Discours 2003 - Mardi 4 mars 2003


MESSAGE DE JEAN-PAUL II À L'OCCASION DE LA "CAMPAGNA DE FRATERNITÉ 2003" AU BRÉSIL





A mon frère dans l'épiscopat
Mgr JAYME HENRIQUE CHEMELLO
Président de la CNBB

"Fais-nous savoir comment compter nos jours, que nous venions de coeur à la sagesse!" (Ps 90,12)

C'est avec une affection particulière que je salue l'épiscopat du Brésil et toute la population de cette nation bien-aimée qui, à l'occasion du Mercredi des Cendres, entreprend son chemin vers la Pâque de la Résurrection, à travers l'encouragement d'une nouvelle Campagne de Fraternité qui a pour thème cette année: "Vie, dignité et espérance".

L'engagement sincère dans la réflexion et l'approfondissement, précisément en ce temps de Carême, du thème de la fraternité avec les personnes âgées, peut être inscrit dans le cadre de la "sagesse". Dans leur propre existence, les personnes âgées sont invitées à vivre le dessein que Dieu a pour chacun de nous, en répétant avec le psalmiste: "De tes jugements je ne me détourne point, car c'est toi qui m'enseignes" (Ps 118,102). Pour leur part, la certitude que le temps de vie est limité les invite à affronter chaque chose à la lumière de la vérité divine, en reconnaissant la relativité de tout autre réalité. Toutefois, la vie terrestre, malgré ses limites et ses souffrances, conserve toujours sa valeur et doit être acceptée jusqu'à la fin. Pour le chrétien, elle "apparaît comme un "passage", comme un pont jeté de la vie à la vie, entre la joie fragile et incertaine de cette terre et la joie pleine et entière que le Seigneur réserve à ses serviteurs fidèles" (Lettre aux personnes âgées, n. 16).

L'Eglise, experte en humanité, indique, par le mandat du rédempteur, le chemin vers le bien spirituel et humain, chemin de réconciliation et de pénitence, à travers la conversion personnelle et la solidarité avec son prochain. Cette solidarité, aujourd'hui nécessaire surtout pour les personnes âgées, s'explique par l'augmentation de la moyenne d'âge, que le progrès de la médecine a rendu possible. La vieillesse a toujours existé, mais elle présente aujourd'hui des caractéristiques particulières en raison de la plus grande longévité des personnes. C'est pourquoi il est nécessaire et urgent de prévoir quelle aide apporter à ces frères et à ces soeurs. Cela exige un changement de mentalité: il est urgent de remplacer la culture utilitariste et matérialiste, qui mesure la valeur de l'homme à l'aune de ce qu'il produit et de ce qu'il consomme, par une culture qui reconnaisse la valeur "absolue" de chaque personne, quelles que soient ses capacités et son efficacité.

Je forme des voeux afin que soit insufflée une nouvelle vie aux programmes sociaux et médicaux de protection du troisième âge, non seulement par les institutions publiques et privées, mais également à travers les diverses pastorales diocésaines. Ma pensée se tourne vers toutes les personnes âgées du Brésil, en particulier vers les veufs et les veuves, vers les religieux et les religieuses âgés et vers mes très chers frères dans le sacerdoce. A tous ceux qui se trouvent dans des centres pour personnes âgées, en maison de retraite, dans les hôpitaux, et surtout aux plus pauvres d'entre eux, j'envoie un baiser chaleureux et mes encouragements afin qu'ils ne se laissent pas abattre par les difficultés. Si Dieu permet la souffrance causée par la maladie ou par tout autre motif, "il nous donne toujours la grâce et la force de nous unir avec plus d'amour au sacrifice de son Fils et de participer avec plus d'intensité à son projet de salut" (ibidem, n. 13).

A toutes les bien-aimées personnes âgées du Brésil, j'accorde, comme encouragement à leur présence importante dans la société et en gage d'abondantes faveurs de Dieu, une Bénédiction apostolique particulière.

Du Vatican, le 4 janvier 2003



IOANNES PAULUS II


RENCONTRE AVEC LES MEMBRES DU CLERGÉ DE ROME

Jeudi 6 mars 2003




Monsieur le Cardinal,
vénérés frères dans l'épiscopat,
très chers prêtres romains!

1. Notre rencontre traditionnelle au début du Carême a lieu cette année, comme l'a souligné le Cardinal-Vicaire, en la XXV année de mon service pastoral en tant qu'Evêque de Rome. Il s'agit d'un anniversaire qui rappelle le ministère sacerdotal, dans lequel l'Evêque et ses prêtres sont intimement unis dans la conscience du don que Dieu leur a fait et dans l'engagement de "répondre" à ce don, en consacrant avec joie leur vie au service du Christ et de leurs frères.

