Discours 2002 - MESSAGE AU XXVème CHAPITRE GÉNÉRAL DE LA CONGRÉGATION FONDÉE PAR DON BOSCO (SALÉSIENS)


AUX PARTICIPANTS À LA VIIIème ASSEMBLÉE GÉNÉRALE DE L'ACADÉMIE PONTIFICALE POUR LA VIE

Mercredi 27 février 2002



1. Nous voilà à nouveau réunis, chers membres éminents de l'Académie pontificale pour la Vie, pour une rencontre qui constitue toujours pour moi un motif de joie et d'espérance.

Mon salut s'adresse à chacun de vous personnellement avec une grande cordialité. Je remercie en particulier le Président, Monsieur Juan de Dios Vial Correa, des paroles aimables à travers lesquelles il a voulu se faire l'interprète de vos sentiments. J'adresse également une pensée particulière au Vice-Président, S.Exc. Mgr Elio Sgreccia, l'animateur diligent des activités de l'Académie pontificale.


2. Vous célébrez ces jours-ci votre huitième Assemblée générale, pour laquelle vous êtes venus ici nombreux de vos pays respectifs, afin d'échanger vos points de vue sur une thématique cruciale dans le cadre d'une réflexion plus générale sur la dignité de la vie humaine : "Nature et dignité de la personne humaine comme fondement du droit à la vie. Les défis du contexte culturel contemporain".

Vous avez choisi de traiter un des points-clé qui sont le fondement de toute réflexion ultérieure, qu'elle soit de type éthique et pratique dans le domaine de la bioéthique, ou de type social et culturel pour la promotion d'une nouvelle mentalité en faveur de la vie.

Pour de nombreux penseurs contemporains, les concepts de "nature" et de "loi naturelle" n'apparaissent applicables qu'au seul monde physique et biologique, ou, comme expression des lois de l'univers, à la recherche scientifique et à l'écologie. Malheureusement, dans une telle perspective, il s'avère difficile de saisir la signification de la nature humaine au sens métaphysique, comme celle de loi naturelle dans l'ordre moral.

Ce passage à la profondeur de la réalité a certainement été rendu plus difficile, par la perte presque totale du concept de création, un concept qui fait référence à toute la réalité cosmique, mais qui revêt une signification particulière à propos de l'homme. L'affaiblissement de la confiance dans la raison, qui caractérise une grande partie de la philosophie contemporaine, y a également contribué, comme je l'ai expliqué dans l'Encyclique Fides et ratio (cf. FR FR 61).

Il faut donc un effort cognitif renouvelé pour retrouver à ses racines, et dans tout son contenu, la signification anthropologique et éthique de la loi naturelle et du concept de droit naturel qui lui est lié. Il s'agit, en effet, de démontrer si et comment il est possible de "reconnaître" les trait propres à tout être humain, en termes de nature et de dignité, en tant que fondement du droit à la vie dans ses multiples formulations historiques. C'est seulement sur cette base qu'un véritable dialogue et qu'une collaboration authentique entre croyants et non-croyants sont possibles.


3. L'expérience quotidienne met en évidence l'existence d'une réalité de fond commune à tous les êtres humains, grâce à laquelle ils peuvent se reconnaître comme tels. Il est nécessaire de faire toujours référence "à la nature propre et originale de l'homme, à la "nature de la personne humaine", qui est la personne elle-même dans l'unité de l'âme et du corps, dans l'unité de ses inclinations d'ordre spirituel ou biologique et de tous les autres caractères spécifiques nécessaires à la poursuite de sa fin" (Veritatis splendor VS 50 cf. aussi Gaudium et spes GS 14).

Cette nature particulière est le fondement des droits de tout être humain, qui a une dignité de personne dès le moment de sa conception. Cette dignité objective, qui a son origine en Dieu Créateur, est fondée sur la spiritualité qui est celle de l'âme, mais s'étend également à sa corporéité, qui en est la composante essentielle. Personne ne peut la lui enlever, au contraire, chacun doit la respecter en soi-même et dans les autres. C'est une dignité égale chez chacun et qui demeure totale à toutes les étapes de la vie humaine individuelle.

La reconnaissance d'une telle dignité naturelle est le fondement de l'ordre social, comme nous le rappelle le Concile Vatican II: "Au surplus, en dépit de légitimes différences entre les hommes, l'égale dignité des personnes exige que l'on parvienne à des conditions de vie justes et plus humaines" (Gaudium et spes GS 29).

Grâce à la raison, la personne humaine est capable de re-connaître à la fois cette dignité profonde et objective de son être, et les exigences éthiques qui en dérivent. L'homme peut, en d'autres mots, lire en lui-même la valeur et les exigences morales de sa propre dignité. C'est une lecture qui constitue une découverte toujours perfectible, selon les critères de l'"historicité" propres à la connaissance humaine.

C'est ce que j'ai souligné dans l'Encyclique Veritatis splendor, à propos de la loi morale naturelle, qui, selon les paroles de saint Thomas d'Aquin, "n'est rien d'autre que la lumière de l'intelligence mise en nous par Dieu. Grâce à elle, nous savons ce que nous devons faire et ce que nous devons éviter. Cette lumière et cette loi, Dieu les a données par la création" (VS 40 cf. aussi Catéchisme de l'Eglise catholique CEC 1954-1955).


4. Il est important d'aider nos contemporains à comprendre la valeur positive et humanisante de la loi morale naturelle, en dissipant un certain nombre de malentendus et d'interprétations erronées.
La première équivoque qu'il faut éliminer, est "le prétendu conflit entre la liberté et la nature" qui "retentit aussi sur l'interprétation de certains aspects spécifiques de la loi naturelle, surtout de son universalité et de son immutabilité" (Veritatis splendor VS 51). En effet, la liberté appartient elle aussi à la nature rationnelle de l'homme, et elle peut et doit être guidée par la raison: "C'est précisément grâce à cette "vérité" que la loi naturelle suppose l'universalité. En tant qu'inscrite dans la nature raisonnable de la personne, elle s'impose à tout être doué de raison et vivant dans l'histoire" (ibid. VS VS 51).


