Discours 2003 - MESSAGE DU COLLÈGE DES CARDINAUX AU SAINT PÈRE

MESSAGE DU COLLÈGE DES CARDINAUX AU SAINT PÈRE


Très Saint-Père!

Le Collège cardinalice s'est réuni pour rendre grâce au Seigneur et à vous-même pour les 25 années de travail fécond comme Successeur de saint Pierre, que l'on ne peut manquer de rappeler en ces journées. Au cours de cette période, la barque de l'Eglise a souvent navigué à contre-courant et par une mer agitée. La mer de l'histoire est agitée d'oppositions entre riches et pauvres, entre peuples et cultures, entre les possibilités ouvertes par le génie humain et le danger d'auto-destruction de l'homme précisément à cause de ces possibilités. Quelquefois, le ciel semble couvert de sombres nuages qui cachent Dieu au regard des hommes et remettent la foi en discussion. Plus que jamais, nous faisons l'expérience que l'histoire du monde - selon l'interprétation qu'en a donnée saint Augustin - est une lutte entre deux formes d'amour: l'amour pour soi-même jusqu'au mépris de Dieu, et l'amour pour Dieu jusqu'à la disponibilité à se sacrifier pour son service et au service de son prochain. Et même si les signes de la présomption de l'homme, de son éloignement de Dieu se sont fait ressentir et percevoir davantage que les témoignages d'amour, grâce à Dieu, nous voyons, aujourd'hui précisément, que la lumière de Dieu ne s'est pas éteinte dans l'histoire: le grand nombre de saints et de bienheureux que vous avez, Très Saint-Père, élevés aux honneurs des autels, en est un signe éloquent: nous pouvons y reconnaître avec joie la lumière de Dieu dans l'histoire, le reflet de Son amour sur le visage des hommes bénis de Dieu.

Votre Sainteté, durant cette période, sans cesse réconforté par la présence amoureuse de la Mère de Jésus, vous nous avez guidés avec la joie de la foi, avec le courage impavide de l'espérance et avec l'enthousiasme de l'amour. Vous avez fait en sorte que nous puissions voir la lumière de Dieu malgré tous les nuages et que ne prévale pas la faiblesse de notre foi qui nous porte trop facilement à nous exclamer: "Au secours, Seigneur, nous périssons!" (Mt 8,25). Pour cela, nous vous rendons grâce aujourd'hui de tout notre coeur. En pèlerin de l'Evangile, à l'exemple des Apôtres, vous vous êtes mis en chemin et vous avez traversé les continents pour apporter l'annonce du Christ, l'annonce du Royaume de Dieu, l'annonce du pardon, de l'amour et de la paix. Opportun ou importun, vous avez inlassablement annoncé l'Evangile et sa lumière, vous avez rappelé chacun aux valeurs humaines fondamentales: au respect de la dignité de l'homme, à la défense de la vie, à la promotion de la justice et de la paix. Par dessus tout, vous êtes allé à la rencontre des jeunes, en transmettant le feu de votre foi, votre amour pour le Christ et votre disponibilité à vous consacrer à Lui corps et âme. Vous vous êtes occupé des malades et des personnes qui souffrent et vous avez lancé un appel passionné au monde pour que les biens de la terre soient partagés équitablement et que les pauvres jouissent de la justice et l'amour. Vous avez perçu le commandement de l'unité fait par le Seigneur à Ses disciples comme un devoir qui vous était adressé personnellement, et vous avez fait tout ce qui était possible afin que les croyants en Christ soient un, de manière à ce que dans le miracle de l'unité, qui dépasse le pouvoir des hommes, on puisse reconnaître le pouvoir bienveillant de Dieu lui-même. Vous êtes allé à la rencontre des hommes d'autres religions pour éveiller en tous le désir de la paix et leur disponibilité à se faire des instruments de paix. Ainsi, vous êtes devenu pour toute l'humanité, au-delà de toutes les barrières et de toutes les divisions, un grand messager de paix. Vous n'avez jamais cessé d'en appeler à la conscience des peuples et de réconforter tous ceux qui sont victimes de l'absence de paix dans ce monde. De cette manière, vous avez obéi au Seigneur qui a laissé aux siens cette promesse: "Je vous laisse la paix; c'est ma paix que je vous donne" (Jn 14,27). C'est précisément par cette manière d'aller à la rencontre des autres que vous n'avez jamais laissé s'immiscer le moindre doute sur le fait que le Christ est l'amour de Dieu fait chair, le Fils unique et le Sauveur de tous. Pour vous, annoncer le Christ ne constitue en aucun cas imposer à personne quoi que soit qui lui soit étranger, mais communiquer à tous ce à quoi au fond de nous, nous aspirons tous avec ferveur: l'amour éternel que le coeur de tout homme attend secrètement.

