Discours 2002 - DÉCLARATION COMMUNE DU SAINT-PÈRE ET DU PATRIARCHE OECUMÉNIQUE SA SAINTETÉ BARTHOLOMAIOS I

DÉCLARATION COMMUNE DU SAINT-PÈRE ET DU PATRIARCHE OECUMÉNIQUE SA SAINTETÉ BARTHOLOMAIOS I

Lundi 10 juin 2002



Nous sommes réunis ici aujourd'hui dans un esprit de paix pour le bien de tous les êtres humains et pour la protection de la création. En ce moment de l'histoire, au début du troisième millénaire, nous regrettons de constater les souffrances quotidiennes d'un grand nombre de personnes à cause de la violence, de la faim, de la pauvreté et de la maladie. Nous sommes également préoccupés par les conséquences négatives pour l'humanité et pour toute la création qui découlent de la dégradation de certaines ressources naturelles fondamentales, comme l'eau, l'air et la terre, provoquée par un progrès économique qui ne reconnaît pas et ne tient pas compte de ses limites.

L'homme a détruit l'harmonie originale de la création

Dieu tout-puissant a envisagé un monde de beauté, et d'harmonie, et Il l'a créé en faisant de chacune de ses parties une expression de Sa liberté, de Sa sagesse et de Son amour (cf. Gn 1,1-25).

Au centre de toute la création, Il nous a placés, nous, êtres humains, avec notre dignité humaine inaliénable. Bien que nous ayons de nombreux points en commun avec les autres êtres vivants, Dieu tout-puissant est allé plus loin avec nous en nous donnant une âme immortelle, source de la conscience de soi et de la liberté, des dons qui nous configurent à son image et à sa ressemblance (cf. Gn 1,26-31 Gn 2,7). Marqués par cette ressemblance, Dieu nous a placés dans le monde afin de coopérer avec lui à la réalisation toujours plus complète de l'objectif divin de la création.

Au début de l'histoire, l'homme et la femme ont péché en désobéissant à Dieu et en rejetant son dessein de création. Parmi les conséquences de ce premier péché figure la destruction de l'harmonie originale de la création. Si nous examinons attentivement la crise sociale et écologique que la communauté mondiale doit affronter, nous devons constater que nous trahissons encore le mandat que Dieu nous a confié: être les gardiens appelés à collaborer avec Dieu en vue de veiller sur la création dans la sainteté et la sagesse.

La conscience écologique chrétienne

Dieu n'a pas abandonné le monde. Son désir est que Son dessein et notre espérance pour le monde soient accomplis à travers notre coopération en vue de restaurer sa beauté originelle. A notre époque, nous assistons à une croissance de la conscience écologique qui doit être encouragée, afin de conduire à des initiatives et à des programmes concrets. La conscience de la relation entre Dieu et l'humanité confère un sens plus complet à l'importance de la relation entre les êtres humains et l'environnement naturel, qui est la création de Dieu et que Dieu nous a confié pour le garder avec sagesse et amour (cf. Gn 1,28).

Le respect pour la création découle du respect pour la vie et la dignité humaines. C'est sur la base de notre reconnaissance du fait que le monde est créé par Dieu que nous pouvons distinguer un ordre moral objectif, à l'intérieur duquel nous pouvons mettre en place un code d'éthique de l'environnement. Dans cette perspective, les chrétiens et les autres croyants doivent jouer un rôle spécifique en proclamant les valeurs morales et en éduquant les personnes à une conscience de l'écologie, qui n'est autre que la responsabilité envers soi-même, envers les autres, et envers la création.


Repentir, prière, triple vision spirituelle

Ce qui est exigé est un acte de repentir de notre part et une tentative renouvelée de nous considérer nous-mêmes, les uns les autres, et le monde qui nous entoure dans la perspective du dessein divin de la création. Le problème n'est pas seulement économique et technologique, il est également moral et spirituel. Une solution au niveau économique et technologique ne peut être trouvée que si nous entreprenons, de la façon la plus radicale possible, une conversion intérieure du coeur, qui puisse conduire à un changement de mode de vie et à une modification des schémas inacceptables de consommation et de production. Une conversion authentique dans le Christ nous permettra de changer notre façon de penser et d'agir.