Je vous salue avec affection tous et chacun en particulier, et je vous remercie pour le service généreux que vous apportez à l'Eglise de Rome. Je vous remercie en particulier pour le climat qui s'est instauré aujourd'hui: un climat spécial, très ouvert, je dirais. Je salue et je remercie le Cardinal-Vicaire, le Vice-Gérant, les Evêques auxiliaires et tous ceux parmi vous qui m'ont adressé la parole.

2. "Paix à vous! Comme le Père m'a envoyé, moi aussi je vous envoie" (Jn 20,21). "Qui vous accueille m'accueille, et qui m'accueille accueille Celui qui m'a envoyé" (Mt 10,40). Dans ces deux affirmations de Jésus est contenu le mystère de notre sacerdoce, qui trouve sa vérité et son identité dans le fait d'être issu et d'être la continuation du Christ lui-même et de sa mission qu'il a reçue du Père.

Deux paroles supplémentaires de Jésus nous aident à entrer plus profondément dans ce mystère. La première le concerne en personne: "En vérité, en vérité, je vous le dis, le Fils ne peut rien faire de lui-même, qu'il ne le voie faire au Père" (Jn 5,19). La seconde est adressée à nous et à tous nos frères dans la foi: "Hors de moi vous ne pouvez rien faire" (Jn 15,5). Ce "rien" répété nous renvoie au Christ et le Christ au Père. C'est le signe d'une dépendance totale, de la nécessité de nous détacher de nous-mêmes, mais c'est également le signe de la grandeur du don que nous avons reçu. Unis au Christ et au Père, en vertu du sacrement de l'Ordre, nous pouvons en effet remettre les péchés et prononcer sur le pain et le vin les paroles: "Ceci est mon Corps, ceci est mon Sang". Dans la célébration de l'Eucharistie, nous oeuvrons véritablement "in persona Christi": ce que le Christ a accompli sur l'autel de la Croix, et qu'il a établi auparavant encore comme sacrement dans le Cénacle, le prêtre le renouvelle dans la force de l'Esprit Saint (cf. Don et mystère, p. 89).

3. Très chers frères prêtres de Rome, cela exige que dans l'exercice de notre ministère et dans toute notre vie, nous soyons véritablement des hommes de Dieu. Non seulement les fidèles, qui sont plus proches de nous, mais également les personnes faibles et titubantes dans leur foi et éloignées de la pratique de la vie chrétienne ne demeurent pas insensibles à la présence et au témoignage d'un prêtre qui est véritablement "homme de Dieu": au contraire, dans la mesure où elles le connaissent, elles l'estiment et tendent à s'ouvrir à lui.

C'est pourquoi il est si important que nous, prêtres, soyons les premiers à répondre avec sincérité et générosité à l'appel à la sainteté que Dieu adresse à tous les baptisés. La voie maîtresse et irremplaçable pour progresser sur le chemin de la sanctification est la prière: en étant avec le Seigneur, nous devenons amis du Seigneur, son regard devient progressivement notre regard, son coeur devient notre coeur. Si nous voulons véritablement que nos communautés soient des "écoles de prière" (cf. Novo millennio ineunte NM 33) nous devons être avant tout des hommes de prière et donc, à l'école de Jésus, de Marie et des Saints, maîtres de prière.

Le coeur de la prière chrétienne et la clé du mystère de notre sacerdoce est sans aucun doute l'Eucharistie. C'est pourquoi la célébration de la Messe ne peut manquer d'être, pour chacun de nous, le centre de la vie et le moment le plus important de chaque journée. Très chers frères, en vérité, nous n'avons pas le choix! Si nous ne nous efforçons pas, humblement mais avec confiance, de progresser sur le chemin de notre sanctification, nous finissons par nous contenter de petits compromis qui deviennent peu à peu plus graves et peuvent déboucher parfois sur la trahison, ouverte ou voilée, de l'amour de prédilection avec lequel Dieu nous a aimés en nous appelant au sacerdoce.

4. Le don de l'Esprit, qui nous unit au Christ et au Père, nous lie de façon indissoluble à ce corps du Christ et à cette épouse du Christ qu'est l'Eglise. Pour être des prêtres selon le coeur du Christ, nous devons aimer l'Eglise comme Lui l'a aimée, en nous donnant nous-mêmes pour elle (cf. Ep 5,25). Nous ne devons pas avoir peur de nous identifier avec l'Eglise en nous prodiguant pour elle. Nous devons être, avec authenticité et générosité, des hommes d'Eglise.

