Discours 2005




                                         2005

      Janvier 2005

SALUT DU PAPE JEAN-PAUL II AUX MEMBRES DU CLUB DE FOOTBALL DE CRACOVIE

Mardi 4 janvier 2005



Je vous salue tous cordialement. Je suis heureux de pouvoir accueillir les représentants d'un club si éminent, qui s'inscrit depuis maintenant cent ans dans le panorama de notre ville. Je sais qu'au cours de ce siècle, vous avez connu des années de splendeur, mais que les périodes difficiles n'ont également pas manqué. Je suis heureux d'apprendre que les dernières années ont apporté de nouveaux succès. Je souhaite qu'ils soient toujours plus nombreux. Que le "Cracovie" témoigne que le sport, en formant les caractères et en enseignant la noblesse dans la compétition et la solidarité dans l'effort, peut être une expression des plus hautes valeurs humaines et sociales.

Que Dieu vous bénisse!



À S.E. M. Raúl Roa Kourí, AMBASSADEUR DU CUBA PRÈS LE SAINT-SIÈGE

Samedi 8 janvier 2005




Monsieur l'Ambassadeur,

1. Je suis heureux de vous souhaiter la bienvenue à l'occasion de la présentation des Lettres qui vous accréditent comme Ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de la République de Cuba près le Saint-Siège. Je vous remercie de vos paroles courtoises, ainsi que des salutations de M. Fidel Castro Ruz, Président du Conseil d'Etat et du Gouvernement de la République, à qui je vous prie de présenter mes meilleurs voeux pour sa santé, ainsi que pour le bien-être intégral de la nation cubaine. Pour celle-ci, je demande à Dieu, par l'intercession de la Très Sainte Vierge vénérée dans votre pays sous le beau titre de Notre Dame de la Charité du Cobre, que se développent les sentiments d'authentique entente mutuelle et fraternelle, qui sont ceux qui permettent à la nation d'être réellement la maison et l'oeuvre de tous.

2. Dans le même temps, je vous dis également l'intérêt avec lequel je suis l'engagement des autorités cubaines pour maintenir et développer les objectifs atteints en accomplissant des efforts dans le domaine de l'assistance médicale, de l'instruction à ses divers niveaux et de la culture dans ses différentes expressions. Le Saint-Siège considère qu'en garantissant ces conditions d'existence humaine, l'on met en place plusieurs piliers de l'édifice de la paix, qui n'est pas seulement l'absence de guerre, mais aussi la capacité de jouir de la promotion humaine intégrale, dans le respect de la santé et de la croissance harmonieuse du corps et de l'esprit de tous les membres d'une société.

De même, le Saint-Siège désire vivement que l'on puisse surmonter au plus tôt les obstacles qui empêchent la libre communication et les échanges entre la nation cubaine et une partie de la Communauté internationale, en garantissant ainsi, à travers un dialogue respectueux et ouvert à tous, les conditions nécessaires pour un authentique développement.

3. Pour sa part, Cuba se distingue par un esprit de solidarité qui apparaît de façon évidente à travers l'envoi de personnel et d'aides matérielles pour répondre aux nécessités de base de diverses populations frappées par des catastrophes naturelles, des conflits ou des situations de pauvreté. La Doctrine sociale de l'Eglise s'est beaucoup développée ces dernières années, précisément pour éclairer les situations qui requièrent cette dimension solidaire, à partir de la justice et de la vérité. A cet égard, l'Eglise qui est à Cuba, à travers sa présence évangélisatrice et dans un esprit de service sincère et concret rendu au peuple cubain, s'efforce de mettre en évidence ce magistère social qui ne s'exprime pas seulement par la parole, mais également à travers ses engagements et ses réalisations concrètes. L'ensemble de valeurs et de propositions qui complètent la Doctrine, et l'action sociale de l'Eglise qui s'ensuit, font partie de sa mission évangélisatrice et, en conséquence, de son identité propre.