5. Un autre point qui doit être éclairci est le prétendu caractère statique et fixe attribué à la notion de loi morale naturelle, peut-être suggéré par une analogie erronée avec le concept de nature propre à la réalité physique. En vérité, le caractère d'universalité et d'obligation morale stimule et encourage la croissance de la personne. "Pour se perfectionner dans son ordre, la personne doit faire le bien et éviter le mal, veiller à la transmission et à la préservation de la vie, affiner et développer les richesses du monde sensible, cultiver la vie sociale, chercher la vérité, pratiquer le bien, contempler la beauté" (Veritatis splendor VS 51 cf. saint Thomas, Somme théologique,   I-II 94,2).

De fait, le Magistère de l'Eglise se réfère à l'universalité et au caractère dynamique et perfectible de la loi naturelle en ce qui concerne la transmission de la vie, que ce soit pour maintenir dans l'acte procréateur la plénitude de l'union du mariage, ou pour conserver dans l'amour conjugal l'ouverture à la vie (cf. Humanae vitae HV 10 Instruction Donum vitae, II, 1-8). Le Magistère fait une référence analogue sur le sujet du respect de la vie humaine innocente: on pense ici à l'avortement, à l'euthanasie, à la suppression et à l'expérimentation destructive des embryons et des foetus humains (cf. Evangelium vitae EV 52-67).


6. La loi naturelle, dans la mesure où elle réglemente les relations interhumaines, vaut comme "droit naturel" et, comme telle, exige le respect de la dignité des personnes dans la recherche du bien commun. Une conception authentique du droit naturel, entendu comme protection de la dignité éminente et inaliénable de tout être humain, est garante de l'égalité et donne un contenu véritable aux "droits de l'homme" qui constituent les fondements des Déclarations internationales.

Les droits de l'homme, en effet, doivent avoir pour référence ce que l'homme est par nature, en vertu de sa propre dignité, et non ce qui est l'expression de choix subjectifs faits par ceux qui jouissent du pouvoir de participer à la vie sociale ou par ceux qui obtiennent le consentement de la majorité. Dans l'Encyclique Evangelium vitae, j'ai dénoncé le grave danger que cette fausse interprétation des droits de l'homme, comme droits de la subjectivité individuelle ou collective, détachée de toute référence à la vérité de la nature humaine puisse conduire les régimes démocratiques eux-mêmes à se transformer en une forme de totalitarisme (cf. EV EV 19-20).

Parmi les droits fondamentaux de l'homme, l'Eglise catholique revendique en particulier pour tout être humain le droit à la vie comme droit fondamental. Elle le fait au nom de la vérité de l'homme, et pour protéger sa liberté, qui ne peut subsister que dans le respect de la vie. L'Eglise affirme le droit à la vie de tout être humain innocent et à tout moment de son existence. La distinction qui est parfois suggérée dans certains documents internationaux entre "être humain" et "personne humaine", pour reconnaître ensuite le droit à la vie et à l'intégrité physique uniquement à la personne déjà née, est une distinction artificielle sans fondement scientifique, ni philosophique: tout être humain, dès sa conception et jusqu'à sa mort naturelle, possède un droit inviolable à la vie et mérite tout le respect dû à la personne humaine (cf. Donum vitae, n. 1).


7. Très chers amis, pour conclure, je désire encourager votre réflexion sur la loi morale naturelle et sur le droit naturel, avec le souhait qu'il en jaillisse un élan renouvelé pour l'instauration du bien véritable de l'homme et d'un ordre social juste et pacifique. C'est toujours en revenant aux racines profondes de la dignité humaine et de son bien véritable, en s'appuyant sur le fondement de ce qui est essentiel et inaliénable chez l'homme, que l'on peut entamer un dialogue fécond avec les hommes de toute culture en vue d'édifier une société inspirée par les valeurs de la justice et de la fraternité.

En vous remerciant encore de votre collaboration, je confie les travaux de l'Académie pontificale pour la Vie à la Mère de Jésus, Verbe fait chair en son sein virginal, pour qu'elle vous accompagne dans la tâche que l'Eglise vous a confiée pour la défense et la promotion du don de la vie et de la dignité de tout être humain.

Avec ce souhait, je vous donne, ainsi qu'à ceux qui vous sont chers, ma Bénédiction affectueuse.


AUX PARTICIPANTS AU CONGRÈS SPIRITUEL DES ÉVÊQUES AMIS DU MOUVEMENT DES FOCOLARI

Jeudi 28 février 2002



Vénérés frères!

1. Je vous accueille avec une grande joie, à l'occasion de votre congrès sur l'approfondissement de la spiritualité de communion, promu par le Mouvement des Focolari. J'adresse à chacun mon salut chaleureux, avec une pensée particulière de gratitude pour le Cardinal Miloslav Vlk, qui s'est fait l'interprète de vos sentiments en illustrant les thèmes de réflexion de votre rencontre. Je souhaite adresser un salut particulier à la fondatrice du Mouvement, Chiara Lubich, qui a voulu être présente parmi nous.

Très chers frères, vous réfléchissez en ce moment sur la communion, une réalité constitutive de la nature même de l'Eglise. L'Eglise, comme le souligne bien le Concile Vatican II, se trouve, pour ainsi dire, entre Dieu et le monde, rassemblée au nom de la Très Sainte Trinité pour être "le signe et le moyen de l'union intime avec Dieu et de l'unité de tout le genre humain" (Lumen gentium LG 1). La communion au sein du peuple chrétien doit donc être toujours plus assimilée, vécue et manifestée, également grâce à un engagement décisif et programmé de l'Eglise universelle comme des Eglises particulières.