Nous devons tout d'abord retrouver l'humilité et reconnaître les limites de nos pouvoirs, et, ce qui est plus important, les limites de nos connaissances et de notre jugement. Nous avons pris des décisions, accompli des actions, et établi des valeurs qui nous ont détournés du monde tel qu'il devrait être, détournés du dessein de Dieu sur la création, et de tout ce qui est essentiel à une planète saine et à une communauté saine de personnes. Une nouvelle approche et une nouvelle culture sont nécessaires, fondées sur la centralité de la personne humaine au sein de la création et inspirées par un comportement fondé sur une éthique écologique dérivant de notre triple relation avec Dieu, avec nous-mêmes et avec la création. Une telle éthique encourage l'interdépendance et souligne les principes de la solidarité universelle, de la justice sociale et de la responsabilité, afin de promouvoir une véritable culture de la vie.

En second lieu, nous devons franchement admettre que l'humanité mérite mieux que ce que nous voyons autour de nous. Nous avons droit, et bien plus encore nos enfants et les générations futures, à un monde meilleur, un monde libéré de la dégradation, de la violence et de l'effusion de sang, un monde de générosité et d'amour.

En troisième lieu, conscients de la valeur de la prière, nous devons implorer Dieu le créateur afin qu'il illumine partout les personnes sur le devoir de respecter et de veiller attentivement sur la création.

Six objectifs éthiques

Dans ce but, nous invitons tous les hommes et toutes les femmes de bonne volonté à réfléchir sur l'importance des objectifs éthiques suivants:

1. Penser aux enfants du monde lorsque nous élaborons et évaluons nos choix d'action.

2. Etre disposés à étudier les valeurs authentiques fondées sur le droit naturel qui sous-tend toute culture humaine.

3. Utiliser la science et la technologie dans toutes leurs compétences et de manière constructive, tout en reconnaissant que les conquêtes de la science doivent toujours être évaluées à la lumière de la centralité de la personne humaine, du bien commun et de l'objectif intrinsèque de la création. La science peut nous aider à rectifier les erreurs du passé, afin de promouvoir le bien-être spirituel et matériel des générations présentes et futures. C'est notre amour pour nos enfants qui nous montrera le chemin que nous devons suivre à l'avenir.

4. Faire preuve d'humilité à l'égard du concept de propriété et être ouverts aux demandes de solidarité. Notre condition de mortels et notre fragilité de jugement nous mettent en garde contre le danger de prendre des mesures irréversibles à l'égard de ce que nous avons choisi de considérer comme notre propriété au cours de notre bref séjour sur cette terre. Nous n'avons pas reçu de pouvoirs illimités sur la création, nous ne sommes que les gardiens du patrimoine commun.

5. Reconnaître la diversité des situations et des responsabilités dans notre action en faveur d'un meilleur environnement mondial. Nous ne pouvons pas attendre de chaque personne et de chaque institution qu'elles assument le même fardeau. Chacun doit apporter sa contribution, mais afin de respecter les exigences de justice et de charité, les sociétés les plus riches doivent porter un fardeau plus lourd, et il est exigé d'elles un plus grand sacrifice que celui que peuvent offrir les pays pauvres. Les religions, les gouvernements et les institutions doivent affronter de nombreuses situations différentes, mais sur la base du principe de subsidiarité, chacun peut accomplir certaines tâches, et donc une partie de l'effort commun.

6. Promouvoir une approche pacifique face aux désaccords sur la façon de vivre sur cette terre, de la partager et de l'utiliser, sur ce qui doit changer et ce qui est immuable. Notre désir n'est pas d'éluder la controverse sur l'environnement, car nous avons confiance en la capacité de la raison humaine et dans la voie du dialogue pour atteindre un accord. Nous nous engageons à respecter les opinions de ceux qui ne sont pas d'accord avec nous, en recherchant des solutions à travers un échange ouvert, sans avoir recours à l'oppression et à la domination.

Il n'est pas trop tard. Le monde créé par Dieu possède d'incroyables pouvoirs de guérison. En une seule génération, nous pourrions guider la terre vers l'avenir de nos enfants. Faisons en sorte que cette génération commence maintenant, avec l'aide et la bénédiction de Dieu!