Pour que l'action de l'Eglise au sein du peuple cubain continue à être plus efficace en vue de la promotion du bien commun, il faut que, dans un cadre de liberté religieuse authentique (cf. Dignitatis humanae DH 13), elle puisse conserver et développer les liens de solidarité déjà existant, avec les autres Eglises soeurs, qui ne doivent pas hésiter à la soutenir avec générosité de toutes les façons possibles; en particulier en mettant à sa disposition des prêtres, des religieux et des religieuses, qui promeuvent l'oeuvre de l'Eglise catholique à Cuba, dont les membres font partie du peuple cubain, vivant unis, en communion et en harmonie avec le Siège apostolique.



4. En fait, dans toute société pluraliste, l'Eglise présente ses propositions et ses orientations qui peuvent déboucher sur des points de vue différents chez ceux qui partagent la même foi et ceux qui ne la professent pas. Les divergences dans ce sens ne doivent engendrer aucune forme de conflit social, mais au contraire favoriser un dialogue constructif et large.

A ce propos, il existe des thèmes au sujet desquels l'Eglise qui est à Cuba désire éclairer la réalité sociale, comme par exemple la vaste problématique suscitée par la promotion de la dignité humaine; la considération de la réalité familiale et l'éducation des nouvelles générations à une culture de la paix, de la vie et de l'espérance; la relation complexe entre l'économie et les valeurs de l'esprit; l'attention globale pour la personne humaine; des thèmes sur lesquels un dialogue avec tous les groupes qui forment le peuple cubain est nécessaire.

5. Monsieur l'Ambassadeur, au moment où vous entamez vos fonctions afin de remplir cette Mission diplomatique, je désire vous assurer de la disponibilité du Saint-Siège et de l'Eglise qui est à Cuba dans leur volonté de continuer à servir les hommes et les femmes qui vivent dans votre pays, ainsi que de surmonter chaque divergence, en empruntant un chemin de dialogue constructif. Je renouvelle mon salut aux Autorités cubaines, et j'invoque sur vous, sur votre famille et sur vos collaborateurs, ainsi que sur toute la nation cubaine, dont je me souviens toujours avec affection, l'aide de Dieu et l'abondance de ses Bénédictions.



AU 31 ESCADRON DE L’AÉRONAUTIQUE MILITAIRE

Samedi 8 janvier 2005

Chers membres du 31 Escadron de l'Aéronautique militaire italienne!

Je vous accueille avec joie et je vous salue avec affection! Je salue, en particulier, votre Commandant et je le remercie des paroles courtoises qu'il a bien voulu m'adresser en votre nom. Je forme volontiers, en retour, mes voeux les plus cordiaux pour la nouvelle année qui vient de commencer: qu'elle soit pour tous sereine et bénéfique!

En 2005, l'Eglise continuera à contempler de manière particulièrement intense le mystère de l'Eucharistie, "pain vivant descendu du ciel" (Jn 6,51) pour notre salut. Ce pain de vie éternel est le Christ, source de notre espérance, source d'amour de laquelle se déversent constamment sur le monde des dons de justice, de pardon et de paix. Très chers amis, nous faisons ainsi l'expérience de la richesse de ce mystère en participant notamment à la Messe dominicale, qui constitue pour le chrétien le centre et le sommet de la semaine!

Tel est le souhait que je forme, alors que j'invoque sur vous et sur vos familles la protection maternelle de la Vierge Marie. En cette circonstance, j'ai en outre particulièrement à coeur de vous renouveler l'expression de ma gratitude pour la coopération généreuse et singulière que vous offrez à mon ministère pastoral.

Avec ces sentiments, je donne de tout coeur à tous ma Bénédiction.



POUR LES VOEUX AU CORPS DIPLOMATIQUE

Lundi 10 janvier 2005

Excellences,
Mesdames et Messieurs,



1. La joie empreinte de la douce émotion propre au temps où l’Église revit le mystère de la naissance de l’Emmanuel et le mystère de son humble famille de Nazareth donne aujourd’hui la tonalité de ma rencontre avec vous, Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs et illustres membres du Corps diplomatique près le Saint-Siège, qui, dans cette rencontre, donnez, pour ainsi dire, une visibilité à la grande famille des Nations.

