Discours 2002 - Vendredi 28 juin 2002


À LA DÉLÉGATION DU PATRIARCAT OECUMÉNIQUE

Samedi 29 juin 2002



Chers Frères dans le Christ,

1. "Aimons-nous les uns les autres, car l’amour vient de Dieu, et quiconque aime est né de Dieu et parvient à la connaissance de Dieu" (1Jn 4,7).

C’est avec joie que je vous souhaite la bienvenue à Rome en ce jour de fête. Je remercie de tout coeur le Patriarche oecuménique, Sa Sainteté Bartholomaios Ier, et le Saint-Synode qui vous ont envoyés pour cette célébration dans un esprit de fraternité ecclésiale et de charité réciproque.

2. L’échange annuel de visite, à Rome pour la fête des saints Pierre et Paul et au Phanar pour la fête de saint André, ravive la charité de nos coeurs et nous encourage à poursuivre notre chemin vers la pleine communion. Nous pouvons déjà y vivre une forme d’harmonie dans la perspective de la pleine unité autour de l’unique autel du Seigneur. Au cours de cette année, le Seigneur nous a donné des occasions de manifester au monde notre volonté commune de rechercher et de parcourir toutes les voies pouvant nous conduire à l’unité, d’adresser à l’humanité un appel à la paix et à la fraternité, dans le respect mutuel, la justice et la charité.

3. Je désire renouveler aujourd’hui au Patriarche oecuménique, Sa Sainteté Bartholomaios Ier, l’expression de ma profonde gratitude pour sa participation fraternelle à la Journée de Prière pour la paix à Assise. Avec d’autres frères, nous avons proclamé au monde, sous diverses formes, l’exhortation de Jean: "Aimons-nous les uns les autres, car l’amour vient de Dieu". Si l’humanité s’engage résolument sur cette voie, alors s’atténueront peu à peu les violences et les menaces qui pèsent sur les hommes.

4. En conclusion du IVe symposium sur l’environnement, consacré à la Mer adriatique, j’ai eu la joie de signer avec Sa Sainteté Bartholomaios Ier la Déclaration de Venise. Ce texte exprime notre engagement commun pour la sauvegarde et le respect de la nature; il manifeste également notre volonté d’oeuvrer afin que, dans notre monde, la science soit au service des hommes et que ces derniers se sentent toujours responsables de la création.

5. Il reste beaucoup à faire pour que règne une meilleure fraternité sur la planète. Le désir de vengeance l’emporte bien souvent sur la paix, notamment en Terre Sainte et dans d’autres régions du monde frappées par une violence aveugle; cela nous fait sentir la précarité de la paix, qui nécessite que nous unissions nos forces, que nous soyons ensemble et que nous agissions ensemble, afin que le monde puise dans notre témoignage commun la force nécessaire pour opérer les changements qui s’imposent. Cette voie de la collaboration nous conduira aussi à la pleine communion, selon la volonté du Christ pour ses disciples.

6. Mais si nous sommes fermement convaincus de leur nécessité, le dialogue de la charité et notre fraternité ne peuvent cependant suffire. Nous avons encore à persévérer pour que le dialogue de la charité soutienne et nourrisse à nouveau notre dialogue de la vérité; j’entends par là le dialogue théologique dont nous avions annoncé l’ouverture au monde, à l’occasion de la fête de saint André en 1979, avec le regretté Patriarche Dimitrios, mettant dans cette démarche de grands espoirs. Malgré nos efforts, ce dialogue théologique piétine. Nous constatons notre impuissance à dépasser nos divisions et à trouver en nous la force de nous tourner avec espérance vers l’avenir. Cette phase délicate ne doit pas nous décourager pour autant. Nous ne pouvons pas non plus accepter dans l’indifférence cet état de fait. Nous ne pouvons renoncer à continuer le dialogue théologique, démarche indispensable en vue de l’unité.

Éminence, chers membres de la Délégation, je vous remercie de votre visite. Je vous saurais gré de transmettre mes salutations fraternelles à Sa Sainteté Bartholomaios Ier, aux membres du Saint-Synode et à tous les fidèles du Patriarcat oecuménique. Ma visite au Phanar reste pour moi un souvenir inoubliable, que j’évoque avec une très grande joie. Le Seigneur soit toujours avec nous tous!

Juillet 2002

AUX ARCHEVÊQUES MÉTROPOLITAINS AYANT REÇU LE PALLIUM

Lundi 1er juillet 2002



Vénérés Archevêques,
Très chers frères et soeurs!

