Discours 2002 - Lundi 6 mai 2002


AUX ÉVÊQUES DES ANTILLES EN VISITE "AD LIMINA APOSTOLORUM"

Mardi 7 mai 2002



Chers frères évêques,

1. "Que Dieu le Père et le Seigneur Jésus-Christ accordent paix aux frères, ainsi que charité et foi" (Ep 6,23). Chers évêques des Antilles, avec les paroles de l'Apôtre Paul et dans la joie de Pâques, je vous souhaite la bienvenue à l'occasion de votre visite ad limina Apostolorum.A travers vous, je salue tous les fidèles du Christ confiés à votre sollicitude. Que la paix du Seigneur ressuscité règne dans tous les coeurs et dans tous les foyers de la région des Caraïbes!

Je remercie Mgr Clarke des paroles courtoises avec lesquelles il a exprimé la spiritualité de communion qui est le coeur de l'Eglise (cf. Novo millennio ineunte NM 43-45). C'est cette communion qui vous conduit à Rome, en pèlerinage sur les tombes des Apôtres, où vous renouvelez votre fidélité à la tradition apostolique, dont les racines plongent dans le commandement du Seigneur (cf. Mt 28,19-20) et font participer à la vie intérieure de la Trinité, base de toute la réalité.
Vous venez ici en tant que pasteurs appelés à partager la plénitude du sacerdoce éternel du Christ. En premier lieu, vous êtes des prêtres: vous n'êtes pas des dirigeants exécutifs, des hommes d'affaire, des fonctionnaires de la finance ou des bureaucrates, mais des prêtres. Cela signifie en particulier que vous avez été appelés à faire des sacrifices, car telle est l'essence du sacerdoce. Le centre du sacerdoce chrétien consiste à offrir le sacrifice du Christ. L'Eucharistie est l'essence de l'existence du prêtre, le motif pour lequel il n'y a rien de plus important que l'offrande du sacrifice eucharistique. C'est pourquoi la célébration de l'Eucharistie se trouve au centre de votre visite ad limina. Nous ne pouvons jamais oublier que les tombes des Apôtres que nous vénérons à Rome sont des tombes de martyrs, dont la vie et la mort ont été attirées toujours plus par la profondeur du sacrifice du Christ, jusqu'à affirmer: "Je suis crucifié avec le Christ; et ce n'est plus moi qui vis, mais le Christ qui vit en moi" (Ga 2,20). Cela a été la matrice de leur extraordinaire oeuvre missionnaire, que nous, leurs successeurs, devons imiter à notre époque si nous voulons être fidèles à la nouvelle évangélisation à laquelle le Concile Vatican II a préparé l'Eglise de façon providentielle.


2. Le Concile fut "la grande grâce dont l'Eglise a bénéficié au vingtième siècle" (Novo millennio ineunte NM 57). Bien que les décennies qui nous en séparent n'aient pas été exemptes de difficultés - nous avons même connu des périodes au cours desquelles des éléments importants de la vie chrétienne semblaient en péril -, de nombreux signes indiquent maintenant ce nouveau printemps de l'Esprit dont le grand Jubilé de l'An 2000 a fait apparaître de manière évidente le caractère prophétique. Dans les années qui suivirent le Concile, l'apparition de nouvelles aspirations spirituelles et de nouvelles énergies apostoliques parmi les fidèles de l'Eglise fut sans conteste l'un des fruits de l'Esprit. Les laïcs vivent la grâce de leur Baptême sous des formes qui font apparaître de manière plus resplendissante le riche éventail des charismes dans l'Eglise; et pour cela, nous ne cessons de rendre grâce à Dieu.

Il est également vrai que le réveil des fidèles laïcs dans l'Eglise a vu apparaître en même temps, dans vos pays aussi, des problèmes relatifs à l'appel au sacerdoce, s'accompagnant de faibles entrées au séminaire dans les Eglises dont vous avez la charge. En tant que Pasteurs, vous êtes vivement préoccupés car, comme vous le savez bien, l'Eglise catholique ne peut pas exister sans le ministère sacerdotal que le Christ lui-même désire pour elle.