Le lien du prêtre avec l'Eglise se développe selon la dynamique typiquement christologique du Bon Pasteur, qui est dans le même temps chef et serviteur du Peuple de Dieu. Il est essentiellement un homme de communion, qui ne se lasse pas d'édifier la communauté chrétienne comme "maison et école de la communion" (cf. Novo millennio ineunte NM 43). Le Synode que nous avons célébré de 1986 à 1993 a été concrètement, pour tout le diocèse de Rome, une grande école de communion et c'est avant tout le devoir du prêtre de traduire ce message du Synode dans la vie quotidienne des communautés. Mais cela exige qu'il sache en premier apporter l'exemple et le témoignage de la communion parmi les prêtres diocésains et dans les rapports avec les prêtres qui vivent ou accomplissent leur ministère dans la même paroisse ou communauté. L'expérience pastorale confirme que la communion entre les prêtres contribue dans une très grande mesure à rendre crédible et fécond leur ministère, selon les paroles de Jésus: "A ceci tous reconnaîtront que vous êtes mes disciples: si vous avez de l'amour les uns pour les autres" (Jn 13,35).

5. Très chers frères, après le Synode, nous avons vécu la Mission dans la ville et à présent, notre diocèse est engagé à conférer de façon stable une empreinte missionnaire précise à toute la pastorale.

Dans l'exercice quotidien de notre ministère, nous devons former une véritable conscience missionnaire chez les fidèles qui sont le plus proches de nous, de façon à ce que nos communautés puissent devenir progressivement d'authentiques communautés évangélisatrices et que chaque croyant s'efforce d'être témoin du Christ dans tous les milieux et toutes les situations de vie. C'est ainsi que nous réalisons de la façon la plus précise et authentique le "don" et "mystère" de notre sacerdoce.

Le sacerdoce ministériel du Nouveau Testament est en effet de par sa nature un sacerdoce apostolique, dans la mesure où il parvient à la communauté à travers la "succession apostolique", c'est-à-dire la transmission aux Evêques du ministère et du charisme des Apôtres. A travers le sacerdoce des Evêques, le sacerdoce des prêtres est lui aussi "incorporé dans la structure apostolique de l'Eglise" (Pastores dabo vobis PDV 16), participant ainsi à son orientation missionnaire essentielle.

6. Chers frères dans le sacerdoce, ne nous lassons jamais d'être des témoins et des annonciateurs du Christ, ne nous laissons pas décourager par les difficultés et les obstacles que nous trouvons aussi bien en nous, dans notre fragilité humaine, que dans l'indifférence ou dans les incompréhensions de ceux auxquels nous sommes envoyés, y compris parfois les personnes qui sont le plus proches de nous.

Lorsque les difficultés et les tentations pèsent sur notre coeur, rappelons-nous plutôt de la grandeur du don que nous avons reçu, pour être à notre tour capables de "donner avec joie" (cf. 2Co 9,7). En effet, nous sommes, en particulier dans le confessionnal mais égalemet dans tout notre ministère, des témoins et des instruments de la miséricorde divine, nous sommes et devons rester des hommes qui savent diffuser l'espérance et faire oeuvre de paix et de réconciliation.

A cela, chers frères, Dieu nous a appelés avec un amour de prédilection, et Dieu mérite toute notre confiance: sa volonté de salut est plus grande et plus forte que tous les péchés du monde.

Merci de cette rencontre. Merci aussi pour le don du volume, qui vient d'être imprimé, dans lequel sont rassemblés les textes des discours que je vous ai adressés au cours des rencontres de début de Carême, à partir du 2 mars 1979. Je souhaite que cette initiative serve également à maintenir vivant et fécond le dialogue qui s'est instauré entre nous au cours de ces années.

Je vous bénis tous de tout coeur et je bénis avec vous les communautés qui vous sont confiées.



  DISCOURS DE JEAN-PAUL II AU TERME DES EXERCISES SPIRITUELS

Chapelle "Redemptoris Mater", Samedi 15 mars 2003


  1. Au terme de cette semaine d'intense prière et de réflexion, je ressens le besoin de rendre grâce au Seigneur d'avoir pu avoir un entretien prolongé et intime avec Lui, en votre compagnie, chers Cardinaux et collaborateurs de la Curie romaine.

Le Seigneur nous a adressé une fois de plus son invitation: "Venite seorsum in desertum locum et requiescite pusillum" (Mc 6,31). Le lieu, en vérité, n'est pas si écarté et désert, mais nous avons toutefois également eu l'opportunité d'un temps de silence et de contemplation qui s'est révélé une occasion privilégiée de rencontrer le Seigneur. Nous lui en sommes avant tout reconnaissants, lui qui nous a comblés de ses dons au cours de ces journées.

2. J'adresse ensuite un remerciement cordial au très cher Mgr Angelo Comastri, qui, avec un tact pastoral, une richesse d'indications ascétiques, une sagesse et une pieuse inspiration, a guidé nos pas vers la rencontre avec le Dieu de l'amour et de la miséricorde.