1. Je suis très heureux de vous accueillir et de vous renouveler mon salut cordial. Après la célébration de samedi dernier, solennité des saints Pierre et Paul, au cours de laquelle, selon la tradition, je vous ai remis le saint Pallium, à vous Archevêques métropolitains nommés au cours de l'année qui vient de s'écouler, cette rencontre nous permet de nous retrouver dans une atmosphère plus familiale.

C'est la Famille de l'Eglise, que je peux admirer aujourd'hui encore en tournant mon regard vers vous, qui provenez de communautés diocésaines des cinq continents.


2. Je salue avec affection le Patriarche de Venise et l'Archevêque de Catane, ainsi que les nombreux confrères, amis et fidèles qui ont voulu les accompagner dans ce pèlerinage particulier. Puissent vos diocèses se distinguer toujours par un esprit de communion intense et concret.

J'adresse un salut cordial aux pèlerins de langue française venus entourer les Archevêques lors de la réception du pallium, en particulier les fidèles des diocèses de Gagnoa en Côte-d'Ivoire, de Saint-Boniface au Canada et de Bordeaux en France. Puisse ce signe, donné à vos Evêques, vous aider à vivre toujours davantage en communion avec toute l'Eglise.

J'étends ma cordiale bienvenue aux Archevêques métropolitains de langue anglaise et aux pèlerins qui les accompagnent, venus de Newark, de Madang, de Visakhapatnam, de Cardiff, d'Adélaïde, de Kumasi, de la Nouvelle-Orléans, de Glasgow, de Calcutta et de Kingston. Votre présence est un signe éloquent de l'universalité de l'Eglise et un puissant témoignage de la communion à travers laquelle l'Eglise vit et accomplit sa mission salvifique.

Chers amis, puisse votre pèlerinage auprès des tombeaux des saints Pierre et Paul vous confirmer dans la foi catholique qui nous vient des Apôtres. Je vous assure, ainsi que les Eglises locales que vous représentez, de mes prières et de mon affection dans le Seigneur.

Je salue avec affection les nouveaux Archevêques des archidiocèses de Burgos et Oviedo en Espagne, Asunción au Paraguay, et Calabozo et Cumanà au Venezuela, ainsi que leurs proches et leurs amis. Tout en vous présentant mes voeux les plus cordiaux en ce jour de l'imposition du Pallium, je désire que, revêtus de ce parement, signe d'un lien de communion particulier avec le siège de Pierre, vous soyez des témoins vivants de la foi et des messagers de l'espérance dans le Christ ressuscité dans les Eglises particulières qui vous sont confiées.

Je salue également avec affection les nouveaux Archevêques brésiliens, ainsi que leurs proches et leurs amis, des archidiocèses de Rio de Janeiro, Juiz de Flora, Florianópolis, Goiânia, Vitória da Conquista et de Feira de Santana. En vous présentant mes voeux pour ce jour, je souhaite que, revêtus de ce parement, signe d'un lien particulier de communion avec le Siège de Pierre, vous puissiez donner un élan à la foi et à l'espérance dans le Christ ressuscité, dans les Eglises particulières qui vous sont confiées.

Je suis heureux de saluer Mgr Tadeusz Kondrusiewicz, Archevêque de la Mère de Dieu à Moscou, et le groupe de parents, d'amis et de fidèles qui l'entourent. Que la Vierge Theotokos obtienne à chacun et, en particulier, à la communauté catholique russe, les grâces souhaitées.
Je salue cordialement les pèlerins venus de Poznan, qui accompagnent leur Archevêque, Mgr Stanislaw Gadecki à l'occasion de la remise du Pallium, signe de l'union avec le Successeur de Pierre. Je vous demande de rester toujours fidèlement à ses côtés et de le soutenir par votre prière. Que Dieu vous bénisse.


3. "Plebs adunata de unitate Patris et Filii et Spiritus Sancti": telle est l'Eglise, selon l'antique définition de saint Cyprien (De Orat. Dom. 23: PL 4, 553), reprise par le Concile Vatican II (cf. Lumen gentium LG 5).

Vénérés frères dans l'épiscopat, soyez toujours des serviteurs passionnés de l'unité de l'Eglise! Et vous, chers frères et soeurs, sachez toujours collaborer avec eux, afin que chaque communauté ecclésiale vive et agisse avec un seul coeur et une seule âme.

En invoquant sur les pasteurs et sur leur ministère la protection constante de la Très Sainte Vierge Marie, Mère de l'Eglise, je renouvelle à chacun ma Bénédiction avec une grande affection.