Notre rencontre empreinte de joie et attendue a été ouverte par les paroles aimables de voeux, d’estime et de partage de ma sollicitude universelle que vient de m’exprimer votre Doyen, Monsieur le Professeur Giovanni Galassi, Ambassadeur de Saint-Marin. Je lui en suis très reconnaissant et je forme en retour des souhaits de sérénité et de joie pour vous tous et pour vos chères familles, ainsi que des voeux de paix et de prospérité pour les pays que vous représentez.

Je salue notamment, en leur souhaitant une cordiale bienvenue et une bonne mission, les trente-sept ambassadeurs, accompagnés de leurs conjoints, qui, depuis le mois de janvier dernier, ont entamé leur mission près le Saint-Siège.



2. À dire vrai, ces sentiments de joie ont été ternis par la terrible catastrophe naturelle qui a frappé, le 26 décembre dernier, divers pays du sud-est asiatique, touchant aussi les côtes de l’Afrique orientale. Ce fléau a marqué très douloureusement la fin de l’année passée: une année marquée aussi par d’autres calamités naturelles, comme les cyclones qui ont dévasté l’Océan Indien et la mer des Antilles, comme les invasions de criquets qui ont ravagé de très vastes étendues de l’ouest de l’Afrique du Nord. D’autres tragédies ont encore endeuillé l’année 2004, comme les actes barbares de terrorisme qui ont ensanglanté l’Irak et d’autres États dans le monde, le tragique attentat de Madrid, le massacre terroriste de Beslan, les violences inhumaines infligées à la population du Darfour, les atrocités perpétrées dans la région des Grands Lacs en Afrique.

Notre coeur en est troublé et angoissé, et nous ne réussirions pas à nous libérer des tristes doutes sur les destinées de l’homme si, de la crèche de Bethléem, ne nous parvenait pas un message de vie et de forte espérance, message à la fois humain et divin: dans le Christ, qui naît frère de tout homme et qui se place à nos côtés, c’est Dieu lui-même qui nous adresse l’invitation à ne jamais nous décourager, mais à vaincre les difficultés, aussi grandes soient-elles, en renforçant et en faisant prévaloir sur toute autre considération les liens communs d’humanité.

3. Et de fait, vous représentez ici, Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs, presque la totalité des peuples de la terre, ouvrant à notre regard d’un seul coup d’oeil la grande scène de l’humanité, avec les graves problèmes qui l’agitent, mais aussi avec les espérances toujours vives qui l’animent. Par sa nature universelle, l’Église catholique prend toujours directement part, de manière active, aux grandes causes pour lesquelles l’homme d’aujourd’hui souffre et espère. Elle ne se sent étrangère à aucun peuple car, partout où se trouve un chrétien, un de ses membres, c’est tout le corps de l’Église qui s’en ressent. Bien plus, partout où il y a un homme, s’établit pour nous un lien de fraternité. Étant activement présent aux destinées de l’homme en tout lieu de la terre, le Saint-Siège sait aussi trouver en vous, Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs, des interlocuteurs hautement qualifiés, parce qu’il est proprement de la mission des diplomates de franchir les frontières et de rassembler les peuples et ceux qui les gouvernent dans une volonté de concorde agissante, dans le strict respect des compétences réciproques, mais aussi dans la recherche d’un bien commun plus élevé.

4. Dans mon message de cette année à l’occasion de la Journée mondiale de la Paix, j’ai voulu proposer à l’attention des fidèles catholiques et de tous les hommes de bonne volonté l’invitation faite par l’Apôtre Paul: «Ne te laisse pas vaincre par le mal, mais sois vainqueur du mal par le bien»: vince in bono malum (Rm 12,21). À la base de cette invitation se trouve une vérité profonde: dans les domaines moral et social, le mal revêt le visage de l’égoïsme et de la haine, qui ont un caractère négatif; seul l’amour, qui possède la force positive du don généreux et désintéressé, jusqu’au sacrifice de soi, peut vaincre le mal. Cela s’exprime tout particulièrement dans le mystère de la naissance du Christ: pour sauver la créature humaine de l’égoïsme du péché et de la mort qui en est le fruit, Dieu lui-même, dans le Christ, plénitude de vie, entre avec amour dans l’histoire de l’homme et élève ce dernier à la dimension d’une vie plus grande.