"Le Rédempteur de l'homme est le centre du cosmos et de l'histoire": ces paroles par lesquelles débute votre première Encyclique ont été comme l'appel au rassemblement, qui invitait à un renouveau religieux, en recentrant toutes choses sur le Christ.

Très Saint-Père, le Collège cardinalice, au terme de ce Congrès, au cours duquel ont été évoqués quelques-uns des aspects des vingt-cinq années de votre Pontificat écoulées jusqu'à présent, souhaite réaffirmer de manière unanime l'attachement filial à votre personne et l'adhésion fidèle et totale à votre Magistère de pasteur de l'Eglise universelle.

"La joie de Yahvé est votre forteresse" disait le prêtre Esdras au peuple d'Israël en un moment difficile (Ne 8,10). Très Saint-Père, vous avez rallumé en nous cette joie du Seigneur. Nous vous en sommes reconnaissants. Puisse le Seigneur vous donner toujours Sa joie.

    

LORS DE L'AGAPE FRATERNELLE À LA DOMUS SANCTAE MARTHAE

18 octobre 2003



Messieurs les Cardinaux,
chers frères dans l'épiscopat!

1. Je garde dans mon coeur le souvenir ému de la solennelle Célébration eucharistique de jeudi dernier, qui m'a fait revivre ce qui a eu lieu il y a vingt-cinq ans. C'est avec joie et gratitude que je partage avec vous cette agape fraternelle. Ainsi se prolonge l'expérience d'intense communion, vécue au cours de l'intéressant Congrès organisé par le Collège cardinalice.

Je remercie de tout coeur chacun de vous, vénérés Frères, pour la proximité affectueuse que vous me témoignez en chaque occasion. Mes remerciements s'adressent de façon particulière au Cardinal-Secrétaire d'Etat, qui s'est fait l'interprète des sentiments communs et au Collège cardinalice dans son entier, pour le don généreux qui m'a été fait. Celui-ci sera destiné aux Communautés chrétiennes de Terre Sainte, si durement éprouvées.

2. Nous continuerons à nous rencontrer dans les prochains jours, d'abord pour la béatification de Mère Teresa, puis pour le Consistoire. Il s'agit de journées chargées de signification, qui mettent en évidence l'unité et la vitalité de l'Eglise.

J'étends ma pensée reconnaissante au directeur et au personnel de cette maison chaleureuse et fonctionnelle qui nous accueille, ainsi qu'à tous ceux qui ont préparé notre repas.

3. Une fois de plus, merci, merci à vous tous de votre présence et de l'amour que vous avez pour l'Eglise. Lorsque vous retournerez dans vos Sièges, apportez mon salut à vos communautés ecclésiales et assurez vos fidèles que le Pape les aime. Remerciez-les de façon particulière pour leurs prières et pour la proximité spirituelle, dont ils ont fait preuve ces jours-ci à mon égard.

Avec une grande affection, je vous donne à présent ma Bénédiction, ainsi qu'à vos communautés.

   

AUX PÈLERINS VENUS POUR LA BÉATIFICATION DE MÈRE TERESA DE CALCUTTA

Lundi 20 octobre 2003



Vénérés frères dans l'épiscopat,
chères et chers Missionnaires de la Charité,
très chers frères et soeurs!

1. Je vous salue cordialement et m'unis avec joie à votre prière d'action de grâce à Dieu pour la béatification de Mère Teresa de Calcutta. J'étais lié à elle par une grande estime et une sincère affection. C'est pourquoi je suis particulièrement heureux de me trouver avec vous, ses filles et fils spirituels. Je salue de manière particulière Soeur Nirmala, me rappelant du jour où Mère Teresa vint à Rome pour me la présenter personnellement. Ma pensée s'étend à toutes les personnes qui composent la grande famille spirituelle de cette nouvelle bienheureuse.

2. "Missionnaire de la Charité: telle a été Mère Teresa, en nom et dans les faits".C'est avec émotion que je répète aujourd'hui ces paroles que je prononçai le lendemain de sa mort (Angelus du 7 septembre 1997).

Avant tout, missionnaire. Il ne fait aucun doute que la nouvelle bienheureuse ait été l'une des plus grandes missionnaires du XX siècle. De cette femme simple, venant d'une des régions les plus pauvres d'Europe, le Seigneur a fait un instrument élu (cf. Ac 9,15) pour annoncer l'Evangile au monde entier non par la prédication, mais à travers des gestes d'amour quotidiens envers les plus pauvres. Missionnaire dans le langage le plus universel: celui de la charité sans limite et sans exclusion, sans préférence sinon pour les plus pauvres.