Il faut cultiver une spiritualité de la communion authentique et profonde, comme j'ai voulu le souligner dans la Lettre apostolique Novo millennio ineunte (cf. NM NM 43). Il s'agit d'une exigence qui concerne tous les membres de la communauté ecclésiale. Toutefois, cette tâche revient en premier lieu aux Pasteurs, appelés à veiller à ce que les différents dons et ministères contribuent à l'édification commune des croyants et à la diffusion de l'Evangile.


2. Le service de l'unité, sur laquelle, avec raison, vous insistez souvent, est intrinsèquement marqué par la Croix. Le Seigneur a souffert la passion et la mort pour détruire l'inimitié et réconcilier les hommes avec le Père et les réconcilier entre eux. En suivant son exemple, l'Eglise, le Corps mystique du Christ, prolonge son oeuvre. Par la force de l'Esprit Saint, elle participe intimement au Mystère pascal, en dehors duquel il n'y a pas de croissance du Royaume de Dieu.

L'expérience de l'histoire montre que l'Eglise vit la passion et la croix en étant unie de façon indissociable à son Seigneur ressuscité, éclairée et confortée par la présence qu'Il lui a lui-même garantie pour tous les jours, jusqu'à la fin du monde (cf. Mt 28,20). C'est le Seigneur lui-même, dont le corps glorieux conserve les marques des clous et de la lance (cf. Jn 20,20 Jn 20,27), qui associe ses compagnons à ses souffrances, pour les préparer ensuite à sa gloire. Ce fut tout d'abord l'expérience des Apôtres, auxquels les croyants font constamment référence au cours de leur pèlerinage. Leur ministère de communion et d'évangélisation a été aussi fécond que celui du Christ: la fécondité du grain de blé, comme le rappelle l'Evangéliste Jean, qui porte beaucoup de fruit à condition précisément de mourir dans la terre (cf. Jn 12,24).


3. Le signe par excellence de cette fécondité pascale, ce sont les fruits de l'Esprit, et tout d'abord "l'amour, la joie et la paix" (Ga 5,22), qui, au-delà de la diversité des styles et des charismes, caractérisent le témoignage des saints de toute époque et de tout pays. Même dans l'épreuve, même dans les situations les plus dramatiques, rien ni personne ne peut enlever à celui qui vit uni au Christ la certitude de son amour (cf. Rm 8,37-39), ni lui enlever la joie d'être et de se sentir une seule chose avec Lui.

J'invoque cet amour, cette joie et cette paix en abondance pour chacun de vous, très chers frères dans l'épiscopat, et pour les communautés qui vous sont confiées. Que Marie, la Vierge de l'amour fidèle, veille sur vous et sur votre ministère. Qu'elle vous aide à marcher en parfaite harmonie avec le coeur de son Fils divin, source de charité et de miséricorde sans fin. Je vous assure quant à moi de mon souvenir constant dans la prière et je vous accorde bien volontiers une Bénédiction spéciale, l'étendant également à ceux que vous rencontrez quotidiennement dans votre service pastoral.


Mars 2002



AUX MEMBRES DE L'ASSEMBLÉE PLÉNIÈRE DU CONSEIL PONTIFICAL POUR LES COMMUNICATIONS SOCIALES

Vendredi 1er mars 2002



Eminences,
Chers frères dans l'épiscopat,
Frères et soeurs dans le Christ,

1. Une fois de plus, vous êtes venus à Rome des cinq continents pour l'Assemblée plénière du Conseil pontifical pour les Communications sociales. Je remercie Monseigneur John Foley pour ses aimables paroles et pour les orientations qu'il a données en tant que Président du Conseil, avec la précieuse collaboration de Monseigneur Pierfranco Pastore. Je désire profiter de cette occasion pour remercier le Conseil dans son ensemble pour l'aide que vous continuez d'apporter à mon ministère apostolique. Dans le monde d'aujourd'hui, comment le Successeur de Pierre peut-il accomplir son ministère de prêcher l'Evangile et de renforcer ses frères et soeurs dans la foi, sinon à travers les moyens de communication sociale? Je suis profondément conscient de cela, et c'est pourquoi je vous suis très reconnaissant, ainsi qu'aux groupes tels que les Chevaliers de Colomb, qui soutiennent généreusement votre travail.


2. J'apprécie le thème que vous avez choisi pour cette Assemblée plénière: "Les moyens de communication sociale et la nouvelle évangélisation: activités actuelles et projets pour l'avenir". Il est essentiel que nous considérions notre engagement dans le monde des médias comme une part essentielle de la nouvelle évangélisation à laquelle le Saint-Esprit appelle à présent l'Eglise partout dans le monde. Comme je l'ai souligné dans ma Lettre apostolique Novo millennio ineunte, nous devons "fixer les éléments concrets d'un programme [...] qui permettent à l'annonce du Christ d'atteindre les personnes, de modeler les communautés, d'agir en profondeur par le témoignage des valeurs évangéliques sur la société et sur la culture" (NM 29). Il ne suffit pas d'attendre que quelque chose se passe ou d'agir au hasard: le moment est venu d'un programme concret et efficace, comme celui que vous préparez au cours de cette Assemblée plénière. Votre défi particulier consiste à trouver les moyens de garantir que la voix de l'Eglise ne soit pas marginalisée ou étouffée dans le forum moderne des moyens de communications sociales. Vous devez jouer un rôle essentiel pour garantir que l'Evangile ne soit pas confiné à la sphère strictement privée. Non! Jésus-Christ doit être proclamé au monde; c'est pourquoi l'Eglise doit entrer dans le grand forum des moyens de communication sociale avec courage et confiance.