Ce message – sois vainqueur du mal par le bien –, je voudrais maintenant vous l’adresser, Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs, et par votre intermédiaire aux peuples bien-aimés que vous représentez, ainsi qu’à vos Gouvernements: ce message est aussi pertinent en ce qui concerne les relations internationales, et il peut aider chacun à répondre aux grands défis de l’humanité d’aujourd’hui. Je voudrais ici en indiquer quelques-uns parmi les plus importants.



5. Le premier défi est le défi de la vie. La vie est le premier don que Dieu nous a fait et la première richesse dont l’homme peut jouir. L’Église annonce «l’Évangile de la Vie». L’État a pour tâche primordiale la protection et la promotion de la vie humaine.

Au cours de ces dernières années, le défi de la vie va en s’amplifiant et se fait de plus en plus crucial. Et il en est venu à se centrer particulièrement sur le commencement de la vie humaine, au moment où l’homme est le plus faible et où il doit être le mieux protégé. Des conceptions opposées s’affrontent sur les questions de l’avortement, de la procréation médicalement assistée, de l’utilisation des cellules souches embryonnaires humaines à des fins scientifiques, du clonage. Soutenue par la raison et par la science, la position de l’Église est claire: l’embryon humain est un sujet identique à l’enfant qui va naître et à celui qui est né, issus de cet embryon. C’est pourquoi rien de ce qui en viole l’intégrité et la dignité ne peut être admissible sur le plan éthique. De même, une recherche scientifique qui réduit l’embryon à un objet de laboratoire n’est pas digne de l’homme. Certes, la recherche scientifique dans le domaine génétique doit être encouragée et promue, mais, comme toute autre activité humaine, elle ne peut jamais se passer des impératifs moraux; elle peut d’ailleurs se poursuivre dans le domaine des cellules souches adultes, avec des perspectives prometteuses de succès.

Dans le même temps, le défi de la vie se manifeste dans ce qui est précisément le sanctuaire de la vie: la famille. Elle est aujourd’hui souvent menacée par des facteurs sociaux et culturels qui, en faisant pression sur elle, en rendent la stabilité difficile; mais, dans certains pays, la famille est aussi menacée par une législation qui porte atteinte – parfois même directement – à sa structure naturelle, qui est et qui ne peut être qu’une union entre un homme et une femme, fondée sur le mariage. La famille est la source féconde de la vie, le présupposé primordial et imprescriptible du bonheur individuel des époux, de la formation des enfants et du bien-être social, et même de la prospérité matérielle de la nation; on ne peut donc admettre que la famille soit menacée par des lois dictées par une vision de l’homme restrictive et contre nature. Puisse prévaloir une conception juste, haute et pure de l’amour humain, qui trouve dans la famille son expression vraiment fondamentale et exemplaire ! Vince in bono malum.

6. Le deuxième défi est celui du pain. Rendue merveilleusement féconde par son Créateur, la terre possède des ressources abondantes et variées pour nourrir tous ses habitants, présents et à venir. Malgré cela, les données qui sont publiées sur la faim dans le monde sont dramatiques: des centaines de millions d’êtres humains souffrent gravement de malnutrition, et, chaque année, des millions d’enfants meurent à cause de la faim ou de ses conséquences.

En réalité, l’alarme a été lancée depuis longtemps déjà, et les grandes organisations internationales se sont données des objectifs exigeants, au moins pour parer au plus urgent. Des propositions d’actions concrètes ont été élaborées, comme celles qui furent présentées, le 20 septembre 2004, à la réunion de New York sur la faim et la pauvreté, à laquelle j’ai tenu à être représenté par le Cardinal Angelo Sodano, Secrétaire d’État, pour donner un signe de la grande attention que l’Église porte à cette situation dramatique. De nombreuses organisations non gouvernementales se sont aussi engagées généreusement pour mettre en place des secours. Mais cela ne suffit pas. Pour répondre à cette nécessité dont l’ampleur et l’urgence ne font que croître, une forte mobilisation morale de l’opinion publique et plus encore des responsables politiques s’impose, surtout dans les pays qui ont atteint un niveau de vie satisfaisant et prospère.