AUX ÉVÊQUES DU PÉROU EN VISITE "AD LIMINA APOSTOLORUM"

Mardi 2 juillet 2002



Chers frères dans l'épiscopat,

1. Je suis heureux de vous souhaiter la bienvenue à l'occasion de cette rencontre avec vous, pasteurs de l'Eglise du Christ au Pérou, qui accomplissez la visite "ad limina" au Siège de Pierre, l'Apôtre qui reçut le mandat de "confirmer ses frères dans la foi" (cf. Lc 22,32) et qui, à Rome, mena à bien son témoignage d'amour et de fidélité au Seigneur, en versant son sang pour Lui.

Je remercie Mgr Luis Armando Bambarén Gasteluzmendi, Evêque de Chimbote et Président de la Conférence épiscopale, des paroles cordiales qu'il m'a adressées, avec lesquelles il a souligné le "lien de l'unité, de la charité et de la paix" qui vous unit à l'Evêque de Rome (Lumen gentium LG 22), ainsi que les principales aspirations qui animent votre mission apostolique dans les diverses Eglises particulières qui vous ont été confiées. Inspiré par ma sollicitude de Pasteur de l'Eglise universelle, je me sens proche de vos préoccupations et je vous encourage à vous dévouer avec générosité et grandeur d'âme, en donnant un nouvel élan à la tâche passionnante du renouveau pastoral en ce début de nouveau millénaire.


2. L'un des défis cruciaux de notre temps, comme je l'ai indiqué dans la Lettre apostolique Novo millennio ineunte, est précisément l'esprit de communion qui doit régner dans l'Eglise et présider tous les aspects et les domaines de l'activité pastorale (cf. NM NM 43-45). En effet, la communion, comme spiritualité enracinée dans la Trinité, comme principe éducatif et attitude chrétienne dont on doit rendre un clair témoignage, est non seulement une exigence impérieuse du message du Christ (cf. Ecclesia in America ) mais également une réponse "aux attentes profondes du monde" (Novo millennio ineunte NM 43).

Grâce à votre profonde expérience pastorale, vous connaissez bien le paradoxe de ce moment historique, dans lequel la capacité presque incommensurable des relations interpersonnelles coexiste avec un fréquent sentiment d'isolement, qui provoque un éclatement et même des conflits dans diverses parties de la famille humaine. Face à cela, l'Eglise doit se rappeler et revivre sans cesse l'expérience incomparable de la Pentecôte, lorsque "tous ensemble les disciples louaient Dieu dans toutes les langues, l'Esprit ayant conduit à l'unité les peuples lointains et offert au Père les prémisses de toutes les nations" (Saint Irénée, Adv. haer. 3, 17, 2). Vous aussi, frères dans l'épiscopat, vous êtes appelés à représenter un exemple de communion dans l'affection collégiale, sans que cela ait lieu au détriment de la responsabilité que chacun d'entre vous possède dans son Eglise locale, dans laquelle à votre tour, vous êtes "le principe visible et le fondement de l'unité" (Lumen gentium LG 23).


3. Si le manque de moyens, les incompréhensions, la diversité d'opinion ou d'origine au sein de votre population, ou d'autres difficultés encore, peuvent conduire au découragement, Jésus nous réconforte toujours en nous faisant voir que "même les vents et la mer lui obéissent" (Mt 8,27). Il est donc nécessaire de se reposer sur Lui, en faisant croître chez tous les croyants un authentique désir de sainteté, à laquelle nous sommes tous appelés et dans laquelle culminent les aspirations les plus profondes de l'être humain.

Le Pérou, qui a été béni de Dieu par d'abondants fruits de sainteté, présente de nombreux exemples qui peuvent éclairer et ouvrir de grandes perspectives aux générations actuelles. On ne doit pas oublier les figures comme saint Toribio de Mogrovejo, sainte Rose de Lima, saint Martín de Porres, saint Francisco Solano ou saint Juan Macías, parmi tant d'autres. Elles constituent un modèle pour les pasteurs, qui doivent s'identifier avec le style personnel de Jésus-Christ, fait de simplicité, de pauvreté, de proximité, de renoncement aux avantages personnels et d'une confiance totale dans la force de l'Esprit, au-delà des moyens humains (cf. Ecclesia in America ). Elles le sont également pour les autres croyants, qui ont trouvé chez les saints la preuve vivante des merveilles que Dieu accomplit dans un coeur bien disposé, quelle que soit la condition sociale ou la situation de vie dans laquelle il accueille sa grâce.

Votre pays doit se sentir privilégié pour ses nombreux fruits de sainteté, dans la mesure où ils soulignent le profond enracinement chrétien de son peuple, qui a contribué de façon décisive à forger son identité et qui, loin d'être ignoré, doit être sauvegardé en tant que valeur incontournable.