Des personnes, on le sait, affirment que la diminution du nombre de prêtres est l'oeuvre de l'Esprit Saint et que Dieu lui-même conduirait l'Eglise, faisant en sorte que le gouvernement des fidèles laïcs se substitue au gouvernement des prêtres. Une telle affirmation ne rend certainement pas compte de ce que les Pères conciliaires ont exprimé lorsqu'ils ont cherché à promouvoir une implication plus grande des fidèles laïcs dans l'Eglise. Dans leur enseignement, les Pères conciliaires ont tout simplement mis en évidence la profonde complémentarité entre les prêtres et les laïcs qu'implique la nature symphonique de l'Eglise. Une mauvaise compréhension de cette complémentarité a parfois conduit à une crise d'identité et de confiance chez les prêtres, et aussi à des formes d'engagement laïc trop cléricales ou trop politisées.

L'engagement des laïcs devient une forme de cléricalisme quand les rôles sacramentels ou liturgiques qui reviennent au prêtre sont assumés par des fidèles laïcs ou bien lorsque ceux-ci se mettent à accomplir des tâches qui relèvent du gouvernement pastoral propre au prêtre. Dans de telles situations, ce que le Concile a enseigné sur le caractère essentiellement séculier de la vocation laïque est le plus souvent négligé (cf. Lumen gentium LG 31). C'est le prêtre, en tant que ministre ordonné, qui, au nom du Christ, préside la communauté chrétienne, sur les plans liturgique et pastoral. Les laïcs l'assistent de bien des manières dans cette tâche. Mais le lieu premier de l'exercice de la vocation laïque est le monde des réalités économiques, sociales, politiques et culturelles. C'est dans ce monde que les laïcs sont invités à vivre leur vocation baptismale, non pas comme des consommateurs passifs, mais en tant que membres actifs de la grande oeuvre qui exprime le caractère chrétien. Il revient au prêtre de présider la communauté chrétienne afin de permettre aux laïcs de remplir la tâche ecclésiale et missionnaire qui leur est propre. En un temps de sécularisation insidieuse, il peut paraître étrange que l'Eglise insiste autant sur la vocation séculière des laïcs. Or c'est précisément le témoignage évangélique des fidèles dans le monde qui est au coeur de la réponse de l'Eglise au malaise de la sécularisation (cf. Ecclesia in America ).

L'engagement des laïcs est politisé lorsque le laïcat est absorbé par l'exercice du "pouvoir" à l'intérieur de l'Eglise. Cela arrive lorsque l'Eglise n'est pas perçue en termes de "mystère" de grâce qui la caractérise, mais en termes sociologiques ou même politiques, souvent sur la base d'une compréhension erronée de la notion de "Peuple de Dieu", une notion qui a de profondes et riches bases bibliques et qui est si heureusement utilisée par le Concile Vatican II. Lorsque ce n'est pas le service mais le pouvoir qui modèle toute forme de gouvernement dans l'Eglise, que ce soit dans le clergé ou dans le laïcat, les intérêts opposés commencent à se faire sentir. Le cléricalisme est pour les prêtres cette forme de gouvernement qui relève plus du pouvoir que du service, et qui engendre toujours des antagonismes entre les prêtres et le peuple; ce cléricalisme se retrouve dans des formes de leadership laïc qui ne tiennent pas suffisamment compte de la nature transcendantale et sacramentelle de l'Eglise, ainsi que de son rôle dans le monde. Ces deux attitudes sont nocives. A l'inverse, ce dont l'Eglise a besoin, c'est d'un sens de la complémentarité entre la vocation du prêtre et celle des laïcs qui soit plus profond et plus créatif. Sans cela, nous ne pouvons pas espérer être fidèles aux enseignements du Concile, ni sortir des difficultés habituelles concernant l'identité du prêtre, la confiance en lui et l'appel au sacerdoce.


3. Toutefois, nous devons aller au-delà des frontières de l'Eglise, car le Concile Vatican II a voulu essentiellement promouvoir de nouvelles énergies pour sa mission dans le monde. Vous êtes conscients du fait qu'une partie essentielle de sa mission évangélisatrice est l'inculturation de l'Evangile et je sais que dans votre région, on a prêté une grande attention à la nécessité de développer des formes de culte et de vie catholique adaptées à la région des Caraïbes. Dans l'Encyclique Fides et ratio j'ai souligné que: "l'Evangile n'est pas opposé à telle ou telle culture, comme si, lorsqu'il la rencontre, il voulait la priver de ce qui lui appartient et l'obligeait à assumer des formes extrinsèques qui ne lui sont pas conformes" (FR 71). J'ai poursuivi en soulignant que non seulement les cultures ne sont pas affaiblies par la rencontre avec l'Evangile, mais qu'elles sont "même stimulées pour s'ouvrir à la nouveauté de la vérité évangélique, pour en tirer une incitation à se développer ultérieurement" (ibid., cf. Exhortation apostolique post-synodale Ecclesia in America ).