Missionnaire de la charité. Missionnaire de Dieu qui est charité, qui privilégie les petits et les humbles, qui se penche sur l'homme blessé dans son corps et dans son esprit et verse sur ses plaies "l'huile de la consolation et le vin de l'espérance". Dieu a fait cela dans la Personne de son Fils fait homme, Jésus Christ, Bon Samaritain de l'humanité. Il continue de le faire dans l'Eglise, en particulier à travers les saints de la charité. Mère Teresa brille de manière particulière parmi ces derniers.

3. Où Mère Teresa a-t-elle trouvé la force de se mettre tout entière au service des autres? Elle la trouva dans la prière et dans la contemplation silencieuse de Jésus Christ, de son saint Visage, de son Sacré Coeur. Elle l'a dit elle-même: "Le fruit du silence est la prière: le fruit de la prière est la foi; le fruit de la foi est l'amour; le fruit de l'amour est le service; le fruit du service est la paix". La paix, même aux côtés des mourants, même dans les nations en guerre, même confrontée aux attaques et à des critiques hostiles. C'est la prière qui emplissait son coeur de la paix du Christ et lui permettait de faire rayonner cette paix sur les autres.

4. Une missionnaire de la charité, une missionnaire de la paix, une missionnaire de la vie. Mère Teresa était tout cela. Elle s'exprimait toujours pour défendre la vie humaine, même lorsque son message n'était pas le bienvenu. Toute l'existence de Mère Teresa était un hymne à la vie. Ses rencontres quotidiennes avec la mort, la lèpre, le SIDA et toutes sortes de souffrances humaines faisait d'elle un témoin efficace de l'Evangile de la Vie. Même son sourire était un "oui" à la vie, un "oui" joyeux, né d'une foi et d'un amour profond, un "oui" purifié au creuset de la souffrance. Elle renouvelait ce "oui" chaque matin, en union avec Marie, au pied de la Croix du Christ. La "soif" de Jésus crucifié devenait la soif de Mère Teresa elle-même et l'inspiration de son chemin de sainteté.

5. Teresa de Calcutta a réellement été une Mère. Mère des pauvres, mère des enfants. Mère de si nombreuses jeunes filles et de tant de jeunes qui l'ont adoptée comme guide spirituel et en ont partagé la mission. A partir d'une petite semence, le Seigneur a fait croître un grand arbre, fécond en fruits (cf. Mt 13,31-32). Filles et fils de Mère Teresa, vous êtes justement les signes les plus éloquents de cette fécondité prophétique. Conservez intact son charisme et suivez ses exemples; elle, depuis le ciel, ne manquera pas de vous soutenir dans votre chemin quotidien.

Le message de Mère Teresa, à présent plus que jamais, apparaît toutefois comme une invitation adressée à tous. Son existence tout entière nous rappelle qu'être chrétiens signifie être des témoins de la charité. Telle est la consigne de la nouvelle bienheureuse. En faisant écho à ses paroles, j'exhorte chacun à suivre avec générosité et courage les pas de cette disciple authentique du Christ. Sur le chemin de la charité, Mère Teresa marche à vos côtés.

De tout coeur, je vous accorde, ainsi qu'aux personnes qui vous sont chères, la Bénédiction apostolique.



AUX NOUVEAUX CARDINAUX, À LEURS FAMILLES ET AUX FIDÈLES DE LEURS DIOCÈSES

Jeudi 23 octobre 2003



Vénérés frères Cardinaux,
très chers frères et soeurs!

1. Après les célébrations solennelles de mardi dernier et d'hier, je suis heureux de vous rencontrer également aujourd'hui.

Je vous salue avant tout, vénérés Cardinaux italiens. Avec vous, je désire saluer vos familles, vos amis et les fidèles de vos diocèses qui vous entourent. Je suis certain qu'ils continueront à vous suivre par la prière et par leur soutien affectueux.

Le Saint-Père s'est ensuite adressé aux Cardinaux et fidèles francophones:

Je salue avec affection les nouveaux Cardinaux de langue française et les pèlerins francophones venus les entourer à l'occasion du Consistoire de leur création. A tous, j'accorde ma Bénédiction.

Après avoir salué les Cardinaux et fidèles en langue anglaise, espagnole et portugaise, le Saint-Père s'adressait aux Cardinaux et aux fidèles polonais:

Je salue cordialement les Pères dehoniens et tous ceux qui ont accompagné le Cardinal Stanislaw ces derniers jours. Avec vous, je rends grâce à Dieu car j'ai pu conférer cette dignité à un prêtre zélé, un savant célèbre et un ami fidèle. Je demande à Dieu la Bénédiction pour lui et pour vous tous.