4. Dans ce contexte, il est particulièrement important de susciter, en particulier parmi les jeunes, la passion pour les grands idéaux de l'Evangile, de façon à ce qu'un nombre croissant d'entre eux se sente poussé à consacrer entièrement sa vie à proclamer et à rendre témoignage du fait que "où est l'Esprit du Seigneur, là est la liberté" (2Co 3,17). C'est pourquoi l'évangélisation des nouvelles générations doit être accompagnée, presque de manière spontanée, par une pastorale des vocations, chaque jour plus urgente, ouvrant de nouveaux horizons d'espérance dans les Eglises locales.

Il est également important de prêter une grande attention à la formation dispensée dans les séminaires. Outre à cultiver la maturité humaine des candidats afin qu'ils se mettent complètement à la disposition de Dieu et de l'Eglise, de façon pleinement consciente et responsable, on doit sagement les guider vers une profonde vie spirituelle qui les rende propres à assumer de façon effective et affective leur futur ministère et toutes ses exigences. Il est nécessaire de présenter et d'affronter de façon claire et complète les qualités permettant une sequela Christi inconditionnée dans le ministère ou dans la vie consacrée, car celui qui aime vraiment Jésus répétera dans son coeur devant chaque difficulté les paroles de Pierre: "Seigneur, à qui irons-nous? Tu as les paroles de la vie éternelle" (Jn 6,68).

Votre pays a besoin de prêtres et d'évangélisateurs, saints, savants et fidèles à leur vocation, et on ne peut y renoncer en raison de leur petit nombre ou d'autres circonstances sociales et culturelles. Il s'agit d'une tâche dans laquelle l'Evêque doit se révéler particulièrement proche de ses séminaristes, comme père et maître, en comptant sur la collaboration inconditionnée et transparente des éducateurs. Il faut, en outre, mettre l'accent sur l'esprit de collaboration entre les divers diocèses afin d'offrir des moyens personnels et matériels à leurs candidats au sacerdoce, ce qui peut donner de très bons résultats et qui manifeste une solidarité concrète avec les Eglises particulières dont les ressources sont les plus faibles.

5. Vous avez également exprimé votre préoccupation pour les problèmes qui concernent le mariage et la famille, que ce soit en raison de certains facteurs culturels ou d'un climat déterminé, parfois "militant", contre la signification authentique de ces institutions (cf. Novo millennio ineunte NM 47). C'est pourquoi il est important que le projet chrétien de sainteté imprègne également l'amour humain et la coexistence familiale, car l'on doit respecter de façon intégrale le dessein de Dieu pour tout le genre humain et sa dignité éminente de signe de l'amour qui unit le Christ à son Eglise (cf. Ep 5,32).

La complexité des aspects impliqués dans ce domaine requiert également une action pastorale pluridisciplinaire, dans laquelle l'initiative catéchétique des pasteurs soit complétée par l'action éducative d'autres fidèles laïcs, par l'aide réciproque entre les familles elles-mêmes et par la promotion de conditions qui favorisent la croissance de l'amour des conjoints et la stabilité familiale. En effet, il est nécessaire que les jeunes connaissent la véritable beauté de l'amour, "puisque l'amour est de Dieu" (1Jn 4,7), qu'ils mûrissent dans celui-ci une attitude de don de soi et non d'égoïsme, qu'ils s'initient à la coexistence avec un esprit limpide et pur, en incluant dans celle-ci également la richesse de l'expérience d'une foi partagée, et qu'ils affrontent leur avenir comme une vocation authentique à laquelle Dieu les appelle pour collaborer à la tâche ineffable d'être des dispensateurs de la vie.

La pastorale de la famille doit également considérer ces aspects qui peuvent conditionner un développement adapté des devoirs propres à cette institution fondamentale, en promouvant un meilleur soutien économique aux nouvelles cellules familiales qui se forment, de plus grandes possibilités d'obtenir des logements décents, qui évitent la désagrégation de la famille, et la possibilité effective d'éduquer les enfants selon sa propre foi et son sens éthique de la vie. C'est pourquoi les pasteurs doivent faire entendre leur voix, pour souligner l'importance de la famille comme cellule de base fondamentale de la société et sa contribution irremplaçable au bien commun de tous les citoyens. Cela devient particulièrement urgent lorsque, pour des raisons plus ou moins opportunistes, on présente des projets de politiques antinatalistes, on étouffe le désir de fidélité dans le mariage et l'on fait obstacle par d'autres moyens au déroulement normal de la vie familiale.