Rome-Venise, le 10 juin 2002



AUX ÉVÊQUES DU VENEZUELA EN VISITE "AD LIMINA APOSTOLORUM"

Mardi 11 juin 2002



Chers frères dans l'épiscopat,

1. Au terme de mon premier voyage dans votre pays, je suis reparti avec l'espérance que "l'Eglise au Venezuela apporte un véritable témoignage de la présence de Jésus-Christ et qu'elle puisse affronter avec courage les défis du millénaire qui vient" (Discours de congé, 29 janvier 1985; cf. ORLF n. 7 du 12 février 1985). A présent, alors que le nouveau millénaire a commencé et que les défis difficiles et imprévus ne se sont pas fait attendre, je vous accueille avec affection, à l'occasion de cette visite ad limina, pour continuer à encourager votre ministère de pasteurs, guides et maîtres du Peuple de Dieu qui est en pèlerinage dans ce pays bien-aimé.

Je remercie cordialement Mgr Baltazar Porras, Archevêque de Mérida et Président de la Conférence épiscopale, des paroles cordiales qu'il m'a adressées, à travers lesquelles il a exprimé votre ferme volonté d'une pleine communion avec le Successeur de Pierre, qui a reçu la mission de confirmer ses frères dans la foi (cf. Lc 22,32) et qui est "le principe et le fondement perpétuel et visible de l'unité de la foi et de la communion" (Lumen gentium LG 18). Je connais bien les aspirations et les préoccupations de votre ministère apostolique, que vous avez exposées dans les rapports quinquennaux et dont vous avez pu parler lors des diverses rencontres avec les responsables des dicastères de la Curie romaine. Vous savez que dans le ministère de l'Eglise: "Un membre souffre-t-il? Tous les membres souffrent avec lui. Un membre est-il à l'honneur? Tous les membres se réjouissent avec lui" (1Co 12,26) et c'est pour cela que, dans votre engagement généreux, vous pouvez ressentir la force qui naît de la communion avec toute l'Eglise, ainsi que la proximité et la sollicitude de celui qui paît le Peuple de Dieu comme un amoris officium (cf. saint Augustin, In Io. Ev, 123, 5).


2. Je suis heureux d'apprendre qu'est actuellement en cours la célébration du I Concile plénier du Venezuela, convoqué afin d'unir "les forces et les volontés en vue de promouvoir le bien commun de l'ensemble des Eglises et de chacune d'elles" (Christus Dominus CD 36), donnant ainsi un nouvel élan à une action évangélisatrice de vaste ampleur qui doit en même temps être l'expression d'un effort unanime en vue du "progrès de la foi et pour que la lumière de la pleine vérité se lève sur tous les hommes" (Lumen gentium LG 23).

A ce propos, après la merveilleuse expérience du grand Jubilé, j'ai indiqué que l'un des défis décisifs du nouveau millénaire est précisément celui de faire de l'Eglise "la maison et l'école de la communion", à travers un chemin spirituel profond, sans lequel "les moyens extérieurs de la communion serviraient à bien peu de chose" (Novo millennio ineunte NM 43). C'est pourquoi, un Concile particulier, qui est un événement d'une grande importance ecclésiale, doit être vécu et mené à bien comme une authentique expérience de l'Esprit, qui guide son Eglise et la conserve dans l'unité de la foi et de la charité. Son premier fruit est la communion entre pasteurs qui, à leur tour, sont un principe d'unité dans les Eglises particulières qu'ils président.

Je vous invite donc à promouvoir, à toutes les étapes de ce Concile, un esprit de dialogue, la concorde fraternelle et la collaboration sincère, en évitant tout type de désaccord qui puisse être source de désarroi chez les fidèles ou prétexte à des menaces de la part de ceux qui poursuivent d'autres intérêts, étrangers au bien de l'Eglise.


3. En raison de la proximité de votre peuple et du travail pastoral que vous accomplissez quotidiennement, vous êtes très conscients des transformations sociales profondes et rapides qui conditionnent la tâche importante de l'évangélisation et qui exigent aujourd'hui "d'affronter avec courage une situation qui se fait toujours plus diversifiée et plus prenante" (ibid., n. 40). Dans ce contexte, le renouveau de la catéchèse revêt une importance particulière, car à travers elle, l'Eglise accomplit son devoir de "révéler de façon sereine la force et la beauté de la doctrine de la foi" (Const. apos. Fidei depositum, n. 1). En effet, la culture laïque, le climat d'indifférence religieuse ou la fragilité de certaines institutions traditionnellement solides, comme la famille, les centres d'éducation et également certaines institutions ecclésiales, peuvent porter atteinte aux voies par lesquelles l'on transmet la foi et l'on promeut l'éducation chrétienne des nouvelles générations.