Au nom de toutes les personnes présentes, je vous adresse, cher frère, mes profonds remerciements! Avec vous, nous avons reparcouru de nombreuses pages de l'Ecriture, en y découvrant des perspectives nouvelles et fascinantes, jusqu'à la dernière, ce matin, sur le prophète Jonas, qui apporte avec lui, de façon indirecte, l'annonce de la Pâque. Nous avons écouté, en outre, des exemples et des témoignages de notre temps, qui nous ont renforcés dans notre décision de nous abandonner avec confiance entre les bras de Dieu, dont la miséricorde "s'étend de génération en génération".

Vous avez porté notre attention de façon opportune sur la Madone, l'indiquant comme la créature la plus fidèle car la plus humble. Dans la Vierge de Nazareth, l'expérience de Dieu a atteint son sommet: grâce à son "fiat" à la volonté divine. Nous confions les fruits de ces Exercices spirituels à la Très Sainte Vierge Marie.

Je voudrais également remercier tous ceux qui nous ont aidés en ces jours, en s'occupant de la liturgie, des chants et des rencontres dans cette Chapelle Redemptoris Mater, où les mosaïques nous font sentir proches dans la prière de nos frères orientaux.

Je voudrais enfin faire parvenir un remerciement particulier, à travers vous, vénéré frère, à tous ceux qui ont été proches de nous en ces jours à travers leurs prières. Qu'ils sachent que le Pape leur est reconnaissant pour ce soutien spirituel et qu'il les bénit de tout coeur.

3. Nous retournons à présent à notre travail quotidien, en repartant, comme nous y a exhortés Mgr Comastri, de la "belle nouvelle": Dieu est amour. Soutenus par la force de l'Esprit Saint, qui nous a été donnée en abondance au cours de la prédication, de la prière et de l'adoration eucharistique, nous voulons continuer à être des témoins du Christ dans notre monde, qui a tant besoin de la "belle nouvelle" de l'amour de Dieu.

Merci à tous et bon travail!



RÉCITATION DU ROSAIRE AVEC LES JEUNES DES UNIVERSITÉS EUROPÉENNES

Samedi 15 mars 2003



Chers jeunes étudiants des universités!

1. Je vous salue avec affection et je vous remercie de votre participation, pleine de joie pieuse, à cette veillée mariale à l'occasion de la première Journée européenne des Etudiants des Universités. Je remercie, en particulier, le Cardinal Camillo Ruini des paroles cordiales par lesquelles il s'est fait l'interprète des sentiments communs. Mes remerciements s'étendent ensuite à Mgr Lorenzo Leuzzi et à tous ceux qui ont collaboré à l'organisation de cette Journée. Je remercie par ailleurs les choeurs et l'orchestre, ainsi que Radio Vatican et le Centre de Télévision du Vatican, qui ont assuré les diverses retransmissions radiophoniques et télévisées. Je salue cordialement les jeunes réunis avec nous, au côté de leurs Pasteurs, à Uppsala, Bratislava, Cracovie, Cologne, Fatima, Vienne et dans certaines paroisses d'Ukraine. Merci, très chers amis, de votre témoignage de foi et de fraternité! Je forme les meilleurs voeux pour vos études et vos projets de vie.

Ce soir nous avons prié pour l'Europe, à un moment important de son histoire. Les jeunes ont la possibilité et le devoir de participer à la construction de la nouvelle Europe, en apportant leur contribution d'aspirations et d'idéaux, d'étude et de travail, de créativité et de dévouement généreux. Les jeunes chrétiens, en particulier, sont appelés à annoncer et à témoigner du Christ et à être, en son nom, des bâtisseurs d'unité dans la diversité, de liberté dans la vérité, de paix dans la justice, de cette paix dont le monde a aujourd'hui particulièrement besoin.

Chers jeunes amis, je vous confie ce soir un souhait qui me tient extrêmement à coeur: celui que les nouvelles générations puissent être fidèles aux principes spirituels et moraux élevés qui, par le passé, ont inspiré les pères de l'Europe unie.

2. Au cours de cette veillée, où l'on ressent l'enthousiasme et la foi qui sont propres aux jeunes, la pensée se tourne naturellement vers les Journées mondiales de la Jeunesse. Il s'agit d'événements qui me permettent de rencontrer, d'un bout à l'autre de la terre, des jeunes de tous les continents, de les écouter et de parler avec eux du Christ. A chaque fois, un thème spécifique de réflexion est offert à l'attention commune. Pour la prochaine Journée, qui sera célébrée dans chaque diocèse, le Dimanche des Rameaux, du fait que nous sommes dans l'Année du Rosaire, j'ai choisi les paroles significatives de Jésus à l'Apôtre dont il était le plus proche: "Voici ta Mère!" (Jn 19,27). Il s'agit d'une puissante invitation qui s'adresse à vous tous, chers jeunes, à reconnaître et accueillir dans votre vie Marie comme Mère. Jeunes d'Europe et du monde, ouvrez votre coeur à Marie et suivez docilement son exemple!