Je voudrais sur ce point rappeler un grand principe de l’Enseignement social de l’Église, que j’ai à nouveau souligné dans le message pour la Journée mondiale de la Paix de cette année et qui est aussi développé dans le Compendium de la Doctrine sociale de l’Église: le principe de la destination universelle des biens de la terre. C’est un principe qui ne justifie assurément pas des formes collectivistes de politique économique, mais qui doit motiver un engagement radical pour la justice et un effort de solidarité plus attentif et plus déterminé. Tel est le bien qui pourra vaincre le mal de la faim et de la pauvreté injuste. Vince in bono malum.

7. Il y a aussi le défi de la paix. Bien suprême qui conditionne l’obtention de tant d’autres biens essentiels, la paix est le rêve de toutes les générations. Mais combien de guerres et de conflits armés y a-t-il encore, que ce soit entre États, entre ethnies, entre peuples et groupes vivant sur un même territoire national ! D’une extrémité du globe à l’autre, ils font d’innombrables victimes innocentes et ils sont source de tant d’autres maux ! Spontanément, notre pensée se tourne vers différents pays du Moyen-Orient, de l’Afrique, de l’Asie, de l’Amérique latine, dans lesquels le recours aux armes et à la violence cause non seulement des dégâts matériels incalculables, mais alimente la haine et accroît les causes de la discorde, rendant toujours plus difficile la recherche et l’obtention de solutions capables de concilier les intérêts légitimes de toutes les parties concernées. À ces maux tragiques s’ajoute le phénomène cruel et inhumain du terrorisme, fléau qui a atteint une dimension planétaire inconnue des générations précédentes.

Contre de tels maux, comment relever le défi de la paix ? En tant que diplomates, Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs, vous êtes par profession – et certainement aussi par vocation personnelle – les hommes et les femmes de la paix. Vous savez de quels moyens dispose la société internationale pour garantir la paix ou pour la réinstaurer. Comme mes Prédécesseurs, je suis moi-même intervenu publiquement à de nombreuses reprises, en particulier par le Message annuel pour la Journée mondiale de la Paix, mais aussi par la diplomatie du Saint-Siège. Je continuerai à le faire, pour indiquer les chemins de la paix et pour inviter à les parcourir avec courage et patience: à la volonté de puissance on doit opposer la raison, à l’affrontement par la force la confrontation par le dialogue, aux armes pointées la main tendue: au mal le bien.

Nombreux sont les hommes qui agissent avec courage et persévérance en ce sens, et les signes encourageants ne manquent pas, démontrant comment peut être relevé le grand défi de la paix. Il en va ainsi en Afrique, où, malgré de graves rechutes dans des désaccords qui paraissaient résolus, s’accroît la volonté commune de travailler à trouver des solutions aux conflits et à les prévenir par une coopération plus intense entre les grandes organisations internationales et les instances continentales, comme l’Union africaine: évoquons par exemple, au mois de novembre dernier, la réunion du Conseil de sécurité des Nations unies à Nairobi, consacrée à l’urgence humanitaire au Darfour et à la situation en Somalie, ainsi que la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs. Il en va ainsi au Moyen-Orient, dans cette terre si chère à ceux qui croient au Dieu d’Abraham et si sacrée pour eux, où la cruelle confrontation des armes paraît s’apaiser et où semble s’ouvrir une issue politique vers le dialogue et la négociation. Et comme modèle, certes privilégié, d’une paix possible, on peut mettre en avant l’Europe: des nations qui furent de farouches adversaires, s’opposant dans des guerres meurtrières, se retrouvent aujourd’hui réunies dans l’Union européenne, qui, au cours de l’année passée, s’est proposée de devenir ultérieurement plus forte avec le Traité constitutionnel de Rome, tandis qu’elle reste disposée à accueillir d’autres États, prêts à accepter les exigences que leur adhésion comporte.