Dans cette situation, il est bon de rappeler que "dans la cause du royaume, il n'y a pas de temps pour regarder en arrière" (Novo millennio ineunte NM 15). Au contraire, il faut communiquer une nouvelle ardeur aux pasteurs et aux catéchistes afin que, à travers leur témoignage et la créativité qui très souvent les caractérise, ils trouvent les formes les plus appropriées pour faire parvenir la lumière du Christ dans le coeur de chaque Vénézuélien, en suscitant toujours la surprise joyeuse de son message et de sa présence. Sur ce point, le Catéchisme de l'Eglise catholique servira de guide et d'inspiration pour une catéchèse renouvelée et adaptée aux diverses catégories de vos fidèles.

4. Avec l'esprit du Bon Pasteur, vous vous apercevez souvent que "la moisson est abondante, mais les ouvriers peu nombreux" (Mt 9,37), et il est réconfortant de constater que le Seigneur a béni votre pays par une certaine augmentation du nombre des nouvelles vocations et par la présence généreuse de personnes venant d'autres horizons, qui sont un exemple de l'esprit de service rempli d'abnégation pour l'Evangile et de proximité à la sensibilité et aux besoins des gens. Vous connaissez bien l'importance que revêtent pour tous l'encouragement et l'estime de leurs propres pasteurs, qui ne doivent pas épargner les efforts pour alimenter un climat de fraternité entre leurs principaux collaborateurs, les prêtres, et d'authenticité dans les divers charismes qui enrichissent chacune des Eglises particulières.

Outre les orientations opportunes, que vous devez proposer en tant que guides, ne cessez jamais d'alimenter la vie spirituelle et l'authentique aspiration à la sainteté de ceux qui collaborent à votre mission apostolique, qui est la source la plus profonde de laquelle naît l'engagement pastoral, accompli dans les milieux les plus divers. Précisément parce qu'ils doivent très souvent exercer leur mission dans des conditions difficiles, ces derniers doivent fonder la joie de leur engagement sur le désir que leurs "noms" soient "inscrits dans les cieux" (Lc 10,20), plutôt que sur des résultats éphémères, en annonçant aux autres ce qu'ils ont eux-mêmes vu et entendu du Seigneur (cf. Ac 4,20 Ac 22,15).


5. Votre pays, qui peut compter sur d'abondantes ressources naturelles et humaines, a connu au cours de ces dernières années une terrible augmentation de la pauvreté, parfois extrême, de nombreuses personnes et familles. Le visage empreint de souffrances du Christ devient visible chez de nombreux paysans, autochtones, laissés-pour-compte dans les villes, enfants abandonnés, personnes âgées délaissées, femmes maltraitées, jeunes au chômage. Je sais que tout cela interpelle de façon pressante votre sollicitude pastorale, car l'on ne peut pas rester indifférent face à son prochain le moins favorisé (cf. Lc 33-35), qui a très souvent besoin d'une attention immédiate, avant encore que les causes de son malheur ne soient analysées.

L'Eglise, que ce soit à travers l'engagement plein d'abnégation de multiples personnes ou à travers l'action constante de nombreuses institutions, a toujours témoigné et continue de témoigner de la miséricorde divine à travers son dévouement généreux inconditionné à l'égard des plus démunis, qui doit se transformer toujours davantage en une attitude générale de toute la communauté chrétienne, avec la collaboration active de ses membres et la promotion inlassable de l'esprit de solidarité au sein de tout le peuple vénézuelien.

En même temps que ces urgences, qui ne peuvent pas attendre, vous ressentez également la nécessité de contribuer à l'édification d'un ordre social plus juste, pacifique et bénéfique pour tous. En effet, sans entrer en concurrence avec tout ce qui est du ressort des autorités publiques, l'Eglise se sent parfois appelée à devenir la voix de ceux que personne ne semble écouter, d'autres fois à "discerner dans les événements, les exigences et les requêtes de notre temps, auxquels elle participe avec les autres hommes, quels sont les signes véritables de la présence ou du dessein de Dieu" (Gaudium et spes GS 11), et d'autres fois encore à chercher des formes de collaboration loyale dans les initiatives qui poursuivent le bien intégral de la personne et qui, de ce fait, correspondent tant à la mission propre à l'Eglise qu'à la finalité spécifique des organisations sociales. Celles-ci, en effet, ne peuvent pas négliger ni encore moins ignorer la contribution importante de l'Eglise dans de nombreux domaines qui appartiennent au bien commun.