3. Non seulement nous devons utiliser les moyens de communication sociale pour communiquer le Christ au monde, mais nous devons prêcher l'Evangile au monde des médias lui-même. Ce que j'ai déjà dit à propos d'internet vaut pour les moyens de communication sociale en général: il s'agit d'un ""nouveau forum" entendu dans son antique sens romain [...] d'un espace peuplé et bruyant, qui reflétait à la fois la culture environnante et créait une nouvelle culture propre" (Message pour la Journée mondiale des Communications sociales 2002, n. 2; cf. ORLF n. 5 du 29 janvier 2002). Cette culture des médias doit elle aussi être évangélisée! Et vous êtes appelés à offrir à l'Eglise l'inspiration et les idées utiles à cette tâche importante, en puisant aux modèles les plus élevés de professionnalisme et aux ressources les plus profondes de la foi chrétienne et de la tradition catholique.

Il s'agit d'une tâche à laquelle le Conseil pontifical s'est consacré avec une grande énergie. Au cours de cette Assemblée plénière, par exemple, vous publierez deux documents importants, qui sont en préparation depuis plusieurs années: "Ethique et internet" et "L'Eglise et internet". Ce sont des signes non seulement de votre créativité professionnelle, mais également de votre engagement à prêcher la Bonne Nouvelle dans ce monde en rapide mutation des communications sociales.



4. L'Evangile vit toujours dans un dialogue avec la culture, car la Parole éternelle ne cesse d'être présente dans l'Eglise et dans l'humanité. Si l'Eglise s'éloigne de la culture, l'Evangile lui-même se tait. C'est pourquoi nous ne devons pas craindre de franchir le seuil culturel de la révolution dans le domaine des communications et de l'information qui a lieu actuellement. "Comme toutes les nouvelles frontières des autres époques, celle-ci également est riche de dangers et de promesses et est marquée par l'esprit d'aventure qui a caractérisé d'autres grandes périodes de changement" (ibid.). Pour l'Eglise, l'aventure consiste à ce que la vérité du Christ influe sur ce nouveau monde, avec toutes les promesses, les recherches et les interrogations que cela comporte. Cela exigera en particulier la promotion d'une éthique véritablement humaine, qui peut créer la communion plutôt que l'aliénation entre les personnes (cf. Novo millennio ineunte NM 43), et la solidarité plutôt que l'inimitié entre les peuples.

Toutefois, la question fondamentale est celle-ci: "De cette galaxie d'images et de sons, le visage du Christ ressortira-t-il et la voix du Christ sera-t-elle entendue?" (Message pour la Journée mondiale des Communications sociales 2002, n. 6). Car, dans tous nos projets, nous ne pouvons pas oublier que le Christ est la Bonne Nouvelle! Nous n'avons rien à offrir sinon Jésus, l'unique médiateur entre Dieu et l'homme (cf. 1Tm 2,5). Evangéliser signifie simplement lui permettre d'être vu et entendu, car nous savons que s'il n'y a pas de place pour le Christ, il n'y a pas de place pour l'homme.

C'est pourquoi, chers frères et soeurs, je vous exhorte, dans tous vos projets, à accorder une place au Christ. Dans la presse écrite, à la radio et à la télévision, dans le monde du cinéma et d'internet, efforcez-vous d'ouvrir les portes à celui qui est pour nous, de façon si miséricordieuse, la porte du salut. Les moyens de communication sociale seront alors un monde de communication authentique, un monde fait non pas d'illusion, mais de vérité et de joie. Je prie avec ferveur pour qu'il en soit ainsi et je confie votre travail à Marie, Mère du Verbe fait chair. Je donne avec joie ma Bénédiction apostolique à tous ceux qui contribuent au travail du Conseil pontifical, en signe de la présence du Christ parmi vous et de sa force sur tout ce que vous faites en son nom.



AU CHAPITRE GÉNÉRAL DES SERVANTES DU SACRÉ-COEUR DE JÉSUS

Samedi 2 mars 2002



A la Révérende Mère Rita Burley Supérieure générale des Servantes du Sacré-Coeur de Jésus
et aux Soeurs qui participent à la XVIIème Congrégation générale

1. A l'occasion de la célébration de la XVIIème Congrégation générale à Rome, qui constitue pour vous un événement d'une importance particulière, je vous salue cordialement et, dans le même temps, je vous invite à écouter avec docilité la voix de l'Esprit, afin de découvrir les voies qui vous permettent de vivre aujourd'hui, dans une fidélité créative à votre charisme de fondation, la pleine consécration au Seigneur et la mission de service inconditionné à l'Eglise.

En outre, la prochaine commémoration du 125ème anniversaire de la fondation de l'Institut doit représenter une occasion privilégiée pour donner une nouvelle impulsion au désir si souvent exprimé par la Mère fondatrice, sainte Rafaela María, selon lequel chaque soeur soit "elle-même entièrement un tissu de foi et de générosité". A Rome, où l'on vénère ses reliques, le murmure de sa voix, la ferveur de sa dévotion à l'Eucharistie et la vigueur de son engagement ardent pour "faire en sorte que le Christ soit adoré par tous les peuples" vous guideront dans vos travaux et dans vos décisions.

2. En harmonie avec toute l'Eglise, vous vous êtes proposées de développer au cours de ce Chapitre général des lignes directrices qui vous aideront à "avancer en eau profonde" en ce début de troisième millénaire, en unissant la rencontre approfondie avec la personne du Christ et la contemplation de sa miséricorde, exprimée de façon éminente dans le Sacré-Coeur, à l'engagement de collaborer intensément à son action salvifique parmi les hommes et les femmes d'aujourd'hui. Cette interaction indispensable entre une profonde vie spirituelle et la dimension évangélisatrice est particulièrement importante pour toutes les personnes consacrées qui se dédient à l'apostolat, auxquelles "l'union étroite entre contemplation et action permettra, aujourd'hui comme hier, de faire face aux missions les plus difficiles" (Vita consecrata VC 74).