3. Je m'adresse à vous, chers jeunes de Rome, et je vous donne rendez-vous le jeudi 10 avril prochain, sur la place Saint-Pierre. Ce sera un moment de prière et de fête, comme ce soir. Ensemble, nous accomplirons un acte solennel de consécration à la Vierge, en Lui demandant de veiller sur vous et de protéger votre chemin de jeunes du troisième millénaire. En cette circonstance, je donnerai à chacune des personnes présentes un chapelet, en invitant à réciter cette prière mariale traditionnelle, afin qu'elle devienne toujours plus familière également à la jeunesse d'aujourd'hui. A travers une fervente récitation du Rosaire, l'on peut changer le destin du monde.

Que la conscience de ce fait vous anime au cours de la procession que vous allez accomplir dans peu de temps, jusqu'à l'église de "Sant'Ivo alla Sapienza", en y portant l'icône de Marie Sedes Sapientiae. Je m'unis spirituellement à vous, tout en vous bénissant tous avec affection, ainsi que les personnes qui vous sont chères.




MESSAGE DE JEAN-PAUL II AU MINISTRE GÉNÉRAL DE L'ORDRE FRANCISCAIN DES FRÈRES MINEURS CONVENTUELS



Au Révérend Père
Joachim GIERMEK
Ministre général
de l'Ordre franciscain des Frères mineurs conventuels

1. J'ai appris avec joie que votre Ordre souhaite commémorer le 400 anniversaire de la naissance de saint Joseph de Copertino, le 17 juin 1603, à travers de nombreuses initiatives religieuses, pastorales et culturelles, visant toutes à redécouvrir la profondeur et l'actualité du message de ce fidèle disciple du "Poverello" d'Assise.

En cette occasion significative, je suis heureux de vous adresser mes salutations les plus cordiales, les étendant volontiers à la communauté franciscaine d'Osimo et aux Frères mineurs conventuels présents à travers le monde. Je salue en outre les fidèles et les pèlerins, qui prendront part aux célébrations jubilaires solennelles.

2. Cette célébration importante constitue une occasion particulière de grâce offerte en premier lieu aux Frères mineurs conventuels. Ceux-ci doivent se sentir poussés par son exemple à approfondir leur vocation religieuse pour répondre avec un engagement renouvelé, comme il le fit en son temps, aux grands défis que la société lance aux fidèles de saint François d'Assise, à l'aube du troisième millénaire.

Dans le même temps, ce centenaire constitue une occasion providentielle pour toute la communauté chrétienne, qui rend grâce au Seigneur pour les fruits abondants de sainteté et de sagesse humaine accordés à cet humble et docile serviteur du Christ.

Saint Joseph de Copertino continue de resplendir de nos jours comme un phare qui illumine le chemin quotidien de ceux qui ont recours à son intercession céleste. Sa renommée s'est popularisée sous le nom du "Saint des lévitations" en raison de ses fréquentes extases et de ses extraordinaires expériences mystiques; il invite les fidèles à répondre aux attentes les plus intimes du coeur; il les encourage à rechercher le sens profond de l'existence et, en dernière analyse, il les pousse à rencontrer personnellement Dieu, en s'abandonnant pleinement à sa volonté.

3. Patron des étudiants, saint Joseph de Copertino encourage le monde de la culture, en particulier de l'école, à fonder son savoir humain sur la sagesse de Dieu. Et c'est précisément grâce à sa docilité intérieure aux suggestions de la sagesse divine que ce saint particulier peut se présenter comme un guide spirituel pour toutes les catégories de fidèles. Aux prêtres et aux personnes consacrées, aux jeunes et aux adultes, aux enfants et aux personnes âgées, à quiconque désire devenir disciple du Christ, il continue d'indiquer les priorités que ce choix radical comporte. La reconnaissance du primat de Dieu dans notre existence, la valeur de la prière et de la contemplation, l'adhésion passionnée à l'Evangile "sine glossa", sans compromis: telles sont certaines des conditions indispensables pour être des témoins crédibles de Jésus, recherchant avec amour son saint Visage. C'est ce que fit ce mystique extraordinaire, disciple exemplaire du "Poverello" d'Assise. Il brûla d'un tendre amour pour le Seigneur et vécut au service de son Royaume. A présent, du ciel, il ne cesse de protéger et de soutenir ceux qui, suivant ses pas, entendent se convertir à Dieu et se mettre en route de façon décidée sur la voie de la sainteté.