Mais pour faire advenir une paix véritable et durable sur notre planète ensanglantée, une force de paix qui ne recule devant aucune difficulté est nécessaire. C’est une force que l’homme ne peut de lui-même ni obtenir ni conserver: c’est un don de Dieu. Le Christ est venu justement pour l’offrir à l’homme, comme les anges l’ont chanté à la crèche de Bethléem: «Paix aux hommes, que Dieu aime» (Lc 2,14). Dieu aime l’homme; il veut pour lui la paix. Nous sommes invités à en être des instruments actifs, en faisant vaincre le mal par le bien. Vince in bono malum.



8. Je voudrais encore faire allusion à un autre défi: le défi de la liberté.Vous savez, Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs, combien ce thème m’est cher, précisément en raison de l’histoire même du peuple dont je viens; mais il vous est aussi certainement cher, à vous qui êtes à juste titre, par votre service diplomatique, jalousement attachés à la liberté des peuples que vous représentez et attentifs à la défendre. Elle est cependant avant tout un droit de l’individu. Comme le dit fort justement la Déclaration universelle des Droits de l’Homme dans son article 1, «tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits». Et l’article 3 déclare: «Tout individu a droit à la vie, à la liberté et à la sûreté de sa personne». Certes, la liberté des États est aussi sacrée car ils doivent être libres, et c’est avant tout afin de pouvoir s’acquitter de manière appropriée de leur devoir primordial de protéger, outre la vie, la liberté de leurs citoyens, dans toutes ses justes manifestations.

La liberté est un grand bien, parce que, sans elle, l’homme ne peut se réaliser d’une manière qui réponde à sa nature. La liberté est lumière: elle permet de choisir de manière responsable ses objectifs et le chemin pour les atteindre. Au plus intime de la liberté humaine se trouve le droit à la liberté religieuse, parce qu’elle touche à la relation la plus essentielle de l’homme: la relation avec Dieu. La liberté religieuse est aussi expressément garantie dans la Déclaration déjà citée (cf. art. 18). Elle a aussi fait l’objet, comme vous le savez tous, d’une déclaration solennelle du Concile oecuménique Vatican II qui s’ouvre par ces mots significatifs: «Dignitatis humanae».

La liberté de religion demeure dans de nombreux États un droit qui n’est pas suffisamment reconnu ou qui ne l’est pas de manière appropriée. Mais on ne peut pas supprimer l’aspiration à la liberté religieuse: elle se fera toujours vive et pressante, tant que l’homme vivra. C’est pour cela que je fais retentir aujourd’hui l’appel que l’Église a déjà maintes fois exprimé: «Il faut que partout sur terre la liberté religieuse soit garantie par une protection juridique efficace et que soient respectés le devoir et le droit suprêmes qu’ont les hommes de mener librement leur vie religieuse dans la société» (Déclaration sur la liberté religieuse Dignitatis humanae DH 15).

On ne doit pas craindre que la juste liberté religieuse limite les autres libertés ou nuise aux relations au sein de la société. Bien au contraire, grâce à la liberté religieuse, se développe et s’épanouit toute autre liberté: parce que la liberté est un bien indivisible, qui appartient en propre à la personne humaine et à sa dignité. On ne craindra pas non plus que la liberté religieuse, une fois reconnue à l’Église catholique, empiète sur le champ de la liberté politique et des compétences spécifiques de l’État: l’Église sait bien distinguer, comme il est de son devoir, ce qui est à César et ce qui est à Dieu (cf. Mt 22,21); elle coopère activement au bien commun de la société, parce qu’elle réprouve le mensonge et éduque à la vérité, condamne la haine et le mépris, et invite à la fraternité; elle promeut partout et toujours, comme cela est facile à reconnaître à partir de l’histoire, les oeuvres de charité, les sciences et les arts. Elle demande seulement la liberté, pour pouvoir offrir un service efficace de collaboration avec toutes les instances publiques et privées qui sont préoccupées par le bien de l’homme. La vraie liberté est toujours pour vaincre le mal par le bien. Vince in bono malum.