Dans ce but, il est important de rappeler les trois critères permettant de comprendre si nos tentatives pour inculturer l'Evangile possèdent un fondement sain. Le premier est l'universalité de l'esprit humain, dont les exigences fondamentales ne sont pas différentes, même dans des cultures complètement diverses. Aucune culture ne pourra donc jamais être absolue au point de nier que l'esprit humain est, au niveau le plus profond, le même à chaque époque, en chaque lieu et dans chaque culture. Le deuxième critère est que, en travaillant dans de nouvelles cultures, l'Eglise ne peut pas abandonner l'héritage précieux qui dérive de son développement initial dans la culture gréco-latine, car cela signifierait "aller contre le dessein providentiel de Dieu, qui conduit son Eglise au long des routes du temps et de l'histoire" (Fides et ratio FR 72). Il ne s'agit donc pas de refuser l'héritage gréco-latin pour permettre à l'Evangile de s'incarner à nouveau dans la culture des Caraïbes. Il s'agit plutôt d'utiliser l'héritage culturel de l'Eglise dans un dialogue profond et réciproquement ennoblissant avec la culture des Caraïbes. Le troisième critère est que la culture ne doit jamais se refermer sur sa propre diversité, elle ne doit pas se réfugier dans l'isolement et s'opposer aux autres cultures et traditions. Cela signifierait non seulement nier l'universalité de l'esprit humain, mais également celle de l'Evangile, qui n'est étranger à aucune culture et cherche à planter ses racines dans chacune d'entre elles.


4. Dans Ecclesia in America, j'ai observé que: "il est plus que jamais nécessaire que les fidèles passent d'une foi routinière [...] à une foi consciente, vécue personnellement. Se renouveler dans la foi sera toujours la voie la meilleure pour que tous soient conduits à la Vérité qu'est le Christ" (). C'est pourquoi, il est essentiel de développer dans vos Eglises particulières une nouvelle apologétique pour vos fidèles, afin qu'il puissent comprendre ce que l'Eglise enseigne et être en mesure de rendre raison de leur propre espérance (cf. 1P 3,15). Dans un monde où les personnes sont sans cesse soumises à la pression culturelle et idéologique des moyens de communication sociale et à l'attitude agressive de nombreuses sectes contre les catholiques, il est essentiel que les catholiques sachent ce que l'Eglise enseigne, comprennent cet enseignement et fassent l'expérience de sa force libératrice. Le manque de compréhension conduit à une carence d'énergie spirituelle, qui est pourtant nécessaire à la vie chrétienne et à l'oeuvre d'évangélisation.

L'Eglise est appelée à proclamer une vérité absolue et universelle au monde, à une époque où de nombreuses cultures éprouvent une incertitude profonde à l'égard de l'existence d'une telle vérité. L'Eglise doit donc parler avec la force du témoignage authentique. En considérant ce que cette tâche implique, le Pape Paul VI a déterminé quatre qualités, qu'il a définies comme perspicuitas, lenitas, fiducia, prudentia - clarté, douceur, confiance et prudence (cf. Lettre encyclique Ecclesiam suam, n. 81).

Parler avec clarté signifie qu'il nous faut expliquer de manière compréhensible la vérité de la Révélation et les enseignements de l'Eglise qui en dérivent. Ce que nous enseignons n'est pas toujours immédiatement ou facilement accessible aux personnes d'aujourd'hui. C'est pourquoi il faut expliquer et pas seulement répéter. Je me référais précisément à cela lorsque j'ai dit que nous avions besoin d'une nouvelle apologétique, adaptée aux exigences d'aujourd'hui, qui considère que notre tâche ne consiste pas seulement à conquérir des points de vue, mais des âmes, à nous engager dans une sorte de lutte spirituelle et non pas dans un conflit idéologique, à défendre et à promouvoir l'Evangile, et non pas nos propres personnes.

Cette apologétique aura besoin de respirer un esprit de douceur, fait de cette humilité et de cette compassion qui comprennent les inquiétudes et les interrogations des personnes et, dans le même temps, ne cèdent pas à une conception sentimentale de l'amour et de la compassion du Christ, en les séparant de la vérité. Nous savons que l'amour du Christ peut demander beaucoup de choses, précisément parce qu'elles ne sont pas liées au sentimentalisme, mais à la vérité qui seule nous rend libres (cf. Jn 8,32).