4. Dans la spiritualité qui le distingue, ressortent les traits typiques de l'authentique tradition franciscaine. Epris du mystère de l'Incarnation, Joseph de Copertino contemplait extasié le Fils de Dieu né à Bethléem, en l'appelant affectueusement et secrètement le "Bambinello" (petit enfant). Il exprimait presque extérieurement la douceur de ce mystère en embrassant une image de l'Enfant Jésus en cire, en chantant et en dansant du fait de la tendresse divine répandue abondamment sur l'humanité dans la grotte de Noël.

Sa participation au mystère de la Passion du Christ était émouvante. Le Crucifix était toujours présent dans son esprit et dans son coeur, parmi les souffrances d'une vie incomprise et souvent pavée d'obstacles. Il versait de chaudes larmes en pensant à la mort de Jésus sur la Croix, en particulier car, comme il aimait le répéter, ce sont les péchés qui ont transpercé le corps immaculé du Rédempteur sous le marteau de l'ingratitude, de l'égoïsme et de l'indifférence.

5. Un autre aspect important de sa spiritualité fut l'amour de l'Eucharistie. La célébration de la Messe, ainsi que les longues heures passées en adoration devant le tabernacle, constituaient le coeur de sa vie de prière et de contemplation. Il considérait le sacrement de l'Autel comme une "nourriture des anges", un mystère de la foi laissé par Jésus à son Eglise, un Sacrement où le Fils de Dieu fait homme n'apparaît pas aux fidèles face à face, mais coeur à coeur. Avec ce suprême mystère, affirmait-il, Dieu nous a donné tous les trésors de la toute-puissance divine et nous a révélé l'abondance de sa miséricorde divine. Du contact quotidien avec Jésus Eucharistie, il tirait sérénité et paix, qu'il transmettait ensuite à ceux qu'il rencontrait, rappelant qu'en ce monde, nous sommes tous pèlerins et étrangers en chemin vers l'éternité.

6. Saint Joseph de Copertino se distingua par sa simplicité et son obéissance. Détaché de tout, il vécut continuellement en chemin, se déplaçant d'un couvent à l'autre, comme le demandaient ses Supérieurs, s'abandonnant en toute circonstance entre les mains de Dieu.

Authentique franciscain, selon l'esprit du "Poverello" d'Assise, il nourrit un profond attachement au Successeur de Pierre et ressentit de vifs sentiments à l'égard de de l'Eglise, qu'il aima de façon inconditionnée. Il se sentait un membre vivant et actif de l'Eglise, perçue dans son intime réalité de Corps mystique. Il adhéra totalement à la réalité des Papes de son temps, se laissant accompagner docilement dans les lieux où le conduisait l'obéissance, acceptant également les humiliations et les doutes que l'originalité de ses charismes ne manqua pas de susciter. Il ne pouvait certes pas nier le caractère extraordinaire des dons dont il était l'objet, mais bien loin de toute attitude d'orgueil et de vanité, il nourrissait des sentiments d'humilité et de vérité, attribuant tout le mérite du bien qui fleurissait entre ses mains à l'action gratuite de Dieu.

7. Et que dire de sa dévotion filiale et émouvante pour la Sainte Vierge? Dès sa jeunesse, il apprit à s'arrêter longuement aux pieds de la Madone des Grâces, dans le Sanctuaire de Galatone. Par la suite, il s'arrêta pour contempler l'image qui lui était si chère de la Vierge de la Grottella, qui l'accompagna tout au long de sa vie. Enfin, du couvent d'Osimo, où il passa les dernières années, il tournait souvent le regard vers la Basilique de Lorette, centre séculaire de dévotion mariale.

Pour lui, Marie fut une véritable mère avec laquelle il entretenait des relations filiales de familiarité simple et sincère. Aujourd'hui encore, il répète aux fidèles qui ont recours à lui: "Elle est notre Protectrice, Notre Dame, Patronne, Mère, Epouse, Auxiliatrice".

8. En saint Joseph de Copertino, très cher au peuple, resplendit la sagesse des petits et l'esprit des béatitudes évangéliques. A travers toute son existence, il indique la voie qui conduit à la joie authentique, même parmi les difficultés et les tribulations; une joie qui vient d'En Haut, et naît de l'amour pour Dieu et pour les frères, fruit d'une recherche longue et difficile du bien véritable, et, précisément pour cela, contagieuse pour ceux qui entrent en contact avec elle.

Si en raison de son engagement intense d'ascèse chrétienne, ce Saint pourrait apparaître à un regard superficiel comme une personne rude, sévère et rigoureuse, en réalité, il était l'homme de la joie, affable et cordial avec tous. Ses biographes rapportent même qu'il réussissait à communiquer sa joie sainte et franciscaine à travers une façon de prier enrichie par d'attrayantes compositions musicales et de versets populaires qui captivaient l'attention de ses auditeurs, ravivant leur dévotion.