6. Je constate avec satisfaction la vigueur et la créativité de l'action que l'Eglise qui est au Pérou accomplit en faveur des plus démunis, et qui est encore davantage nécessaire à un moment où la situation économique difficile de la région fait réapparaître avec une plus grande violence les multiples formes, anciennes et nouvelles, de pauvreté. Lorsque les fils de Dieu qui vivent dans des conditions inhumaines sont aussi nombreux, il faut donner un élan à une pastorale sociale concrète, tangible et organisée, qui réponde rapidement aux besoins les plus urgents et qui jette les bases d'un développement harmonieux et durable, fondé sur l'esprit de solidarité fraternelle.

A ce propos, j'exprime mes plus sincères remerciements aux nombreuses institutions ecclésiales qui, avec un grand dynamisme et dévouement, font parvenir la lumière de l'Evangile et l'assistance fraternelle dans les lieux les plus reculés de la terre péruvienne, de la forêt amazonienne, de la cordillère des Andes ou des plaines côtières. Il est satisfaisant de constater comment dans ce domaine les efforts s'unissent, les différences disparaissent et les frontières sont abolies. C'est en cela que se distinguent les Instituts de vie consacrée, qui peuvent être considérés "comme une exégèse vivante de la parole de Jésus: "Dans la mesure où vous l'avez fait à l'un de ces petits qui sont mes frères, c'est à moi que vous l'avez fait" (Mt 25,40)" (Vita consecrata VC 82). Il revient aux pasteurs de faire de ces nombreuses initiatives un signe clair de la sollicitude de l'Eglise, car aucun de ses membres, pasteurs ou fidèles, ne doit rester indifférent face au besoin spirituel et matériel, qu'il s'agisse de nécessités quotidiennes, de la dignité personnelle ou de l'opportunité effective de participer au bien commun de son peuple.


7. Au terme de cette rencontre fraternelle, je vous encourage à nouveau à poursuivre l'oeuvre de guider et d'éclairer la vie de vos Eglises particulières, en la confiant à la douce protection de la Très Sainte Vierge Marie, Etoile de la Nouvelle Evangélisation. Je vous demande de transmettre le salut et l'affection du Pape à vos prêtres et séminaristes, aux missionnaires, aux communautés religieuses, aux catéchistes, aux éducateurs et aux laïcs engagés, ainsi qu'aux personnes âgées et aux malades, qui sont à vos côtés et qui vous aident dans la tâche passionnante de semer l'Evangile, source d'espérance et de paix, dans le coeur des Péruviens.

Alors que je vous accompagne toujours de mes prières et de mon affection, je vous donne de tout coeur la Bénédiction apostolique.




À LA CONGRÉGATION DES SOEURS OBLATES DE L'ENFANT-JÉSUS

Mardi 2 juillet 2002



  Très chères soeurs!

1. Votre Institut célèbre aujourd'hui le 330 anniversaire de sa fondation. En effet, le 2 juillet 1672, à Rome, Anna Moroni et douze jeunes filles se consacrèrent au Christ dans le but de le suivre et de le servir à travers les "petits", et notamment grâce à la catéchèse et l'éducation de la jeunesse. En cette heureuse circonstance, j'ai la joie de m'adresser à vous à travers ce Message. Je salue chacune de vous avec une pensée particulière pour la Supérieure générale, que je remercie pour les sentiments qu'elle a exprimés en votre nom à toutes.

Très chères soeurs, vous avez désiré rencontrer le Successeur de Pierre, auquel vous êtes liées, depuis plus de trois siècles, par le service que vous rendez au sein de la Sacristie pontificale, un service qui vous avait été confié par mon vénéré prédécesseur, le bienheureux Innocent XI. Je vous suis reconnaissant de l'attention assidue et diligente avec laquelle vous le remplissez depuis lors.

Votre spiritualité, empreinte de la contemplation de l'Enfant Jésus à Bethléem, vous porte à prendre soin des objets sacrés nécessaires à la Liturgie avec le même amour que celui de Marie quand elle langea son Fils nouveau-né et le déposa dans la mangeoire (cf. Lc 2,7). L'adoration de l'Enfant Jésus vous encourage à devenir toujours davantage modestes et humbles de coeur, en imitant sa soumission et sa diligence au sein de la Sainte Famille.



2. "Vivre la spiritualité de Bethléem en parvenant à la ressemblance avec le Verbe incarné": voilà le charisme de votre Congrégation, intimement lié au mystère de l'Incarnation. J'imagine que le Jubilé de l'An 2000 a été pour vous une occasion privilégiée d'approfondir encore plus cet "esprit de Bethléem". C'est l'esprit de l'enfance spirituelle qui, comme le soulignent les statuts de votre Congrégation, vous aide "à conquérir, par la grâce de Dieu, les vertus qui sont naturellement celles des enfants, par rapport à Dieu et au prochain: l'innocence, la spontanéité, l'ouverture, la sincérité, la confiance, la rectitude, la simplicité qui naît de la sagesse divine".