Le Pape poursuivait en italien:

2. Vénérés et chers frères! En vous renouvelant mon salut fraternel et mes voeux fervents pour la mission qui vous a été confiée au service de toute l'Église, je désire confier vos personnes et votre ministère à la protection céleste de la Sainte Vierge. Que les saints Pierre et Paul intercèdent également pour vous.

Avec ces sentiments, je renouvelle de tout coeur ma Bénédiction à chacun de vous et à tous ceux qui vous entourent avec joie et affection, ainsi qu'à tous ceux que vous rencontrerez dans votre ministère pastoral.




AUX ÉVÊQUES D'ANGLETERRE ET DU PAYS DE GALLES EN VISITE AD LIMINA APOSTOLORUM

Jeudi 23 octobre 2003


Eminence,
Chers frères Evêques,

1. "Grâce, miséricorde, paix, de par Dieu le Père et le Christ Jésus notre Seigneur" (1Tm 1,2). En reprenant ces paroles de salut, je vous souhaite une cordiale bienvenue, Evêques d'Angleterre et du Pays de Galles. Je remercie le Cardinal Murphy O'Connor de ses voeux et des sentiments courtois exprimés en votre nom. Je vous présente cordialement les miens en retour, et je vous assure de mes prières pour vous et pour les personnes confiées à vos soins pastoraux. En venant "rendre visite à Céphas" (Ga 1,18), vous renforcez dans la foi, dans l'espérance et dans la charité vos liens de communion avec l'Evêque de Rome. Votre première visite "ad limina Apostolorum" en ce nouveau millénaire constitue une occasion pour affirmer votre engagement à rendre le visage du Christ toujours plus visible dans l'Eglise et dans la société, à travers un témoignage constant de l'Evangile qu'est Jésus Christ lui-même (cf. Ecclesia in Europa, n. 6).

2. L'Angleterre et le Pays de Galles, bien qu'étant imprégnés d'un riche héritage chrétien, doivent aujourd'hui faire face au développement envahissant du sécularisme.A la base de cette situation se trouve la tentative de promouvoir une vision de l'humanité détachée de Dieu et éloignée du Christ. Il s'agit d'une mentalité qui exacerbe l'individualisme, qui rompt le lien fondamental entre la liberté et la vérité et qui, en conséquence, détruit les liens réciproques qui définissent la vie sociale. Cette perte du sens de Dieu est souvent ressentie comme un "abandon de l'homme" (cf. Ibid., n. 9). La désagrégation sociale, les menaces contre la vie familiale, les spectres horribles de l'intolérance raciale et de la guerre, ont pour conséquences que de nombreux hommes et femmes, et surtout les jeunes, se sentent désorientés et parfois même privés d'espérance. C'est pourquoi, il n'y a pas que l'Eglise qui doive affronter les effets préoccupants du sécularisme, mais également la vie civique.

Jésus Christ, qui est vivant dans son Eglise, nous permet de surmonter les perplexités de notre temps. En tant qu'Evêques, nous sommes appelés a rester vigilants dans notre devoir de proclamer, avec une certitude claire et ardente, que Jésus Christ est la source de l'espérance, une espérance qui ne déçoit pas (cf. Rm 5,5). Les fidèles qui sont en Angleterre et au Pays de Galles se tournent vers vous avec un grand espoir, afin que vous prêchiez et que vous enseigniez l'Evangile qui dissipe les ténèbres et qui éclaire le chemin de la vie. La proclamation quotidienne de l'Evangile et une vie de sainteté représentent la vocation de l'Eglise à chaque époque et en chaque lieu. Ce mandat, qui exprime l'identité la plus profonde de l'Eglise, exige la plus grande sollicitude. Les phénomènes du sécularisme et de l'indifférence religieuse diffuse, la diminution des vocations au sacerdoce et à la vie religieuse, ainsi que les grandes difficultés que les parents connaissent dans leurs tentatives de catéchiser leurs enfants, témoignent tous de l'urgente nécessité pour les Evêques d'accomplir leur mission fondamentale d'être d'authentiques annonciateurs de la Parole qui fait autorité (cf. Pastores gregis ). Pour que cela se réalise, les évêques, appelés par le Christ à être des enseignants de la vérité, "doivent promouvoir et sauvegarder l'unité de la foi et la discipline commune de l'ensemble de l'Eglise" (Lumen gentium LG 23). C'est par la fidélité au Magistère ordinaire de l'Eglise, par la stricte adhésion à la discipline de l'Eglise universelle et par les déclarations positives qui instruisent les fidèles de façon claire, que l'Evêque préserve le Peuple de Dieu des déviations et des faiblesses, et lui assure la possibilité objective de professer sans erreur la foi authentique (cf. Catéchisme de l'Eglise catholique CEC 890).