Parler avec confiance signifiera ne jamais perdre de vue la vérité absolue et universelle révélée dans le Christ, ni le fait qu'elle est la vérité à laquelle tous aspirent, indépendamment du degré de désintérêt, d'hostilité ou de réticence que chacun peut manifester.

Parler avec la sagesse pratique et le bon sens que le Pape Paul VI définit comme prudence et que Grégoire le Grand considère comme une vertu des personnes courageuses (Moralia, 22, 1) signifiera donner une réponse claire à celui qui demande: "Que nous faut-il donc faire?" (Lc 3,10 Lc 3,12 Lc 3,14). La grave responsabilité de notre ministère épiscopal apparaît ici dans toute sa difficulté. Nous devons prier chaque jour afin que l'Esprit Saint nous illumine, que nous puissions parler selon la sagesse de Dieu, et non selon celle du monde, "pour que ne soit pas réduite à néant la croix du Christ" (1Co 1,17).

Le Pape Paul VI a conclu en observant que parler avec perspicuitas, lenitas, fiducia et prudentia "nous rendra sages; nous rendra des maîtres" (cf. Ecclesiam suam, n. 83) et que c'est ce que nous sommes particulièrement appelés à être: des maîtres de vérité, qui ne cessent jamais d'implorer "la grâce de voir la vie entière et la force d'en parler de façon efficace" (Grégoire le Grand, Sur Ezéchiel, I, II, 6).


5. Je suis convaincu, chers frères, que de nombreux problèmes de votre ministère, y compris la nécessité d'un plus grand nombre de vocation sacerdotales et religieuses, pourront être résolus en osant se consacrer avec une générosité encore plus grande à la tâche missionnaire. Cela a été un objectif important du Concile et si, depuis cette époque, il y a eu des problèmes internes dans l'Eglise, cela a peut-être en partie eu lieu parce que la communauté catholique n'a pas été autant missionnaire que le souhaitaient le Seigneur Jésus et le Concile.

Chers frères Evêques, les Eglises particulières doivent elles aussi être missionnaires, dans le sens où elles doivent aller avec courage dans tous les lieux de la société des Caraïbes, même le plus obscur, armées de la lumière de l'Evangile et de l'amour qui ne connaît pas de limites. L'heure est venue de jeter les filets, même là où il ne semble pas y avoir de poisson (cf. Lc 5,4-5): Duc in altum! En planifiant cette mission, il est fondamental que vous sachiez que nous devons "parier sur la charité" (Novo millennio ineunte NM 49), car "le siècle et le millénaire qui commencent devront encore voir, et il est même souhaitable qu'ils le voient avec une plus grande force, à quel degré de dévouement peut parvenir la charité envers les plus pauvres" (Ibid. NM NM 49). Toutefois, il est encore plus important que vous gardiez le regard fermement tourné vers Jésus (cf. He He 12,2), sans perdre de vue Celui qui est le début et la fin de toute la mission chrétienne.

En invoquant sur vous, en ce temps de Pâques, les dons de l'Esprit Saint et en confiant vos communautés bien-aimées, ces "semences saintes du ciel" (Saint Augustin, Sermone, 34, 5), à la protection constante de Marie, Mère du Rédempteur, je vous donne ma Bénédiction apostolique, ainsi qu'aux prêtres, aux religieux, hommes et femmes, et à tous les fidèles laïcs de la région des Caraïbes, en gage de grâce et de paix en Jésus-Christ, premier-né d'entre les morts.


AUX PARTICIPANTS À L'ASSEMBLÉE GÉNÉRALE DU CENTRE CATHOLIQUE INTERNATIONAL POUR L’UNESCO

Vendredi 10 mai 2002




Monsieur le Cardinal,
Monsieur le Président,
Chers amis du Centre catholique international pour l’UNESCO,

1. Je suis heureux de vous accueillir ce matin, pour vous exprimer ma reconnaissance et vous redire ma confiance à l’occasion de votre trentième Assemblée générale, qui a pour thème «Le dialogue interculturel et interreligieux: une chance pour l’humanité». Je remercie le Président, Monsieur Bernard Lacan, de ses paroles délicates. Je salue les membres du Centre catholique, en particulier Monsieur Gilles Deliance, son Directeur, vous exprimant à tous ma gratitude pour l’activité que vous déployez au service de la culture. Je suis heureux que soit présent avec vous l’Observateur permanent du Saint-Siège auprès de l’Unesco, Monseigneur Renzo Frana, et je le remercie pour le travail qu’il a accompli durant de longues années auprès de cette Organisation des Nations unies.