Je me réjouis avec vous de l'élan spirituel qui vous anime: il constitue la meilleure garantie pour un authentique renouveau de la vie consacrée. La devise "Duc in altum", que j'ai adressée à tout le peuple chrétien dans la Lettre apostolique Novo millennio ineunte, trouve une interprétation significative dans celle que vous a laissée votre fondatrice: "De Bethléem au Calvaire". En suivant le Christ dans l'intégralité de son itinéraire salvifique, on peut "avancer en eaux profondes" vers l'horizon sans limites de la sainteté, en laissant Dieu accomplir en nous et à travers nous des prodiges de bonté et d'amour.



3. Dans la Rome du XVII siècle, Anna Moroni, aux côtés des premières soeurs consacrées, ne disposait pas de beaucoup de moyens, mais elle était riche de Dieu et c'est pourquoi elle put, aidée par les conseils de son directeur spirituel, le R.P. Cosimo Berlinsani, accomplir de grandes oeuvres parmi les plus faibles et les plus modestes, en conjuguant la foi et la vie et en amenant de nombreuses âmes au Christ. Votre Fondatrice était amoureuse de l'Enfant Jésus et elle éprouvait une émotion profonde envers le Crucifix, qu'elle appelait son "unique livre".

Fidèles à votre charisme, vous êtes en mesure de répondre aux nouveaux défis de l'éducation et de l'évangélisation, en privilégiant, selon la spécificité de votre Institut, la catéchèse et la pastorale des jeunes. Sans vous laisser décourager par les difficultés et les épreuves, continuez à étendre le voile de votre action apostolique sur le monde, comme vous l'avez fait récemment, par exemple, - et je vous en rends hommage - à travers votre nouvelle oeuvre dans la banlieue de Lima, au Pérou. Se consacrer à l'éducation de l'enfance et de la jeunesse est une priorité apostolique à laquelle l'Eglise n'a jamais renoncé et ne renoncera jamais. Dans ce domaine pastoral complexe, se joue un aspect essentiel du mandat du Christ aux Apôtres: "Allez donc, de toutes les nations faites des disciples..." (Mt 28,19).

Chères Soeurs Oblates de l'Enfant-Jésus, vous coopérez à cette mission à travers de multiples initiatives: de la catéchèse, qui constitue le premier de vos engagements, aux oeuvres paroissiales; des exercices spirituels pour les jeunes aux autres propositions de pastorale pour les jeunes et dans les instituts universitaires; de l'éducation à l'aide d'urgence et au soutien aux situations familiales difficiles; de la visite aux familles pauvres à l'accueil des pèlerins.



4. Dans chacune de vos activités, vous vous sentez "nourrices de l'Enfant Jésus", en contemplant son visage dans chaque personne que vous rencontrez, et en faisant rayonner ses vertus à travers l'obéissance filiale, l'abandon au Père, la simplicité et la joie de vivre, la pauvreté et le travail quotidien, la prière et l'esprit de communion fraternelle. Avec le style séduisant de l'enfance spirituelle, il ne vous sera pas difficile d'impliquer dans votre apostolat les laïcs qui vous sont proches. Leur collaboration est précieuse, car elle répond à un enseignement clair du Concile Vatican II et elle permet de mieux diffuser le levain évangélique dans les familles et dans la société.
Je pense au phénomène déjà bien structuré des "Animateurs laïcs Anna Moroni" (A.L.A.M.) et aux programmes que vous êtes en train de mettre en oeuvre avec eux. En adressant mon salut à leurs nombreux représentants présents aujourd'hui, je vous exhorte à poursuivre avec générosité cette route: Dieu bénira vos efforts par de nombreuses vocations et de nouveaux et précieux collaborateurs.

Très chères soeurs, que l'amour ardent pour l'Enfant Jésus inspire chaque moment de votre vie, tout comme l'exercice de votre apostolat au milieu de la jeunesse. Que la contemplation et l'action soient pour vous comme un unique appel, parce que c'est uniquement de l'union des deux que jaillit cette maternité spirituelle authentique qui doit guider l'action caritative et pédagogique à laquelle vous êtes vouées.

Que vous soutienne une dévotion intense et confiante dans la Très Sainte Vierge Marie, tout comme dans son époux saint Joseph, auxquels le Père céleste a confié le soin de son Fils unique fait homme. Avec affection, je vous renouvelle quant à moi l'expression de mon estime et de ma reconnaissance, tout en priant pour chacune de vous et pour l'Institution tout entière, qui dans ses multiples activités et ses perspectives futures, entend vivre, aux côtés de ses collaborateurs laïcs, le testament de la Mère fondatrice: "union et concorde".