3. Chers frères, vos rapports indiquent clairement que vous avez pris à coeur ma profonde conviction selon laquelle le nouveau millénaire exige un "élan renouvelé pour notre vie chrétienne" (Novo Millennio ineunte NM 29). Si l'Eglise désire étancher la soif de vérité et de valeurs authentiques des hommes et des femmes, sur lesquelles construire sa propre vie, on ne peut négliger aucun effort pour lancer des initiatives pastorales efficaces, afin de faire connaître Jésus.

Face aux mouvements de division répétés, aux soupçons et aux hostilités, le grand défi que nous devons affronter est celui de faire de l'Eglise la maison et l'école de la communion (cf. Ibid., NM NM 43), en reconnaissant que celle-ci est "un peuple qui tire son unité de l'unité du Père et du Fils et de l'Esprit Saint" (Lumen gentium LG 4). C'est pourquoi il est très important que les programmes de catéchèse et d'éducation religieuse que vous avez introduits continuent à rendre plus profonds, chez les fidèles, la compréhension et l'amour du Christ et de son Eglise. La pédagogie authentique de la prière, la catéchèse convaincante sur la signification de la liturgie et sur l'importance de l'Eucharistie dominicale et la promotion de la pratique fréquente du Sacrement de la Réconciliation (cf. Congrégation pour le Clergé, Instruction Le prêtre, pasteur et guide de la communauté paroissiale, n. 27), pourront constituer une aide précieuse afin de parvenir à cet objectif pastoral et d'allumer dans les coeurs de vos populations la joie et la paix qui découlent de la participation à la vie et à la mission de l'Eglise.

4. Le rôle du ministère sacerdotal est fondamental pour le succès de vos programmes de renouvellement pastoral. L'Eglise a besoin de prêtres humbles et saints, dont le chemin de conversion quotidien inspire tout le Peuple de Dieu à suivre la voie de la sainteté, à laquelle il est appelé (cf. Lumen gentium LG 9). Solidement enraciné dans une relation personnelle de profonde communion et d'amitié avec Jésus le Bon Pasteur, le prêtre trouvera non seulement sa propre sanctification, mais il deviendra un modèle de sainteté pour les personnes qu'il est appelé à servir. Assurez vos prêtres que les fidèles chrétiens, et également la société dans son ensemble, ont besoin d'eux et leur sont reconnaissants. Je suis certain qu'à cet égard, vous leur manifesterez votre affection particulière, en les accompagnant comme des pères et des frères dans toutes les étapes de leur vie ministérielle (cf. Pastores gregis ).

De même, doivent être encouragés les prêtres religieux, les frères et les soeurs alors qu'ils cherchent à enrichir la communion ecclésiale à travers leur présence active et leur ministère dans vos diocèses. En tant que don fait à l'Eglise, la vie consacrée se trouve au centre de celle-ci, manifestant la profonde beauté de la vocation chrétienne à l'amour altruiste et au sacrifice. Vos récentes tentatives pour promouvoir une "culture de la vocation" deviendront assurément un signe apprécié de la richesse des divers états de la vie ecclésiastique, qui existent ensemble "pour que le monde croie" (Jn 17,21).

Comme priorité dans votre réponse à l'appel pour une nouvelle évangélisation, je suis heureux d'apprendre vos efforts décidés pour apporter une énergie supplémentaire au ministère des jeunes.La croissance de groupes comme "Youth 2000" et le développement de programmes d'aumônerie universitaire, sont un témoignage du désir de nombreux jeunes de participer à la vie de l'Eglise. En tant que ministres de l'espérance, les Evêques doivent édifier l'avenir avec ceux auxquels l'avenir est confié (cf. Pastores gregis ). Offrez-leur une formation chrétienne intégrale et invitez-les à suivre le Christ. Vous découvrirez que leur enthousiasme et leur générosité sont exactement ce qui est nécessaire pour promouvoir un esprit de renouvellement non seulement entre eux, mais dans toute la communauté chrétienne.