Cette année marque le cinquantième anniversaire de la nomination du premier Observateur permanent du Saint-Siège auprès de l’Unesco, en la personne de Monseigneur Roncalli, le bienheureux Pape Jean XXIII. Depuis lors, le Saint-Siège suit avec attention les activités de l’Unesco dans les domaines fondamentaux de l’éducation, des sciences, des sciences humaines, de la communication et de l’information, autant d’aspects de la culture, «réalité fondamentale qui nous unit et qui est à la base de l’établissement et des finalités de l’Unesco» (Discours à l’Unesco, Paris, 2 juin 1980, n. 8).

Votre centre facilite le travail et la coopération des Organisations internationales catholiques qui participent aux grandes activités de l’Unesco liées à l’éducation et à la formation. Je vous encourage, dans la mission qui vous est propre, à diffuser, à travers vos initiatives et vos publications, le savoir et un savoir-faire spécifiques, offrant à nos contemporains la possibilité de relever les graves défis culturels de notre temps en y apportant des réponses dignes de la personne humaine.

Les grands domaines de l’éducation et de la culture, de la communication et de la science, comportent une dimension éthique fondamentale. Pour y donner des réponses appropriées, il convient d’acquérir une juste connaissance scientifique, de mener une réflexion approfondie et de proposer l’éclairage de l’humanisme chrétien et des valeurs morales universelles. La famille doit être l’objet d’une attention particulière, car c’est à elle, en tout premier lieu, que revient la mission éducative auprès des jeunes.

Je vous encourage à poursuivre sans relâche votre travail, afin que s’opère un dialogue fécond entre le message du Christ et les cultures. Je vous sais gré du service que vous accomplissez dans la formation d’experts catholiques, prenant soin de les préparer sérieusement et de les enraciner dans la foi, les rendant aptes à apporter au monde un témoignage crédible, nourri de la Parole de Dieu et de l’enseignement de l’Église. Il serait souhaitable que vos recherches sur les thèmes scientifiques, culturels et éducatifs, réalisées à la lumière de l’Évangile, puissent être mises à la disposition des catholiques qui oeuvrent dans ces domaines, et cela de manière habituelle et accessible, selon les possibilités offertes par les moyens modernes.

Vous avez choisi Rome pour tenir vos assises, manifestant ainsi votre attachement au Successeur de Pierre et au Saint-Siège. Sensible à ce geste, je vous remercie pour la mission d’Église que vous assurez de façon généreuse et attentive auprès de l’Unesco, au service de tous les hommes.

À chacun et à chacune d’entre vous, et à toutes les personnes qui vous sont chères, j’accorde bien volontiers la Bénédiction apostolique



Á UNE DÉLÉGATION BULGARE VENUE POUR LA FÊTE DES SAINTS CYRILLE ET MÉTHODE

Samedi 11 mai 2002



Chers amis bulgares,

Une fois de plus, j'ai la joie d'accueillir une délégation bulgare à l'occasion de la fête des saints Cyrille et Méthode. Votre visite est désormais devenue traditionnelle. Cette année, elle revêt un caractère particulier en prévision de ma visite en Bulgarie dans deux semaines. Je remercie S.E. le Ministre des Affaires étrangères, pour ses paroles cordiales, et le Métropolite Kalinik pour ses paroles fraternelles et pour les salutations qu'il me transmet de la part du Patriarche Maxim. J'assure votre délégation de mes prières sincères pour le bien-être du peuple bulgare, si riche d'histoire et d'humanité.

Même si ma visite dans votre pays a un but pastoral, celui de confirmer mes frères et soeurs catholiques dans la foi, je forme également le voeu fervent qu'elle renforce les liens de communion chrétienne entre l'Eglise catholique et l'Eglise orthodoxe bulgare. Notre rencontre aidera certainement la Bulgarie à consolider ses racines chrétiennes à un moment où l'ancien ordre a disparu et où une vie nouvelle se dessine dans votre pays. Cela serait un service rendu par les Eglises au continent européen tandis qu'il cherche à édifier une nouvelle unité, en puisant plus abondamment aux richesses de l'Orient et de l'Occident.

Une telle contribution serait profondément en harmonie avec la vision des saints Cyrille et Méthode, une vision qui n'a rien perdu de son importance à travers les siècles. Née de l'Evangile de Jésus-Christ, leur vision était une vision d'unité dans la diversité, de liberté rattachée à la vérité, d'espérance face à toute douleur. En visitant la Bulgarie, je rendrai visite au peuple né de leur témoignage et je rencontrerai la culture qui incarne l'âme de leurs enseignements.