Que Dieu vous aide à conserver et à enrichir ce précieux héritage pour le bien de tous. Avec ce souhait, je vous bénis de tout coeur.





MESSAGE DU PAPE JEAN PAUL II AU CARDINAL LUBOMYR HUSAR À L'OCCASION DE L'ASSEMBLÉE DE L'ÉGLISE GRECQUE-CATHOLIQUE À UN AN DU VOYAGE APOSTOLIQUE DU PAPE EN UKRAINE




Au vénéré frère Lubomyr Cardinal HUSAR
Archevêque majeur de Lviv des Ukrainiens

1. A l'occasion de l'importante Assemblée de l'Eglise grecque-catholique ukrainienne, qui se déroulera à Lviv du 30 juin au 6 juillet 2002, à un an de mon inoubliable Visite pastorale dans ce pays, je désire vous adresser mon salut cordial, à vous, aux frères dans l'épiscopat et à tous les participants.

Le thème choisi pour la rencontre revêt un sens particulier et une profonde importance: "Le Christ, source de la renaissance du peuple ukrainien". Avec une affection fraternelle, je m'unis à cette communauté ecclésiale bien-aimée pour invoquer l'Esprit Saint, afin qu'il lui soit permis d'approfondir la connaissance du Christ et que les travaux de l'Assemblée servent à communiquer aux fidèles un courage renouvelé à témoigner le message du salut.

Dès ma première Encyclique Redemptor hominis, je soulignais que le Christ doit occuper une place centrale dans la vie de l'Eglise et de chaque chrétien. En effet, Il est le Rédempteur de l'homme, le Rédempteur du monde. Dans le Christ et par le Christ, "Dieu s'est révélé pleinement à l'humanité et s'est définitivement rendu proche d'elle; en même temps, dans le Christ et par le Christ, l'homme a acquis une pleine conscience de sa dignité, de son élévation, de la valeur transcendante de l'humanité elle-même, du sens de son existence" (RH 11). La mission de l'Eglise est donc celle d'annoncer à tous, par l'action constante de l'Esprit Saint, le mystère du Christ, afin de faire en sorte qu'il devienne concret et efficace pour chaque homme.


2. "Sur ta parole je vais lâcher les filets" (Lc 5,5). La communauté chrétienne croît et se renouvelle en premier lieu dans l'écoute de la parole du Christ. Les longues années d'athéisme, durant lesquelles on a tenté de dissimuler les valeurs chrétiennes qui ont marqué l'histoire du peuple ukrainien, ont laissé des traces dans les âmes et dans les comportements des personnes. A cela s'ajoute aujourd'hui le phénomène d'érosion provoqué par le processus de sécularisation, à travers une vision prioritairement matérielle de la vie, qui s'accompagne de la recherche effrénée d'un bien-être souvent éphémère et passager. Ce sont précisément ces phénomènes insidieux - qui caractérisent bien souvent les sociétés occidentales - qui rendent plus difficile l'effort quotidien consacré à témoigner avec cohérence la "bonne nouvelle" de la foi.

Dans ce contexte, votre Eglise grecque-catholique ukrainienne entend intensifier à juste titre l'oeuvre de ré-évangélisation entreprise ces dernières années. Dans la Lettre apostolique Novo millennio ineunte, j'adressais aux croyants l'invitation à se nourrir de la Parole pour être des "serviteurs de la parole" dans la tâche d'évangélisation et je rappelais qu'il s'agit là assurément d'une priorité de l'Eglise au début du nouveau millénaire (cf. NM NM 40). L'invitation du Christ, "Duc in altum", s'adresse aussi à chaque membre de cette Eglise pour que, forte de la présence du Seigneur, elle soit prête à transmettre avec clarté à celui qui est à ses côtés le message durable de l'Evangile, la Bonne Nouvelle que, dans Jésus "le chemin, la vérité et la vie" (Jn 14,6), il est possible de rencontrer l'amour accueillant et miséricordieux du Père. Pour mener à bien cette oeuvre, il sera nécessaire de promouvoir une formation solide du clergé, une bonne organisation de la catéchèse pour les jeunes et les adultes, une participation toujours plus consciente des fidèles à la liturgie, source et sommet de la vie de l'Eglise (cf. Sacrosanctum Concilium SC 10).

Face à vous brille l'exemple inoubliable des martyrs et des confesseurs de la foi, qui n'ont pas hésité à payer au prix de leur vie leur fidélité au Christ et à son Eglise. Ils constituent pour tous un enseignement constant. Oui, la terre d'Ukraine, marquée du sang des martyrs, a donné au monde l'exemple d'une fidélité indéfectible à l'Evangile!