Je sais que cet aspect de votre ministère n'est pas toujours facile et que ne manquent pas les malentendus, les tentations de tergiverser ou les propos plus ou moins ouvertement partisans. Toutefois, ce terrain n'est pas celui sur lequel agit l'Eglise, qui désire en revanche promouvoir un climat de dialogue ouvert et constructif, patient et désintéressé, entre tous ceux qui ont des responsabilités publiques, dans le but de faire valoir la dignité et les droits inaliénables de la personne dans chaque projet de société, pour que "la terre soit plus fraternelle et solidaire, pour qu'il y fasse bon vivre et que l'indifférence, l'injustice et la haine n'aient jamais le dernier mot" (Discours au Corps diplomatique, 10 janvier 2002, n. 2; cf. ORLF n. 3 du 15 janvier 2002).

Je confie votre ministère pastoral à la Très Sainte Vierge Marie, tant aimée dans votre patrie sous le nom de Notre-Dame de Coromoto. Je me suis agenouillé devant elle au cours de mon dernier voyage au Venezuela, pour implorer sa protection sur le peuple vénézuélien et je continue aujourd'hui à lui demander que les catholiques de ce pays bien-aimé soient "le sel et la lumière pour les autres, comme d'authentiques témoins du Christ" (Homélie au Sanctuaire de la Vierge de Coromoto, 10 février 1996, n. 6; cf. ORLF n. 10 du 5 mars 1996).

Alors que je vous demande de transmettre à vos fidèles le salut du Pape, qui ne les oublie pas, ainsi que sa reconnaissance particulière aux prêtres, aux communautés religieuses et à ceux qui collaborent de façon plus directe à la tâche passionnante de l'évangélisation, je répète mon exhortation à oeuvrer en communion réciproque avec le Siège de Pierre en faveur de la cause de l'Evangile et, dans le même temps, je vous donne de tout coeur la Bénédiction apostolique.



AUX MEMBRES DU CHAPITRE GÉNÉRAL DE L'INSTITUT DES FILLES DE SAINT-CAMILLE

Samedi 15 juin 2002



Très chères soeurs!

1. Je suis heureux de souhaiter une cordiale bienvenue à chacune d'entre vous, religieuses de l'Institut des Filles de Saint-Camille, venues à Rome pour votre Chapitre général. Je vous remercie de cette rencontre, à travers laquelle vous avez voulu témoigner de votre dévotion et de votre affection au Vicaire du Christ, en confirmant votre fidélité à son Magistère de Pasteur universel de l'Eglise. Je salue votre nouvelle Supérieure générale, Soeur Laura Biondo, et je la remercie des paroles courtoises qu'elle m'a adressées au nom des personnes présentes et de votre Congrégation tout entière. J'invoque pour elle et pour le Conseil général d'abondants dons de lumière et de grâce pour exercer leur nouvelle tâche conformément à la volonté de Dieu.

2. Je conserve encore un vif souvenir des béatifications de vos Fondateurs Giuseppina Vannini et Luigi Tezza, que j'ai eu la joie d'élever aux honneurs des autels, respectivement en 1994 et en 2001. Il s'est agi d'occasions de grâce particulières, qui continuent à constituer une invitation constante à grandir dans la ferveur spirituelle et dans le zèle apostolique.

Enrichies et encouragées par ces dons, vous avez choisi d'orienter les travaux du Chapitre général vers un approfondissement de l'héritage spirituel reçu des nouveaux bienheureux, afin de poursuivre de façon consciente et avec enthousiasme la voie de la sainteté. Il s'agit d'un choix qui vous permet de confirmer le chemin entrepris et d'adapter votre charisme aux nouvelles conditions des temps, afin de devenir des témoins toujours plus crédibles de l'amour miséricordieux du bon Samaritain.

Je connais l'effort généreux que vous avez fourni dans le service aux pauvres et aux malades, ainsi que l'élan que votre Famille religieuse, déjà présente sur quatre continents, a récemment apporté à l'activité missionnaire en Amérique du Sud, en Orient et en Europe de l'Est. Je vous encourage à poursuivre cette voie, animées et soutenues par l'exemple du bienheureux Luigi Tezza, authentique pèlerin pour la mission.