9. En cette année qui vient de débuter, je suis sûr, Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs, que dans l’accomplissement de vos hautes fonctions vous continuerez à demeurer aux côtés du Saint-Siège dans son engagement quotidien en vue de répondre, selon ses responsabilités spécifiques, aux défis précédemment évoqués, qui touchent l’humanité tout entière. Jésus Christ, dont nous venons de célébrer la naissance il y a quelques jours, a été annoncé par le prophète comme «Admirabilis Consiliarius, Princeps Pacis, Merveilleux-Conseiller, Prince-de-la-Paix» (Is 9,5). Puissent la lumière de sa Parole, son esprit de justice et de fraternité, et le don si nécessaire et tant désiré de sa paix, qu’il offre à tous, resplendir dans la vie de chacun d’entre vous, de vos familles bien-aimées, de toutes les personnes qui vous sont chères, de vos nobles pays et de l’humanité tout entière.



AUX PARTICIPANTS AU SYNODE INTERÉPARCHIAL DES ÉPARCHIES ITALO-ALBANAIS EN ITALIE

Mardi 11 janvier 2005




Votre Béatitude,
Vénérés frères dans l'épiscopat et le sacerdoce,
Très chers frères et soeurs!

1. Je vous accueille avec joie et je vous salue cordialement. Je salue tout d'abord le Préfet de la Congrégation pour les Eglises orientales et je le remercie des paroles courtoises qu'il m'a adressées au nom de toutes les personnes présentes. J'étends mon salut aux communautés que vous représentez ici, et à ceux qui prennent part à votre Synode, qui a pour thème: "Communion et annonce de l'Evangile".

Il s'agit d'un thème plus que jamais actuel pour vos deux éparchies et pour le monastère exarchique de Grottaferrata. Héritières d'un patrimoine spirituel commun, vos réalités ecclésiales sont appelées à témoigner de l'unité de la même foi dans divers contextes sociaux. Celles-ci collaborent d'un point de vue pastoral avec les communautés de tradition latine et renforcent toujours davantage leur identité, en tirant profit de leur tradition byzantine millénaire.

2. Pour encourager tout cela, votre Synode a placé l'accent sur des thèmes essentiels comme la catéchèse et la mystagogie, en vue d'une croissance spirituelle adaptée du Peuple de Dieu tout entier. Il a en outre déterminé les parcours théologiques et ascétiques pour la préparation du clergé et des membres des Instituts de vie consacrée. En outre, pour éviter une transformation inappropriée de l'identité spirituelle qui vous caractérise, votre intention est de garantir une solide formation, enracinée dans la tradition orientale et en mesure de répondre de manière efficace aux défis croissants de la sécularisation.

Le Saint-Siège, à travers la Congrégation pour les Eglises orientales, ne manquera pas d'offrir son soutien à cette action rénovatrice, alors que dans les textes du Concile Vatican II et dans le Code des Canons des Eglises orientales, il vous sera possible de trouver des références utiles pour soutenir ces efforts qui sont les vôtres.

3. Le rite byzantin des mirabilia Dei pour l'humanité et, à leur propos, les Anaphores de saint Jean Chrysostome et de saint Basile constituent des exemples sublimes. Les prières eucharistiques et la célébration des autres Sacrements, de même que tout le déroulement liturgique et le Culte divin accompagné de sa riche iconographie, constituent un puissant moyen de catéchèse pour le peuple chrétien.

Vous célébrez presque quotidiennement la Divine liturgie de saint Jean Chrysostome, qui en raison de son art oratoire et de sa connaissance des Ecritures Saintes, a été appelé "Bouche d'or". Ses paroles pénètrent également aujourd'hui dans l'oreille et dans le coeur de l'homme. C'est pourquoi vous les faites retentir, à juste titre, de manière compréhensible dans les langues de notre temps.

4. Je vous encourage également à poursuivre les contacts, grâce à la tradition liturgique commune, avec les Eglises orthodoxes souhaitant elles aussi rendre gloire à l'Unique Dieu et Sauveur. Que le Seigneur tout-puissant, qui lors du récent Noël a révélé sa tendresse divine à travers la lumineuse incarnation du Verbe, accorde à tous les croyants dans le Christ de vivre pleinement l'unité de la même foi. Je prie pour cela et je demande au Seigneur que votre Synode contribue à favoriser une annonce renouvelée de l'Evangile dans votre Communauté, ainsi qu'un vigoureux élan oecuménique.