5. L'évangélisation de la culture est un aspect central de la nouvelle évangélisation, car "au centre de toute culture se trouve l'attitude que l'homme prend devant le mystère le plus grand, le mystère de Dieu" (Centesimus annus CA 24). En tant qu'évêques, vous cherchez à juste titre à trouver les moyens pour que soit accordée à la vérité de Dieu la juste considération dans le domaine public. A ce propos, je reconnais la précieuse contribution de vos lettres pastorales et de vos déclarations sur des questions propres à votre société. Je vous exhorte à continuer à faire en sorte que ces déclarations expriment de façon complète et claire l'ensemble de l'enseignement du magistère de l'Eglise. La nécessité de soutenir l'unicité du mariage comme une union pour toute la vie entre un homme et une femme, dans laquelle, en tant que mari et femme, ils participent à l'oeuvre de création de Dieu, pleine d'amour, revêt une importance particulière. Assimiler le mariage à d'autres formes de coexistence, entâche le caractère sacré du mariage et viole sa profonde valeur dans le dessein de Dieu pour les hommes (cf. Familiaris consortio FC 3).

Il ne fait aucun doute que l'un des principaux facteurs dans la formation de la culture actuelle est représenté par les moyens de communication sociale. La qualité morale fondamentale de toute communication est qu'elle doit respecter et servir la vérité. Vos efforts pour aider ceux qui travaillent dans ce domaine à exercer leurs responsabilités sont dignes d'éloges. Bien que ces efforts puissent parfois rencontrer certaines résistances, je vous encourage à chercher à travailler avec les hommes et les femmes du monde des communications. Invitez-les à s'unir à vous pour abattre les barrières de la méfiance et chercher à réunir les peuples dans la compréhension et le respect.

6. Enfin, dans le contexte de l'évangélisation de la culture, je désire vous exprimer ma reconnaissance pour la précieuse contribution apportée par vos écoles catholiques, que ce soit en enrichissant la foi de la communauté catholique ou en promouvant une excellente préparation pour la vie civique en général. Reconnaissant les profonds changements relatifs au monde de l'éducation, j'encourage les enseignants, laïcs et religieux, dans leur mission primordiale d'assurer que ceux qui ont été baptisés "deviennent chaque jour plus conscients de ce don de la foi qu'ils ont reçu" (Gravissimum educationis GE 2). Alors que l'éducation religieuse, le centre de toute école catholique, représente aujourd'hui un défi et un devoir pour l'apostolat, apparaissent également de nombreux signes du désir des jeunes d'apprendre la foi et de la pratiquer avec ardeur. Si ce réveil dans la foi doit se développer, il y a besoin d'enseignants qui aient une compréhension claire et précise de la nature spécifique et du rôle de l'éducation catholique. Il faut que celle-ci soit articulée à tous les niveaux, si les jeunes et leurs familles doivent faire l'expérience de l'harmonie entre la foi, la vie et la culture (cf. Congrégation pour l'Education catholique, Les personnes consacrées et leur mission dans l'école, n. 6). A ce propos, je désire adresser un appel spécial à vos religieux afin qu'ils n'abandonnent pas l'apostolat dans les écoles (cf. Pastores gregis ) et, au contraire, qu'ils renouvellent leur engagement à servir également les écoles situées dans les quartiers les plus pauvres. Dans les lieux où de nombreux facteurs éloignent les jeunes du chemin de la vérité et de la liberté authentique, le témoignage des conseils évangéliques, de la part d'une personne consacrée, constitue un don irremplaçable.

7. Chers frères, c'est avec une affection fraternelle que je partage avec vous ces réflexions, et je vous assure de mes prières, alors que vous cherchez à rendre le visage du Christ toujours plus reconnaissable dans vos communautés. Le message d'espérance que vous proclamez ne manquera pas de susciter une nouvelle ferveur et un engagement renouvelé dans la vie chrétienne. Unis dans notre amour du Seigneur et inspirés par l'exemple de Mère Teresa de Calcutta, béatifiée depuis peu, nous avançons dans l'espérance. Avec ces sentiments, je vous confie à Marie, Etoile de la Nouvelle Evangélisation, afin qu'elle vous soutienne dans votre sagesse pastorale, qu'elle vous renforce dans votre courage et qu'elle allume dans vos coeurs l'amour et la compassion. Je vous donne cordialement ma Bénédiction apostolique, ainsi qu'aux prêtres, aux diacres, aux religieux et aux fidèles laïcs de vos diocèses.

  


AUX PÈLERINS VENUS À ROME POUR LE IV CENTENAIRE DE LA NAISSANCE DE SAINT JOSEPH DE COPERTINO

Samedi 25 octobre 2003




Très chers frères et soeurs!