3. Vous pouvez puiser à ce patrimoine spirituel pour poursuivre l'élan apostolique et missionnaire, en conservant vivante devant vos yeux l'icône de Jésus qui s'agenouille pour laver les pieds des Apôtres. C'est avec cette attitude de service et d'humilité que votre Eglise doi

Dans la société d'aujourd'hui, dans laquelle semble souvent prévaloir la recherche du pouvoir, du succès à tout prix et de la possession égoïste qui rend les personnes insensibles aux besoins du prochain, chaque communauté ecclésiale est appelée à proclamer et à témoigner du respect de la dignité de chaque être humain, créé à l'image et à la ressemblance de Dieu, et de l'exercice du pouvoir envisagé non pas comme un instrument de domination, mais de service, dans la logique évangélique du Maître divin qui n'est pas venu pour être servi, mais pour servir (Mt 10,45). Consciente de cela, votre Assemblée ne manquera pas de concentrer son attention sur la famille, en tenant compte des difficultés que, malheureusement, elle rencontre également en Ukraine, où le nombre de divorces augmente et où la plaie de l'avortement s'étend.

Avec la famille, il faut privilégier la pastorale des jeunes, qui sont l'espérance et l'avenir de l'Eglise, et les aider à redécouvrir les racines religieuses de la culture à laquelle ils appartiennent. Montrez-leur que ce n'est que dans le Christ qu'ils peuvent trouver la réponse qui répondra aux questions qu'ils portent dans leur coeur; aidez-les à se sentir des acteurs de la reconstruction spirituelle et matérielle du pays, en restant fidèles à l'Evangile et aux valeurs spirituelles qui en émanent.

Votre Eglise investit avec générosité, énergies et moyens dans la formation des nouvelles générations. Qu'elle ait le courage de leur proposer le Christ et l'Evangile "sine glossa". Ce n'est qu'ain-si que le monde des jeunes pourra dépasser la tentation de donner foi à des mirages illusoires et des modèles trompeurs, dictés par le matérialisme et l'hédonisme.


4. Le domaine apostolique sur lequel le Seigneur appelle votre Eglise à oeuvrer est vaste. Vénéré frère, tout en assurant les fidèles grecs-catholiques d'Ukraine de ma proximité spirituelle, je vous invite, ainsi que toute l'Assemblée, à réécouter les paroles du Christ: "Comme toi, Père, tu es en moi et moi en toi, qu'eux aussi soient en nous" (Jn 17,21). Cette prière, que Jésus adresse au Père dans les derniers moments de sa vie terrestre, est un "impératif qui nous oblige, une force qui nous soutient, un reproche salutaire face à nos paresses et à nos étroitesses de coeur" (Novo millennio ineunte NM 48).

De nombreuses incompréhensions et des divisions ont marqué l'histoire de l'Eglise en Ukraine. Il est à présent nécessaire d'intensifier les efforts d'entente et de communion, tout d'abord entre les catholiques des deux rites. Il sera en outre important d'accroître l'effort de rapprochement et de réconciliation avec les autres chrétiens, en particulier avec les frères orthodoxes. Que l'identité orientale de votre Eglise et la pleine communion avec le Successeur de Pierre vous aident à trouver des voies toujours nouvelles de dialogue, de solidarité et de collaboration avec les Eglises orthodoxes. Je suis persuadé que le chemin personnel et communautaire de conversion au Christ et à son Evangile, auquel le Concile oecuménique Vatican II invite chacun (cf. Unitatis redintegratio UR 7), hâtera le moment de cette pleine unité qui est voulue par le Christ pour ses disciples.


5. Eglise grecque-catholique ukrainienne, tu as devant toi un avenir riche en espérance! Les difficultés et les déceptions ne manqueront pas, mais n'aie pas peur! Le Seigneur est à tes côtés. Que t'accompagne la Très Sainte Mère de Dieu, qui participe à la souffrance de la mort de son Fils sur la croix, mais qui témoigne aussi de la joie de sa glorieuse résurrection. Que son aide maternelle rende fructueux les travaux de l'Assemblée pour le bien de tout le Peuple de Dieu.

Avec ces sentiments et une profonde affection, je vous adresse très volontiers une Bénédiction spéciale, à vous, vénéré frère, aux participants de l'Assemblée de l'Eglise grecque-catholique ukrainienne et à tous les autre fidèles de votre pays, qui m'est très cher.

Du Vatican, le 25 juin 2002



Discours 2002 - Vendredi 28 juin 2002