"A tous ceux qui l'ont accueilli, il a donné pouvoir de devenir enfants de Dieu" nous dit l'Apôtre Jean (Jn 1,12). En Jésus de Nazareth, Il nous donne sa vie même. Il fait de nous des "fils dans le Fils", nous faisant participer à son intimité trinitaire et nous faisant devenir frères entre nous. Noël est le terrain sûr et toujours fertile sur lequel germe l'espérance de l'humanité. Contempler l'enfant de Jérusalem signifie espérer l'avent d'une humanité nouvelle, recréée à son image, victorieuse sur le péché et sur la mort; cela signifie croire que, dans notre histoire marquée par tant de souffrances, le dernier mot appartiendra à la vie et à l'amour. Dieu a planté sa tente parmi nous, pour nous ouvrir le chemin vers sa demeure éternelle.

Les grâces du Jubilé de l'An 2000

2. C'est avec cette "somme" d'éternité que nous voulons lire l'histoire et retourner - comme c'est la tradition au cours notre rencontre annuelle - aux principaux événements qui ont marqué les douze mois qui se sont écoulés: je le fais volontiers avec vous, mes collaborateurs appréciés, dans une attitude de gratitude au Dieu de la vie, qui tient entre ses mains les oeuvres et les jours des êtres humains.

Je me souviens tout d'abord de l'émotion profonde avec laquelle, le matin de l'Epiphanie, j'ai apposé ma signature sur la Lettre apostolique Novo millennio ineunte. Je désire à nouveau louer Dieu, source de tout bien, pour les innombrables grâces que le grand Jubilé de l'An 2000 a apportées à la communauté chrétienne et pour l'élan apostolique renouvelé qui a jailli dans les diverses Eglises locales de la célébration du bimillénaire de la naissance du Christ. "Duc in altum!" (Lc 5,4). Encore une fois, "cette parole résonne aujourd'hui pour nous et elle nous invite à faire mémoire avec gratitude du passé, à vivre avec passion le présent, à nous ouvrir avec confiance à l'avenir: Jésus-Christ est le même hier et aujourd'hui, il le sera à jamais!" (Novo millennio ineunte NM 1). Au début du nouveau millénaire, toute l'Eglise, en repartant du Christ, soutenue par l'amour du Père et réconfortée par le don inépuisable de l'esprit, se place avec humilité au service du monde et, à travers le témoignage de la vie et des oeuvres, entend lui offrir son unique richesse: le Seigneur Jésus-Christ, Sauveur et Rédempteur de l'homme (cf. Ac 3,6).

Les rencontres avec les Evêques: expériences de prière, de travail, de partage

3. Cette mission est confiée en particulier à tous ceux qui, en tant que successeurs des Apôtres, sont appelés et envoyés pour paître le troupeau de Dieu (cf. 1P 5,2). Dans cette perspective, ma pensée s'adresse avant tout aux Evêques des diverses nations, que j'ai eu la joie d'accueillir au cours des derniers mois à l'occasion des visites ad limina Apostolorum. Je pense également aux nombreux prélats qui ont vécu avec moi au cours du mois d'octobre l'expérience de la Xème Assemblée ordinaire du Synode des Evêques, sur le thème: "L'Evêque, serviteur de l'Evangile du Christ pour l'espérance du monde". En outre, le 22 novembre, j'ai rendu publique l'Exhortation apostolique Ecclesia in Oceania, dans laquelle j'ai recueilli les conclusions de l'Assemblée spéciale du Synode des Evêques, célébrée en 1998, sur les problèmes et les perspectives de ce grand continent. Enfin, je ne peux manquer de rappeler le Consistoire du mois de février, au cours duquel de nombreux Evêques et plusieurs prêtres ont été appelés à faire partie du Collège cardinalice, qui s'est ensuite réuni à Rome au mois de mai pour le Consistoire extraordinaire.

Ces rencontres - caractérisées par la prière, le travail, la recherche commune et le partage fraternel - nous ont aidés à rechercher les voies sur lesquelles l'Eglise doit marcher pour annoncer le Christ à notre époque et être ainsi toujours plus le sel de la terre et la lumière du monde (cf. Mt 5,13), afin que l'humanité tout entière, "en entendant l'annonce du salut [...] croie, qu'en croyant, [elle] espère, qu'en espérant, [elle] aime" (Dei Verbum DV 1).

Le pèlerinage aux lieux liés à l'histoire du Salut

4. Le Seigneur m'a accordé de porter à terme le "pèlerinage jubilaire" aux lieux liés à l'histoire du Salut: j'ai pu en effet me rendre sur les traces de saint Paul à Athènes, Damas et Malte, pour faire mémoire de l'aventure humaine et spirituelle de l'Apôtre des Nations et de son dévouement sans réserve à la cause du Christ.

Dans chaque pays, j'ai rencontré avec joie les communautés catholiques des divers Rites et j'ai voulu également rendre visite aux Patriarches et aux Archevêques des vénérables Eglises orthodoxes d'Orient, auxquels nous lie la profession de la foi dans le Christ, unique Seigneur et Sauveur. Avec eux, j'ai pu exprimer à nouveau le désir ardent de la pleine unité de tous les croyants dans le Christ, renouvelant l'engagement à oeuvrer afin que se hâte le jour de la communion visible entre l'Orient et l'Occident chrétien. En outre, à Damas, j'ai visité la Mosquée des Omayades, qui conserve le monument en mémoire de Jean le Baptiste, précurseur de Jésus, manifestant ainsi, tout en reconnaissant les différences, le respect que l'Eglise catholique nourrit à l'égard de l'Islam.