1. Je suis heureux de vous souhaiter une cordiale bienvenue à vous tous, réunis à Rome à l'occasion des célébrations solennelles du IV centenaire de la naissance de saint Joseph de Copertino. Je salue avant tout les chers Frères mineurs conventuels, accompagnés de leur Ministre général, le Père Joachim Giermek, que je remercie des paroles courtoises qu'il m'a adressées au nom de toutes les personnes présentes. J'adresse une pensée particulière au Cardinal Sergio Sebastiani et aux Pasteurs des Communautés ecclésiales qui prennent part au pèlerinage d'aujourd'hui aux tombeaux des Apôtres. Je vous salue enfin, très chers pèlerins venus des Pouilles, de l'Ombrie et des Marches, lieux particulièrement liés au passage terrestre et à la mémoire du "Saint des lévitations".

Comme je l'indiquais dans le Message publié en février dernier, Joseph de Copertino continue d'être un saint d'une actualité extraordinaire, car il est "spirituellement proche des hommes de notre temps", auxquels il enseigne à "parcourir la voie qui conduit à une sainteté de "chaque jour", marquée par l'accomplissement fidèle du devoir quotidien" (n. 9).

2. Saint Joseph, en effet, est avant tout un maître de prière. Au centre de sa journée figurait la célébration de la Messe, suivie de longues heures d'adoration devant le Tabernacle. Selon la plus authentique tradition franciscaine, il se sentait fasciné et ému par les mystères de l'Incarnation et de la Passion du Seigneur. Saint Joseph de Copertino a vécu en union intime avec l'Esprit Saint; il était entièrement possédé par l'Esprit, dont il apprenait les choses de Dieu pour les traduire ensuite dans un langage simple et compréhensible à tous. Ceux qui le rencontraient écoutaient volontiers ses paroles car, comme le rapportent ses biographes, même s'il ignorait la langue et avait une écriture irrégulière, lorsqu'il parlait de Dieu, il se transformait.

3. En second lieu, le Saint de Copertino continue à parler aux jeunes et, en particulier, aux étudiants, qui le vénèrent comme leur patron. Il les pousse à aimer l'Evangile, à "avancer en eau profonde" dans le vaste océan du monde et de l'histoire, en demeurant solidement ancrés à la contemplation du Visage du Christ.

Mon souhait est que vous tous, chers jeunes et étudiants, ainsi que vous tous qui oeuvrez dans le domaine de la culture et de la formation, suiviez l'exemple de saint Joseph, en vous engageant à conjuguer la sagesse de la foi et la méthode rigoureuse de la science, afin que le savoir humain, toujours ouvert à la transcendance, avance de façon sûre vers une connaissance toujours plus totale de la vérité.

4. Saint Joseph de Copertino resplendit enfin comme un modèle exemplaire de sainteté pour ses confrères de l'Ordre franciscain des Frères mineurs conventuels. Ses efforts constants en vue d'appartenir uniquement au Christ font de lui une icône du frère "mineur" qui, à l'école du Poverello d'Assise, met le Christ au centre de toute son existence. Son engagement décisif pour reconduire constamment le coeur vers Dieu, afin que rien ne le sépare de "son" Jésus, aimé par-dessus toute chose et toute personne, devient particulièrement éloquent.

Le témoignage de ce grand Saint, qui resplendit d'une lumière particulière en ce quatre-centième anniversaire, constitue un message encourageant de vie évangélique. Pour tous ceux qui ont embrassé les idéaux de la vie consacrée, il représente un profond rappel à vivre en étant toujours tendu vers les valeurs de l'esprit, totalement consacrés au Seigneur et à un service indispensable de charité envers ses frères.

5. Comme tous les saints, Joseph de Copertino ne passe pas de mode! Après quatre siècles, son témoignage continue de représenter pour tous une invitation à être saints. Même s'il appartient à une époque sous certains aspects très diverse de la nôtre, il indique un itinéraire de spiritualité valable pour toutes les époques; il rappelle le primat de Dieu, la nécessité de la prière et de la contemplation, l'adhésion ardente et confiante au Christ, l'engagement de l'annonce missionnaire, l'amour de la Croix.

Tandis que je renouvelle le souhait que les célébrations du quatre-centième anniversaire contribuent à faire mieux connaître le "Saint des lévitations", j'invoque sur tous ceux qui les ont organisées et qui y prennent part, la protection céleste de la Vierge Marie.

Avec ces sentiments et ces voeux, je vous donne de tout coeur la Bénédiction apostolique à vous ici présents, à vos communautés et aux nombreux fidèles du saint de Copertino d'Italie et du monde.