3. Ayez soin de rendre présent le Christ miséricordieux dans tous vos contacts avec votre prochain, à commencer par ceux au sein de la Congrégation. Que règne entre vous l'esprit de charité fraternelle, de façon à ce que chaque religieuse se sente comprise et valorisée dans ses compétences et qu'aucune d'entre elles n'ait à se plaindre d'injustices ou d'abus.

Vous êtes appelées à être des signes concrets de la tendresse de Dieu, en particulier là où la souffrance opprime l'être humain dans son corps et dans son esprit. Vous êtes aidées dans cette tâche par votre condition de femmes consacrées qui, en se tournant vers la Vierge Immaculée, font preuve d'une sensibilité particulière pour ce qui est essentiellement humain, également dans des contextes où règnent la douleur et la marginalisation (cf. Mulieris dignitatem MD 30). C'est là une contribution spécifique que vous pouvez offrir à la vaste action de la nouvelle évangélisation, qui touche tout le Peuple de Dieu.

En suivant l'exemple de saint Camille et des bienheureux Fondateurs, n'hésitez pas à proclamer à travers les paroles, mais surtout les oeuvres, la joie de sacrifier votre existence pour vos frères démunis. Et dans cette mission singulière, n'ayez pas peur de tendre avec ardeur vers les sommets de la charité héroïque.

"En tant que véritables Filles de saint Camille, vous devez être les premières dans la charité et, pour la charité, être prêtes à accomplir tous les sacrifices". Voilà ce qu'écrivait le bienheureux Luigi Tezza aux premières disciples, offrant ainsi à toutes ses filles un critère précieux pour vivre fidèlement leur vocation.


4. En outre, en plus d'une assistance riche en humanité à l'égard du malade, icône vivante du Christ, il vous est demandé, dans votre travail quotiden, d'apporter à tous le Message salvifique de l'Evangile.

A travers les institutions socio-médicales et les écoles dont vous avez la charge, soyez les promotrices d'authentiques foyers d'humanité et de charité, en mesure de susciter chez ceux qui sont au contact avec les malades, le désir de transformer le soin en une façon de prendre soin, et la profession en vocation. Pour atteindre cet objectif, une synthèse harmonieuse de l'intelligence et du coeur, de la technique et de la capacité d'accueil du malade est nécessaire. Il est nécessaire, dans le même temps, de soutenir la "culture de la vie", en plaçant à la base de tout enseignement la conviction que la personne revêt une valeur unique et que la vie humaine est sacrée. C'est pourquoi elle doit toujours être défendue et protégée, de sa naissance jusqu'à son terme naturel.

5. Très chères soeurs, restez fidèles à votre merveilleuse vocation et efforcez-vous de la vivre avec dévouement et joie. Comme vous le rappelle le témoignage de vos Fondateurs, elle constitue pour vous la route vers la perfection de la charité et la totale configuration au Christ, que vous avez choisi de servir chez les malades et les personnes qui souffrent.

Avec ces sentiments, alors que je vous confie à l'intercession céleste de la Mère du Seigneur, Consolatrice des affligés, de saint Camille de Lellis et des bienheureux Luigi Tezza et Giuseppina Vannini, je donne de tout coeur à chacun de vous la Bénédiction apostolique, que j'étends volontiers à toutes vos consoeurs présentes dans le monde.


  MESSAGE À MGR SERAFINO SPROVIERI, ARCHEVÊQUE DU BÉNÉVENT À L'OCCASION DU CONGRÈS EUCHARISTIQUE DIOCÉSAIN




A mon Vénéré frère Serafino SPROVIERI
Archevêque de Bénévent

1. J'ai appris avec joie que cet archidiocèse conclut la célébration du Congrès eucharistique par des solennités particulières, en la fête liturgique du Corpus Domini. Je suis donc heureux de vous envoyer, par l'intermédiaire du cher Cardinal Joseph Ratzinger, Préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, qui présidera la célébration, mon plus cordial salut, vénéré frère, ainsi qu'à toute l'Eglise bien-aimée de Bénévent, profondément unie par de multiples liens au Siège de Pierre. Je reviens en esprit à la visite que j'ai eu l'occassion d'accomplir, il y a environ douze ans, dans la Communauté ecclésiale de Bénévent et, alors que je pense avec gratitude à l'Archevêque Carlo Minchiatti, votre prédécesseur de vénérée mémoire, je me souviens de la visite au nouveau séminaire, que j'ai eu la possibilité de bénir.