Un grand nombre d'entre vous et de vos soeurs possèdent une grande expérience des difficultés rencontrées dans le déroulement de leur mission sur les quatre continents où l'Institut est présent. Certaines revêtent un caractère dramatique, en raison du danger, des conditions d'extrême indigence ou d'injustice, alors que d'autres proviennent des milieux sociaux particulièrement insensibles à l'esprit des béatitudes dont les soeurs sont appelées à témoigner (cf. Lumen gentium LG 31). Toutefois, les situations ne manquent pas où la cause de l'impossibilité de s'identifier complètement à la propre mission doit être recherchée dans la vie des personnes et des communautés elles-mêmes, parfois guettées par l'ennui lorsqu’elles accomplissent leurs activités, qui sont peu reconnues ou qui ne portent pas de fruits à court terme. Dans ces cas aussi, un authentique esprit de service doit renaître sans cesse, en vivant joyeusement l'option radicale qui est de rechercher et d'accomplir en premier lieu la volonté de Dieu, caractéristique de la tradition ignatienne dans laquelle votre Institut se reconnaît: "Dans la cause du Royaume, il n'y pas de temps pour regarder en arrière, et encore moins pour s'abandonner à la paresse" (Novo millennio ineunte NM 15).

C'est pourquoi je désire vous remercier au nom de l'Eglise pour le service que vous prêtez à l'évangélisation, que ce soit à travers votre témoignage de vie ou à travers l'activité que vous accomplissez dans les divers domaines de l'éducation, la direction des centres de spiritualité, la pastorale des jeunes ou la promotion des plus démunis dans la société. Toutefois, à la gratitude s'ajoute l'espérance et l'invitation à développer une nouvelle imagination dans la charité, qui est nécessaire à la mission de l'Eglise et qui ne se mesure pas tant aux nouveautés extérieures ou à l'efficacité apparente, mais au fait d'être un véritable partage fraternel dans les attitudes, dans les formes et dans les méthodes (cf. Novo millennio ineunte, n. 50).


3. Je désire conclure en confiant à la Vierge Marie les fruits de la Congrégation et l'avenir de l'Institut. Qu'Elle soit le modèle de docilité joyeuse à la volonté de Dieu, caractéristique de son "humble servante" (cf. Lc 1,48), maîtresse dans l'art d'accompagner le Christ à tous les moments de sa vie et de sa mission, jusqu'à la croix (cf. Jn 19,26). Puisse-t-elle intercéder dans les moments de difficultés ou d'incertitude.

Avec ces sentiments, en implorant la protection de saint Ignace de Loyola et de sainte Rafaela María, je vous donne avec affection la Bénédiction apostolique, que j'étends avec plaisir à toutes vos Soeurs, les Servantes du Sacré-Coeur de Jésus.



AUX ÉTUDIANTS UNIVERSITAIRES EUROPÉENS RELIÉS PAR SATELLITE

Samedi 2 mars 2002



Très chers jeunes universitaires!


Je vous salue avec une grande joie, à l'issue de cette rencontre de réflexion et de prière mariale, en ce premier samedi du mois de mars. Tout en remerciant tous ceux d'entre vous qui sont venus nombreux dans la Salle Paul VI, ma pensée se tourne avec affection vers ceux qui sont en liaison avec nous d'un certain nombre de villes d'Europe, grâce à la radio et à la télévision. Je salue en particulier les étudiants d'Athènes, de Moscou, de Strasbourg, de Budapest, de Valence et de Vienne. Je remercie chaleureusement les choeurs et l'orchestre pour leur contribution, ainsi que Radio Vatican et le Centre de Télévision, qui ont coopéré à la réussite de cet événement important et significatif.

Le Pape s'est alors adressé en français aux étudiants d'Athènes et de Strasbourg:

Chers jeunes universitaires qui, d'Athènes et de Strasbourg, avez prié le chapelet avec nous, je vous salue chaleureusement. Demandez à Marie de vous aider à comprendre en profondeur le mystère de son Fils, pour qu'il soit votre joie et votre force. Souvenez-vous qu'en suivant son exemple, vous dépasserez toutes les difficultés et vous trouverez le bonheur véritable! Je vous donne rendez-vous à Toronto.

Après un salut en allemand aux étudiants de Vienne, le Saint-Père s'est adressé en russe à ceux de Moscou:

Je salue avec une grande affection les étudiants universitaires réunis dans la cathédrale de l'Immaculée Conception à Moscou. Je vous remercie, très chers amis, de votre participation à ce moment de prière, au nom de la Vierge Marie. Restons toujours unis dans la foi et dans le service à l'Evangile. Que le Seigneur vous bénisse!

Le Pape a enfin salué en espagnol les étudiants de Valence. A l'issue de chaque discours adressé aux différents groupes de jeunes, le Pape a donné rendez-vous à chacun pour la Journée mondiale de la Jeunesse au Canada. Puis il a conclu en italien:

Ce lien de foi commune qui unit les jeunes de divers pays européens, qui appartiennent à différentes traditions culturelles, est un motif de réconfort et d'espérance. Il en a toujours été ainsi dans l'histoire de l'évangélisation du "vieux" continent: l'Evangile et les cultures ont cheminé ensemble. Et c'est aujourd'hui encore la tâche de l'Eglise. Chers jeunes, je vous demande de promouvoir le dialogue entre la foi et la culture dans les Universités, afin que le levain évangélique encourage et soutienne la qualité spirituelle et morale de la recherche et des études universitaires. Je forme des voeux dans ce sens et je vous souhaite bon courage!