Du tombeau des Apôtres Pierre et Paul, j'envoie au Saint-Synode des salutations de paix. Au gouvernement et au peuple de Bulgarie, j'exprime ma joie de me rendre bientôt dans leur pays. En vous confiant à la protection de la Mère du Sauveur et à l'intercession des saints Cyrille et Méthode, j'invoque sur la nation d'abondantes Bénédictions de Dieu tout-puissant.



À 22 MAIRES DE DIVERSES GRANDES VILLES DU MONDE PARTICIPANT À LA PREMIÈRE CONFÉRENCE SUR LA GESTION DE LA MONDIALISATION À L'ÉCHELLE LOCALE ("GLOCALISATION")

Lundi 13 mai 2002



Chers amis,

C'est pour moi une grande joie de vous rencontrer, vous qui êtes maires de quelques-unes des plus grandes villes du monde. Vous êtes réunis à Rome pour réfléchir sur la manière dont la mondialisation affecte la vie des villes dont vous avez la charge, et sur les opportunités qu'elle offre d'établir des relations plus étroites entre celles-ci. Je suis profondément reconnaissant à Monsieur Walter Veltroni, Maire de Rome pour ses paroles courtoises d'introduction et de conclusion.

Une ville est bien davantage qu'un territoire, qu'une zone de production économique, ou qu'une réalité politique. C'est par dessus tout une communauté de personnes, et en particulier de familles avec leurs enfants. C'est une expérience humaine vivante, enracinée dans l'histoire, possédant une identité culturelle qui lui est propre. Ceux qui exercent un contrôle administratif et politique sur celle-ci ont de lourdes responsabilités quant au bien commun des personnes, des êtres humains possédant une dignité et des droits inaliénables. De même, les citoyens ont des devoirs importants à l'égard de la communauté.

La dimension éthique d'une ville devrait être avant tout fondée sur le concept de solidarité. Chacun de vous doit faire face à de graves problèmes économiques et sociaux qu'on ne pourra pas résoudre si une solidarité d'un nouveau genre ne voit pas le jour. Les institutions et les organisations sociales à différents niveaux, tout comme l'Etat, doivent participer à la promotion d'un mouvement général de solidarité entre toutes les couches de la population, en faisant preuve d'une attention particulière à l'égard des plus faibles et des laissés-pour-compte. Il ne s'agit pas seulement d'une question d'intérêt. C'est une nécessité de l'ordre moral, auquel chacun doit être éduqué, et auquel doivent s'attacher tous ceux qui exercent une influence, de quelque ordre qu'elle soit, pour des raisons de conscience.

L'objectif de la solidarité doit être le progrès d'un monde plus humain pour tous, un monde auquel chaque individu pourrait participer de façon positive et utile, et dans lequel le bien-être de quelques-uns ne constituerait plus un obstacle au développement des autres, mais une aide.

Alors que vous réfléchissez aux nombreuses questions complexes soulevées par votre conférence, je vous encourage à voir dans votre tâche une occasion unique d'accomplir le bien, de vraiment améliorer le monde dans lequel nous vivons. Puisse le Tout-Puissant éclairer et soutenir vos efforts.
J'invoque d'abondantes Bénédictions divines d'harmonie et de paix sur vous et sur vos concitoyens.



MESSAGE À S.Em. LE CARDINAL PAUL POUPARD, POUR LE XXème ANNIVERSAIRE DE LA CRÉATION DU CONSEIL PONTIFICAL DE LA CULTURE




Monsieur le Cardinal,

C'est avec plaisir que je m'unis à vous et à vos collaborateurs, aux ambassadeurs accrédités près le Saint-Siège et à toutes les personnalités venues célébrer le vingtième anniversaire de la création du Conseil pontifical de la Culture.

Dès le début de mon pontificat, j'ai saisi toutes les occasions de répéter à quel point le dialogue entre l'Eglise et les cultures est important. C'est un domaine vital non seulement pour la nouvelle évangélisation et l'inculturation de la foi, mais également pour le destin du monde et l'avenir de l'humanité.