9. Toutes ces caractéristiques rendent saint Joseph de Copertino spirituellement proche des hommes de notre temps. Je souhaite donc que cet anniversaire soit une occasion opportune et appréciée de redécouvrir la spiritualité authentique du "Saint des lévitations". A son école, puisse chacun apprendre à parcourir la voie qui conduit à une sainteté "de chaque jour", marquée par l'accomplissement fidèle du devoir quotidien.

Qu'il soit, pour les frères mineurs de la Famille religieuse conventuelle, un modèle lumineux de "sequela" évangélique, selon le charisme spécifique de François et Claire d'Assise. Aux fidèles qui prendront part aux divers moments de commémoration, qu'il rappelle que tout croyant doit "avancer en eau profonde", confiant dans l'aide du Seigneur pour répondre pleinement à son appel à la sainteté.

En un mot, l'héroïque témoignage évangélique de ce fascinant homme de Dieu, reconnu par l'Eglise et reproposé aux hommes et aux femmes de notre temps, constitue pour chacun un profond rappel à vivre sa foi avec passion et enthousiasme dans les multiples et complexes situations de l'époque contemporaine.

Avec ces sentiments et souhaits je vous donne volontiers, Très Révérend Ministre général, ainsi qu'à vos Confrères présents à travers le monde, et à tous ceux qui se pressent chaque jour au sanctuaire d'Osimo, une Bénédiction apostolique particulière, que j'étends avec affection à tous ceux qui s'inspirent des exemples et des enseignements du Saint de Copertino.

Du Vatican, le 22 février 2003


IOANNES PAULUS II



MESSAGE DU PAPE JEAN-PAUL II AU DIRECTEUR DE LA PETITE OEUVRE DE LA DIVINE PROVIDENCE



Au Révérend Père
Dom ROBERTO SIMIONATO
Directeur général
de la Petite OEuvre de la Divine Providence

1. J'ai appris avec joie que votre Institut commémore le centenaire de son approbation canonique par l'Evêque de Tortona, Mgr Igino Bandi. En cette heureuse circonstance, je suis heureux de vous adresser, ainsi qu'au Conseil général et aux membres de toute la Congrégation, une pensée cordiale, en vous assurant de ma proximité spirituelle à chacun des divers moments de la célébration qui contribueront certainement à faire revivre la ferveur des origines, pour poursuivre avec un enthousiasme immuable le chemin entrepris par le Fondateur il y a plus de cent ans.

2. Le clerc Luigi Orione, ancien élève de dom Bosco à Turin, n'avait que vingt ans lorsqu'il ouvrit la première Aumônerie à Tortona, et l'année suivante, en 1893, il devint fondateur en donnant vie à un "petit collège", avec en son sein une école pour les enfants pauvres. C'est dans les événements quotidiens, vécus avec foi et charité, que se développa le programme auquel le destinait la Divine Providence. Au futur Cardinal Perosi, son concitoyen et ami qui lui demandait quelle était son "idée", il écrivit une lettre en date du 4 mai 1897: "Il me semble que Notre Seigneur Jésus-Christ m'appelle à un état de grande charité,... mais c'est un feu grand et doux qui a besoin de se diffuser et d'enflammer toute la terre. A l'ombre de chaque clocher s'élèvera une école catholique, à l'ombre de chaque Croix un hôpital: les monts feront place à la grande charité de Notre Seigneur Jésus et tout sera instauré et purifié par Jésus" (L'esprit de Dom Orione, I, 2).

Précisément parce qu'il était enflammé par ce feu mystique, dom Orione surmonta les obstacles et les difficultés des débuts et devint un apôtre inlassable, créatif et efficace. Certains compagnons de séminaire suivirent ce clerc fondateur; de nombreux élèves voulurent être prêtres comme lui. L'Oeuvre, qu'il dénomma dès le début de la Divine Providence, s'accrut en membres et en activité. L'Evêque de Tortona suivait avec intérêt l'évolution de ces initiatives si hardies et humainement fragiles, mais sut y reconnaître l'action de l'Esprit. A travers le Décret du 21 mars 1903, il en garantit le charisme et décréta la constitution de la Congrégation religieuse masculine des Fils de la Divine Providence, comprenant des prêtres, des frères ermites et coadjuteurs. Par la suite apparurent les Petites Soeurs missionnaires de la Charité, parmi lesquelles fleurirent deux branches contemplatives, les Sacramentines adoratrices non-voyantes et les Contemplatives de Jésus crucifié, tandis que, plus récemment, sont apparus l'Institut séculier de Dom Orione et le Mouvement des Laïcs de Dom Orione.