Je confie ce souhait ardent à la Très Sainte Mère de Dieu, alors que je donne de grand coeur à vous tous ici présents, ainsi qu'à vos éparchies, une Bénédiction apostolique particulière.



À LA RÉGION DU LATIUM, DE LA MUNICIPALITÉ ET DE LA PROVINCE DE ROME

Jeudi 13 janvier 2005


Mesdames, Messieurs!

1. Je suis heureux de vous accueillir au début de la nouvelle année, pour le traditionnel échange de voeux, et j'adresse à chacun de vous mes salutations les plus cordiales.

Je salue avec respect le Président de la région du Latium, M. Francesco Storace, le Maire de Rome, M. Walter Veltroni, et le Président de la province de Rome, M. Enrico Gasbarra. Je les remercie de s'être fait les interprètes des sentiments communs des personnes présentes. Je salue aussi les Présidents et les membres des trois Assemblées conciliaires et leurs collaborateurs. Ma pensée s'adresse également à tous les habitants de la ville, de la province, de la région, auxquels je souhaite avec affection une année de sérénité, de croissance spirituelle et civile, et de paix.

2. En cette occasion, je voudrais renouveler tout d'abord l'expression de ma vive satisfaction concernant l'approbation des statuts de la région du Latium. En effet, en plus de souligner le rôle de Rome comme centre du catholicisme, ceux-ci reconnaissent explicitement le primat de la personne et la valeur fondamentale de la vie. Ils reconnaissent, en outre, les droits de la famille en tant que société naturelle fondée sur le mariage et se proposent de la soutenir dans l'accomplissement de sa fonction sociale, en faisant explicitement mention de l'Observatoire régional permanent sur les familles. Les statuts prévoient également que la Région garantisse le droit aux études et la liberté de choix en matière d'éducation.

3. La signature du Protocole d'accord entre le vicariat, la municipalité et la région en vue de réaliser de nouveaux complexes paroissiaux dans les banlieues de la ville constitue un motif supplémentaire de satisfaction. Cet accord, inspiré à juste titre par le principe de subsidiarité, simplifiera l'édification de nouvelles paroisses qui, en plus d'assurer une mission pastorale, jouent le rôle de centres d'intégration sociale et de revalorisation urbaine. A côté d'autres initiatives à caractère social, est également prévue la collaboration entre l'Eglise et les Institutions de la municipalité, de la province et de la région en vue de la promotion d'événements culturels mettant en valeur notre riche patrimoine artistique, historique et spirituel.

4. Parmi les problèmes qui méritent une attention particulière, je souhaite signaler en premier lieu celui du logement, en particulier pour les jeunes familles aux revenus modestes. Un effort conjoint de la part des Institutions est indispensable à cet égard, étant donné les conséquences sociales que le manque de logements adéquats entraîne en ce qui concerne la constitution de nouvelles familles et la possibilité de faire des enfants.

Les tristes phénomènes de la toxicomanie et, de façon plus générale, du malaise des jeunes, exigent eux aussi une attention et un engagement toujours vigilant pour préserver autant que possible l'avenir de la jeunesse.

Que dire ensuite de la circulation urbaine, qui d'année en année devient plus encombrée et difficile? Elle est la cause de difficultés importantes pour la vie quotidienne d'un grand nombre de personnes et de familles. Je souhaite vivement qu'avec la contribution de tous les services responsables, la question de la viabilité et des transports urbains puisse être affrontée de manière adéquate. L'ouverture de nouvelles artères de communication est, de ce point de vue, d'une utilité évidente.

5. Messieurs les représentants des Administrations régionale, provinciale, et municipale, je vous assure du soutien de ma prière, pour vous et votre travail quotidien. Avec ces sentiments, je vous donne la Bénédiction apostolique, que j'étends volontiers à vos familles et à tous ceux qui vivent et travaillent à Rome, dans sa province et dans tout le Latium.



Discours 2005