Au cours des vingt dernières années, les modèles de pensée et les coutumes de nos sociétés ont considérablement changé, alors que les progrès techniques,  avec  l'avènement  des technologies modernes de communication, ont eu une profonde influence sur les relations de l'homme avec la nature, avec lui-même et avec les autres. La mondialisation elle-même, qui initialement concernait le domaine économique, est désormais devenue un phénomène qui touche aussi d'autres aspects de la vie humaine. Devant de telles mutations culturelles, la réflexion des Pères du Conseil oecuménique qui, dans la Constitution pastorale Gaudium et spes, voulurent souligner l'importance de la culture pour le plein développement de l'homme, apparaît plus que jamais pertinente. Dans la Lettre autographe pour la création du Conseil pontifical de la Culture, j'écrivais: "La synthèse entre culture et foi n'est pas seulement une exigence de la culture mais aussi de la foi... Une foi qui ne devient pas culture est une foi qui n'est pas pleinement accueillie, entièrement pensée et fidèlement vécue" (cf. ORLF n. 21 du 25 mai 1982).


2. Après le Concile, au cours des Assemblées du Synode des Evêques, ces thématiques sont souvent réapparues, et je les ai reprises dans des Exhortations apostoliques spécifiques. Je voudrais ici remercier ce Conseil pontifical, que j'ai créé le 20 mai 1982, de l'aide qu'il m'a apportée dans ce domaine, très important pour l'action missionnaire de l'Eglise.

En 1993, j'ai ensuite voulu unir à ce dicastère le Conseil pontifical pour le Dialogue avec les Non-croyants, institué par mon vénéré prédécesseur, le serviteur de Dieu Paul VI, avec la conviction que la culture est une voie privilégiée pour comprendre la façon de penser et de ressentir des hommes de notre époque qui ne font référence à aucune croyance religieuse. Dans cette perspective, j'écrivais à cette occasion: "Le Conseil promeut la rencontre entre le message salvifique de l'Evangile et les cultures de notre temps, souvent marquées par la non-croyance et l'indifférence religieuse, afin qu'elles s'ouvrent toujours davantage à la foi chrétienne, créatrice de culture et source inspiratrice des sciences, des lettres et des arts" (Motu proprio Inde a Pontificatus, 25 mars 1993, art. 1; cf. ORLF n. 23 du 8 juin 1993).


3. Monsieur le Cardinal, je voudrais profiter de cette heureuse circonstance pour encourager le Conseil pontifical de la Culture et tous ses membres à poursuivre le chemin déjà entrepris, pour faire en sorte que la voix du Saint-Siège puisse parvenir dans les divers "aréopages" de la culture moderne, en entretenant des relations fructueuses avec les amateurs des arts et des sciences, des lettres et de la philosophie.

Dans les rencontres ecclésiales et interculturelles sur la science, la culture et l'éducation, ainsi que dans les Organisations internationales, que tous vos efforts visent à témoigner de l'intérêt de l'Eglise pour le dialogue fécond de l'Evangile du Christ avec les cultures, et d'une participation concrète des catholiques à la construction d'une société toujours plus respectueuse de la personne humaine, créée à l'image de Dieu.

Tout en invoquant, dans la perspective toute proche de la fête de la Pentecôte, la lumière de l'Esprit divin sur l'activité du dicastère, je vous donne de tout coeur, Monsieur le Cardinal, ainsi qu'à vos collaborateurs et à tous ceux qui sont réunis pour célébrer cet heureux anniversaire, une Bénédiction apostolique spéciale et affectueuse.

Du Vatican, le 13 mai 2002



  MESSAGE AUX PARTICIPANTS À L'ASSEMBLÉE GÉNÉRALE DES OEUVRES PONTIFICALES MISSIONNAIRES

Jeudi 16 mai 2002



1. Chers Directeurs nationaux, collaborateurs et collaboratrices des Oeuvres pontificales missionnaires, la rencontre annuelle avec vous constitue pour moi un motif de joie.

La réalité missionnaire de l'Eglise représente un puissant encouragement pour répondre, de façon responsable et clairvoyante, aux défis du monde actuel. Face aux difficultés et aux attentes du temps présent, qui interpellent notre foi, l'Eglise indique avec un humble courage Jésus-Christ, espérance vivante comme étant la réponse. L'Eglise est consciente que "l'évangélisation missionnaire constitue le premier service que l'Eglise peut rendre à tout homme et à l'humanité entière dans le monde actuel" (Redemptoris missio RMi 2), en révélant l'amour de Dieu qui s'est manifesté dans le Rédempteur. La communauté des croyants avance ainsi dans les siècles en obéissant au mandat du Seigneur: "Allez donc, de toutes les nations faites des disciples [...], leur apprenant à observer tout ce que je vous ai prescrit" (Mt 28,19-20).