Le Baptême est le point de départ commun pour cette mission stimulante, duquel il faut toujours repartir, car il est la source de la vie chrétienne. Le Carême, que nous sommes en train de vivre, constitue le temps liturgique le plus propice pour prendre à nouveau conscience de notre identité baptismale. A travers le Baptême, nous avons été unis à la mort et à la résurrection du Christ; grâce au Baptême, l'Esprit Saint a fait de nous des témoins de l'amour de Dieu, artisan de communion, de fraternité et de paix. La vie nouvelle, qui jaillit des fonts baptismaux, régénère à son tour constamment les mentalités et les choix, les rapports inter-personnels et sociaux, ainsi que les cultures des peuples.

Seuls des hommes et des femmes nouveaux peuvent renouveler l'histoire. Tel est le grand défi qui vous attend en particulier, chers jeunes européens. Le prochain rassemblement mondial de Toronto, où je vous attends nombreux, vous aidera à mieux comprendre encore cette urgence apostolique: être, au début du troisième millénaire, "le sel de la terre et la lumière du monde" (Mt 5,13). Je donne également rendez-vous aux jeunes de Rome le jeudi 21 mars prochain sur la Place Saint-Pierre, pour le traditionnel moment de fête et de prière en préparation à la Journée mondiale de la Jeunesse.

Chers jeunes, c'est la Sainte Vierge qui nous réunit ce soir d'un bout à l'autre de l'Europe. Tournons nos regards vers l'icône de la Madone de Lorette, Vierge du silence et de l'écoute, Mère du Fils de Dieu fait homme. Regardons toujours vers elle, en lui demandant d'être comme elle disponibles à la grâce divine. Et ainsi, le Tout-Puissant accomplira de grandes choses en chacun de vous aussi.
Avec ce souhait, je vous embrasse tous, proches ou lointains - mais pour moi, vous êtes tous très proches -, et je vous bénis chaleureusement ainsi que vos familles, vos universités et les jeunes du monde entier.



AU DEUXIÈME GROUPE D'ÉVÊQUES ARGENTINS EN VISITE "AD LIMINA APOSTOLORUM"

Mardi 5 mars 2002



Très chers frères dans l'épiscopat,

1. Je suis heureux de vous souhaiter une cordiale bienvenue, à vous qui formez le second groupe d'Evêques argentins en visite ad limina. Au cours de votre pèlerinage aux tombeaux des saints Apôtres Pierre et Paul, et des rencontres avec l'Evêque de Rome et ses collaborateurs, vous trouverez un dynamisme renouvelé pour poursuivre votre mission épiscopale, conscients que le Christ n'abandonne jamais son Eglise (cf. Mt 28,20), et la guide par la force de son Esprit, afin qu'elle soit un signe de salut dans le monde. Que Lui, maître des Pasteurs, vous emplisse d'espérance et fasse de vous des témoins dans votre vie (cf. 1P 3,15), édifiant ainsi tous les fidèles confiés à votre sollicitude pastorale.

Je remercie Mgr Estanislao Karlic, Archevêque de Paraná et Président de la Conférence épiscopale argentine, pour ses paroles cordiales, à travers lesquelles il a renouvelé l'adhésion de chacun de vous et des communautés ecclésiales que vous présidez au nom du Seigneur, en me présentant dans le même temps les orientations pastorales qui guident votre ministère afin que les hommes et les femmes de la bien-aimée nation argentine avancent vers la communion intime avec Dieu, Un et Trine. En ce moment, l'Eglise doit avancer avec le dynamisme extraordinaire de l'effusion de la grâce, qui, comme "un fleuve d'eau vive" jaillit de la célébration, encore récente, du grand Jubilé (cf. Novo millennio ineunte NM 1) et qui doit se traduire par des propositions ferventes et des lignes d'action concrètes (cf. Ibidem, NM 3).


2. A ce propos, il faut noter avec satisfaction l'attention manifestée dans la mise en pratique des orientations proposées dans la Lettre apostolique Novo millennio ineunte, pour la préparation et la célébration du grand Jubilé. Rappelons à cet égard qu'en Argentine, la Rencontre oecuménique, qui a comporté un sérieux examen de conscience, a favorisé un esprit de réconciliation. Dans cet esprit, vous avez également réalisé une consultation ample et détaillée entre les diverses Eglises particulières et les diverses communautés chrétiennes afin de mettre à jour les Orientations pastorales pour la nouvelle évangélisation, approuvées en 1990. Tout cela a été complété par l'accueil de la Lettre apostolique Novo millennio ineunte et par la réflexion sur celle-ci, lettre dont vous avez adopté les critères pastoraux en vue de les publier prochainement sous le titre suggestif de "Navega mar adentro" (Avance en eau profonde).

Je désire vous encourager dans vos choix afin d'affronter de façon efficace la nouvelle évangélisation, à travers la persévérance créative des actions quotidiennes de la pastorale ordinaire, l'accueil cordial et le renouveau de la sainteté de la part des communautés paroissiales, tout cela uni à une solide formation chrétienne qui favorise l'engagement missionnaire des laïcs.

Comme je l'ai indiqué dans ma Lettre apostolique Novo millennio ineunte, nous nous trouvons face à "l'horizon plus large et plus exigeant de la pastorale ordinaire" (NM 29), qui est toujours un devoir passionnant. Cela ne signifie pas que chacun doit porter à terme son oeuvre sur la base de critères individuels, mais, au contraire, que l'on doit se conformer aux critères propres au projet pastoral de son diocèse respectif, en convergeant ensuite vers les priorités communes, et en répondant aux nécessités d'évangélisation actuelle des Argentins.