3. En cet anniversaire jubilaire, il m'est agréable d'exprimer ma profonde reconnaissance à vous tous, membres de la Famille de Dom Orione, pour la précieuse contribution apportée au cours de ces années à la mission de l'Eglise. Dans le même temps, il m'est agréable de rappeler ce que j'écrivais dans l'Exhortation apostolique Vita consecrata: vous aussi "vous n'avez pas seulement à vous rappeler et à raconter une histoire glorieuse, mais vous avez à construire une grande histoire!" (VC 110). C'est pourquoi je vous invite à regarder vers l'avenir, "où l'Esprit vous envoie pour faire encore avec vous de grandes choses" (ibid. VC 110).

Chers Fils de la Divine Providence, l'Eglise attend de vous que vous raviviez le don qui est en vous (cf. 2Tm 1,6), en renouvelant vos intentions, et, dans un monde qui change, que vous promouviez une fidélité créative à votre vocation. Je soulignais dans l'Exhortation apostolique susmentionnée: "Les Instituts sont donc invités à retrouver avec courage l'esprit entreprenant, l'inventivité et la sainteté des fondateurs et des fondatrices, en réponse aux signes des temps qui apparaissent dans le monde actuel. Il s'agit là surtout d'un appel à persévérer sur la voie de la sainteté, à travers les difficultés matérielles et spirituelles rencontrées dans les vicissitudes quotidiennes. Mais c'est aussi un appel à acquérir une bonne compétence dans son travail et à garder une fidélité dynamique dans sa mission, en adaptant lorsque c'est nécessaire les modalités aux situations nouvelles et aux besoins différents, en pleine docilité à l'inspiration divine et au discernement ecclésial" (VC 37).

Ce n'est qu'en demeurant solidement enracinés dans la vie divine et en conservant intact l'esprit des origines que vous pourrez répondre de façon prophétique aux exigences de l'époque actuelle. L'engagement principal de chaque baptisé et, à plus forte raison, de chaque consacré, est de tendre vers la sainteté; et ce serait sans aucun doute "un contre-sens que de se contenter d'une vie médiocre vécue sous le signe d'une éthique minimaliste et d'une religiosité superficielle" (Novo millennio ineunte NM 31). Dans le style de votre bienheureux fondateur, et selon la nature propre de la vie religieuse que vous avez embrassée, n'ayez pas peur de rechercher avec une constance patiente "ce "haut degré" de la vie chrétienne", en ayant recours à "une vraie pédagogie de la sainteté" (ibid. NM NM 31), personnelle et communautaire, solidement ancrée dans la riche tradition ecclésiale et ouverte au dialogue avec les temps nouveaux.

4. Fidélité créative dans un monde qui change: Que cette orientation vous serve de guide pour marcher, comme aimait le répéter dom Orione, "à la tête des temps". Si les célébrations du centenaire de l'approbation canonique poussent à "rappeler", en le revivant, le climat des origines, elles vous encouragent dans le même temps, en vue notamment du prochain Chapitre général, à "programmer" de nouvelles et courageuses interventions sur les frontières de la charité.

Que l'esprit de la première heure demeure intact! Je voudrais, à ce propos, souligner un aspect significatif de l'intuition charismatique du clerc dom Orione: son amour supérieur et unifiant pour la "Sainte Mère l'Eglise". Aujourd'hui comme hier, il est fondamental pour votre Oeuvre de cultiver cette passion intime pour l'Eglise, afin que vous puissiez "contribuer modestement, au pied du Siège apostolique et des Evêques, à renouveler et à unifier en Jésus-Christ, notre Seigneur, l'homme et la société, en apportant à l'Eglise et au Pape le coeur des enfants les plus abandonnés, des pauvres et des classes ouvrières: ad omnia in Christo instauranda, ut fiat unun ovile et unus pastor" (Constitutions, art. 5).

Que dom Orione continue de vous accompagner du ciel, avec les nombreux confrères qui, tout au long de ces cent ans, ont consacré leur existence au service du Christ et des pauvres. Que sur chacun de vous veille la Vierge Marie, Mère du Christ et Mère de l'Eglise et qu'elle fasse en sorte que, comme le priait dom Orione, toute votre vie soit "sacrée pour donner le Christ au peuple et le peuple à l'Eglise du Christ; qu'elle brûle et resplendisse du Christ et qu'elle se consume dans le Christ en une lumineuse évangélisation des pauvres; que notre vie et notre mort soient un cantique très doux de charité, un holocauste au Seigneur" (L'esprit de Dom Orione, IX, 131).

Je vous assure avec affection de mon souvenir constant dans la prière, tandis que je bénis de tout coeur toute votre Famille spirituelle et tous ceux qui sont au centre de vos préoccupations quotidiennes.

Du Vatican, le 8 mars 2003


IOANNES PAULUS II



Discours 2003 - Mardi 4 mars 2003