Jésus ne nous a-t-il pas assuré qu'il sera avec nous "pour toujours jusqu'à la fin du monde" (Mt 28,20)? Confiants dans sa Parole, les chrétiens vivent chaque époque comme "le moment favorable" et le "jour du salut" (cf. 2Co 6,2), car "Jésus-Christ est le même hier, aujourd'hui et à jamais!" (He 13,8).

Très chers frères et soeurs, votre engagement est précisément celui d'aider les communautés ecclésiales à répondre aux dons de l'Esprit et à collaborer activement à l'oeuvre universelle du salut.

2. Au cours des journées qui précèdent l'Assemblée générale des Oeuvres pontificales missionnaires, vous vous êtes arrêtés, bien que brièvement, pour réfléchir sur la nécessité d'une formation adaptée du personnel missionnaire et sur le dialogue, aujourd'hui toujours davantage nécessaire, avec les autres religions. Il vous apparaît bien clairement que cette formation n'est pas "marginale mais centrale dans la vie chrétienne" (Redemptoris missio RMi 83)

Il est en effet nécessaire que, aux divers niveaux de responsabilité, tous dans l'Eglise soient formés pour coopérer ensemble à la mission même du Christ. Il faut que les vocations ad gentes, ainsi que des ouvriers remplissant diverses fonctions dans le domaine de l'évangélisation, ne manquent jamais.

En outre, l'activité missionnaire ne peut jamais se limiter à une simple promotion humaine, à aider les pauvres et à libérer les opprimés. Même si elle doit courageusement intervenir dans ces domaines, en collaboration avec toutes les personnes de bonne volonté, l'Eglise possède une autre tâche primordiale et spécifique, faire en sorte que chaque homme et chaque femme rencontre le Christ, unique Rédempteur.

L'activité missionnaire doit donc tout d'abord se soucier de transmettre le salut que Jésus a opéré. D'autre part, qui mieux que vous peut témoigner que les pauvres ont tout d'abord faim de Dieu, et pas seulement de pain et de liberté? Lorque les croyants en Christ restent fidèles à leur mission, ils deviennent des instruments privilégiés de libération globale.


3. Mais la formation missionnaire a tout d'abord besoin du témoignage évangélique. Le véritable missionnaire est la personne sainte, et le monde attend des missionnaires saints. Il n'est alors pas suffisant de se consacrer uniquement au renouvellement des méthodes pastorales et des structures, en coordonnant mieux les forces ecclésiales; il ne suffit pas de se limiter à explorer avec une plus grande précision les bases bibliques et théologiques de la foi. Ce qui est indispensable, c'est de susciter une nouvelle "ardeur à la sainteté" parmi les missionnaires et dans toute la communauté chrétienne, et en particulier parmi les plus proches collaborateurs des missionnaires.

Je voudrais encore une fois répéter ici l'urgence de missionnaires ad gentes et ad vitam. Cette vocation "conserve toute sa valeur: elle est le paradigme de l'engagement missionnaire de l'Eglise, qui a toujours besoin que certaines personnes se donnent radicalement et totalement, qui a toujours besoin d'élans nouveaux et audacieux" (Redemptoris missio RMi 66).

Je rends grâce au Seigneur pour ceux qui, écoutant sa voix, lui répondent avec générosité, tout en étant conscients de leurs propres limites, et qui ont confiance dans ses promesses et dans son aide. Soutenus par la grâce divine, les missionnaires - prêtres, religieux, religieuses et laïcs - consacrent au Christ toutes leurs énergies dans des terres lointaines, devant parfois faire face à des difficultés, des incompréhensions, des dangers et même des persécutions.

4. Comment ne pas rappeler avec gratitude ceux qui, également au cours des derniers mois, sont tombés en première ligne pour rester fidèles à leur mission? Ce sont des évêques et des prêtres, mais les religieux et les religieuses ne manquent pas non plus, ainsi que de nombreux laïcs. Ce sont "les martyrs et les témoins de la foi" de notre temps, qui encouragent tous les croyants à servir l'Evangile avec un dévouement total.

J'élève ma prière à Dieu pour chacun d'eux, alors que je vous confie, très chers frères et soeurs, aux mains de Marie, Etoile de l'Evangélisation, et je vous donne de tout coeur une Bénédiction apostolique spéciale, que j'étends à vos collaborateurs et collaboratrices dans l'inlassable travail d'animation, de formation et de coopération missionnaire.



Discours 2002 - Lundi 6 mai 2002