N'hésitez jamais à placer tout votre zèle et votre engagement pastoral dans l'oeuvre de la nouvelle évangélisation, profondément convaincus qu'elle illuminera l'action des laïcs chrétiens et qu'elle pourra être un remède efficace et durable aux maux graves et complexes dont souffrent actuellement de nombreux habitants de votre nation.


3. Dans votre action pastorale, vous pouvez compter sur l'aide des prêtres, unis à leur Evêque selon la belle expression de saint Ignace d'Antioche, "comme les cordes à la lyre" (Ad Efesios, 4, 1). Ceux-ci, en vertu de leur ordination, ont reçu une consécration spéciale qui les destine à "prêcher l'Evangile, être les pasteurs des fidèles et célébrer le culte divin" (Lumen gentium, LG 28), car ils sont le signe et l'expression de la charité pastorale du Christ dans leur fonction d'enseigner, de sanctifier et de soutenir le peuple qui leur est confié. Ils participent à la mission qui leur a été confiée par le Christ lui-même et reconnue par l'Eglise, qui ne doit pas être vécue comme le simple exercice d'une fonction humaine, et doit être préservée tous les jours comme un don précieux de Dieu.

Le prêtre doit se rappeler qu'il est avant tout un homme de Dieu, et ne doit donc jamais négliger sa vie spirituelle. Toute son activité "doit commencer effectivement par la prière" (Saint Albert le Grand, Commentaire de la théologie mystique, 15). Parmi les multiples activités qui remplissent la journée de chaque prêtre, le primat revient à la célébration de l'Eucharistie, qui le rend conforme au Prêtre Suprême et Eternel.

Dans la présence de Dieu, il trouve la force pour vivre les exigences du ministère et la docilité pour accomplir la volonté de Celui qui l'a appelé et consacré, et qui l'a envoyé pour lui confier une mission particulière et nécessaire. C'est pourquoi la célébration pieuse de la Liturgie des Heures, la prière personnelle, la méditation assidue de la Parole de Dieu, la dévotion à la Mère du Seigneur et de l'Eglise et la vénération des Saints, sont des instruments précieux dont on ne peut se passer pour affirmer la splendeur de son identité et assurer l'exercice fécond de son ministère sacerdotal.

Comme il s'agit d'une mission exigeante, et que les circonstances actuelles sont souvent difficiles, c'est à vous qu'il revient, chers Evêques, de les aider, de les accompagner et de les suivre, en vous préoccupant des nécessités de leur vie et en leur offrant des moyens matériels, spirituels et de formation, afin qu'ils vivent avec joie et dignité leur ministère. En se sentant accueillis par vous comme par un père, qu'ils aillent à la rencontre des hommes pour leur annoncer avec dynamisme l'Evangile et en faire des disciples du Seigneur!


4. La vie paroissiale est le moyen ordinaire à travers lequel les fidèles de tout milieu et de toute condition participent à la vie de l'Eglise et reçoivent la grâce de Dieu. Dans la Lettre apostolique Dies Domini, j'ai écrit: "parmi les nombreuses activités d'une paroisse, pour la communauté, aucune n'est aussi vitale et n'apporte autant pour la formation que, le dimanche, la célébration du jour du Seigneur et de l'Eucharistie" (n. 35), car en elle, le Christ est présent dans son Eglise de façon éminente comme source et sommet de la vie ecclésiale. Pour cette raison, le Concile Vatican II recommande que "les curés veillent à ce que la célébration du sacrifice eucharistique soit le centre et le sommet de toute la vie de la communauté chrétienne" (Christus Dominus CD 30).

En tant que pasteurs, vous êtes conscients de l'importance de la Sainte Messe pour l'édification, le développement et la revitalisation des communautés chrétiennes. Rien ne pourra jamais la remplacer, car, bien que la célébration de la Parole, en l'absence du prêtre, soit utile pour maintenir vivante la foi, l'objectif vers lequel on doit tendre est la célébration eucharistique régulière.

La Sainte Messe, avec la double table de la Parole et de l'Eucharistie, fait en sorte que les fidèles aient la vie et qu'ils l'aient en abondance (cf. Jn 10,10), la recevant du Christ lui-même qui forme et alimente ainsi son Eglise. A cet égard, le Catéchisme de l'Eglise catholique rapelle que "la célébration dominicale du Jour et de l'Eucharistie du Seigneur est au coeur de la vie de l'Eglise" (CEC 2177), car elle fait revivre aux chrétiens "avec une intensité particulière l'expérience faite par les Apôtres réunis le soir de Pâques, lorsque le Ressuscité se manifesta devant eux (Jn 20,19)" (Dies Domini, n. 33).

Il faut donc développer une action pastorale qui favorise une participation plus assidue des fidèles à l'Eucharistie du Dimanche, qui doit être vécue non seulement comme un précepte, mais également comme une exigence profondément inscrite dans l'existence humaine. "Il est vraiment d'une importance capitale que chaque fidèle soit convaincu qu'il ne peut vivre sa foi dans la pleine participation à la vie de la communauté chrétienne sans prendre part régulièrement à l'assemblée eucharistique dominicale" (ibid., n. 81). Plus récemment, j'ai également indiqué qu'il faut donner "une importance particulière à l'Eucharistie dominicale et au dimanche lui-même, entendu comme un jour particulier de la foi, jour du Seigneur ressuscité et du don de l'Esprit" (Novo millennio ineunte NM 35).