Avec vous, Vénéré frère, je salue les prêtres, les religieux et les religieuses, les membres de l'Action catholique, les membres des associations et des mouvements ecclésiaux, et toute la communauté chrétienne, qui affronte avec courage, sous votre direction éclairée et clairvoyante, les défis de la post-modernité. Je m'unis avec affection à ceux qui sont rassemblés sur la plus grande place de la ville, pour la solennelle concélébration de conclusion des diverses manifestations en l'honneur de l'Eucharistie, puis la consécration au Christ qui suivra, sceau de tout le Congrès. J'encourage chacun à offrir au "Seigneur des seigneurs" un coeur sincère et une âme renouvelée, en se confiant à Lui avec une espérance certaine.


2. Je sais que cette intense semaine de célébrations a été préparée par de nombreuses initiatives, en harmonie avec les orientations et les suggestions présentes dans la Lettre apostolique Novo millennio ineunte. Je m'en réjouis avec vous, avec le clergé, les religieux et les fidèles de cette très ancienne Eglise particulière, en souhaitant à tous de poursuivre ensemble le chemin commencé lors du grand Jubilé "non seulement comme mémoire du passé, mais aussi comme prophétie de l'avenir" (NM 3). Tout doit converger vers le Tabernacle, "nouvelle tente du rassemblement" et lieu privilégié pour contempler, "jusqu'à ce que le coeur en soit vraiment amoureux" (ibid., NM NM 3), le visage du Seigneur: le visage empreint de souffrance du Christ crucifié "dans lequel est cachée la vie de Dieu et est offert le salut du monde" (ibid., NM NM 28); le visage glorieux du Christ ressuscité dans lequel l'Eglise, "l'Epouse, contemple son trésor, sa joie" (ibid. NM NM 28).

Je désire vous répéter aujourd'hui ce que je disais déjà au début de mon pontificat: "Le Christ est le Rédempteur de l'homme!". Lui, qui demeure identique au cours des siècles (cf. He He 13,8), est véritablement l'unique Sauveur de l'homme, car "il n'y a pas sous le ciel d'autre nom donné aux hommes, par lequel nous devions être sauvés" (Ac 4,12). La vie chrétienne ne peut donc se développer qu'à partir de Lui. Nous devons chaque jour "repartir du Christ", en visant à un "haut degré" de la vie évangélique, en mettant en acte une "vraie pédagogie de la sainteté" (cf. Novo millennio ineunte NM 31).


3. Eglise de Bénévent, rassemblée autour du Christ vivant dans l'Eucharistie! Poursuis avec constance et générosité l'engagement de l'adoration eucharistique hebdomadaire, récemment reprise, en ouvrant des "écoles de prière" nombreuses et fréquentées, dans lesquelles on pourra accueillir les nombreux jeunes souhaitant découvrir en Jésus leur compagnon de voyage. Valorise les "centres d'écoute", pour approfondir le mystère eucharistique avec tes frères dans la foi, en mobilisant les familles afin qu'elles assument de façon responsable le rôle difficile mais exaltant de l'éducation à la foi de leurs enfants. Multiplie tes attentions et ton témoignage de solidarité à l'égard des malades et des personnes âgées, des pauvres et des exclus, en faisant participer chacun à une croisade de prière pour le triomphe du Christ et de son Eglise.

Eglise de Bénévent! Efforce-toi de réaliser ce que j'ai voulu proposer à tout le Peuple de Dieu à propos du caractère central de l'Eucharistie, en accomplissant tous les efforts pastoraux possibles pour donner un élan toujours plus puissant à la célébration communautaire de l'Eucharistie dominicale (cf. Novo millennio ineunte NM 35), afin de valoriser le "jour du Seigneur" comme "jour de l'Eglise et de l'homme", en en tirant un nouveau souffle de communion pour tous les membres de la communauté ecclésiale, qui sera alors davantage prête à intervenir de façon efficace pour affronter les multiples formes de pauvreté présentes sur le territoire, à travers de nombreuses initiatives de solidarité et d'amour concret.

Eglise de Bénévent! Sois une "véritable communauté eucharistique", qui tente de retrouver "ceux qui sont loin", à travers l'oeuvre incessante de la "chaîne des messagers", une initiative plus que jamais opportune, dans le but de mener à bien la reconversion du milieu, en éliminant des régions du Sannio et de l'Irpinia les zones résiduelles de superstition, où règnent des conceptions inadaptées de la religiosité.