Les pèlerinages en Ukraine, au Kazakhstan et en Arménie

5. En poursuivant l'engagement qui est à la base des voyages apostoliques accomplis jusqu'à présent, c'est-à-dire de confirmer les frères dans la foi (cf. Lc 22,32), et de les réconforter dans toutes sortes de peines (2Co 1,3-4), je me suis rendu en Ukraine au mois de juin, où les fils de l'Eglise catholique, avec leurs autres frères chrétiens, ont fait l'expérience, au cours du siècle qui vient de s'écouler, d'une cruelle persécution et ont témoigné jusqu'au martyre de leur adhésion au Seigneur Jésus. Au cours de ces jours, j'ai demandé avec insistance à Dieu que l'Eglise en Europe puisse recommencer à respirer avec ses deux poumons, afin que tout le continent connaisse une évangélisation renouvelée.

Au mois de septembre, je me suis rendu au Kazakhstan, où j'ai pu constater la ferme volonté de ce peuple de surmonter un passé difficile, marqué par l'oppression de la dignité et des droits de la personne humaine. Là, j'ai invité à nouveau les fidèles de chaque religion à rejeter fermement la violence, pour contribuer à former une humanité qui aime la vie, et est tendue vers des objectifs de justice et de solidarité.

Je me suis ensuite rendu en Arménie, pour rendre hommage à une nation qui, depuis dix-sept siècles, a lié son histoire au christianisme et a payé cher sa fidélité à son identité: il suffit de penser à la terrible extermination de masse subie au début du XXème siècle. L'hospitalité qui m'a été offerte avec une extrême courtoisie par Sa Sainteté le Catholicos Karékine II m'a profondément touché.

L'affection du Pape pour le peuple chinois

Je remercie de tout coeur tous ceux qui m'ont accueilli comme un ami, un frère et un pèlerin. A tous, j'assure mon souvenir dans la prière. De même que j'accompagne avec une affection particulière le bien-aimé peuple chinois, que j'ai eu particulièrement en mémoire au cours de la récente commémoration du 400ème anniversaire de l'arrivée à Pékin du Père Matteo Ricci, célèbre fils de la Compagnie de Jésus.

Sans ignorer les difficultés qui marquent parfois le chemin, je réaffirme ma profonde conviction selon laquelle la voie de la connaissance réciproque, et, lorsque cela est possible, de la prière commune, est la voie privilégiée vers l'entente, la solidarité et la paix.

L'ombre des attentats terroristes du 11 septembre

6. L'ombre du terrible attentat terroriste de New York, de représailles armées en Afghanistan et de l'accroissement des tensions en Terre Sainte, a assombri les derniers mois de l'Année. Face à cette situation, les disciples du Christ, Prince de la Paix (cf. Is 9,5), sont appelés à proclamer avec constance que toute forme de violence terroriste déshonore la sainteté de Dieu et la dignité de l'homme et que la religion ne peut devenir un motif d'agression armée, de haine et d'abus. Je renouvelle mon invitation pressante à tous les hommes de bonne volonté à n'épargner aucun effort afin de trouver des solutions équitables aux nombreux conflits qui tourmentent le monde et d'assurer à tous un présent et un avenir de paix. Que l'on n'oublie pas qu'"il n'y a pas de paix sans justice, il n'y a pas de justice sans pardon!" (Message pour la Journée mondiale de la Paix, 1er janvier 2002).

La rencontre d'Assise du 24 janvier prochain

Avant d'être le fruit d'efforts humains, toutefois, la véritable paix est le don de Dieu: en effet, Jésus-Christ "est notre paix, lui qui des deux peuples n'en a fait qu'un, détruisant la barrière qui les séparait" (Ep 2,14). Etant donné que "ce que la prière implore, c'est le jeûne qui l'obtient et la miséricorde qui le reçoit, et ces trois choses, la prière, le jeûne et la miséricorde, sont une seule chose et se donnent la vie mutuellement" (Saint Pierre Chrysologue, Sermon 43: PL 52, 320), j'ai voulu proposer aux fils de l'Eglise un jour de pénitence et de solidarité le 14 décembre dernier.

Dans une continuité idéale, le 24 janvier prochain, nous nous tournerons une fois de plus vers Celui qui, seul, est capable d'abattre les murs d'inimitié qui séparent les hommes: dans la ville de saint François, les représentants des religions du monde, en particulier les chrétiens et les musulmans, élèveront leur prière implorante pour surmonter les oppositions et promouvoir la paix authentique.
Je remercie tous ceux qui, dans les diverses régions de la terre, s'unissent à cet exercice de pénitence: le fruit de leur sacrifice servira à soulager les souffrances de tant de frères et soeurs innocents et marqués par la douleur. Je les invite également, et je vous invite en particulier vous, chers membres de la Curie romaine et du Vicariat de Rome, à vous unir spirituellement à la prière qui se tiendra à Assise, afin que le monde connaisse des jours de paix.

L'Eglise est la mère des saints

7. Pour notre réconfort et pour soutenir notre espérance, nous admirons le don de la sainteté qui fleurit sans cesse dans le Peuple de Dieu: l'Eglise est la mère des saints! La fécondité de la grâce baptismale se manifeste dans la vie de nombreux de chrétiens, qu'au cours de l'année j'ai eu la joie d'élever aux honneurs des autels, ici à Rome et au cours de mes voyages apostoliques en Ukraine et à Malte. Sur cet horizon lumineux de "témoins", évêques et prêtres, personnes consacrées et laïcs, il me plaît de rappeler en particulier les époux Luigi et Maria Beltrame Quattrocchi, les premiers de l'histoire de l'Eglise à avoir été béatifiés ensemble, comme couple, témoignage éloquent de la sainteté du mariage.

Je confie à l'intercession commune de tous nos frères exemplaires l'invocation pour la paix en ce temps de Noël.


Discours 2001 - Mardi 11 décembre 2001