5. Un autre domaine de l'action pastorale qui exige une attention particulière est celui de la promotion et de la défense de l'institution familiale, qui fait aujourd'hui l'objet de nombreuses attaques provenant de divers fronts et à travers de multiples et subtils arguments. Nous assistons à un courant, très fort, dans certains milieux, qui vise à affaiblir sa véritable nature. Les fidèles catholiques eux-mêmes, pour divers motifs, n'ont pas recours au sacrement du mariage pour inaugurer leur union dans l'amour. Il est important de rappeler que le Christ "vient à la rencontre des époux chrétiens par le sacrement du mariage. Il continue de demeurer avec eux pour que les époux, par leur don mutuel, puissent s'aimer dans une fidélité perpétuelle, comme lui-même a aimé l'Eglise et s'est livré pour elle" (Gaudium et spes GS 48).

Je connais l'engagement que vous placez dans la défense et la promotion de cette institution, et qui a son origine en Dieu et dans son dessein de salut (cf. Familiaris consortio FC 49). La diffusion de la crise du mariage et de la famille ne doit pas conduire à l'accablement ou à l'abandon; au contraire, elle doit nous pousser à proclamer avec fermeté pastorale, comme un authentique service à la famille et à la société, la vérité sur le mariage et sur la famille établie par Dieu. Cesser de le faire serait une grave omission pastorale qui induirait en erreur les croyants, ainsi que ceux qui ont la lourde responsabilité de prendre des décisions en ce qui concerne le bien commun de la nation. Cette vérité est valable non seulement pour les catholiques, mais pour tous les hommes et femmes sans distinction, car le mariage et la famille constituent un bien irremplaçable pour la société, qui ne peut rester indifférente face à leur dégradation ou à la perte de leur identité.

A ce propos, les conjoints engagés dans l'Eglise doivent, avec l'aide des pasteurs, oeuvrer afin d'approfondir la théologie du mariage, aider les jeunes couples et les familles en difficultés à mieux reconnaître la valeur de leur engagement sacramentel et à accueillir la grâce de l'alliance qu'ils ont scellée en tant que baptisés. Les familles chrétiennes doivent être les premières à témoigner de la grandeur de la vie conjugale et familiale, fondée sur l'amour réciproque et sur la fidélité. Grâce au Sacrement, leur amour humain acquiert une valeur supérieure, car les conjoints manifestent l'amour du Christ pour son Eglise, en assumant dans le même temps une responsabilité importante dans le monde: celle d'engendrer des fils appelés à devenir fils de Dieu et les aider dans leur croissance humaine et surnaturelle.

Chers frères, suivez les familles, encouragez la pastorale familiale dans vos diocèses et promouvez les mouvements et les associations de spiritualité du mariage; réveillez leur zèle apostolique afin qu'ils fassent leur le devoir de la nouvelle évangélisation, qu'ils ouvrent leurs portes à ceux qui vivent dans des conditions difficiles, et qu'ils témoignent de la grande dignité d'un amour désintéressé et inconditionnel.

En outre, il ne faut pas oublier que pour la défense et la promotion de l'institution familiale, la préparation adéquate de ceux qui s'apprêtent à contracter le sacrement du mariage est importante (cf. CIC CIC 1063-1064). De cette façon, on encourage la formation d'authentiques familles qui vivent selon le dessein de Dieu. Dans cette tâche, il faut présenter aux futurs époux non seulement les aspects anthropologiques de l'amour humain, mais également les bases pour une authentique spiritualité conjugale, qui considère le mariage comme une vocation qui permet au baptisé d'incarner la foi, l'espérance et la charité au sein d'une nouvelle situation personnelle, sociale et religieuse.

En complétant cette préparation spécifique, on peut saisir également l'occasion de ré-évangéliser les baptisés qui se rapprochent de l'Eglise pour demander le sacrement du mariage. Même si aujourd'hui, grâce à la diffusion de l'enseignement, les jeunes possèdent souvent une culture supérieure à celle de leurs parents, dans de nombreux cas, cela ne correspond pas à une plus grande formation à la vie chrétienne, dans la mesure où l'on constate parfois non seulement une grave ignorance religieuse chez les jeunes générations, mais également, ce qui est plus triste, un certain vide moral et un manque marqué du sens transcendant de la vie.


6. Chers frères, à travers ces réflexions sur divers thèmes, je désire vous encourager dans votre service à l'Eglise de Dieu en pèlerinage dans la Nation argentine. Dans quelques jours, vous retournerez dans votre pays pour guider les prêtres et les fidèles à vivre le chemin quadragésimal et à célébrer avec une vigueur renouvelée les fêtes annuelles de Pâques, sommet de l'année liturgique. Apportez mon salut en premier lieu aux jeunes, "sentinelles du matin" de ce nouveau millénaire, espérance de l'Eglise et de la nation, en particulier aux jeunes argentins qui, dans les séminaires et dans les maisons de formation nombreuses et variées, se préparent au sacerdoce; aux familles, écoles d'humanité généreuse et de vertu chrétienne; aux pauvres et aux personnes dans le besoin, qui doivent continuer à faire l'objet de votre sollicitude et de vos attentions; aux professionnels des divers domaines de l'activité humaine, qui doivent être les constructeurs de la Patrie et de la société renouvelée en ce moment si particulier de votre histoire; aux malades et aux personnes âgées; aux prêtres et à toutes les personnes consacrées, témoins du transcendant dans un monde où tout change et semble difficile.

Que sur vous et sur vos communautés chrétiennes se déversent les Bénédictions du Seigneur, par l'intercession de la Virgen de Luján, Mère de tous les Argentins, sur le manteau de laquelle se reflètent les couleurs du drapeau de la patrie! J'accompagne ces voeux de ma Bénédiction apostolique, que je vous donne volontiers, en l'étendant à tous les fidèles argentins.





Discours 2002 - MESSAGE AU XXVème CHAPITRE GÉNÉRAL DE LA CONGRÉGATION FONDÉE PAR DON BOSCO (SALÉSIENS)