  MESSAGE À L'OCCASION DU XIV CENTENAIRE DE LA MORT DE SAINT GRÉGOIRE LE GRAND





A Mgr Walter BRANDMULLER
Président du Comité pontifical des Sciences historiques

1. En vue du XIV centenaire de la mort de mon prédécesseur, saint Grégoire le Grand, l'Académie nationale des Lincei et le Comité pontifical des Sciences historiques entendent commémorer ensemble cette éminente figure de Successeur de Pierre, auquel a été à juste titre donné le nom de "Grand". En évoquant à nouveau les personnages et les événements du passé qui ont laissé une empreinte importante sur leur époque, l'historiographie rend un service précieux aux générations futures, car elle met en lumière des modèles humains porteurs de valeurs universelles, et utiles - en tant que telles - pour chaque époque. C'est le cas de Grégoire le Grand, dont je veux souligner ici certains aspects de la personnalité, que je considère particulièrement importants.

2. Fils d'une antique famille romaine à la longue tradition chrétienne, Grégoire, grâce à l'atmosphère de la maison paternelle et à la formation scolaire reçue, put se familiariser avec le patrimoine des sciences et de la littérature antique.

Chercheur attentif de la vérité, il comprit que le patrimoine de l'antiquité classique, outre celui de l'antiquité chrétienne, constituait une base précieuse pour tout développement scientifique et humain à venir. Il s'agit d'une intuition qui conserve aujourd'hui encore toute sa valeur en vue de l'avenir de l'humanité et surtout de l'Europe. En effet, on ne peut édifier l'avenir en faisant abstraction du passé. Voilà pourquoi, en diverses occasions, j'ai exhorté les Autorités compétentes à valoriser pleinement les riches "racines" classiques et chrétiennes de la civilisation européenne, pour transmettre leur lymphe aux nouvelles générations.

Une autre caractéristique significative de saint Grégoire le Grand fut son engagement à mettre en lumière le primat de la personne humaine considérée non seulement dans sa dimension physique, psychologique et sociale, mais également dans la référence constante à son destin éternel. Il s'agit d'une vérité à laquelle le monde d'aujourd'hui doit redevenir plus attentif, s'il veut édifier un monde plus respectueux des multiples exigences de chaque être humain.

3. Saint Grégoire le Grand est souvent appelé "le dernier des Romains". En effet, il fut profondément enraciné dans l'Urbs, dans son peuple, dans ses traditions. En tant que Souverain Pontife, il eut toujours comme objectif l'Orbis Romanus. Il s'intéressa non seulement à la partie orientale de l'Empire romain, Byzance, qu'il connaissait bien étant donné son long séjour à Constantinople, mais étendit sa préoccupation pastorale à l'Hispanie, à la Gaule, à la Germanie, et à la Bretagne, qui faisaient alors partie de l'Empire romain.

Mû par un zèle exemplaire pour la diffusion de l'Evangile, il promut une activité missionnaire intense dans laquelle trouvait son expression une romanité purifiée et inspirée par l'Evangile; une romanité chrétienne, non plus orientée vers l'affirmation d'un pouvoir politique, mais désireuse de diffuser le message salvifique du Christ à tous les peuples.

Cette attitude intérieure de ce grand Pontife apparaît dans les directives qu'il se préoccupa de transmettre à l'Abbé Augustin, envoyé en Bretagne: il lui demanda explicitement de respecter les coutumes de ces peuples, pourvu qu'elles ne soient pas en opposition avec la foi chrétienne. De cette façon, Grégoire le Grand, en plus de cultiver la préoccupation missionnaire inhérente à son ministère, apportait une contribution décisive à une intégration harmonieuse des divers peuples de la chrétienté occidentale.

Le témoignage de cet illustre Pontife, demeure donc comme un exemple également pour nous, chrétiens d'aujourd'hui, qui avons depuis peu franchi le seuil du troisième millénaire, et regardons avec confiance vers l'avenir. Pour édifier un avenir serein et solidaire il conviendra de tourner le regard vers cet authentique disciple du Christ, et d'en suivre l'enseignement, en reproposant avec courage au monde d'aujourd'hui le message salvifique de l'Evangile. C'est en effet dans le Christ, et dans lui seul, que l'homme de toute époque peut trouver le secret de la pleine réalisation de ses aspirations les plus essentielles.

Je souhaite de tout coeur que vous aussi, illustres Professeurs, grâce à une collaboration fructueuse entre le Comité pontifical des Sciences historiques et l'Académie des Lincei, en approfondissant la pensée et l'oeuvre du grand Pontife, puissiez offrir votre importante contribution à la construction d'une nouvelle civilisation, véritablement digne de l'homme.

Avec ces sentiments, tandis que je vous assure de mon souvenir dans la prière, je vous bénis tous de tout coeur.

Du Vatican, le 22 octobre 2003.

IOANNES PAULUS II




Discours 2003 - MESSAGE DU COLLÈGE DES CARDINAUX AU SAINT PÈRE