4. Bien-aimée Eglise de Bénévent! Que la Très Sainte Vierge des Grâces et les nombreux saints qui veillent sur toi - de saint Bartolomeo Apôtre à saint Gennaro et saint Barbato, de saint Pompilio à saint Giuseppe Moscati e saint Alberico Crescitelli, jusqu'au bienheureux Pio de Pietrelcina - t'aident à poursuivre avec un élan renouvelé ton chemin de foi et de témoignage des valeurs chrétiennes éternelles. Qu'ils obtiennent pour toi de nombreuses et saintes vocations sacerdotales et de consécration spéciale, afin que ne manquent jamais à tes fils ceux qui fractionnent le pain de la Parole et de l'Eucharistie.

Avec ces sentiments et ces voeux, je donne volontiers au Cardinal Ratzinger, Porteur de ce Message, ainsi qu'à vous, vénéré frère, au clergé, aux religieux, aux religieuses, aux séminaristes, aux Autorités civiles auxquelles est confié le chemin futur de ces terres, et à la bien-aimée communauté de Bénévent, la Bénédiction apostolique implorée.

Du Vatican, le 1er juin 2002



À SA GRÂCE LE DR GEORGE CAREY, ARCHEVÊQUE DE CANTERBURY ET PRÉSIDENT DE LA COMMUNION ANGLICANE

Vendredi 21 juin 2002



Votre Grâce,
Chers amis,

C'est pour moi une grande joie de vous accueillir dans la "grâce et paix de par Dieu notre Père et le Seigneur Jésus-Christ" (Ph 1,2). Je vous suis très reconnaissant d'avoir choisi de rendre une visite de congé ici, avant votre retraite imminente. Votre visite représente en quelque sorte un signe vivant des relations étroites qui ont continué de se développer entre la Communion anglicane et l'Eglise catholique.
En reparcourant les onze années qui viennent de s'écouler, au cours desquelles vous avez été l'Archevêque de Canterbury, mon esprit se tourne en particulier vers la Déclaration commune que nous avons signée en 1996. Tout en reconnaissant les obstacles qui nous ont séparés de la pleine communion, nous avons décidé d'"examiner plus en détail la façon dont les relations entre la Communion anglicane et l'Eglise catholique peuvent progresser" (cf. ORLF n. 51 du 17 décembre 1996). Au cours des derniers mois, nous avons commencé à recueillir les fruits de cet esprit de persévérance à travers la formation de la nouvelle Commission internationale anglicane-catholique romaine pour l'Unité et la Mission, qui accompagnera l'oeuvre constante de la Commission internationale anglicane-catholique romaine.
Je répète volontiers ce que j'ai écrit dans ma Lettre encyclique Ut Unum sint: "Vraiment, le Seigneur nous a pris par la main et nous conduit" (UUS 25). Dans l'espérance qui naît de l'Esprit, ayons confiance dans le fait que les initiatives et les instruments de réconciliation que nous avons promus et encouragés seront toujours guidés par le même Esprit Saint, qui est toujours capable de susciter toutes sortes de bénédictions.
Lorsque nous réfléchissons sur les dangers et les défis auxquels doit faire face le monde aujourd'hui, nous ne pouvons manquer de ressentir le besoin urgent de travailler côte à côte pour promouvoir la paix et la justice. Je sais que Votre Grâce a joué un rôle très actif dans les efforts pour encourager le dialogue en Terre Sainte, en réunissant les responsables chrétiens, juifs et musulmans dans le but de rechercher une solution durable. Puisse cette initiative, ainsi que toutes celles que vous accomplissez en vue de la paix dans la justice, trouver un soutien et apporter l'espérance dans les luttes et les souffrances.
Votre Grâce, je prie pour que la prochaine étape de votre vie vous offre de nouvelles façons de partager vos dons sur la route de la réconciliation que nous avons entreprise. Sachez que vous et Mme Carey, ainsi que toute la Communion anglicane, demeurez dans mes prières. Puisse le Seigneur vous accorder une abondance de Bénédictions.



Discours 2002 - DÉCLARATION COMMUNE DU SAINT-PÈRE ET DU PATRIARCHE OECUMÉNIQUE SA SAINTETÉ BARTHOLOMAIOS I